sommaire
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
2. Conseil européen des 23 et 24 mars 2006. - Débat sur une déclaration du Gouvernement
MM. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères ; Hubert Haenel, président de la Délégation pour l'Union européenne ; Robert Bret, Pierre Fauchon, Simon Sutour, Jean-Paul Émorine, Aymeri de Montesquiou, Bruno Retailleau.
Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes.
Clôture du débat.
Suspension et reprise de la séance
présidence de M. Roland du Luart
3. Organismes génétiquement modifiés. - Suite de la discussion d'un projet de loi
Amendement no 11 de la commission. - MM. Jean Bizet, rapporteur de la commission des affaires économiques ; François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.
Amendements nos 154 de M. Jean Desessard, 12 de la commission ; amendements identiques nos 84 de M. Jean-Marc Pastor et 116 de M. Gérard Le Cam. - Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le rapporteur, Jean-Marc Pastor, Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre délégué, Daniel Raoul. - Rejet de l'amendement no 154 ; scrutin public sur l'amendement no 12 donnant lieu à pointage.
Suspension et reprise de la séance
Adoption, par scrutin public après pointage, de l'amendement no 12 ; rejet des amendements nos 84 et 116.
Adoption de l'article modifié.
MM. le ministre délégué, Jean-Marc Pastor, François Fortassin, le rapporteur.
Amendements nos 13 de la commission, 117, 118 de M. Gérard Le Cam, 102 de M. Jean-Marc Pastor et 156 de M. Jean Desessard. - MM. le rapporteur, Gérard Le Cam, Pierre-Yvon Trémel, Mme Alima Boumediene-Thiery, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement no 13, l'amendement no 117 devenant sans objet ; rejet des amendements nos 102, 156 et 118.
Amendement no 155 de M. Jean Desessard. - Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 14 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 15 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 85 rectifié de M. Jean-Marc Pastor. - MM. Pierre-Yvon Trémel, le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Amendements nos 119 de M. Gérard Le Cam, 104 de M. Jean-Marc Pastor, 16 de la commission et 157 de M. Jean Desessard. - MM. Gérard Le Cam, Pierre-Yvon Trémel, le rapporteur, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le ministre délégué, Daniel Raoul. - Rejet des amendements nos 119 et 104 ; adoption de l'amendement no 16, l'amendement no 157 devenant sans objet.
Amendement no 105 de M. Jean-Marc Pastor. - MM. Pierre-Yvon Trémel, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 120 de M. Gérard Le Cam. - MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 17 de la commission et sous-amendement no 103 de M. Jean-Marc Pastor. - MM. le rapporteur, Pierre-Yvon Trémel, le ministre délégué. - Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement.
Amendement no 158 de M. Jean Desessard. - Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 18 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Amendements nos 86 de M. Jean-Marc Pastor et 159 de M. Jean Desessard. - M. Pierre-Yvon Trémel, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Daniel Raoul. - Retrait de l'amendement no 86 ; rejet de l'amendement no 159.
Amendements nos 19 de la commission, 121 et 122 de M. Gérard Le Cam. - MM. le rapporteur, Gérard Le Cam, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement no 19, les amendements nos 121 et 122 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Amendements identiques nos 70 rectifié bis de Mme Françoise Férat et 161 de M. Jean Desessard. - M. Daniel Soulage, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait de l'amendement no 70 rectifié bis ; rejet de l'amendement no 161.
Amendements nos 20 rectifié de la commission et 123 de M. Gérard Le Cam ; amendements identiques nos 71 rectifié bis de Mme Françoise Férat et 162 de M. Jean Desessard. - MM. le rapporteur, Gérard Le Cam, Daniel Soulage, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le ministre délégué, Rémy Pointereau. - Retrait de l'amendement no 71 rectifié bis ; adoption de l'amendement no 20 rectifié, les autres amendements devenant sans objet.
Suspension et reprise de la séance
présidence de M. Adrien Gouteyron
5. Organismes génétiquement modifiés. - Suite de la discussion d'un projet de loi
Amendements identiques nos 88 de M. Jean-Marc Pastor et 164 de M. Jean Desessard. - M. Paul Raoult, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Jean Bizet, rapporteur de la commission des affaires économiques ; François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. - Rejet des deux amendements.
Amendements nos 72 rectifié bis de Mme Françoise Férat, 87 rectifié de M. Jean-Marc Pastor et 163 de M. Jean Desessard. - MM. Daniel Soulage, Paul Raoult, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Daniel Raoul, Jean-Marc Pastor, Michel Charasse, le président. - Scrutin public sur l'amendement no 72 rectifié bis donnant lieu à vérification.
Vote réservé sur l'article.
Amendements identiques nos 90 de M. Jean-Marc Pastor et 165 de M. Jean Desessard. - M. Paul Raoult, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait de l'amendement no 90 ; rejet de l'amendement no 165.
Amendement no 89 de M. Jean-Marc Pastor. - MM. Paul Raoult, le rapporteur, le ministre délégué, Daniel Raoul. - Rejet.
Adoption de l'article.
Amendement no 21 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 22 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.
Article additionnel avant l'article 11
Amendement no 91 rectifié de M. Jean-Marc Pastor. - MM. Daniel Raoul, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendements nos 124 de M. Gérard Le Cam, 166 de M. Jean Desessard et 52 rectifié bis de M. Gérard César. - M. Gérard Le Cam, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Gérard César, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet des amendements nos 124 et 166 ; adoption de l'amendement no 52 rectifié bis.
Adoption de l'article modifié.
Adoption, par scrutin public, de l'amendement no 72 rectifié bis, les amendements nos 87 rectifié et 163 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 11
Amendement no 167 de M. Jean Desessard. - Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
M. François Marc.
Amendements nos 168 de M. Jean Desessard, 125 de M. Gérard Le Cam, 23 rectifié de la commission et sous-amendements identiques nos 213 rectifié de M. Michel Charasse et 220 de M. Gérard César, et sous-amendement no 60 de M. Gérard César ; amendements nos 106 de M. Jean-Marc Pastor, 126, 128 de M. Gérard Le Cam et 61 de M. Gérard César ; amendements identiques nos 127 de M. Gérard Le Cam, 169 de M. Jean Desessard et 206 rectifié bis de M. Michel Mercier ; amendements nos 129 de M. Gérard Le Cam, 24 de la commission et sous-amendement no 107 de M. Jean-Marc Pastor ; amendement n° 54 rectifié de M. Gérard César. - Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, Michel Charasse, Rémy Pointereau, Daniel Raoul, Jean-Paul Amoudry, le ministre délégué, Gérard Delfau. - Rejet des amendements nos 168 et 125 ; retrait des sous-amendements nos 213 rectifié, 220 et 60 rectifié ; adoption de l'amendement no 23 rectifié, les amendements nos 106, 126, 128, 61, 127, 169, 206 rectifié bis et 129 devenant sans objet ; rejet du sous-amendement no 107 ; adoption de l'amendement no 24 ; retrait de l'amendement no 54 rectifié.
MM. Gérard Delfau, le ministre délégué.
Adoption de l'article modifié.
MM. Jean-Marc Pastor, Jacques Blanc, le rapporteur, Gérard Delfau.
Amendement no 170 de M. Jean Desessard ; amendements identiques nos 131 de M. Gérard Le Cam, 171 de M. Jean Desessard et 203 rectifié ter de M. Michel Mercier ; amendements nos 25, 26, 27 rectifié de la commission et sous-amendement no 221 de M. Gérard César ; amendements nos 130 de M. Gérard Le Cam et 28 de la commission. - Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Gérard Le Cam, Jean-Paul Amoudry, le rapporteur, Rémy Pointereau, le ministre délégué. - Rejet des amendements nos 170, 131, 171, 203 rectifié ter et 130 ; Retrait du sous-amendement no 221 ; adoption des amendements nos 25 à 27 rectifié et 28.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 172 de M. Jean Desessard, 132, 133 de M. Gérard Le Cam, 29 rectifié de la commission, 55 rectifié de M. Gérard César et 205 rectifié bis de M. Michel Mercier. - Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, Rémy Pointereau, Jean-Paul Amoudry, le ministre délégué. - Retrait des amendements nos 205 rectifié bis et 55 rectifié ; rejet des amendements nos 172, 132 et 133 ; adoption de l'amendement no 29 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
6. Dépôt de questions orales avec débat
7. Transmission d'un projet de loi organique
8. Transmission d'un projet de loi
10. Dépôt d'un rapport d'information
11. Ordre du jour
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Conseil européen des 23 et 24 mars 2006
Débat sur une déclaration du Gouvernement
M. le président. L'ordre du jour appelle la déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, préalable au Conseil européen des 23 et 24 mars 2006.
Avant de donner la parole au Gouvernement, je me félicite, avec vous tous, mes chers collègues, que, pour la troisième fois, un débat préalable au Conseil européen soit organisé dans notre assemblée, conformément à la volonté maintes fois exprimée par celle-ci.
Le Parlement peut ainsi débattre en amont des grands enjeux des Conseils européens.
Oui, depuis longtemps, nous demandions à être mieux associés aux processus de décision européens. Le principe d'un débat préalable à chaque Conseil européen est désormais acquis, et je m'en réjouis avec vous, mes chers collègues.
Je forme le voeu, en votre nom à tous, que cette pratique, systématique depuis 2005, soit désormais pérennisée, conformément à l'engagement pris devant nous par M. le Premier ministre.
Monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, vous êtes sur la bonne voie, continuez ! (Sourires.)
Vous avez la parole, monsieur le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, dès demain, avec Thierry Breton et Catherine Colonna, j'accompagnerai le Président de la République à Bruxelles pour participer au Conseil européen de printemps, consacré aux questions économiques et sociales.
Traditionnellement, en effet, le Conseil européen traite de ce que l'on appelle la « stratégie de Lisbonne » pour la croissance et l'emploi. Si l'objectif de cette stratégie est essentiel, si la méthode de coordination qu'elle a créée entre les États membres a eu de nombreux résultats positifs, il faut le reconnaître, les citoyens européens ont encore souvent du mal à comprendre concrètement ce que l'Europe fait pour la croissance et l'emploi. Nous devons donc agir pour que la stratégie de Lisbonne devienne moins abstraite et qu'elle soit aussi mieux comprise.
Un premier progrès pour la lisibilité de cette stratégie a été l'élaboration, par chaque État membre, d'un « programme national de réforme » : il permet à chacun de s'engager en faveur de la croissance et de l'emploi, tout en préservant ses spécificités nationales.
La France a élaboré son programme national à l'automne dernier, en portant l'accent, en particulier, sur les nouveaux pôles de compétitivité, sur l'Agence nationale de la recherche et l'Agence de l'innovation industrielle. Ce sont là trois initiatives nationales ambitieuses qui ont, chacune, des implications européennes évidentes. Elles témoignent de la volonté de la France d'être en phase avec l'évolution de notre continent et de peser sur les formidables transformations économiques que nous observons.
Mais, au-delà, d'autres progrès sont nécessaires et ce Conseil européen est l'occasion de faire un pas majeur dans la bonne direction. Nous savons que, dans de très nombreux secteurs, l'Europe est en mesure d'apporter une plus-value évidente à l'économie de notre pays. C'est ce que nous devons, aujourd'hui, beaucoup mieux démontrer, en aboutissant, à la fin de cette semaine, à de nouveaux progrès concrets et visibles.
Je distinguerai en particulier quatre domaines : l'énergie, la recherche, le soutien à l'industrie et la mobilité des étudiants.
S'agissant de l'énergie, renforcer la sécurité de l'approvisionnement est devenu pour l'Europe un impératif prioritaire. La crise gazière du mois de janvier entre la Russie et l'Ukraine a montré toute l'importance et l'urgence de ce sujet.
Que peut faire l'Europe dans le domaine énergétique ?
D'abord, et c'est un premier point, l'Europe peut aider les États membres à identifier les capacités de production et de transport énergétiques qui, d'évidence, doivent être construites.
Nous devons ensuite développer une politique externe, une politique énergétique européenne, avec une attention particulière pour la Russie, le Caucase, l'Asie centrale et l'Afrique du Nord. L'Europe peut aider nos entreprises à mieux exploiter et acheminer les ressources en énergie des zones voisines de l'Union européenne, à mieux identifier les moyens concrets d'y parvenir.
Enfin, il importe de s'assurer que la politique énergétique européenne est respectueuse de l'environnement, ce qui implique le développement des sources d'énergie alternative et, très probablement, une réflexion sur la place de l'énergie nucléaire dans cette politique.
La France souhaite que des objectifs précis et un programme d'action soient adoptés par le Conseil européen en faveur de ces priorités énergétiques. C'est là un point majeur si nous voulons affirmer une volonté politique commune en matière de stratégie énergétique européenne.
Avec l'énergie, la recherche constitue le deuxième secteur où nous voulons agir. Nous poursuivons, dans ce domaine, deux objectifs.
Le premier, c'est le lancement d'un institut européen de technologie, afin de mettre en réseau les compétences européennes en matière de recherche et, ne l'oublions pas, d'enseignement. J'ai très tôt exprimé mon appui à ce projet, qui contribuera au développement de l'excellence et de l'innovation en Europe.
Nous voulons aussi soutenir l'effort européen de financement de la recherche, notamment par la mise en oeuvre d'une initiative du Président de la République visant à inciter la Banque européenne d'investissement à consacrer quelque 10 milliards d'euros à la recherche. Cette initiative devrait induire près de 30 milliards d'euros de ressources supplémentaires destinées aux entreprises européennes et, en particulier, aux petites et aux moyennes entreprises.
Investir dans la recherche, c'est bâtir aujourd'hui l'activité et la croissance de demain. C'est pourquoi, là encore, la France travaillera pour que le Conseil européen adopte des décisions concrètes. Ces décisions viendraient compléter l'effort déjà prévu dans les perspectives financières pour la période 2007-2013, avec près de 50 milliards d'euros consacrés, sur cette période, au programme-cadre de recherche.
Au-delà du secteur de la recherche, nous devons aussi apporter une réponse concrète à l'inquiétude de l'opinion sur la question majeure des délocalisations. Pour gagner la confiance des citoyens dans la durée, il importe de favoriser l'innovation, mais aussi d'accompagner les reclassements économiques des secteurs les plus fragilisés.
C'est pourquoi, dans le cadre des perspectives financières pour la période 2007-2013, l'Europe mettra en oeuvre un fonds pour venir en aide aux États membres confrontés aux conséquences des délocalisations. Le prochain Conseil approuvera la création de ce fonds, dont la France a demandé la mise en place. Nous nous félicitons que, dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, l'Europe se donne ainsi les moyens concrets, visibles, de soutenir les salariés victimes des délocalisations.
Enfin, nous souhaitons que l'Union fasse un effort supplémentaire en faveur de la mobilité étudiante ; je pense notamment aux bourses Erasmus et Leonardo.
Favoriser la mobilité des étudiants et la mobilité des jeunes travailleurs européens fait partie intégrante d'une stratégie globale de soutien à l'emploi. C'est aussi une vraie opportunité de renforcer le sentiment d'appartenance à l'Europe et la conscience européenne, sans lesquels il ne saurait y avoir de projet politique solide et durable.
Nous comptons fermement sur cette décision du Conseil européen, dont nous savons qu'elle apporterait une contribution importante à la formation des jeunes et à leur insertion sur le marché du travail européen.
Un autre sujet majeur sera débattu durant ce Conseil, je veux parler de la directive sur les services.
Les choses sont claires désormais : depuis le vote du Parlement européen du 16 février dernier, nous disposons d'un socle solide pour établir une directive sur les services qui soit compatible avec les exigences du modèle social européen.
Il est donc nécessaire de s'en tenir au compromis du Parlement européen, qui remet totalement en cause les propositions Bolkestein, avec le rétablissement des nombreuses dérogations pour les services publics, l'abandon du principe du pays d'origine, des garanties pour les consommateurs ou encore le respect du droit du travail de chacun des États membres.
Il revient à présent à la Commission européenne d'en prendre acte pour décider de la nouvelle proposition qu'elle transmettra bientôt au Conseil. Toute autre démarche ne pourrait que rouvrir des débats stériles et voués à l'échec.
À chacun de faire preuve, dans le cadre de la directive sur les services, d'esprit de responsabilité : le moment est venu de trouver un accord sur cette directive et de mettre fin, par la même occasion, à une trop longue polémique.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, si nous voulons que les Français retrouvent confiance dans l'Union européenne, il faut aussi que l'Europe se montre confiante dans sa capacité à construire un dessein et à approfondir son projet.
Cela passe aujourd'hui par des initiatives concrètes, porteuses de résultats clairement identifiables, « palpables », par les citoyens. D'où notre volonté, cette année, de mettre l'accent en particulier sur l'énergie et la recherche, qui seront les termes dominants des débats des chefs d'État et de gouvernement à Bruxelles.
Mais, pour que les Français retrouvent confiance, il faut également que l'Union devienne un projet partagé et compréhensible, que la direction choisie par l'Union soit claire, et que les citoyens se sentent plus proches et mieux associés à la prise de décision.
Le défi auquel l'Europe doit répondre dans les mois à venir est un défi pédagogique, mais c'est aussi un défi démocratique.
Relever ce défi exige, naturellement, de poursuivre notre réflexion sur l'avenir des institutions, mais également sur la continuation, ou non, du processus d'élargissement.
À cet égard, une question fondamentale doit être posée : quelles sont les conditions qui permettront à l'Union européenne d'être en mesure d'absorber de nouveaux candidats ?
C'est là tout l'enjeu qui entoure le débat sur la notion de capacité d'absorption, dont la France a rappelé la pertinence à l'occasion des récentes discussions au sujet de la Turquie ou de la Macédoine.
À partir de là, nous devons aborder à vingt-cinq les différents aspects de ce sujet majeur pour l'avenir de l'Union.
Que signifie la poursuite de l'élargissement, en particulier en termes de réforme des politiques communes ou d'effort financier, pour un État comme la France et, au-delà, pour l'Union européenne ?
Comment s'assurer du soutien des opinions publiques dans la poursuite du processus d'élargissement ?
Cette question est d'autant plus importante en France que notre pays s'est doté de la disposition constitutionnelle prévoyant la procédure référendaire pour les traités d'adhésion qui pourraient suivre ceux qui concernent la Roumanie, la Bulgarie et la Croatie.
Enfin, comment faire fonctionner de manière efficace cette future Europe élargie si nous ne disposons pas des institutions adaptées à cette nouvelle réalité européenne ?
Ces questions fondamentales seront celles qui domineront lors du Conseil européen de juin. Cependant, mesdames, messieurs les sénateurs, la présidence autrichienne a souhaité que de premiers échanges informels aient lieu sur ce thème dès jeudi soir, à l'occasion d'une réunion des ministres des affaires étrangères à laquelle je participerai.
Nous commencerons donc dès jeudi - et c'est une bonne chose - à réfléchir aux enjeux de la poursuite de l'élargissement.
Ces premières réflexions nourriront et prépareront très utilement la discussion qui aura lieu ensuite en juin prochain entre les chefs d'État et de gouvernement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce Conseil européen de printemps, largement consacré à l'énergie et à la recherche, s'annonce comme une nouvelle étape sur le chemin de l'Europe des projets.
Le fait est qu'une Union de vingt-cinq États, rassemblant 450 millions d'habitants, dispose d'un potentiel considérable pour lancer de grands projets d'intérêt commun. ITER, GALILEO, sont autant d'exemples de ce que nous pouvons faire ensemble afin d'être au rendez-vous de l'avenir et de la modernité.
Or, nous le savons, ce potentiel immense n'est encore que très partiellement exploité.
Si elle en a la volonté, si elle en a le courage, l'Europe unie peut apporter une contribution essentielle au service de l'emploi, de la croissance, de la science, de la sécurité énergétique ou encore de l'environnement et de la santé.
Pour cela, l'Europe doit aussi se doter, sur son territoire, d'une base industrielle solide dans les secteurs stratégiques de l'économie de demain.
À cette fin, elle doit également mettre en place des entreprises d'une taille suffisante. C'est un impératif majeur si nous voulons affronter, avec les meilleurs atouts, une concurrence internationale de plus en plus vive dans le cadre de la mondialisation.
Que ce soit dans le secteur de l'énergie ou dans d'autres domaines encore, les Européens doivent effectivement disposer de « champions » capables de défendre nos positions,...
M. Serge Vinçon. Très bien !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. ... et d'abord l'emploi, comme cela se pratique dans d'autres régions du monde.
C'est cette ambition, ce volontarisme économique, que la France entend porter haut et loin avec ses partenaires.
Nulle idée de protectionnisme ne se cache derrière cette ambition. Au contraire, elle témoigne de la ferme volonté de promouvoir les intérêts de notre pays, et donc ceux de l'Europe tout entière, face à la compétition mondiale.
Au-delà, l'Europe pourra s'affirmer encore davantage comme un facteur de paix et de stabilité sur la scène internationale, dès lors qu'elle aura repris confiance en elle et qu'elle saura faire valoir son projet et sa vision dans le concert des nations.
C'est pourquoi, malgré les doutes, malgré les difficultés, il est clair que l'intérêt de la France réside plus que jamais dans une Europe forte et unie, une Europe audacieuse, mais aussi une Europe davantage à l'écoute des espoirs et des attentes de ses citoyens.
C'est cette Europe-là que nous souhaitons faire progresser cette semaine à Bruxelles, car nous voulons une Europe qui tienne sa place dans l'économie mondiale en retrouvant le chemin d'une croissance soutenue, une Europe qui soit à la pointe de la recherche et de l'innovation, une Europe capable de faire évoluer son modèle de développement afin de concilier les exigences de dynamisme économique et de justice sociale.
Le Conseil européen de jeudi et de vendredi prochains s'annonce donc comme un rendez-vous important pour l'Union européenne et son avenir. Nous en aurons encore beaucoup d'autres pour redonner toute sa cohérence et sa visibilité à notre projet européen, tant il est vrai qu'il s'agit là d'un travail de longue haleine auquel notre pays doit prendre toute sa part.
Dès demain, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, à Bruxelles, le Président de la République, Thierry Breton, Catherine Colonna et moi-même, entendons y veiller afin de donner un contenu exigeant, concret et visible à cette Europe des projets que nous appelons de nos voeux. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le président de la délégation pour l'Union européenne.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, après le président du Sénat, je me réjouis de constater que le « pli » a été pris d'organiser un débat public avant chaque Conseil européen.
Mme Hélène Luc. Dommage, tout de même, qu'il vienne si tard !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Cela permet au Gouvernement d'entendre les points de vue et les interrogations des porte-parole de tous les groupes, et cela nous fournit l'occasion d'un minimum de discussions sur le sujet.
Je n'arrive pas démuni aujourd'hui devant vous, car il se trouve que la délégation pour l'Union européenne a examiné tout récemment les deux grands thèmes qui sont à l'ordre du jour du prochain Conseil.
Notre collègue Jean Bizet nous a en effet présenté un rapport sur la relance de la stratégie de Lisbonne et notre collègue Aymeri de Montesquiou a présenté, quant à lui, un rapport sur la politique européenne de l'énergie.
J'ai ainsi la chance de pouvoir m'appuyer sur leurs travaux pour envisager un Conseil européen dont, au premier abord, l'ordre du jour pourrait avoir quelque chose de décourageant.
Que cinquante ans, ou presque, après le traité de Rome, nous en arrivions enfin à nous demander si une politique européenne de l'énergie ne serait pas nécessaire ne plaide pas en faveur de la capacité de l'Europe à anticiper sur les grands défis de notre temps !
M. Aymeri de Montesquiou. Eh oui !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Quant à la stratégie de Lisbonne, elle a fini par devenir une sorte de refrain que l'on entonne à chaque occasion ou un sujet académique qui ne vieillit jamais, et pour cause, puisqu'il est insusceptible de se rattacher à la moindre conséquence concrète dans l'esprit de nos concitoyens !
Il s'agissait, je le rappelle, de faire de l'Union « l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique au monde » à l'horizon de 2010, c'est-à-dire demain !
Mais le Conseil européen de mars 2005 a constaté, cinq ans donc après le lancement de la stratégie, non seulement que l'objectif ne serait pas atteint, mais de surcroît que l'Europe perdait des points dans la compétition mondiale.
Le Conseil européen a alors décidé de recentrer la stratégie de Lisbonne sur la croissance et sur l'emploi.
Depuis lors, les annonces claironnantes sur ce thème se sont multipliées : « Passer à la vitesse supérieure » comme l'affirmait le titre de la communication de la Commission européenne ; « Lancer un signal clair aux 17 millions de chômeurs en Europe », comme le déclarait le président du conseil Ecofin il y a quelques jours.
Pourtant, malgré ces annonces, nous nous trouvons en présence de textes peu lisibles, marqués surtout par la volonté d'aboutir à des compromis et ne comportant quasiment pas de mesures novatrices !
La résolution adoptée la semaine dernière par le Parlement européen - résolution qui comporte douze pages - en est un parfait exemple.
Englués dans le politiquement correct, nous ne pouvons évoquer un objectif sans en mentionner aussitôt trois ou quatre autres. Finalement, aucune direction claire n'apparaît.
Or - qu'on me pardonne d'énoncer cette évidence - adopter une stratégie, c'est faire des choix et prendre des risques.
M. Alain Vasselle. Eh oui !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Si nous voulons remettre sur pied la stratégie de Lisbonne, il nous faut isoler dans notre programme national de réforme un très petit nombre d'objectifs et mobiliser autour d'eux l'ensemble des parties prenantes, soit les forces vives du pays.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. Hubert Haenel., président de la délégation pour l'Union européenne. Pour que cette mobilisation soit possible, il faut aller beaucoup plus loin dans l'appropriation nationale de la stratégie de Lisbonne, en associant bien plus étroitement le Parlement, les partenaires sociaux et la société civile.
Afin que la stratégie de Lisbonne soit crédible, elle doit également prendre un caractère beaucoup plus opérationnel !
Certes, quelques progrès ont été faits dans ce sens, grâce à l'appel à la Banque européenne d'investissement pour mettre au point un mécanisme de financement de l'innovation, grâce à la création d'un institut européen de technologie ou grâce aux mesures annoncées pour favoriser le développement des PME.
Néanmoins, six ans après le lancement de la stratégie de Lisbonne, rien de tout cela ne s'est encore complètement concrétisé. Il n'est pas sûr que l'Europe puisse de nouveau se permettre de faire preuve d'autant de lenteur !
Pour résumer l'impression que donne aujourd'hui la stratégie de Lisbonne, je ne peux que rappeler la conclusion tirée par M. Jean Bizet, qui est pourtant un modéré : ...
M. Jean Bizet. C'est vrai !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. « En définitive, la nouvelle stratégie de Lisbonne, en renforçant la visibilité du dispositif au travers des lignes directrices intégrée, et en recentrant ses objectifs sur la croissance et l'emploi, constitue un élément de politique économique indispensable [..].
« Pour autant, l'outil reste embryonnaire. Malgré les efforts louables des institutions communautaires, le mélange des fonctions d'analyse et de décision contribue à brouiller le message de l'Europe auprès des acteurs économiques et des opinions. Les informations fournies par les États membres manquent de précisions. Le contenu du programme communautaire reste du domaine de l'incantation. »
Le second thème du Conseil européen - l'énergie - peut paraître plus novateur. Certes, l'énergie était au départ l'un des principaux domaines de la construction européenne. La première communauté européenne était celle du charbon et de l'acier - la CECA -, et la Communauté européenne de l'énergie atomique - Euratom - est contemporaine du traité de Rome.
Mais la CECA s'est éteinte en même temps que l'extraction charbonnière en Europe, tandis que l'énergie nucléaire ne s'est développée que dans certains États membres, et sur des bases essentiellement nationales. Il aura fallu attendre le malheureux traité constitutionnel pour que la politique commune de l'énergie soit inscrite dans les compétences européennes.
Ce traité ayant connu le sort que l'on sait, il restera difficile d'agir ensemble, alors que les Européens prennent de plus en plus conscience - vous venez de le dire, monsieur le ministre - que l'énergie est un sujet majeur, stratégique. On pourrait même écrire en majuscules : l'énergie constitue un véritable intérêt commun ! Pourtant, comme cela a été dit devant la délégation du Sénat pour l'Union européenne - notamment par M. de Montesquiou, qui reviendra sans doute sur ce point dans son intervention -, nous ne pouvons en rester aux seules mesures de libéralisation découlant des directives de 1996 et de 1998.
Comme le souligne le mémorandum français présenté en janvier dernier, nous avons besoin d'une politique européenne intégrée, assurant un équilibre entre les trois objectifs que sont la sécurité des approvisionnements, la prise en compte de l'environnent et la compétitivité. Le Livre vert présenté par la Commission en mars dernier va précisément dans ce sens.
Il est à espérer que le Conseil européen, comme c'est son rôle, donnera l'impulsion politique nécessaire afin que ces orientations se traduisent dans les faits.
En effet, c'est en avançant sur des sujets concrets, correspondant aux préoccupations des citoyens, que l'Union retrouvera leur confiance. L'énergie est assurément l'un de ces sujets. Montrons que la construction européenne est utile et efficace dans un tel domaine, et les citoyens recommenceront à voir tout l'intérêt de l'entreprise commune.
Nous devons toujours garder en point de mire la nécessité de réconcilier les citoyens avec l'Europe - c'est notre devoir -, sinon l'échec du 29 mai n'aura servi à rien.
M. Alain Vasselle. Nous avons du pain sur la planche !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. L'examen de la directive sur les services par le Parlement européen a montré la voie à suivre Il a prouvé que l'Europe élargie, l'Europe à vingt-cinq, est encore capable de dégager de bons compromis. Désormais, on s'achemine vers une directive équilibrée, écartant le risque d'une concurrence débridée entre systèmes sociaux.
Il est nécessaire que l'Europe - et d'abord le Conseil européen - sache également tenir, demain, le grand débat qui s'impose sur les élargissements futurs. C'est un autre domaine où les citoyens ont besoin d'y voir plus clair. Quelle que soit la réponse apportée, il en faut une ! Comment les citoyens pourraient-ils se retrouver dans une Europe sans identité, aux frontières insaisissables ?
Contre la tentation de la fuite en avant, c'est le devoir de tous ceux qui sont attachés à l'idéal européen que de chercher à réduire la fracture qui s'est révélée lors du référendum. J'espère malgré tout que le prochain Conseil européen saura nous aider dans cette tâche.
Le chacun pour soi qui prévaut actuellement, le patriotisme tous azimuts - pays anciens et nouveaux confondus - sont en train de détériorer la construction européenne. Nous sommes tous ensemble responsables de l'Europe, notre héritage, cette Europe sans laquelle nous n'avons pas d'avenir. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF ainsi que sur de nombreuses travées du groupe socialiste et du RDSE.)
M. le président. Dans la suite du débat, la parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Si je vous ai bien compris, monsieur le ministre, l'instauration de débats préalables aux Conseils européens dans les deux chambres du Parlement est la réponse du Gouvernement censée résorber le déficit démocratique qui caractérise la construction européenne, laquelle a été condamnée sans appel par le peuple français le 29 mai dernier.
Permettez-moi de douter qu'il s'agisse là d'une réponse adéquate. Le débat qui nous réunit aujourd'hui permet seulement à notre Haute Assemblée d'exprimer son opinion vingt-quatre heures avant le prochain Conseil européen !
Le Parlement français ne peut en aucun cas mandater les gouvernants en vue des négociations qui auront lieu à Bruxelles. L'avis que nous donnons dans le cadre de ce débat est purement informatif. Le Gouvernement auquel vous appartenez n'a aucun devoir de l'entendre et encore moins d'en tenir compte.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Oh !
M. Robert Bret. Mais si !
De la même manière que pour les résolutions votées dans le cadre de l'article 88-4, notre avis n'a aucune valeur contraignante. Il s'agit de simples prises de position sans pouvoir de contrainte. À la suite de l'adoption d'une résolution, le Gouvernement n'a d'autres obligations que celles qu'il veut bien se donner. Cela est inacceptable !
Par ailleurs, je déplore que l'ordre du jour définitif et précis du Conseil européen ne nous soit pas communiqué officiellement, dans des délais raisonnables, afin que nous puissions préparer convenablement ce débat. Cela témoigne du manque de considération accordé à l'avis des parlementaires nationaux dans le processus décisionnel communautaire.
Mme Hélène Luc. C'est vrai !
M. Robert Bret. Plus précisément, le Conseil européen de demain intervient à un moment important : l'Europe traverse une crise existentielle face à laquelle il faut réagir.
L'Union est aujourd'hui en panne. Les « non » français et néerlandais ont fait remonter à la surface toutes les contradictions latentes de la construction européenne. Les dirigeants européens, qui ont donné la compétitivité comme fondement à la stratégie de Lisbonne et qui prônent une « économie de marché ouverte où la concurrence est libre et non faussée », ont été désavoués par les peuples : il faut en tirer les conséquences.
La stratégie de Lisbonne, définie par le Conseil européen de mars 2000, devait faire de l'Union « l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde » d'ici à 2010.
À mi-parcours, tous les indicateurs constatent l'échec cinglant de cette stratégie. Monsieur le ministre, ce n'est pas un problème d'information ou de pédagogie, c'est une question de fond.
Lors du Conseil européen des 22 et 23 mars 2005, les dirigeants européens ont enfin pris acte de cet insuccès. Le rapport établi à l'automne 2004 par le groupe de haut niveau, présidé par l'ancien Premier ministre néerlandais Wim Kok, dresse en effet un tableau sans appel.
À l'époque, le président en exercice de l'Union, Jean-Claude Juncker, reconnaissait lui-même que le bilan de la stratégie de Lisbonne était « lamentable ». Josep Borrell, l'actuel président du Parlement européen, fait le même constat.
On le vérifie chaque jour un peu plus : l'Union européenne est frappée depuis 2000 par un ralentissement de la croissance, de l'économie et de l'emploi, par la montée des inégalités, par la fragilisation des droits sociaux et des services publics ainsi que par la persistance d'un niveau élevé de chômage, de pauvreté, d'exclusion sociale et de précarité de l'emploi. Ce sont autant d'éléments qui fragilisent nos sociétés et qui nous éloignent de l'avènement d'une prospérité accrue et partagée.
Face à cette situation désastreuse, la stratégie de Lisbonne a amplement démontré son incapacité à atteindre les objectifs affichés, à savoir un taux de croissance de 3 % du PIB par an en moyenne, un taux d'emploi qui devait atteindre à terme 70 % des actifs potentiel ou encore un taux de 3 % du PIB qui devait être consacré à la recherche.
Compte tenu de ce constat d'échec, les responsables européens ont initié une « relance » à mi-parcours. Malheureusement, les priorités de la relance de la stratégie de Lisbonne sont uniquement concentrées sur la « compétitivité économique », alors qu'il conviendrait, au contraire, de trouver un équilibre entre les politiques économique, sociale et environnementale.
Pour parvenir à cet équilibre, dans le sens des attentes des peuples, le budget de l'Union mériterait d'être accru dans un esprit de solidarité.
À cet égard, l'accord conclu lors du Conseil européen de décembre 2005 sur les perspectives financières pour la période 2007-2013, en particulier les réductions apportées à l'enveloppe des fonds structurels - de 0,41 % à 0,37 % du revenu national brut de l'Union - et des programmes consacrés au domaine social, à l'environnement, à la recherche, à la culture et à l'éducation, ne peut que susciter nos plus vives critiques. Nous estimons qu'un montant équivalent à 1,045 % du RNB de l'Union est très insuffisant.
Le montant du budget de l'Union devrait être à la mesure des ambitions affichées pour relever les défis sociaux, économiques et environnementaux de l'Union européenne. La construction européenne a besoin d'être réorientée conformément aux aspirations des peuples européens.
Les objectifs d'emploi, de justice sociale, de développement humain doivent se substituer aux obsessions libérales des dirigeants de l'Union, qui sont focalisés sur les aspects strictement économiques.
Aussi désapprouvons-nous les huit mesures clés inscrites par la Commission dans son « programme communautaire de Lisbonne » présenté en juillet dernier, lesquelles attestent que les appels d'insatisfaction adressés par les peuples européens n'ont pas été entendus.
En particulier, la priorité accordée à l'achèvement du marché intérieur des services et à l'adoption de la directive dite Bolkestein est inadmissible. Depuis plus de deux ans, la proposition de directive sur les services dans le marché intérieur suscite de très nombreuses oppositions. Le rejet du traité établissant une Constitution pour l'Europe s'inscrit en cohérence avec l'opposition à la directive sur la libéralisation des services.
L'Union européenne doit décider une nouvelle négociation sur ses institutions et sur les politiques économiques et sociales. Cette nouvelle discussion doit s'ouvrir aux exigences des peuples, qui doivent être associés et consultés.
En cohérence avec la volonté majoritaire exprimée par les Françaises et les Français le 29 mai dernier, nous réitérons notre demande à la Commission de retrait pur et simple de la directive Bolkestein.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. Robert Bret. Par ailleurs, nous regrettons que la majorité des « programmes nationaux de réforme » se concentrent sur le nombre d'emplois, c'est-à-dire sur le quantitatif, omettant d'en considérer la qualité.
En effet, l'élévation du taux d'emploi est considérée comme positive, quelles que soient les conditions de travail - bas salaires, durée du travail, pénibilité importante - et quels que soient les éléments de précarité associés aux emplois concernés - temps partiel contraint, intérim, etc. Les États membres se sont révélés incapables de comprendre que le développement de politiques communes solidaires à l'échelon européen pouvait apporter une valeur ajoutée qui profiterait à tous. Au contraire, ils ont opté pour la mise en concurrence des salariés et des peuples.
À présent, des mesures concrètes devraient être prises au plus vite en matière sociale afin de favoriser le développement d'une société axée sur la cohésion, ce qui suppose des mesures en faveur de la stabilité de l'emploi et du respect des droits des travailleurs.
Concernant la recherche et l'innovation, le constat est aussi alarmant. En 2004, l'Union européenne a consacré 1,9 % de son PIB à la recherche-développement.
L'investissement dans ce domaine est pourtant indispensable à la réussite de la politique de développement durable dans son ensemble et permettrait la création de richesses et d'emplois. Les investissements dans la recherche et le développement doivent être axés sur l'accroissement de la qualité de la vie et la promotion du développement durable.
Concernant la politique énergétique européenne, l'Union européenne prend place dans un monde où la demande énergétique s'accroît considérablement.
On estime que la consommation mondiale d'énergie devrait croître de près de 52 % à l'horizon de 2030 par rapport au niveau de 2003. Selon les prévisions de l'Agence internationale de l'énergie, l'Europe devra importer près de 70 % de ses besoins en énergie en 2030, contre 50 % actuellement.
Comme dans d'autres domaines, la Commission européenne a donné la priorité à la libéralisation du marché intérieur du gaz et de l'électricité. Cette libéralisation s'est faite par étapes depuis les directives de 1996 et 1998 et sera achevée au 1er juillet 2007.
Jusqu'à présent, la libéralisation du gaz et de l'électricité a surtout accéléré la concentration du secteur aux mains de quelques grands groupes et a favorisé le remplacement des monopoles publics par des monopoles privés.
Cette libéralisation se traduit également par des augmentations de prix et remet en cause le droit à l'énergie pour tous.
Dans ce sens, l'année 2006 débute en France par la fusion, annoncée le 7 février, de Gaz de France et de Suez, ainsi que par l'augmentation des tarifs de GDF, afin de satisfaire un retour sur investissement confortable pour les futurs actionnaires.
Le Parlement français vient également d'adopter un projet de loi dédouanant l'État de sa responsabilité en matière de sécurité nucléaire et ouvrant la porte à la privatisation du nucléaire civil. Pourtant, le nucléaire, dans l'état actuel des connaissances, est une réponse efficace au double défi de l'augmentation des besoins et du respect de l'environnement.
Le protocole de Kyoto, récemment entré en vigueur, impose de prendre des mesures pour la réduction de l'émission de gaz à effet de serre.
Cependant, il nous faut continuer à promouvoir la diversité énergétique et le développement des énergies renouvelables.
Le développement des énergies renouvelables impose des investissements importants en faveur de la recherche.
Ces questions doivent se situer au coeur de la stratégie de Lisbonne, et devraient figurer au premier rang des priorités du septième programme-cadre de recherche de la Communauté.
J'espère que les discussions du Conseil européen sur les questions énergétiques se traduiront par des mesures concrètes permettant de répondre aux besoins énergétiques croissants tout en assurant le respect de l'environnement.
