M. le président. « Art. 2. - Les objectifs de résultats mentionnés à l'article 1er sont déterminés, pour chaque zone urbaine sensible, en concordance avec les objectifs nationaux figurant à l'annexe 1 de la présente loi et tendant à réduire de façon significative les écarts constatés, en matière, notamment, d'emploi, de formation scolaire, d'accès au système de santé et de sécurité publique, entre les zones urbaines sensibles et l'ensemble du territoire national. »
La parole est à M. Paul Loridant, sur l'article.
M. Paul Loridant. Cet article 2 du présent projet de loi décline localement les objectifs nationaux de la politique de la ville définis à l'article 1er que nous venons de voter dans chacune des zones urbaines sensibles.
En la matière, si l'on peut s'accorder sur des données moyennes qu'il conviendrait d'atteindre, on ne peut aussi oublier que les zones urbaines sensibles connaissent des situations extrêmement différentes, notamment du point de vue de leur environnement économique immédiat ou des infrastructures de transport auxquelles elles peuvent être reliées, pour ne citer que ces exemples.
Le développement économique d'une bonne partie des zones urbaines sensibles de la région Ile-de-France ne passe-t-il pas, par exemple, par la prolongation de la ligne 1 du tramway RATP ou par le dédoublement de la ligne 13 ?
De la même manière, le maintien et le développement d'activités industrielles de haut niveau, le développement de pôles audiovisuels et de médias, le renforcement des moyens des universités parisiennes de banlieue sont parmi les outils dont peuvent disposer ces territoires pour se développer et répondre, entre autres, aux besoins de formation et d'emploi des habitants.
Et l'on peut multiplier les exemples.
Si les réseaux de bus et de métro de l'agglomération marseillaise ou toulousaine sont mis en cohérence avec le désenclavement, respectivement, des quartiers Nord ou du Mirail, on peut aussi dégager quelques pistes pour le développement de ces quartiers, le rattrapage de leurs handicaps et le plein épanouissement de leurs habitants.
La même observation vaut évidemment pour l'ensemble des zones urbaines situées à proximité de grandes entreprises, dont les stratégies d'emploi sont déterminantes et font effet sur bien des communes aux alentours.
Nous pensons ainsi aux communes du pays de Mantes, directement concernées par les choix de PSA ou de Renault, aux communes du pays de Montbéliard, dont la vie est étroitement dépendante du niveau de l'emploi chez Peugeot.
M. Louis Souvet. Merci !
M. Paul Loridant. On ne peut donc réellement décliner localement les objectifs de la politique de la ville sans avoir à l'esprit que ce qui peut lui donner une chance de réussite la dépasse parfois, mais interpelle directement sur le sens que l'on peut donner à l'action publique, dès qu'il s'agit de créer des équipements ou des infrastructures, dès qu'il s'agit de l'emploi et des politiques que l'on peut mener pour arriver à atteindre ces objectifs.
De plus, que l'on ne s'y trompe pas, toutes les actions tendant à mettre en oeuvre les diverses formules de la politique de l'emploi n'auront pas de sens tant que ces efforts seront ruinés par la mise en oeuvre de plans sociaux, de plans de restructuration ou de licenciements massifs.
Je pourrais citer l'exemple de l'usine de Lu à proximité d'Evry : alors qu'on crée une zone franche à Evry-Corbeil, on supprime des emplois sur le site de Lu à Evry. Et l'on pourrait citer d'autres exemples dans divers secteurs.
On ne peut en effet concevoir les zones urbaines sensibles comme des vases clos, destinés à une observation scientifique des effets d'une politique donnée, avec des objectifs circonscrits et mesurables.
Vouloir les détacher de la collectivité nationale, même sous la forme d'une discrimination dite positive, ne peut constituer la réponse unique aux problèmes qui nous sont posés.
Nous redisons donc, monsieur le ministre, que le développement économique doit tenir compte de l'environnement de ces zones sensibles et faire partie intégrante de la liaison entre la politique nationale et les politiques locales.
Telles sont les quelques observations que nous suggère l'article 2.
