PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au secteur de l'énergie.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 10, à l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements et sous-amendements.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Monsieur le président, je commencerai donc par l'amendement n° 450 de suppression de l'article, qui a été défendu par M. Coquelle. Mon argumentation vaudra également pour l'amendement n° 161, présenté par M. Courteau, car ces amendements ont en fait la même finalité.

Chers collègues de l'opposition, l'article 10 est, bien sûr, l'un des articles essentiels de ce projet de loi, puisqu'il prévoit la privatisation de Gaz de France. Indiscutablement, nous ne sommes pas du tout d'accord avec vous sur cette évolution ; nous avons ainsi, les uns et les autres, abondamment défendu nos points de vue respectifs. Même si je ne me lancerai pas à nouveau dans une longue explication, je souhaite tout de même m'appesantir quelque peu sur ce sujet, ce qui m'évitera d'y revenir pour les amendements suivants.

À cet égard, c'est vrai, nous avons changé de position en deux ans.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Guy Fischer. Ah !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Mais il est vrai aussi que la situation a beaucoup évolué durant cette période.

M. Bernard Piras. C'est un peu facile comme argument !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Plus précisément, c'est le paysage énergétique mondial qui a changé.

Mme Michelle Demessine. Cela va encore bouger !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Peut-être, ma chère collègue.

En tout état de cause, nous avons tous bien vu ce qui s'est passé en Grande-Bretagne avec Centrica, en Espagne avec Endesa, en Italie avec Edison et en Grande-Bretagne avec London Energy. Il y aussi Gazprom, et je ne fais pas simplement allusion à l'accord entre cette société russe et Sonatrach, que M. Fourcade a évoqué tout à l'heure. En effet, la gourmandise de Gazprom s'illustre partout, sous la forme, notamment, de prises de participations dans E.ON, en Allemagne, ainsi que dans l'électricien russe possédant 70 % du marché russe.

M. Bernard Piras. Bientôt chez nous !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La situation bouge aussi en France : heureusement pour nous, les opérateurs français, notamment EDF, sont suffisamment dynamiques !

Pour résumer, la situation change beaucoup, et très vite.

Un autre élément important a été rappelé par nombre d'entre vous, et ce sur toutes les travées. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. Bernard Piras. Vos amis n'ont rien dit !

M. Guy Fischer. On ne les a pas entendus !

M. Bernard Piras. Il n'y a que vous, monsieur le rapporteur, qui avez parlé !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Mes chers collègues, je parle de la discussion générale, au cours de laquelle je vous ai tous écoutés avec attention. Nous savons très bien que, en matière de production d'électricité, l'été et l'hiver constituent des pics dangereux, notre capacité de production étant alors insuffisante. Il s'agit d'ailleurs d'un problème non seulement français, mais aussi européen.

En outre, nous sommes confrontés au niveau mondial à un autre phénomène, à savoir la hausse des prix du pétrole, qui a une répercussion directe sur l'ensemble des prix, et donc sur celui du gaz.

Du reste, madame Borvo Cohen-Seat, vous avez utilisé au début de la discussion un argument qui m'a personnellement attristé.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Aïe, aïe, aïe !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Selon vos affirmations, « on » m'aurait préconisé de ne pas sortir du cadre de l'article 10. Mais non, on ne m'a rien préconisé du tout ! Si j'ai accepté d'être le rapporteur de ce projet de loi, c'est parce que j'ai de vraies convictions. Certes, elles ne sont pas les mêmes que les vôtres.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Mais cela ne m'empêche pas d'en avoir ! À mes yeux, si nous voulons garantir le développement de l'entreprise Gaz de France dans la conjoncture internationale que je viens d'évoquer, il faut lui en donner les moyens.

Mme Nicole Bricq. Pas comme cela !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'une des solutions est justement de lui trouver un partenaire.

Mme Nicole Bricq et M. Bernard Piras. Pas celui-là !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Une opportunité s'offre à nous : c'est le partenariat avec Suez. Je suis pour ma part convaincu qu'il s'agit d'un beau projet industriel. Peut-être ne sera-t-il pas finalisé, je n'en sais rien.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Guy Fischer. Allons bon !

M. Bernard Piras. Parce que maintenant vous en doutez !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Nous nous apprêtons seulement à voter la première étape, c'est-à-dire l'ouverture du capital de Gaz de France.

M. Guy Fischer. Vous avez de drôles de convictions !

M. Michel Mercier. Je n'y comprends plus rien !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Pour autant, j'ai la conviction que nous avons l'occasion d'assister à un beau mariage et à un beau projet industriel. Je le répète, si je n'en étais pas persuadé, je n'aurais pas accepté d'être rapporteur.

Après ce long détour, j'en reviens à l'amendement de suppression n° 450. Puisque nous sommes convaincus que cette ouverture du capital de Gaz de France est nécessaire, nous avons émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. Billout a ensuite défendu l'amendement n° 451, qui est quasiment identique à l'amendement n° 209 du groupe CRC portant article additionnel avant l'article 1er, que nous avions alors rejeté.

Chers collègues de l'opposition, tout au long de ce débat, nous avons longuement discuté de la faisabilité d'une fusion EDF-Gaz de France. Désormais, je connais bien vos arguments et vous connaissez tout aussi bien les miens : nous n'arriverons donc pas à nous convaincre mutuellement !

En l'espèce, le fait de contraindre ces deux entreprises à abandonner près de 15 % de leurs actifs serait pour nous une vraie erreur stratégique. Même les personnels de ces entreprises ne le souhaitent pas. La commission est donc défavorable à cet amendement.

En ce qui concerne l'amendement n° 452, que vous avez défendu, madame Mathon-Poinat, chacun sait que le statut d'EPIC conféré à EDF et à Gaz de France ayant été contesté par la Commission européenne, la France a dû transformer ces deux entreprises en sociétés anonymes. Il n'est donc pas utile de rouvrir ce débat maintenant. Au demeurant, ma chère collègue, ce qui était vrai pour EDF et Gaz de France séparées le serait encore plus pour EDF et Gaz de France fusionnées : la Commission européenne accepterait d'autant moins une entité fusionnée qui prendrait la forme d'un établissement public à caractère industriel et commercial, comme vous le suggérez dans cet amendement. C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable.

Madame David, en présentant l'amendement n° 454, vous êtes allée au-delà de ce qui est inscrit à l'alinéa 9 du préambule de la constitution de 1946, lequel n'impose la nationalisation qu'en cas de monopoles de fait et de services publics nationaux. Gaz de France n'entrant dans aucune de ces deux catégories, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

L'adoption de l'amendement n° 526, soutenu par M. Billout, aurait un triple effet : « renationaliser » totalement EDF et Gaz de France, ce qui implique, donc, de racheter toutes les actions acquises par nos concitoyens au moment de l'ouverture du capital de ces sociétés ; annuler, par voie de conséquence, la privatisation ; enfin, redonner à ces entreprises le statut d'EPIC. Ce sont trois bonnes raisons qui ont incité la commission à émettre un avis défavorable sur cet amendement.

Par les amendements identiques nos 159, 453 et 662, défendus respectivement par M. Reiner, Mme Demessine et M. Desessard, nos collègues s'opposent tout simplement à la privatisation de Gaz de France. Ils l'ont d'ailleurs clairement expliqué eux-mêmes. Encore une fois, mes chers collègues, j'ai bien compris que vous n'étiez pas d'accord avec l'évolution que nous défendons. C'est la raison pour laquelle nous avons émis un avis défavorable sur ces trois amendements. Au passage, monsieur Reiner, je tiens à vous le dire, votre amendement n'était pas vraiment rédactionnel ! (M. Daniel Reiner sourit.)

L'amendement n° 455, défendu par M. Foucaud, appelle deux observations. Tout d'abord, il vise Gaz de France en tant qu'EPIC, alors que cette entreprise est devenue une société anonyme voilà deux ans. Ensuite, il tend à imposer le recours au référendum pour décider du changement de statut de Gaz de France. Nous en avons déjà largement débattu lors de la discussion sur la motion référendaire, que le groupe CRC avait présentée et qui avait été rejetée. Puisque nous sommes, là encore, en total désaccord, l'avis de la commission est une nouvelle fois défavorable.

Monsieur Coquelle, vous avez présenté l'amendement no 470, ainsi que les amendements de repli nos 469, 468, 467 et 466. Aujourd'hui, le capital d'EDF se compose de plus de 1,8 milliard d'actions : l'État en détient 87,3 % ; le public - particuliers et investisseurs institutionnels - en possède 10,8 %, et les salariés d'EDF, 1,9 %. Or vous nous proposez dans ces amendements de porter la part publique du capital d'EDF respectivement à 95 %, à 90 %, à 85 %, à 80 % ou à 75 %, alors que la loi n'impose qu'un seuil de 70 %.

D'une part, l'adoption d'un de ces amendements serait coûteuse pour les finances de l'État, qui serait contraint de racheter les actions détenues actuellement par le public ou par les salariés. Or, il y a tout de même aujourd'hui d'autres priorités budgétaires et d'autres besoins à satisfaire, notamment en matière d'investissement !

D'autre part, même si l'État n'envisage pas de nouvelles souscriptions publiques d'actions d'EDF à court terme, il ne me paraît pas opportun de rigidifier la composition du capital de cette entreprise, qui pourrait trouver un intérêt à ouvrir un peu plus son capital, dans la limite de ce que la loi lui permet de faire aujourd'hui. L'essentiel est que l'État conserve une participation supérieure à 70 %. Puisque ce principe n'est pas modifié par le présent projet de loi, la commission émet un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.

Si M. Longuet m'a bien confirmé qu'il retirerait l'amendement n° 67, il s'est abstenu de le faire tout de suite, afin de permettre aux auteurs des sous-amendements de les présenter. Je ne reviens pas sur ce qui a été dit, notre collègue ayant obtenu, me semble-t-il, toutes les explications qu'il souhaitait avoir de la part de M. le ministre, après s'être notamment interrogé sur le comportement qu'adopterait l'État actionnaire de la future entité que constituerait éventuellement Gaz de France-Suez, si jamais cette société sollicitait une augmentation de capital.

M. Michel Mercier. Il vendra EDF !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Le sous-amendement n° 798, comme M. Pastor l'a dit lui-même lors de sa présentation, a pour objet d'empêcher la privatisation de Gaz de France. La commission, favorable à cette dernière, émet donc un avis défavorable sur ce sous-amendement.

Quant au sous-amendement n° 775 que vous avez défendu, monsieur Mercier, il tend à prévoir que l'État doit détenir au moins 51 % du capital de Gaz de France. Cette disposition est clairement contraire à la position du Gouvernement,...

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. ... et à celle de la commission.

Cela étant, au-delà de l'objet même de cet amendement, vous avez soulevé, lors de la présentation de ce dernier, un vrai problème, auquel M. le ministre et moi-même avons été attentifs. En effet, vous vous êtes interrogé sur les besoins d'investissement en matière d'électricité dans notre pays, point que j'avais moi-même évoqué tout à l'heure.

En la matière, si je suis convaincu du bien-fondé de la création de cette grande entité GDF-Suez, je ne sais pas ce qu'il en sera pour elle, je ne sais même pas si elle sera amenée un jour à investir dans le domaine nucléaire. Mais tout ce que j'espère, c'est qu'elle augmentera ses capacités d'investissement actuelles. Nous savons que, dans notre pays, ces capacités sont surtout concentrées dans le domaine hydraulique. Vous l'avez rappelé les uns et les autres, cette entité disposera, en Belgique, de capacités supplémentaires dans d'autres types d'énergie, qu'il s'agisse du fioul, du gaz ou du nucléaire.