Il convient en effet de tirer toutes les conséquences de la libéralisation : la sécurité énergétique est impossible sans la maîtrise publique de la production énergétique.
Celle-ci nécessite en effet d'avoir une vision à long terme, qui seule permet d'intégrer la charge des coûts externes majeurs que sont le traitement et la gestion des déchets - nous en parlerons dans quelques mois -, le démantèlement des installations et la prise en compte des risques, notamment nucléaires.
De plus, car il s'agit de biens publics, il est nécessaire d'instaurer une réelle transparence, une circulation effective des informations ainsi qu'un exercice concret de la citoyenneté.
Pour conclure, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, je constate qu'en dépit du contexte actuel, exceptionnel à bien des égards, aucune volonté de mettre en oeuvre une vraie politique de relance, qui irait dans le sens des aspirations des peuples européens, n'est perceptible.
Une fois encore, la question fondamentale d'une augmentation du budget européen est éludée. Pourtant, seul un budget digne de ce nom permettrait à l'Union de financer des politiques communes ambitieuses et solidaires, et de répondre aux attentes des peuples.
Mme Hélène Luc. Très bien ! (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Vasselle. Les applaudissements sur les travées du groupe CRC sont bien modestes !
M. Pierre Fauchon. Mais le coeur y est ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Fauchon.
M. Pierre Fauchon. La présence en nombre de mes collègues des groupes UC-UDF et UMP montre qu'eux seuls, ou presque, mesurent l'importance des enjeux du présent débat ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.- Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Au XIXe siècle, on disait de l'Empire ottoman qu'il était l'homme malade de l'Europe. Aujourd'hui, force est de constater que l'homme malade de l'Europe, c'est l'Europe elle-même !
Après les deux tentatives de suicide, à demi réussies, à demi manquées, qui ont marqué atrocement la première moitié du siècle dernier - je veux parler des deux guerres mondiales, en témoin de la seconde que je suis -, il a pu sembler que les Européens comprenaient que seule leur union permettrait de surmonter les handicaps de leur morcellement historique, pour consolider la paix, d'abord, développer leurs économies, ensuite, faire face au processus de mondialisation, enfin, de telle sorte que, face aux géants de la planète, l'Europe conserve sa liberté, sa prospérité, sa culture et, disons-le, sa civilisation.
On a fait pour cela tout ce qu'il était facile de faire, comme ouvrir les frontières aux produits, unifier les monnaies - ce que l'on avait déjà fait au XIXe siècle avec l'or ; je n'y étais pas, mais presque ! (Sourires.) -, réunir un parlement pour l'étouffer sous les travaux réglementaires, soutenir les agricultures plus souvent que les agriculteurs, et semer en toutes occasions des proclamations optimistes merveilleuses telles que le principe de la reconnaissance mutuelle ou encore les objectifs de Lisbonne, pour citer des exemples remarquables.
Cependant, dès qu'il s'agit de toucher à ce qui pourrait paraître heurter de front les prérogatives ou les intérêts nationaux, vrais ou supposés - politique étrangère, politique économique, libre circulation des services ou encore système judiciaire -, on atteint rapidement les limites de la volonté d'union, merveilleusement drapée dans le sacro-saint principe de subsidiarité dont on préfère ignorer qu'il postule, aussi et surtout, l'urgente nécessité de faire ensemble ce que l'on ne peut plus faire efficacement chacun de son côté.
Nous en sommes là !
Après la panne du processus constitutionnel et tant d'autres échecs plus ou moins voilés, l'adoption par le Conseil européen d'un budget statique, négation des ambitions formulées d'autre part dans les domaines de la recherche, des infrastructures et de l'énergie, vient en fournir la démonstration éclatante.
L'actualité parlementaire va nous donner très prochainement un autre exemple de la navrante incapacité des Européens à s'organiser avec un minimum d'efficacité. La proposition de loi relative au droit de préemption et à la protection des locataires en cas de vente d'un immeuble, dont le Sénat aura à connaître en deuxième lecture dans quelques jours, montre en effet que les plus-values foncières, considérables, que réalisent les groupes financiers qui opèrent dans ce domaine, ne sont pas imposables en France. Ces groupes ont en effet leur siège au Luxembourg. Il ne faut pas croire cependant que ces plus-values sont imposées dans le Grand-Duché. En effet, les biens concernés n'y sont pas implantés !
Telles sont les incohérences dont, apparemment, personne ne s'inquiète, alors même qu'elles sont connues depuis 2002. Le problème sera, nous dit-on, résolu dans les dix ans qui viennent... Il sera bien temps !
Encore ne s'agit-il que d'un exemple entre mille, mais qui me permet d'introduire quelques observations concernant le domaine économique, qui se trouve être plus spécialement à l'ordre du jour de ce sommet.
Or que voit-on, dans ce domaine ?
Dans son effort d'adaptation à la mondialisation, la France, comme d'ailleurs un certain nombre d'autres pays européens, préfère malheureusement jouer la carte du protectionnisme caché derrière le vocable politiquement correct du patriotisme économique.
Ces relents de nationalisme sont mauvais pour l'Europe, mauvais pour la France. Ils vont à l'encontre du principe de libre circulation des capitaux et des personnes, et de la liberté d'entreprendre.
Comment en effet justifier une telle intervention de l'État dans les processus de restructuration d'entreprises qui ne cherchent qu'à s'adapter aux réalités des marchés d'aujourd'hui, qui plus est à une échelle européenne ?
Permettez-moi, au passage, de préciser que le texte que je lis ici a été vu et amendé par M. le président de la commission des finances.
M. Robert Bret. Est-ce que le président Mercier l'a lu également ?
M. Pierre Fauchon. Dans la compétition mondiale, au-delà d'aspects strictement économiques, ce sont également des enjeux hautement stratégiques qui imposent la constitution de grands groupes européens, notamment dans le domaine de l'énergie, mais aussi dans ceux des transports et des infrastructures. Ainsi, avant toute initiative gouvernementale en la matière, une réflexion européenne globale devrait s'imposer.
Contrôle des offres publiques d'achat, indépendance énergétique, directive Bolkestein, restriction de circulation des travailleurs des nouveaux États membres dans l'Union européenne, telles sont aujourd'hui les formes du néoprotectionnisme français, gesticulatoire et illusoire, révélateur de l'incapacité des institutions européennes à faire avancer l'intégration européenne dans les domaines économiques.
Les marges de manoeuvre en matière de politique économique resteront ténues tant que l'harmonisation fiscale et sociale n'avancera pas en Europe et, surtout, tant que l'Europe ne se sera pas dotée d'un pouvoir institutionnel fort à même de définir une politique économique, budgétaire et industrielle permettant d'accompagner efficacement la politique monétaire de la Banque centrale européenne.
Nous ne sommes pas plus avancés, cher Hubert Haenel, dans le domaine du troisième pilier, dont je m'occupe plus fréquemment, celui de la lutte contre la criminalité transfrontalière, incluant, excusez du peu, le terrorisme et la traite des êtres humains, domaine qui devrait faire, plus facilement que tout autre, l'unanimité. Hélas ! les chancelleries, à la différence des parlementaires, ne s'entendent le plus souvent que pour multiplier les difficultés !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. C'est exact !
M. Pierre Fauchon. Alors, que faire ? Faut-il craindre, avec notre ami Maurice Blin, que l'Europe ne soit trop vieille pour retrouver la force de renaître ?
À cette tribune, c'est évidemment la voix de l'espoir qu'il faut faire entendre !
Ne nous figurons pas qu'il suffit toutefois d'inscrire à l'ordre du jour les grands problèmes. Il n'est que trop évident que rien de décisif ne peut être attendu de la configuration actuelle du système européen.
Tout esprit réaliste est donc inévitablement conduit à reposer le problème des institutions, et ce ne sont pas les fidèles du général de Gaulle qui se tromperont sur leur importance.
Une récente communication du Premier ministre belge, Guy Verhofstadt, nous y invite d'ailleurs hardiment. Rendons-lui hommage pour cette contribution courageuse.
C'est dans cette perspective que nous souhaitons vous présenter deux voies alternatives.
Exceptée l'hypothèse d'une adoption à court ou moyen terme du projet actuel de Constitution, ce qui semble fortement compromis dans la conjoncture actuelle, il ne faut pas hésiter à poser, dans toute son ampleur, la question d'une union opérationnelle entre les États conscients des enjeux et de l'urgence, et prêts en quelque sorte à entrer dans la voie des États-Unis d'Europe, comme nous y invite Guy Verhofstadt dans un ouvrage actuellement en cours de publication.
Autrement dit, il est grand temps de franchir le Rubicon des incertitudes et des routines afin de travailler sérieusement à la création d'une organisation vraiment fédérale. Une telle avancée n'irait évidemment pas sans poser un certain nombre de problèmes, en particulier quant à l'organisation des compétences respectives des pouvoirs législatif et exécutif. Disons-en deux mots.
La question du Parlement serait sans doute la plus facile à résoudre, sur la base d'une organisation bicamérale qui conserverait, d'une part, le Parlement actuel élu au suffrage universel direct et qui créerait, d'autre part, cette seconde assemblée que nous appelons de nos voeux depuis longtemps, une assemblée représentative des États, qui s'inspirerait donc davantage du Bundesrat allemand que des Sénats américains ou français.
La question de l'exécutif serait certes plus complexe, et je n'ai pas le temps ici d'explorer toutes les configurations possibles. Cependant, il est d'évidence qu'il conviendrait de faire pencher la balance en faveur de procédures intégratives et opérationnelles.
M. Pierre Fauchon. Cela passerait en premier lieu par l'élection au suffrage universel direct d'un Président de l'Union doté de pouvoirs effectifs, ainsi que par un gouvernement responsable qui procéderait d'une évolution de l'actuelle Commission.
Il resterait à supprimer le Conseil des ministres, ce qui est facile, et de le remplacer par la seconde chambre.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. C'est une solution radicale !
M. Pierre Fauchon. Il conviendrait en revanche de maintenir dans la plénitude de ses responsabilités le Conseil européen : ce dernier conserverait ses responsabilités d'orientation générale, qui demeurent essentielles, y compris dans le système auquel je pense.
Enfin, en ce qui concerne le troisième pouvoir, la justice, il s'agirait de conserver le système déjà en place et de le développer dans le sens d'un véritable espace judiciaire commun, qui supposerait bien évidemment une plus grande harmonisation des législations et la création d'un parquet européen, le tout placé sous le contrôle d'une formation spécifique de la Cour de justice des Communautés européennes.
Voilà donc une perspective institutionnelle pour les pays « fondateurs » qui seraient prêts à l'adopter, sans exclure bien entendu aucun de ceux qui voudraient s'y associer.
Le système européen actuel pourrait, naturellement, coexister à côté et au-delà de cette nouvelle Union. Il servirait de cadre à une mouvance européenne plus large géographiquement, ce qui permettrait ainsi de gérer le problème de l'élargissement d'une manière plus aisée.
Utopie, me direz-vous ? Peut-être ! Mais magnifique utopie, avouons-le, et seule à la hauteur des défis de l'Histoire !
Supposons cependant qu'une telle avancée se révèle impraticable, et entrons donc dans une autre voie, celle du réalisme.
Il faudrait alors avoir assez d'imagination pour voir les choses sous un tout autre angle, bien plus pragmatique, et prendre exemple sur la configuration institutionnelle de certains États tels que la Grande-Bretagne, dont je n'ai pas à rappeler les mérites.
Elle a en effet créé le régime parlementaire et l'Empire britannique ; elle a su tenir tête à Hitler ; elle connaît enfin aujourd'hui un renouveau spectaculaire, tout en réussissant à intégrer les différences de certaines régions qui la composent, comme le Pays de Galles ou l'Écosse, dont les personnalités sont bien différentes de celles de l'Angleterre. Et tout cela, mes chers collègues, sans Constitution ! Car, faut-il le rappeler, la Grande Bretagne n'a pas de Constitution.
Elle s'est construite par voie de chartes, de conventions interinstitutionnelles, d'usages, de pratiques, qui sont tout aussi respectés et efficaces que nos textes de loi.
Je pose donc la question : pourquoi l'Europe ne s'inspirerait-elle pas d'une telle méthode ? C'est la seconde voie à laquelle on pourrait penser.
Pourquoi des coopérations renforcées, telles que celles que le traité a prévues, ou qui prendraient d'autres formes, ce que le traité n'interdit pas, ne viendraient-elles pas, une à une et de manière pragmatique, répondre aux difficultés qui freinent actuellement le développement économique, social et culturel de l'Europe, pour créer une dynamique nouvelle qui ramènerait l'espoir et l'ambition dans notre camp, suscitant un mouvement d'entraînement auquel les plus réticents finiraient par s'associer ?
C'est une autre voie, c'est une autre espérance.
M. Pierre Fauchon. Telles sont donc les deux voies qui se présentent à tout esprit soucieux de sortir l'Europe de sa léthargie actuelle.
Mais qui, à ce stade, pourrait proposer de telles novations ?
On ne peut guère les attendre du Conseil européen, dont le vote du budget a montré l'impuissance, ni de la Commission, tétanisée par le harcèlement contestataire dont elle fait l'objet.
Il reste, et c'est essentiel, le Parlement européen. C'est vers lui que nous devons nous tourner, pour lui lancer un appel. Le Parlement présente l'immense avantage de posséder une légitimité propre incontestable.
Les deux grandes formations politiques qui le composent viennent d'ailleurs de fournir la preuve de leur capacité à s'unir pour sortir de la crise ouverte par la directive sur les services chère à M. Robert Bret.
M. le président. Mon cher collègue, il faut conclure.
M. Pierre Fauchon. Je conclus, monsieur le président. Mais votre horloge va trop vite. (Rires.) Serait-elle truquée ?
Pourquoi le Parlement européen n'assumerait-il pas les responsabilités historiques qui sont les siennes en se considérant saisi du devenir de l'Europe et en formulant des propositions concrètes dans une forme qui constituerait une véritable mise en demeure lancée aux Européens ?
Il faut savoir s'inspirer des grands événements de l'Histoire. Sans doute celle-ci a-t-elle connu l'impuissance du Parlement de Francfort, mais elle a également été témoin de la prodigieuse créativité des états généraux, qui, réunis en 1789 pour voter des impôts, ont décidé de faire la Révolution ! (Sourires.)
Telles sont, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, les réflexions et la contribution de mon groupe à l'occasion du sommet qui va se tenir.
La situation de l'Europe est trop grave pour que l'on se réfugie une fois de plus dans de faux-semblants et de simples déclarations d'intention.
Le groupe de l'UDF ose le dire ici, et je mesure mes propos : face à la dégradation actuelle du processus européen, les chefs d'État ou de gouvernement qui ne feront pas preuve d'une résolution et d'une capacité d'initiative à la hauteur des enjeux porteront devant l'Histoire la responsabilité de ce qui apparaîtra un jour comme le troisième suicide de l'Europe ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, il s'agit aujourd'hui du troisième débat institutionnalisé préalable à un Conseil européen.
Ces rendez-vous sont toujours positifs et utiles pour rapprocher le Parlement, et donc les Français, des questions européennes.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. Simon Sutour. Cependant, nous pouvons regretter qu'une telle discussion se déroule seulement à la veille d'un Conseil européen très important.
M. Alain Gournac. Avant, il n'y avait pas du tout de débat, alors ...
M. Simon Sutour. En outre, nous ne pouvons qu'émettre des doutes quant à la prise en compte par le Gouvernement du débat d'aujourd'hui.
En effet, les positions françaises sur les dossiers qui seront abordés demain à Bruxelles ont, semble-t-il, d'ores et déjà été définies. Ce Conseil européen est pourtant très important : sur de nombreux points, il sera même déterminant pour l'avenir de l'Europe, notre avenir commun.
Après une année 2005 chaotique pour la construction européenne, l'heure est venue de se mobiliser pour que l'esprit européen souffle de nouveau.
Or permettez-moi d'émettre quelques doutes quant à la volonté supposée ou réelle de certains gouvernements nationaux de faire de cette question une priorité.
À ce titre, la France, qui était autrefois un moteur de cette construction, semble tétanisée.
Les propositions de son gouvernement sont pour le moins floues et contradictoires. Et cela ne me fait pas sourire, madame la ministre déléguée !
M. Josselin de Rohan. Nous attendons M. Fabius !
M. Alain Gournac. Tout à fait !
M. Simon Sutour. Les questions qui seront abordées demain à Bruxelles sont pourtant déterminantes pour l'avenir de l'Europe et, au-delà, pour la vie quotidienne de nos concitoyens.
L'ordre du jour de ce Conseil comporte en effet un premier bilan de la stratégie de Lisbonne, une prise de position sur la proposition de la directive sur les services que le Parlement européen vient de modifier, une discussion sur les perspectives financières de l'Europe ou encore un débat sur l'avenir de la politique énergétique commune. Il s'agit, on le voit, d'enjeux majeurs.
Malheureusement, nous risquons un accord a minima - cela avait déjà été le cas lors du Conseil européen du mois de décembre dernier -, avec de grandes ambitions affichées et des moyens budgétaires de plus en plus faibles.
S'agissant des questions budgétaires, je voudrais attirer votre attention sur l'état des négociations relatives aux perspectives financières pour la période 2007-2013, afin de dénoncer une nouvelle fois l'insuffisance des montants proposés par le Conseil européen pour financer de façon décente et constructive les politiques de l'Union.
Le rapport intitulé Les perspectives d'évolution de la politique de cohésion après 2006, que mon collègue Yann Gaillard et moi-même avions rédigé en février 2004, visait déjà à vous informer et, surtout, à mettre en garde le Gouvernement sur les conséquences d'un budget européen trop faible pour, à la fois, relever le défi de l'élargissement et conserver, voire améliorer, les politiques européennes ; je pense notamment aux fonds structurels, dont nos territoires ont tant besoin.
Or force est de constater que le Gouvernement est resté sourd à ces justes recommandations non partisanes.
En effet, comment ne pas être déçu ? Comment peut-on raisonnablement se contenter d'un budget à seulement 1,045 % du RNB européen, ainsi que vous semblez vous en satisfaire, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée ?
Or la France est en partie responsable de cette situation. N'a-t-elle pas en effet signé, dès décembre 2003, une lettre réclamant une limitation du budget à 1 % du RNB des États membres ?
Pourtant, au même moment, M. Michel Barnier, alors commissaire européen chargé de ces questions, avait admis, à l'occasion d'une audition devant le Sénat, que, avec un budget inférieur à 1,14 % du RNB européen, il serait très difficile de bénéficier de fonds structurels à la hauteur d'une politique régionale digne de ce nom.
Pour sa part, la Commission européenne a conservé la même logique dans ses propositions sur les perspectives financières.
Le Parlement européen, dans sa résolution du 18 janvier 2006, n'a pas manqué de souligner un tel manque d'ambition pour l'Europe. Il a ainsi rejeté la proposition du Conseil européen, au motif que, dans sa forme actuelle, celle-ci ne garantissait pas « un budget communautaire renforçant la prospérité, la compétitivité, la solidarité, la cohésion et la sécurité dans l'avenir » et ne respectait pas « les engagements pris à l'égard des nouveaux États ».
Quel est aujourd'hui l'état d'avancement des négociations ? Trois trilogues, réunissant le Conseil européen, la Commission européenne et le Parlement européen, ont déjà eu lieu sans qu'un accord ait été obtenu.
Un autre trilogue est attendu. Les négociations continuent et nous pouvons encore tous agir pour que ce budget a minima soit remis à plat.
Pourquoi ? Parce que, par une obstination de certains gouvernements et du nôtre en particulier, nos régions et territoires vont être les premiers perdants du budget de l'Union européenne pour 2007-2013 ! Et je sais que ce sentiment est largement partagé sur toutes les travées de cet hémicycle !
En effet, l'enveloppe consacrée au nouvel objectif 2, l'objectif « Compétitivité régionale et emploi », est en baisse de 26 %. Ainsi, sur cette période, les régions métropolitaines devront se contenter de 9 milliards d'euros, contre 15 milliards d'euros sur la période 2000-2006 !
Il s'agit donc d'une enveloppe en baisse de 6 milliards d'euros ; c'est considérable ! De surcroît, le comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires du 6 mars dernier nous a permis de constater que le Gouvernement se servait des fonds européens aux seules fins de camoufler son désengagement. Je pense notamment aux contrats de plan ou à leur nouvelle mouture, les « contrats de projets ».
M. Bernard Frimat. Très bien !
M. Simon Sutour. J'insiste particulièrement sur ce point.
En effet, au Sénat, nous sommes particulièrement concernés par de telles questions. Nous mesurons tous l'extrême précarité des finances de nos collectivités locales, qui vont devoir se serrer encore davantage la ceinture.
D'autres questions seront abordées demain à Bruxelles. Nous avons une nouvelle illustration du manque d'ambition que j'évoquais : la négociation de la directive sur les services, dite directive Bolkestein, du nom de l'ancien commissaire européen qui en est à l'origine.
Au Parlement européen, après deux ans de travail, le texte initial de la Commission européenne a été modifié sous la conduite de notre collègue socialiste allemande, Mme Evelyne Gebhardt, rapporteur, dont je tiens à saluer le travail et la ténacité.
Grâce à un certain nombre d'amendements, les socialistes français et européens ont réussi à obtenir la suppression du principe du pays d'origine et l'exclusion des services d'intérêt général du champ de la directive. Je pense notamment aux services sociaux, comme la santé, l'aide sociale ou le logement social, et au droit du travail. En effet, comme vous le savez, c'est le droit du travail du pays d'accueil qui continuera de s'appliquer.
Mais cela n'est suffisant ni pour nous ni pour nos concitoyens.
Et, contrairement à ce que vous avez indiqué, madame la ministre déléguée, tous les services publics ne sont pas exclus du champ d'application de la directive. En effet, la gestion de l'eau, l'éducation, la culture, sauf le cinéma, les services postaux - si importants pour nos campagnes ! - et l'énergie y demeurent.
Il n'y a pour l'heure aucune avancée sur la voie d'une directive-cadre sur les services publics. Nous, socialistes, demandons que tous les services publics soient explicitement exclus du champ d'application de la proposition de directive relative aux services.
M. Bernard Frimat. Très bien !
M. Simon Sutour. À ce sujet, quelle est la position du Président de la République ? Quelle est celle du Gouvernement ? Et quelle est la position de nos collègues de la majorité parlementaire ? Est-elle en phase avec celle des élus de l'UMP au Parlement européen ?
M. Josselin de Rohan. Et quelle est la position du parti socialiste ?
M. Simon Sutour. Nous avons souvent l'impression d'un flou total et d'un double, d'un triple, voire d'un quintuple langage.
M. Josselin de Rohan. Et vos relations avec les sociaux-démocrates ?
M. Simon Sutour. C'est dommage pour l'influence de notre pays dans la sphère européenne.
Que dira demain la France à Bruxelles sur ce sujet ? Et sur la politique européenne de l'énergie ?
S'alignera-t-elle, comme l'y encourage la Commission européenne dans son Livre vert intitulé Une stratégie européenne pour une énergie sûre, compétitive et durable, sur les théories ultra-libérales de M. Barroso ? (M. Henri de Raincourt s'exclame.) Celui-ci souhaite en effet une dérégulation et une concurrence totales, seules à même, selon lui, d'assurer « aux citoyens et aux entreprises de l'Union européenne tous les bienfaits de la sécurité d'approvisionnement et de prix bas ».
Sécurité d'approvisionnement et prix bas, vivons-nous dans le même monde, dans la même Europe ?
En effet, l'actualité de ces derniers mois démontre l'absurdité d'une telle approche. Nombre de pays européens subissent de substantielles hausses de prix, des problèmes d'approvisionnement en gaz naturel, du fait de la dépendance vis-à-vis de la Russie, et, demain, des problèmes d'approvisionnement en électricité, avec un parc nucléaire vieillissant.
Et on nous parle de prix bas et de sécurité d'approvisionnement ? Non ! On devrait plutôt parler d'un niveau record de bénéfices pour GDF privatisé, qui, au lendemain de la publication de ses résultats, réclame pourtant une hausse considérable de ses tarifs et l'obtient du Gouvernement, ainsi que nous le voyons aujourd'hui même !
À l'opposé de cette vision libérale, nous souhaitons la mise en place d'une politique commune de l'énergie favorisant l'émergence de grands groupes européens de services publics adossés à un projet industriel, avec une finalité autre que la seule réalisation de profits exorbitants. Nous aurions ainsi les moyens de garantir des prix justes et une sécurité de l'approvisionnement.
Madame la ministre déléguée, je souhaite profiter de ce débat pour vous interroger sur une idée susceptible d'être abordée lors du Conseil européen : le remplacement du siège du Parlement européen par un institut européen de technologie. (M. le président de la délégation pour l'Union européenne manifeste son étonnement.)
Qu'en est-il ? Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet que vous avez évoqué dans votre discours, monsieur le ministre ?
Comme vous le savez, les sénateurs du groupe socialiste en général et notre collègue M. Roland Ries en particulier sont très attachés au maintien du siège du Parlement européen à Strasbourg.
M. Henri de Raincourt. Nous aussi !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Monsieur Sutour, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Simon Sutour. Je vous en prie, monsieur le président de la délégation.
M. le président. La parole est à M. le président de la délégation, avec l'autorisation de l'orateur.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. M. Roland Ries n'est pas le seul à être attaché à ce que le Parlement européen continue de siéger à Strasbourg. La plupart des collègues ici présents partagent, me semble-t-il, un tel souhait. (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)
M. Roland Ries. Merci !
M. René Garrec. Nous sommes pour Strasbourg !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Sutour.
M. Simon Sutour. Je posais simplement la question. Pour l'instant, je suis le seul à l'avoir posée et j'attends une réponse claire de la part du Gouvernement.
Mes chers collègues, en tant qu'Européen convaincu, j'aurais voulu être plus enthousiaste à la veille de ce Conseil européen.
J'ai limité mon intervention à trois thèmes : les perspectives financières, la directive relative aux services et l'énergie.
J'aurais également pu évoquer le premier bilan de la stratégie de Lisbonne, les coupes claires dans les crédits du programme Erasmus ou le fonds européen d'ajustement à la mondialisation, qui ne sera finalement doté, pénurie oblige, que de 500 millions d'euros par an.
L'Europe est en panne. Certes, il faut rester optimiste. Mais on ne peut que douter qu'une dynamique puisse s'enclencher quand l'un de ses piliers, la France, fait preuve d'autant d'incohérences et se trouve si absente de la scène européenne. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Emorine.
M. Jean-Paul Emorine. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, ce rendez-vous avec la représentation nationale, à la veille du Conseil européen traditionnellement consacré à la croissance et à l'emploi, retient toute notre attention.
Tout doit en effet être mis en oeuvre pour relancer la croissance et améliorer la compétitivité de l'Europe face aux défis de la mondialisation. Cela suppose que des efforts et des réformes courageuses soient réalisés au sein de chacun des États membres, d'où l'intérêt d'une vaste réflexion préalable.
Il est donc très souhaitable que, au cours de cette séance, soient débattues et enrichies les positions que défendra le Gouvernement français lors du Conseil européen des 23 et 24 mars.
Pour ma part, en tant qu'élu du groupe de l'UMP, mais aussi et surtout comme président de la commission des affaires économiques, j'insisterai sur trois points qui intéressent tout particulièrement mes collègues : la directive sur les services, la stratégie de Lisbonne et la politique énergétique de l'Union européenne.
S'agissant de la directive sur les services, la commission des affaires économiques a adopté à l'unanimité les conclusions de la communication de notre collègue Jean Bizet sur la position prise par le Parlement européen le 16 février dernier. Elle a ainsi réaffirmé sa volonté de voir se poursuivre le processus législatif communautaire sur la libre circulation des services en soutenant les amendements du Parlement européen, qui constituent un compromis qu'elle estime désormais acceptable.
Quatre points essentiels devraient, selon la commission des affaires économiques, être ainsi intégrés dans la nouvelle proposition de la Commission soumise au Conseil : l'exclusion de certains secteurs spécifiques du champ d'application de la directive tels que les services sociaux, les agences de travail intérimaire ou, de façon plus générale, les secteurs déjà couverts par des législations spécifiques ; la primauté des régimes et des directives sectoriels ; la réaffirmation de la règle de la libre circulation des services, en poursuivant le processus d'harmonisation ; l'exclusion du droit du travail, qui doit rester de la compétence du pays d'accueil, et le maintien de l'application effective de la directive sur le détachement des travailleurs.
Ce dernier point est particulièrement important, car nous sommes très attentifs à tout risque de dumping social qui pourrait naître des textes européens ou de leur mauvaise application sur le terrain.
Sur ce sujet, la commission des affaires économiques a d'ailleurs demandé à notre collègue Francis Grignon de préparer un rapport sur la concurrence résultant de l'élargissement dans les domaines du bâtiment et des travaux publics.
En ce qui concerne la mise en oeuvre de la stratégie de Lisbonne, sur des bases révisées par le Conseil européen des 22 et 23 mars 2005, la commission des affaires économiques soutient les objectifs économiques et sociaux que celle-ci définit à l'horizon 2010.
Au mois de novembre dernier, la commission des affaires économiques a adopté une proposition de résolution, devenue résolution européenne du Sénat, sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité.
Ce programme-cadre, d'un montant de 4,2 milliards d'euros pour la période 2007-2013, est conçu pour permettre le redémarrage de la stratégie de Lisbonne. Il va indéniablement dans le bon sens : il encourage la création et le développement des entreprises innovantes, intervient dans le domaine des technologies de l'information et de la communication, mais tend aussi à favoriser le développement de l'énergie intelligente, c'est-à-dire à améliorer l'efficacité énergétique. En cela, l'Europe prend les moyens d'assurer sa compétitivité pour demain.
Il me paraît essentiel, pour assurer cette compétitivité, à la fois globalement et nationalement, de veiller à l'articulation effective de ce programme avec les politiques des États membres, qu'il s'agisse de la politique industrielle ou de la politique de recherche et d'innovation.
De ce point de vue, nous pouvons nous féliciter de la réforme de notre système de recherche et d'innovation menée depuis deux ans. Désormais, la mise en place de l'Agence nationale de la recherche et de l'Agence de l'innovation industrielle renforce les logiques de projets qui sous-tendent les programmes européens.
Je crois également intéressant de souligner que c'est dans ce cadre que doivent s'inscrire nos pôles de compétitivité, qui traduisent une véritable politique d'aménagement du territoire en impliquant les collectivités territoriales. Quel est votre sentiment sur ce point, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée ?
Un autre volet de ce Conseil porte sur la définition d'une « stratégie européenne pour une énergie sûre, compétitive et durable ». Il s'agit, à l'évidence, d'un enjeu majeur pour la croissance économique de l'ensemble des États membres et pour l'indépendance de l'Europe sur la scène mondiale.
La parution du Livre vert de la Commission européenne et la contribution des ministres de l'énergie adoptée le 14 mars dernier constituent la base des discussions de ce volet « énergie ».
À cet égard, on peut se féliciter que le mémorandum français remis en janvier dernier ait pu contribuer à l'élaboration de ces documents.
Les éléments de contexte et les enjeux en matière de sécurité, d'approvisionnement, de demande énergétique et de changement climatique, obligent à mettre en place une stratégie commune. Il est aujourd'hui plus que temps !
Il faut en effet rappeler que la dépendance énergétique extérieure de l'Europe devrait augmenter et atteindre 70 % en 2030, contre 50 % aujourd'hui. À cet horizon, nous devrions encore dépendre principalement de trois sources fossiles : le pétrole, le gaz et le charbon. Or, ces ressources sont importées et leur épuisement est programmé à moyen terme. Cela pèsera inéluctablement sur les prix de l'énergie. Il convient, en outre, de prendre en compte les turbulences politiques qui peuvent affecter les fournitures de l'Europe, comme l'a récemment montré la crise entre la Russie et l'Ukraine.
L'Europe doit donc impérativement se prémunir contre ces aléas contraignants en faisant de la sécurité énergétique une priorité stratégique communautaire, déclinée à travers plusieurs axes d'intervention.
Il convient de rappeler que la France, à la suite du premier choc pétrolier, a fait le choix de cette priorité et que les options arrêtées et bâties autour du nucléaire ont largement fait leurs preuves. Il faut également redire que le nucléaire contribue de façon essentielle à la lutte contre le changement climatique.
À l'échelon communautaire, il est certes satisfaisant que le nucléaire soit mentionné dans la composition du bouquet énergétique européen plus durable, efficace et diversifié.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. Jean-Paul Emorine. Cependant le consensus n'est pas encore acquis au niveau des vingt-cinq États membres.
La France doit donc poursuivre ses travaux dans le domaine nucléaire afin de convaincre ses partenaires, notamment en matière de sécurité, de sûreté, de gestion des déchets et de développement de nouvelles technologies. Le savoir-faire et la place de leader mondial tant d'AREVA que d'EDF dans le nucléaire devraient être ainsi confortés.
Parallèlement, et dans le souci affirmé de diversifier l'offre d'énergies, je crois utile de souligner, pour m'en féliciter, la convergence des lois adoptées récemment s'agissant des énergies renouvelables et de l'utilisation des biocarburants. Tout cela devrait contribuer à combler notre retard.
Enfin, s'agissant de l'achèvement de l'intégration du marché intérieur de l'énergie, on ne peut qu'être favorable à la mise en place d'un plan d'interconnexion à l'échelle européenne, mais aussi d'un régulateur européen de l'énergie.
Plus généralement, le souci de renforcer la compétitivité à travers la libre circulation des capitaux, la libéralisation du marché et la constitution de groupes à taille européenne, voire mondiale, doit s'accompagner d'une grande vigilance s'agissant de la définition et du respect des obligations de service public, afin de préserver l'accès de tous à l'énergie.
La commission des affaires économiques reste ainsi très attachée à la pérennité de ce service public, notamment grâce à la péréquation tarifaire et à la compensation des obligations qui pèsent sur les opérateurs historiques. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Conseil européen est invité demain à réagir à la publication du Livre vert de la Commission européenne définissant les bases d'une politique européenne de l'énergie. Je consacrerai mon propos à ce thème, dont on semble enfin découvrir l'importance vitale.
Force est de constater que, depuis la création de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, la CECA, dont le volet énergétique s'est refermé avec les dernières mines de charbon, aucune politique de l'énergie n'a été mise en place à l'échelon européen.
Certes, la Communauté européenne de l'énergie atomique, l'Euratom, traite de l'énergie nucléaire, mais cette structure a pour seule mission de mettre en commun des connaissances, des infrastructures et des investissements, ainsi que d'assurer la sécurité de l'approvisionnement.
M. Alain Vasselle. Il faut faire du bio !
M. Aymeri de Montesquiou. Aujourd'hui, chaque membre de l'Union européenne développe ses propres options. Celles-ci vont du quasiment tout nucléaire français à la diabolisation de cette énergie par d'autres.
La somme de vingt-cinq politiques énergétiques ne fait pas une politique européenne de l'énergie. Or, l'Europe doit faire face à des défis immenses.
Cela a été dit : d'ici à vingt-cinq ans, l'Europe sera dépendante à 90 % pour son pétrole, à 70 % pour son gaz et à 100 % pour son charbon. Si la proportion du nucléaire reste la même, et à moins d'améliorer la performance énergétique, les importations devront couvrir, en 2030, environ 70 % de nos besoins en énergie, contre 50% aujourd'hui !
Dans ce contexte, la hausse croissante du prix du pétrole a évidemment de quoi nous tirer de la somnolence dans laquelle l'obligation de maintenir un matelas de quatre-vingt-dix jours de stock nous avait plongés. Ayons également à l'esprit que les oléoducs, les gazoducs et les raffineries sont des cibles potentielles du terrorisme. Un attentat ferait aussi exploser les prix. Une augmentation de 10 dollars du prix du baril ferait vraisemblablement perdre un demi-point de croissance à l'économie européenne.
Le récent conflit sur le gaz entre la Russie et l'Ukraine a également cristallisé les craintes d'une insuffisance d'approvisionnement. C'est un avertissement pour l'Union européenne qui, je le rappelle, importe 25 % de son gaz et 30 % de son pétrole de Russie. Certains États membres sont même totalement dépendants de cette source d'approvisionnement.
L'Union européenne a été surprise par la décision de la Russie de ne plus vendre son gaz à l'Ukraine au cinquième du prix international. Cet étonnement illustre son manque de réalisme et sa totale impréparation.
Enfin, j'évoquerai un autre défi, et non des moindres : le réchauffement de la planète. Le protocole de Kyoto a fixé pour objectif la réduction des émissions de gaz à effet de serre d'au moins 8 % par rapport à 1990, pendant la période 2008-2012. Serons-nous en mesure de tenir cet engagement ?
Les tendances de ces dernières années n'incitent guère à l'optimisme : si l'Union européenne a réduit ses émissions de 3,3 % entre 1990 et 2000, celles-ci ont augmenté de 0,3 % entre 1999 et 2000 et de 1 % entre 2000 et 2001. Cela met en évidence la vulnérabilité de l'Europe dans un monde où l'énergie sera, de par sa rareté, un enjeu de plus en plus vital.
M. Alain Vasselle. Il faut lancer les énergies renouvelables !
M. Aymeri de Montesquiou. Les États-Unis l'ont d'ailleurs bien compris. Le nouveau grand jeu qu'ils mènent face à l'Union européenne pour le contrôle des ressources énergétiques alimente leur politique internationale.
Au Moyen-Orient, leur hégémonie est une évidence. La guerre d'Irak a fait des Anglo-Saxons les maîtres du pétrole de ce pays, où la France n'a pas su, ou pu, garder l'exploration et l'exploitation des champs géants de Majnoun ou de Nahr bin Umar. L'Arabie saoudite et les Émirats privilégient aussi majoritairement les compagnies anglo-saxonnes. L'alignement de la politique étrangère de l'Union européenne sur celle des États-Unis vis-à-vis de l'Iran laisse augurer une prédominance américaine lorsque les relations avec ce pays se seront apaisées.
Certes, la France est fortement implantée dans le Golfe de Guinée et en Angola, mais, là aussi, les Américains progressent et la Chine développe ses positions africaines.
Les liens étroits entre les sociétés pétrolières américaines et le gouvernement des États-Unis génèrent une politique de l'énergie dynamique et même agressive, face à laquelle l'Union européenne n'offre pas une ligne de défense cohérente. Devant cette situation, elle doit agir d'urgence.
Le conseil « Énergie » du 14 mars semble montrer qu'il existe un consensus sur la nécessité d'élaborer une stratégie commune ; je m'en réjouis.
Le Livre vert identifie six domaines clés dans lesquels des actions sont nécessaires pour atteindre les objectifs de durabilité, de compétitivité et de sécurité de l'approvisionnement.
Trois points me semblent essentiels.
En premier lieu, l'Union européenne doit parler d'une seule voix, diversifier les sources et les voies d'approvisionnement extérieures et conclure de nouveaux partenariats avec ses voisins et avec d'autres grands pays producteurs dans le monde.
Le premier partenariat à conclure, c'est évidemment avec la Russie, géant énergétique, voisin direct et premier fournisseur de l'Union européenne. Il y a urgence, car des ventes d'hydrocarbures importantes se développent avec la Chine et le Japon. Et le potentiel de la Russie n'est pas infini.
Si le dialogue sur l'énergie entre l'Union européenne et la Russie est établi, les accords de partenariat et de coopération de 1997 et les conclusions du sommet Union européenne-Russie de 2001 ne sont pas encore entrés véritablement dans les faits.
Notre dépendance par le volume et la valeur vis-à-vis de ce pays crée mécaniquement une dépendance de celui-ci vis-à-vis de nous. L'Union européenne représente en effet 30 % en volume et 70 % en valeur des recettes de Gazprom.
Par ailleurs, les investissements nécessaires pour garantir l'approvisionnement et améliorer des installations vieillissantes et polluantes ont été évalués récemment par la Commission européenne à 715 milliards de dollars. Sans ces investissements, la capacité exportatrice de la Russie risque de très fortement diminuer. Si la Russie n'améliore pas son efficacité énergétique, d'ici à 2010, elle sera à 83 millions de tonnes équivalent pétrole exportables contre dix fois plus si elle le portait au niveau français.