M. le président. L'amendement n° 322, présenté par Mmes Didier, Beaufils et Terrade, MM. Coquelle, Le Cam, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans cet article, après les mots : "d'emploi," insérer les mots : "de développement économique,". »
La parole est à M. Paul Loridant.
M. Paul Loridant. L'article 2 du projet de loi prévoit que les objectifs locaux de résultats sont fixés en concordance avec les objectifs nationaux. Cela me paraît une bonne chose.
L'article 2 évoque les écarts entre les zones urbaines sensibles et l'ensemble du territoire national, en matière d'emploi, de formation scolaire, d'accès au système de santé et de sécurité publique. Il n'évoque pas le développement économique.
Cet article conditionne pourtant la réalisation des objectifs en matière d'emploi notamment, mais aussi de pouvoir d'achat pour les habitants de ces quartiers. Il a des incidences importantes sur la possibilité pour sortir un quartier ou non des difficultés qui le font classer en zone urbaine sensible.
Créer plus de 160 000 emplois dans ces zones urbaines sensibles pour atteindre l'objectif de réduction d'un tiers du chômage ne se fera qu'avec une économie dynamique ; c'est là une évidence.
Le problème, c'est que la situation économique dans notre pays n'est pas nécessairement bonne ; nous le savons, aujourd'hui, la croissance régresse ou tout au moins se ralentit, et hélas ! les plans de licenciements se succèdent dans des proportions alarmantes.
En vingt ans, le paysage économique du pays s'est profondément modifié, du fait de la mobilité du capital, de l'extension, de la financiarisation de l'économie et de la stratégie d'un certain nombre de grands groupes industriels ou économiques et financiers.
C'est en raison de ces reculs économiques que beaucoup de quartiers se sont appauvris, fragilisés, de nombreux salariés ne trouvant plus d'emploi ni pour eux-mêmes, ni pour leurs enfants. C'est l'avenir de quartiers entiers qui a ainsi été hypothéqué.
Il est donc urgent de prendre des dispositions qui, au lieu de favoriser ou de laisser faire la récession, fassent entrer à nouveau notre pays dans une période de croissance, de développement économique, à l'inverse d'un certain nombre de mesures prises par le Gouvernement actuel.
De plus, la décentralisation qui vise à transférer aux régions la responsabilité du développement économique va sans doute créer des difficultés,...
M. Eric Doligé, rapporteur pour avis. Ce n'est pas fait !
M. Paul Loridant. ... dégager, là encore, l'Etat de ses responsabilités et hélas ! favoriser vraisemblablement la concurrence entre les territoires.
Ainsi, notre amendement vise à souligner l'idée que le développement économique, à ajouter aux conditions qui ont été fixées, est un facteur essentiel de lutte contre les inégalités dans ces quartiers.
C'est pourquoi nous vous invitons à voter cet amendement qui vient compléter les critères locaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. Ce n'est pas M. Loridant qui m'a convaincu avec sa longue diatribe. Le développement économique est cependant un point fort et essentiel du projet de loi qui nous est soumis. N'ayant pas attendu, notamment avec les zones franches urbaines, pour créer 40 000 ou 50 000 emplois dans les quartiers, nous allons poursuivre le développement économique.
C'est la raison pour laquelle, la commission donne, malgré tout, un avis favorable à cet amendement.
M. Yves Coquelle. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Ayant la même préoccupation que la commission, le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 322.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
M. le président. « Art. 3. - Il est créé, auprès du ministre chargé de la ville, un Observatoire national des zones urbaines sensibles. L'observatoire est chargé de mesurer l'évolution de la situation urbaine, sociale, économique et de développement durable dans chacune des zones urbaines sensibles, de suivre la mise en oeuvre des politiques publiques conduites en leur faveur, de mesurer les moyens exceptionnels mis en oeuvre et d'en évaluer les effets au regard des objectifs et des indicateurs de résultats mentionnés à l'annexe 1 de la présente loi. L'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics sont tenus de communiquer à cet observatoire les éléments nécessaires à l'accomplissement de sa mission, sous réserve de l'application des dispositions législatives imposant une obligation de secret. »
La parole est à Mme Odette Terrade, sur l'article.
Mme Odette Terrade. Cet article 3 du présent projet de loi appelle plusieurs observations, dont cette intervention se fera naturellement l'écho.