De mon point de vue, la réponse à votre interrogation réside dans la volonté et les capacités de ce nouveau grand groupe, mais aussi des autres, à engager, demain, les investissements nécessaires pour augmenter la capacité de production et répondre ainsi aux attentes et aux besoins de notre pays.

Mon cher collègue, j'espère que mes arguments vous auront convaincu et que vous accepterez de retirer ce sous-amendement n° 775. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.

L'amendement n° 465, défendu par M. Muzeau, tend à porter la part de l'État dans le capital de Gaz de France à 95 % et s'inscrit dans une série de neuf amendements dont la logique est la même, seul variant le pourcentage correspondant à la part de l'État : 90 %, 85 %, 80 %, etc.

Aujourd'hui, le capital de Gaz de France est détenu à 80,2 % par l'État.

Dès la discussion de la loi du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, quelques-uns d'entre nous, et non des moindres, notamment Philippe Marini et certains membres du groupe de l'Union Centriste-UDF, avaient souligné, bien avant les autres et avec clairvoyance, que le seuil de 70 % correspondant à la participation de l'État était vraisemblablement trop élevé. Ils avaient d'ailleurs déposé des amendements en ce sens.

La commission n'est évidemment pas favorable à la démarche inverse dans la mesure, d'une part, où cette dernière entraînerait le rachat des actions Gaz de France détenues par le public ou les salariés, et, d'autre part - et surtout -, où nous souhaitons la privatisation de Gaz de France et son alliance avec un partenaire industriel.

L'avis de la commission est donc défavorable sur les amendements nos 465,458, 464, 463, 457, 459, 462, 460 et 461.

Les amendements identiques nos 161 et 664, qui tendent à indiquer que la part de l'État dans le capital de Gaz de France doit être supérieure à 70 %, s'inscrivent dans la même logique que les précédents, notamment l'amendement n° 450. L'avis de la commission est donc défavorable.

L'amendement n° 456 est en quelque sorte le « petit frère » des précédents, puisqu'il tend à fixer la part de l'État dans le capital de Gaz de France à sept dixièmes...

M. Yves Coquelle. Je pensais que ce serait plus clair ! (Sourires.)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Vous n'espériez pas nous tromper, tout de même ? (Nouveaux sourires.)

Mme Hélène Luc. Vous auriez pu changer d'avis !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Et préférer sept dixièmes à 70 % ?

Toujours est-il que la commission émet, là encore, un avis défavorable.

En défendant l'amendement n° 471, Mme Demessine entendait s'opposer à la privatisation de Gaz de France. Cette position est tout à fait respectable et je peux la comprendre.

Pour notre part, nous ne partageons pas cette conviction. Nous souhaitons au contraire voir diminuer la part de l'État dans le capital de Gaz de France en vue de la privatisation de cette entreprise, ce qui est une opinion tout aussi respectable.

Cependant, madame Demessine, je ne comprends pas pourquoi vous voulez supprimer les dispositions du II de l'article 10, qui fixent les modalités du contrôle public sur l'entreprise privatisée Gaz de France.

J'ai bien compris que votre groupe était hostile à l'action spécifique de l'État au capital de Gaz de France. Mais vous devriez en revanche être favorables à la disposition prévue dans la deuxième partie du II de l'article 10, selon laquelle l'État est obligé de nommer un commissaire du Gouvernement qui assiste aux séances du conseil d'administration ou du conseil de surveillance de Gaz de France.

La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 471, ainsi que sur l'amendement n° 721, identique.

L'amendement n° 472 tend à remplacer le II de l'article 10 par une disposition précisant qu'Électricité de France dispose d'un monopole d'exploitation des centrales de production d'électricité d'origine nucléaire.

Nous avons déjà eu ce débat à propos d'un amendement n° 82 du groupe socialiste tendant à insérer un article additionnel avant l'article 1er.

Électricité de France est à l'heure actuelle, sur le territoire français, le seul exploitant de centrales nucléaires, et ce principe n'a pas vocation à être remis en cause aujourd'hui.

M. Guy Fischer. Et demain ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'adoption de cet amendement aurait pour conséquence de supprimer l'action spécifique de l'État au capital de Gaz de France et l'obligation de nommer des commissaires du Gouvernement au sein du conseil d'administration ou du conseil de surveillance de GDF. La commission émet par conséquent un avis défavorable.

Je rappelle que l'amendement n° 749 rectifié est désormais un amendement de la commission des affaires économiques.

Je suis donc défavorable aux amendements identiques nos 162 et 665, qui sont contraires à l'esprit de l'amendement n° 749 rectifié.

Compte tenu de nos débats sur la nécessité d'encadrer méticuleusement les conditions dans lesquelles l'État peut se doter d'une action spécifique au regard du droit communautaire, ces amendements me semblent contre-productifs. Ceux-ci sont en effet libellés dans des termes extrêmement généraux. L'État pourrait ainsi s'opposer à peu près à n'importe quelle décision émanant des entreprises, et cette action spécifique risquerait d'être annulée par les juridictions communautaires à l'occasion du premier contentieux venu. Mais peut-être était-ce l'objectif de votre amendement ...

La commission, souhaitant au contraire la mise en application de l'action spécifique, émet un avis défavorable sur ces amendements.

Les amendements identiques nos 163 et 666 m'inspirent la même réflexion que les précédents. Rédigés de façon très générale, ils visent en effet les grands principes du service public. N'importe quelle décision des entreprises pourrait ainsi être remise en cause et nous serions confrontés, au niveau communautaire, aux mêmes risques d'annulation de l'action spécifique.

J'en viens aux amendements identiques nos 165 et 668.

Je tiens à féliciter Jean-Marc Pastor pour le grand talent d'acteur avec lequel il a défendu l'amendement n° 165. Je l'ai d'ailleurs applaudi.

Néanmoins, sur le fond, le Gouvernement, à la demande de Jean-Pierre Bel, vous a transmis le projet de décret instituant une action spécifique de l'État au capital de Gaz de France SA. Vous avez donc pu découvrir que figurait, en annexe de ce projet de décret, une liste très précise des actifs de Gaz de France situés sur le territoire national qui seront protégés par l'action spécifique. Il est ainsi fait mention des canalisations de transport, des actifs liés à la distribution, des stockages souterrains de gaz naturel et des installations de gaz naturel liquéfié.

Ce projet de décret donne donc entièrement satisfaction aux auteurs de ces amendements, qui réclamaient la mention explicite de ces éléments. Mais vous conviendrez avec moi que de telles précisions ne relèvent pas du domaine de la loi.

C'est la raison pour laquelle je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir retirer les amendements nos 165 et 668. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.

Le projet de décret que je viens d'évoquer devrait également donner pleinement satisfaction aux auteurs des amendements identiques nos 164 et 667. Il est en effet précisé ceci, dans son article 2 : « Le ministre chargé de l'économie peut s'opposer par arrêté à toute décision de Gaz de France ou de toute société venant aux droits et obligations de Gaz de France et de ses filiales de droit français ayant pour objet, directement ou indirectement, de céder sous quelque forme que ce soit, de transférer l'exploitation, d'affecter à titre de sûreté ou de garantie, ou de changer la destination des actifs mentionnés en annexe du présent décret ».

La commission souhaite donc le retrait des amendements nos 164 et 667. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

J'en viens à l'amendement n° 473.

Avec la privatisation de Gaz de France, l'État sera représenté au sein du conseil d'administration ou du conseil de surveillance à due proportion de la part de capital qu'il détient. Il n'y a donc pas lieu de prévoir spécifiquement la présence de trois représentants de l'État nommés par décret. Il n'y a en effet aucune raison qu'une société privatisée soit soumise à la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

Au demeurant, aux termes de l'article 10, l'État sera contraint de nommer un commissaire du Gouvernement auprès de Gaz de France, ce qui devrait, je l'espère, rassurer les auteurs de cet amendement.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement n° 473.

Il en va d'ailleurs de même s'agissant de l'amendement n° 474, qui s'inscrit dans la même logique.

Dans le libellé de cet amendement n° 474, Mme Luc renvoie en effet de façon tout à fait opportune à l'article 8-1 de la loi du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations décidées par la loi, qui dispose que, dans les sociétés transférées au secteur privé, « le conseil d'administration ou le conseil de surveillance, selon le cas, comprend : deux membres représentant les salariés et un membre représentant les salariés actionnaires, s'il compte moins de quinze membres ; trois membres représentant les salariés et un membre représentant les salariés actionnaires, s'il compte quinze membres ou plus ».

Il n'y a pas de raison que Gaz de France déroge à ces principes ainsi qu'aux modalités de nomination de ses administrateurs, telles qu'elles sont définies par le code de commerce.

Les amendements identiques nos 475 et 563 traduisent une opposition à la privatisation de Gaz de France. Or ma détermination, en tant que rapporteur de ce projet de loi, n'a pas changé, malgré la longueur et l'intensité de nos débats.

Mme Hélène Luc. L'intensité des échanges n'est pas si grande de l'autre côté de l'hémicycle !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Restant fidèle, comme les auteurs de ces amendements, à mes convictions, j'émets donc un avis défavorable.

L'amendement n° 476 tend à remplacer le III de l'article 10.

Tout d'abord, nous avons déjà longuement débattu de ce sujet à propos de l'amendement n° 531 tendant à insérer un article additionnel avant l'article 1er, déposé par le groupe socialiste.

Ensuite, cet amendement constitue une injonction au Gouvernement, ce qui est contraire à la Constitution.

Enfin, sur le fond, nous ne pouvons accepter une telle proposition car, hormis le fait que Bruxelles conteste le statut d'établissement public pour Électricité de France et pour Gaz de France, nous estimons que le statut de société anonyme est plus adapté à ces deux sociétés.

N'ayant pas l'intention de revenir sur cette disposition, la commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 476.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Loos, ministre délégué. Je voudrais tout d'abord rappeler la raison d'être de l'article 10.

Dans le secteur du gaz, nous devons absolument prendre en compte la situation internationale.

Aujourd'hui, 50 % à 60 % des réserves mondiales de gaz - celles qui servent à approvisionner à la fois le Japon, la Chine, les États-Unis et l'Amérique du sud -, se trouvent dans trois pays : la Russie, l'Iran et le Qatar.

La Grande-Bretagne assiste ainsi actuellement à l'extinction de ses réserves propres. Quant aux ressources des autres pays, elles ne représentent qu'un faible pourcentage des réserves mondiales.

En outre, la Russie vient de passer avec l'Algérie un accord qui renforce encore ses marges de manoeuvre.

Face à cette situation, l'intérêt des possesseurs de ces gisements, selon leur stratégie déclarée, se situe clairement en aval. Rien n'est plus facile pour eux que de chercher à valoriser leur production sur l'ensemble de la chaîne. Ils détiennent la rente minière et les canalisations de transport. Ils souhaitent prendre pied sur les marchés et ne pas être dépendants d'intermédiaires qui doivent négocier avec eux.

Cette situation ne va que s'accentuer puisque les trois principaux producteurs vont détenir une part de plus en plus importante des réserves du monde. Pour défendre la sécurité d'approvisionnement de notre pays dans de bonnes conditions en termes de prix et de quantités et assurer la continuité de fourniture, nous avons l'obligation de travailler sur l'amont, de maîtriser l'ensemble de la filière, et de nous approvisionner largement, afin que nos capacités soient supérieures à nos besoins stricts.

Au moment où nous en arrivons à l'article 10, il faut en tirer la conséquence sur la dimension de l'entreprise pouvant faire face à cette situation.

Vous croyez qu'il suffit d'être le gestionnaire français des tuyaux français pour faire le poids dans les négociations internationales. Vous pensez qu'il suffit que l'État demande pour qu'il soit exaucé. Si c'était le cas, vous imaginez bien que l'Ukraine n'aurait eu aucun problème avec la Russie l'année dernière ! Si c'était le cas, vous imaginez bien que l'Italie ne se serait pas préoccupée de se précipiter à Moscou dès le mois de janvier pour s'approvisionner ! Si c'était le cas, pensez-vous que les grands pétroliers s'intéresseraient à ce domaine ?