L'Union a donc un intérêt vital à renforcer la Russie en tant que fournisseur sûr et fiable par des transferts technologiques et des investissements. La maîtrise de l'itinéraire et la cogestion, aujourd'hui inexistante, des oléoducs et gazoducs conditionnent également la sécurité de l'approvisionnement. Je citerai en exemple les gazoducs du Nord russo-allemand, qui sont totalement bilatéraux, et les deux projets Yamal.
En deuxième lieu, il est essentiel de diversifier le bouquet énergétique par le développement de sources d'énergies propres et renouvelables compétitives.
M. Alain Vasselle. Ah !
M. Aymeri de Montesquiou. L'Union s'est fixé pour objectif de porter à 12 % la part de l'énergie produite à partir de sources renouvelables d'ici à 2010. Mais, malgré cet enthousiasme originel, il existe des limites techniques et matérielles à la rentabilité de l'énergie renouvelable.
M. Alain Vasselle. Il faut les surmonter !
M. Aymeri de Montesquiou. Chacun sait que les énergies solaires et éoliennes ne sont qu'un complément. Ainsi, seuls 6% à 7 % de l'énergie potentielle d'une éolienne sont utilisables...
M. Alain Vasselle. Et l'éthanol ? Et le diester ?
M. Aymeri de Montesquiou. Quant aux biocarburants, si le passage du baril de pétrole à 60 dollars les rapproche du seuil de compétitivité, ils nécessitent cependant que de lourds investissements soient consentis en amont par les raffineurs et les constructeurs automobiles. Par ailleurs, les biocarburants de première génération, utilisant des plantes à usage agricole, comme le colza ou la betterave, dépendent toujours des hydrocarbures et sont très consommatrices d'espace.
Cela dit, les progrès vont faire passer les rendements d'une tonne de pétrole pour deux tonnes d'éthanol à cinq tonnes. À long terme, la filière ligno-cellulosique fondée sur des plantes dédiées à la production de carburant présentera des rendements énergétiques trois fois supérieurs à ceux des biocarburants actuels et consommant moins d'engrais.
Enfin, la culture de biomasse est limitée matériellement par l'espace dédié à l'usage agricole et rejette du CO2 par combustion. Pour atteindre nos objectifs, il faut donc investir massivement dans la recherche pour approfondir les techniques existantes et explorer d'autres vecteurs énergétiques à faible teneur en carbone.
On ne fera pas non plus l'économie d'un vrai débat sur le nucléaire.
Au sein de l'Union européenne, seuls douze États membres ont développé une filière électronucléaire. Les opinions publiques nationales hésitent entre méfiance et hostilité affirmée. Pourtant, le nucléaire est un atout dans la lutte contre les changements climatiques amorcée à Kyoto. La Finlande a d'ailleurs choisi cette énergie et l'Allemagne, la Pologne, la Suède, l'Italie, l'Espagne, s'interrogent aujourd'hui sur son inéluctabilité. Nous avons le choix entre une catastrophe affirmée et un risque contrôlé.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. Aymeri de Montesquiou. Nous devons respecter le droit des États membres d'effectuer leurs propres choix, mais le bouquet énergétique global de l'Union européenne devra inévitablement comprendre une part importante de nucléaire.
En troisième lieu, l'efficacité énergétique est également essentielle.
Si celle-ci s'est nettement améliorée depuis le premier choc pétrolier, ces dernières années marquent un ralentissement des efforts : elle plafonne actuellement à 0,5 % par an, contre 1 % auparavant.
Le secteur industriel, soucieux d'optimiser sa consommation d'énergie, est le bon élève de la classe. Il représente 28,3 % de la consommation finale d'énergie.
Les économies dans les bâtiments progressent, mais méritent encore la mention « peut mieux faire ». Certes, les normes deviennent de plus en plus exigeantes et, aujourd'hui, on construit des bâtiments économes et même créateurs d'énergie. Mais le parc immobilier ne se renouvelle que de 1 % chaque année ! À elle seule, la mise en oeuvre de la directive de 2002 sur la performance énergétique des bâtiments devrait permettre un gain de 40 millions de tonnes équivalent pétrole par an pour l'Union.
Cancre de la classe, l'activité transport engloutit 66 % de la consommation finale de produits pétroliers. Cette consommation himalayenne croît encore de 1 % par an. La directive relative à l'efficacité énergétique a retenu un objectif de réduction annuelle de 1 % sur neuf ans. C'est un premier pas, mais il doit impérativement être accompagné d'une sensibilisation très forte des citoyens.
Je vous rappelle qu'il faut en moyenne investir 80 dollars pour économiser une tonne de pétrole et 120 dollars pour la produire !
Les États-Unis ont développé la stratégie de la « route de la soie » et dominent le Moyen-Orient. La Russie contrôle le gaz de l'Asie centrale. L'Inde et la Chine achètent partout où elles le peuvent des participations dans leurs champs pétroliers. La Chine, par sa politique étrangère, se rapproche, par l'Iran et l'Arabie saoudite, des approvisionnements européens. Si les États de l'Union persistent dans cette politique du « chacun pour soi », l'Union le paiera très cher. Le mémorandum français du 24 janvier dernier doit faire prendre conscience de l'urgence, sinon notre politique de l'énergie balkanisée sera balayée par la détermination des pays continents.
Monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, nous devons savoir que le poids politique de l'Union européenne est indissociable de la part du marché de l'énergie que l'Union aura su collectivement conquérir. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur plusieurs travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Excellente intervention !
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau.
M. Bruno Retailleau. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, la stratégie de Lisbonne va être au coeur du prochain Conseil européen. Comme l'a indiqué Hubert Haenel tout à l'heure, l'objectif de cette stratégie est de faire de notre économie « l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique au monde ». Sans rire !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Eh oui !
M. Bruno Retailleau. Une telle pétition de principe évoque irrésistiblement celles qui étaient faites jadis en Union soviétique. Peut-on vraiment d'ailleurs blâmer la France d'être le seul pays à ne pas avoir nommé de coordonnateur national pour une stratégie qu'on devrait plutôt appeler « le songe de Lisbonne » ou « la lettre au père Noël » ? (Sourires.)
Depuis son lancement, en mars 2000, quels sont les résultats de cette stratégie ? La croissance, par rapport aux cinq années qui ont précédé 2000, s'est affaissée. Pire, la productivité du travail s'est effondrée et, désormais, le PIB par habitant des Européens est inférieur de 35 % à celui des Américains.
M. Jean Bizet, dans son excellent rapport, notait d'ailleurs que, au rythme actuel, nous n'atteindrions que 70 % de l'objectif de Lisbonne en 2020 ! Comme l'a écrit M. Hubert Védrine dans un excellent article du 9 juin 2005, il est temps de sortir du dogme européiste pour regarder la réalité en face.
Cette réalité nous confronte à trois problèmes économiques majeurs.
Premier problème, les élargissements sont mal préparés. L'Allemagne a elle-même sous-estimé sa réunification. Nous avons sous-estimé l'élargissement aux dix pays de l'Europe de l'Est. Nous allons, encore une fois, sous-estimer l'élargissement à la Roumanie et à la Bulgarie. Il nous faudra une génération pour les absorber.
Le deuxième problème majeur porte sur les stratégies « non coopératives », ainsi qu'on les désigne en termes économiques. Ce sont bien sûr celles des pays de l'Est qui, successivement, adoptent la flat tax mais sont bien heureux d'avoir nos subventions, mais aussi celle de l'Allemagne qui, depuis 1999, adopte une politique de désinflation compétitive qui est l'équivalent, ni plus ni moins, d'une dévaluation monétaire.
Enfin, troisième problème majeur : il n'y a jamais eu autant de divergences entre les économies européennes. L'exigence de l'euro ou plutôt la condition de l'euro, c'était la convergence. Or les écarts se creusent, sur la croissance, sur l'inflation, sur la compétitivité, sur tous les indicateurs économiques.
Certains pourraient alors être tentés de nous dire, citant l'exemple des États-Unis, où la croissance est de 6 % en Arizona alors qu'elle est à peine de 1 % en Louisiane, que l'hétérogénéité dans une union monétaire est normale. Non ! Aux États-Unis, elle s'explique par l'existence de deux mécanismes compensateurs : une très forte mobilité du travail, six fois plus élevée que chez nous, et un fédéralisme budgétaire et fiscal qui change tout, fédéralisme que, bien sûr, je n'appelle pas de mes voeux.
Or, nous, nous n'avons plus aucune force de rappel et notre politique monétaire est par elle-même de nature à entraîner plus de divergences encore. Le taux d'intérêt actuel est sans doute satisfaisant pour la moyenne des pays, mais il ne l'est pas pour l'Allemagne ni sans doute pour l'Espagne. Il faut accepter l'idée que l'Europe ou, en tout cas, l'euro a été fait, non pas à des fins économiques - en effet, l'Europe n'est pas une zone monétaire optimale - mais pour un État unique que les Français ont refusé.
Face à ces problèmes, à condition toutefois que l'on se pose les bonnes questions, des réponses de deux types peuvent être apportées, mais c'est en vain qu'on les cherchera dans les propositions de la Commission.
D'abord, quelle réponse peut être apportée face à la mondialisation ? Rien n'est proposé par la Commission, nous dit dans son rapport notre collègue Jean Bizet. Rien sur les délocalisations, rien non plus sur les secteurs qui ont des avantages comparatifs, tout juste un fonds d'ajustement qui ne règlera absolument rien.
Ensuite, quelle est l'articulation entre politique macroéconomique et politique microéconomique ?
Mes chers collègues, tout repose en Europe sur une sorte de division des tâches : à l'Europe, aux institutions européennes, les grands équilibres macroéconomiques et, aux États, les réformes microéconomiques. Ce dogme est faux. Tous les États - le Canada, les pays scandinaves - qui, dans les années quatre-vingt-dix, ont entrepris avec succès des réformes courageuses ont pu le faire grâce à une politique monétaire accommodante.
Ce n'est plus possible aujourd'hui chez nous. Depuis dix ans, les pays de l'Union européenne consacrent trop d'efforts à respecter - ce qu'ils n'arrivent pas toujours à faire - des contraintes macroéconomiques et trop peu d'efforts à mettre en place un environnement microéconomique réglementaire favorable à la croissance.
Voilà les nouveaux équilibres qu'il est urgent de repenser, faute de quoi nous pourrions demain être confrontés non à une utopie, même magnifique, mais à un vrai risque d'éclatement. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le président de la délégation pour l'Union européenne, mesdames, messieurs les sénateurs, avant toute chose, permettez-moi de me réjouir à mon tour de la tenue désormais régulière de ces débats avant chaque Conseil européen.
Dans leurs interventions, tous les orateurs ont d'ailleurs souligné l'intérêt croissant qu'ils portent aux enjeux européens, qui tiennent une place de plus en plus grande dans la vie quotidienne des Françaises et des Français. Je les en remercie.
Les questions économiques et sociales constituent l'essentiel de l'ordre du jour du Conseil européen de printemps, comme M. Philippe Douste-Blazy vous l'a indiqué, en soulignant l'importance de ces enjeux, sur lesquels les attentes de nos concitoyens sont si fortes : la France souhaite en effet des projets et des pas concrets cette semaine.
Elle entend donc saisir l'occasion de ce Conseil pour progresser dans la mise en oeuvre de la stratégie de croissance, d'emploi et de développement durable dont s'est dotée l'Europe, dite stratégie de Lisbonne, que vous avez été nombreux à évoquer. C'est donc d'abord sur ce point que je souhaite vous répondre.
On peut dire beaucoup de choses de la stratégie de Lisbonne, n peut dire qu'elle est complexe, qu'elle est abstraite, qu'elle est difficile à populariser. Sans doute. Mais il faut surtout en dire l'essentiel : cette stratégie est la bonne et elle souffrait surtout d'être trop peu appliquée par les États membres, comme vous l'avez souligné, monsieur Haenel.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. C'est vrai !
Mme Catherine Colonna, ministre déléguée. Il a donc été décidé l'an dernier, au Conseil européen de mars, de mieux l'appliquer, de façon plus volontariste et avec des objectifs et des calendriers précis chaque fois que cela est possible, grâce à l'élaboration par chaque État membre d'un « programme national de réformes » détaillant les mesures qu'il prend, à titre national, dans chacun des domaines de la stratégie européenne. Je considère que cette innovation est un progrès.
De plus, nous sommes prêts à parler de ces programmes avec nos partenaires et à comparer nos réformes, car les enjeux sont les mêmes pour nous tous : la mondialisation, le vieillissement démographique de nos sociétés, les progrès technologiques constants. Mais il faudra établir ces comparaisons, en regardant ce qui fonctionne et ce dont chacun peut s'inspirer chez le voisin, de façon pragmatique et dans le meilleur esprit européen. Je souhaite, en tout cas, que l'élaboration des deuxièmes programmes nationaux de réforme soit l'occasion de nouveaux progrès dans la méthode et dans le contenu, comme vous en avez, à juste titre, émis le souhait.
Je veux sans attendre vous communiquer quelques informations complémentaires sur le projet de conclusions de la présidence. Il évoque la thématique de l'emploi avec quelques objectifs généraux : créer 2 millions d'emplois chaque année au niveau européen d'ici à 2010, permettre à tout jeune d'entrer rapidement sur le marché du travail, adopter un pacte européen pour l'égalité des sexes.
Le projet prévoit également la mise en place du fonds d'ajustement à la mondialisation, dont le principe avait été arrêté par le Conseil européen en décembre dernier et qui pourra mobiliser 500 millions d'euros. Ce fonds doit permettre de mieux résister aux chocs comme ceux qui résultent de délocalisations vers les pays tiers.
Le projet évoque également la recherche et l'innovation, conformément aux souhaits que vous avez exprimés. Dans ce cadre, il prévoit ainsi la création d'une facilité financière de 10 milliards d'euros, gérée par la Banque européenne d'investissement, dont la France souhaite qu'elle ait lieu le plus rapidement possible, ainsi que la mise en place du futur institut européen de technologie, qui devrait d'abord être une mise en réseau. À cet égard, sachez, monsieur Sutour, que, si j'ai bien compris votre inquiétude, le Président de la République et le Gouvernement sont profondément attachés à conserver à Strasbourg son statut de capitale européenne et de ville siège du Parlement européen.
M. le président. Très bien !
Mme Catherine Colonna, ministre déléguée. Si cela va sans dire, je comprends que cela va encore mieux en le redisant. Non seulement rien n'ira à l'encontre de cette volonté, mais tout est fait, jour après jour, pour consolider la situation. Ainsi, nous avons pris, lors du conseil des ministres franco-allemand, un certain nombre de décisions allant précisément dans ce sens.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien : cela devait être dit !
Mme Catherine Colonna, ministre déléguée. Il n'y a, en tout cas, aucun rapport entre le futur institut européen de technologie et le siège du Parlement européen. (Applaudissements.)
M. le président. Nous nous en réjouissons tous, n'est-ce pas, monsieur Sutour ?
M. Simon Sutour. Nous jugerons aux résultats...
Mme Catherine Colonna, ministre déléguée. Monsieur Emorine, vous m'avez interrogée sur les pôles de compétitivité. En les mettant en place, la France a lancé une initiative majeure en matière d'innovation, mise en valeur dans notre programme national de réforme.
Ce dispositif, salué par la Commission européenne dans son rapport sur la stratégie de Lisbonne, est aujourd'hui une référence en Europe, et il intéresse de plus en plus nos partenaires européens et, en particulier, je tiens à vous le dire, nos partenaires allemands.
Il est évident que l'emploi ne se décrète pas et que le chiffrage ne suffit pas, mais l'expérience prouve que le fait de se fixer des objectifs chiffrés est utile pour guider l'action des États et les inciter à agir.
Sur toutes ces questions, notre pays entend tirer le meilleur parti d'une politique européenne orientée vers la croissance et l'emploi, qui correspond à la première préoccupation des citoyens. La France est active et bien insérée dans le marché européen, elle est un pays ouvert au commerce et à l'investissement : troisième terre d'accueil des investissements étrangers au monde, première en Europe, quatrième exportateur mondial de services, la France n'est ni protectionniste ni repliée sur elle-même. La réalité le prouve et je refuse qu'on fasse sur ce point de mauvais procès à notre pays.
Vous avez également été nombreux à évoquer le sujet de l'énergie. Ce thème sera au centre des débats lors de ce Conseil européen qui l'abordera pour la première fois d'une façon globale. Je vous rappelle que c'est à la demande de la France, en octobre dernier, que ce sujet avait été retenu dans les débats européens. L'énergie à l'ordre du jour du Conseil européen, voilà qui est à la fois nouveau et bienvenu. Comme certains d'entre vous l'ont dit, il était temps.
Depuis l'automne, le gouvernement français a entendu conserver un rôle moteur sur ce sujet en présentant à ses partenaires, dès le mois de janvier, un mémorandum sur l'énergie, dont la Commission s'est d'ailleurs sensiblement inspirée dans son Livre vert, paru début mars.
Le texte qui sera soumis à l'approbation des chefs d'État et de gouvernement au Conseil européen va dans le sens de ce que nous souhaitons. Il prévoit ainsi que la Commission présentera régulièrement un « examen stratégique énergétique annuel » à partir de 2007.
Le texte identifie également des mesures à prendre dans un premier temps, telles que le plan d'action sur l'efficacité énergétique, un plan d'interconnexions, ou le renforcement du dialogue Union européenne-Russie pour que cette dernière ratifie la charte de l'énergie. Cela permettra de jeter les premières bases d'une politique européenne de l'énergie.
Toutefois, la France est prête à aller plus loin, et il faudra aller plus loin, par exemple en matière de programmation des investissements, de relations extérieures, de développement des différentes sources d'énergie -- sans exclure, en effet, monsieur Emorine, le nucléaire -ou encore en matière de maîtrise de la demande énergétique.
De telles propositions figurent dans le mémorandum français, dont le Président de la République ne manquera pas de rappeler la teneur au cours de ce Conseil européen. D'ailleurs, nous savons que les attentes sont fortes en ce domaine, puisque le dernier sondage Eurobaromètre montre que 76 % des personnes interrogées se prononcent en faveur d'une action européenne en matière d'énergie.
Nous voulons aller de l'avant et nous considérons donc ce Conseil européen, non pas comme un point d'arrivée, mais comme un point de départ, de façon que les efforts se poursuivent pour mettre progressivement en place une vraie politique européenne de l'énergie, politique qui est nécessaire et possible si nous savons faire dans les années qui viennent ce que nous avons su faire dans le passé avec le charbon et l'acier, ainsi que vous l'avez dit avec force, monsieur Haenel, tout comme vous l'aviez écrit, monsieur de Montesquiou, dans un excellent rapport.
J'en viens à la proposition de directive sur les services que vous avez été nombreux à évoquer après Philippe Douste-Blazy.
Le Parlement européen a pris en compte les préoccupations que nous avions exprimées avec les représentants d'autres États membres. Le principe du pays d'origine est supprimé, les services publics, ainsi que les secteurs sensibles, sont préservés, et, surtout, c'est le droit du travail français qui s'appliquera en France, comme il se doit.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire devant la représentation nationale, la proposition initiale de la précédente Commission est maintenant derrière nous.
L'équilibre et la force du vote du 16 février - près de 400 voix pour et un peu plus de 200 contre - sont une réalité politique qui doit être respectée par la Commission européenne, laquelle doit élaborer une nouvelle proposition en tenant le plus grand compte de ce vote. Nous souhaitons que le Conseil européen le souligne et je peux vous assurer, monsieur Sutour, que le Président de la République le fera clairement savoir.
De toute façon, le Parlement européen aura à se prononcer de nouveau sur ce texte, puisque nous sommes en co-décision, et il serait vain d'ignorer son message du 16 février dernier.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Tout à fait !
Mme Catherine Colonna, ministre déléguée. Enfin, sur les perspectives financières et le futur accord interinstitutionnel, que vous avez notamment évoqué, messieurs Bret et Sutour, il est essentiel que l'équilibre de l'accord du 16 décembre 2005 soit respecté. En effet, avec plus de 862 milliards d'euros, il permet de doter l'Europe d'un budget en augmentation de plus de 50 milliards d'euros sur la période ce qui, pour un budget « statique », monsieur Fauchon, n'est pas si mal... Cette augmentation porte, en outre, sur les programmes les plus importants pour l'avenir : recherche-développement, réseaux transeuropéens, mais aussi Erasmus et Leonardo, dont nous souhaitons voir doubler, comme l'a demandé le Premier ministre, les bénéficiaires d'ici à 2013,...
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. C'est très important !
Mme Catherine Colonna, ministre déléguée. ... ou encore les relations extérieures, notamment l'instrument de voisinage, en particulier pour les pays méditerranéens.
Je tiens aussi à préciser que la politique de cohésion passera de 263 milliards d'euros à 308 milliards d'euros, soit une augmentation d'environ 45 milliards d'euros pour la période 2007-2013.
Au total, pour le Gouvernement, ce Conseil européen de mars représente une première étape pour engager plusieurs actions que nous jugeons essentielles sur la voie de l'Europe des projets. Cette dernière est indispensable pour montrer concrètement à nos concitoyens ce que l'Europe leur apporte.
C'est une première étape, mais il en faudra d'autres ; c'est la raison pour laquelle le Président de la République et le Premier ministre ont fait des actions concrètes de l'Union la priorité de leur politique européenne. J'ai constaté avec plaisir que vous en avez tous souligné l'importance.
Au-delà, restent bien sûr les questions qui intéressent l'avenir de l'Union européenne, à commencer par celle de l'élargissement et celle des institutions. Plusieurs d'entre vous ont soulevé ces deux questions qui ne figureront pas à l'ordre du jour, cette semaine, mais qui seront abordées lors du Conseil européen de juin. D'ici là, nous aurons donc l'occasion, d'une part, de faire des propositions, d'autre part de vous en reparler. Par avance, je remercie de leurs propositions tous les sénateurs qui voudront nous en soumettre, notamment M. Fauchon.
Aujourd'hui, je veux seulement rappeler que c'est à la demande de la France que ce débat sur la stratégie de l'élargissement aura lieu. Je sais que vous l'appelez de vos voeux autant que nous : Philippe Douste-Blazy vous a fait part de façon extrêmement précise de nos réflexions en la matière.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l'Europe, nous le savons, se construit pas à pas. Je tiens à vous redire que la France est active et engagée dans l'action européenne. Elle est déterminée à aller de l'avant, à recréer les conditions d'une action plus résolue de l'Union, car c'est notre avenir qui s'y joue. Gouvernance économique, innovation, recherche, énergie, sécurité, défense, sont autant de domaines dans lesquels l'Europe doit retrouver sa capacité d'
Sachant que seule la preuve par l'action lèvera les interrogations sur la construction européenne que nous voyons se répandre dans notre pays et au-delà, la France s'emploie à l'apporter, en assumant ses responsabilités, en prenant des initiatives et en faisant des propositions à ses partenaires. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Ayons la foi et l'espérance !
M. le président. Le débat est clos.
Acte est donné de la déclaration du Gouvernement, qui sera imprimée sous le numéro 173 et distribuée.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dix-sept heures cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.)
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Organismes génétiquement modifiés
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés (nos 200, 258).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus au chapitre II.
CHAPITRE II
MODIFICATIONS DU CHAPITRE II RELATIF À L'UTILISATION CONFINÉE D'ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS
M. le président. L'amendement n° 11, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi l'intitulé de cette division :
Utilisation confinée d'organismes génétiquement modifiés
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur de la commission des affaires économiques. Cet amendement tend à une plus grande lisibilité du texte.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. Avis favorable, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, l'intitulé du chapitre II est ainsi rédigé.
Article 4
L'article L. 532-1 est ainsi modifié :
1° La seconde phrase est supprimée.
2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les utilisations confinées d'organismes génétiquement modifiés font l'objet d'un classement en classes de confinement en fonction du groupe de l'organisme génétiquement modifié et des caractéristiques de l'opération.
« Les critères de ce classement sont fixés par décret après avis du conseil des biotechnologies. »
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 154, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le 2° de cet article pour compléter l'article L. 532-1 du code de l'environnement :
« Les ministres en charge de l'agriculture et de l'environnement établissent, sur avis du Conseil des biotechnologies, le classement -en fonction des produits mis en oeuvre et des caractéristiques de l'opération- des utilisations confinées du point de vue du risque qu'elles peuvent présenter pour la santé humaine ou l'environnement. Dans l'hypothèse où l'autorité administrative ne suit pas l'avis du conseil de biotechnologie, la décision doit être spécialement motivée.
« En cas d'hésitation quant à la classe la mieux adaptée à l'utilisation confinée prévue, les mesures de protection les plus strictes doivent être appliquées. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet de préciser les modalités de classement des utilisations confinées d'OGM. Il met le projet de loi en conformité avec l'article 5 de la directive 98/81/CE relatif à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés, notamment avec son point 4, qui prévoit explicitement la mise en oeuvre de mesures d'exposition plus strictes en cas d'hésitation quant à la classe la mieux adaptée à l'utilisation confinée prévue.
Il s'agit, là aussi, de mettre en place un principe de précaution.
M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Avant le dernier alinéa du texte proposé par le 2° de cet article pour ajouter deux alinéas dans l'article L. 532-1 du code de l'environnement, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d'hésitation quant à la classe la mieux adaptée à l'utilisation confinée prévue, les mesures de protection les plus strictes sont appliquées, à moins que des preuves suffisantes soient apportées, en accord avec l'autorité administrative, pour justifier l'application de mesures moins strictes.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser les modalités de classement des utilisations confinées d'OGM. Il met le projet de loi en conformité avec la directive 90/219/CEE dont l'article 5, point 4, prévoit explicitement la mise en oeuvre de mesures de protection plus strictes en cas d'hésitation quant à la classe de confinement la mieux adaptée à l'utilisation envisagée, sauf preuve contraire. Nous sommes, là aussi, dans l'esprit du principe de précaution.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 84 est présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe socialiste.
L'amendement n° 116 est présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par le 2° de cet article pour ajouter deux alinéas dans l'article L .532-1 du code de l'environnement, après le mot :
avis
insérer le mot :
conforme
La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour présenter l'amendement n° 84.
M. Jean-Marc Pastor. Aux termes de l'article 4, les critères du classement des utilisations confinées d'OGM sont fixés par décret après avis du conseil des biotechnologies, désormais Haut conseil. En demandant, par notre amendement, que ce haut conseil rende un avis conforme, nous souhaitons renforcer son rôle et le positionner comme autorité de référence en matière d'OGM.
En effet, l'État se doit de respecter l'avis dudit conseil quant à la détermination d'éléments techniques. La compétence du Gouvernement est donc liée à cet avis.
Les membres du groupe socialiste ont insisté sur ce point, conformément à la ligne de conduite qui est la leur, à savoir, mettre en place un conseil des biotechnologies dont les missions soient bien précises et surtout renforcer le rôle important des scientifiques quant à l'émission d'avis destinés au Gouvernement.
Le fait d'obtenir un avis conforme nous semble être prépondérant.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 116.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement est identique au précédent. Par conséquent, notre argumentation est la même.
Bien sûr, nous voyons mal un ministre autoriser la culture d'un OGM qui aurait reçu un avis défavorable du haut conseil des biotechnologies. Il ne s'agit donc pas de cela ici. En revanche, une dissémination d'OGM autorisée au niveau communautaire, imposée par l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, et déconseillée en France par ce haut conseil est une hypothèse tout sauf invraisemblable.
Nous connaissons la force de la pression juridique exercée par la Commission européenne ou par l'OMC sur les gouvernements et la tendance naturelle de ces derniers à céder aux vents mauvais du libéralisme. Nous savons à quel point ces contraintes juridiques jouent rarement au bénéfice de nos concitoyens.
Aussi, par cet amendement, nous proposons de donner aux avis du haut conseil des biotechnologies toute l'autorité qu'ils méritent pour que la France puisse résister aux possibles injonctions qui émaneront bientôt de la Commission européenne ou de l'Organisation mondiale du commerce pour imposer la culture d'OGM en France et qui ont déjà conduit au dépôt de ce projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 154 ainsi que sur les amendements identiques nos 84 et 116 ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Pour ce qui concerne l'amendement n° 154, rien ne justifie de confier aux ministres chargés de l'agriculture et de l'environnement le classement des utilisations confinées d'OGM. Cette utilisation, particulièrement destinée aux chercheurs, ressortit spontanément à la compétence du ministre chargé de la recherche. La consultation du haut conseil des biotechnologies est prévue avant que soit pris le décret fixant les critères du classement en classes de confinement des utilisations confinées d'OGM.
La disposition visée par le point 4 de l'article 5 de la directive 98/81/CE, à savoir le classement en classe de confinement supérieure en cas d'hésitation, figure déjà dans l'amendement n° 12 de la commission.
Par conséquent, l'amendement n° 154 est partiellement satisfait. Je demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer, faute de quoi la commission émettra un avis défavorable.
La mesure proposée par les auteurs de l'amendement n° 84 contraindrait le Gouvernement à suivre l'avis du haut conseil des biotechnologies rendu sur la détermination des critères de classement en classes de confinement des utilisations d'OGM. En la matière, ledit conseil est compétent, et ô combien, pour donner son avis. Toutefois, il n'a pas à se substituer au Gouvernement, dont il doit simplement éclairer les choix.
La décision politique ne saurait revenir à un conseil, certes, expert, mais extérieur au système de représentation démocratique. Il faut garder les grandes architectures.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
L'amendement n° 116 étant identique à l'amendement n° 84, il appelle de ma part les mêmes observations.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 154.
S'agissant des activités relevant de la défense nationale, vous convenez à une très large majorité, mesdames, messieurs les sénateurs, quel que soit d'ailleurs le groupe auquel vous appartenez, qu'elles doivent échapper aux procédures de droit commun : si le secret n'a pas droit de cité à propos d'autres activités, il se justifie, en revanche, dans ce cas.
Par ailleurs, les décisions de classement des utilisations confinées d'OGM de l'autorité administrative ne sont pas assimilables à des décisions défavorables en droit et n'ont donc pas à être motivées.
Quant à la rédaction du second alinéa de l'amendement, celle qu'a adoptée la commission dans son amendement nous semble préférable.
En ce qui concerne l'amendement n° 12, j'ai été convaincu par l'argumentation de M. le rapporteur. Je m'apprêtais à m'en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée, mais, en vertu du principe de précaution, il me paraît normal de suivre la proposition de la commission.
Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.
Les amendements identiques nos 84 et 116 soulèvent une question de principe. Nous sommes, les uns et les autres, attachés à ce que chaque institution joue le rôle qui lui est dévolu : en tant qu'instance scientifique, le Haut conseil des biotechnologies est chargé d'éclairer les pouvoirs publics, notamment le Gouvernement, dans leurs prises de décisions, et de donner des avis. Il importe que l'autorité politique prenne ses responsabilités en cette matière délicate. J'insiste beaucoup sur ce point, comme M. le rapporteur l'a fait lui-même.
Le Gouvernement est donc totalement défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Madame Alima Boumediene-Thiery, l'amendement n° 154 est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 12.
M. Daniel Raoul. Je comprends bien l'esprit dans lequel est rédigé cet amendement : il s'agit de monter d'un cran en cas d'hésitation. Or vous vous apprêtez à nous refuser l'avis conforme. Où se situe donc l'hésitation ? Dans l'esprit de M. le ministre ou dans celui des membres du Haut conseil des biotechnologies ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Les explications de M. le rapporteur étaient extrêmement claires. Cet amendement est, en quelque sorte, une traduction du principe de précaution : en cas de doute, on doit s'orienter vers le classement le plus protecteur.
Cette mesure est compatible avec la responsabilité totale de l'autorité administrative, donc de l'autorité politique. Celle-ci n'est pas tenue de suivre l'avis du Haut conseil des biotechnologies, mais, le cas échéant, elle sera tenue d'expliquer à la juridiction administrative pourquoi elle n'a pas suivi l'avis dudit conseil.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Mes chers collègues, les scrutateurs m'informent qu'il y a lieu d'effectuer un pointage ; je vais donc suspendre la séance le temps d'y procéder.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante.)
M. le président. La séance est reprise.
Voici, après pointage, le résultat du dépouillement du scrutin n° 154 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 298 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 150 |
Pour l'adoption | 298 |
Le Sénat a adopté. (Marques d'ironie sur les travées du groupe socialiste.)
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 84 et 116.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, la nuit dernière, nous avons interrompu nos travaux au milieu d'un débat sur le rôle du Haut conseil des biotechnologies dans les discussions locales concernant l'expérimentation en plein champ. Une discussion très fructueuse s'était engagée à ce sujet.
Après réflexion - je m'étais engagé, à l'issue de la séance, à conduire une réflexion de quelques heures - je vous annonce que je demanderai, à la fin de l'examen des articles, une deuxième délibération sur l'article 3. Le Gouvernement pourra ainsi déposer un amendement allant dans le sens souhaité par une majorité des membres de la Haute Assemblée appartenant à divers groupes politiques.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor.
M. Jean-Marc Pastor. Le Sénat a examiné cette nuit un amendement du groupe socialiste tendant à la mise en place de commissions locales d'information et de suivi, les CLIS.
En effet, comme nous l'avons dit à plusieurs reprises au cours du débat, nous sommes convaincus qu'une incompréhension s'est installée depuis dix ans entre la classe scientifique, un certain nombre de décideurs et le reste de la société.
Si nous ne favorisons pas, au niveau local, des échanges caractérisés par une plus grande transparence et une information plus fluide afin de rassurer nos concitoyens, et si nous ne parvenons pas à innover, dans cinq ans, la situation sera la même qu'aujourd'hui.
Monsieur le ministre, la mise en place de ces commissions locales d'information et de suivi constitue l'un des éléments qui détermineront notre position sur ce projet de loi.
Je tiens à vous remercier d'avoir accepté de faciliter l'information du grand public au niveau local. Nous attendons de prendre connaissance de l'amendement que vous allez déposer, mais, sur le principe, nous vous sommes reconnaissants d'avoir fait un pas de plus dans cette direction.
J'ai cru comprendre que nous n'étions pas d'accord sur tous les points. Pour notre part, nous souhaitons que l'on puisse se prononcer au niveau local sur l'opportunité de mettre en place des protocoles de cultures, de façon à favoriser une véritable participation de la société. Il importe de rassurer, d'accompagner, de soutenir nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Je souhaite, comme M. Pastor, saluer l'esprit d'ouverture de M. le ministre.
Hier, lors d'une brève intervention, j'ai dit que la transparence était une nécessité absolue. En démocratie, les explications doivent être simples, et ce sont les acteurs locaux qui sont les mieux placés pour accomplir cet effort de vulgarisation.
Je remarque que l'opposition sénatoriale a parfois raison !
M. Jean Bizet, rapporteur. Je veux à mon tour non seulement me réjouir de l'esprit d'ouverture du Gouvernement et l'en féliciter, mais également souligner la qualité de notre débat.
Le dispositif en vigueur ne manquait pas de transparence, mais il donnait lieu à de nombreuses incohérences.
Le rôle du Haut conseil des biotechnologies, au travers de sa section socioéconomique et de ses personnalités qualifiées, sera bien de « présider » au dialogue maîtrisé qui permettra d'éviter l'incompréhension, laquelle engendre ensuite des réactions irrationnelles ou passionnelles.
La proposition que nous fera M. le ministre aura également pour objet de ne pas mettre le maire en première ligne, bien qu'il soit au coeur du sujet puisqu'il s'agira d'essais sur sa propre commune, en lui permettant en quelque sorte de se placer derrière le « paravent » des personnalités qualifiées de la section socioéconomique du Haut conseil des biotechnologies.
Là encore, le débat est conforme à l'esprit dans lequel nous avons abordé ce texte : il ne s'agit pour le Gouvernement ni de légiférer par ordonnances, ni d'obtenir un vote en urgence, mais de parvenir avec le Parlement à trouver le meilleur texte pour rassurer nos concitoyens et pour engager une politique où les chercheurs ont également toute leur place.
Article 5
L'article L. 532-2 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 532-2. - I. - Sous réserve des dispositions du chapitre III relatif à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés, toute utilisation à des fins de recherche, de développement, d'enseignement ou de production industrielle d'organismes génétiquement modifiés qui peut présenter des dangers ou des inconvénients pour la santé publique ou pour l'environnement est réalisée de manière confinée.
« Les modalités de ce confinement, qui met en oeuvre des barrières physiques, chimiques ou biologiques pour limiter le contact des organismes avec les personnes et l'environnement et assurer à ces derniers un niveau élevé de sécurité, sont définies en fonction du classement des organismes génétiquement modifiés utilisés après avis du conseil des biotechnologies, sauf pour les activités couvertes par le secret de la défense nationale.
« II. - Ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 532-3 à L. 532-6 du présent chapitre :
« 1° Les utilisations confinées mettant en oeuvre des organismes génétiquement modifiés ne présentant pas de danger pour la santé publique ou l'environnement et répondant à des critères définis par décret après avis du conseil des biotechnologies ;
« 2° Le transport d'organismes génétiquement modifiés.
« III. - Les organismes génétiquement modifiés mis à la disposition de tiers, à l'occasion d'une utilisation confinée de ces organismes, sont soumis à étiquetage dans les conditions définies par décret. »
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 13, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Au second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-2 du code de l'environnement, remplacer les mots :
après avis du conseil des biotechnologies,
par les mots :
, après avis du Haut conseil des biotechnologies
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement de clarification vise à préciser que les activités couvertes par le secret de la défense nationale font bien l'objet d'un confinement, dont les modalités dépendent du classement des OGM utilisés, mais que la définition de ces modalités se fait sans l'avis du Haut conseil des biotechnologies, qui n'a pas à connaître du secret défense.
En effet, la rédaction actuelle risquerait de laisser croire que les activités couvertes par le secret de la défense nationale sont exemptées d'obligation de confinement.
M. le président. L'amendement n° 117, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
I. - Dans le second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-2 du code de l'environnement, après le mot :
avis
insérer le mot :
conforme
II. - En conséquence, effectuer la même insertion dans le 1° du II du même texte.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 102, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Supprimer le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-2 du code de l'environnement.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Le paragraphe que cet amendement vise à supprimer prévoit que les utilisations confinées d'OGM ne présentant pas de danger pour la santé et pour l'environnement ainsi que le transport d'OGM ne sont pas soumis aux diverses procédures, notamment d'agrément et d'information, prévues aux articles L.532-3 à L. 532-6 du code de l'environnement.
Prenant nous aussi appui sur le principe de précaution, nous proposons d'imposer les mêmes règles, notamment en ce qui concerne les conditions d'agrément et d'information, au transport et aux utilisations confinées d'OGM quand bien même elles ne présenteraient a priori pas de danger pour la santé publique.
M. le président. L'amendement n° 156, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa (1°) du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-2 du code de l'environnement par une phrase ainsi rédigée :
Dans l'hypothèse où l'autorité administrative ne suit pas l'avis du conseil des biotechnologies, la décision doit être spécialement motivée.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement d'harmonisation avec le dernier amendement que j'ai présenté concerne le rôle joué par le Haut conseil des biotechnologies. Il est également sous-tendu par le principe de précaution.
M. le président. L'amendement n° 118, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le 2°du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-2 du code de l'environnement.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous refusons l'exclusion du transport d'OGM de l'obligation de confinement imposée aux OGM par l'article 5 du projet de loi.
Il s'agit en effet, dans cet article, d'OGM soumis à une obligation de confinement, et donc d'OGM dont l'innocuité éventuelle sur la santé ou l'environnement n'a pas été évaluée. Leur dissémination présenterait donc un risque non négligeable.
Aussi, la loi devrait s'attacher à prévenir toute dissémination involontaire d'OGM de ce type et à réduire ce risque au maximum.
Au regard de ce principe, on nous propose de ne plus imposer de confinement pour le transport de ces organismes. C'est pourtant bien au cours de leur transport que le risque de dissémination de ces OGM est le plus élevé et le plus incontrôlable.
À quoi bon, en effet, confiner des OGM en laboratoire si l'on ne contrôle plus leur possible dissémination au cours de leur transport, c'est-à-dire le long des routes, sur des dizaines, voire sur des centaines de kilomètres ? N'offrez-vous pas là une merveilleuse occasion de contaminer tout notre environnement d'OGM dont l'on ne sait encore rien ?
Une telle perspective est inimaginable. C'est bien pourquoi nous vous proposons de voter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Comme je l'ai déjà souligné à propos du précédent amendement de M. Le Cam, l'instauration d'un Haut conseil des biotechnologies ne vise pas à défaire le Gouvernement de son pouvoir de décision : le politique ne doit pas se « défausser » sur le scientifique. La commission est donc défavorable à l'amendement n° 117.