En effet, après avoir défini les objectifs nationaux et leur déclinaison locale dans les deux premiers articles de ce projet de loi, nous voici confrontés à la création d'un Observatoire national des zones urbaines sensibles.
Cet observatoire serait placé auprès du ministre de la ville, et viendrait donc, si l'on en croit l'actuelle architecture des missions et fonctions en ces matières, compléter le rôle de la délégation interministérielle de la ville, mais dans le sens d'une évaluation plus directe de la pertinence des politiques publiques.
On notera d'ailleurs que l'appréhension de certains caractères des politiques publiques est relativement succincte dans les termes de l'annexe. Nous pensons, en particulier, aux mesures relatives aux incitations fiscales pour l'implantation d'entreprises.
Par ailleurs, nous pensons que les missions de cet observatoire doivent dépasser la collecte d'informations et s'orienter vers une évaluation ciblée des engagements pris en utilisant non seulement des indicateurs quantitatifs, mais aussi des indicateurs qualitatifs à partir d'entretiens, notamment directifs, permettant aux habitants de ces quartiers d'être aussi des acteurs de cette évaluation, traités comme des citoyens à part entière.
Nous savons tous que la guérison du malade ne peut se faire sans lui. Les habitants des quartiers visés sont concernés au premier chef.
M. le président. L'amendement n° 74, présenté par Mme Olin, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase de cet article, remplacer les mots : "auprès du ministre chargé de la ville" par les mots : "au sein de la délégation interministérielle à la ville". »
La parole est à Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis.
Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement de précision.
Compte tenu de la multiplicité des indicateurs de résultats servant de base à l'évaluation de l'Observatoire et du nombre important de zones urbaines sensibles, il apparaît que les données nécessaires à une évaluation complète et rigoureuse sont considérables.
Leur exploitation nécessitera donc un travail important. C'est pourquoi il est indispensable que l'Observatoire soit une structure entièrement consacrée au suivi des données collectées en vue de l'élaboration d'une évaluation annuelle de haute qualité.
Aussi, il est judicieux de rattacher cet observatoire à la délégation interministérielle à la ville, la DIV, qui dispose du personnel et des compétences nécessaires pour mener à bien cette mission, et non seulement de le placer auprès du ministre chargé de la ville.
En outre, cette option éviterait la multiplication des structures chargées de la politique de la ville, qui nuit trop souvent à la lisibilité de celle-ci.
Le rattachement de l'Observatoire à la DIV permettrait, enfin, de développer le rôle d'expertise de cette dernière.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?...
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Madame la sénatrice, nous partageons votre souci de l'absolue nécessité de ne pas créer un outil supplémentaire. En outre, pour répondre à une question posée tout à l'heure, j'indique qu'il est hors de question de supprimer la DIV.
Par ailleurs, la DIV est effectivement un outil interministériel et, compte tenu de la nature des critères extrêmement diversifiés, indiscutablement la compétence revient en la matière à la DIV. Sur ce point, nous partageons votre avis.
En revanche, en ce qui concerne la responsabilité politique, vous savez qu'à l'article 5 un amendement de l'Assemblée nationale a prévu que le ministre de la ville présente devant chacune des assemblées, lors d'un débat annuel, les résultats des travaux de l'Observatoire et de la réduction des écarts par site.
Etant le responsable politique à l'égard des assemblées, je souhaite qu'il soit précisé que, bien évidemment, la DIV est l'outil technique et que la responsabilité politique à l'égard des parlementaires reste le ministre de la ville.
Je vous demande donc, madame Olin, de bien vouloir retirer votre amendement n° 74.
M. le président. L'amendement n° 74 est-il maintenu, madame le rapporteur pour avis ?
Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, compte tenu des explications tout à fait satisfaisantes que vous venez de nous donner, je retire l'amendement au nom de la commission des affaires sociales.
Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 74 est retiré.