Nous devons aujourd'hui constater que la taille et la compétence de nos entreprises sont les éléments clés qui permettent d'agir sur l'amont. Notre opérateur, même s'il a beaucoup de qualités, doit pouvoir changer de dimension. Si, à cette fin, on ne lui proposait que de procéder à des acquisitions dans son domaine, il pourrait certes s'agrandir, mais il s'endetterait très rapidement et n'aurait pas de marges de manoeuvre suffisantes. La solution est donc de lui permettre d'ouvrir son capital et de s'agrandir par échange d'actions.

Nous ne souhaitons pas que cette opération se traduise par un abandon des intérêts essentiels que nous essayons de servir. Nous voulons assurer la sécurité d'approvisionnement, nous voulons être certains de pouvoir mener notre action afin de garantir la continuité de fourniture, en contrôlant ce qui se fait dans ce domaine et en ayant le choix de nos partenaires. Ce choix des partenaires, c'est ce que nous permet la minorité de blocage.

En nous octroyant par ce projet de loi la golden-share, cette action spécifique que même la Commission européenne considère comme utilisable dans le cas présent,...

M. Roland Courteau. Dans le cas présent !

M. François Loos, ministre délégué. ... puisqu'il s'agit des intérêts essentiels de la France, nous nous assurons la capacité de traiter des questions essentielles et stratégiques.

Je vous ai ainsi expliqué la position du Gouvernement. Je vais maintenant aborder les différents amendements.

Je ne suis évidemment pas favorable à l'amendement n° 450, qui propose de supprimer l'article, puisque je viens d'expliquer pourquoi il me paraît indispensable.

L'amendement n° 451 propose de réaliser un rapport sur la faisabilité d'une fusion entre EDF et GDF. Nous avons déjà plusieurs fois traité ce sujet, et il y a plusieurs façons d'y répondre.

M. Roland Courteau. Vous n'avez jamais posé la question à Bruxelles !

M. Yves Coquelle. De toute façon, vous ne voulez pas de cette fusion !

M. François Loos, ministre délégué. Je vais vous répondre qu'il suffit de regarder le cas portugais ! Avec les conditions de concurrence exigées au niveau européen, vous voyez bien que ce n'est pas réaliste. C'est du moins ce que nous estimons, mais vous avez bien sûr le droit de penser le contraire.

Un certain nombre de rapports vont dans notre sens. Nous ne souhaitons pas démanteler EDF. Pour cette raison, l'avis du Gouvernement est défavorable.

M. Yves Coquelle. C'est un peu court !

M. François Loos, ministre délégué. Mme Josiane Mathon-Poinat a défendu l'amendement n° 452 visant à ce que GDF retrouve le statut d'établissement public à caractère industriel et commercial. Ce statut ne permet pas d'offrir ce que nous souhaitons à notre opérateur gazier. De plus, le coût serait de l'ordre de 50 milliards d'euros, sans aucun investissement gazier ou électrique. Il s'agirait seulement de racheter des actions. J'y suis donc défavorable.

L'amendement n° 454 prévoit que toute entreprise qui remplit une mission de service public devienne propriété de l'État. C'est une surinterprétation des textes de la Constitution !

M. Yves Coquelle. Jusqu'à maintenant, cela a pourtant bien fonctionné !

M. François Loos, ministre délégué. Il faut au contraire donner à GDF la possibilité de s'ouvrir, certes dans le respect de toutes les conditions que nous avons imposées. L'avis est donc défavorable.

Il en va de même pour l'amendement n°526, qui porte sur la renationalisation d'EDF et de GDF. Cette opération, dont le coût serait de 20 milliards d'euros, ne serait pas de l'investissement utile.

S'agissant des amendements identiques nos 159, 453, et 662, c'est le même constat, qui appelle la même réponse : le Gouvernement émet un avis défavorable.

L'amendement n° 455 prévoit qu'un changement de statut de GDF ne se fasse que par voie de référendum. Mais nous ne sommes pas en train d'opérer un changement de statut puisque GDF est une société anonyme. Nous changeons simplement le taux de participation de l'État. La question ne se pose donc pas. Nous avons tout de même consulté le Conseil d'État sur cette question : il a estimé qu'il ne serait pas nécessaire de passer par la voie référendaire.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Si le Conseil d'État l'a dit... Pourtant, vous vous asseyez parfois sur ses avis !

M. François Loos, ministre délégué. Pas ici !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et sur les 35 heures ? Votre argument est spécieux !

M. François Loos, ministre délégué. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. Coquelle a défendu les amendements nos  466 à 470, concernant le seuil minimum de détention du capital d'EDF par l'État. Nous n'avons pas souhaité traiter cette question dans ce projet de loi, qui ne porte pas sur EDF. Le seuil actuel nous paraît équilibré par rapport à nos objectifs. Tous les taux proposés par ces amendements nous paraissent moins intéressants. L'avis du Gouvernement est donc défavorable.

S'agissant de l'amendement n° 67, qui vise à supprimer le seuil minimum afin éventuellement de privatiser totalement GDF, le Gouvernement émet un avis défavorable, car il souhaite pouvoir choisir le partenaire avec lequel GDF travaillera et s'agrandira. Pour cela, la minorité de blocage est l'instrument idéal. D'un autre côté, si cette minorité de blocage pouvait constituer un obstacle pour un agrandissement ultérieur ou un autre partenariat que celui qui est envisagé avec Suez, l'État pourrait suivre pour conserver la part exigée par la loi.

Mme Nicole Bricq. Il n'y a plus d'argent dans les caisses : vous les avez vidées ! Arrêtez de raconter des histoires !

M. François Loos, ministre délégué. L'avis du Gouvernement est donc défavorable.

Il en va de même pour le sous-amendement n° 798 de M. Pastor, qui exige un seuil minimum de détention du capital de GDF par l'État de plus de 70 %. Cela revient d'ailleurs à demander la suppression de l'article 10, puisque nous sommes ramenés à la case départ !

Le sous-amendement n° 775 de M. Mercier prévoit que le seuil minimum de détention du capital de GDF doit être de 51 %. Notre objectif est de donner à GDF la capacité d'être le plus grand possible tout en conservant pour l'État la possibilité de choisir les partenaires avec lesquels il veut travailler. La minorité de blocage répond à cette demande.

La majorité est moins efficace puisqu'elle ne permet pas de grandir autant, alors qu'elle donne peu de pouvoirs supplémentaires. Elle ne permet pas à un partenaire d'être aussi motivé dans la mesure où son pouvoir serait également réduit à l'occasion de l'opération de rapprochement.

M. Michel Mercier. Et l'actionnaire Suez ?

M. François Loos, ministre délégué. Le bon équilibre, c'est la minorité de blocage. Je suis donc contre un taux à 0 %, contre un taux à 70 % et contre un taux à 51 %. Toutes ces réflexions sont cependant bien utiles pour comprendre pourquoi nous avons proposé la minorité de blocage.

Les amendements nos 465, 458, 464, 463, 457, 459, 462, 460 et 461, présentés par le groupe communiste républicain et citoyen, portent sur les seuils minimums de détention du capital de GDF. J'ai démontré qu'il était pour nous nécessaire de permettre à GDF de s'agrandir autrement que par endettement, et ce pour être présent comme partenaire puissant sur ces marchés internationaux.

Le Gouvernement ne pense pas qu'un supplément de marge de manoeuvre soit donné à GDF en augmentant la part de l'État, mais bien plutôt en la réduisant. Il est donc défavorable à tous ces seuils qui changent l'esprit même dans lequel il a décidé de proposer la minorité de blocage.

Les amendements identiques nos 471 et 762, qui tendent à supprimer le II de l'article 10, portent sur l'action spécifique et le commissaire du Gouvernement. L'action spécifique nous est indispensable pour défendre les intérêts essentiels de la France. Nous y tenons : s'en priver, c'est se refuser des moyens d'action politique en matière de sécurité d'approvisionnement. Quant au commissaire du Gouvernement, il nous est aussi nécessaire pour cet objectif ; le supprimer ne nous paraît pas une bonne solution. L'avis du Gouvernement est donc défavorable.

L'amendement n° 472 vise à donner à EDF un monopole d'exploitation des centrales de production d'électricité d'origine nucléaire en France. En pratique, EDF est effectivement l'exploitant de toutes les centrales de production d'électricité d'origine nucléaire. Il n'y a cependant pas de raison d'empêcher quelqu'un de soumissionner à cette lourde procédure. J'ai entière confiance en l'Autorité de sûreté nucléaire, autorité indépendante créée par la loi du 13 juin 2006, pour analyser les projets qui nous seraient soumis. Actuellement, il n'y en a pas.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela ne saurait tarder !

M. François Loos, ministre délégué. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Il émet en revanche un avis favorable sur l'amendement n° 749 rectifié, qui vise, dans le texte proposé par le II de l'article 10 pour l'article 24?1 de la loi n° 2004?803 du 9 août 2004, à remplacer les mots : « intérêts nationaux » par les mots : « intérêts essentiels de la France ». Ces derniers mots conviennent mieux à nos amis européens et correspondent bien aux intérêts que nous voulons défendre.

Les amendements identiques nos 162 et 665 visent à préciser les applications de l'action spécifique. Ils relèvent de la même logique que les amendements nos 163, 666, 165 - l'amendement n° 165 a d'ailleurs été excellemment défendu par M. Pastor - et 668. Ces amendements ressortissent au domaine réglementaire et traitent d'un sujet qui sera réglé par décret. Le Gouvernement prie donc leurs auteurs de bien vouloir les retirer. À défaut, il émettra un avis défavorable.

Les amendements nos 164 et 667 visent à préciser l'étendue des pouvoirs que donne l'action spécifique. Ils sont inutiles, puisque le projet de loi, dans sa rédaction actuelle, définit les conditions dans lesquelles l'action spécifique sera utilisée. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Les amendements suivants portent sur la participation des représentants de l'État et des salariés au conseil d'administration.

Je traiterai tout d'abord de l'amendement n° 473. Pour l'heure, Gaz de France relève de la loi relative à la démocratisation du secteur public. Si l'État devenait minoritaire dans le capital de Gaz de France, il continuerait d'être représenté au conseil d'administration de la société en vertu du décret-loi de 1935,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les choses ont changé depuis 1935 !

M. François Loos, ministre délégué. ... qui prévoit que l'État peut nommer un nombre d'administrateurs proportionnel à sa part au capital, soit un tiers. Si le présent projet de loi est voté et si la fusion est réalisée, la part des représentants de l'État au conseil d'administration demeurera donc inchangée. Cela vous impressionne, n'est-ce pas ?

M. Roland Courteau. Nous sommes éblouis !

M. François Loos, ministre délégué. L'amendement n° 474 vise à préciser la représentation de l'État, ainsi que celle des salariés. S'agissant des représentants de l'État, je me suis déjà exprimé.

En ce qui concerne les représentants des salariés, c'est la loi de 86...

M. François Loos, ministre délégué. ...qui s'applique. Elle prévoit deux membres représentant les salariés et un membre représentant les salariés actionnaires si le conseil d'administration compte moins de quinze membres, ou trois membres représentant les salariés et un membre représentant les salariés actionnaires si le conseil d'administration compte quinze membres ou plus. La disposition proposée est donc inutile, et le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable.

Les amendements nos 475, 563 et 722 visent à supprimer la liste des sociétés qui doivent appliquer la loi de 1986 et compter dans leur conseil d'administration des administrateurs salariés, comme je viens de l'indiquer. Il ne me semble donc pas opportun de supprimer le III de l'article 10, qui prévoit la représentation des salariés au conseil d'administration. Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur ces amendements.