Le paragraphe dont les auteurs de l'amendement n° 102 demandent la suppression tend à exonérer de l'obligation d'agrément deux types d'utilisation confinée, à savoir les utilisations mettant en oeuvre des OGM non dangereux et le transport d'OGM. Ces exonérations sont prévues aux articles 3 et 4 de la directive 90/219/CEE. Les supprimer serait donc non conforme à la directive que nous devons transposer dans le présent projet de loi. Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.
La commission est également défavorable aux amendements nos 156 et 118.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. J'émets un avis favorable sur l'amendement n° 13, car la rédaction que propose la commission est préférable à celle qui avait été initialement prévue par le Gouvernement.
L'amendement n° 117 porte sur un point dont nous avons déjà débattu ; comme pour le précédent amendement de M. le Cam, l'avis du Gouvernement est défavorable.
Pour l'amendement n° 102, l'explication donnée par M. le rapporteur est parfaitement pertinente : son adoption serait contraire au texte de la directive puisque celle-ci exclut précisément le transport, qui obéit à des règles extrêmement contraignantes et tout à fait adaptées quand, le cas échéant, il s'agit de matières dangereuses.
Les mêmes raisons motivent un avis défavorable sur l'amendement n° 156 ainsi que sur l'amendement n° 118.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 117 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 102.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 155, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
À la fin du second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-2 du code l'environnement, remplacer les mots :
, sauf pour les activités couvertes par le secret de la défense nationale
par la phrase :
Dans l'hypothèse où l'avis du conseil de biotechnologie n'est pas suivi, la décision sur les modalités de confinement doit être spécialement motivée.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet de supprimer, pour les modalités de confinement, l'exemption accordée aux activités couvertes par le secret de la défense nationale.
Le confinement étant une modalité de précaution, son application ne doit pas être liée au rattachement fonctionnel des activités conduites, mais être strictement fonction du classement des OGM. Les modalités du confinement ne mettent aucunement en cause la poursuite des activités concernées. Elles en garantissent simplement la sécurité.
L'amendement proposé permet également de rappeler le rôle du Haut conseil des biotechnologies, dont l'avis doit être réellement pris en compte.
Dans le cas où l'autorité administrative ne se conformerait pas à l'avis du Haut conseil, ce qui ne serait pas anormal puisque la légitimité politique appartient au Gouvernement et non au conseil, il serait légitime que la décision soit motivée
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Il n'est nullement dans le projet du Gouvernement d'exonérer d'obligation de confinement les activités couvertes par le secret de la défense nationale, même si, il faut l'avouer, la rédaction du texte est ambiguë sur ce point. C'est pour la clarifier que la commission a présenté l'amendement n° 13, qui tend à préciser que c'est seulement la définition des modalités de confinement des activités couvertes par le secret défense qui ne nécessite pas l'avis du Haut conseil des biotechnologies.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Boumediene-Thiery, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-2 du code de l'environnement:
« III.- Les organismes génétiquement modifiés, mis à la disposition de tiers à l'occasion d'une utilisation confinée, sont soumis à étiquetage dans des conditions définies par décret. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
Il est créé un article L. 532-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 532-2-1. - Toute utilisation confinée d'organismes génétiquement modifiés à des fins de production industrielle est soumise aux dispositions du titre Ier du présent livre. »
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
À la fin du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-2-1 du code de l'environnement, supprimer les mots :
du présent livre
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Il s'agit également d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Nous avons une divergence, qui n'est pas fondamentale, concernant cette rédaction. Je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. Charles Revet. Vous avez raison !
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
L'article L. 532-3 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 532-3. - I. - Toute utilisation confinée à des fins de recherche, de développement ou d'enseignement d'organismes génétiquement modifiés dans une installation publique ou privée est soumise à agrément.
« Toutefois l'utilisation peut n'être soumise qu'à déclaration eu égard au faible risque qu'elle présente pour la santé publique ou pour l'environnement ou aux autres caractéristiques de l'opération ou lorsque est en cause la réitération d'une utilisation déjà agréée.
« II. - L'agrément délivré à l'exploitant de l'installation par l'autorité administrative est subordonné au respect de prescriptions techniques définissant notamment les mesures de confinement nécessaires à la protection de la santé publique et de l'environnement et les moyens d'intervention en cas de sinistre.
« Un nouvel agrément doit être demandé en cas de modification notable des conditions d'utilisation des organismes génétiquement modifiés ayant fait l'objet de l'agrément.
« III. - Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application du présent article, et notamment la procédure d'octroi de l'agrément, les cas dans lesquels une déclaration suffit et les modalités selon lesquelles l'exploitant fait connaître les informations qu'il estime confidentielles. »
M. le président. L'amendement n° 85, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement par les mots :
après avis et évaluation par le Conseil des biotechnologies.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Cet amendement a pour objet de conforter le rôle du Haut conseil des biotechnologies en matière d'agrément en vue de l'utilisation d'OGM.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Comme le propose la commission dans son amendement n° 10 rectifié, la section scientifique du Haut conseil des biotechnologies doit rendre au ministre un avis sur chaque demande d'agrément en vue de l'utilisation confinée d'OGM. Il est donc logique de prévoir que l'agrément est octroyé après avis du conseil. Cet avis est rendu au terme d'une évaluation scientifique des risques liés à l'utilisation de cet OGM en milieu confiné. Par conséquent, il serait redondant de prévoir également que l'agrément intervient après évaluation par le conseil.
C'est pourquoi, si les auteurs de l'amendement n° 85 acceptaient de supprimer les mots : « et évaluation », la commission pourrait émettre un avis favorable.
M. le président. Monsieur Trémel, acceptez-vous la modification proposée par M. le rapporteur ?
M. Pierre-Yvon Trémel. Tout à fait, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 85 rectifié, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, qui est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement par les mots :
après avis par le Conseil des biotechnologies.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 119, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Il s'agit d'assouplir la réglementation de l'agrément au niveau de l'utilisation confinée des OGM.
Selon le texte, la déclaration peut seule suffire pour obtenir un agrément lorsqu'il s'agit d'OGM présentant de faibles risques.
La question est de savoir si nous approuvons le fait de faire courir des risques sanitaires ou environnementaux, fussent-ils faibles, à nos concitoyens.
Étant donné que la culture des produits OGM ne remonte pas à bien longtemps - à peine à plus d'une dizaine d'années - nous n'avons aucune certitude qu'une utilisation confinée comporte peu de risques. C'est avec le temps seulement que nous pourrons constater d'éventuels dégâts.
C'est pourquoi nous vous proposons, mes chers collègues, d'encadrer toute opération d'utilisation confinée, sans exception.
L'un des moyens d'y parvenir est la délivrance ou non des agréments par la seule autorité administrative. Aucune recherche ne doit échapper au contrôle de celle-ci. L'État a le devoir de protéger les citoyens de tout risque potentiel.
Un tel encadrement permettrait également une surveillance régulière de l'autorité administrative sur toute opération touchant aux OGM.
M. le président. L'amendement n° 104, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement :
« Toutefois l'utilisation peut n'être soumise qu'à déclaration lorsqu'est en cause la réitération d'une utilisation déjà agréée.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. L'article 7 prévoit la substitution d'un régime de déclaration à un régime d'agrément pour les utilisations confinées d'OGM ne présentant qu'un faible risque pour la santé ou l'environnement.
Cet amendement vise à limiter la procédure de déclaration aux seules utilisations qui auraient déjà été agréées et ne présenteraient aucun risque quant à la santé publique et à l'environnement.
Au nom du principe de précaution et en raison de l'incertitude persistante qui pèse sur les risques et les conséquences de l'utilisation des OGM pour l'environnement, le principe de déclaration ne doit pouvoir s'appliquer que dans un nombre limité de cas.
Il s'agit ainsi de mettre le projet de loi en conformité avec la directive 98/81/CE, relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés. Cette directive ne prévoit en effet aucune exception pour les utilisations comportant de faibles risques.
C'est à la seule condition de l'absence de risque que peut être acceptée une dérogation au principe de l'agrément, et toute utilisation présentant un risque, aussi faible soit-il, doit donc faire l'objet d'un agrément et non d'une simple déclaration.
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
peut n'être soumise qu'à déclaration
rédiger comme suit la fin du second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement :
si elle présente un risque nul ou négligeable pour la santé publique ou pour l'environnement ou si, présentant un risque faible, elle s'effectue dans une installation déjà agréée pour une utilisation confinée d'organismes génétiquement modifiés de même classe de risque.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Conformément aux dispositions de l'article 9 de la directive 90/219/CEE, cet amendement tend à préciser les deux cas où l'utilisation confinée d'OGM peut se faire sur simple déclaration.
Cela peut être soit en raison du caractère nul ou négligeable du risque que présente cette utilisation, soit du fait que ladite utilisation, si elle présente un faible risque, s'effectue dans une installation déjà agréée pour une utilisation confinée d'OGM relevant de la même classe de risque.
M. le président. L'amendement n° 157, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement, remplacer les mots :
eu égard au faible risque qu'elle présente
par les mots :
en cas d'absence de risque
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à limiter la procédure de déclaration aux seules utilisations ne présentant aucun risque pour la protection de la santé publique et de l'environnement et de mettre ainsi le projet de loi en conformité avec la directive 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés. Cette directive ne prévoit en effet aucune exception pour les utilisations comportant des risques faibles.
C'est à la seule condition de l'absence de risque que peut être acceptée une dérogation au principe de l'agrément. Toute utilisation présentant un risque, aussi faible soit-il, doit faire l'objet d'un agrément et non seulement d'une simple déclaration.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Les auteurs de l'amendement n° 119 refusent que l'utilisation confinée d'OGM soit possible par une simple déclaration, alors même que cet assouplissement procédural constitue l'une des innovations majeures de la directive 98/81/CE, qui a modifié l'article 8 de la directive 90/219/CEE. Supprimer le régime déclaratif serait donc contraire à nos obligations communautaires.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Comme les auteurs de l'amendement n° 104, la commission considère que l'assouplissement procédural qu'autorise la directive 98/81/CE mérite d'être précisément circonscrit. Tel est d'ailleurs l'objet de l'amendement présenté par la commission et qui vise à prévoir les deux cas de figure où l'utilisation confinée d'OGM peut se faire sur simple déclaration. Il ne serait pas possible, comme le souhaitent les auteurs de l'amendement, de ne retenir que l'un de ces deux cas. L'article 9 de la directive 90/219/CEE doit en effet être scrupuleusement transposé, dans son intégralité.
La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 104.
Les auteurs de l'amendement n° 157 sont fondés à souligner que le texte du projet de loi ne transpose pas tout à fait fidèlement l'article 9 de la directive 90/219/CEE puisqu'il prévoit un régime déclaratif pour toute utilisation présentant un faible risque. L'utilisation confinée d'OGM peut en effet se faire sur simple déclaration dans deux cas seulement, comme tend à le préciser l'amendement n° 16 de la commission.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 157.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. L'amendement n° 16 précise utilement la rédaction de l'article 7. Je serai donc défavorable aux autres formulations proposées.
L'amendement n° 119 me semble clairement non conforme à la directive 98/81/CE.
La formulation à laquelle tend l'amendement n° 104 est moins éloignée des prescriptions de la directive, mais elle est non conforme à celle-ci.
L'amendement n° 157 n'est pas non plus conforme à la directive, puisque les OGM dont l'utilisation ne comporte aucun risque et dont l'innocuité est démontrée ne sont pas couverts par la directive.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 16 et un avis défavorable sur les autres amendements.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 16.
M. Daniel Raoul. L'amendement présenté par M. le rapporteur pourrait nous satisfaire si sa rédaction était modifiée pour être plus proche de la rédaction initiale du projet de loi.
Autrement dit, je vous suggère de modifier la dernière partie de la phrase en la rédigeant ainsi : « elle s'effectue dans une installation et pour une utilisation agréées ». Car avec la rédaction que vous proposez, on peut imaginer une utilisation totalement différente et qui n'ait pas été agréée. Ce sont à la fois l'installation et l'utilisation qui doivent être agréées.
On retrouverait ainsi l'esprit de l'amendement que nous avons déposé.
M. le président. Monsieur le rapporteur, acceptez-vous cette modification ?
M. Jean Bizet, rapporteur. J'aurais aimé pouvoir souscrire au souhait de M. Raoul, mais si cette modification intervient, rien n'impose plus alors que l'installation soit agréée. Or il faut que l'installation soit déjà agréée.
M. Daniel Raoul. Et l'utilisation aussi !
M. Jean Bizet, rapporteur. À partir du moment où l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés correspond à la même classe de risque, l'utilisation de ces OGM a déjà été agréée.
M. Daniel Raoul. Vous avez éprouvé le besoin de séparer installation et utilisation. Allez jusqu'au bout : les deux doivent être agréées !
M. Jean Bizet, rapporteur. On ne peut pas globaliser ! L'installation est agréée pour une utilisation spécifique. Un OGM appartient à une classe de risque qui a ou non été agréée.
Je crois que nous devons conserver l'esprit de cette rédaction si nous voulons véritablement nous conformer à la directive.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Comme vient de le dire M. le rapporteur, l'installation est agréée pour une utilisation précise : elle n'est pas agréée dans l'absolu.
La rédaction prévue par l'amendement n° 16 nous paraît donc conforme à l'esprit de l'ensemble du texte et correspondre au régime d'agrément prévu.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 157 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 105, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement, après les mots :
prescriptions techniques
insérer les mots :
, fixées après avis conforme du Conseil des biotechnologies,
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Il s'agit de montrer toute l'importance que nous accordons au rôle que doit jouer le Haut conseil des biotechnologies en amont du processus d'agrément.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Comme je l'ai déjà indiqué, il ne revient pas au Haut conseil des biotechnologies de remplacer l'autorité administrative ; il doit simplement l'éclairer.
La délivrance de l'agrément et les prescriptions au respect desquelles cet agrément est subordonné doivent rester du ressort du Gouvernement. Cette architecture me paraît claire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Les lois sont faites pour durer. Imaginez qu'un gouvernement prenne systématiquement des décisions qui ne seraient pas conformes aux avis du Haut conseil des biotechnologies. Il me semble que ce fait serait relevé par les membres du Haut conseil.
Le gouvernement n'a pas l'intention de s'éloigner des avis scientifiques que peut rendre un tel conseil. Mais il peut arriver que, sur tel ou tel point, son appréciation soit différente de celle du conseil. Dans de nombreux cas, le Gouvernement irait plutôt dans le sens d'une plus grande exigence.
En toute hypothèse, c'est à l'autorité politique de prendre des décisions de cette nature. Car s'il y a contestation, c'est vers l'autorité politique que l'on se tournera. Le rôle de l'instance scientifique est non pas de prendre une décision, mais de rendre un avis.
Nous devrions tous être d'accord sur ce principe, car nous sommes, les uns comme les autres, attachés à la bonne marche de l'État.
M. le président. L'amendement n° 120, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532- 3 du code de l'environnement par les mots :
et à une évaluation par le conseil des biotechnologies de l'intérêt de cette recherche et des bénéfices éventuels attendus par l'organisme génétiquement modifié considéré
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Par cet amendement, nous souhaitons donner, d'une part, plus de poids au Haut conseil des biotechnologies et, d'autre part, un sens aux recherches et exploitations concernant les OGM.
Les origines et la diversité du Haut conseil des biotechnologies font que celui-ci est indispensable pour assurer une évaluation des OGM tant en matière de risques environnementaux et sanitaires que s'agissant des enjeux économiques et sociaux. Un agrément ne devrait en aucun cas être délivré sans cette évaluation du Haut conseil des biotechnologies.
Nous voulons également, au travers de cet amendement, traiter une question assez sensible dans le cas des OGM : leur utilité.
Les recherches et développements sur les OGM qui, pour le plus grand nombre, ne sont pas susceptibles de faire avancer l'humanité sur les plans sanitaire, environnemental et économique, ne devraient pas être autorisés.
Nous constatons aujourd'hui, ne serait-ce qu'en ce qui concerne le maïs, que le bénéfice économique est quasiment nul, ce qui, en soi, ne profite à personne si ce n'est aux multinationales semencières.
Il convient donc de mieux évaluer l'intérêt de telle ou telle recherche et de ses bénéfices éventuels attendus avant de délivrer une autorisation quelconque.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Il ne paraît pas judicieux de se demander, en amont d'une recherche, quel est l'intérêt de celle-ci et quels sont les bénéfices éventuels attendus de l'OGM considéré.
L'objet de la recherche est précisément de parvenir à identifier des gènes intéressants qui aboutiront, ensuite, à des produits susceptibles d'engendrer des bénéfices. Il me semble que cette approche vaut pour toutes les activités de la recherche, tant il est vrai que, bien souvent, les résultats auxquels celle-ci parvient sont le fruit du hasard. Donc, ne bridez pas la recherche, monsieur Le Cam, laissez-la respirer !
C'est la raison pour laquelle la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Les propos de M. le rapporteur nous renvoient au débat que nous avons eu dans cet hémicycle à l'occasion de la discussion du projet de loi de programme pour la recherche. Certains membres du groupe auquel vous appartenez, monsieur Le Cam, nous avaient alors reproché - selon moi, à tort - de favoriser une recherche finalisée, dont l'utilité serait démontrée, au détriment de la recherche fondamentale. Or il n'en est rien. Par conséquent, les arguments avancés par M. le rapporteur sont tout à fait fondés.
Ne mélangeons pas l'intérêt économique de tel ou tel type de cultures, qui font l'objet d'une autorisation de mise sur le marché, et les utilisations confinées à des fins de recherche ou d'enseignement.
Je considère qu'il est tout à fait inopportun d'évoquer l'intérêt de cette recherche. Il s'agit, en fait, de recueillir un avis sur les précautions à prendre et les risques encourus, la notion d'intérêt de la recherche étant, le plus souvent, relativement imprécise.
M. le président. Monsieur Le Cam, l'amendement est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Oui, monsieur le président, je le maintiens.
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement, insérer un alinéa ainsi rédigé:
« L'évaluation des risques prévue à l'article L. 532- 2 et les mesures de confinement et autres mesures de protection appliquées sont régulièrement revues.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement a pour objet de transposer l'article 6. 2 de la directive 90/219/CEE qui prévoit une révision régulière de l'évaluation des risques et des modalités de confinement. Il s'agit du principe de précaution.
M. le président. Le sous-amendement n° 103, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par l'amendement n° 17, remplacer les mots :
mesures de confinement et autres mesures de protection
par le mot :
prescriptions
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Si nous sommes d'accord avec M. le rapporteur s'agissant de sa proposition de transposition, nous souhaiterions toutefois qu'il aille un peu plus loin.
Tel est l'objet de ce sous-amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. L'amendement n° 17 de la commission a pour objet, je le répète, de transposer l'article 6. 2 de la directive 90/219/CEE qui prévoit, précisément, une révision régulière de l'évaluation des risques ainsi que des mesures de confinement et autres mesures de protection appliquées. Il serait donc contraire à la directive d'élargir cette révision régulière à l'ensemble des prescriptions dont est assortie l'utilisation confinée d'OGM.
Il convient plutôt d'en rester à une transcription que je pourrais qualifier de littérale. En effet, notre pays souffre déjà par trop d'un certain élargissement administratif en la matière.
C'est la raison pour laquelle la commission est défavorable au sous-amendement n° 103.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Pour ce qui est de l'amendement n° 17, même si sa rédaction est relativement imprécise - mais le décret pourra pallier cette lacune - il recueille de la part du Gouvernement un avis favorable.
En revanche, en ce qui concerne le sous-amendement n° 103 présenté par M. Trémel, une telle mesure serait source de complications - d'autant que les décisions en la matière seront très fréquentes - ce qui, à notre sens, est inutile, surtout si l'on considère que l'amendement n° 17 va certainement être adopté.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.
M. le président. L'amendement n° 158, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532- 2 du code de l'environnement, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« L'utilisateur procède à une évaluation des utilisations confinées du point de vue des risques qu'elles peuvent présenter pour la santé humaine et l'environnement, en utilisant au moins les éléments d'évaluation et la procédure définis à l'annexe III, parties A et B de la directive 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés.
« L'évaluation prend particulièrement en considération la question de l'évacuation des déchets et des effluents. Le cas échéant, les mesures doivent être prises pour protéger la santé humaine et l'environnement.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. L'article 5. 2 de la directive 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro- organismes génétiquement modifiés prévoit la nécessité d'une évaluation du risque préalable à toute utilisation confinée.
Cet amendement a donc pour objet de rappeler cette obligation et de s'assurer que l'analyse du risque sera bien conforme à la méthode et aux critères d'évaluation définis par cette directive, afin de garantir le respect de l'environnement et de la santé humaine.
Plus particulièrement, et conformément à l'article 5. 5 de ladite directive, cet amendement vise à introduire dans le projet de loi la nécessité de prendre en compte la question de l'évacuation des déchets et effluents.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Le dossier de demande d'agrément pour une utilisation confinée doit, aux termes de l'article L.532- 4 du code de l'environnement, comporter toutes informations utiles. Dès lors, il n'est pas nécessaire de détailler dans la loi la liste de ces informations, qui relèvent plutôt du domaine réglementaire.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement en ce qu'il constitue le type même d'une précision qui, ajoutée à un texte, risque d'en affaiblir la portée. En effet, l'appréciation du risque doit être globale. Or l'indication de risques particuliers pourrait conduire, en réalité, à une couverture incomplète du champ qui doit être visé.
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532- 3 du code de l'environnement, remplacer les mots :
conditions d'utilisation des organismes
par les mots :
conditions de l'utilisation d'organismes
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel tendant à bien préciser que l'agrément porte sur l'utilisation des OGM, et non sur les OGM eux-mêmes.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 86, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Compléter le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532- 3 du code de l'environnement par un alinéa ainsi rédigé :
« Avant le début d'une utilisation confinée, l'autorité administrative s'assure qu'un plan de prévention des risques est établi dans le cas où une défaillance des mesures de confinement pourrait entraîner un danger grave, immédiat ou différé, pour les personnes se trouvant en dehors du site et/ou pour l'environnement. Les informations concernant ce plan de prévention des risques sont rendues publiques.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Cet amendement a trait au régime d'agrément préalable à toute utilisation confinée d'OGM.
Il a pour objet de mettre en conformité la rédaction proposée par l'article 7 du projet de loi avec l'article 14 de la directive 98/81/CE qui concerne les mesures que doivent préalablement prendre les autorités avant toute utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés.
Ainsi, conformément à l'article 14 de la directive, les autorités compétentes doivent s'assurer qu'un plan d'urgence est établi pour les utilisations confinées dans les cas où une défaillance des mesures de confinement pourrait entraîner un danger grave, immédiat ou différé, pour les personnes se trouvant en dehors du site et/ou pour l'environnement, sauf si un plan d'urgence a été établi en application d'un autre acte communautaire.
Or, à ce plan d'urgence, qui renvoie aux législations afférentes au plan ORSEC départemental, maritime ou de zone, nous souhaiterions substituer, sur le modèle de la loi du 2 février 1995, qui complétait la loi du 22 juillet 1987, un plan de prévention des risques.
La mise en oeuvre de ce dernier nous semble en effet essentielle à plusieurs titres. Elle garantit qu'en cas de défaillance une analyse scientifique détaillée est effectuée et qu'une évaluation de l'importance des effets prévisibles est envisagée, de même qu'une analyse des enjeux en termes de sécurité et d'aménagement.
Ces documents doivent pouvoir donner lieu à une concertation avec les différents partenaires locaux, ce qui pourrait constituer la matrice de la réflexion qui aboutira au plan de prévention des risques.
Les informations concernant ce plan, conformément au b) de l'article 14 de la directive, y compris les mesures de sécurité pertinentes à mettre en oeuvre, seront donc communiquées de manière appropriée aux organismes et autorités susceptibles d'être affectés par l'accident, sans qu'ils doivent en faire la demande.
Par ailleurs, ces informations seront périodiquement mises à jour, rendues publiques, et, simultanément, portées à la connaissance des autres États membres de l'Union européenne intéressés.
L'amendement n° 86 tend donc à garantir que des mesures adéquates seront effectivement prévues et pourront être prises en cas de défaillance des mesures de confinement.
Une telle disposition nous semble tout à fait essentielle tant au regard des catastrophes naturelles qui peuvent malheureusement survenir - telles que la tempête de décembre 1999 - qu'au regard des risques encourus par nos concitoyens et par l'environnement.
Notre proposition participe pleinement de la mise en oeuvre du principe constitutionnel de précaution.
M. le président. L'amendement n° 159, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene- Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532- 3 du code de l'environnement par un alinéa ainsi rédigé :
« Avant le début d'une utilisation confinée, l'autorité administrative s'assure qu'un plan d'urgence est établi dans les cas où une défaillance des mesures de confinement pourrait entraîner un danger grave, immédiat ou différé, pour les personnes se trouvant en dehors du site et/ou pour l'environnement. Les informations concernant les plans d'urgence sont rendues publiques.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Comme vient de le dire mon collègue Pierre-Yvon Trémel, cet amendement a pour objet de mettre le projet de loi en conformité avec l'article 14 de la directive 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés et selon laquelle un plan d'urgence doit être établi en cas de danger survenant du fait d'une défaillance des mesures de confinement.
La dissémination des OGM présente, en effet, des risques potentiellement graves à la fois pour la santé humaine et pour l'environnement. Dès lors, il nous paraît essentiel que des mesures d'urgence soient prévues pour contrôler de telles dérives.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. En ce qui concerne l'amendement n° 86, qui tend à compléter le II du texte proposé par l'article 7 pour l'article L.532- 3 du code de l'environnement, je rappellerai que l'agrément délivré en vue d'une utilisation confinée d'OGM est d'ores et déjà subordonné au respect de prescriptions techniques définissant, notamment, « les moyens d'intervention en cas de sinistre ».
L'article 14 de la directive 90/219/CEE est donc bien transposé dans le projet de loi. Des mesures d'urgence sont prévues pour contrôler les éventuels dangers que pourrait présenter une utilisation confinée d'OGM. Cela devrait être de nature à satisfaire nos collègues, dont la préoccupation est, je le reconnais, légitime.
S'agissant de l'amendement n° 159, la notion de plan d'urgence retenue par ses auteurs est plus fidèle à l'article 14 de la directive que celle de plan de prévention des risques. Toutefois, comme je l'ai souligné précédemment, le projet de loi prévoit déjà que l'agrément doit être assorti de la définition des moyens d'intervention en cas de sinistre.
La commission estime que ces deux amendements sont déjà satisfaits et elle émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements pour les raisons que vient d'indiquer M. le rapporteur.
J'ajoute que le Gouvernement a l'intention de préciser et de compléter, par la voie réglementaire, les dispositions législatives afin de doter ces installations d'un plan d'urgence permettant aux autorités de faire face à toute hypothèse d'accident, quel qu'il soit.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, vous auriez pu m'objecter que ces dispositions relevaient du domaine réglementaire dès lors que le III du texte proposé par l'article 7 renvoie à un décret d'application.
Cela étant, je constate que la moindre installation destinée à accueillir du public doit faire l'objet d'une visite destinée à vérifier qu'un plan d'urgence est bien établi, que tous les équipements fonctionnent, que toutes les normes de sécurité ont été respectées... Les élus connaissent bien ces obligations et savent avec quel goût du détail les membres des commissions de sécurité les font appliquer ; les pompiers, en particulier, se montrent très zélés dans l'exercice de leur mission.
Je trouve étonnant que ce projet de loi ne prévoit pas une visite de sécurité avant toute mise en service d'une installation, afin de vérifier que toutes les prescriptions ont été respectées et, surtout, qu'il existe un plan définissant les mesures à suivre en cas d'urgence.
Je suis prêt à me rallier au texte proposé par l'amendement n° 159, dont la rédaction est d'ailleurs plus conforme à l'article 14 de la directive. Toutefois, il serait anormal de ne pas prévoir une telle mesure s'agissant d'un milieu confiné. Le risque est en effet réel pour l'environnement en cas de défaillance du confinement.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le sénateur, je souhaite vous rassurer : les dispositions réglementaires qui seront édictées seront très rigoureuses, et certainement davantage que le régime de droit commun qui s'applique aux établissements recevant du public.
Convenez que les risques sont ici d'une autre nature et que les personnes habilitées à les mesurer et à vérifier que toutes les mesures adéquates ont été prises ne sont pas exactement les mêmes.
Les uns et les autres, nous connaissons les commissions de sécurité. Nous savons qu'elles sont tout à fait adaptées dans les collectivités locales. En l'occurrence, nous avons besoin d'un autre genre de spécialistes.
M. le président. Monsieur Raoul, l'amendement n° 86 est-il maintenu ?
M. Daniel Raoul. Non, je le retire, monsieur le président, au profit de l'amendement n° 159. L'amendement n° 86 constituait un amendement d'appel, et les propos tenus par M. le ministre nous ont rassurés.
M. le président. L'amendement n° 86 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 159.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 19, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement :
« III.- Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application du présent article. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement tend à donner au décret en Conseil d'État qui est prévu à l'article 7 la portée générale qui lui revient.
Le projet de loi ne précise pas que le délai maximal d'instruction de la demande d'agrément sera fixé par le décret en Conseil d'État. Or le respect de ce délai, qui est prévu dans la directive, contribue à l'égalité des conditions de concurrence entre les États membres de l'Union européenne, et constitue donc un élément fondamental du dispositif.
La formulation générale qui a été retenue ne doit pas empêcher l'administration de veiller à la conformité du décret avec l'article 19 de la directive 90/219/CEE, relatif à la confidentialité de certaines informations données par l'exploitant, afin de répondre expressément aux exigences de l'arrêt en manquement rendu par la Cour de justice des communautés européennes le 27 novembre 2003.
M. le président. L'amendement n° 121, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement, supprimer les mots :
, les cas dans lesquels une simple déclaration suffit
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement a déjà été défendu. Il s'inscrit dans la même logique que nos précédents amendements.
M. le président. L'amendement n° 122, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-3 du code de l'environnement, supprimer les mots :
et les modalités selon lesquelles l'exploitant fait connaître les informations qu'il estime confidentielles
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement vise à obliger les exploitants à faire preuve de la plus grande transparence. À tout moment, le Haut conseil des biotechnologies doit pouvoir disposer de la totalité des informations relatives à la nature des essais réalisés.
Ce texte s'inscrit également dans la lignée de nos amendements précédents, au travers desquels nous avons souligné qu'une simple déclaration ne pouvait suffire à réaliser des opérations d'utilisation confinée des OGM.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 121 et 122 ?
M. Jean Bizet, rapporteur. L'amendement n° 121 ne fait que tirer les conséquences de l'amendement n° 119 présenté par les mêmes auteurs, qui refusait tout régime déclaratif pour les utilisations confinées d'OGM. En effet, aux termes de l'amendement n° 121, le décret d'application ne préciserait plus les cas où une simple déclaration suffit. La commission émet donc un avis défavorable.
La commission émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 122, qui est contraire à la directive.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Il m'arrive fréquemment de rendre hommage à la qualité des rédactions proposées par le Sénat. Je le fais bien volontiers s'agissant de l'amendement n° 19, qui améliore la solidité juridique de l'article 7.
En ce qui concerne les amendements nos 121 et 122, pour les raisons exposées par M. le rapporteur, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je vous remercie, monsieur le ministre, de cet hommage rendu au travail du Sénat.
La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 19.
M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, vos déclarations d'intention, notamment en ce qui concerne le plan d'urgence, me confortent dans mon intention de voter l'amendement n° 19.
En fait, le dispositif prévu donnerait la priorité à des mesures qui nous semblent secondaires. Ce sont celles qui ont été évoquées par M. le ministre tout à l'heure qui sont prioritaires.
M. le président. Les amendements nos 121 et 122 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
L'article L. 532-4 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 532-4. - I. - Lorsque l'agrément pour l'utilisation confinée d'organismes génétiquement modifiés à des fins de recherche, de développement ou d'enseignement porte sur la première utilisation de tels organismes dans une installation, l'exploitant met à la disposition du public un dossier d'information.
« Ce dossier comporte toutes informations utiles, à l'exclusion des informations couvertes par le secret industriel et commercial ou protégées par la loi, ou dont la divulgation pourrait porter préjudice aux intérêts de l'exploitant. La liste des informations communiquées par l'exploitant qui ne peuvent pas rester confidentielles est fixée par décret en Conseil d'État.
« II. - Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas si l'agrément porte sur l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés ne présentant qu'un risque faible pour la santé publique ou l'environnement, conformément au classement mentionné à l'article L. 532-1. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 70 rectifié bis est présenté par Mme Férat, M. Zocchetto et les membres du groupe Union centriste - UDF.
L'amendement n° 161 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger comme suit le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-4 du code de l'environnement :
L'exploitant met à la disposition du public un dossier d'information.
La parole est à M. Daniel Soulage, pour présenter l'amendement n° 70 rectifié bis.
M. Daniel Soulage. Cet amendement tend à rappeler que le principe d'information du public ne saurait souffrir la moindre exception.
Si les OGM suscitent autant d'inquiétudes dans l'opinion publique, c'est également en raison du manque récurrent d'informations relatives à leurs effets sanitaires et environnementaux. En exigeant de l'exploitant qu'il mette à la disposition du public un dossier d'information, nous contribuerons à dissiper ce climat général de suspicion.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour défendre l'amendement n° 161.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à réaffirmer que le principe d'information du public, qui nous semble tout à fait essentiel, s'impose dans tous les cas.
Aujourd'hui, je vous le rappelle, le droit à l'information fait l'objet d'une véritable bataille, que nous, les écologistes, menons contre les firmes agroalimentaires, mais aussi, hélas, contre le Gouvernement.
En 2005, une étude nutritionnelle du maïs MON 863, restée secrète à la demande de l'entreprise Monsanto, a été rendue publique à la suite de la décision d'un tribunal allemand.
Le lot de rats qui consommait ce type de maïs présentait des anomalies évoquant des pathologies de type inflammatoire, telles que l'inflammation des reins, l'augmentation du nombre de globules blancs chez les mâles, la baisse de nombre de globules rouges et l'augmentation de la glycémie chez les femelles.
La firme productrice Monsanto et l'EFSA ont expliqué ces symptômes par « une variabilité biologique naturelle », ce qui ne résiste pas à l'analyse et rendrait nécessaire, pour le moins, la poursuite des recherches. Or celle-ci se trouve pour l'instant refusée.
Souvenez-vous de cette triste note rédigée par les autorités françaises, l'an dernier, qui demandaient à la Commission européenne de garder confidentielles certaines informations liées à la toxicité des maïs BT 11 en France et MON 863 en Allemagne, au motif qu'elles seraient « susceptibles d'entacher la confiance de l'opinion publique dans le processus de gestion du risque, mais également de nuire à la position concurrentielle de l'entreprise ».
Vous le voyez, le droit à l'information fait l'objet d'une véritable bagarre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Le projet de loi prévoit que la mise à la disposition du public d'un dossier d'information n'est requise que lorsqu'il s'agit de la première utilisation confinée d'un OGM, conformément à l'article 7 de la directive 90/219/CEE, qui se trouve ici strictement transposée. Le souci de transparence n'est donc pas sacrifié, loin s'en faut.
Ces deux amendements identiques n'étant pas conformes à la directive, la commission ne peut émettre qu'un avis défavorable.
Madame Boumediene-Thiery, je profite de l'occasion pour vous signaler, puisque vous ne vous trouviez pas en séance hier soir, que M. le ministre a répondu à plusieurs reprises à votre collègue Jean Desessard à propos de l'affaire dont vous venez de vous faire l'écho. Vous vous êtes inspirée de la lecture de quotidiens du soir qui, certes, sont passionnants, mais qui ne jouissent pas d'une autorité scientifique très affirmée. Dispensez-nous donc de telles références au cours de ces débats, parce que la réponse sera toujours la même.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur les amendements identiques nos 70 rectifié bis et 161, pour les raisons que vient d'énoncer M. le rapporteur.
Je rappelle que l'article 8 du projet de loi porte sur les essais en milieu confiné, lesquels seront nombreux et donneront lieu au dépôt de bien des dossiers d'autorisation. Il convient de ne pas alourdir inutilement des procédures destinées avant tout aux chercheurs.
S'agissant des rats auxquels vous avez fait allusion, madame la sénatrice, il convient, s'agissant de conclusions scientifiques, de se référer autant que possible à des revues qui sont dotées d'un comité de lecture et qui jouissent d'une réputation bien établie au sein de la communauté internationale. C'est en effet la meilleure façon de ne pas bâtir des raisonnements sur des faits qui, par la suite, se révèlent entièrement faux.
Du reste, selon les informations dont je dispose sur ces malheureux rats, c'est leur lignée qui était en cause, et non pas leur alimentation. Efforçons-nous de débattre à partir de faits et de données établies, plutôt que de supputations.
M. le président. Monsieur Soulage, l'amendement n° 70 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Daniel Soulage. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 70 rectifié bis est retiré.
Madame Boumediene-Thiery, l'amendement n° 161 est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 20 rectifié, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-4 du code de l'environnement:
« Ce dossier comporte toutes informations utiles, qui ne sont pas protégées par la loi. La liste des informations qui ont un caractère public est fixée par décret en Conseil d'État.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement vise à rendre la plus transparente possible l'information mise à la disposition du public par l'exploitant qui sollicite un agrément pour une première utilisation confinée d'OGM à des fins de recherche, de développement ou d'enseignement.
D'une part, il tend à établir une liste positive des informations à publier, la rédaction du projet de loi pouvant laisser croire que le secret est la règle et la publicité l'exception.
D'autre part, il vise à exclure du dossier uniquement les informations protégées par la loi, cette formulation générale étant appelée à se voir précisée par décret, afin que la directive communautaire soit fidèlement transposée.
M. le président. L'amendement n° 123, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-4 du code de l'environnement :
« Ce dossier comporte toutes les informations dont dispose l'exploitant. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Par cet amendement, nous voulons établir un système d'information qui garantisse une transparence totale. Il s'agit de satisfaire les attentes de la population, qui, compte tenu de ses inquiétudes, parfois justifiées, souhaite être informée en permanence sur les OGM.
Le Haut conseil des biotechnologies doit lui aussi jouer son rôle d'information et diffuser toutes les informations existantes concernant l'exploitation, ce qui permettra, par ce biais, d'informer la population.
Vous l'aurez compris, nous sommes opposés à la notion d'informations couvertes par le secret professionnel et commercial. À nos yeux, aucune information concernant les OGM ne doit rester confidentielle. Dans le cas contraire, nous ne réussirons pas à développer un sentiment de confiance dans la population. Cela va sans dire, cette confiance a déjà été trahie plus d'une fois.
L'exemple du refus de Monsanto, il y a quelque temps, de rendre publiques les informations concernant des essais sur les rats prouve à quel point il nous faut rester vigilants, même si le fait d'utiliser des rats ne constitue pas, a priori, la meilleure façon de procéder dans ce domaine.
Cet amendement vise non pas à rendre les exploitants plus vulnérables devant leurs concurrents, mais simplement à les obliger à rester honnêtes et respectueux de la santé publique et de l'environnement.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 71 rectifié bis est présenté par Mme Férat, M. Zocchetto et les membres du groupe Union centriste - UDF.
L'amendement n° 162 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
À la fin de la première phrase du second alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-4 du code de l'environnement, supprimer les mots :
, ou dont la divulgation pourrait porter préjudice aux intérêts de l'exploitant
La parole est à M. Daniel Soulage, pour présenter l'amendement n° 71 rectifié bis.
M. Daniel Soulage. Ainsi que nous l'avons précisé dans l'un des amendements portant sur l'article 3 de ce projet de loi, nous ne souhaitons pas que le besoin d'information porte atteinte au secret industriel ou commercial. En revanche, nous ne pouvons pas non plus admettre que le risque de porter préjudice aux intérêts de l'exploitant puisse être invoqué pour justifier la rétention d'informations vis-à-vis du public.
C'est pourquoi nous vous proposons une rédaction excluant une protection excessive de l'exploitant. Cet amendement va dans le sens d'une transparence accrue sur la question de l'agrément délivré lors d'une utilisation confinée d'organismes génétiquement modifiés.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 162.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le ministre, cet amendement concerne encore et toujours le droit à l'information. Je vous l'accorde, les rapports rédigés par des spécialistes ont leur importance. Malgré tout, le respect de la transparence et le droit à l'information du public nécessitent un effort de vulgarisation et la presse a un rôle à jouer en la matière.