L'amendement n° 31, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début de la deuxième phrase de cet article :
« Cet observatoire... »
La parole est à M. le rapporteur
M. Pierre André, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Dans la deuxième phrase de cet article, remplacer les mots : "de la situation urbaine, sociale, économique et de développement durable" par les mots : "des inégalités sociales et des écarts de développement". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre André, rapporteur. Par coordination avec l'article 1er, qui prévoit que les programmes d'action dans les zones urbaines sensibles visent à « réduire les inégalités sociales et les écarts de développement » entre les territoires, il est proposé que l'Observatoire national des ZUS soit chargé de suivre l'évolution de ceux-ci plutôt que de faire référence, comme le propose l'Assemblée nationale, à l'évolution de « la situation urbaine, sociale, économique et de développement durable dans chacune des zones urbaines sensibles. »
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Dans la deuxième phrase de cet article, remplacer le mot : "exceptionnels" par le mot : "spécifiques". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre André, rapporteur. Il paraît souhaitable que l'Observatoire mesure non seulement les moyens exceptionnels, mais aussi l'impact de tous les moyens mis en oeuvre pour améliorer la situation des zones urbaines sensibles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Dans la deuxième phrase de cet article, remplacer les mots : "au regard des objectifs et des indicateurs" par les mots : "eu égard aux objectifs et aux indicateurs". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre André, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 75, présenté par Mme Olin, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans la dernière phrase du texte proposé pour cet article, après les mots : "leurs établissements publics", insérer le mot : "respectifs". »
La parole est à Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis.
Mme Nelly Olin, rapporteur pour avis. Afin de permettre la mise en oeuvre d'une évaluation rigoureuse et efficace par l'Observatoire national des zones urbaines sensibles, il est nécessaire que l'ensemble des acteurs publics concernés transmettent à cet organisme toutes les données lui permettant de mener à bien sa mission.
Nous voudrions préciser que les établissements publics concernés par cet article sont ceux qui sont attachés non seulement aux collectivités locales, mais aussi à l'Etat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 75.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 33, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Dans la dernière phrase de cet article, remplacer les mots : "sont tenus de communiquer à cet observatoire" par les mots : "lui communiquent". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre André, rapporteur. Il s'agit d'un amendement purement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 169 rectifié, présenté par MM. Alduy et Poirier, est ainsi libellé :
« Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Cet Observatoire associe, aux côtés d'experts et de chercheurs, des représentants des collectivités territoriales, des associations du cadre de vie et des syndicats professionnels. »
La parole est à M. Jean-Paul Alduy.
M. Jean-Paul Alduy. J'ai bien compris que la DIV serait l'outil technique et que la responsabilité politique incomberait au ministre. Mais, entre la responsabilité politique et l'outil strictement technique, il faut bien une instance de pilotage. Si l'on veut que la mission de l'Observatoire ne se résume pas à une analyse technocratique des zones urbaines sensibles et de leur évolution, il nous semble nécessaire d'associer à cet organisme des experts, des associations, et de ne pas le limiter à un rôle administratif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. La commission, qui aimerait connaître l'avis du Gouvernement, s'en remet à la sagesse du Sénat, une sagesse négative.
Mon cher collègue, ce que vous proposez est fort intéressant, mais cela risque d'alourdir le dispositif. Un débat aura lieu devant chaque assemblée parlementaire ; est-il bien nécessaire de prévoir ici, en plus, des études sociologiques qui, à la limite, pourront être faites par d'autres, à d'autres moments et à la demande du ministre ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Le Gouvernement est perplexe. En effet, il faut éviter toute dénaturation technocratique des données. D'un autre côté, l'organisation, y compris la composition, relève du décret. Je vous propose donc de nous faire confiance. Nous aurons l'occasion d'en reparler et de faire évoluer le système au fur et à mesure.
M. le président. Monsieur Alduy, maintenez-vous l'amendement ?
M. Jean-Paul Alduy. Compte tenu de ces explications, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 169 rectifié est retiré.
L'amendement n° 323, présenté par Mmes Didier, Beaufils et Terrade, MM. Coquelle, Le Cam, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
« Cet Observatoire est composé d'équipes de chercheurs pluridisciplinaires, spécialisés dans l'analyse sociologique et économique.
« Il peut être sollicité par les collectivités locales ou leurs groupements, par les élus locaux et leurs associations nationale et départementales, par les parlementaires des deux assemblées pour toute étude relative à la mise en oeuvre de la politique de la ville.