Enfin, l'amendement n° 476 ne concerne en rien le projet de loi. J'y suis donc défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 450.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote sur l'amendement n° 451.

M. Roland Courteau. Mon explication de vote vaudra également pour l'amendement n° 452.

On a l'impression d'assister à un dialogue de sourds ! Si l'entreprise GDF a besoin d'alliances pour son développement, comme M. le rapporteur et M. le ministre ne cessent de le répéter, alors gardons là propriété publique et cherchons donc les voies d'une alliance !

Nous ne cessons de le répéter, la privatisation n'est pas la seule solution. De plus, compte tenu des dégâts que provoque le libéralisme dans le monde, notamment dans le secteur de l'énergie, comprenez, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, que nous ayons le souci de trouver d'autres solutions. Le groupe socialiste et les Verts sont favorables à un pôle public. Le Gouvernement en repousse l'idée, arguant d'un refus éventuel de la Commission. Mais a-t-il seulement soumis un projet aux instances européennes afin que les autorités de la concurrence l'étudient sérieusement ? (Non !  sur les travées du groupe CRC.) À notre connaissance, non !

Bref, les enjeux sont tels qu'il nous faut prendre le temps d'étudier d'autres solutions, notamment un rapprochement entre GDF et EDF et, partant, s'assurer avec Bruxelles de l'euro-compatibilité d'un tel projet.

Affrontez donc la Commission sur ce dossier, monsieur le ministre ! Ne vous contentez pas de dire et de répéter, faute d'autres arguments d'ailleurs, qu'une telle solution a déjà été refusée pour le Portugal, ou que Bruxelles pourrait s'y opposer ! Proposez à la Commission un projet bien précis, puis nous en reparlerons !

Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons cet amendement, ainsi que l'amendement n° 452.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument ! Vous avez raison !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 451.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle, pour explication de vote sur l'amendement n° 452.

M. Yves Coquelle. Cet amendement vise à revenir à la situation antérieure à la loi de 2004. Il tend à rendre à Électricité de France comme à Gaz de France leur statut d'établissement public à caractère industriel et commercial. On peut y voir un retour en arrière, mais aussi un grand bond en avant. Il s'agit de permettre à nos deux opérateurs énergéticiens de répondre aux exigences de service public fixées par la loi.

En 2004, le changement de statut, l'ouverture du capital et l'alignement sur le droit des sociétés anonymes ont été justifiés, notamment, par des besoins nouveaux de financement. Il est en effet beaucoup question des investissements industriels nécessaires au développement du service public en France.

Cette année, la même soupe nous est resservie, quelque peu réchauffée, pour justifier la fusion entre Gaz de France et Suez. Il s'agirait, à en croire les tenants de la privatisation de Gaz de France, de permettre à cette entreprise de faire face aux enjeux énergétiques du futur, en lui donnant l'assise financière nécessaire pour mener toute politique de long terme. Tel est votre discours.

Or la réalité des faits contredit quelque peu cette présentation de la situation. D'une part, le silence le plus complet est fait sur les conditions de la fusion, notamment sur le coût pour Gaz de France de l'offre publique d'échange de titres entre GDF et Suez, qui va atteindre un niveau inégalé.

En effet, s'il faut placer les titres GDF au niveau de ceux de Suez, ce sont au moins 3 milliards d'euros qu'il faudra mettre sur la table, d'entrée, pour favoriser la valorisation des stock-options levées par Gérard Mestrallet et son équipe, ainsi que des actions détenues par les actionnaires de Suez, c'est-à-dire plus que le résultat opérationnel du groupe Gaz de France en 2005 et 180 % du résultat net part du groupe. Comme moyen de financer le développement de notre opérateur énergétique, on pourrait trouver mieux !

Une fois parvenu à ce résultat, on permettra à l'État - faut-il le rappeler ? - d'affecter le produit de la cession des titres au compte des privatisations. Compte tenu du nombre de titres que l'État sera amené à vendre, ce sont plus de 13,6 milliards d'euros qui seront ainsi versés au compte d'affectation. Comme par hasard - mais est-ce un hasard ? -, ce montant ne correspond absolument pas à celui des produits attendus en 2007 pour ce compte.

De deux choses l'une, monsieur le ministre : ou bien le Gouvernement a renoncé, a priori, à la réalisation de la cession des titres de Gaz de France et n'a donc pas voulu procéder à l'inscription budgétaire de l'opération, ou bien il se garde pour plus tard, notamment si la croissance n'est pas au rendez-vous, une jolie poire pour la soif, d'un montant de 13,6 milliards si l'on prend en compte la valeur actuelle du titre Gaz de France, de 15 milliards d'euros, une fois prise en compte la revalorisation du titre après l'OPE avec Suez !

La confidentialité invoquée dans les documents préparatoires du projet de loi de finances pour 2007 n'est qu'un rideau de fumée destiné à dissimuler la manipulation financière de grande envergure qui se prépare !

Les fonds de pension américains qui se sont porté acquéreurs d'une part importante du capital de Suez, et qui se nourrissent également des titres de la dette publique indexés sur l'inflation, apprécieront sans doute l'affaire beaucoup plus que nos concitoyens !

Le retour au statut d'établissement public à caractère industriel et commercial est le meilleur moyen de mettre un terme à ces processus infernaux, qui, en bout de course, finiront par représenter pour la collectivité un coût significatif, bien plus élevé que celui qui est inhérent au rachat, dans des conditions similaires à celles de la loi de 1946, des titres aujourd'hui détenus par d'autres personnes morales ou privées que l'État !

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons à adopter cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 452.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle, pour explication de vote sur l'amendement n° 454.

M. Yves Coquelle. Réintégrer l'entreprise Gaz de France dans le patrimoine de la nation est la seule réponse à la question énergétique. Cette solution traduirait une éthique politique digne de ce nom.

De plus, la mission de service public dévolue à cette entreprise exige, sans ambiguïté aucune, que l'État en soit le financier, le gestionnaire et le maître d'oeuvre, l'énergie étant vitale pour notre pays et sa population.

Le service public est assurément l'un des domaines les plus visibles de l'action des politiques publiques.

Si la notion de service public paraît si incontournable en France, c'est qu'elle recouvre un périmètre d'actions très vaste, qui constitue, depuis 1945 et la reconstruction du pays, une solution consensuelle et efficace.

Sous l'effet conjugué de ruptures politiques, économiques et technologiques à l'échelle mondiale, la politique nationale épouse des revirements sidérants, à l'heure où se pose de façon tragique pour l'humanité la question de sa survie.

L'intérêt général, essentiel et stratégique dans ce cas précis, n'est pas compatible avec le fonctionnement du marché, même si l'on fait abstraction des problèmes éthiques que posent la privatisation et la sous-traitance.

L'ouverture des monopoles publics, sous la pression de l'Union européenne, est le fruit d'une position dogmatique de vos idéologues, qui paraissent ignorer la notion européenne de service d'intérêt général, ou SIG.

Il n'existe pas de réglementation des SIG dans leur ensemble à l'échelon européen. Le terme ne désigne d'ailleurs parfois que les seuls SIG non marchands. Les SIG restent donc de la compétence des États membres ou des collectivités locales.

La Commission a toutefois reconnu, dans une communication du 26 septembre 1996, que les services d'intérêt général sont « au coeur du modèle européen de société ».

Un monopole d'État est l'expression d'une politique forte en direction de la population, de la collectivité. Il doit être avantageux pour l'usager. Le but de la structure d'État est d'être rentable dans la mesure de l'amortissement et de la nécessaire modernisation de ses infrastructures, mais pas au sens du profit actionnarial.

L'avantage du monopole public est qu'il permet de supprimer les coûts de concurrence. Les ressources sont consacrées à l'amélioration du service par la recherche et l'investissement, du fait d'un compromis sur le prix du service.

Comme vous le constatez, les arguments ne manquent pas en faveur de la préservation de GDF, et le démantèlement des services publics effectué dans le cadre de l'accord général sur le commerce des services, l'AGCS, n'est pas irréversible, contrairement à ce que vous déclarez.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 454.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 31 :

Nombre de votants 328
Nombre de suffrages exprimés 327
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l'adoption 126
Contre 201

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 526.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 159, 453 et 662.

Mme Annie David. Nous avons apprécié que M. le rapporteur et M. le ministre prennent la peine de donner un avis argumenté sur chacun de nos amendements ; toutefois, l'amendement n° 453 appelle de notre part quelques remarques supplémentaires.

En effet, la religion du marché aveugle le Gouvernement : ce dernier en oublie que le moteur du marché qu'il prône n'est pas la satisfaction des gens, mais la prédation des « cibles humaines » que sont les consommateurs.

Dans cette logique, le profit maximal net des financiers est le seul critère opérant ; c'est tellement vrai que des entreprises sont sacrifiées sur l'autel d'un actionnariat vorace. À ce sujet, mes chers collègues, je vous renvoie à mon intervention concernant les industries papetières, à l'article 1er.

Dans le cas qui nous occupe, le paradoxe est désarmant : GDF est l'une des plus importantes compagnies gazières du monde et déjà un leader de son secteur. Elle représente une structure intégrée de l'amont à l'aval, avec une dizaine de plates-formes offshore et terrestres de production de gaz, deux terminaux méthaniers, quatre navires méthaniers, plus de 150 000 kilomètres de canalisations de transport et de distribution de gaz, treize sites de stockage souterrain totalisant plus de 10 milliards de mètres cubes de gaz en réserve, quarante-cinq stations de compression de gaz et l'un des plus importants sites de recherche et développement d'Europe sur les techniques gazières...

Suez est, par comparaison, trois fois plus petit, mais il pèse trois fois plus lourd que GDF en capitalisation boursière. En fait, il n'apporterait rien au potentiel gazier de GDF, sinon une stratégie commerciale élaborée à partir de quelques terminaux américains.

Et puis, coup de théâtre, M. François Pinault s'est allié depuis l'été dernier au groupe italien Enel, dans l'idée de lancer une OPA hostile sur le groupe Suez. Même si l'on nous dit que cette tentative d'OPA est aujourd'hui derrière nous, nous restons inquiets.

Guerres économiques et leurs dégâts collatéraux, OPA hostiles, concurrences meurtrières, liquidations, délocalisations : l'illustration de ce que valent votre projet et la société inhumaine que vous bâtissez s'étalait dans les médias, le 12 octobre dernier.

Aux nouvelles exigences de Bruxelles face à votre projet de fusion s'ajoute la versatilité des milieux d'affaires qui, tour à tour, vous conditionnent puis vous abandonnent à votre absence de principes politiques et d'éthique.

Par cet amendement, nous rejetons le paragraphe I de cet article par lequel vous réduisez à un tiers la participation de l'État dans Gaz de France.

Nous refusons cette privatisation, nous refusons cet article comme nous avons refusé l'ensemble des articles et, de ce fait, votre projet de loi dans sa globalité !

M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.

Mme Hélène Luc. Nous en avons déjà parlé, mais je veux, à ce moment du débat, démontrer que la privatisation de Gaz de France est un danger pour les usagers.

Le danger se situe à plusieurs niveaux : celui des tarifs, celui de la sécurité des installations, celui de l'égalité de traitement dans tout le pays.

La baisse des investissements, qui a commencé depuis 1995, a entraîné des problèmes en ce qui concerne le renouvellement des réseaux et les travaux de maintenance effectués chaque jour.

Par exemple, le centre de Villejuif, qui dessert quarante communes du Val-de-Marne et de l'Essonne, a dénombré quelque 2 500 robinets de conduites d'immeuble non manoeuvrables, ce qui peut être la cause d'accidents graves pour les habitants et leurs biens. On sait que la conduite d'immeuble est le branchement collectif qui pénètre dans l'immeuble et se scinde en branchements individuels ; le robinet permet, en cas d'incident lié à une fuite, de couper le gaz sans avoir à pénétrer dans l'immeuble. On en mesure les conséquences !