Notre amendement a donc pour objet de rappeler qu'en aucun cas les intérêts de l'exploitant ne peuvent justifier la rétention d'informations vis-à-vis du public. Il n'est pas acceptable qu'un texte de loi fasse ouvertement prévaloir des intérêts privés sur le droit à l'information du public, surtout dans des domaines concernant la protection de la santé publique et de l'environnement.
La rédaction retenue pour cet article, qui permet de rendre confidentielles les informations « dont la divulgation pourrait porter préjudice aux intérêts de l'exploitant », est vraiment choquante.
Mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité, vous n'avez cessé de vous interroger sur les raisons de la méfiance de l'opinion publique à propos des OGM. Contrairement à ce que vous pensez, cette méfiance n'est absolument pas irrationnelle. Avec une telle rédaction, vous leur donnez d'ailleurs raison.
La méfiance de la population à l'égard de ses représentants politiques ou des entreprises est tout à fait justifiée. Les pouvoirs politiques ou économiques ont parfois intérêt à cacher des informations qui leur seraient préjudiciables, que ce soit à propos des dangers de l'amiante, ou du nuage de déchets radioactifs de Tchernobyl, qui s'était prétendument arrêté à nos frontières.
Avec de tels articles de loi, on s'aperçoit que la culture du secret est toujours légitime, même quand des risques toxicologiques et environnementaux mettent manifestement en jeu la santé de nos concitoyens.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. En ce qui concerne l'amendement n° 123 présenté par notre collègue Gérard Le Cam, la transparence de l'information est souhaitable et certainement décisive pour contribuer à la connaissance et à l'acceptation sociétale des biotechnologies. Toutefois, au nom du respect de ce principe, il ne saurait être question de déroger aux dispositions légales existantes protégeant le secret de certaines informations, pour des motifs incontestablement légitimes, qu'il s'agisse du secret de la vie privée, du secret industriel et commercial ou du secret défense.
La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 123.
S'agissant des amendements identiques nos 71 rectifié bis et 162, c'est la directive elle-même, plus précisément son article 19, qui permet de tenir confidentielles certaines informations dont la divulgation pourrait porter préjudice aux intérêts de l'exploitant. Toutefois, d'autres raisons sont admises et d'autres motifs légitimes pourraient être listés.
Pour éviter toute omission, la commission préfère une rédaction plus large. Dans l'amendement n° 20 rectifié, elle propose donc tout simplement d'exclure du dossier mis à la disposition du public les informations protégées par la loi et de renvoyer à un décret le soin de fixer les informations qui ont nécessairement un caractère public.
Par conséquent, je demande à nos collègues Daniel Soulage et Alima Boumediene-Thiery de bien vouloir retirer leurs amendements, puisqu'ils sont satisfaits par l'amendement n° 20 rectifié.
M. le président. La parole est M. Daniel Soulage.
M. Daniel Soulage. Monsieur le président, si notre demande est effectivement prise en compte, je n'ai pas de raison de maintenir cet amendement. Comme je fais confiance à M. le rapporteur et à M. le ministre, je le retire.
M. François Goulard, ministre délégué. À ce stade de notre débat, je souhaite apporter un certain nombre de précisions sur ce qu'implique la transparence de l'information pour le sujet qui nous occupe, car c'est en effet un point fondamental. Chacun en convient, cette transparence est absolument nécessaire : le grand public exprime une telle réticence à l'encontre des OGM que le devoir d'information à son égard est véritablement impératif.
Nous devons donc agir, mais dans le cadre fixé par nos lois et, en particulier, par notre Constitution. En effet, en matière de protection des libertés, notre loi fondamentale impose la protection de certaines informations. Ainsi, le juge constitutionnel considère que la propriété intellectuelle ou industrielle ainsi que certains aspects du secret commercial doivent être respectés, y compris par la loi.
Nous devons donc combiner cette exigence de protection et notre volonté de permettre au grand public d'accéder le plus largement possible à toute l'information nécessaire.
Dans la rédaction initiale du projet de loi, nous avions prévu de nous référer très explicitement au texte de la directive pour préciser les informations qui pouvaient faire l'objet de restrictions. Mais le Conseil d'État nous a recommandé le renvoi au décret.
Par l'amendement n° 20 rectifié, la commission propose que ce décret fixe la liste des informations « qui ont un caractère public ». Je le reconnais, la rédaction « positive » de la commission est préférable à la rédaction « négative » que nous avions initialement prévue.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur ledit amendement. En conséquence, il ne peut qu'être défavorable aux amendements nos 123 et 162.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je permets d'insister sur le contenu du décret prévu dans l'amendement n° 20 rectifié, qui nécessite, en effet, d'être très clairement précisé : il comportera des dispositions interdisant d'opposer le secret commercial et industriel à la diffusion de toutes données intéressant soit la santé humaine, soit la protection de l'environnement.
En d'autres termes, si la loi et la Constitution nous imposent de respecter certaines informations confidentielles, s'agissant notamment de la propriété intellectuelle, il nous faut en même temps affirmer très clairement qu'il est totalement exclu que de telles clauses de secret ou de confidentialité empêchent le public de disposer de toutes les informations qui, d'une manière ou d'une autre, auraient des conséquences sur la santé humaine ou sur l'environnement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il n'y aura pas de rétention de l'information pour ce qui concerne la santé humaine et l'environnement ! Vous trouverez peut-être que j'insiste, mais ce point me semble fondamental.
M. Gérard César. Il faut le répéter !
M. François Goulard, ministre délégué. Le texte réglementaire souhaité par le Conseil d'État sera, à cet égard, d'une clarté totale.
M. Gérard Dériot. Très bien !
M. Henri de Raincourt. Nous voilà rassurés !
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote sur l'amendement n° 20 rectifié.
M. Rémy Pointereau. À propos de la santé humaine et des effets nocifs éventuels des OGM, notre principale préoccupation est de rassurer les consommateurs, en contribuant à combler leur manque d'information et en garantissant la fiabilité des essais.
À ce titre, il serait peut-être intéressant de définir un protocole identique pour des cultures traditionnelles, des cultures biologiques et des cultures d'OGM, en prévoyant une expérimentation sur une période suffisamment longue pour nous permettre, à son terme, d'identifier les problèmes rencontrés dans ces trois filières. Le ministère de la recherche pourrait prendre l'initiative de préparer un cahier des charges en ce sens.
Finalement, un tel dispositif permettrait de rassurer les consommateurs. Cette expérimentation pourrait donner des résultats pour le moins surprenants.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le sénateur, l'article 8 porte sur des essais confinés et non pas sur ce que le grand public considère comme étant le sujet principal, c'est-à-dire les essais en plein champ.
Pour autant, je partage votre préoccupation. L'une des tâches dévolues au Haut conseil des biotechnologies sera précisément de rendre les informations accessibles au grand public. C'est avec des idées comme celle que vous venez d'exprimer que nous pourrons contribuer non pas à rassurer, parce qu'au fond il ne s'agit pas de cela, mais à informer clairement, honnêtement, scientifiquement le public sur les effets supposés, réels, attendus ou à attendre de tel ou tel organisme génétiquement modifié.
Il faut éviter tout a priori. Il reviendra au Haut conseil des biotechnologies et aux pouvoirs publics d'assurer, dans la plus complète transparence, l'accès du grand public à toutes les informations utiles, pour lui permettre de se faire une opinion.
M. Rémy Pointereau. Très bien !
M. le président. En conséquence, les amendements nos 123 et 162 n'ont plus d'objet.
Mes chers collègues, compte tenu de la réunion de la conférence des présidents, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
M. le président. Mes chers collègues, la conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
JEUDI 23 MARS 2006
Ordre du jour prioritaire
À 9 heures 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir :
1°) Troisième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux offres publiques d'acquisition (n° 262, 2005-2006) ;
2°) Suite du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés (n° 200, 2005 2006).
MARDI 28 MARS 2006
Ordre du jour réservé
À 16 heures 30 et le soir :
1°) Question orale avec débat (n° 10) de M. Jean-Pierre Bel sur le bilan des violences urbaines et la situation dans les banlieues ;
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au Service de la Séance, avant 17 heures, le lundi 27 mars 2006) ;
2°) Débat sur le rapport d'information de M. Claude Belot sur le développement des télévisions de proximité en France (n° 417, 2004 2005) ;
(Dans le débat interviendront :
- le rapporteur spécial de la commission des finances et le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (quinze minutes) ;
- les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
- ainsi que le Gouvernement ;
La conférence des présidents a fixé :
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 27 mars 2006) ;
3°) Conclusions de la commission des affaires culturelles (n° 265, 2005 2006) sur la proposition de loi de MM. Ivan Renar, Jacques Valade et plusieurs de leurs collègues, modifiant le code général des collectivités territoriales et la loi n° 2002-6 du 4 janvier 2002 relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle (n° 224, 2005 2006) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 27 mars 2006, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 27 mars 2006).
MERCREDI 29 MARS 2006
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
1°) Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection du Président de la République (n° 271, 2005-2006) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 28 mars 2006, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 28 mars 2006) ;
2°) Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative au droit de préemption et à la protection des locataires en cas de vente d'un immeuble (n° 137, 2005-2006) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 28 mars 2006, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 28 mars 2006).
JEUDI 30 MARS 2006
À 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire
1°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005 relative à la garantie de la conformité du bien au contrat due par le vendeur au consommateur (AN, n° 2293) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 28 mars 2006, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 29 mars 2006) ;
2°) Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant engagement national pour le logement (n° 188, 2005-2006) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 28 mars 2006, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 29 mars 2006) ;
À 15 heures et le soir :
3°) Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
4°) Communication de M. Jean-Paul Delevoye, Médiateur de la République, sur son rapport annuel, en application de la loi n° 2000-23 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;
Ordre du jour prioritaire
5°) Suite de l'ordre du jour du matin.
MARDI 4 AVRIL 2006
À 10 heures :
1°) Dix-sept questions orales :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 872 de M. Claude Biwer à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Prise en charge des personnes âgées dépendantes) ;
- n° 951 de M. Claude Domeizel à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ;
(Rationalisation de la gestion des aides par la CPAM des Alpes de Haute Provence) ;
- n° 957 de Mme Jacqueline Alquier à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;
(Intempéries dans la vallée du Thoré les 28 et 29 janvier 2006) ;
- n° 959 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Problèmes liés aux droits à paiement unique) ;
- n° 960 de M. Hubert Haenel à M. le Garde des Sceaux, ministre de la justice ;
(Réforme du Conseil supérieur de la magistrature) ;
- n° 962 de M. Richard Yung à Mme la ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie ;
(Situation des Français rapatriés de Côte d'Ivoire) ;
- n° 975 de Mme Hélène Luc à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
(Devenir des zones d'éducation prioritaire) ;
- n° 976 de M. Bernard Piras à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales ;
(Applications de l'article L. 2122-22 4° du code général des collectivités territoriales) ;
- n° 978 de Mme Alima Boumediene-Thiery à M. le Garde des Sceaux, ministre de la justice ;
(Indépendance de la justice et liberté d'expression des magistrats) ;
- n° 980 de M. Francis Grignon à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
(Réglementations européennes et distorsions de concurrence) ;
- n° 981 de Mme Marie-Thérèse Hermange à M. le ministre des affaires étrangères ;
(Partenariat entre l'État et les ONG dans le cadre de la réforme de la coopération internationale) ;
- n° 982 de M. Gilbert Barbier à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;
(Réalisation du TGV-Rhin-Rhône) ;
- n° 983 de M. Louis Souvet à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales ;
(Situation des communes placées en fusion association) ;
- n° 987 de M. André Rouvière à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
(Contribution des communes aux dépenses des écoles privées) ;
- n° 994 de Mme Anne-Marie Payet à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Fermeture du centre de documentation de Marmottan);
- n° 997 de M. Jean-Pierre Godefroy à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
(Garantie d'État pour les commandes de navires civils) ;
- n° 998 de Mme Gisèle Printz à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ;
(Entreprises adaptées et chômage des personnes handicapées).
Ordre du jour prioritaire
À 16 heures et le soir :
2°) Suite de la deuxième lecture du projet de loi portant engagement national pour le logement.
MERCREDI 5 AVRIL 2006
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
- Suite de la deuxième lecture du projet de loi portant engagement national pour le logement.
JEUDI 6 AVRIL 2006
Ordre du jour prioritaire
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite de la deuxième lecture du projet de loi portant engagement national pour le logement.
MARDI 11 AVRIL 2006
À 10 heures :
1°) Douze questions orales :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 948 de M. Roger Madec à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;
(Répartition du nombre des conseillers de Paris entre les arrondissements) ;
- n° 952 de M. Bernard Cazeau à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Demande d'IGP Volailles du Sud-Ouest) ;
- n° 971 de M. Jean-Marc Pastor à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Situation des sociétés d'aménagement régional) ;
- n° 977 de M. Thierry Foucaud à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
(Place de l'enseignement EPS et avenir des étudiants en STAPS) ;
- n° 984 de M. Raymond Courrière à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
(Enfouissement des lignes électriques) ;
- n° 985 de M. Michel Mercier à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales ;
(Compétence voirie des communautés de communes) ;
- n° 989 de M. François Marc à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Financement de la prise en charge des personnes vulnérables) ;
- n° 990 de M. Jean-Paul Amoudry à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
(Compétences des conseils généraux en matière d'accueil des élèves dans les collèges) ;
- n° 991 de M. Richard Yung à M. le ministre des affaires étrangères ;
(Mauvaise application de la loi n° 2005 843 du 26 juillet 2005 par le ministère des Affaires étrangères) ;
- n° 999 de Mme Nicole Bricq à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement ;
(Réduction de l'enveloppe budgétaire d'aide au logement temporaire) ;
- n° 1000 de Mme Muguette Dini à M. le Garde des Sceaux, ministre de la justice ;
(Maintien des relations enfants-parents dans les cas de séparations familiales conflictuelles) ;
- n° 1001 de M. Gérard Delfau à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
(Situation des directeurs d'école du premier degré).
Ordre du jour prioritaire
À 16 heures et le soir :
2°) Suite de la deuxième lecture du projet de loi portant engagement national pour le logement.
MERCREDI 12 AVRIL 2006
Ordre du jour réservé
À 15 heures et le soir :
1°) Question orale avec débat (n° 12) de M. Gérard César à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la crise de la filière viticole française ;
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 11 avril 2006) ;
2°) Question orale avec débat (n° 4) de M. Dominique Mortemousque à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les conséquences économiques de l'épidémie de grippe aviaire sur la filière avicole ;
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
La conférence des présidents a accordé un temps de parole de 15 minutes au rapporteur spécial de la commission des finances pour la mission « Sécurité sanitaire ».
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 11 avril 2006) ;
3°) Question orale avec débat (n° 15) de M. Jean Puech à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales sur les difficultés éprouvées par les collectivités territoriales dans l'accès aux informations ;
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 11 avril 2006) ;
4°) Question orale avec débat (n° 16) de M. Guy Fischer à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur les conditions de transfert du revenu minimum d'insertion aux départements ;
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 11 avril 2006).
JEUDI 13 AVRIL 2006
À 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire
1°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne visant à compléter la liste des établissements culturels et d'enseignement auxquels s'appliquent les dispositions de la convention culturelle du 4 novembre 1949 et de l'accord par échange de lettres du 9 novembre et du 6 décembre 1954 relatif aux exemptions fiscales en faveur des établissements culturels (n° 389, 2004-2005) ;
2°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Agence spatiale européenne relatif au Centre spatial guyanais (ensemble trois annexes) (n° 41, 2005-2006) ;
3°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Agence spatiale européenne relatif aux ensembles de lancement et aux installations associées de l'agence au Centre spatial guyanais (ensemble trois annexes) (n° 42, 2005-2006) ;
(La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune) ;
4°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord de siège entre le Gouvernement de la République française et la Communauté du Pacifique (n° 39, 2005-2006) ;
5°) Projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République azerbaïdjanaise pour la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières (n° 130, 2005-2006) ;
6°) Projet de loi autorisant l'adhésion à la convention internationale sur le contrôle des systèmes antisalissure nuisibles sur les navires (ensemble quatre annexes et deux appendices), adoptée à Londres le 5 octobre 2001 (n° 156, 2005-2006) ;
7°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du protocole n° 14 à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, amendant le système de contrôle de la convention (n° 221, 2005-2006) ;
8°) Éventuellement, suite de la deuxième lecture du projet de loi portant engagement national pour le logement ;
À 15 heures :
9°) Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
10°) Éventuellement, suite de l'ordre du jour du matin.
En application de l'article 28 de la Constitution et de l'article 32 bis, alinéa 1, du règlement, le Sénat a décidé de suspendre ses travaux en séance plénière du dimanche 16 avril 2006 au dimanche 30 avril 2006.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Ces propositions sont adoptées.
5
Organismes génétiquement modifiés
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés.
Article 8 (suite)
M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 8, aux amendements identiques nos 88 et 164.
L'amendement n° 88 est présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe socialiste.
L'amendement n° 164 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-4 du code de l'environnement.
La parole est à M. Paul Raoult
M. Paul Raoult. Cet amendement tend à imposer la mise à disposition du public par l'exploitant d'un dossier d'information, quel que soit le risque que présente l'utilisation d'OGM.
En effet, même dans un environnement confiné, les OGM, comme le prouve une série d'études de l'INRA, mais également d'autres instituts de recherche, constituent des produits dont nous n'avons pas encore sérié l'ensemble des conséquences.
À titre d'exemple, un récent rapport de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA, intitulé OGM et alimentation : peut-on identifier et évaluer des bénéfices pour la santé ? , qui concerne l'analyse de deux OGM sur le marché ou en passe de l'être, et de deux OGM en cours d'évaluation, estimait qu' « à ce jour, aucun problème de santé, qu'il s'agisse de toxicité ou d'allergénicité, n'a pu être spécifiquement attribué à un OGM mis sur le marché. Cela n'exclut pas qu'il puisse exister un risque, mais aujourd'hui celui-ci ne peut être précisément identifié, ni a fortiori quantifié ».
Or la rédaction du II de l'article 8 est surprenante. En effet, la culture d'OGM pourrait être acceptée dès lors qu'elle ne présenterait qu'un risque faible pour la santé humaine ou l'environnement.
On ne peut que s'interroger sur la portée du terme « faible ». Ainsi, en matière de santé humaine, à quoi correspond la faiblesse invoquée ? A-t-elle trait aux pathologies et allergies qui pourraient survenir à la suite d'un contact, d'une consommation ou d'une inspiration ? Ou bien ce qualificatif renvoie-t-il au nombre de nos concitoyens qui pourraient avoir à subir des dommages dus aux OGM ?
De plus, comment pouvons-nous considérer que les effets sont faibles dès lors que nous ignorons s'il existe ou non un degré de latence pour certaines allergies, voire pathologies ?
Cette logique vaut-elle également pour ce qui est de l'environnement ? Comment mesurer un impact faible ? Sur quoi se fonde la rédaction qui nous est proposée ? Est-ce un impact à l'échelle d'une existence humaine, ou bien au regard du bien commun que constitue notre environnement et que nous laisserons en héritage aux générations futures ?
Est-ce au regard d'une territorialité précise ou bien d'une espèce végétale ou animale définie que se fonde ce qualificatif ? Nous l'ignorons !
Parce que nous avons le devoir de tout mettre en oeuvre pour sécuriser ces cultures, nous estimons qu'actuellement aucune certitude n'existe concernant la présence d'un risque faible pour la santé publique ou l'environnement.
Il est donc nécessaire d'appliquer le principe de précaution. Celui-ci se fonde sur le critère d'incertitude, souvent considéré comme fondamental, pour distinguer la précaution de la prévention. Cette incertitude peut porter sur les causes du dommage, sur son étendue ou sur les deux aspects à la fois.
La prévention, quant à elle, touche à des risques avérés dont seule la réalisation est aléatoire. En matière d'environnement, par exemple, le principe 15 de la déclaration de Rio de juin 1992 dispose : « Pour protéger l'environnement, des mesures de précaution doivent être largement appliquées par les États selon leurs capacités. En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l'environnement ».
En outre, au nom de la prépondérance des intérêts de la population, il nous semble inadmissible que l'on puisse considérer et accepter d'emblée l'idée qu'une production d'OGM aura un effet, même faible, sur la santé humaine et sur l'environnement.
En effet, l'état de nos connaissances est largement insuffisant pour pouvoir porter un jugement certain sur le degré de nocivité qu'une production d'OGM pourrait avoir à terme, alors même que les critères de classement des OGM utilisés dans un cadre confiné sont déterminés par décret, après avis du conseil des biotechnologies, tel que le précise le nouvel article L. 532-1 du code de l'environnement instauré par l'article 4 du projet de loi.
Aussi, nous considérons que l'agrément dont pourrait bénéficier un utilisateur doit, dans tous les cas, donner lieu à la publication d'un dossier d'information, comme prévu dans le premier alinéa du présent article. Ce dossier devra contenir les informations évoquées dans la directive 98/81/CE, et notamment dans les annexes 2 et 3.
Il s'agit de l'application du principe de précaution et de la nécessaire transparence dans laquelle doivent s'inscrire la recherche, l'expérimentation et la culture des OGM.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 164.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement est un amendement de coordination avec l'amendement n° 15 ; il tend à prévoir que l'exploitant doit mettre à la disposition du public un dossier d'information.
Il s'agit d'une question très importante, car l'information du public est souvent sacrifiée sur l'autel du commerce.
Je tiens à votre disposition une note des autorités françaises du 19 septembre 2005 relative à la confidentialité des données, qui nous invite à être prudents en ce qui concerne l'évaluation des risques, car cela ne doit pas nuire à la position concurrentielle de la société. Or, en matière d'évaluation des risques, la santé publique est beaucoup plus importante que les intérêts commerciaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur de la commission des affaires économiques. La commission est défavorable aux amendements identiques n°s 88 et 164, car il ne serait pas cohérent, alors même qu'un assouplissement procédural permet à certaines utilisations peu risquées, pratiquées en milieu confiné, d'être dispensées d'agrément, de contraindre l'exploitant, pour ces mêmes utilisations, à mettre à la disposition du public un dossier d'information.
Par ailleurs, le doute des chercheurs fait partie de leur éthique.
Certes, le principe de précaution existe au travers de l'article 5, mais je vous renvoie à l'article 8 relatif à la recherche et au développement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. Monsieur le sénateur, nous parlons d'essais en milieu confiné destinés à la recherche. Votre propos, d'ordre très général, était donc assez éloigné du sujet que nous traitons. Nous en avons déjà très largement débattu à l'occasion de l'examen d'amendements voisins ; les arguments sont évidemment les mêmes.
Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements identiques n°s 88 et 164.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 88 et 164.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 72 rectifié bis, présenté par Mme Férat, M. Zocchetto et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 532-4 du code de l'environnement par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - En aucun cas, les informations ci-après ne peuvent demeurer confidentielles lorsqu'elles ont été fournies conformément aux articles 7, 9 ou 10 de la directive 98/81/CE du Conseil du 26 octobre 1998 modifiant la directive 90/219/CEE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés :
« - les caractéristiques générales des micro-organismes génétiquement modifiés, le nom et l'adresse du notifiant et le lieu d'utilisation ;
« - la classe de l'utilisation confinée et les mesures de confinement ;
« - l'évaluation des effets prévisibles, notamment des effets nocifs pour la santé humaine et l'environnement. »
La parole est à M. Daniel Soulage.
M. Daniel Soulage. La première phrase de l'exposé des motifs du présent texte apporte la précision suivante : « Le présent projet de loi porte, en premier lieu, transposition de la directive 98/81/CE du 26 octobre 1998 modifiant la directive 90/219/CEE du 23 avril 1990 relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés et de la directive 2001/18/CE relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement qui a abrogé, le 17 octobre 2002, la directive 90/220/CEE ayant le même objet ».
Or certaines des dispositions inhérentes à une meilleure information du public n'ont pas été reprises. Par cet amendement, il vous est donc proposé d'y remédier, en indiquant explicitement la liste des informations qui ne peuvent rester confidentielles, et ce conformément au 3. de l'article 19 de la directive 98/81/CE du 26 octobre 1998 relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés.
M. le président. L'amendement n° 87 rectifié, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 532-4 du code de l'environnement par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - En aucun cas, les informations ci-après ne peuvent rester confidentielles lorsqu'elles ont été fournies conformément aux articles 7, 9 ou 10 de la directive 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés (MGM) :
« - les caractéristiques générales des micro-organismes génétiquement modifiés, le nom et l'adresse du notifiant et le lieu d'utilisation ;
« - la classe de l'utilisation confinée et les mesures de confinement ;
« - l'évaluation des effets prévisibles, notamment des effets nocifs sur la santé humaine et l'environnement. »
La parole est à M. Paul Raoult.
M. Paul Raoult. L'article 8 vise à modifier l'article L. 532-4 du code de l'environnement, qui concerne l'information du public prévue en matière d'utilisation confinée.
Cette mise à disposition d'informations précises, notamment le nom de l'utilisateur, la formation du personnel, la description du site, la nature du travail accompli, la classe des utilisations confinées et l'évaluation des risques pour la santé humaine et l'environnement sont des éléments qui doivent nécessairement être portés à la connaissance de l'autorité compétente.
Elle participe du principe de précaution qui vise à garantir à l'homme, mais également à son environnement, une sécurité optimale.
Par cet amendement, nous entendons rappeler et préciser la liste des informations qui ne peuvent rester confidentielles, conformément au 3. de l'article 19 de la directive 98/81/CE relative à l'utilisation de micro-organismes génétiquement modifiés.
Ainsi, préalablement à l'obtention d'une première autorisation d'utilisation d'OGM en milieu confiné, l'utilisateur est tenu d'adresser aux autorités compétentes les informations relatives à l'utilisateur ou aux utilisateurs, aux responsables du contrôle et de la sécurité, à leur formation et à la qualification des personnes responsables, aux classes des utilisations confinées, à la nature du travail effectué et à l'évaluation des risques pour la santé humaine et l'environnement, conformément à la procédure définie à l'annexe III de la directive.
Il devra également fournir des informations sur la nature de l'OGM, mais également toutes les informations permettant d'établir un plan d'urgence ou, comme nous le souhaitons, un plan de prévention des risques.
Cet amendement entend par conséquent reprendre les dispositions contenues dans la directive 98/81/CE, qui apparaissent indispensables, préalablement à l'obtention d'un agrément pour cultiver les OGM en milieu confiné.
M. le président. L'amendement n° 163, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 532-4 du code de l'environnement par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - En aucun cas, les informations ci-après ne peuvent rester confidentielles lorsqu'elles ont été fournies conformément aux articles 7, 9 ou 10 de la directive 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés :
« - les caractéristiques générales des micro-organismes génétiquement modifiés, le nom et l'adresse du notifiant et le lieu d'utilisation ;
« - la classe de l'utilisation confinée et les mesures de confinement ;
« - l'évaluation des effets prévisibles, notamment des effets nocifs pour la santé humaine et l'environnement.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet de rappeler la liste des informations qui ne peuvent rester confidentielles, conformément au 3. de l'article 19 de la directive 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés.
Même si les utilisations de micro-organismes génétiquement modifiés sont pratiquées en milieu confiné, elles ne sont pas pour autant exonérées d'un minimum de transparence, notamment à propos de leurs caractéristiques et de leurs effets potentiels.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Ces trois amendements visent à expliciter la liste des informations contenues dans les dossiers d'agrément pour l'utilisation confinée d'OGM qui ne pourraient rester confidentielles.
L'article 8 du projet de loi renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de fixer la liste des informations communiquées par l'exploitant à cette fin.
Il est en effet logique de renvoyer le détail de cette liste au pouvoir réglementaire. C'est pourquoi, conformément aux articles 34 et 37 de la Constitution, la commission ne peut se déclarer favorable à ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Ces trois amendements très voisins appellent de la part du Gouvernement un avis défavorable, pour des raisons que j'ai largement développées précédemment.
Nous avons prévu de faire figurer dans un décret la liste des informations pour lesquelles aucun secret d'aucune sorte n'est opposable ; c'est l'avis du Conseil d'État qui nous a conduits à retenir ce dispositif.
Je réaffirme le principe selon lequel toutes les informations qui ont trait à la santé humaine et à l'environnement seront évidemment accessibles au public. Simplement, nous n'avons pas jugé opportun de reprendre un texte à peu près identique à celui de la directive. Une autre présentation juridique a été retenue, mais elle donnera toutes les garanties d'accès aux informations.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote sur l'amendement n° 72 rectifié bis
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, le sujet dont nous traitons est trop important pour que l'on se réfugie derrière une interprétation de la Constitution, au demeurant fort contestable.
Comme le dit le président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Louis Debré, le Gouvernement ne cesse de proposer au Parlement des textes qui sont des pétitions de principe.
En l'espèce, alors qu'il s'agit de la santé des Français et que la directive européenne prévoit certains garde-fous, le Gouvernement nous demande de lui faire confiance. Pourquoi vous ferions-nous confiance, monsieur le ministre ? Quelles garanties avons-nous pour nos concitoyens ? Aucune !
M. Jean-Marc Pastor. Absolument !
M. Gérard Delfau. Ce texte concerne un sujet difficile. Nous sommes partagés quant à l'attitude prise par le Gouvernement, malheureusement suivie par la majorité de la commission. Notre jugement est en train de se former, et vous ne serez pas étonnés si nous sommes nombreux à voter contre ce texte, alors même que, dans un autre cadre de discussion, si nous avions obtenu les garanties nécessaires, l'issue aurait pu être différente.
M. le président. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.
M. Charles Revet. Je souscris aux préoccupations exprimées par nos collègues quant à la bonne information de nos concitoyens Si j'ai bien compris, compte tenu de leur caractère réglementaire, les précisions demandées doivent figurer dans le décret d'application.
Dans ce cas, et dans la mesure où nous pourrons réexaminer la question en deuxième lecture, je suggère à nos collègues de retirer leurs amendements.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. J'ai eu l'occasion d'expliquer quelle avait été la genèse de la rédaction de cet article.
Le Gouvernement, dans son projet de loi initial, puisqu'il s'agit notamment d'une transposition, avait repris le texte même de la directive. En tout état de cause, la directive s'impose ! C'est le Conseil d'État, saisi du projet de loi, qui a recommandé au Gouvernement de renvoyer à un décret les précisions touchant aux informations.
M. Gérard Delfau. Le Conseil d'État impose-t-il ses positions au Parlement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le sénateur, il se trouve que, aux termes de notre Constitution, les projets de loi sont soumis obligatoirement au Conseil d'État, qui est le conseil juridique du Gouvernement, en même temps que la juridiction suprême de l'ordre administratif. Il est d'usage - mais ce n'est pas une obligation -, pour la bonne rédaction des textes, de faire confiance aux avis des juristes s'agissant de l'interprétation des articles 34 et 37 de la Constitution, c'est-à-dire des domaines respectifs de la loi et du règlement. C'est ce que le Gouvernement a fait !
J'ai par ailleurs indiqué, avant le dîner, que le décret d'application de ces dispositions serait extrêmement clair. Le secret industriel, par exemple, est rattachable aux droits de propriété intellectuelle, qui relèvent du droit de propriété ; nous ne pourrions pas, par exemple dans une loi, faire abstraction de ces informations protégées.
Comme je l'ai formellement précisé, le décret prévoira qu'aucun secret n'est opposable à la diffusion des informations qui ont trait à la santé humaine ou à la protection de l'environnement. Je ne saurais être plus clair !
Ce qui figurera dans le décret sera forcément conforme à la directive, faute de quoi nous serions passibles d'une procédure pour transposition non conforme.
Nous pourrions débattre, sur un plan strictement juridique, de la construction qui a été retenue à l'instigation du Conseil d'État. Néanmoins, monsieur le sénateur, l'engagement d'un membre du Gouvernement n'est pas un vain mot et vous aurez la possibilité, à très brève échéance, de constater dans le décret que le Gouvernement tient ses engagements.
J'ajoute qu'un décret est un acte attaquable devant le Conseil d'État et que, s'il était non conforme à la loi ou aux textes européens, il serait parfaitement annulable.
Nous souhaitons, je l'ai dit à plusieurs reprises et nous aurons l'occasion d'y revenir, que la transparence soit totale. Il est en effet nécessaire, sur un sujet aussi difficile, qui engendre des peurs - nous le constatons tous -, que rien ne soit caché à nos concitoyens, afin qu'ils puissent se faire, par eux-mêmes, un jugement responsable.
Telle est notre conviction, telles sont nos intentions. Elles trouveront leur traduction dans la loi, ainsi que dans les textes réglementaires qui l'accompagneront.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Si j'ai bien compris, monsieur le ministre, vous avez levé l'urgence pour ce projet de loi ?
M. Michel Charasse. Comme sur les OGM, il y a des bruits qui circulent !
M. Daniel Raoul. En effet !
M. Gérard César. Il n'y a pas d'urgence !
M. Daniel Raoul. Cela signifie donc que ce texte reviendra en deuxième lecture au Sénat.
En ce cas, puisque la navette se poursuivra, que craignez-vous, monsieur le ministre, quand des parlementaires affirment leurs préoccupations quant au contenu des textes d'application ? Il ne s'agit que de cela ! Il sera toujours temps, lors de la deuxième lecture, de faire la part des choses. Vous aurez alors peut-être eu le loisir de définir plus précisément le contenu du décret ! En attendant, nous aurons pu exprimer notre volonté.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. M. le ministre a été très clair, me semble-t-il. Malgré cela, j'insisterai de nouveau sur le fait qu'il s'agit ici d'une utilisation en milieu confiné, au sein de laboratoires, et non en milieu ouvert. La procédure est la plus sécurisée qui soit. La transparence et le principe de précaution sont au coeur de ce projet de loi. Cependant, de même que, comme le disait Montesquieu, les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires, les amendements superfétatoires ne renforcent pas les amendements nécessaires ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Gérard Delfau. Il faut le dire au Gouvernement !
M. Jean Bizet, rapporteur. Respectons donc les articles 34 et 37 de la Constitution.
M. Jean-Marc Pastor. À quoi servons-nous, alors ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Il s'agit ici du domaine le plus strictement réglementaire, mes chers collègues !
Je demande donc à Daniel Soulage de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, je confirmerai l'avis défavorable de la commission.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Je voudrais répondre très brièvement à M. Raoul.
Monsieur le sénateur, vous êtes un parlementaire d'expérience, et vous savez comme moi que le Parlement est souverain quand il s'agit d'adopter ou non des amendements.
Cependant, vous ne pouvez contester au Gouvernement le droit de donner son avis sur des amendements, ni celui de préférer une rédaction qu'il trouve plus conforme à la lettre de la Constitution. Ce faisant, il n'empiète nullement sur les prérogatives du Parlement, dont les membres votent ensuite en leur âme et conscience. C'est ainsi que le Parlement fonctionne et a toujours fonctionné !
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le ministre, on ne peut pas non plus reprocher au peuple de France de demander que figurent dans ce projet de loi un certain nombre d'éléments nécessaires à la connaissance de ce qui se passera sur notre territoire ! Pouvoir obtenir des indications sur les essais d'implantation d'OGM, sur leurs modalités, sur leurs finalités, sur l'identité de leurs promoteurs, c'est le minimum que demande aujourd'hui la société !
Or on voudrait, une fois encore, essayer de dissimuler ces éléments, en renvoyant à un décret que prendra le Gouvernement. Chacun a en effet le droit de s'exprimer sur cette question, monsieur le ministre, et nous nous faisons, au travers de nos amendements, les interprètes des attentes de la société en matière d'information. Cela ne va pas plus loin !
Nous reverrons ce point en deuxième lecture s'il le faut, mais, de grâce, que l'on n'essaie pas, une fois de plus, de masquer la vérité !
M. Jean Bizet, rapporteur. Il s'agit ici des essais en milieu confiné, cher collègue !
M. Jean-Marc Pastor. À plus forte raison !
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Je m'immisce dans ce débat. Certes, j'ai manqué son début, mais je pense avoir suffisamment compris le sens de vos échanges pour pouvoir m'exprimer.
Monsieur le ministre, vous nous avez indiqué tout à l'heure que le Conseil d'État, au stade de la consultation sur ce projet de loi, avait considéré que les dispositions dont nous parlons étaient réglementaires.
Si vous pensez qu'elles le sont effectivement, pourquoi ne défendez-vous pas votre domaine grâce à l'article 41 de la Constitution ? Si vous n'utilisez jamais l'arme dont vous disposez, vous ne pourrez pas empêcher le Parlement d'empiéter sur le domaine de l'exécutif !
Il vous suffit donc d'opposer l'irrecevabilité prévue par l'article 41, et nous irons réveiller le président du Sénat pour savoir ce qu'il en pense ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.) S'il a un doute, le Conseil constitutionnel, saisi par lui ou par le Gouvernement, tranchera sous huitaine. (M. le ministre délégué sourit.)
Vous avez donc, monsieur le ministre, les moyens de protéger votre domaine !
Mais si vous décidez de ne pas le faire aujourd'hui, le Gouvernement pourra toujours demander demain au Conseil constitutionnel le déclassement de la disposition votée et promulguée, en application de l'article 37 de la Constitution.
En d'autres termes, mes chers collègues, ce que le Gouvernement ne fera pas ce soir, il pourra le faire demain ! Je tenais à vous le signaler avant que cet amendement ne soit mis aux voix.
M. le président. Monsieur Soulage, l'amendement n° 72 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Daniel Soulage. Un scrutin public ayant été demandé, il n'est plus temps, me semble-t-il, de retirer l'amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 72 rectifié bis.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Mes chers collègues, le scrutin étant assez serré, il est nécessaire de procéder à la vérification des résultats.
Je vous propose donc de poursuivre l'examen du texte et de réserver le vote sur l'article 8, dans l'attente des résultats du scrutin sur l'amendement n° 72 rectifié bis. (Assentiment.)
Le vote sur l'article 8 est réservé.
Article 9
L'article L. 532-5 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 532-5. - Dans les cas où une nouvelle évaluation des dangers ou des inconvénients pour la santé publique ou l'environnement le justifie, l'autorité administrative peut, après avis du conseil des biotechnologies sauf en cas d'urgence :
« 1° Soumettre à agrément l'utilisation déclarée ;
« 2° Modifier les prescriptions initiales ou imposer des prescriptions nouvelles ;
« 3° Suspendre l'agrément ou les effets de la déclaration pendant le délai nécessaire à la mise en oeuvre des mesures propres à faire disparaître ces dangers ou inconvénients ;
« 4° Retirer l'agrément ou mettre fin aux effets de la déclaration si ces dangers ou inconvénients sont tels qu'aucune mesure ne puisse les faire disparaître. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 90 est présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste.
L'amendement n° 165 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Au début du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-5 du code de l'environnement, ajouter une phrase ainsi rédigée :
L'évaluation des risques prévue à l'article L. 532-2 du présent code et les mesures de confinement et autres mesures de protection appliquées sont régulièrement revues.
La parole est à M. Paul Raoult, pour présenter l'amendement n° 90.
M. Paul Raoult. Par cet amendement, nous entendons, d'une part, mettre en conformité le présent projet de loi avec le 2 de l'article 6 de la directive 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés, et, d'autre part, instaurer une prévention active contre tout danger qui résulterait de l'utilisation d'OGM en zone confinée.
Il s'agit là de renforcer les mesures existantes en matière de biovigilance. En effet, la protection de la santé humaine, tout comme celle de l'environnement, nécessite une attention et une vigilance de tous les instants. Dans cette logique, il nous est donc apparu indispensable que l'utilisateur de cultures d'OGM en milieu confiné procède à des évaluations régulières.
Adopter cette disposition semble d'autant plus justifié que nos connaissances ne cessent d'évoluer et que la découverte de risques jusqu'alors non avérés peut survenir à tout moment et imposer des modifications dans l'utilisation des OGM en milieu confiné.
On peut relever, à ce propos, que les études menées par l'INRA ont par exemple mis en lumière que, dans le cas du colza, des risques de dissémination par le pollen et les graines existaient, et que le transfert de gènes dans les populations sauvages semblait possible, même à faible fréquence. Des travaux sont en cours pour préciser la fréquence d'hybridation selon les diverses conditions agronomiques et pour déterminer si le transgène peut être intégré de façon stable dans le génome de la ravenelle.