« Sa composition et son budget de fonctionnement sont fixés par décret. »
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. L'article 3 crée un Observatoire national des zones urbaines sensibles.
Cependant, un tel observatoire, pour être efficace, doit favoriser la circulation de l'information et des analyses.
De cette façon, il sera en mesure de contribuer aux mécanismes démocratiques, sans quoi nous aurons donné une illusion de transparence et créé un de ces nombreux organismes qui alignent les chiffres et les données sans véritable analyse prospective.
Nous souhaitons que cet organisme nouveau joue un rôle véritablement actif, qu'il devienne, en quelque sorte, un observatoire « des engagements ».
Cela suppose qu'il soit composé de spécialistes qui connaissent bien la situation dans les quartiers concernés, ou qui soient en capacité de bien l'appréhender, afin d'en tirer des analyses et des conclusions utiles aux villes, utiles à toutes les institutions concernées, autrement dit, des spécialistes de l'analyse sociologique et économique.
Cela suppose aussi que l'ensemble de ces institutions concernées puissent faire appel à lui. Nous proposons qu'il puisse être sollicité par les collectivités locales ou leurs groupements, par les élus locaux eux-mêmes, ainsi que leurs associations nationales et départementales et les parlementaires. L'Observatoire doit être en mesure de répondre à toute demande d'étude relative à la mise en oeuvre de la politique de la ville.
Il doit, bien entendu, pour cela, disposer d'un budget de fonctionnement.
C'est l'objet des trois alinéas que nous vous proposons d'ajouter au début de l'article 3.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. Comme sur l'amendement n° 169 rectifié de M. Alduy, la commission émet un avis de « sagesse négative. »
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Je complèterai le propos de M. le rapporteur parce que cet amendement présente quelques différences avec celui de M. Alduy.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je le rappelle, le Conseil national des villes est complètement ouvert, et à disposition. Il existe par ailleurs l'Institut des villes, un lieu de débat entre les différents partenaires. Quant à la DIV, elle est évidemment à disposition des villes. Il ne me semble donc franchement pas raisonnable de créer un outil opérationnel de plus. A la limite, on pourrait débattre du renforcement du dispositif existant, du moins de la DIV. Mais je pense que, avant d'acquérir les compétences nécessaires pour répondre de manière pertinente, il y faudrait une demi-décennie ou une décennie. Donc, humainement, je comprends cet amendement, mais j'y suis défavorable pour cette raison-là.
M. le président. Madame Terrade, l'amendement n° 323 est-il maintenu ?
Mme Odette Terrade. Non, monsieur le président, nous faisons un geste ! (Sourires.) Compte tenu des informations que vous venez de nous communiquer et de vos explications, monsieur le ministre, je retire cet amendement, d'autant que nous n'avons pas plus que vous l'envie de surcharger le dispositif d'institutions nouvelles.
M. le président. L'amendement n° 323 est retiré.
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 192, présenté par MM. Poirier, Alduy et Schosteck, est ainsi libellé :
« Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale sur le territoire desquels sont situées une ou plusieurs zones présentant des caractéristiques économiques et sociales analogues aux zones urbaines sensibles peuvent adresser à l'Observatoire national des zones urbaines sensibles un rapport détaillé sur la situation de ce ou ces quartiers ainsi que sur leurs engagements en matière de politique de la ville.
« Sur la base des informations recueillies, l'Observatoire national des zones urbaines sensibles peut émettre une avis à destination du ministre chargé de la ville sur la pertinence d'une modification de la liste des zones urbaines sensibles ainsi que sur l'opportunité de la conclusion d'un contrat de ville entre l'Etat et la collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération intercommunale concerné. »
La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck.
M. Jean-Pierre Schosteck. Monsieur le ministre, comme je suppose que l'avis du Gouvernement sur mon amendement sera le même que celui qu'a reçu le précédent, que j'avais déposé avant l'article 1er, je retire celui-ci, et je vous renouvelle ma confiance pour faire le nécessaire !
M. le président. L'amendement n° 192 est retiré.
L'amendement n° 218, présenté par MM. Mano, Dauge et Raoul, Mme San Vicente, M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans les départements comprenant une ou plusieurs zones urbaines sensibles, le représentant de l'Etat établit chaque année, en vue de préparer le débat mentionné à l'article 4, un rapport relatif aux actions menées dans ces zones, les moyens qui y sont affectés et l'évolution des indicateurs mesurant la réduction des inégalités.
« Ce rapport est transmis à la région, au département, aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale concernés, ainsi qu'au conseil départemental de l'habitat. »
La parole est à M. Jean-Yves Mano.
M. Jean-Yves Mano. Il est prévu dans le texte que l'ensemble des assemblées délibérantes locales doivent débattre régulièrement du bilan annuel, ce qui implique que les informations nécessaires soient portées à leur connaissance. Je remarque, d'ailleurs, que le conseil départemental de l'habitat, par exemple, n'a pas été prévu ! Au-delà des instances politiques, il existe aujourd'hui dans ce pays un certain nombre d'instances de réflexion et d'orientation sur la politique de l'habitat, notamment le conseil départemental de l'habitat, qui devrait figurer sur la liste.
Notre amendement a simplement pour objet de préciser que le préfet transmet l'ensemble des informations. En cela, d'ailleurs, nous ne faisons que nous inspirer d'un article qui figurait dans l'avant-projet de loi et qui a disparu, peut-être par erreur.
Il serait judicieux et utile de prévoir que le préfet transmet la totalité des informations en sa possession pour permettre un débat constructif au sein des instances appelées à débattre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre André, rapporteur. L'avis est défavorable, car cet amendement est satisfait par l'amendement n° 34. Je pense qu'il suffit au Gouvernement, notamment au ministre de l'intérieur, de donner les instructions aux préfets pour qu'ils transmettent les rapports à tous les organismes qui peuvent être concernés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Sur le fond, l'avis est plutôt favorable. S'agissant de l'avant-projet, c'est le Conseil d'Etat qui a estimé qu'il était de la responsabilité du ministre de donner les instructions aux préfets. Sinon, soyez assuré, monsieur le sénateur, que c'est bien la méthodologie adoptée. Le Conseil d'Etat a retiré cette disposition de l'avant-projet de loi, tout simplement !
M. le président. Monsieur Mano, l'amendement n° 218 est-il maintenu ?
M. Jean-Yves Mano. Non, je le retire, monsieur le président, compte tenu de l'avis du Conseil d'Etat.
M. le président. L'amendement n° 218 est retiré.
M. le président. « Art. 4. - Le deuxième alinéa de l'article L. 1111-2 du code général des collectivités territoriales est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale sur le territoire desquels sont situées une ou plusieurs zones urbaines sensibles organisent chaque année au sein de leur assemblée délibérante un débat sur les actions qui sont menées dans ces zones, les moyens qui y sont affectés et l'évolution des indicateurs relatifs aux inégalités. Le débat est suivi d'une délibération sur leurs engagements en matière de politique de la ville. »
La parole est à M. Gérard Le Cam, sur l'article.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article 4 du présent projet de loi appelle plusieurs observations.
Le fait est que les collectivités locales sont particulièrement engagées dans la politique de la ville.
Si l'on en croit notamment le « jaune » budgétaire relatif aux politiques de développement social urbain, ce sont en effet 1 093,48 millions d'euros qui sont consacrés par les collectivités locales aux actions de développement social urbain et de politique de la ville.
On notera que ces sommes sont plus importantes que celles qui sont consacrées par l'Etat à la compensation des exonérations de cotisations sociales et fiscales dans les zones de redynamisation urbaine et les zones franches urbaines, qui s'élèvent à 513,16 millions d'euros, et plus de deux fois supérieures aux concours découlant de la mise en oeuvre du dispositif de solidarité urbaine, qui s'élèvent à 484,98 millions d'euros.
Dans les faits, il y a longtemps que les collectivités locales participent à la politique de la ville, d'autant que, si l'on est encore plus précis, on peut déduire rapidement que nombre des dépenses de personnel, d'action et d'intervention sociale ou encore de dépenses scolaires des collectivités locales sont directement conditionnées par la mise en oeuvre des politiques de développement social urbain.
Qu'est-ce qui, dans le compte administratif de villes comme La Courneuve, Garges-lès-Gonesse, Chanteloup-les-Vignes ou encore Roubaix, n'est pas en effet directement ou indirectement lié à la réponse aux difficultés sociales des habitants, dans le cadre des procédures contractualisées, comme en dehors de ces procédures ?
Que l'article 4 dispose de l'organisation d'un débat annuel au sein des assemblées délibérantes des collectivités locales pour savoir ce que devient l'argent public consacré à la politique de la ville paraît normal.
Pour autant, construire ce débat annuel autour de la seule évaluation déclinée par l'annexe ne nous semble pas suffisant. Il importe, en effet, d'avoir une approche critique plus globale et plus profonde encore.
Nous ne croyons pas à des collectivités locales dont les assemblées délibérantes se contenteraient de décliner la grille de lecture des problèmes posés par la politique de la ville, telle qu'elle ressort, pour l'heure, de ce que nous avons vu du projet de loi.
En même temps, se pose également la question des moyens que les collectivités seront en mesure d'affecter à la poursuite des politiques mises en oeuvre, ce dont nous reparlerons évidemment lors de l'examen de l'article 33, mais qui, dès cet article 4, pose en grand la question du devenir de la péréquation, notamment de la dotation de solidarité urbaine et des différents dispositifs de solidarité existants.
Si cette loi est habitée de quelques idées ou principes généreux, la question de la DSU et des mécanismes de solidarité est directement posée et devra être, si l'ambition politique existe vraiment, examinée dès la discussion de la prochaine loi de finances.
Il nous faut sans doute améliorer encore l'indice synthétique de la DSU et probablement modifier l'économie générale de la dotation d'aménagement.
Par ailleurs, il faut espérer que l'Etat s'appliquera à lui-même cette disposition et dans les mêmes domaines. On peut toujours placer une famille dans un appartement rénové : si cette famille n'a que très peu de revenus avec un « reste à vivre » trop étroit, elle reproduira les mêmes comportements. Ce sont les conditions initiales qu'il importe de changer.
Ce sont là quelques observations et quelques pistes de réflexion que nous souhaitions produire à l'occasion de la discussion de cet article 4.
M. le président. L'amendement n° 34, présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« I. - Rédiger comme suit le début du texte proposé par le second alinéa de cet article pour compléter le deuxième alinéa de l'article L. 1111-2 du code général des collectivités territoriales :
« Chaque année, à l'occasion du rapport du représentant de l'Etat ou lors du débat sur les orientations générales du budget prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 2312-1 du code général des collectivités territoriales, il est présenté un rapport aux assemblées délibérantes des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale compétents sur le territoire desquels sont situées une ou plusieurs zones urbaines sensibles sur les actions...
« II. - Supprimer la seconde phrase du même texte. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre André, rapporteur. Il s'agit, d'une part, de prévoir qu'à l'occasion du débat sur la politique de la ville les collectivités territoriales et les établissements publics compétents présenteront leurs orientations pour l'avenir et, d'autre part, par coordination, de supprimer l'obligation de prendre des engagements par délibération à ce sujet. Nous considérons qu'il est inutile de faire prendre aux communes, par voie unilatérale, des engagements sur des matières qui font d'ores et déjà l'objet de nombre d'engagements conventionnels, tels que les contrats de ville.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis favorable.
Notre but, dans tout cela, est vraiment d'engager le débat démocratique ; il ne s'agit sûrement pas d'inciter ou de sanctionner. Nous croyons en la vertu du débat : nous soutenons donc l'amendement de la commission.
M. le président. La parole est à M. Eric Doligé, pour explication de vote.
M. Eric Doligé. Je suis tout à fait favorable à l'amendement n° 34, mais, comme l'a dit tout à l'heure, M. le ministre, à la suite d'une interrogation de M. Mano, il relève de sa responsabilité, comme de celle des autres ministres, de donner instruction aux représentants de l'Etat de fournir toutes les informations. Il ne faudrait pas que les préfets se contentent de quelques éléments d'information succincts, et se croient quittes pour autant. Je souhaite, à cette occasion, rappeler que les représentants de l'Etat doivent communiquer toutes les informations dont ils disposent et répondre éventuellement aux questions qui peuvent leur être posées.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)