De plus, le renouvellement des réseaux vieillissants ne sera pas la même priorité pour une entreprise privée que pour une entreprise publique : l'entreprise privée attendra la dernière minute avant de réaliser des investissements. Il suffit, pour s'en convaincre, d'observer la pratique de Suez dans la distribution d'eau, que certaines communes connaissent bien.

Il est maintenant de notoriété publique que les services d'intérêt général demandent de lourds investissements, ce qui limite la concurrence et ne profite pas, en fin de compte, au client.

L'ouverture du capital de Gaz de France, contrairement au souhait des consommateurs, n'a pas entraîné de baisse des tarifs, loin de là, puisque, depuis août 2004, le prix du kilowattheure de gaz a augmenté de 33 %, en sachant que le Gouvernement a imposé une limitation à la demande initiale de la direction de l'entreprise, qui était bien supérieure.

La priorité des entreprises n'est plus non plus le service de proximité qui existait précédemment : le centre de distribution de Villejuif a vu ses points d'accueil passer de neuf à quatre sur le territoire du centre ; les centres d'Alfortville, de Villeneuve-Saint-Georges, d'Arcueil, d'Ivry et de Choisy-le-Roi ont été fermés, et l'ouverture de ceux qui restent est irrégulière, liée à l'effectif disponible, la priorité de l'entreprise étant désormais les centres d'appels téléphoniques.

Cette politique entraîne des difficultés pour les personnes les plus démunies, qui ont du mal à contacter l'entreprise pour exposer leurs problèmes. L'entreprise cherche à se décharger de l'aide octroyée aux personnes en difficulté, arguant du fait qu'elle prévoit un forfait annuel pour cette opération et que le surplus doit être pris en charge - une fois de plus - par les services sociaux des collectivités territoriales.

Il faut le dire clairement : Gaz de France ne jouera plus le rôle de service public.

En outre, le centre de Villejuif, qui couvre quarante communes, a vu son effectif passer de 1 023 agents en septembre 1999 à environ 650 aujourd'hui. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. Guy Fischer. Oh là là !

M. Jean Desessard. Quels chiffres !

M. le président. Veuillez conclure, madame Luc.

Mme Hélène Luc. Pour conclure, monsieur le président, je dirai quelques mots de la sous-traitance. Celle-ci existait déjà, mais elle a augmenté, jusqu'à 40 % dans certains cas, pour le renouvellement des réseaux, les branchements de gaz et le relèvement des compteurs.

Le renouvellement des réseaux de fonte grise en polyéthylène, qui devait être terminé fin 2006, ne sera peut-être pas achevé en 2007. Encore aura-t-il fallu le terrible incendie d'un bâtiment dû à une fuite de gaz pour que de nouvelles mesures soient prises !

M. le président. Votre temps de parole est épuisé, madame Luc.

Mme Hélène Luc. Je ne résiste pas à l'envie de vous citer les propos que j'ai relevés sur le site d'un député UMP...

M. le président. Chère madame, la durée d'une explication de vote est de cinq minutes : vous avez parlé sept minutes, et vous n'avez donc plus la parole ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Hélène Luc. Je le dirai tout à l'heure !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 159, 453 et 662.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 32 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 329
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 127
Contre 202

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 455.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 33 :

Nombre de votants 328
Nombre de suffrages exprimés 327
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l'adoption 126
Contre 201

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à Mme Michelle Demessine, pour explication de vote sur l'amendement n° 470.

Mme Michelle Demessine. Nous n'avons pas été convaincus par les explications de la commission et du Gouvernement. C'est pourquoi nous souhaitons exprimer avec cet amendement de repli l'exigence que la part de l'État dans les entreprises EDF et GDF reste à son niveau le plus haut possible. Il s'agit de fixer un seuil infranchissable en dessous duquel l'État ne pourrait pas descendre, lui garantissant ainsi une véritable marge de manoeuvre.

Cette privatisation est définitivement une grave erreur. Un tel démantèlement serait lourd de conséquences pour les générations à venir.

Monsieur le ministre, votre majorité assumera-t-elle ses responsabilités face à ce désastre ? On est en droit d'en douter. Elle se cache en effet derrière des arguments qui la rendent le plus souvent irresponsable à l'égard de ce qu'elle est en train de faire : il s'agirait d'un contexte international contre lequel on ne pourrait rien ; il s'agirait d'une pression industrielle et financière que l'on ne pourrait que subir ; il s'agirait d'instances européennes à ce point omnipotentes que le Gouvernement ne pourrait plus agir.

Face à ces arguments, je rappelle que les directives européennes depuis 2002 n'ont jamais prévu que l'État ne devait pas détenir à 100 % des entreprises énergétiques. En réalité, l'État ne doit pas apporter de garanties financières illimitées au regard des emprunts contractés par ces entreprises afin d'éviter les distorsions de concurrence. C'est loin d'être la même chose !

En faisant peser la responsabilité de cette privatisation sur l'Europe et en abaissant la part de l'État dans EDF et GDF, vous envoyez un mauvais signal à l'ensemble de nos concitoyens.

Je le répète une fois encore, rien ne justifie de privatiser GDF. Tout porte à croire le contraire. C'est pourquoi nous vous invitons, mes chers collègues, à voter cet amendement de repli.

M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour explication de vote.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Le gaz et l'électricité ne sont pas des produits ordinaires. La maîtrise publique que nous exigeons implique donc la mise en oeuvre d'une logique d'intérêt général sur le long terme afin de minimiser les coûts et de rejeter le critère simpliste du profit immédiat.

Mes chers collègues, vous le savez - et aucune démagogie ne saura vous couvrir -, lorsque les dividendes sont en jeu, les fonds de pension et les grands acteurs boursiers ne s'intéressent pas aux intérêts nationaux ni au devenir de l'humain. Par conséquent, vous mettez en route une machine qui n'a pour vocation que la marche au profit.

Vous êtes clairs sur la privatisation de Gaz de France et prêts à aller toujours plus loin que les exigences de Bruxelles en faisant de cette privatisation une question de dogme. Mais que devons-nous penser de Suez ?

Suez agit uniquement en tant qu'actionnaire financier - dans l'intérêt de son actionnaire principal, M. Frère - et envisage de démanteler GDF par filialisation des secteurs de l'ensemble industriel.

Expliquez-nous l'intérêt que présente pour GDF et pour la France cette fusion à laquelle vous teniez tant jusqu'au 12 octobre dernier, avant l'annonce faîte par M. Pinault ? C'est justement parce qu'il n'existe pas de réponse de bon sens que nous vous proposons de voter cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. L'article 24 de la loi du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières avait amorcé le mouvement de désengagement de l'État des entreprises électriques et gazières. Nous l'avons rappelé tout au long de ce débat. Ainsi, bien que les directives communautaires en matière énergétique ne nous en fassent pourtant pas explicitement obligation, le gouvernement de M. Raffarin avait jugé utile de réduire de 30 % la part de l'État dans le capital d'EDF.

Après le dépeçage progressif de l'entreprise publique entamé les années précédentes sous la pression de Bruxelles, avec la séparation et la filialisation des activités pour faire place à la concurrence et à la liberté des prix, il s'agissait alors, à travers la détention du capital d'EDF, de s'en prendre directement à la maîtrise publique et nationale de l'énergie électrique.

Aujourd'hui, vous voulez aller encore plus loin avec GDF. Comme nous ne souhaitons pas vous laisser faire, nous proposons par précaution de renforcer la maîtrise publique sur EDF afin de lui donner plus de moyens, donc plus de poids, pour faire face à la concurrence du futur groupe privé issu d'une hypothétique fusion entre GDF et Suez.

Notre volonté de renforcer cette maîtrise de la puissance publique sur EDF est aussi motivée par d'autres considérations. Nous craignons en effet que, après la privatisation de GDF, si d'aventure vous y parveniez, mes chers collègues, celle d'EDF ne suive.

La privatisation d'EDF serait la suite logique de ce que vous voulez faire avec le gaz. J'ajouterai même que l'entreprise publique EDF ne serait pas protégée par un engagement de l'État visant à ne pas la privatiser, comme cela a pu être le cas auparavant pour GDF, avec l'efficacité que l'on sait ...

Mais j'en reviens aux raisons fondamentales qui nous incitent à renforcer la maîtrise de la puissance publique sur EDF.

Nous l'avons maintes fois répété - nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls -, l'énergie, que ce soit le gaz ou l'électricité, n'est pas un produit ou une marchandise comme les autres.

En ces temps difficiles où les émissions de gaz à effet de serre produisent des conséquences de plus en plus dramatiques, où les énergies fossiles se font plus rares et sont l'objet de tant de spéculations financières entraînant d'insupportables augmentations des prix, soustraire l'ensemble du secteur énergétique à la loi aveugle et sourde du marché est d'autant plus nécessaire et urgent.

Or, pour soustraire l'énergie à la loi du marché, il n'y a pas d'autre solution que de renforcer la maîtrise publique. En effet, cette dernière procède d'une logique toute différente : pour défendre l'intérêt général, l'entreprise qui la met en oeuvre est notamment plus soucieuse des coûts payés par les consommateurs. En revanche, c'est tout le contraire quand prime la logique des fonds de pension et des actionnaires pour lesquels seule compte l'augmentation des dividendes au détriment de tout le reste : les investissements, la sécurité, la qualité du service rendu, les tarifs pratiqués, etc.

En augmentant le taux de participation de l'État dans EDF, nous voulons clairement signifier notre refus de faire payer la progression des dividendes des actionnaires par les utilisateurs de l'énergie électrique.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.

Mme Hélène Luc. Les prix du pétrole et du gaz ont presque doublé dans l'Union européenne au cours des deux dernières années, ...

M. François Loos, ministre délégué. Eh oui !

Mme Hélène Luc. ...entraînant avec eux le prix de l'électricité.

Compte tenu de la demande mondiale de combustible fossile, de la longueur des chaînes d'approvisionnement, de la dépendance croissante à l'égard des importations, les prix du pétrole et du gaz vont se maintenir à des niveaux élevés. Tout le monde le sait !

Tous les chefs d'entreprise nous rappellent que la politique énergétique commande la politique industrielle d'un pays et que, pour renforcer et pour développer leur entreprise, ils ont besoin d'être assurés de la stabilité de la gestion de l'énergie.

Les raisons de maintenir une forte participation publique au capital de l'entreprise sont aussi valables aujourd'hui qu'en 1946, pour que des champions industriels puissent s'affirmer comme à l'époque et pour que notre indépendance soit assurée.

Ce modèle a permis la sécurité des approvisionnements, l'accès à l'énergie pour tous, l'indépendance de notre approvisionnement pour le programme nucléaire - où en serions-nous aujourd'hui si nous ne l'avions pas fait ? -, l'accès à l'énergie à des prix permettant aux industriels de développer les outils de la production nationale.

Hier soir, j'ai vu un reportage intéressant à la télévision sur ... (Chirac ! sur les travées du groupe socialiste.) ...la manière dont une société privée développe les conduites de gaz.

Le journaliste a demandé au directeur de cette société, qui a travaillé vingt ans pour GDF, pourquoi les conduites de gaz n'allaient pas plus loin. Le directeur lui a répondu que cela coûterait trop cher, que le département voisin était agricole, qu'il y avait du bois,...

M. Éric Doligé. Des carottes...

Mme Hélène Luc. ...que l'on pouvait également utiliser du butane, etc.

Nous voyons bien qu'un service privé ne rendra absolument pas les mêmes services que ceux qui sont rendus aujourd'hui par le service public.