Cet exemple démontre bien la nécessité de mettre en oeuvre une politique de prévention active. Cette dernière, ici fondée sur la réévaluation, doit permettre à la fois d'assurer une mission de surveillance des installations et de garantir l'existence d'une capacité appropriée de réaction de l'utilisateur ou des autorités compétentes.
Une telle démarche se justifie notamment lorsque les mesures de confinement existantes ne sont plus à même de garantir une totale sécurité pour l'environnement et la santé humaine, ou bien lorsque les autorités ont modifié la classification du produit cultivé.
Nous proposons donc que cette évaluation régulière soit effectuée dans le respect intégral non seulement de la procédure, mais également des éléments d'évaluation définis dans les parties A et B de l'annexe III de la directive 98/81/CE. Il s'agit de renforcer l'application du principe de précaution, qui est inscrit dans notre Constitution.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 165.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet de mettre en conformité le projet de loi avec le 2 de l'article 6 de la directive 98/81/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés.
Il s'agit ici de s'assurer que les mesures de confinement et de protection sont régulièrement revues, afin de les adapter à toute évolution possible dans l'avenir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. L'application des dispositions prévues à l'amendement n° 17 de la commission, que le Sénat a adopté à l'article 7, produira des effets rigoureusement identiques à ceux qu'entraînerait l'adoption de ces deux amendements. Je me félicite de cet accord sur le fond : il faut en effet prévoir explicitement que l'évaluation des risques et des modalités de confinement devra intervenir régulièrement.
Par conséquent, les amendements sont satisfaits, mais leurs auteurs n'ont pas accepté, malheureusement, la suggestion qui leur avait été faite, en commission, de s'aligner strictement sur notre proposition en les présentant à l'article 7. Par cohérence, la commission ne peut donc qu'émettre un avis défavorable, alors que, sur le fond, je le répète, nos collègues ont satisfaction.
En conséquence, j'invite M. Raoult et Mme Boumediene-Thiery à retirer leurs amendements. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Comme l'a très justement indiqué M. le rapporteur, cette disposition a été adoptée précédemment.
De plus, permettez-moi de vous faire observer, monsieur Raoult, que vous avez évoqué, dans votre intervention, la dissémination du pollen du colza, alors qu'il s'agit ici d'essais confinés.
En conséquence, le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable sur les amendements nos 90 et 165.
M. le président. Monsieur Raoult, l'amendement n° 90 est-il maintenu ?
M. Paul Raoult. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 90 est retiré.
Madame Boumediene-Thiery, retirez-vous également votre amendement ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Non, je le maintiens.
M. le président. L'amendement n° 89, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
À la fin du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 532-5 du code de l'environnement, supprimer les mots :
sauf en cas d'urgence
La parole est à M. Paul Raoult.
M. Paul Raoult. Cet amendement tend à prévoir que l'avis du Haut conseil des biotechnologies soit sollicité quelle que soit la situation, qu'il y ait urgence ou pas.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Les auteurs de l'amendement sont soucieux, à juste titre, d'assurer un rôle prééminent au Haut conseil des biotechnologies et de garantir la sécurité de nos concitoyens.
La commission partage ces deux préoccupations, mais il serait contre-productif d'imposer, même en cas d'urgence, une consultation du Haut conseil des biotechnologies.
En effet, si un danger devait être circonscrit de toute urgence, une décision de l'autorité administrative devrait pouvoir intervenir au plus vite. Dans de telles circonstances, il serait donc légitime de pouvoir s'exonérer de l'avis du Haut conseil des biotechnologies : il me semble que ce serait, là aussi, respecter dans l'esprit le principe de précaution. En tout état de cause, il convient de ne pas faire de la « réunionite » aiguë, l'autorité administrative devant pouvoir agir au plus vite.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je fais appel à votre bon sens et à votre esprit de responsabilité. Il s'agit là de recherches en milieu confiné, qui peuvent éventuellement porter sur des espèces hautement toxiques, auxquelles il est tout à fait naturel que la science puisse s'intéresser. Imaginez que, dans un tel cas, il soit nécessaire de prendre une décision en urgence : on ne va pas consulter le Haut conseil des biotechnologies, cela relève du bon sens le plus élémentaire !
C'est la raison pour laquelle figure dans le texte la mention : « sauf en cas d'urgence ». Soyons concrets, et mettons-nous à la place d'une autorité administrative ou politique confrontée à une situation potentiellement dangereuse. Que faut-il faire ? Consulter, attendre ou agir ? La réponse va de soi !
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, j'ai bien entendu vos arguments, mais la rédaction qui nous est présentée à l'article 9 prévoit que, « dans les cas où une nouvelle évaluation des dangers ou des inconvénients pour la santé publique ou l'environnement le justifie, l'autorité administrative peut, après avis du conseil des biotechnologies sauf en cas d'urgence, soumettre à agrément l'utilisation déclarée, etc. ».
Or, si l'urgence doit commander en cas de problème, comme vous l'affirmez, il conviendrait d'écrire carrément que, dans une telle hypothèse, l'agrément sera suspendu. La rédaction actuelle du texte nous pose problème.
M. le président. Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)
Article 10
Les deux premiers alinéas de l'article L. 532-6 sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Toute demande d'agrément d'utilisation confinée d'organismes génétiquement modifiés à des fins de recherche, de développement ou d'enseignement est assortie du versement d'une taxe à la charge de l'exploitant de l'installation.
« Le montant de cette taxe est fixé par arrêté du ministre chargé de la recherche en fonction de la nature de la demande et de la destination, lucrative ou non, de l'utilisation, dans la limite de 2 000 €. »
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Au début du premier alinéa du texte proposé par cet article pour les deux premiers alinéas de l'article L. 532-6 du code de l'environnement, remplacer les mots :
Toute demande d'agrément d'utilisation
par les mots :
Toute demande d'agrément pour une utilisation
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
CHAPITRE III
MODIFICATIONS DU CHAPITRE III RELATIF À LA DISSÉMINATION VOLONTAIRE D'ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi l'intitulé de cette division :
Dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Il s'agit là aussi d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'intitulé du chapitre III est ainsi rédigé.
Article additionnel avant l'article 11
M. le président. L'amendement n° 91 rectifié, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'application des deux directives européennes 98/81/CE et 2001/18/CE correspond aux trois phases suivantes :
« Première phase : la recherche et la production en milieu confiné
« Deuxième phase : le prolongement des expérimentations en milieu naturel
« Troisième phase : la production en milieu naturel et la mise sur le marché ».
Le passage à la deuxième phase est subordonné à deux conditions : une évaluation scientifique, économique et sociale, d'une part, et l'acceptabilité sociétale locale autour du projet au moyen de la consultation de la commission locale d'information et de suivi.
Les conditions susmentionnées pourront ultérieurement se reproduire à l'identique pour le passage à chaque étape.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Eu égard à la multitude d'avis contradictoires et à l'absence d'un recul suffisant quant aux effets à long terme des cultures transgéniques, force est de constater que nous avons encore beaucoup à apprendre sur les OGM.
La réponse à l'inquiétude devant le risque a pris forme progressivement avant que le principe de précaution ne finisse par être consacré, en 1992, dans le traité de Maastricht, puis ne revête une valeur constitutionnelle à travers son inscription dans la Charte de l'environnement qui a été adoptée en 2003.
Le principe de précaution aura conduit des régions et des autorités locales à adhérer, en 2005, à la charte de Florence portant sur la coexistence entre les OGM et les cultures traditionnelles et biologiques. Cette charte prend en considération la grande incertitude qui demeure quant aux effets des OGM sur la santé et aux risques de contamination des environnements naturels et pour la biodiversité.
En l'état actuel des connaissances et de la recherche sur ce sujet, le principe de précaution doit donc être mis en exergue, et le passage progressif par les trois phases que nous évoquons au travers de notre amendement est impératif, tant que les risques réels pour la santé et l'environnement n'auront pas été clairement identifiés.
Ainsi, le passage à une étape ultérieure doit impérativement être subordonné à une évaluation scientifique, économique et sociale, d'une part, et à l'acceptabilité sociétale locale, d'autre part.
Pour la mission d'information de l'Assemblée nationale, présidée par M. Jean-Yves Le Déaut, les OGM sont incontestablement une technologie prometteuse, qu'il faut encourager, mais également encadrer.
Toute progression doit respecter l'impératif de rigueur attaché au principe de précaution que nous venons d'inclure dans notre corpus constitutionnel. Cependant, le principe de précaution ne doit pas être un principe de blocage, comme le répète à l'envi M. le rapporteur ; c'est au contraire un principe d'action, qui suppose bien entendu que toutes les garanties nécessaires aient été prévues et respectées afin d'éviter tout risque.
Les diverses crises sanitaires qui ont frappé l'Europe, notamment la France, depuis une quinzaine d'années ont conduit beaucoup de citoyens à douter de l'attitude des experts, des scientifiques et des responsables politiques, voire de certaines innovations scientifiques.
L'encadrement et le contrôle de l'utilisation des OGM répondent à des exigences de prudence. Il est donc nécessaire de développer l'information et la transparence - nous ne cessons d'ailleurs de le dire, les uns et les autres, quels que soient nos points de vue - et d'encadrer la problématique des OGM par une régulation qui viserait à prévenir les dérives, dont la plus visible serait l'appropriation du vivant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Les trois phases identifiées par les auteurs de l'amendement sont naturellement à respecter.
Il convient en effet de garantir que le passage au champ obéisse au « principe de parcimonie », qu'il n'est pas utile d'expliciter davantage. En vertu de ce principe qu'avaient mis au jour les quatre sages en 2002, l'essai en milieu ouvert n'intervient qu'après une recherche approfondie en milieu confiné.
À cet égard, la commission présentera, à l'article 12, un amendement n° 23 rectifié soumettant la délivrance d'une autorisation pour des essais en champ au recueil des avis du Haut conseil des biotechnologies, outre les conditions déjà prévues à l'article 12 que sont la consultation du public et l'évaluation des risques. Cette phase est donc déjà très encadrée.
S'agissant du passage de la dissémination à des fins de recherche à la phase de mise sur le marché, le a du 2 de l'article 13 de la directive 2001/18/CE impose que le dossier de demande d'autorisation de mise sur le marché contienne les résultats des essais expérimentaux. L'article 13 du projet de loi prévoit qu'une nouvelle évaluation des risques est également requise avant toute autorisation de mise sur le marché. En outre, la commission, par son amendement n° 27 rectifié, exigera également le recueil des avis du Haut conseil des biotechnologies avant l'octroi de cette autorisation.
Le passage d'une phase à l'autre est donc suffisamment encadré aux yeux de la commission. Ces éléments me permettent de dire que les préoccupations des auteurs de l'amendement sont prises en compte. En conséquence, la commission souhaite le retrait de celui-ci. À défaut, elle devra émettre un avis défavorable.
M. Daniel Raoul. Navré de vous décevoir !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Nous sommes d'accord, sur le fond, avec les auteurs de cet amendement, mais la formulation de celui-ci est relativement vague et n'a pas de caractère normatif. Le dispositif ne serait guère opérationnel s'il devait être inséré dans le projet de loi, et la rédaction présentée nous paraît difficilement acceptable, d'autant qu'elle pourrait être source de contestations.
S'il partage les intentions de M. Raoul, le Gouvernement ne peut donc approuver ce dispositif, de même qu'il s'était opposé à la création de commissions locales d'information et de suivi. Nous avons d'ailleurs eu un long débat sur ce sujet, et nous y reviendrons sans doute ultérieurement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, la rédaction de notre amendement est très claire, même si les termes employés vous paraissent vagues !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 91 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 11
I. - L'intitulé du chapitre est remplacé par l'intitulé suivant : « Chapitre III : Dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés ».
II. - L'article L. 533-2 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 533-2. - Au sens du présent chapitre, on entend par dissémination volontaire toute introduction intentionnelle dans l'environnement d'un organisme génétiquement modifié ou d'une combinaison d'organismes génétiquement modifiés pour laquelle aucune mesure de confinement particulière n'est prise pour en limiter le contact avec les personnes et l'environnement.
« On entend par mise sur le marché la mise à disposition de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 124, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement tend à refuser l'amalgame que comporte l'article 11.
En effet, en assimilant la dissémination volontaire d'OGM à des fins de recherche à une dissémination à des fins commerciales, cet article conduit à la confusion des objectifs.
En théorie, un essai en plein champ respecte les principes de précaution et de parcimonie. Il doit servir à évaluer effectivement les risques réels d'une dissémination volontaire d'OGM dans la nature. Ces évaluations peuvent nous servir à étudier ces risques.
En outre, un tel essai doit permettre d'accroître nos connaissances en matière de biotechnologies et, certainement, il doit nous aider à trouver des solutions aux maux de la planète, notamment la faim ou la pollution. Ce sont là des objectifs que l'on peut atteindre, en particulier grâce au développement de la recherche publique.
En revanche, une culture commerciale répond à une tout autre logique. Elle a d'abord vocation à être réalisée à grande échelle, ce qui rend les risques de dissémination bien plus importants. Elle n'a souvent qu'un faible intérêt économique, du moins pour ceux qui la pratiquent sur le terrain, car elle ne sert que les intérêts de multinationales et tend à aliéner les paysans.
C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. L'amendement n° 166, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après les mots :
n'est prise pour
rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 533-2 du code de l'environnement :
limiter leur contact avec l'ensemble de la population et l'environnement et pour assurer à ces derniers un niveau élevé de sécurité
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet de reprendre la définition de la dissémination volontaire inscrite dans la directive européenne 2001/18/CE.
M. le président. L'amendement n° 52 rectifié, présenté par MM. César, Grignon, Doublet, Pointereau et Mortemousque, Mme Gousseau, MM. Bécot, Leroy, de Raincourt, Juilhard, Barraux, Martin et Gouteyron, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par le II cet article pour l'article L. 533-2 du code de l'environnement, après le mot :
produits
insérer les mots :
préparés pour être
La parole est à M. Gérard César.
M. Gérard César. Cet amendement vise à préciser la définition des « produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés ».
L'article 1386-3 du code civil définit un produit comme « tout bien meuble, même s'il est incorporé dans un immeuble, y compris les produits du sol, de l'élevage, de la chasse et de la pêche ».
En outre, l'article 520 du même code énonce que « les récoltes pendantes par les racines, et les fruits des arbres non encore recueillis, sont pareillement immeubles. Dès que les grains sont coupés et les fruits détachés, quoique non enlevés, ils sont meubles. Si une partie seulement de la récolte est coupée, cette partie seule est meuble. »
Il est donc nécessaire de compléter la définition du mot « produit » inscrite dans le code civil en précisant le caractère intentionnel qu'implique le mot « préparation » figurant dans la définition présentée par la directive 2001/18/CE.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Les auteurs de l'amendement n° 124 refusent toute assimilation entre la dissémination volontaire d'OGM à des fins de recherche et leur dissémination à des fins commerciales.
La définition de la dissémination volontaire qui figurait jusqu'à présent dans le code de l'environnement était issue de la loi du 13 juillet 1992 relative au contrôle de l'utilisation et de la dissémination des organismes génétiquement modifiés. Elle visait effectivement les opérations alors définies, en droit communautaire, comme relevant de la dissémination volontaire à toute fin autre que la mise sur le marché. De ce fait, la mise sur le marché n'était pas considérée comme une dissémination volontaire par la loi du 13 juillet 1992.
L'article 11 tend donc à introduire une nouvelle définition de la dissémination volontaire, conforme aux dispositions communautaires. Désormais, la notion de dissémination volontaire visera aussi bien la mise sur le marché que les opérations à toute fin autre. Pour autant, il ne s'agit pas d'une assimilation entre les deux notions, chacune des opérations obéissant à des procédures d'autorisation différentes, détaillées respectivement aux articles 10 et 12 du présent projet de loi.
Par conséquent, la commission ne peut qu'émettre un avis défavorable sur l'amendement n° 124.
S'agissant de l'amendement n° 166, je précise que, pour assurer une distinction claire entre l'utilisation confinée et la dissémination volontaire, il convient de définir l'une a contrario de l'autre.
C'est précisément ce que tend à réaliser l'article 11 du présent projet de loi. Il ne serait donc pas judicieux de brouiller cette ligne de partage en introduisant des exigences de sécurité qui prêteraient à débat.
Par conséquent, la commission émet également un avis défavorable sur cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 52 rectifié, je comprends le souci de notre collègue Gérard César de faire figurer explicitement, dans la définition de la mise sur le marché, le fait que la présence d'OGM dans les produits visés est voulue.
Toutefois, il faut également prévoir les cas où seraient mis sur le marché des produits où une telle présence serait fortuite et le taux supérieur à 0,9 %, ce qui imposerait l'étiquetage « OGM » pour respecter la réglementation européenne. En l'occurrence, la présence d'OGM dans ces produits ne résulterait pas d'une préparation délibérée.
Cela étant, nous pourrions émettre un avis favorable sur cet amendement si ses auteurs acceptaient de le rectifier, en précisant que les produits visés sont entendus comme des préparations. Cela serait conforme à la définition des produits, telle qu'elle figure dans la directive. Dans cette hypothèse, l'avis de la commission pourrait alors être favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Je partage l'avis de M. le rapporteur.
L'article 11 tend à apporter des définitions, et sa suppression n'aurait, de mon point de vue, pas grand sens. Je suis donc défavorable à l'amendement n° 124, ainsi qu'à l'amendement n° 166, puisqu'il s'agit de maintenir, dans cet article, une stricte définition.
Enfin, s'agissant de l'amendement n° 52 rectifié, monsieur César, compte tenu de la liste extrêmement prestigieuse des signataires (Sourires), j'émettrai un avis favorable, sous réserve de la rectification qui a été demandée par M. le rapporteur.
M. le président. Monsieur César, acceptez-vous de procéder à la rectification suggérée par M. le rapporteur et M. le ministre ?
M. Gérard César. Je remercie M. le rapporteur et M. le ministre de me tendre une telle perche ! (Sourires.) J'accepte bien volontiers leur proposition, qui permet la survie de mon amendement, et je remplace les mots : « préparés pour être » par les mots : «, entendus comme des préparations, ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 52 rectifié bis, présenté par MM. César, Grignon, Doublet, Pointereau et Mortemousque, Mme Gousseau, MM. Bécot, Leroy, de Raincourt, Juilhard, Barraux, Martin et Gouteyron, et ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par le II cet article pour l'article L. 533-2 du code de l'environnement, après le mot :
produits
insérer les mots :
, entendus comme des préparations,
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article 8 (suite)
M. le président. Mes chers collègues, nous en revenons à l'article 8, la vérification des résultats du scrutin public sur l'amendement n° 72 rectifié bis étant terminée.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 155 :
Nombre de votants | 326 |
Nombre de suffrages exprimés | 319 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 160 |
Pour l'adoption | 162 |
Contre | 157 |
Le Sénat a adopté. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
En conséquence, les amendements nos 87 rectifié et 163 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article additionnel après l'article 11
M. le président. L'amendement n° 167, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 532-2 du code de l'environnement, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - I. - L'instruction, la délivrance et le contrôle du respect de toute autorisation de mise en culture ou de mise sur le marché d'organismes génétiquement modifiés procèdent du principe de précaution et de l'ensemble des droits, principes et objectifs consacrés à l'article L. 110-1 du code de l'environnement. « II. - L'instruction, la délivrance et le contrôle du respect de toute autorisation de mise en culture ou de mise sur le marché d'organismes génétiquement modifiés procèdent en outre des principes suivants :
« 1° Le principe de libre administration des collectivités locales suivant lequel toute collectivité locale doit avoir le droit d'interdire sur tout ou partie de son territoire la mise en culture d'organismes génétiquement modifiés ;
« 2° Les principes de pluralisme, de transparence et d'indépendance de l'expertise scientifique ;
« 3° Le principe de protection des cultures sans organismes génétiquement modifiés de toute dissémination d'organismes génétiquement modifiés. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet d'inscrire dans le projet de loi plusieurs principes devant guider les politiques publiques.
Au premier rang d'entre eux doit figurer le principe de précaution, mentionné dans la directive européenne 2001/18/CE et élevé au rang de principe constitutionnel par la Charte de l'environnement. Il me semble utile de le rappeler dans ce projet de loi, qui n'en tient absolument pas compte.
Par ailleurs, le principe de la libre administration des collectivités locales par elles-mêmes doit être respecté. De même que les communes ont le droit d'interdire l'implantation d'une installation classée au titre de la protection de l'environnement, elles devraient pouvoir réglementer ou interdire les cultures génétiquement modifiées, ainsi que le demandent de nombreux maires.
À ce propos, je rappelle que dix-huit régions de France se sont déclarées « zones sans OGM ». Il convient donc de respecter de telles décisions locales, qui s'appuient sur la crainte exprimée par la grande majorité de l'opinion publique à l'égard des OGM. En outre, se déclarer « zone sans OGM », c'est assurer la survie des produits sous appellation d'origine contrôlée ou issus de l'agriculture biologique.
Les principes de pluralisme, de transparence et d'indépendance de l'expertise scientifique sont également essentiels, ainsi que celui de la protection des cultures sans OGM contre toute dissémination de ceux-ci.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Bizet, rapporteur. Après avoir rejeté le principe de parcimonie, la commission ne peut qu'écarter les divers principes que Mme Boumediene-Thiery propose de retenir pour encadrer la dissémination des OGM, d'autant que dans cet inventaire « à la Prévert » figurent aussi bien des principes consacrés par la Constitution que d'autres forgés pour la circonstance, sans qu'une hiérarchie claire soit établie entre eux.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Cet amendement, très inventif, tend à créer des principes qui, à l'heure actuelle, n'existent pas dans notre droit.
Il vise en outre à interpréter des principes anciens, comme celui de la libre administration des collectivités locales par elles-mêmes, mais qui s'exercent dans le cadre des lois, ce qui empêche les conséquences que vous évoquez, madame Boumediene-Thiery.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 167.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 12
L'article L. 533-3 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 533-3. - I. - Toute dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés à des fins autres que la mise sur le marché, ou tout programme coordonné de telles disséminations, est soumise au respect des dispositions suivantes.
« II. - La dissémination est autorisée par l'autorité administrative après une consultation du public et une évaluation de l'ensemble des risques qu'elle peut présenter pour la santé publique ou pour l'environnement.
« Elle peut être assortie de prescriptions.
« Tout refus d'autorisation est motivé. En cas de décision implicite de rejet d'une demande d'autorisation, l'autorité administrative est tenue de fournir d'office les motifs de ce rejet.
« III. - Lorsqu'ils sont mis à la disposition de tiers, les organismes génétiquement modifiés sont soumis à étiquetage dans des conditions définies par décret.
« IV. - Ne peut être autorisée la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés qui contiennent des gènes codant des facteurs de résistance aux antibiotiques utilisés pour des traitements médicaux ou vétérinaires, pour lesquels l'évaluation des risques conclut qu'ils sont susceptibles d'avoir des effets préjudiciables à la santé publique ou à l'environnement. »
M. le président. La parole est à M. François Marc, sur l'article.
M. François Marc. Avec cet article 12 et les suivants, nous abordons la question des risques directs ou indirects, immédiats ou différés, de la dissémination des OGM pour la santé publique et l'environnement. Il s'agit de faire référence à la directive 2001/18/CE quant à l'évaluation des risques considérés.
Or, pour ma part, j'ai le sentiment que le principe constitutionnel de précaution n'est pas véritablement pris en considération ; il n'est d'ailleurs pas mentionné explicitement dans le projet de loi.
De fait, l'évaluation des risques liés aux OGM, telle que définie par le projet de loi, manque de fondement scientifique. En particulier, aucune méthode ni aucun critère d'analyse des risques ne sont imposés, et ce contrairement aux prescriptions de la directive précitée.
Pourtant, la conduite d'analyses scientifiques sérieuses n'est possible que dans un cadre précis et objectif.
À cet égard, je voudrais évoquer ici plusieurs études récentes, réalisées par des chercheurs crédibles, affichant leur neutralité. Publiées dans des revues scientifiques, elles concordent pour jeter un doute sur la totale innocuité des OGM et démontrent que ceux-ci suscitent des effets biologiques qui devraient être plus largement étudiés.
Par exemple, durant l'été de 2005, une équipe italienne a démontré que l'absorption de soja transgénique par des souris induisait des modifications dans les noyaux de leurs cellules du foie et que le retour à une alimentation non transgénique faisait disparaître les différences observées.
En novembre 2005, des chercheurs australiens ont mis en lumière que des souris nourries avec des pois transgéniques développaient des réactions allergiques fortes.
En Norvège, enfin, au mois de janvier dernier, l'Institut d'écologie génétique de l'université de Tromsö a mis en évidence qu'un élément des constructions génétiques utilisées pour modifier une plante, le fameux promoteur 35S CaMV, peut susciter l'expression de gènes dans des cellules humaines en culture. Or, selon les défenseurs des OGM, ce promoteur n'a normalement cet effet que chez les plantes.
La multiplication de ces expériences a conduit la FAO, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, à déclarer, en octobre 2005, que « ce qui se dégage est qu'il faut être attentif à ce genre d'études », puisque, « dans plusieurs cas, il y a eu mise sur le marché d'OGM sans que les dossiers de sûreté soient très clairs ».
Une condition majeure de l'objectivité des études est que l'instance responsable de l'évaluation dispose de l'indépendance et des moyens nécessaires, mais le projet de loi, monsieur le ministre, ne garantit nullement la pluralité - et donc l'impartialité - du Haut conseil des biotechnologies, qui est précisément chargé de l'évaluation. Enfin, on apprend que l'autorité publique disposera toujours des moyens de passer outre l'avis de ce haut conseil, sans pour autant avoir à motiver sa décision !
Le droit à l'information du public est donc très insuffisamment pris en compte dans ce projet de loi. Ainsi, le citoyen ne se voit même pas reconnaître le droit d'être informé de la localisation géographique exacte des cultures génétiquement modifiées. Le droit de participation du public, s'agissant des demandes d'autorisation, est tout autant malmené, aucune réelle procédure de consultation n'étant prévue.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe socialiste a déposé des amendements concernant les commissions locales d'information et de surveillance, les CLIS.
Par ailleurs, je voudrais soulever une autre objection majeure, qui porte sur le principe de réparation, dont le respect est mis à mal, au détriment des finances des cultivateurs.
La protection des cultures non génétiquement modifiées ne semble pas être l'un des objectifs visés au travers du projet de loi, puisque celui-ci normalise, en quelque sorte, la contamination. Or le caractère irréversible de la contamination aura de lourdes conséquences pour certaines activités économiques, pour l'indépendance de l'agriculteur, pour la liberté de choix du consommateur et pour la préservation de la biodiversité.
Surtout, le principe pollueur-payeur n'est pas appliqué. En effet, le projet de loi ne prévoit pas la souscription obligatoire, par l'exploitant cultivant des OGM, d'un contrat d'assurance, ce qui est impensable compte tenu des risques liés à la dissémination incontrôlée des OGM. À la place, le texte prévoit que cet exploitant peut se défausser de toute responsabilité, par le simple versement d'une taxe à un fonds d'indemnisation.
On aurait pu s'attendre à ce que, à défaut du principe pollueur-payeur, le principe de réparation mentionné à l'article 4 de la Charte de l'environnement trouve à s'appliquer dans ce texte. Or, là encore, la création du fonds de garantie, alimenté par des taxes levées sur les seuls agriculteurs et par un abondement de l'État, aboutit à exonérer les firmes productrices d'OGM de toute responsabilité financière !
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ces arguments justifient pleinement le dépôt par le groupe socialiste de nombreux amendements aux articles que nous allons examiner. Ce que l'on attend de nous, c'est bien que nous fassions appliquer le principe constitutionnel de précaution.
M. Gérard Le Cam. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de treize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 168, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement :
« Art. L. 533-3 - I. Toute dissémination volontaire, ou tout programme coordonné de disséminations à des fins de recherche et de développement ou à toute autre fin que la mise sur le marché, est subordonnée à une autorisation préalable.
« II. Conformément au principe de précaution, l'autorisation est précédée de l'évaluation de tout risque direct ou indirect, immédiat ou différé pour la santé publique et l'environnement et notamment des risques susceptibles de découler du transfert de gènes de produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés à d'autres produits ou organismes. Elle peut être assortie de prescriptions. Elle doit être motivée par référence à son intérêt pour la société et l'environnement, tant sur le plan agricole, social qu'économique.
« Le projet d'autorisation de mise en culture donne lieu à l'organisation par l'autorité administrative, aux niveaux national et local, de l'information et de la consultation du public et de tout organisme compétent.
« Au niveau national, l'intégralité du dossier de demande d'autorisation et l'avis du conseil des biotechnologies sont mis en ligne sur Internet.
« Au niveau local, chaque autorisation de mise en culture est précédée d'une enquête publique dont la durée ne peut être inférieure à un mois, dans les conditions fixées par les dispositions de la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement.
« III. Les autorisations de dissémination sont conformes aux prescriptions des schémas départementaux agricoles des disséminations d'organismes génétiquement modifiés, élaborés par l'État en concertation avec les conseils régionaux, les chambres d'agricultures, les organisations professionnelles agricoles et les associations agréées de défense de l'environnement. Ces schémas indiquent les sites d'implantation d'essais, situés de préférence dans des communes dont les maires sont favorables à de telles expérimentations.
« IV. Toute autorisation de mise en culture d'organismes génétiquement modifiés est portée à la connaissance du public, deux mois avant le semis. Une fiche d'information du public est affichée en mairie et sur le terrain.
« V. À compter du 1er janvier 2009, aucune autorisation n'est délivrée pour des disséminations volontaires à toute autre fin que la mise sur le marché pour des produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés qui contiennent des gènes exprimant une résistance aux antibiotiques utilisés pour des traitements médicaux ou vétérinaires. Les autorisations de disséminations volontaires à toute autre fin que la mise sur le marché délivrées antérieurement à cette date, pour ce type de produits, prennent fin à cette même date. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet de préciser les règles relatives aux autorisations de dissémination volontaire.
En particulier, afin de mettre le projet de loi en conformité avec la directive 2001/18/CE relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement, notamment avec son article 9, la consultation du public est rendue obligatoire avant toute délivrance d'autorisation.
En effet, si les cultures d'OGM en plein champ doivent être autorisées, ce que nous contestons depuis le début de cette discussion, nous demandons que cela se fasse au moins dans la plus grande transparence !
Il me semble important, à cet instant, de préciser ce que nous entendons par « consultation du public ».
Par exemple, l'emplacement précis des parcelles de cultures génétiquement modifiées doit être connu de tous. Les citoyens ont le droit de savoir si le champ situé près de chez eux contient ou non des OGM.
Ainsi, les agriculteurs « bio » ou produisant sous appellation d'origine contrôlée pourront vérifier si les normes de sûreté sont respectées, et surtout se préparer à la contamination par les OGM, car celle-ci se produira, en raison des flux de gènes sur moyennes distances, des possibilités de contaminations hors champ - par les semences, lors du transport, du stockage ou de la transformation -, de la présence d'impuretés dans les semences, de pollinisations croisées, de germinations spontanées. Les agriculteurs contaminés pourront alors envisager une demande d'indemnisation, voire une action devant la justice.
Cet amendement tend ensuite à prévoir une concertation avec les autorités locales. Je rappelle, à cet égard, le voeu voté par le conseil régional de Rhône-Alpes, qui s'oppose à ce projet de loi. Je vous en épargnerai la lecture !
Par ailleurs, l'amendement vise à préciser que l'autorisation de dissémination volontaire « est précédée de l'évaluation de tout risque direct ou indirect, immédiat ou différé pour la santé publique et l'environnement ».
En effet, nous ne savons rien sur les incidences à long terme de cette technique relativement neuve. Nous ne possédons pas les outils scientifiques adéquats nous permettant d'avoir une quelconque assurance sur ce plan, et les expériences qui ont été menées, uniquement sur des rats, sont très insuffisantes.
À cet égard, permettez-moi, mes chers collègues, de citer l'intervention de M. Gérard Pascal, ancien président du comité scientifique directeur de l'Union européenne, lors de la table ronde sur les enjeux sanitaires des OGM qui s'est tenue le 2 février 2005 :
« Nous ne progresserons jamais dans le domaine de l'alimentarité des plantes - transgéniques ou non - tant que nous travaillerons avec des méthodes de toxicologie classique sur un animal de laboratoire. C'est un modèle insuffisamment sensible et nous ne trouverons jamais rien, pas plus en quatre-vingt-dix jours qu'en deux ans. »
À propos de l'affaire du MON 863, M. Gérard Pascal, interrogé sur les effets à long terme des OGM et des nouveaux aliments, avait déjà donné la réponse suivante : « Je ne sais pas répondre. Il faut avoir la franchise d'avouer que l'on ne dispose pas des méthodes appropriées. »
Peut-être m'objectera-t-on que M. Gérard Pascal est un dangereux faucheur d'OGM ? Je citerai donc M. Philippe Gay, consultant et représentant de Syngenta Seeds, qui a déclaré, lors de la même table ronde, que « le risque à long terme ne fait toujours pas l'objet de méthodologies scientifiques appropriées ».
Même les députés Jean-Yves Le Déaut et Christian Ménard reconnaissent l'existence de ce problème central dans leur rapport : « les tests classiques de toxicité aigue qui jouent sur les doses consommées ne permettent aucune prédiction concernant les effets à long terme sur les systèmes vitaux, notamment immunitaires, hormonaux et reproducteurs ».
Toute personne de bonne foi l'admettra : on ne sait pas ! Une dépêche de l'AFP, datée de dimanche dernier, s'achevait par ces phrases pleines de bon sens : « Seules des études de toxicologie limitées ont jusqu'à présent été conduites sur l'impact des insecticides sécrétés par des OGM et des désherbants métabolisés par les plantes rendues tolérantes. On ignore donc l'effet à long terme de ces substances sur l'organisme humain. »
Le projet de loi n'apporte aucune réponse à cette inquiétude bien légitime. En conséquence, je demande, par le biais de cet amendement, un moratoire de fait sur toute dissémination d'OGM.
M. le président. L'amendement n° 125, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le I du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement, après les mots :
organismes génétiquement modifiés
insérer les mots :
émanant d'instituts de recherche publics ou de programmes en partenariat public-privé
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement vise à limiter l'octroi des autorisations de dissémination volontaire d'OGM, et donc de recherches en plein champ, aux seuls projets de recherche émanant d'instituts de recherche publics ou élaborés dans le cadre de partenariats public-privé.
Trop de demandes d'autorisation d'essais visent aujourd'hui simplement à préparer la commercialisation d'OGM. Ces essais ne sont pas destinés à mieux connaître les interactions entre les OGM et la nature, ils n'ont pas d'objectif scientifique : le but est uniquement de vérifier si ces OGM sont adaptés à une commercialisation en France et de les inscrire au catalogue le plus vite possible.
De tels essais, nous n'en voulons pas !
Si des essais en plein champ sont à notre avis nécessaires, leur seule finalité doit être de mieux évaluer les risques réels que présente la culture d'OGM pour notre environnement. Il est donc nécessaire de bien limiter les essais en plein champ à ces seules expérimentations à but scientifique.
Nous savons que ces OGM pourraient se disséminer dans la nature, agir sur la vie des abeilles ou d'autres insectes. Nous ne pouvons continuer à affirmer l'existence de ces risques sans chercher à les évaluer sérieusement, cette évaluation exigeant, malheureusement, d'être réalisée à ciel ouvert, dans des conditions de vie normales, les principes de précaution et de parcimonie devant bien évidemment être respectés.
M. le président. L'amendement n° 23 rectifié, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les deux premiers alinéas du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement :
« La dissémination est autorisée par l'autorité administrative après avis rendu public du haut conseil des biotechnologies, évaluation des risques, directs ou indirects, immédiats ou différés, qu'elle peut présenter pour la santé publique ou pour l'environnement et consultation nationale du public.
« Elle est assortie de prescriptions. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser les conditions dans lesquelles sera autorisée la dissémination volontaire d'OGM dans l'environnement, afin que celle-ci soit engagée avec prudence.
L'autorisation devra être précédée par le recueil du ou des avis du Haut conseil des biotechnologies, par une évaluation des risques, conformément au 2 de l'article 4 de la directive 2001/18/CE - l'amendement visant à préciser qu'il s'agit d'évaluer les risques directs ou indirects, immédiats ou différés, comme le prévoit le 8 de l'article 2 de la directive - et par une consultation du public, conformément au 1 de l'article 9 de la même directive.
À cet égard, nous proposons que cette consultation soit menée à l'échelon national, puisqu'il s'agit d'une décision relevant de l'État. Afin qu'elle soit plus éclairée, il serait bon que cette consultation intervienne après celle du Haut conseil et après l'évaluation des risques.
En outre, l'amendement tend à assortir systématiquement l'autorisation de prescriptions, alors que le projet de loi ne fait que permettre d'associer de telles prescriptions à l'autorisation de dissémination. Subordonner l'autorisation au respect de prescriptions apparaît indispensable pour encadrer et maîtriser la dissémination d'OGM dans l'environnement.
M. le président. L'amendement n° 23 rectifié est assorti de trois sous-amendements.
Les deux premiers sont identiques.
Le sous-amendement n° 213 rectifié est présenté par M. Charasse.
Le sous-amendement n° 220 est présenté par MM. César, Juilhard et Pointereau.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 23 rectifié pour les deux premiers alinéas du II de l'article L. 533-3 du code de l'environnement, après les mots :
des biotechnologies
insérer les mots :
ou de sa section scientifique,
La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter le sous-amendement n° 213 rectifié.
M. Michel Charasse. M. le rapporteur indique, dans l'amendement n° 23 rectifié, que la dissémination est autorisée « après avis rendu public du Haut conseil des biotechnologies ». Je propose d'ajouter : « ou de sa section scientifique ».
Je pense, mes chers collègues, que le Haut conseil doit pouvoir se prononcer à titre exceptionnel, mais que, à titre habituel, c'est à la section scientifique de donner un avis. Elle est tout de même la plus appropriée pour cela et, permettez-moi de le dire, la seule vraiment compétente !
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour présenter le sous-amendement n° 220.
M. Rémy Pointereau. L'octroi de l'autorisation de dissémination dépend d'une évaluation des risques sanitaires et environnementaux et non des éventuels bénéfices socioéconomiques futurs.
Dès lors, l'expertise des incidences sanitaires et environnementales doit être conduite de façon indépendante et distincte par la section scientifique du Haut conseil des biotechnologies, qui a la légitimité requise pour cela.
La section socioéconomique de cette même instance n'a pas à se prononcer sur chaque demande d'autorisation de dissémination, car cela conduirait à la remise en cause des expertises scientifiques et techniques par des personnes non compétentes de ce point de vue.
De plus, la saisine de la section socioéconomique au cas par cas poserait le problème de la confidentialité de certains éléments contenus dans les dossiers de demande d'autorisation, notamment en matière de secret industriel et de propriété intellectuelle ou commerciale.
M. le président. Le sous-amendement n° 60 rectifié, présenté par MM. César, Grignon, Doublet, Pointereau et Mortemousque, Mme Gousseau, MM. Bécot, Leroy, de Raincourt, Juilhard, Barraux et Martin, est ainsi libellé :
Compléter l'amendement n° 23 rectifié par une phrase ainsi rédigée:
« Un décret en Conseil d'État fixe la durée des différentes phases d'instruction des dossiers de demande d'autorisation et les délais maximums pour chacune de ces phases. »
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Ce sous-amendement vise à mettre l'article 12 en conformité avec la directive 2001/18/CE, dont le projet de loi porte transposition.
Le 5 de l'article 6 de cette directive fixe en effet explicitement un délai de quatre-vingt-dix jours pour l'instruction des dossiers de demande d'autorisation. Le non-respect de ces délais exposerait la recherche française en biotechnologies végétales, publique ou privée, à des distorsions de concurrence par rapport aux autres États membres de l'Union européenne.
M. le président. L'amendement n° 106, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement :
La dissémination est autorisée par l'autorité administrative après avis rendus publics des deux sections du Conseil des biotechnologies et de la Commission locale d'information et de suivi concernée, ainsi qu'après évaluation de l'ensemble des risques, directs ou indirects, immédiats ou différés, qu'elle peut présenter pour la santé ou pour l'environnement. Elle ne peut avoir lieu que dans le cadre du prolongement d'une expérimentation.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Nous continuons notre travail, en espérant obtenir le même résultat que pour la création des commissions locales d'information et de suivi...
Cet amendement vise à autoriser, sous conditions, la dissémination d'OGM uniquement dans le cas du prolongement d'une expérimentation en plein champ, et cela, bien entendu, après avis, rendus publics, des deux sections - et non pas d'une seule d'entre elles - du Haut conseil des biotechnologies et de la commission locale d'information et de suivi.
Nous ne cesserons de le marteler, une acceptation locale est nécessaire. Au terme de l'examen de cet article 12, nous saurons quelle est la position du rapporteur et du ministre sur ce point.
M. le président. L'amendement n° 126, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement :
« La dissémination peut être autorisée par l'autorité administrative après une consultation du public et une évaluation, par le conseil des biotechnologies, de l'ensemble des risques qu'elle peut présenter pour la santé publique ou pour l'environnement et des bénéfices éventuels attendus par l'organisme génétiquement modifié concerné. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L'introduction du principe de précaution dans notre Constitution, au sein de la Charte de l'environnement, impose aux autorités publiques de procéder, en cas d'incertitude scientifique et de présomption de risques, à une évaluation de ces risques.
M. le président. L'amendement n° 128, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement, remplacer les mots :
est autorisée par l'autorité administrative
par les mots :
n'est autorisée par l'autorité administrative qu'en cas de réelle nécessité
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement nous paraît fondamental : le groupe communiste républicain et citoyen demande un moratoire sur la culture commerciale d'OGM, tant parce que ces OGM servent la domination de grandes multinationales que parce que leur utilité agronomique est faible ou nulle, comme nous avons déjà eu l'occasion de le signaler.
Si notre groupe accepte le principe d'essais en plein champ, c'est à la condition expresse que ces essais soient, d'un point de vue strictement scientifique, absolument indispensables.
Ainsi, des essais en serre, des essais par modélisation mathématique ne permettent pas d'intégrer tous les paramètres expliquant le fonctionnement de la nature. Les modes de coexistence et de dissémination n'obéiront pas à une règle mathématique ; les relations entre le gène, la nature et la plante n'obéissent pas à une relation mécanique. Tout le milieu naturel bouge, qualitativement et quantitativement.
Parce que nous avons besoin de mieux connaître tout cela, des essais en plein champ doivent être autorisés, dans des conditions très strictes, lorsque leur nécessité est réelle.
Ainsi, les modèles mathématiques prédisaient que la culture du maïs « Bt » allait accélérer les mutations génétiques chez les pyrales résistantes à ce maïs. Pourtant, cette évolution n'était pas constatée là où était cultivé ce maïs, aux États-Unis notamment. Seul un essai en plein champ a permis de comprendre pourquoi les pyrales ne développaient pas de résistance à ce maïs « Bt ».
Cet exemple montre bien que les essais en milieu confiné sont parfois insuffisants, même s'ils ont trait à un OGM dont je ne souhaite pas la culture en France.
Voilà pourquoi il nous paraît important de préciser que ces essais en plein champ doivent être rendus possibles, mais seulement en cas d'absolue nécessité.
M. le président. L'amendement n° 61, présenté par MM. César, Grignon, Doublet, Pointereau et Mortemousque et Mme Gousseau, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement, après le mot :
consultation
insérer le mot :
nationale
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Cet amendement vise à mettre l'article 12 en conformité avec la directive européenne 2001/18/CE.
L'article 9 de cette directive dispose en effet que « les États membres consultent le public en général et, le cas échéant, certains groupes sur la dissémination volontaire engagée ». C'est donc bien une consultation nationale qui doit être mise en place, afin de donner à tous les citoyens l'occasion d'exprimer un avis sur les expérimentations effectuées sur des organismes génétiquement modifiés.
Cette précision s'inscrit par ailleurs dans une continuité avec les consultations nationales pratiquées jusqu'à présent.
M. le président. Je suis maintenant saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 127 est présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 169 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 206 rectifié bis est présenté par MM. Mercier, Zocchetto et les membres du groupe Union centriste - UDF.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Dans le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement, après les mots :
après une consultation
insérer les mots :
du conseil des biotechnologies et
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 127.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement vise à rappeler le rôle de contrôle et de suivi du Haut conseil des biotechnologies.
Alors que nous abordons le coeur du projet de loi, avec la question de la dissémination des OGM en plein champ, il n'est nullement fait référence, dans cette partie du texte, au rôle de ce Haut conseil des biotechnologies.
Tout le discours du Gouvernement était notamment articulé autour du rôle et des missions de ce conseil indépendant, capable de prendre en compte des problématiques scientifiques, mais aussi économiques et sociales. Aussi ne comprenons-nous pas qu'il n'y soit plus jamais fait référence dans les articles 12 et 13 de ce projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 169.
Mme Alima Boumediene-Thiery. La précision qu'il est proposé d'apporter permettra d'éviter une interprétation erronée de l'article 12, selon laquelle la seule décision administrative pourrait se substituer à l'examen d'un dossier d'autorisation par le Haut conseil des biotechnologies.
Or il est indispensable que la consultation du Haut conseil des biotechnologies constitue effectivement la garantie fondamentale accordée aux citoyens pour la protection de la santé publique et la préservation de l'environnement, comme cela est indiqué dans l'exposé des motifs du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Amoudry, pour présenter l'amendement n° 206 rectifié bis.
M. Jean-Paul Amoudry. Cet amendement de précision vise à renforcer les principes de transparence et d'information du public que nous avons mis en avant.
La précision que nous proposons d'apporter a pour objet de rendre obligatoire la consultation du Haut conseil des biotechnologies lors de la procédure d'autorisation de dissémination volontaire d'un organisme génétiquement modifié, en dehors des cas de mise sur le marché.
Selon la procédure prévue par le projet de loi, avant de délivrer une autorisation de dissémination volontaire d'un OGM, l'autorité administrative doit consulter le public et évaluer l'ensemble des risques que cette dissémination peut présenter pour la santé publique ou pour l'environnement.
Il nous semble donc primordial que le Haut conseil des biotechnologies soit consulté de manière systématique au cours de cette procédure, car cette consultation constitue la garantie fondamentale accordée aux citoyens pour la protection de la santé publique et la préservation de l'environnement, comme cela est indiqué dans l'exposé des motifs du projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 129, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Elle respecte le principe de parcimonie.
« La dissémination vise notamment à évaluer la réalité du risque sur l'environnement, notamment en matière de contamination de parcelles avoisinantes et de réaction du milieu naturel. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Si nous estimons nécessaires certaines recherches sur les OGM, afin de mieux comprendre leur relation avec le milieu naturel, nous tenons à préciser que ces recherches doivent être conduites dans le strict respect du principe de parcimonie. Il ne peut être question de cultiver des centaines d'hectares d'OGM à des fins de recherche.
Nous ne comprenons d'ailleurs pas pourquoi ce principe de parcimonie n'est pas d'ores et déjà inscrit clairement dans ce projet de loi. C'est une condition essentielle pour légitimer cette recherche et pour préciser que son but est d'abord scientifique.
En refusant d'adopter cet amendement, vous donneriez à entendre, chers collègues, que votre objectif, à travers ce projet de loi, est moins de faire progresser nos connaissances en matière de biotechnologies que d'autoriser et de généraliser la culture d'OGM en France, afin de mieux aliéner les paysans de ce pays à leurs semenciers et à cette logique capitaliste qui mine depuis des décennies nos campagnes.
Cet amendement vise également à rappeler que toute dissémination volontaire d'OGM, à titre de recherche, a d'abord pour objet de bien évaluer la réalité du risque pour l'environnement, notamment celui de contamination des parcelles voisines et celui de dissémination dans la terre, et ensuite, évidemment, d'évaluer les réactions du milieu naturel.
Ainsi, nous savons que beaucoup d'apiculteurs sont inquiets devant le risque de dissémination d'OGM. Quelles seront les réactions des abeilles à la présence de ces OGM ? Nous n'en avons aucune idée, c'est bien pourquoi il est malheureusement nécessaire de faire des recherches, en respectant bien sûr le principe de parcimonie.
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement, insérer un paragraphe ainsi rédigé:
« II bis.- La dissémination d'un même organisme génétiquement modifié ou d'une combinaison d'organismes génétiquement modifiés sur un même site ou sur différents sites, effectuée dans le même but et au cours d'une période déterminée peut faire l'objet d'une seule autorisation, dans des conditions fixées par décret. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement vise à mettre l'article 12 en conformité avec la directive 2001/18/CE, dont le projet de loi porte transposition.
Le 4 de l'article 6 de la directive prévoit en effet une procédure simplifiée, puisqu'il dispose que « l'autorité compétente peut accepter que les disséminations d'un même OGM ou d'une combinaison d'OGM sur un même site ou sur sites différents, effectuées dans un même but et au cours d'une période déterminée, fassent l'objet d'une seule notification ».
M. le président. L'amendement n° 24 est assorti d'un sous-amendement n° 107, présenté par MM. Pastor, Raoul, Collombat, Trémel, Lejeune, Courteau et les membres du groupe Socialiste, et ainsi libellé :
Dans le texte proposé par l'amendement n° 24 pour le II bis de l'article L. 533-3 du code de l'environnement, après le mot :
autorisation,
insérer les mots :
après avis des diverses commissions locales d'information et de suivi concernées,
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Ce sous-amendement tend, lui aussi, à donner un rôle à la commission locale d'information et de suivi.
M. le président. L'amendement n° 54 rectifié, présenté par MM. César, Grignon, Doublet, Pointereau et Mortemousque, Mme Gousseau, MM. Bécot, Leroy, de Raincourt, Juilhard, Barraux, Martin et Gouteyron, est ainsi libellé :
Après le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-3 du code de l'environnement, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La dissémination d'un même organisme génétiquement modifié ou d'une combinaison d'organismes génétiquement modifiés sur un même site ou sur différents sites, effectuée dans le même but et au cours d'une période déterminée peut faire l'objet d'une seule autorisation. »
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Cet amendement, qui est très proche de l'amendement n° 24 de la commission, vise à mettre l'article 12 en conformité avec la directive 2001/18/CE.
Le 4 de l'article 6 de la directive dispose en effet que « l'autorité compétente peut accepter que des disséminations d'un même OGM ou d'une combinaison d'OGM sur un même site ou sur différents sites, effectuées dans un même but et au cours d'une période déterminée, fassent l'objet d'une seule notification ».
Cet amendement permet par ailleurs d'éviter la multiplication des évaluations d'un même OGM, sans pour autant réduire le degré de vigilance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements autres que celui qu'elle a présenté, ainsi que sur les sous-amendements ?
M. Jean Bizet, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 168.
En effet, la rigidité et les lourdeurs de l'enquête publique ne rendent pas le recours à celle-ci adapté ni justifié en vue de l'autorisation des essais d'OGM en plein champ.
La commission a également exprimé un avis défavorable sur l'amendement n° 125, car il n'est pas légitime d'interdire à la recherche privée de procéder à des essais en plein champ. Ce serait porter atteinte à la liberté de mener des activités de recherche, liberté reconnue par le Conseil constitutionnel.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 213 rectifié présenté par M. Charasse, si la commission n'a pu se prononcer sur cette version modifiée, je crois toutefois pouvoir avancer les éléments suivants.
L'amendement n° 23 rectifié de la commission prévoit la consultation du Haut conseil des biotechnologies, sans apporter plus de précisions sur la section concernée. Cette formulation souple permet de mettre l'accent sur la mission générale du Haut conseil comme instance unique, même si je conçois bien que l'avis de la section scientifique soit, dans ces matières, prépondérant. Toutefois, viser l'une ou l'autre section reviendrait à accuser la distinction entre elles, voire à semer la division.
Si je suis donc tout à fait d'accord sur le fond avec vous, monsieur Charasse, je souhaite néanmoins, pour des raisons de cohérence, que nous en restions à l'avis du Haut conseil des biotechnologies, sans autre précision.
Je suis donc défavorable à ce sous-amendement, ainsi bien sûr qu'au sous-amendement identique n° 220.
Quant au sous-amendement n° 60 rectifié, ses auteurs cherchent à obtenir que la procédure d'instruction des demandes d'autorisation respecte les délais figurant dans la directive 2001/18/CE. C'est là une exigence que nous partageons. Bien évidemment, il ne faudrait pas que les demandeurs d'autorisation en France pâtissent d'une procédure traînant en longueur et les disqualifiant par rapport à leurs concurrents des autres États membres de l'Union européenne.
Toutefois, il n'est pas nécessaire de prévoir un décret supplémentaire pour fixer ce délai. En effet, l'article L. 537-1 du code de l'environnement prévoit déjà un décret en Conseil d'État pour fixer les conditions d'application des dispositions du chapitre III, où s'insère précisément cet article L. 533-3, pour lequel l'article 12 du présent texte prévoit une nouvelle rédaction.
C'est donc à ce décret qu'il reviendrait de fixer la durée limite de l'instruction des demandes d'autorisation. En clair, votre souhait, monsieur Pointereau, est déjà satisfait. Je vous suggère donc de retirer ce sous-amendement, auquel, sinon, je donnerai un avis défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 106, comme j'ai déjà eu l'occasion de le faire valoir, une autorisation nationale de dissémination ne saurait donner lieu à l'avis d'une commission locale. Nous n'allons pas rouvrir ce débat, cette question ayant fait l'objet d'un engagement de M. le ministre.
Je souhaite donc le retrait ou, à défaut, le rejet de cet amendement.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 126.
En effet, il n'est pas opportun de conditionner l'octroi d'une autorisation de dissémination à la mesure des bénéfices attendus. Il revient au demandeur, et non pas au Haut conseil des biotechnologies, d'évaluer les bénéfices éventuels attendus de la culture de l'OGM concerné.
Sur l'amendement n° 128, qui vise à n'autoriser les cultures d'OGM en plein champ qu'en cas de réelle nécessité d'un point de vue scientifique, la commission ne peut qu'émettre un avis défavorable.
L'amendement n° 61, qui vise à prévoir que la consultation du public devant précéder toute autorisation de dissémination sera nationale, est satisfait. J'en préconise donc le retrait ou, à défaut, le rejet.
En ce qui concerne les amendements identiques nos 127, 169 et 206 rectifié bis, qui visent à imposer une consultation du Haut conseil des biotechnologies avant toute autorisation de dissémination d'OGM, ils sont satisfaits par l'amendement n° 23 rectifié. La commission y est donc défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 129, qui tend à soumettre la dissémination d'OGM dans l'environnement au respect du principe de parcimonie et prévoit que l'autorisation de procéder à une telle dissémination devra avoir pour finalité l'évaluation de la réalité des risques pour l'environnement, la commission a émis un avis défavorable.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 107, comme je l'ai déjà dit, M. le ministre a pris un engagement. L'avis est défavorable.
Enfin, l'amendement n° 54 rectifié reprend une possibilité ouverte par la directive 2001/18/CE en son article 6. Il est donc pleinement justifié et permettra d'ailleurs d'éviter la multiplication d'évaluations sur un même OGM. La commission a toutefois prévu cette procédure simplifiée à l'amendement n° 24, qui satisfait donc pleinement les auteurs de l'amendement n° 54 rectifié. Je demande donc le retrait de celui-ci ou, sinon, son rejet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements et sous-amendements ?
M. François Goulard, ministre délégué. Au travers de la présentation de vos amendements, vous vous êtes largement exprimés, mesdames, messieurs les sénateurs, sur cet important article, ainsi que sur les principes qui sous-tendent le texte.
Nous entendons mettre en place un dispositif garant d'une information complète du public, avec un Haut conseil des biotechnologies dont la composition, que nous avons longuement commentée hier, semblait satisfaire la majorité des membres de la Haute Assemblée, avec une procédure qui garantit l'accès total à l'information, avec une possibilité d'expression du public, par le biais d'une consultation nationale. Bref, ce dispositif, qui apporte en outre la certitude que les précautions nécessaires sont prises, que le suivi est assuré, a sa cohérence.
Cela étant, je comprends que vous puissiez imaginer d'autres dispositifs, notamment ceux d'entre vous qui, ne souhaitant pas que l'on procède à des disséminations d'OGM en plein champ, préconisent la mise en place d'un système qui aboutirait, sinon de jure du moins de facto, à un moratoire. Comprenez toutefois, pour votre part, que nous défendions le texte que nous vous présentons.
Ce sont les raisons pour lesquelles, à la suite de M. le rapporteur, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 168 et 125, et se déclare en revanche favorable à l'amendement n° 23 rectifié de la commission, qui apporte des précisions utiles.
En ce qui concerne les sous-amendements nos 213 rectifié et 220, le Gouvernement y est défavorable, mais cela appelle une explication.
En effet, nous estimons, comme M. le rapporteur, qu'il convient, par souci de cohérence, que ce soit le Haut conseil des biotechnologies qui émette un avis. Ensuite, le règlement qui régira le fonctionnement du Haut conseil prévoira, je crois avoir suffisamment insisté sur ce point hier, les cas où un avis de la section scientifique sera requis, une appréciation générale sur toute demande d'autorisation devant être portée par la section socioéconomique. Il me semble que c'est là un mode de fonctionnement de bon sens.
Par conséquent, sans avoir de désaccord sur le fond avec leurs auteurs, pour une question de forme et par souci de cohérence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux sous-amendements.
Sur le sous-amendement n° 60 rectifié, l'avis du Gouvernement est défavorable, car il est satisfait : un décret sera pris, comme cela est prévu dans la rédaction qui sera présentée pour l'article L. 537-1 du code de l'environnement, et il prendra en compte les préoccupations exprimées.
En ce qui concerne l'amendement n° 106, le Gouvernement émet un avis défavorable. Nous avons eu un débat sur les commissions locales d'information et de suivi, mais nous envisageons, pour notre part, de procéder autrement. Nous aurons l'occasion d'en reparler.
Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 126, pour des raisons assez évidentes de divergence de conceptions s'agissant du mécanisme d'autorisation, ainsi qu'à l'amendement n° 128, pour les mêmes motifs.
Quant à l'amendement n° 61, il appelle un avis favorable de notre part.
En revanche, le Gouvernement, jugeant les amendements identiques nos 127, 169 et 206 rectifié bis non conformes à l'esprit d'ensemble du texte, y est défavorable.
Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 129. En effet, le respect du principe de parcimonie sera implicitement pris en compte dans le jugement qui sera porté par l'autorité administrative sur chaque demande d'autorisation : le champ de l'autorisation sera limité au strict nécessaire, cela va de soi, mais il est difficile d'évaluer a priori ce qu'il sera.
Par ailleurs, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 24 de la commission, qui apporte une précision utile, mais défavorable au sous-amendement n° 107, la rédaction présentée par l'amendement nous semblant préférable.
Enfin, nous considérons que l'amendement n° 54 rectifié est lui aussi satisfait par l'amendement n° 24.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur les sous-amendements identiques nos 213 rectifié et 220.
M. Michel Charasse. J'ai bien entendu ce qu'ont dit, à propos de ces sous-amendements, M. le rapporteur et M. le ministre. Mais il y a peut-être là un problème de compréhension du texte.
L'amendement de M. Bizet signifie-t-il que l'on suivra la procédure présentée pour chaque terrain ou groupe de terrains, ou s'agira-t-il d'une étude d'ensemble sur le principe et les modalités de la dissémination, qui se déclinera, ensuite, dossier par dossier ?
S'il s'agit d'une étude d'ensemble sur la dissémination, effectivement, à partir du moment où il s'agit d'un dossier précis mais général, le Haut conseil est parfaitement qualifié. S'il s'agit, en revanche, d'une étude portant sur un ou des dossiers particuliers relatifs à des projets prévus ici ou là, je préfère de beaucoup que seule la section scientifique soit concernée.
Si mon analyse est la bonne, il y a néanmoins un problème de rédaction dans l'amendement de M. Bizet. En effet, prévoir que « la dissémination est autorisée par l'autorité administrative, etc. » signifie que d'abord l'autorité administrative pourra prendre un texte global et général autorisant en France la dissémination, et qu'ensuite seulement elle prendra les décisions individuelles nécessaires au cas par cas et terrain par terrain.
Je souhaiterais, monsieur le rapporteur, avoir une explication sur l'interprétation de votre texte. Si sa portée est, comme je le crois, globale, sans descendre au niveau de chaque demande individuelle d'autorisation, mon sous-amendement n'a effectivement plus d'objet. Si tel n'est pas le cas, je le maintiens.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Votre question, monsieur le sénateur, est utile : elle nous permet de préciser que tout essai en plein champ doit faire l'objet d'une autorisation particulière, et donc d'un avis du Haut conseil qui, en l'occurrence, sera un avis de la section scientifique. C'est le décret organisant les travaux du Haut conseil qui le précisera, comme il en va pour tous les conseils de ce type.
Une autorisation sera donc nécessaire pour chaque essai puisque, dans chaque cas, des conditions sont à prévoir et une opinion est formulée par l'autorité administrative sur les précautions prises et sur les mesures de suivi. Le décret organisant les travaux du Haut conseil indiquera que la section socioéconomique est périodiquement appelée à se prononcer sur les conditions dans lesquelles les autorisations sont délivrées. Elle sera informée systématiquement de tous les avis rendus par la section scientifique, de sorte que nous puissions conjuguer un flux permanent d'avis rendus dossier par dossier par la section scientifique et un rythme régulier, mais moins soutenu, pour les avis rendus par la section socioéconomique.
Cela me semble assez clair. Nous avons préféré conserver, dans le texte, la mention d'un avis du Haut conseil, d'abord pour des raisons de cohérence, ensuite parce que, selon les cas, l'une ou l'autre des sections, ou les deux ensemble, seront saisies. En tout état de cause, elles prépareront un avis qui sera rendu par le Haut conseil.
M. le président. Monsieur Charasse, maintenez-vous votre sous-amendement ?
M. Michel Charasse. Si je comprends bien, l'amendement de M. Bizet crée une sorte de « code de la dissémination » applicable sur l'ensemble du territoire et n'entraîne pas une consultation nationale du public par parcelle...
M. Michel Charasse. Excusez-moi, mais si je lis l'amendement, je vois qu'il est écrit que l'autorisation est donnée « [...] après avis rendu public du Haut conseil des biotechnologies, évaluation des risques, directs ou indirects, immédiats ou différés, qu'elle peut présenter pour la santé publique ou pour l'environnement et consultation nationale du public ».
Je pense que cela signifie que l'autorité administrative va établir les règles générales applicables, ensuite, dossier par dossier. Sinon, cela signifie que, pour chaque essai, il y aura une consultation nationale...
M. Michel Charasse. Pour chaque parcelle ?
M. Michel Charasse. Pour chaque essai, il y aura une consultation nationale ? Cela veut dire que si, l'été prochain, il y a cinquante demandes d'autorisation, il y aura cinquante consultations nationales...
M. Jean Bizet, rapporteur. Oui, mais ces consultations s'effectueront par l'Internet.
M. Gérard César. Ah bon ?
M. Michel Charasse. Vous ne pouvez pas, monsieur le rapporteur, quelle que soit la sympathie que j'ai pour vous, considérer que « la consultation nationale du public », comme il est écrit dans votre texte, n'est satisfaite que lorsqu'on a les moyens de s'acheter un appareil sophistiqué et que l'on sait s'en servir. Car ceux qui ne savent pas faire joujou avec l'informatique ou qui n'ont pas les moyens de le faire n'auront alors pas le droit de consulter le dossier, et vous vous ferez rappeler à l'ordre à tous les coups par la juridiction administrative.
M. Gérard Delfau. Absolument !
M. Gérard César. Bien sûr !
M. Michel Charasse. Je vous mets en garde : ou bien il y a une consultation nationale essai par essai, et dans ce cas je vous souhaite bien du plaisir, ou bien votre amendement signifie que l'on fait une consultation nationale seulement pour établir une espèce de code général applicable à toutes les demandes d'autorisation, celles-ci étant ensuite déclinées individuellement après avis de la section scientifique.
Je ne sais pas si c'est ce qu'avait compris M. César (M. Gérard César acquiesce.), mais je vous dis tout de suite que vous ne pouvez pas écrire « consultation nationale du public » sans donner à chaque citoyen, qu'il soit à pied, à cheval ou en voiture, avec ou sans accès à internet, le droit de participer à la consultation et sans mettre à sa disposition les moyens nécessaires pour cela.
Personne n'est obligé d'acheter un ordinateur et de savoir s'en servir pour s'informer sur une parcelle qui sera plantée dans la Haute-Loire ou dans le Puy-de-Dôme !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Soyons clairs sur ce point, mon cher collègue : en ce qui concerne cette consultation nationale, la directive prévoit que chaque État membre peut l'organiser comme il le souhaite. Or internet est aujourd'hui le moyen le plus simple et le plus rapide pour procéder à une telle consultation. (M. Michel Charasse s'exclame.) Si l'on pousse jusqu'au bout votre logique, que dire de quelqu'un qui ne saurait ni lire ni écrire ?
M. Michel Charasse. Il peut se faire assister par quelqu'un qui sait !
M. Jean Bizet, rapporteur. Eh bien, en ce qui concerne la navigation sur internet, on peut se faire assister par quelqu'un qui sait manier un ordinateur.
M. Michel Charasse. Il y a un principe d'égalité auquel, pour le moment, les Européens n'ont pas encore tordu le cou, même si certains en ont sûrement envie !
M. Jean Bizet, rapporteur. Monsieur l'ancien ministre du budget, tout contribuable a maintenant la possibilité d'établir sa déclaration de revenus sur internet.
M. Michel Charasse. C'est une possibilité, pas une obligation.
M. Jean Bizet, rapporteur. Nous sommes ici dans le même cas de figure. Je tiens à repréciser que faculté est laissée à tous les États membres de consulter le public par toutes les méthodes qu'ils souhaitent.
De nos jours, le moyen le plus communément utilisé à cette fin, c'est internet. Si quelqu'un ne sait pas utiliser ce mode de communication, il peut se faire assister, comme je viens de l'indiquer.
Il ne faut pas, à mon sens, entrer dans ce type de détails. (M. Michel Charasse lève les bras au ciel.) Une consultation publique sera organisée au cas par cas, dans un souci de transparence, mais on ne peut pas aller plus loin dans la précision.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Je m'aperçois que, malgré les travaux de la commission, malgré les longs débats qui se sont déjà déroulés, ce point particulier appelle des précisions.
Je le répète, toute autorisation d'essai fait l'objet d'une décision particulière, après avis du Haut conseil. Cela est très clair. Il est impossible de donner des autorisations générales, s'agissant d'expérimentations qui, par définition, sont différentes les unes des autres. Chaque cas de figure comporte une innovation, des conditions particulières. De ce fait, une appréciation au cas par cas doit être portée, en application du principe de précaution.
Le mode d'accès à l'information et de consultation retenu est, pour des raisons pratiques, l'outil informatique, la voie électronique. Une ordonnance autorise le recours à ce mode de consultation et d'information du public, qui est aujourd'hui admis dans notre droit positif. La diffusion des outils informatiques fait de la voie électronique un mode normal d'accès à l'information, qui n'est pas jugé discriminant.
Afin de fixer les idées, je voudrais donner un ordre de grandeur du nombre de demandes d'autorisation.
Nous avons parlé tout à l'heure du dispositif concernant les essais en milieu confiné. Chaque mois, une cinquantaine de demandes d'autorisation sont déposées à ce titre. Le flux est important, parce que les travaux de recherche, d'abord menés en laboratoire, explorent de nombreuses pistes, qui ne conduisent pas toutes à la phase suivante, à savoir l'essai en plein champ. Le dispositif prévu est adapté au nombre des demandes.
S'agissant maintenant des essais en plein champ, quinze demandes d'autorisation ont été déposées l'année dernière. À l'avenir, elles seront peut-être plus nombreuses, mais nous n'aurons à traiter, quoi qu'il en soit, que quelques dizaines de demandes chaque année, ce qui sera tout à fait gérable.
Les dossiers seront mis à la disposition du public dans leur intégralité pendant quinze jours. L'information pourra ainsi être assurée dans de bonnes conditions. Ensuite, pendant un autre délai de quinze jours, la consultation par voie électronique sera ouverte.
Tel est le dispositif prévu dans le projet de loi qui vous est soumis. Il sera, naturellement, précisé par voie réglementaire. La Haute Assemblée dispose maintenant, me semble-t-il, de toutes les informations pour en juger.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Nous n'arriverons pas ce soir à nous mettre d'accord.
Quoi qu'il en soit, on peut être en conformité avec le droit européen sans l'être avec le droit interne français ! En matière de directives, la règle est que chaque pays applique ces textes en fonction de son droit interne, dans la mesure où ce dernier n'est pas contraire au contenu desdites directives. Or, en France, il existe le principe d'égalité. De ce fait, lorsqu'une consultation nationale est organisée, chacun doit pouvoir consulter le dossier comme il l'entend, à la mairie de son domicile ou ailleurs, mais dans la commune concernée.
Monsieur le ministre, je ne vous souhaite pas de malheur,...
M. Michel Charasse. ... mais si l'amendement n° 23 rectifié est définitivement adopté dans la rédaction qui est proposée par notre estimable rapporteur, le Conseil constitutionnel ne manquera pas d'émettre des réserves qui vont rendre le dispositif impraticable.
M. Michel Charasse. Ce ne serait pas la première fois que le Conseil d'État se ferait contrer par le Conseil constitutionnel, car il arrive qu'il ne voie pas ou qu'il voie mal ! Quoi qu'il en soit, il n'a pas pu statuer sur l'amendement n° 23 rectifié, puisque le Conseil d'État n'est pas consulté sur les amendements parlementaires.
Mais, monsieur le président, pour ne pas faire perdre de temps au Sénat, je retire le sous-amendement n° 213 rectifié. Par cohérence, comme j'ai déposé à l'article 13 un sous-amendement n° 214 rectifié de même nature, je le retire également.
M. le président. Les sous-amendements nos 213 rectifié et 214 rectifié sont retirés.
Monsieur César, les sous-amendements nos 220 et 60 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Gérard César. Non, je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les sous-amendements nos 220 et 60 rectifié sont retirés.
La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 23 rectifié.
M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, je suis sans doute têtu, en tant que Breton, et je persiste à penser que la solution que nous avons proposée, à savoir l'instauration de commissions locales d'information et de suivi, aurait pu vous permettre d'éviter l'écueil qui a été signalé par M. Charasse s'agissant de la consultation nationale du public. Réfléchissez-y, mais je vous promets bien du plaisir avec cette consultation nationale du public !
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Notre collègue Michel Charasse a fait la démonstration que la proposition de la commission débouchera sur l'organisation de consultations nationales que je qualifierai de « confinées ». (Sourires.) Elles ne seront pas disséminées, encore moins locales, et elles ne seront surtout pas démocratiques.
Depuis le début de ce débat, nous savions que, derrière les mots et les intentions affichées, se cachait en fait la volonté de laisser le champ libre - c'est l'expression qui convient ! - à des intérêts multinationaux, parfois même en restant en retrait par rapport aux conditions posées par la directive européenne.
Aussi, monsieur le rapporteur, ne serez-vous pas surpris que je vote contre l'amendement n° 23 rectifié. Tous les éléments qui ont été évoqués influeront sur la position que je prendrai dans la suite du débat, notamment lors du vote final.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. En vertu de l'article 22 bien connu, selon lequel « chacun se dém... » comme il peut, je vous pose une question, monsieur le ministre : si, en ma qualité de maire, je demande, à l'occasion d'une consultation nationale, à disposer du dossier dans ma mairie pour le mettre à la disposition du public de ma commune, me répondra-t-on oui ou non ?
M. Gérard Delfau. Très bonne question !
M. Michel Charasse. Si je m'appuie sur la loi relative à la communication des documents administratifs et sur la Commission d'accès aux documents administratifs, me répondra-t-on oui ou non ?
M. Gérard Delfau. Deuxième bonne question !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. La réponse est extrêmement simple. Le maire de n'importe laquelle des 36 000 communes de notre pays peut naturellement obtenir le dossier, qui est accessible à l'ensemble de nos concitoyens. Il suffit de le télécharger...
M. Michel Charasse. Ma mairie n'est pas équipée !
M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le sénateur, je ne doute pas que votre mairie n'acquière très prochainement les équipements nécessaires !
M. Michel Charasse. Il n'est pas obligatoire de les acheter !
M. François Goulard, ministre délégué. Dans ces conditions, nous ferons une exception pour les rares communes qui ne disposent pas encore d'un accès à l'Internet. Nous adresserons la version « papier » du dossier aux communes qui en feront la demande. Mesdames, messieurs les sénateurs, j'en prends l'engagement devant vous.
M. Michel Charasse. Très bien ! Merci, monsieur le ministre !
M. le président. En conséquence, les amendements nos 106, 126, 128, 61, 127, 169, 206 rectifié bis et 129 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 107.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Monsieur César, l'amendement n° 54 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard César. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 54 rectifié est retiré.
La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote sur l'article 12.
M. Gérard Delfau. À ce moment de la discussion, je veux prendre acte du fait que des communes sur le territoire desquelles se dérouleront des essais de dissémination d'OGM ne seront pas directement informées et n'auront accès à aucun document particulier qu'elles pourraient mettre à disposition de la population.
Je voulais faire cette remarque, car un certain nombre de maires étaient attentifs à ce point de notre discussion. Ils seront ainsi édifiés sur la volonté de transparence et le sens de la démocratie qui sous-tendent le projet de loi qui nous est soumis.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le sénateur, je voudrais essayer de vous rassurer. Non seulement les informations seront accessibles à tous nos concitoyens, mais encore la fiche retraçant l'autorisation sera adressée, comme cela est d'ailleurs déjà prévu dans le droit actuel, à toutes les mairies concernées. Il est bien évident que tout maire sera informé des essais qui se dérouleront sur le territoire de sa commune.
M. Jacques Blanc. Il est très important de le préciser, parce qu'on va raconter n'importe quoi !
M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
Article 13
L'article L. 533-4 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 533-4. - I - La mise sur le marché, au sens du second alinéa de l'article L. 533-2, est soumise au respect des dispositions suivantes.
« II. - La mise sur le marché est autorisée par l'autorité administrative après une évaluation de l'ensemble des risques que la dissémination volontaire peut présenter pour la santé publique ou pour l'environnement.
« Cette autorisation est délivrée dans les conditions prévues par la directive 2001/18/CE du 12 mars 2001.
« L'autorisation ne vaut que pour l'usage qu'elle prévoit.
« Elle peut être assortie de prescriptions.
« La durée de l'autorisation initiale, qui ne peut excéder dix ans, est fixée par l'autorité administrative. L'autorisation peut être renouvelée.
« Le titulaire d'une autorisation qui en a sollicité le renouvellement dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, continue d'en bénéficier jusqu'à ce que l'autorité administrative lui notifie sa décision.
« Tout refus d'autorisation est motivé. En cas de décision implicite de rejet d'une demande d'autorisation, l'autorité administrative est tenue de fournir d'office les motifs de ce rejet.
« III. - Ne peut être autorisée la mise sur le marché de produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés qui contiennent des gènes codant des facteurs de résistance aux antibiotiques utilisés pour des traitements médicaux ou vétérinaires, pour lesquels l'évaluation des risques conclut qu'ils sont susceptibles d'avoir des effets préjudiciables sur la santé publique ou l'environnement. »
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor, sur l'article.
M. Jean-Marc Pastor. Nous arrivons à une nouvelle étape dans l'examen de ce projet de loi, qui concerne plus directement la transposition de la directive 2001/18/CE.
Je voudrais rappeler, à cet instant, comme cela a déjà été fait à deux ou trois reprises, que le rapport de la mission d'information sénatoriale sur les enjeux économiques et environnementaux des organismes génétiquement modifiés, remis en 2003, insistait sur deux points forts : la recherche publique sur les OGM, d'une part, la transparence et l'information locales, d'autre part. J'ai apporté un exemplaire de ce rapport (L'orateur le brandit.), afin que ceux d'entre mes collègues qui auraient encore des doutes, s'il en est, puissent s'y reporter : ces deux conclusions avaient été approuvées à l'unanimité.
Ces deux points ont orienté, pour l'essentiel, les analyses et les prises de position des membres de mon groupe sur les dispositions du projet de loi qui nous est soumis.
Or nous avons été amenés, ce que je regrette, à voter contre des amendements qui visaient à mettre en valeur la recherche publique afin de rassurer la communauté scientifique, qui en a bien besoin aujourd'hui.
En ce qui concerne la transparence locale, nous proposons que s'instaurent des échanges directs, ne passant pas forcément par les techniques modernes de communication, notamment par internet. Dans le département du Tarn, seulement 18 % de la population dispose aujourd'hui d'un accès à l'Internet.
Par conséquent, monsieur le ministre, si vous comptez utiliser internet comme vecteur essentiel de la diffusion de l'information à destination des populations locales, vous allez rencontrer des problèmes !
En effet, les essais et les mises en culture en milieu ouvert ne seront pas obligatoirement pratiqués dans des zones couvertes par les nouvelles technologies. Ils ne se feront pas à Paris, à Toulouse ou à Marseille ; ils se feront au plus profond de la France, là où ces techniques ne sont pas accessibles ! Si vous n'avez que cet outil d'information à proposer aux populations,...
M. Jean-Marc Pastor. ... il est incontestable que vous aurez des problèmes.
Quand on a peur d'aller au devant des gens, comme nous l'avons proposé, on suscite des réactions hostiles. Il faut les rencontrer, mettre en place des mécanismes locaux, comme les commissions locales d'information et de surveillance, dont vous avez refusé la création. Nous n'allons pas y revenir, mais elles auraient permis que des intervenants locaux puissent assurer le suivi et l'évaluation des essais confinés et se prononcer sur l'opportunité de passer aux essais en milieu naturel. Nous déplorons que vous ayez repoussé nos propositions, qui auraient pu être, le cas échéant, aménagées.
Par ailleurs, je voudrais maintenant évoquer les trois étapes des procédures d'essais, qui existent bel et bien, même si vous le niez : les essais en milieu confiné, les essais en milieu naturel - les articles 11 et 12 ont trait à la fois à la recherche et à la production - et la mise sur le marché de la production.
À chacune de ces étapes, il est indispensable, à notre sens, de mettre en place des dispositifs d'information reposant sur une relation directe, et non pas exclusivement sur des échanges par voie électronique, de façon que la population soit associée à la démarche et se sente concernée. Nos propositions à cet égard ont été, je le répète, rejetées. Nous avions pourtant annoncé que nous soutiendrions toute initiative favorisant la recherche, en milieu confiné comme en milieu ouvert, mais aussi la participation et l'information du grand public, qui nous semblent aujourd'hui indispensables si l'on veut franchir une étape supplémentaire.
Dans cet esprit, nous avons émis un vote favorable sur certains des articles 1er à 10 ; pour d'autres, nous nous sommes abstenus ou nous avons voté contre, parce que des amendements auxquels nous tenions avaient été repoussés.
En ce qui concerne le milieu ouvert, nous avons pu vous suivre sur l'article 11, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mais pas sur l'article 12.
S'agissant maintenant des articles 13 à 17, qui concernent notamment la mise sur le marché et la production d'OGM par dissémination volontaire, faute d'avancées en matière de recherche publique fondamentale et d'instauration d'une véritable participation locale, nous ne sommes guère rassurés !
C'est la raison pour laquelle, monsieur le président, le groupe socialiste ne participera pas - j'insiste sur ce point, afin que ma déclaration figure bien au compte rendu de nos débats - à la discussion et au vote sur les articles 13 à 17, du moins à l'occasion de cette première lecture, parce que les conditions pour aller plus loin s'agissant de la mise sur le marché des OGM ne sont pas réunies. Nous réservons notre décision en ce qui concerne la deuxième lecture. Certains de nos collègues ont souhaité invoquer l'irrecevabilité, mais ce n'est pas la démarche que nous avons privilégiée, car nous voulons mettre en exergue la recherche et l'information locale. En tout état de cause, nous ne pouvons accepter de poursuivre le débat sur de telles bases. Nous ne participerons pas davantage à l'examen de l'article 26.
En revanche, nous participerons aux débats et aux votes sur les articles 18 à 25 et 27, qui sont d'une portée majeure et dans lesquels on retrouvera un volet relatif à la recherche. (M. Jean-Marc Pastor quitte l'hémicycle.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc.