Monsieur le ministre, répondez à la question posée et répétée dans les débats : comment une stratégie à très long terme, visant à garantir des investissements très lourds en termes d'innovation, sera-t-elle possible dans le cadre du financement et de la déstructuration proposée de cette entreprise ?

La réponse ne venant pas, j'ai emprunté une conclusion à un député UMP (Exclamations sur les travées de l'UMP.) :...

M. Éric Doligé. Formidable !

Mme Hélène Luc. ...« Est-il acceptable et opportun à quelques mois seulement des échéances cruciales de 2007 de renier ainsi notre parole ? Au moment où la crédibilité des hommes politiques est profondément entamée, ce virage à 180 degrés tant du Gouvernement que du président de l'UMP est préjudiciable à la majorité tout entière ! Il oblige les députés soit à trahir un engagement solennellement donné aux Français, soit à s'écarter de la discipline majoritaire.

« Comment, de surcroît, accepter un projet qui concrétise une politique européenne interdisant à moyen terme le principe même des tarifs réglementés au nom de la concurrence et, au même moment, s'indigner de la hausse des prix d'EDF-GDF et réclamer le maintien durable des tarifs régulés ? »

Ce parlementaire, vous l'aurez reconnu, c'est...

M. Éric Doligé. Maxime Gremetz !

Mme Hélène Luc. ... Nicolas  Dupont-Aignan !

M. Jean Bizet. Ce n'est pas une référence !

Mme Hélène Luc. Je suis d'accord avec lui : il faut rejeter ce projet de privatisation. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 470.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 469.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 468.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 467.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 466.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 798.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 34 :

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 326
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l'adoption 126
Contre 200

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 775.

M. Michel Mercier. M. Breton est parti vers la Chine compliquée, sans nous laisser ici avec des idées claires ! (Sourires.)

Que veut faire le Gouvernement ? C'est la question qu'a posée M. Longuet au travers de l'amendement n° 67 et tout au long de ses deux interventions. C'est la question que j'ai également soulevée au travers de ce sous-amendement.

La question est simple : le Gouvernement souhaite-t-il simplement avec le titre III - je mets de côté tout ce qui concerne la transposition en droit interne des directives européennes - faire « bouger » Gaz de France, pour reprendre une expression qui a été largement utilisée durant tous ces débats, ou souhaite-t-il, à partir de Gaz de France, développer une véritable politique de l'énergie et se donner les moyens de l'investissement ?

Il faut distinguer le gaz de l'énergie électrique, car les conditions ne sont pas les mêmes.

Monsieur le ministre, vous nous avez répondu tout à l'heure que le Gouvernement souhaitait une participation de 34 % de l'État dans le capital de GDF, car cela lui permettait de choisir le partenaire.

Pendant tout le temps où il a été présent, M. Breton nous a dit qu'il ne savait pas qui serait le partenaire, mais que ce qui était important était de pouvoir en avoir un.

Vous avez eu l'honnêteté de reconnaître que vous aviez un partenaire et que le Gouvernement souhaitait que l'État garde 34 % dans ce capital de Gaz de France pour pouvoir choisir Suez. C'est à la fois bien et un peu court : une fois que vous aurez choisi Suez, il faudra bien faire quelque chose !

Vous avez répondu à M. Longuet qu'il pourrait peut-être être question d'augmenter le capital - on se demande bien avec quel argent, mais c'est une autre affaire !

Le « mariage » entre Gaz de France et Suez répondra parfaitement au problème du gaz, notamment en ce qui concerne la diversification des approvisionnements et le gaz naturel liquéfié. De ce point de vue, ce nouveau groupe bénéficiera d'une position tout à fait intéressante.

S'agissant cette fois de l'énergie nucléaire, j'aimerais, monsieur le ministre, que vous soyez un peu plus clair ou un peu moins embrouillé que vous ne l'avez été jusqu'à maintenant.

Bien entendu, le nouveau groupe Gaz de France-Suez vendra à la fois du gaz et de l'énergie nucléaire - il dispose d'énergie hydraulique en France, et d'énergie thermique et nucléaire, en Belgique.

La question est de savoir comment sera fabriquée en France, demain, l'énergie d'origine nucléaire. Il existe un projet d'EPR mené par EDF et que nous approuvons. Mais vous savez comme nous tous, monsieur le ministre, qu'un EPR n'est pas suffisant, et qu'il en faudra au moins deux.

Le nouveau groupe né de la fusion entre Gaz de France et Suez aura-t-il le droit, lui aussi, de participer à la fabrication de l'énergie nucléaire ?

Une réponse positive justifierait tout à fait mon sous-amendement, qui tend à fixer le seuil de participation de l'État dans le capital de GDF à 51 %.

On considère aujourd'hui, même s'il existe une loi relative à la sécurité nucléaire qui est très bien, que l'État doit conserver 70 % de participation dans le capital d'EDF. Si cette loi était suffisante, il n'y aurait pas besoin de conserver un tel seuil de participation !

Dès lors que l'État veut garder 70 % dans le capital d'EDF, il doit détenir une participation d'au moins 51 % dans le nouveau groupe né de la fusion entre GDF et Suez afin de lui assurer l'accès à une production moderne d'énergie nucléaire, selon un procédé moderne.

Aujourd'hui, Suez dispose de centrales nucléaires en Belgique. On ne va pas dire à ce groupe qu'il a le droit de ne faire du nucléaire qu'en Belgique, de l'autre côté de la rivière !

En ce cas, il faudrait interdire également le vent d'Est, afin que les fumées de Belgique n'arrivent pas sur le nord de la France !

Il y a donc de ce point de vue une carence dans la discussion. Je comprends, monsieur le ministre, que vous ne soyez pas en mesure de me répondre. Dans le cas contraire, vous l'auriez fait depuis longtemps !

Quoi qu'il en soit, puisque vous ne me répondez pas, je maintiens mon sous-amendement afin que GDF-Suez puisse avoir lui aussi accès à la fabrication de toutes les formes d'énergie, notamment la fabrication de l'énergie électrique nucléaire !

M. Jean Desessard. Sous-amendement excellemment défendu !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Même si je ne partage bien évidemment pas les attendus de M. Mercier, je voudrais indiquer pourquoi nous allons voter en faveur de ce sous-amendement. Ce n'est bien sûr pas pour permettre à Suez de faire du nucléaire.

Tout à l'heure M. le rapporteur s'est dit attristé par certains de mes propos. Pour ma part, je suis affligée par les arguments présentés par la commission et par le Gouvernement.

Alors que nous sommes « embarqués » dans l'énorme machine qu'est ce projet de loi privatisant GDF en vue d'un grand projet industriel, M.  Poniatowski nous dit aujourd'hui qu'il n'est pas du tout sûr que cela se fasse !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. J'ai indiqué que je le souhaitais !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous le souhaitez et vous êtes convaincu de son intérêt, cela, nous l'avons bien compris, mais vous n'êtes pas sûr, avez-vous dit, que ce projet se réalise.

M. Longuet nous a expliqué qu'une participation de 34 % de l'État dans le capital n'empêchait absolument pas une OPA hostile. Donc, là aussi, vos arguments sur le seuil de 34 % étaient très convaincants... On a bien compris que tout cela ne correspondait pas tout à fait à ce que vous nous disiez.

On ne sait pas s'il y aura un grand groupe industriel Suez-GDF ; ce dont on est parfaitement sûr, c'est que vous entendez privatiser GDF.

Le sous-amendement de M. Mercier traduit évidemment, au-delà de ses attendus, une préoccupation que nous partageons, qui est de garder la possibilité d'une maîtrise publique sur le secteur de l'énergie.

Comme le montre, entre autres, le rapport Marini, la majorité du capital de l'ensemble Suez-Gaz de France sera flottante, ce qui, par conséquent, induit le risque d'une OPA hostile - c'est ce qu'a dit M. Longuet - qui pourrait, par exemple, être menée par un autre opérateur gazier européen. Dans la mesure où l'on ne sait pas si le projet va voir le jour, GDF peut, par la suite, se retrouver privatisé.

Cet opérateur pourrait être la Shell, par exemple, dont les intérêts ont été largement défendus par la commissaire européenne Nellie Kroes. S'il y a des questions qu'on ne pose pas à la Commission européenne - par exemple, sur une fusion EDF-GDF -, en revanche, on lui en pose d'autres, et elle répond qu'elle défend les intérêts de la Shell.

Pourquoi pas Enel, qui risque fort de se porter acquéreur des actifs cédés au terme de l'affaire ? Pourquoi pas Gazprom, fournisseur en devenir de l'Europe de l'Ouest et qui vient de signer un important contrat avec la République d'Ukraine, sous des conditions qui laissent transparaître la possibilité d'un accroissement sensible de la trésorerie disponible pour mener des raids boursiers à l'étranger ?

Dans ces conditions, chers collègues de la majorité, maintenir à 51 % la part du capital de Gaz de France détenue par l'État est sans doute une garantie minimale pour éviter que ce texte ne conduise, en définitive, à nous priver de l'outil indispensable de maîtrise de notre politique énergétique.

Nous en avons des exemples.

Depuis que MM. Chirac et Balladur - l'exemple date un peu, mais il reste valable - ont privatisé Pechiney, que s'est-il passé ? Pechiney s'est retrouvé absorbé au bout du compte par son principal concurrent, Alcan Toyo.

Que s'est-il passé à la suite de la privatisation du secteur aéronautique, notamment après la constitution d'EADS ? Je ne reviens pas sur le résultat actuel qui conduit le gouvernement fédéral allemand à venir au secours du groupe Daimler, à la suite des mésaventures d'Airbus.

Que s'est-il passé après la privatisation du secteur de la sidérurgie ? Je passe sur les pathétiques gesticulations qu'il vous a fallu faire, monsieur le ministre, pour intervenir dans l'affaire de l'offre publique d'achat de Mittal Steel sur Arcelor, mouvement qui ne s'est manifestement pas interrompu, malgré l'adoption de votre projet de loi sur les OPA... On pourrait en parler parce que, en l'espèce, on sait quel a été le résultat de ces gesticulations phénoménales : l'OPA de Mittal !

M. Guy Fischer. Ah oui !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout cela constitue donc des raisons de voter ce sous-amendement de moindre mal qui nous est proposé. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Nous aurions souhaité aller au-delà de ce que propose M. Mercier dans son sous-amendement. C'était d'ailleurs, je le rappelle, l'objet de nos amendements et sous-amendements visant à porter la part de l'État dans le capital de GDF à plus de 70 %, en attendant d'aller plus loin et de mettre en oeuvre un pôle public de l'énergie. Mais le Sénat ne nous a pas suivis, et c'est fort regrettable.

Dès lors, nous sommes tentés de voter ce sous-amendement, qui est pour nous, en quelque sorte, un texte de repli. Une participation de 51 %, pour l'instant du moins, permettrait à l'État de rester majoritaire. Nous souhaitons, en effet, que l'État conserve la maîtrise de la politique énergétique de la France. C'est un bon moyen d'y parvenir.

C'est la raison pour laquelle nous voterons ce sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. J'ai attendu le dernier moment pour intervenir parce que j'espérais une réponse du ministre.

M. Mercier lui a demandé quelles étaient ses intentions, lui laissant même la possibilité de ne pas répondre s'il n'était pas en mesure de le faire. Je souhaite, pour ma part, insister sur les questions qui se posent.

Monsieur le ministre, avez-vous l'intention de laisser Suez et GDF faire du nucléaire en France ?

Y aura-t-il concurrence sur le nucléaire ? Cela signifie qu'une société à capitaux majoritairement privés pourra faire du nucléaire, vendre ensuite à d'autres pays, ce qui contribuera à la prolifération nucléaire.

M. Mercier a bien posé cette question et souligné qu'il souhaitait que 51 % du capital restent publics afin précisément d'éviter cela.

Or, à cette question très précise qui a été posée au ministre, je m'aperçois, à l'instant de voter le sous-amendement n° 775, qu'aucune réponse n'a été apportée.

Monsieur le ministre, n'avez-vous pas encore réfléchi à la question ? Alors que nous débattons depuis trois semaines, qu'il nous est demandé de voir loin, sur quinze, vingt ou trente ans, aucune réponse ne nous est donnée sur l'avenir de l'énergie, en particulier sur le développement et la sûreté du nucléaire.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Loos, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis évidemment à votre disposition pour répondre à toutes vos questions. Je trouve très intéressant que vous vous interrogiez sur la possibilité de construire des EPR en France, et même que ce soit un sujet de préoccupation pour M. Desessard.

M. Jean Desessard. C'en est un !

M. François Loos, ministre délégué. Plutôt que de reformuler la réponse que j'ai déjà faite, je préfère ajouter qu'il existe une programmation pluriannuelle des investissements, dont nous avons plusieurs fois parlé, que j'ai communiquée à l'Assemblée nationale et au Sénat, notamment à M. Reiner, qui en possède un exemplaire. M. Mercier était absent ce soir-là, mais je suis sûr qu'il sera très intéressé par la lecture de ce document.

Cette programmation pluriannuelle des investissements, qui trace différents scénarios de consommation pour les années à venir, prend en compte des économies d'énergie. Monsieur Desessard, donnez-nous en acte ! Grâce à notre action, des économies d'énergie, notamment d'électricité, seront réalisées !

Ainsi, en 2012, Eurodif cessera de consommer beaucoup d'électricité, à la suite du remplacement de l'usine Georges Besse par l'usine Georges Besse II. Cela signifie que la consommation d'électricité n'est pas en croissance importante, que son rythme de croissance tend plutôt à se réduire et qu'un des facteurs les plus importants de consommation d'électricité, voire le plus important, disparaîtra en 2012.

Nous avons besoin, d'ici à 2015, d'une tranche nucléaire supplémentaire. C'est la raison d'être du projet d'EPR mené, vous le savez, par EDF à Flamanville.

Vous m'avez demandé si, dans cet intervalle, d'autres projets doivent être lancés et, dans d'affirmative, si un autre opérateur qu'EDF pourrait être autorisé à le faire.

M. François Loos, ministre délégué. Aujourd'hui, la possibilité de faire du nucléaire n'appartient à personne. Il revient à l'autorité de sûreté nucléaire, comme je l'ai dit tout à l'heure, d'instruire les projets.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout le monde peut faire du nucléaire à part nous !

M. François Loos, ministre délégué. Premièrement, il n'y a pas de besoins ; mais, deuxièmement, s'il y en avait, ...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On fera de l'énergie nucléaire pour la vendre !

M. François Loos, ministre délégué. ... l'autorité de sûreté nucléaire, dont vous avez voté l'indépendance au mois de juin dernier, est chargée de mettre les projets en perspective et d'étudier leur faisabilité au regard de la sûreté.

À un horizon un peu plus lointain, c'est-à-dire lorsque le parc nucléaire français aura une quarantaine d'années d'ancienneté, des besoins peuvent se manifester. D'après l'autorité de sûreté nucléaire, dont je ne fais que répéter les dires, les centrales actuellement en service pourraient avoir une durée de vie d'environ quarante ans et peuvent donc continuer à fonctionner jusqu'en 2017.

M. François Loos, ministre délégué. En 2017, la plus ancienne centrale française aura en effet quarante ans.

Si, à ce moment-là, des besoins de renouvellement se font sentir, ce sera dans la prévision des investissements. L'autorité de sûreté nucléaire dira alors si tel opérateur est fiable, s'il peut, en toute sécurité pour notre pays, mettre en place les constructions nécessaires. Je pense, là, être assez clair.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Cela n'est pas lié à la détention du capital !

M. François Loos, ministre délégué. En effet, monsieur Marini, cela n'a aucun lien avec la majorité dans le capital.

M. Michel Mercier. Pourquoi 70% à EDF, dès lors ?

M. François Loos, ministre délégué. Nous avons opté pour la solution de la minorité de blocage parce qu'elle permet de décider si l'on accepte ou non les augmentations de capital. Cela signifie que l'État a la possibilité d'accepter ou non d'être dilué dans un groupe plus large qui inclurait Gaz de France et un autre partenaire. L'État n'arrange pas le mariage, madame Borvo Cohen-Seat, mais il a un droit de veto sur le partenaire du fait même de la minorité de blocage qu'il conserve.

Ce n'est pas un choix. À partir de la proposition formulée par des opérateurs industriels de fusionner, l'État accepte d'être dilué à la hauteur de la minorité de blocage.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Assortie de l'action spécifique !

M. François Loos, ministre délégué. En effet, et cela lui donne le droit d'accepter ou non le projet qui lui est présenté par l'une et l'autre entreprises.

M. Roland Courteau. Cela ne veut pas dire grand-chose !

M. François Loos, ministre délégué. C'est donc en ce sens qu'il faut entendre l'idée de « choix ». La combinaison de l'action spécifique et de la minorité de blocage et les moyens qui en découlent nous permettent de mener une politique de développement de l'entreprise Gaz de France et d'accepter une dilution plus importante. L'entreprise pourra ainsi grandir, en tout cas plus que si la participation demeurait à 51 % ou à 70 %.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est un argument spécieux ! Attendons Bruxelles sur l'action spécifique !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Le capital de l'éventuelle entité fusionnée comportera, auprès de l'État, des investisseurs publics, AREVA et la Caisse des dépôts et consignations en particulier.

Même s'il s'agit de participations considérées comme financières, il n'en reste pas moins que, s'il y avait une justification pour cela, une concertation interviendrait entre l'État et ces investisseurs publics, qui sont à ses côtés.

M. Jean-Marc Pastor. Vous êtes Mme Soleil ?

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. En réalité, nous serions ainsi dans une situation où les intérêts publics seraient non pas limités à 34 %, mais bien proches de 40 %.(Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Marc Pastor. Vous vivez dans une bulle !

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je tenais à effectuer cette précision pour répondre à un argument que j'ai entendu tout à l'heure quant à une éventuelle situation de marché. Il faut être bien conscient, me semble-t-il, de ce que je viens d'évoquer. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)

Et puisque Mme Borvo Cohen-Seat a eu la gentillesse de mentionner mon rapport, sachez que cet argument y figure noir sur blanc. (Très bien ! sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 775.

Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, de la commission des affaires économiques et, l'autre, du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 35 :

Nombre de votants 328
Nombre de suffrages exprimés 327
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l'adoption 157
Contre 170

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme Hélène Luc. C'est dommage !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, pour explication de vote sur l'amendement n° 465.

M. Michel Billout. Nous ne nous faisons pas tellement d'illusions quant au sort qui sera réservé à l'amendement n° 465 et aux amendements suivants, mais nous souhaitons tout de même insister sur le sujet. Ces différents amendements visent à maintenir la part de l'État dans Gaz de France à 70 % au minimum.

Personne ne pourra prétendre le contraire, si l'État ne détient pas la majorité du capital, c'est bien la rémunération de l'actionnaire qui prévaudra. En effet, l'entrée d'investisseurs privés dans le capital des entreprises historiques appelle nécessairement une rentabilité des capitaux investis, à plus forte raison si ces investisseurs sont majoritaires.

Or la recherche de la création de valeur pour les actionnaires est totalement inconciliable avec les missions d'intérêt général qui sont inhérentes au service public de l'énergie. Seul un tel service est à même d'assurer l'indépendance énergétique, la sécurité d'approvisionnement, le droit à l'électricité pour tous et le développement équilibré du territoire dans le respect de l'environnement.

Malgré nos multiples demandes concernant la réalisation d'un bilan des conséquences de la libéralisation des marchés de l'énergie, force est de constater qu'un tel exercice ne sera pas effectué. Pourquoi ? Tout simplement parce que ce bilan serait désastreux et condamnerait votre politique énergétique !

Nous l'avons déjà dit, mais je tiens à le répéter ici, la libéralisation des marchés de l'énergie en Europe a abouti à la suppression ou à la précarisation de 250 000 emplois, à la hausse des tarifs qui étrangle déjà les entreprises et bientôt les particuliers, et aux ruptures d'approvisionnements. Vous n'ignorez pas ces effets dévastateurs.

Pourtant, le présent projet de loi met tout en oeuvre pour accélérer ce processus destructeur pour notre service public, nos emplois et nos industries.

Si le capital n'est pas détenu par des fonds publics, c'est la perspective longue qui se trouve négligée. Pourquoi ? Tout simplement parce que les capitaux privés ne mettent pas, comme peut le faire l'État, l'activité en perspective dans l'intérêt général. Ce qui les intéresse, ce sont des cycles courts avec un retour sur investissements plus rapide.

À cet égard, à défaut d'investissements, ne risquons-nous pas de nous retrouver dans quelques années face à une pénurie d'énergie ?

Quant à la nécessité de réinvestir, qui vaut pour les réseaux gaziers comme pour les réseaux électriques, compte tenu du fait que notre réseau de distribution du gaz n'est pas encore entièrement renouvelé, comment peut-on être assuré que demain, après la privatisation, une société privée aura pour priorité le réinvestissement de ses bénéfices dans le renouvellement et l'extension des réseaux ?

Aujourd'hui encore, de larges pans de notre territoire ne sont pas desservis. Ce qui nous rassure, c'est que Gaz de France soit toujours la propriété de l'État. Mais qu'en sera-t-il demain ? Une solidarité territoriale doit donc se manifester.

C'est la raison pour laquelle je voterai l'amendement n° 465, ainsi que les amendements suivants.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 465.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 458.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 464.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 463.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 457.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 459.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 462.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 460.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 461.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 161 et 664.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 36 :

Nombre de votants 232
Nombre de suffrages exprimés 232
Majorité absolue des suffrages exprimés 117
Pour l'adoption 31
Contre 201

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Roland Courteau. Monsieur le président, à la suite d'une fausse manoeuvre, nous n'avons pas voté ! Peut-être aurait-on pu nous prévenir, car il était évident que nous souhaitions voter en faveur de notre amendement n° 161 !

M. le président. Monsieur le sénateur, j'ai demandé si plus personne ne demandait à voter. Dès lors que plus personne ne souhaitait prendre part au scrutin, j'en ai naturellement prononcé la clôture. (Murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Annie David. C'eut été l'UMP...

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 456.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 471 et 721.

M. Yves Coquelle. Tout comme les amendements précédents, les amendements nos 471 et 721 tendent à supprimer une partie de l'article 10, en l'occurrence le paragraphe II.

Toutefois, je profite de l'occasion qui m'est ici offerte pour revenir sur ce qui constitue de notre point de vue un véritable drame et une hypothèque sur notre avenir national.

Aucun des arguments avancés par la majorité ne nous paraît recevable pour justifier la privatisation de GDF.

Monsieur le ministre, le premier argument que vous avancez est la baisse des prix. Or, au regard du contexte actuel sur le marché énergétique, nous sommes assurés que les prix augmenteraient nécessairement en cas de privatisation de GDF. En effet, dès lors que la gestion de l'entreprise sera uniquement guidée par la volonté d'augmenter les profits, je ne vois pas très bien comment les prix pourraient baisser.

Face à ce fragile argument de votre part, les questions et les inquiétudes sont en revanche particulièrement nombreuses.

Que restera-t-il de l'indépendance énergétique de la France dans de telles conditions ? En mettant ainsi en péril l'indépendance énergétique de la France, et ce dans un contexte international de tensions et d'incertitudes, la majorité prend une immense responsabilité.

De quelles garanties disposons-nous face à une éventuelle OPA sur Suez ? Qu'est-ce qui met cette dernière entreprise à l'abri du démantèlement ? Sur tous ces sujets, il y a beaucoup de manipulations, d'idéologie et de mensonge !

Vous présentez cette privatisation comme la seule solution envisageable pour GDF. Mais ce n'est pas vrai !

Juridiquement, rien n'interdit un rapprochement entre EDF et GDF, et vous le savez fort bien. En effet, les deux entreprises ne produisent pas le même type d'énergie. Vous vous abritez derrière l'Europe, mais la construction d'un pôle public de l'énergie n'exigerait pas plus de compromis auprès des institutions communautaires que ceux que vous êtes actuellement en train de négocier.

En matière énergétique, la France dispose de grands atouts. Mais, au lieu de les valoriser par une politique française ou européenne volontariste, vous les bradez au secteur privé en les cédant pièce par pièce. C'est exactement l'inverse de ce que nous apprennent les expériences de nos voisins.

Face à un tel danger pour notre avenir, je vous demande une nouvelle fois, mes chers collègues, de revenir sur cette disposition, en supprimant le paragraphe II de l'article 10.

Mise au point au sujet d'un vote

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Article 10 (précédemment réservé) (début)

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Monsieur le président, je voudrais signaler que, lors du scrutin public sur les amendements identiques nos 161 et 664, nous avons cru que l'un de nos collègues avait effectué l'opération de vote. Or, à la suite d'une fausse manoeuvre, tel n'a pas été le cas.

Au nom de mon groupe, je demande donc au service de la séance de bien vouloir considérer que, sur ces amendements, dont l'un émanait de notre groupe, notre vote était bien sûr positif.

M. le président. Je vous en donne acte, mon cher collègue.

Mise au point au sujet d'un vote
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Article 10 (précédemment réservé) (interruption de la discussion)

Article 10 (suite)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 471 et 721.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 472.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 37 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 329
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 128
Contre 201

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 749 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 162 et 665.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 163 et 666.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 165 et 668.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 164 et 667.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 473.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 474.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 475 et 563.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 476.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote sur l'article 10.

Mme Bariza Khiari. Dans leurs interventions sur l'article, mes collègues ont dit tout le mal qu'ils pensaient de la méthode utilisée pour faire aboutir ce projet. En cet instant, je voudrais redire pourquoi la privatisation de GDF est parfaitement inacceptable sur le fond.

Ce projet est mauvais et funeste : mauvais pour les Français, en termes de service public et de tarifs ; funeste pour la France, car il remet en cause la capacité de notre pays à défendre sa place sur le marché énergétique et à assurer sa sécurité d'approvisionnement.

Au niveau industriel, ce projet va à l'opposé de ce dont la France a aujourd'hui besoin. Un peu partout dans le monde, les États et les gouvernements ont la volonté de reprendre en main le secteur de l'énergie. Ce secteur est en effet stratégique et vital pour l'économie, et la puissance publique est le mieux à même de sécuriser les approvisionnements et de garantir des tarifs raisonnables.

De plus, les contrats d'approvisionnement sont plus que jamais le fruit de négociations entre États dans lesquelles le secteur privé ne joue qu'un rôle très réduit. Dans ces conditions, pourquoi la France serait-elle le seul pays à brader un outil énergétique puissant en le transférant au secteur privé ? Cela n'a aucun sens !

Nous constatons que trois logiques s'affrontent dans cet hémicycle.

La première est celle de M. Longuet, que caractérise une réelle honnêteté intellectuelle et qui montre qu'une dilution du capital de GDF est inévitable avec une participation de l'État qui serait réduite à 33 %, ce qui amène notre collègue à ne pas fixer de niveau à cette participation.

La deuxième correspond à la proposition défendue par M. Mercier ; elle est tout aussi honnête intellectuellement et place le curseur de la participation de l'État à 51 %. Elle vise à donner à GDF les moyens de forger les alliances nécessaires pour poursuivre son développement et lui permettre de devenir un acteur gazier incontournable à l'échelle européenne et internationale.

La troisième logique répond à notre conviction, qui nous conduit à maintenir le niveau de participation de l'État à 70 %, parce que nous pensons que la France a besoin d'un véritable projet industriel en matière d'énergie, projet qui doit passer par la création d'un grand pôle public de l'énergie.

Finalement, votre projet de loi, monsieur le ministre, ne donne satisfaction à personne, puisque vous maintenez un niveau de participation au tiers du capital, avec toutes les incertitudes qui s'ensuivent.

Pourtant, la France dispose de puissants atouts en matière énergétique : elle a EDF, premier électricien du monde, le CEA, AREVA, une grande compagnie pétrolière privée, Total, et Gaz de France. Bref, nous avons les outils industriels adaptés pour mener une grande politique française et européenne de l'énergie. Par pur dogmatisme et pour servir des intérêts à court terme, vous préférez affaiblir cet ensemble en privatisant Gaz de France, en réduisant nos performances et notre indépendance énergétique. Quoi que vous en pensiez, c'est la France que vous affaiblissez !

Nous ne pouvons que nous opposer fermement à cette politique en rejetant cet article 10.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Cet article est l'article du reniement de l'engagement pris par M. Sarkozy de ne pas privatiser GDF.

C'est l'article de la remise en cause de l'un des fondements de notre service public de l'énergie et de la loi du 8 avril 1946.

C'est l'article de la faute majeure, puisque l'État renonce, par cette privatisation, à la maîtrise de la politique énergétique de la France.

C'est l'article de la perte de pouvoir de l'État dans un domaine aussi essentiel, pour le présent et l'avenir, que celui de l'énergie.

C'est l'article de la dénationalisation, mais aussi de l'illusion, puisque ni la golden share, ni la minorité de blocage, ni même la présence d'un commissaire du Gouvernement ne rétablissent l'État dans sa capacité d'agir et ne préservent l'entreprise d'une OPA. Nous persistons à le dire, dans un domaine comme celui de l'énergie, seul un État majoritaire dans le capital de l'entreprise peut garantir sa capacité d'action !

Monsieur le ministre, vous vous inscrivez en rupture avec soixante ans d'histoire et avec l'avenir, car il faudrait que dans le domaine de l'énergie, bien de première nécessité, l'État puisse peser au maximum. C'est aussi le rapport entre notre pays et l'Europe qui est en train de se jouer ; le vote sur l'article 10 en sera d'autant plus important.

Voilà quelques-unes des raisons qui conduisent le groupe socialiste et les Verts à voter contre l'article 10.

M. Jean-Marc Pastor. Notre « non » sera inscrit dans l'Histoire !

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. L'article 10 réduit la part de l'État dans le capital de Gaz de France et autorise la privatisation de l'entreprise.

Nous pensons que cette politique est irresponsable car l'asservissement des secteurs de l'électricité et du gaz au libre-échange, et donc à la rentabilité à court terme, place de fait les pouvoirs publics dans l'incapacité de répondre aux enjeux énergétiques.

En effet, comment penser que les entreprises privées et la loi du marché peuvent prendre en compte ces impératifs, puisque leur principal objectif est l'augmentation des marges pour les actionnaires ? Ce qui prime pour les actionnaires, ce sont les dividendes : ils veulent du cash ! Quand ils investissent dans une entreprise, ils veulent que cela leur rapporte à la fin de l'année, sinon ils reprennent leurs fonds pour les placer ailleurs !

Quand des millions d'euros menacent d'être retirés par un fonds d'investissement, un fonds de pension ou une banque importante, il est clair que la direction de l'entreprise est à l'écoute, non pas des intérêts du pays où elle est installée, mais des exigences de l'actionnaire !

Par le biais de nos amendements, nous souhaitions renforcer la maîtrise publique et sociale de GDF.

Il est courant d'entendre, tant dans des bouches savantes que dans des conversations informelles, que le débat autour du régime de propriété des biens est dépassé. Dans notre hémicycle, cette idée est particulièrement en vogue depuis plusieurs jours.

Savoir qui possède les entreprises et les capitaux répondrait à une préoccupation de nos ancêtres des xixe et xxe siècles - on nous a même traités de « ringards » - mais, en ce siècle nouveau, nous nous serions rendus à l'évidence du marché, nous concentrant maintenant sur les « vraies » questions, celles de l'organisation et de l'adaptation à ce marché !

Nous nous serions adaptés à la réalité et aurions cessé de nous perdre dans des utopies irréalisables. Ainsi, les problématiques de fond du débat politique actuel auraient trait à la transparence et à l'édifice de règles élaborées pour réglementer, voire réguler les différents marchés. L'ouverture du capital des entreprises publiques ne serait plus une question taboue.

Cette conception n'est pas la nôtre. Nous affirmons, au contraire, que le régime de la propriété est toujours une question de fond - nous en rediscuterons dans les mois ou les années à venir -, d'autant que le marché capitaliste tend à s'attaquer aux secteurs les plus vitaux et les plus rentables de notre économie : l'énergie, mais aussi la santé, comme en témoigne l'offensive des compagnies d'assurance contre le « monopole » de la sécurité sociale, ou encore l'éducation.

La propriété reste un pouvoir sur les choses et sur les autres êtres humains. Être détenteur, c'est aussi être décideur et, plus on possède, plus on pèse dans les décisions.

La transformation de Gaz de France en entreprise privée implique qu'une poignée d'actionnaires et de dirigeants d'entreprises négocieront désormais les prix du kilowattheure ou du mètre cube de gaz, prendront les décisions d'investissement, orienteront la politique de recherche et de sécurité dans le secteur crucial qu'est le gaz. Ils seront responsables de la qualité du service rendu aux usagers. Or nous ne croyons pas à l'altruisme des actionnaires, de M. Albert Frère, à leur souci de défendre l'intérêt général.

Au contraire, le désengagement de l'État dans ce domaine, c'est la perte de la maîtrise publique des prix, le recul des investissements de sécurité et de la recherche. La question du régime de propriété n'a donc pas perdu son importance.

Les forces libérales l'ont d'ailleurs bien compris, puisqu'elles continuent de faire la chasse aux entreprises publiques et à la propriété publique. En défendant une maîtrise publique de l'énergie, nous posons la question suivante : qui doit décider de l'avenir du secteur énergétique en France et gérer les outils que sont EDF et GDF ?

Bien entendu, nous voterons contre l'article 10. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Comme je l'ai déjà indiqué, nous considérons que cet article est inconstitutionnel au regard de l'alinéa 9 du préambule de la Constitution de 1946.

En tout état de cause, nous saisirons le Conseil constitutionnel, en nous fondant notamment sur sa décision concernant la loi de 2004.

Par conséquent, je ne surprendrai personne en annonçant que nous voterons contre cet article. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Henri Revol, pour explication de vote.

M. Henri Revol. L'examen de cet article a été riche d'échanges. C'est donc en connaissance de cause, après ce long débat où tous les arguments ont été présentés dans la sérénité, que nous nous apprêtons à voter.

L'adoption de ces dispositions permettra à notre grande société nationale de devenir vraiment européenne et de jouer un rôle primordial au sein d'un grand marché libéralisé. (Rires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. Henri Revol. GDF pourra se renforcer et s'ouvrir, grâce à son alliance avec Suez, de vastes perspectives de développement.

Vous savez bien, mes chers collègues, que l'État continuera à être le principal actionnaire- et de loin ! - et à garder ainsi une capacité de contrôle que nous avons largement évoquée.

M. Roland Courteau. Ce n'est pas possible !

M. Henri Revol. Le groupe de l'UMP votera bien entendu cet article. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Bernard Piras. On n'y croit pas !

M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 38 :

Nombre de votants 323
Nombre de suffrages exprimés 318
Majorité absolue des suffrages exprimés 160
Pour l'adoption 173
Contre 145

Le Sénat a adopté.

M. Roland Courteau. C'est tout juste !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas brillant !

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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