M. Jacques Blanc. Je déplore que les interventions de certains de nos collègues suscitent le doute, alors que, précisément, ce texte a le mérite - j'en rends hommage à M. le ministre et à M. le rapporteur - de nous faire sortir d'une situation qui n'était pas satisfaisante.
Il s'agit d'un sujet complexe et délicat, qui provoque certaines angoisses au sein d'une population peu avertie de la réalité des problèmes et qui n'est guère rassurée par la manière dont ceux-ci sont souvent présentés.
Or ce texte me paraît équilibré et prend en compte à la fois ces inquiétudes et les exigences de la recherche. Comment ne pas se mobiliser, mes chers collègues, pour permettre à cette dernière d'aller de l'avant et d'explorer toutes les perspectives ? L'enjeu est majeur, et il fallait donc bien sortir d'une situation ambiguë : il ne s'agit pas simplement de transposer une directive en droit interne.
Par ailleurs, s'agissant de l'information des populations, je vais finir par croire que la Lozère est en avance sur beaucoup d'autres départements !
M. Charles Revet. C'est vrai ! (Sourires.)
M. Jacques Blanc. Même dans les villages les plus reculés de la Lozère, nous avons accès à internet ! L'immense majorité des communes de mon département sont équipées en matériel informatique !
M. Gérard César. Grâce à vous !
M. Jacques Blanc. Non, ce n'est pas grâce à moi ! Les Lozériens ont bien compris l'intérêt, dans le monde actuel, de savoir utiliser les techniques modernes de l'information et de la communication.
Les réponses que vous nous avez apportées sur ce point sont satisfaisantes, monsieur le ministre. Ne laissons pas dire que nous refusons que les maires des communes concernées soient informés. Au contraire, nous voulons la transparence, et ce texte permet, précisément, de sortir d'une obscurité parfois entretenue, pour que les problèmes puissent être envisagés avec objectivité, sans jamais oublier le principe de précaution.
En tout état de cause, notre assemblée permet le dialogue et l'échange. Nous avons ainsi pu discuter d'un amendement relatif aux AOP, les appellations d'origine protégée, sujet qui nous préoccupe quelque peu. D'une manière générale, nous devons savoir traiter dans la sérénité des questions que, pendant trop longtemps, on n'a pas osé aborder.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. J'avoue être quelque peu déçu de la tournure que prend notre débat, qui, jusqu'à présent, s'était déroulé de façon assez satisfaisante. Il est vrai qu'il s'agissait de la transposition de la directive 98/81/CE, la plus facile à réaliser, puisque ce texte traite des essais en milieu confiné.
À partir du moment où nous abordons la question des essais en milieu ouvert, les choses se compliquent quelque peu. Cependant, je suis surpris que M. Delfau puisse estimer qu'une consultation publique nationale recourant à la voie informatique serait « confinée ». Il a sans doute voulu dire qu'elle serait confidentielle. Or, s'il est bien un outil d'information universel et planétaire, c'est la « toile », c'est l'Internet !
Vous avez ajouté, mon cher collègue, qu'une telle méthode est antidémocratique. Pourtant, même M. Charasse, s'il consentait à faire un effort, pourrait se servir d'un ordinateur, quitte à se faire assister ! (Sourires.) Il n'y a rien d'antidémocratique à recourir à la voie électronique.
En outre, comme l'a indiqué M. le ministre, il n'y aura que quelques dizaines d'essais en milieu naturel par an. Chaque maire concerné recevra automatiquement, et dans les plus brefs délais, une fiche d'information.
Par ailleurs, je déplore l'attitude de M. Pastor, qui fait abstraction de l'engagement pris par M. le ministre de mettre à disposition du Haut conseil des biotechnologies, au travers de sa section socioéconomique, des personnalités qualifiées qui seront à même, sur demande des élus locaux, d'organiser l'information des populations. Qu'est-ce là, sinon favoriser la transparence et le débat local ?
Je ne comprends donc pas l'attitude de M. Pastor. Nous en arrivons à la transposition de la directive 2001/18/CE. Elle est certes politiquement quelque peu délicate, mais - je le dis en pesant soigneusement mes mots, étant très prudent en matière de sémantique - j'estime que le groupe socialiste manque de réalisme politique, car nous devrons en passer par là : n'oublions pas que, en cas de non-transcription de cette directive, la France devrait acquitter 168 800 euros d'amende par jour !
Je n'aurai pas la malice de rappeler que cette directive a été votée sous le gouvernement de Lionel Jospin. Je le répète : je suis déçu par l'attitude de M. Pastor et de l'ensemble de nos collègues du groupe socialiste. Certes, je comprends que M. Pastor, qui rapporta les travaux de la mission d'information sur les enjeux économiques et environnementaux des organismes génétiquement modifiés, soit dans une situation inconfortable, parce que son groupe est divisé sur cette question, mais je ne puis accepter certains propos selon lesquels le dispositif manquerait de transparence et la consultation nationale prévue serait « confinée » et antidémocratique !
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, sur l'article.
M. Gérard Delfau. Je m'exprime, à cet instant, au nom des seuls radicaux de gauche siégeant au sein du groupe du RDSE : je suis volontairement prudent !
J'estime que les conditions d'un passage à la commercialisation des OGM, après les étapes successives de l'expérimentation confinée et de l'expérimentation en plein champ, ne sont pas réunies en matière de préservation de l'environnement et de l'accès aux semences, ainsi que de protection de la santé publique.
De plus, le dispositif présenté vise à éviter toute information et tout débat local dans les communes concernées par des expérimentations pouvant receler des risques.
Je vous ferai observer, monsieur le ministre, que lorsqu'il s'agit d'apprécier un risque d'épidémie ou d'accident toxique ou nucléaire, on recourt, depuis une dizaine d'années, à des procédures lourdes. Personne ne pourrait concevoir l'absence tant d'une information précise que d'une commission locale, comprenant notamment, et en premier lieu, les élus locaux saisis sur chaque dossier.
Même quand il s'agit de réviser des règles d'urbanisme, on recourt à des enquêtes publiques. Or la portée de ces modifications est sans commune mesure avec le champ de risque que vous ouvrez.
Concernant le projet de transposition de la directive, je maintiens ce que je disais : vous voulez un débat confiné, vous refusez qu'il soit conduit en pleine clarté, sur le terrain. La position que j'ai prise est donc tout à fait logique.
Après une première phase dans laquelle les risques, même s'ils existent - et nous les avons soulignés -, sont limités, je considère que nous entrons, avec les articles 13 à 17, dans un champ d'expérimentation et d'autorisation beaucoup plus important en termes de risques. C'est la raison pour laquelle je ne prendrai pas part au vote, avec les membres de la sensibilité de gauche du RDSE.
M. Jacques Blanc. Courage, fuyons !
M. Gérard Delfau. Mais comme, à cet instant, je représente aussi l'ensemble du RDSE, j'assisterai au débat et je ne me priverai pas d'apporter éventuellement un avis, si cela me paraît utile.
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 170, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 533-4 du code de l'environnement :
« Art. L. 533-4. - I. La mise sur le marché fait l'objet d'une autorisation préalable délivrée par l'autorité administrative après accord des autres États membres de l'Union européenne ou de l'autorité communautaire compétente.
« II. Conformément au principe de précaution, cette autorisation est délivrée par l'autorité administrative après évaluation de tout risque direct ou indirect, immédiat ou différé pour la santé publique et l'environnement et notamment des risques susceptibles de découler du transfert de gènes de produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés à d'autres organismes, ainsi qu'une analyse des effets cumulés à long terme de la mise sur le marché sur la santé et l'environnement.
« III. Lorsque le ministre de l'agriculture, en raison d'informations nouvelles ou complémentaires, devenues disponibles après que l'autorisation a été donnée et qui affectent l'évaluation des risques pour l'environnement ou en raison de la réévaluation des informations existantes sur la base de connaissances scientifiques nouvelles ou complémentaires, a des raisons précises de considérer qu'un organisme génétiquement modifié en tant que produit ou élément de produit ayant fait l'objet d'une notification en bonne et due forme et d'une autorisation écrite conformément à la présente directive présente un risque pour la santé humaine ou l'environnement, il peut limiter ou interdire, à titre provisoire, l'utilisation et/ou la vente de cet organisme génétiquement modifié en tant que produit ou élément de produit sur son territoire.
« Le ministre de l'agriculture veille à ce qu'en cas de risque grave, des mesures d'urgence consistant, par exemple, à suspendre la mise sur le marché ou à y mettre fin, soient prises, y compris en ce qui concerne l'information du public.
« IV. L'autorisation de mise sur le marché, y compris les conditions qui y sont spécifiées, est rendue publique, ainsi que, le cas échéant, la décision prise à l'issue de la procédure communautaire en cas d'objection.
« L'autorisation ne vaut que pour l'usage qu'elle prévoit.
« Elle doit être assortie de prescriptions. Elle doit être motivée par référence à son intérêt pour la société et l'environnement.
« La durée de l'autorisation est limitée. Tout refus d'autorisation est explicite et motivé.
« V. Au plus tard à la date mentionnée à l'article 4 de la directive 2001/18/CE du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement, aucune autorisation n'est délivrée pour la mise sur le marché de produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés qui contiennent des gènes exprimant une résistance aux antibiotiques utilisés pour des traitements médicaux ou vétérinaires et pour lesquels l'évaluation des risques conclut qu'ils sont susceptibles d'avoir des effets préjudiciables sur la santé publique ou l'environnement. Les autorisations de mise sur le marché délivrées antérieurement à cette date, pour ce type d'organismes génétiquement modifiés, prennent fin à cette même date.
« VI. Les produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés, y compris les produits et sous-produits d'animaux élevés avec une alimentation composée en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés, mis sur le marché sont soumis à étiquetage. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet de mettre le projet de loi en conformité avec la directive 2001/18/CE en ce qui concerne l'évaluation des risques et le droit d'information du public relatif aux délivrances d'autorisation de mise sur le marché.
Monsieur le ministre, je crois que vous ne disposez pas des bons chiffres en matière de technologies de l'information et de la communication. En effet, à peine 38 % ou 40 % des foyers français sont équipés d'ordinateurs et de lignes internet. La communication reste donc très élitiste lorsqu'il s'agit de la diffusion de l'information par cette voie. C'est la raison pour laquelle nous demandons la mise en place d'une véritable information du public.
Enfin, cet amendement précise que toute autorisation d'OGM prend en compte tout risque direct ou indirect, immédiat ou différé pour la santé publique et l'environnement, et notamment les risques susceptibles de découler du transfert de gènes de produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés à d'autres organismes, ainsi qu'une analyse des effets cumulés à long terme de la mise sur le marché sur la santé et l'environnement.
Permettez-moi de vous rappeler les termes des attendus du jugement d'Orléans, qui montrent à quel point il est impossible scientifiquement de prévoir les effets à long terme de la transgénèse. Cet extrait devrait à lui seul vous convaincre du fait que seul un moratoire constituerait une solution respectant le principe de précaution :
« Attendu qu'il importe de rappeler que la construction d'une variété transgénique est, pour partie, le fruit d'un événement aléatoire baptisé " événement " ; que les constructions artificielles génétiques sont, en effet, introduites dans les cellules de l'organisme à modifier grâce à différentes méthodes qui ont pour résultat de les insérer de façon aléatoire dans le génome de cet organisme " receveur ", ce qui peut entraîner des effets indéterminés et imprévus, pouvant aller jusqu'à des anormalités grossières chez les animaux ou les plantes, et, à un degré moindre, favoriser l'essor de toxines et d'allergènes dans les plantes destinées à l'alimentation ; que ce premier problème dans la construction initiale se double ensuite de la question de l'instabilité des lignées transgéniques au fil des générations, instabilité qui rend extrêmement difficile l'évaluation raisonnée des risques résultant de l'utilisation des semences transgéniques sur plusieurs générations. »
M. Charles Revet. C'est un cours de sciences ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. « Attendu que ces problèmes de distribution aléatoire de la modification génétique dans le génome puis de sa stabilité dans le temps, maîtrisables dans le cadre de modifications créées et désirées par l'homme, au sein d'une même variété et en milieu confiné, sont imprévisibles et incontrôlés en cas de modification génétique induite sur une variété non transgénique par pollinisation ou de transfert d'un gène modifié au bénéfice d'une bactérie ou d'un champignon, dans l'hypothèse d'essais en plein champ. »
Notre amendement permet également une mise en conformité du projet de loi avec l'article 13 de la directive, relatif à l'étiquetage des produits issus d'organismes génétiquement modifiés. En outre, l'amendement vise à assurer l'information du public sur l'incorporation d'OGM dans l'alimentation des animaux qu'il consomme.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 131 est présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 171 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 203 rectifié ter est présenté par MM. Mercier, Zocchetto et les membres du groupe de l'Union centriste-UDF.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Dans le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-4 du code de l'environnement, après les mots :
par l'autorité administrative
insérer les mots :
après consultation du Conseil des biotechnologies, du public et
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 131.
M. Gérard Le Cam. Dans la logique de l'amendement précédent, nous souhaitons connaître le rôle du Haut conseil des biotechnologies dans l'ensemble du mécanisme d'autorisation administrative de dissémination volontaire d'OGM à des fins de mise sur le marché.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 171.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Lors de l'examen de l'article précédent, le Gouvernement avait indiqué que les autorisations de dissémination d'OGM étaient soumises à autorisation après consultation du public, mais en oubliant de préciser que le Haut conseil des biotechnologies était consulté.
Dans l'article 13, ce sont à la fois le Haut conseil des biotechnologies et le public qui sont oubliés.
La précision proposée par cet amendement permet, là encore, d'éviter une interprétation erronée de cet article, selon laquelle la seule décision administrative pourrait se substituer à l'examen d'un dossier d'autorisation par le Haut conseil des biotechnologies.
Il est en effet indispensable que la consultation du Haut conseil des biotechnologies constitue effectivement la garantie fondamentale accordée aux citoyens pour la protection de la santé publique et la préservation de l'environnement, comme cela est indiqué dans l'exposé des motifs du projet de loi.
Par ailleurs, s'agissant de la mise sur le marché, la consultation du public se révèle encore plus importante que dans le cas d'une dissémination volontaire, les produits autorisés étant destinés notamment à entrer dans la filière alimentaire.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Amoudry, pour présenter l'amendement n° 203 rectifié ter.
M. Jean-Paul Amoudry. Comme l'amendement n° 206 rectifié bis, que nous avions déposé à l'article 12, cet amendement a pour objet d'apporter une précision au texte afin de renforcer les principes de transparence et d'information du public.
Cette précision vise à rendre obligatoire la consultation du Haut conseil des biotechnologies et du public lors de la procédure d'autorisation de mise sur le marché d'organismes génétiquement modifiés.
Dans l'article du projet de loi, l'autorité administrative délivre une autorisation de mise sur le marché sans consulter ni le public ni le Haut conseil des biotechnologies. Cela nous semble inadapté au regard de la dynamique de transparence et d'information du public que nous voulons mettre en avant.
Il nous semble donc indispensable, naturel et légitime que le Haut conseil des biotechnologies et le public soient consultés dans tous les cas de mise sur le marché d'un organisme génétiquement modifié.
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-4 du code de l'environnement, remplacer les mots:
de l'ensemble des risques
par les mots:
des risques, directs ou indirects, immédiats ou différés,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement tend à reprendre les termes de la définition communautaire de l'évaluation des risques telle qu'elle a été prévue à l'article 2.8 de la directive 2001/18/CE.
M. le président. L'amendement n° 26, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-4 du code de l'environnement, remplacer les mots:
que la dissémination volontaire
par les mots:
qu'elle
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. L'amendement n° 27 rectifié, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter in fine le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-4 du code de l'environnement par les mots :
et après avis rendu public du haut conseil des biotechnologies.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement vise à rappeler la nécessité de consulter le Haut conseil des biotechnologies avant d'autoriser la mise sur le marché d'un OGM.
M. le président. Cet amendement est assorti de deux sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 214 rectifié est présenté par M. Charasse.
Le sous-amendement n° 221 est présenté par MM. César, Demessine et Pointereau.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
À la fin du texte proposé par l'amendement n° 27 rectifié, après les mots :
des biotechnologies
ajouter les mots :
ou de sa section scientifique
Le sous-amendement n° 214 rectifié a été précédemment retiré.
La parole est à M. Rémy Pointereau, pour présenter le sous-amendement n° 221.
M. Rémy Pointereau. L'autorisation de dissémination dépend d'une évaluation des risques sanitaires et environnementaux, et non des éventuels futurs bénéfices socioéconomiques. Dès lors, l'expertise des impacts sanitaires et environnementaux doit être conduite de façon indépendante et distincte par la section scientifique du Conseil, qui a la légitimité requise pour cela.
La section socioéconomique n'a pas à se prononcer sur chaque demande d'autorisation de dissémination, car cela conduirait à la remise en cause des expertises scientifiques et techniques par des personnes non compétentes sur le plan scientifique.
De plus, la saisine de la section socioéconomique au cas par cas pose le problème de la confidentialité de certains éléments contenus dans les dossiers de demande d'autorisation, notamment en matière de secret industriel et de propriété intellectuelle ou commerciale.
M. le président. L'amendement n° 130, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme De Messine et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-4 du code de l'environnement par les mots :
et des bénéfices éventuels attendus par l'organisme génétiquement modifié concerné
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L'introduction du principe de précaution dans notre Constitution, au sein de la Charte de l'environnement, impose aux autorités publiques de procéder, en cas d'incertitude scientifique et de présomption de risques, à une évaluation de ces risques.
Toute analyse de risques doit comporter une analyse économique débouchant sur une étude coût-bénéfice, au sens large, préalable à la prise de décision.
Il y a déjà eu un certain nombre d'amendements allant dans ce sens et, comme vous le savez, nous demandons un moratoire sur la culture commerciale d'OGM.
Ce qui nous oppose dans ce débat tient à l'objet même des OGM. Nous estimons en effet que la société et l'autorité administrative pourraient leur faire jouer un rôle efficace d'ordre humanitaire, social et environnemental. Or, aujourd'hui, on laisse le champ un peu trop libre à la recherche privée, dont les intérêts sont avant tout financiers.
Les OGM pourraient être utiles à la société, à condition que celle-ci indique la direction à suivre. À cet égard, nos points de vue divergent.
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Au quatrième alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-4 du code de l'environnement, remplacer les mots :
peut être
par le mot :
est
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur les autres amendements, ainsi que sur le sous-amendement n° 221.
M. Jean Bizet, rapporteur. L'amendement n° 28 a pour objet d'assortir systématiquement l'autorisation de mise sur le marché de prescriptions, ce qui est conforme à l'article 19 de la directive, selon lequel l'autorisation écrite indique explicitement les conditions de mise sur le marché du produit et les conditions de protection des écosystèmes/environnements particuliers et/ou zones géographiques particulières.
J'en viens à l'avis de la commission sur les autres amendements, ainsi que sur le sous-amendement n° 221.
La commission est défavorable à l'amendement n° 170.
Elle est également défavorable aux amendements identiques nos 131, 171 et 203 rectifié ter, qui sont partiellement satisfaits par l'amendement n° 27 rectifié.
S'agissant du sous-amendement n° 221, nous souhaitons, comme je l'ai dit tout à l'heure à M. Charasse, maintenir l'unité du Haut conseil des biotechnologies. Aussi, je demande aux auteurs de ce sous-amendement de bien vouloir le retirer. À défaut, j'émettrais un avis défavorable.
Enfin, la commission est défavorable à l'amendement n° 130.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. En ce qui concerne l'amendement n° 170, le Gouvernement émet un avis défavorable, car le dispositif proposé est très différent de celui qui est prévu dans le projet de loi.
Il émet également un avis défavorable sur les amendements identiques nos 131, 171 et 203 rectifié ter, qui sont partiellement satisfaits.
Le Gouvernement est en revanche favorable aux amendements nos 25, 26 et 27 rectifié.
Concernant le sous-amendement n° 221, l'avis est défavorable pour les raisons qui ont déjà été exposées, mais notre désaccord ne tient pas au fond.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 130, pour des raisons qui ont été largement explicitées.
Enfin, il émet un avis favorable sur l'amendement n° 28.
M. le président. Monsieur Le Cam, l'amendement n° 131 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Oui, monsieur le président.
M. le président. Madame Boumediene-Thiery, qu'en est-il de l'amendement n° 171 ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Et l'amendement n° 203 rectifié ter, monsieur Amoudry ?
M. Jean-Paul Amoudry. Il est maintenu, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 131, 171 et 203 rectifié ter.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Monsieur César, le sous-amendement n° 221 est-il maintenu ?
M. Gérard César. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 221 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
Article 14
L'article L. 533-5 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 533-5. - I. - Un décret en Conseil d'État fixe la liste des informations communiquées par les personnes demandant les autorisations mentionnées aux articles L. 533-3 et L. 533-4, qui ne peuvent pas rester confidentielles.
« Lorsque les demandes d'autorisation sont instruites par la Commission européenne ou par un État membre autre que la France, les informations reconnues confidentielles, à cette occasion, ne peuvent être communiquées à des tiers.
« II. - L'autorité administrative communique à la Commission européenne toutes les informations nécessaires à l'instruction des demandes, même si elles présentent un caractère confidentiel.
« III. - Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux activités couvertes par le secret de la défense nationale. »
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 172, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 533-5 du code de l'environnement :
« Art. L. 533-5. - I. Le demandeur de l'autorisation préalable de dissémination d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement doit adresser à l'autorité administrative, en langue française, les éléments d'informations suivants :
« 1° un dossier technique contenant notamment les informations indiquées à l'annexe III de la directive 2001/18/CE, qui sont nécessaires pour procéder à l'évaluation des risques pour l'environnement de la dissémination volontaire d'un organisme génétiquement modifié ou d'une combinaison d'organismes génétiquement modifiés ;
« 2° l'évaluation des risques pour l'environnement et les conclusions prévues à l'annexe II, section D de la directive 2001/18/CE, ainsi que les références bibliographiques et l'indication des méthodes utilisées ;
« 3° les résultats des études de dissémination en milieu confiné et les motifs pour lesquels une étude de dissémination en milieu ouvert est impérative ;
« 4° les mesures assurant la protection des cultures d'organismes non génétiquement modifiés de toute dissémination volontaire ou involontaire ;
« 5° La copie du contrat d'assurance des mises en culture.
« II. Le demandeur d'une autorisation de dissémination volontaire peut indiquer à l'autorité administrative les informations fournies à l'appui de sa demande dont la divulgation pourrait porter atteinte à sa position concurrentielle. À cette fin, il lui apporte les éléments de nature à justifier le caractère confidentiel de ces informations. Le demandeur préalablement consulté, l'autorité administrative fixe, sur avis du conseil des biotechnologies, la liste des informations qui ne peuvent être communiquées à des tiers. Elle en informe le demandeur.
« Les informations contenues dans les dossiers de demande d'autorisation de dissémination volontaire instruite par la Commission des Communautés européennes ou par un État membre autre que la France, reconnues confidentielles par ces autorités, dans les conditions fixées par la directive 2001/18/CE, ne peuvent être communiquées à des tiers.
« III. Ne peuvent être considérées comme confidentielles les informations fournies à l'appui d'une demande d'autorisation de dissémination volontaire et portant sur :
« 1° La description exacte du ou des organismes génétiquement modifiés ;
« 2° Le nom et l'adresse du demandeur et des responsables, personnes physiques et morales, de l'opération de dissémination ;
« 3° Le but de la dissémination ;
« 4° Le lieu de la dissémination : nom de la commune et numéros des parcelles cadastrées concernées ;
« 5° L'utilisation prévue du ou des organismes génétiquement modifiés ;
« 6° Les méthodes et plans de surveillance du ou des organismes génétiquement modifiés et d'intervention en cas d'urgence ;
« 7° L'ensemble des études relatives à l'évaluation des effets et des risques des organismes génétiquement modifiées pour la santé et l'environnement, réalisées par tout demandeur d'une autorisation de dissémination d'organismes génétiquement modifiés. À ce titre, les informations produites en fonction des annexes II et III de la directive 2001/18/CE sont publiques. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet de transposer les prescriptions de la directive 2001/18/CE, notamment de son article 25, en ce qui concerne les informations qui doivent être fournies lors d'une demande d'autorisation, en particulier les informations qui ne peuvent être considérées comme confidentielles.
En l'état actuel, le projet de loi renvoie, dans son article 14, à un décret en Conseil d'État pour la fixation de la liste des informations qui ne peuvent pas rester confidentielles, tout en prévoyant noir sur blanc, dans son article 8, que des informations « utiles » mais « dont la divulgation pourrait porter préjudice aux intérêts de l'exploitant » pourront être absentes du dossier d'information.
M. le président. L'amendement n° 132, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le I du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-5 du code de l'environnement :
I. - Les personnes demandant les autorisations mentionnées aux articles L. 533-3 et L. 533-4 doivent fournir toutes les informations dont elles disposent. Aucune clause de confidentialité ne peut être admise.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Mes chers collègues, vous aurez constaté que nos amendements, comme d'autres d'ailleurs, portent souvent sur la transparence. C'est aussi le cas de celui-ci.
Pour illustrer mes propos, mais sans avoir l'ambition d'être original, je citerai à mon tour Robb Fraley, vice-président de Monsanto chargé de la technologie, qui exposait dans Le Monde du 22 mars son point de vue sur la transparence et expliquait pourquoi il n'était pas question pour lui de mettre dans le domaine public les données qui pourraient renseigner le public sur la toxicité éventuelle des OGM : « Notre compagnie n'a certainement pas l'intention de rendre publiques des données confidentielles qui sont la clé du succès de nos produits. »
M. Gérard Delfau. Eh oui !
M. Gérard Le Cam. Voilà pourquoi il ne faut permettre aucune clause de confidentialité et être plus que vigilants avec les multinationales semencières, qui n'ont qu'un but : faire plus de bénéfices, au mépris de la société, de l'environnement et de notre futur, qui est pourtant aussi le leur.
C'est donc encore une fois avec beaucoup d'insistance que je vous demande, mes chers collègues, de voter notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 29 rectifié, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
À la fin du premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-5 du code de l'environnement, remplacer les mots :
qui ne peuvent pas rester confidentielles
par les mots :
qui ont un caractère public, si elles ne sont pas protégées par la loi
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Bizet, rapporteur. Cet amendement vise à renverser la perspective et à substituer au principe du secret un principe de transparence des informations fournies par le demandeur d'autorisation de mise sur le marché.
Par symétrie avec le dispositif retenu à l'article 8 concernant le dossier d'agrément pour une utilisation confinée d'OGM, il est proposé de n'apporter au caractère public des informations que des réserves tenant à la protection légale dont elles sont susceptibles de bénéficier.
M. le président. L'amendement n° 55 rectifié, présenté par MM. César, Grignon, Doublet, Pointereau et Mortemousque, Mme Gousseau, MM. Bécot, Leroy, de Raincourt, Juilhard, Barraux, Martin et Gouteyron, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-5 du code de l'environnement par les mots :
dès lors qu'elles ne sont pas de nature à porter atteinte au secret de la vie privée ou à la sécurité des biens et des personnes
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Cet amendement vise à garantir la protection des informations susceptibles de porter atteinte à la sécurité des personnes réalisant des expérimentations d'OGM en plein champ ou cultivant des OGM à des fins commerciales, comme le préconise la Commission d'accès aux documents administratifs dans son avis n° 20030691 du 27 mars 2003.
S'agissant de la fiche d'implantation, la CADA a en effet émis un avis défavorable à sa communication, « ce document contenant des éléments touchant à la vie privée et permettant d'identifier les personnes pratiquant ces essais ».
Par ailleurs, depuis la publication de la liste des communes où sont implantés les essais d'OGM en plein champ, la moitié des expérimentations mises en place sont détruites chaque année par des opposants.
Il convient donc de protéger les agriculteurs concernés, les expérimentations et les cultures d'OGM en évitant la publication des données susceptibles de leur porter préjudice.
M. le président. L'amendement n° 133, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 533-5 du code de l'environnement par un alinéa ainsi rédigé :
« Ne sont pas reconnues confidentielles, les informations ayant trait à la sécurité sanitaire ou environnementale et, en particulier, le résultat des analyses toxicologiques dans le cas d'organismes génétiquement modifiés destinés à la consommation humaine ou animale. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 205 rectifié bis, présenté par MM. Mercier, Zocchetto et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après le I du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-5 du code de l'environnement, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Ne peuvent être considérées comme confidentielles les informations fournies à l'appui d'une demande d'autorisation de dissémination volontaire et portant sur :
« 1° La description exacte du ou des organismes génétiquement modifiés ;
« 2° Le nom et l'adresse du demandeur et des responsables, personnes physiques et morales, de l'opération de dissémination ;
« 3° Le but de la dissémination ;
« 4° Le lieu de la dissémination : nom de la commune et numéros des parcelles cadastrées concernées ;
« 5° L'utilisation prévue du ou des organismes génétiquement modifiés ;
« 6° Les méthodes et plans de surveillance du ou des organismes génétiquement modifiés et d'intervention en cas d'urgence ;
« 7° L'ensemble des études relatives à l'évaluation des effets et des risques des organismes génétiquement modifiées pour la santé et l'environnement, réalisées par tout demandeur d'une autorisation de dissémination d'organismes génétiquement modifiés. À ce titre, les informations produites en fonction des annexes II et III de la directive 2001/18/CE sont publiques. »
La parole est à M. Jean-Paul Amoudry.
M. Jean-Paul Amoudry. Cet amendement a pour objet de transposer les prescriptions de la directive 2001/18/CE de manière plus large que le projet de loi ne le fait. En effet, dans un souci de transparence accrue, nous ne pouvons pas nous permettre de transcrire a minima l'article 25 de la directive.
Cet article, d'une part, établit une liste détaillée des informations qui doivent être fournies lors d'une demande d'autorisation de dissémination volontaire ; d'autre part, il précise la liste des informations qui ne peuvent être considérées comme confidentielles.
Conformément à cet article, nous estimons que l'ensemble des études relatives à l'évaluation des effets et des risques des organismes génétiquement modifiés pour la santé et l'environnement ne peuvent demeurer confidentielles.
De même, l'indication du but de la dissémination d'organismes génétiquement modifiés ainsi que celle de la localisation de la dissémination sont des informations qui doivent être portées à la connaissance du public.
Je le répète, le souci de transparence nous impose de rendre aussi claire que possible toute procédure d'autorisation de dissémination d'OGM.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements qui n'émanent pas d'elle ?
M. Jean Bizet, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 172 : nous sommes dans le domaine réglementaire.
Elle est également défavorable à l'amendement n° 132, mais je veux « rebondir » sur les propos tenus par M. Le Cam à propos de l'article paru dans un grand quotidien du soir, dont j'estime qu'il recèle une grande ambiguïté.
Il est clair que les éléments toxicologiques ne sont pas confidentiels pour la section scientifique du Haut conseil des biotechnologies et qu'ils sont bien évidemment communiqués aux scientifiques pour qu'ils se prononcent, au cas par cas, sur l'usage des OGM. Mais, au-delà de la section scientifique, ces informations relèvent du secret industriel et commercial ; les scientifiques, qui non seulement sont de qualité mais qui ont aussi le sens de l'éthique, n'ont pas à les divulguer.
La commission estime que l'amendement n° 55 rectifié est satisfait par son amendement n° 20 rectifié, adopté à l'article 8, dont la formulation générale lui paraît préférable. Elle demande donc le retrait de l'amendement n° 55 rectifié.
La commission est défavorable à l'amendement n° 133.
Enfin, elle est défavorable à l'amendement n° 205 rectifié bis, qui est d'ordre réglementaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les six amendements en discussion commune ?
M. François Goulard, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, il ne vous étonnera pas que le Gouvernement ait le même avis que la commission.
Ainsi, il est défavorable à l'amendement n° 172, du fait de son caractère réglementaire mais aussi pour de multiples raisons que j'ai déjà avancées en ce qui concerne l'information.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 132, et il partage la position exprimée par M. le rapporteur.
Le Gouvernement est en revanche favorable à l'inversion proposée à l'amendement n° 29 rectifié, qui rend en effet le texte plus clair.
Il est défavorable à l'amendement n° 55 rectifié, mais je crois comprendre que ses auteurs sont satisfaits par les explications données par M. le rapporteur et qu'ils s'apprêtent à retirer leur amendement.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 133, qui est incompatible avec la directive 2001/18/CE.
Enfin, sur l'amendement n° 205 rectifié bis, il n'y a pas de désaccord de fond, mais nous avons choisi de faire figurer ces précisions dans le décret. La simple cohérence m'amène donc à émettre un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Amoudry, l'amendement n° 205 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Paul Amoudry. M. le ministre délégué vient d'indiquer que le Gouvernement avait prévu d'intégrer la liste d'informations qui fait l'objet de cet amendement dans le décret.
Je souhaiterais savoir si tous les éléments qui figurent dans cette liste seront repris de manière exhaustive dans le décret ou si nous sommes en désaccord avec le Gouvernement sur certaines des informations dont nous souhaitons qu'elles ne soient pas considérées comme confidentielles.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le sénateur, la liste qui figure dans votre amendement résulte très directement de la directive. Le décret sera évidemment conforme à celle-ci et répondra au souci d'assurer l'information la plus complète possible.
Nous avons assez longuement expliqué dans quelle mesure les secrets industriels devaient, naturellement, être préservés, mais ne devaient en aucun cas faire obstacle à l'émission d'un avis totalement fondé par le Haut conseil non plus qu'à la parfaite et complète information du public quant aux conséquences possibles, et pour la santé humaine et pour l'environnement, des OGM.
Nous sommes donc exactement sur la même ligne.
M. Jean-Paul Amoudry. Dans ces conditions, je retire l'amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 205 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 172.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote sur l'amendement n° 132.
M. Gérard Le Cam. C'est la vertu du débat que de permettre d'éclairer d'un jour nouveau certaines notions. Il n'en reste pas moins que, même si les scientifiques de la section scientifique du futur haut conseil des biotechnologies ont à leur disposition, comme cela vient de nous être dit, l'ensemble des éléments d'information, on est en droit de penser que certaines grandes firmes hésiteront à communiquer à des scientifiques parfois issus de maisons concurrentes des éléments qu'ils ne sont pas censés connaître.
C'est tout le problème de la transparence et de la confidentialité, et je crois que notre amendement a toute sa justification.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le sénateur, je puis vous dire d'avance quelle serait notre réaction dans l'hypothèse où une entreprise manifesterait une certaine réticence à communiquer des informations au Haut conseil et à l'autorité administrative : l'autorisation lui serait tout simplement refusée, parce qu'il n'est pas question que nous admettions ce type de comportement.
M. Gérard César. Très bien !
M. Rémy Pointereau. Parfait !
M. le président. L'amendement n° 55 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard César. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 55 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 133.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, la suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
6
DÉPÔT DE questions orales avec débat
M. le président. J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante :
N° 15 - Le 30 mars 2006 - M. Jean Puech appelle l'attention de M. le ministre délégué aux collectivités territoriales sur les difficultés éprouvées par les collectivités territoriales dans l'accès aux informations qui leur sont nécessaires pour mener les politiques publiques dont elles ont la charge. D'un côté, les collectivités doivent fournir un grand nombre de données aux administrations déconcentrées de l'État ou à d'autres organismes. De l'autre, elles ont souvent la plus grande peine à obtenir les informations qui pourtant les concernent. Après des années de débat, l'Assemblée nationale a obtenu, par l'article 106 de la loi de finances pour 2006 n° 2005-1719 du 30 décembre 2005, la transmission des rôles supplémentaires d'imposition et des montants des compensations, exonérations et dégrèvements dont les contribuables locaux ont bénéficié. Ces informations sont indispensables à une politique fiscale éclairée. Mais il faut aller plus loin. Il est nécessaire que les collectivités disposent des données non seulement fiscales, mais aussi sociales qui les concernent. Il faut qu'une commune puisse aisément savoir, et contrôler, combien de titulaires du RMI, de personnes sans emploi, de logements sociaux, sont situés sur son territoire. Il faut qu'elle puisse anticiper les recettes fiscales ou les dotations liées aux constructions nouvelles. Cela suppose la collaboration active des services de l'État, services fiscaux, services de l'équipement, mais aussi des organismes sociaux, caisses d'allocations familiales, ANPE, URSSAF, offices d'HLM... En conséquence, il lui demande ce qu'il compte faire pour améliorer la transparence des données nécessaires à l'exercice des politiques publiques locales, et pour instaurer des relations plus confiantes entre les autorités locales élues et les responsables administratifs de l'État, de la sécurité sociale ou des établissements publics qui en dépendent, confiance réciproque qui est indispensable à la réussite de la décentralisation, que tous les élus appellent de leurs voeux.
Conformément aux articles 79 et 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.
J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante :
N° 16 - Le 30 mars 2006 - M. Guy Fischer interroge M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur les conditions de transfert du revenu minimum d'insertion aux départements.
Mis en oeuvre par la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité, ce transfert conduit, dans de nombreux cas, les départements à être en situation de prendre à leur charge, au seul profit de l'État, les dépenses recouvrées par l'ensemble des actions liées au revenu minimum d'insertion, qu'il s'agisse de l'instruction des dossiers des allocataires, du versement des allocations et du suivi de leurs parcours et projets d'insertion.
Ce constat, largement partagé par l'ensemble des conseils généraux et qui a fait l'objet de plusieurs motions de l'Association des départements de France, montre à l'expérience que la solidarité nationale, traduite entre autre par l'existence du RMI, ne peut avoir vocation à être décentralisée, sauf à faire courir aux allocataires le risque d'une déperdition de la qualité des prestations fournies.
Il invite donc le Gouvernement, en lien avec la représentation nationale et les conseils généraux, à réfléchir dès maintenant aux conditions du retour, à la situation originelle, c'est-à-dire le financement direct par l'État des missions de solidarité nationale lui incombant.
Conformément aux articles 79 et 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.
7
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI organique
M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection du Président de la République.
Le projet de loi organique sera imprimé sous le n° 271, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
8
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 269, distribué et renvoyé à la commission des affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
9
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président. J'ai reçu de M. Philippe Marini un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux offres publiques d'acquisition (n° 262, 2005-2006).
Le rapport sera imprimé sous le n° 268 et distribué.
J'ai reçu de M. Dominique Braye un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant engagement national pour le logement (n° 188, 2005-2006).
Le rapport sera imprimé sous le n° 270 et distribué.
10
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président. J'ai reçu de M. Adrien Gouteyron un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la simplification de la gestion des ambassades.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 272 et distribué.
11
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, jeudi 23 mars 2006, à neuf heures trente, quinze heures et, éventuellement, le soir :
1. Discussion, en troisième lecture, du projet de loi (n° 262, 2005-2006), modifié par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux offres publiques d'acquisition.
Rapport (n° 268, 2005-2006) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
2. Suite de la discussion du projet de loi (n° 200, 2005 2006) relatif aux organismes génétiquement modifiés.
Rapport (n° 258, 2005-2006) de M. Jean Bizet, fait au nom de la commission des affaires économiques.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délais limites pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Question orale avec débat (n° 10) de M. Jean-Pierre Bel sur le bilan des violences urbaines et la situation dans les banlieues ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 27 mars 2006, à dix-sept heures.
Débat sur le rapport d'information de M. Claude Belot, sur le développement des télévisions de proximité en France (n° 417, 2004-2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 27 mars 2006, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires culturelles (n° 265, 2005-2006) sur la proposition de loi de MM. Ivan Renar, Jacques Valade et plusieurs de leurs collègues, modifiant le code général des collectivités territoriales et la loi n° 2002-6 du 4 janvier 2002 relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle (n° 224, 2005-2006) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 27 mars 2006, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 27 mars 2006, à seize heures.
Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection du Président de la République (n° 271, 2005-2006) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 28 mars 2006, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 28 mars 2006, à dix-sept heures.
Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative au droit de préemption et à la protection des locataires en cas de vente d'un immeuble (n° 137, 2005-2006) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 28 mars 2006, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 28 mars 2006, à dix-sept heures.
Sous réserve de sa transmission, projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005 relative à la garantie de la conformité du bien au contrat due par le vendeur au consommateur (A.N., n° 2293) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 29 mars 2006, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 28 mars 2006, à dix-sept heures.
Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant engagement national pour le logement (n° 188, 2005-2006) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 29 mars 2006, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 27 mars 2006, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 23 mars 2006, à zéro heure trente.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD