M. Bernard Dussaut. Très bien !
Mme Nicole Bricq. J'en viens à l'amendement n° 99.
Les études récentes conduites dans le secteur bancaire, notamment le rapport de la Commission européenne, expliquent le très faible taux français de mobilité bancaire par l'existence de barrières rendant le changement de compte compliqué et coûteux.
Monsieur le secrétaire d'État, vous l'avez vous-même souligné à l'Assemblée nationale et je souscris tout à fait à votre constat qui est d'ailleurs connu, les Français sont plus fidèles à leur banque qu'à leur conjoint : dix ans pour nos banques et, dans les nouvelles générations, sept ans pour les conjoints ! (Sourires.)
Si, comme on nous l'annonce, la procédure de divorce par consentement mutuel est désormais confiée au notaire et non plus au juge,...
Mme Odette Terrade. Et même sans avocat !
Mme Nicole Bricq. ... sans l'aide d'un avocat, le rythme va encore s'accélérer ! (Nouveaux sourires.)
À ce stade, vous en conviendrez, il s'agit non plus de fidélité à sa banque, mais bien plutôt de captivité ! Oui, les clients des banques sont souvent captifs car, à l'heure actuelle, il est à la fois pénible sur le plan administratif et onéreux de changer de banque.
Il faut gérer soi-même le passage d'un compte à l'autre. Il appartient donc au client de prévenir de ce changement de compte l'ensemble des sociétés ou organismes qui interviennent sur son compte par le biais de virements ou de prélèvements, alors que cette information est à la disposition de l'établissement bancaire.
Je peux en témoigner car, comme vous tous, j'ai déménagé à plusieurs reprises dans ma vie. Quand on conserve le même établissement bancaire, un service particulier de la banque s'occupe de toutes les formalités de changement de compte. Ce qui est possible au sein d'une banque doit également l'être d'une banque à l'autre.
Or, en l'absence de coordination entre établissements bancaires, le passage d'un établissement à un autre peut déclencher une série d'incidents liés précisément à la gestion des instruments de paiement. Le client doit être très vigilant et veiller à laisser une provision suffisante afin d'éviter des frais supplémentaires, voire une interdiction bancaire. Le coût important de ces opérations laissées à la charge du client freine la mobilité des clients.
À l'instar des pays étrangers, où les taux de mobilité bancaires sont bien plus élevés - je pense en particulier au Royaume-Uni -, le présent amendement entend instaurer un service d'aide au changement de compte, dont le rôle serait de simplifier, à un prix plafonné par décret, les démarches du consommateur.
La banque gestionnaire du compte de dépôt transmettrait au nouvel établissement bancaire choisi par le consommateur l'ensemble des éléments d'information relatifs aux opérations menées sur son compte, afin que toute la procédure se déroule dans les meilleurs délais.
Cet amendement devrait aller dans votre sens, chers collègues de la majorité. Puisque vous incitez à la mobilité, vous devriez être favorables à la mobilité bancaire !
J'en viens maintenant à l'amendement n° 100.
La pratique bien connue des dates de valeur consiste, pour le banquier, à percevoir une rémunération sur un temps plus long que celui pendant lequel il avance les fonds - intérêts débiteurs - et à verser une rémunération sur un temps plus court que celui pendant lequel il dispose des fonds - intérêts créditeurs.
Aujourd'hui, la plupart des banques ont recours aux dates de valeur, ce qui alourdit considérablement la facture des frais bancaires pourtant injustifiés en l'occurrence. D'ailleurs, dans un arrêt du 6 avril 1993, s'appuyant sur les dispositions de l'article 1131 du code civil, la Cour de cassation a jugé que les dates de valeur étaient au moins partiellement sans cause. Elle a opéré une distinction entre les remises de chèques à l'encaissement et les opérations de dépôt et de retrait d'espèces.
Depuis, la jurisprudence s'est étoffée. Le jugement du tribunal de grande instance de Paris rendu le 18 mai 2004 a ainsi établi le caractère non justifié de l'application de dates de valeur négatives et, donc, de la facturation d'intérêts aux comptes débiteurs.
Le présent amendement vise à prohiber la pratique des dates de valeur, « à l'exception des opérations internationales, pour lesquelles elles doivent être dûment justifiées ». Il s'agit d'insérer un nouvel article dans la section « Droit au compte et relations avec le client » du code monétaire et financier. L'amende prévue est de 3 000 euros, et elle est cumulable.
M. le président. Je m'efforce de suivre le débat, mais je n'ai pas bien compris la relation que vous établissiez entre mariage et captivité, ma chère collègue ! (Sourires.)
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit de fidélité, monsieur le président ! M. le secrétaire d'État nous a brillamment expliqué les problèmes de fidélité et de captivité, vaste sujet philosophique !
M. Philippe Nogrix. Restons-en au texte, il en vaut la peine !
M. le président. En effet, mon cher collègue.
Quel est donc l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. L'amendement n° 101 vise à instaurer le calcul de moyennes à partir des informations données dans le récapitulatif annuel.
Même si cet amendement procède d'une bonne intention, puisqu'il s'agit d'obtenir davantage de transparence, son adoption créerait une certaine complexité, trop d'information tuant l'information.
Laissons le nouveau dispositif « s'installer » dans la vie des consommateurs ; voyons comment ces derniers l'utilisent. Nous comptons bien d'ailleurs sur nos concitoyens pour mettre à profit les fêtes de fin d'année, période de grande convivialité s'il en est, et discuter en famille de leurs frais bancaires respectifs ! (Sourires.) Voyons également s'ils font pression sur les banques pour négocier de nouveaux tarifs ou s'ils se décident à accroître leur mobilité bancaire.
Ce n'est qu'au vu de ce bilan qu'il sera possible de réfléchir à d'éventuels mécanismes complémentaires, à l'instar de celui qui est proposé dans cet amendement. Mais la réflexion devra également prendre en compte les effets négatifs potentiels et évaluer les coûts eu égard aux avantages attendus.
Pour cette raison, la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 101.
La mise en oeuvre des dispositions prévues par l'amendement n° 99, qui soulève une question importante et dont le principe s'inspire de la portabilité des numéros de téléphone -sujet que M. le secrétaire d'État connaît bien ! -, ne serait pas sans poser de sérieuses difficultés en matière de secret bancaire et de confidentialité des données personnelles.
Aussi la commission est-elle défavorable à cet amendement. Au demeurant, je souhaiterais entendre l'avis du Gouvernement sur ce dossier intéressant, qui mérite d'être développé.
M. Philippe Nogrix. Très bien !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Par ailleurs, la commission estime que le dispositif prévu par l'amendement n° 100 nécessiterait une réflexion et une concertation préalables, qui n'ont pas eu lieu, tout au moins au Parlement.
Je me demande notamment si une telle mesure ne pourrait pas avoir des effets négatifs sur les consommateurs. En effet, les banques ne seraient-elles pas tentées de récupérer par d'autres moyens, par exemple en majorant les taux des crédits ou le coût de certains services bancaires, ce qu'elles ne pourraient plus gagner en jouant sur les dates de valeur ? Il faudrait évidemment examiner tout cela en détail.
Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à l'amendement n° 100.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Madame Bricq, le Gouvernement partage votre objectif de transparence dans le domaine des frais bancaires. Toutefois, l'information que vous proposez d'inclure par le biais de l'amendement n° 101 dans le récapitulatif annuel ne nous paraît pas forcément pertinente.
En effet, comme vous le savez, les banques proposent à leurs clients des forfaits qui incluent parfois un certain nombre de virements gratuits. Le coût moyen d'un virement pour un client disposant d'un forfait n'est donc pas forcément le même que pour un client qui n'en dispose pas.
De plus, la transparence sur le coût moyen n'est exigée d'aucun autre métier. Nous ne sommes donc pas convaincus de la pertinence de cette information. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement n'y est pas favorable.
Sur l'amendement n° 99, qui est relatif à un sujet très important, le Gouvernement est très favorable à l'idée de faciliter la mobilité bancaire. Plusieurs mesures ont d'ailleurs été prises en ce sens depuis le mois de novembre 2004. Ainsi, dans le cadre du Comité consultatif du secteur financier, les banques se sont déjà engagées à ne pas facturer la clôture des comptes et à fournir à leurs clients, à un prix raisonnable, une liste des opérations automatiques et récurrentes exécutées sur leurs comptes courants.
En outre, le Gouvernement a engagé avec la Commission européenne des travaux importants sur cette question. Parallèlement, le président de la Commission a lui-même récemment demandé aux commissaires concernés de travailler sur ce sujet, afin de faciliter la fluidité du marché bancaire au profit des consommateurs.
Or, madame Bricq, l'amendement n° 99 ne répond pas sur le fond à toutes les questions sur lesquelles le Gouvernement est en train de travailler, en coordination avec la Commission européenne. Par ailleurs, son adoption pourrait poser, comme M. le rapporteur l'a indiqué, un certain nombre de difficultés techniques liées au secret bancaire et à la confidentialité des données. Pour ces raisons, le Gouvernement n'y est pas favorable.
S'agissant de l'amendement n° 100, nous souscrivons à l'objectif, à savoir la suppression des dates de valeur non justifiées. Mesdames, messieurs les sénateurs, le code civil, je vous le rappelle, impose que toute obligation soit causée, c'est-à-dire qu'elle ait une cause. Pour cette raison, les dates de valeur non justifiées par des délais techniques liés au traitement des opérations sont aujourd'hui prohibées.
J'observe que la justice est intervenue à de nombreuses reprises pour confirmer ce point et condamner des établissements à restituer les intérêts perçus au titre de dates de valeur sans cause.
À l'heure actuelle, la jurisprudence considère que seules les dates de valeur appliquées en matière d'encaissement de chèques ou de paiements internationaux sont valables et justifiées sur le plan technique.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 100.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'amendement n° 101.
Mme Nicole Bricq. Cette explication de vote vaudra pour les amendements nos 101, 99 et 100, monsieur le président.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez invoqué contre cet amendement l'imprécision technique, imprécision que je suis d'ailleurs prête à reconnaître. En effet, je ne dispose pas des éléments auxquels peuvent avoir recours mes collègues de la majorité, avec l'aide des services du secrétariat d'État.
Je remarque tout de même, puisque vous m'opposez finalement, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d'État, une fin de non-recevoir sur ces trois amendements, que la Fédération bancaire française, dont je ne mésestime pas l'influence, défend bien ses intérêts. En effet, les résultats de nos opérateurs bancaires en 2006 ont tout de même été très favorables ! J'en veux pour preuve les dividendes que ces établissements ont distribués à leurs actionnaires.
Quant à votre remarque, monsieur le rapporteur, concernant une éventuelle récupération des sommes par une augmentation des taux de crédit, j'attire votre attention sur l'étendue de la crise des liquidités due au surendettement des ménages américains, dite crise des subprimes, qui va causer aux établissements bancaires, en 2008, beaucoup plus de soucis que nos modestes travaux parlementaires !
Je retiens de cette discussion qu'elle n'a pas été inutile, dans la mesure où vous partagez nos objectifs. Toutefois, je regrette que vous ne fassiez pas écho à ces amendements, que nous maintenons, car nous sommes persuadés qu'ils procèdent du bon sens et que leur adoption irait dans l'intérêt des clients.
Les associations de consommateurs militent en faveur de ces revendications depuis des années. Il faudra bien y arriver un jour... Pour notre part, nous préférons que ce soit maintenant !
M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote sur l'amendement n° 100.
M. Philippe Nogrix. Mes chers collègues, dès que nous évoquons le lien entre la banque et son client, nous devons faire très attention, car il y a dans le système bancaire des règles du jeu bien précises, à commencer par le secret bancaire, qui ne se partage pas. En effet, un lien de confiance s'établit entre le client et sa banque. Je pense également au respect des données personnelles. Lorsque l'on a besoin de son banquier, on est prêt à lui dévoiler énormément d'éléments de sa vie privée.
Cependant, pour une raison ou une autre, chacun peut être tenté de changer de banque. Vous demandez, madame Bricq, que tout ce que l'on a confié à son banquier, dans l'intimité de son bureau, soit transmis à un autre banquier, et ce simplement pour une raison d'argent ! Je vous invite à bien considérer tout ce que représentent les données personnelles et le lien de confiance qui s'est établi entre le banquier et son client. Sans doute jugerez-vous alors que le Gouvernement et la commission ont eu raison de repousser vos amendements.
Quant aux bénéfices des banques, l'exemple que vous avez donné ne peut que nous faire réfléchir. Il est vrai que nous allons subir le contrecoup de la crise américaine des subprimes. (Mme Nicole Bricq s'exclame.) Or, lorsque vous empruntez de l'argent à votre banque, c'est mon argent qu'elle utilise, chère collègue, et je suis tout autant attaché à l'argent qu'une banque peut vous prêter que vous à l'argent que vous désirer lui emprunter ! Il s'agit de notre argent, et c'est de notre argent que les banques disposent.
Selon moi, il faut respecter un certain équilibre et ne pas s'en tenir au seul point de vue de celui qui emprunte ; convenez que celui qui dépose son argent et celui qui in fine prêtera méritent également attention.
Considérons les risques énormes que représentent aujourd'hui les mouvements financiers internationaux, en particulier dans le contexte de la mondialisation : un battement d'aile de papillon dans le Pacifique peut provoquer une tempête dans la Manche ! Nous devons intégrer ces données pour parfaire notre vision d'ensemble.
Les associations de consommateurs ne cessent de réclamer encore et encore, mais elles ne disposent pas de toutes les données. En tant que législateur, notre rôle est de nous informer, afin de considérer le problème dans sa totalité sans privilégier une seule des parties en cause.
En définitive, mes chers collègues, que représentent le lien de confiance instauré par le secret bancaire et toutes les règles du jeu qui ont été établies ? Quels sont les risques que les uns et les autres doivent assumer ? Si les consommateurs doivent un jour perdre de l'argent à cause des trop grands risques courus par leur banque, ils feront peut-être attention quand ils placeront leurs économies !
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 10 bis
I. - Le 2° bis de l'article L. 312-8 du code de la consommation est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Dans ce cas, le prêteur remet avec l'offre préalable un document d'information contenant une simulation de l'impact d'une variation du taux d'intérêt sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit. Cette simulation ne constitue pas un engagement du prêteur à l'égard de l'emprunteur quant à l'évolution effective des taux d'intérêt pendant le prêt et à leur impact sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit. Le document mentionne le caractère indicatif de la simulation et l'absence de responsabilité du prêteur quant à l'évolution effective des taux d'intérêt pendant le prêt et à leur impact sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit ; ».
II. - Le I entre en vigueur neuf mois après la publication de la présente loi.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 39, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le I de cet article :
I. - L'article L. 312-8 du code de la consommation est ainsi modifié :
1° Le quatrième alinéa (2° bis) est ainsi rédigé :
« 2° bis. Pour les offres de prêts dont le taux d'intérêt est fixe, comprend un échéancier des amortissements détaillant pour chaque échéance la répartition du remboursement entre le capital et les intérêts ; »
2° Après le quatrième alinéa (2° bis), il est inséré un 2° ter ainsi rédigé :
« 2° ter. Pour les offres de prêts dont le taux d'intérêt est variable, est accompagnée d'une notice présentant les conditions et modalités de variation du taux d'intérêt et d'un document d'information contenant une simulation de l'impact d'une variation de ce taux sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit. Cette simulation ne constitue pas un engagement du prêteur à l'égard de l'emprunteur quant à l'évolution effective des taux d'intérêt pendant le prêt et à son impact sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit. Le document d'information mentionne le caractère indicatif de la simulation et l'absence de responsabilité du prêteur quant à l'évolution effective des taux d'intérêt pendant le prêt et à son impact sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit ; »
3° Le début du pénultième alinéa est ainsi rédigé :
« Toute modification des conditions d'obtention d'un prêt dont le taux d'intérêt est fixe, notamment... (le reste sans changement) »
4° Le dernier alinéa est supprimé.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Cet amendement devrait faire plaisir à Mme Bricq...
En effet, l'article 10 bis a pour objet d'informer le consommateur susceptible de s'engager dans un crédit à taux variable quant à l'impact d'une variation potentielle du taux d'intérêt sur le montant des mensualités à venir.
Outre son objectif de clarification rédactionnelle, cet amendement vise à rendre obligatoire la fourniture de la notice présentant les conditions et modalités de variation du taux du prêt immobilier, alors que ce n'est aujourd'hui que facultatif. Il serait en effet paradoxal que la simulation soit obligatoire, mais pas le document qui l'explique !
M. le président. L'amendement n° 113, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Tout emprunteur ayant déjà souscrit un prêt à taux variables bénéficie à sa demande du document d'information susmentionné au précédent alinéa. »
La parole est à M. Bernard Dussaut.
M. Bernard Dussaut. L'article 10 bis permet de renforcer, au bénéfice du consommateur, la transparence pour la souscription d'un crédit immobilier à taux variable.
Ce sujet est particulièrement d'actualité, puisque les contrats à taux variable se sont multipliés ces dernières années, notamment entre 2004 et 2006. Certains ménages se retrouvent aujourd'hui dans des situations financières difficiles, en raison de la tension actuelle sur les taux d'intérêt, qui provoque un allongement de la durée de leur crédit et une hausse de leurs mensualités de remboursement.
L'objet de cet amendement est de permettre à ces ménages de bénéficier dès aujourd'hui du document d'information prévu par cet article. Il ne fait aucun doute que les établissements bancaires sont actuellement en mesure de fournir à leur client un tel document, qui répond à une réelle nécessité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 113 ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je pense que M. Dussaut sera d'accord avec moi pour reconnaître que la simulation prévue par l'article 10 bis n'a d'utilité qu'au moment de l'offre de prêt pour que l'emprunteur potentiel soit clairement informé des effets d'une variation des cours du taux d'intérêt. Une fois que le prêt est engagé, cette simulation n'a plus guère d'utilité.
Par ailleurs, l'amendement n° 190 rectifié de la commission, dont nous débattrons tout à l'heure dans le cadre de l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 10 bis, répond probablement beaucoup mieux au souci d'information de nos collègues, puisqu'il impose aux banques d'adresser chaque année à leurs clients ayant souscrit un prêt à taux variable un document leur indiquant le montant de capital qu'il leur reste à rembourser.
Au bénéfice de cette explication, j'invite M. Dussaut à retirer son amendement, faute de quoi la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements en discussion commune ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 39.
S'agissant de l'amendement n° 113, il partage le point de vue exprimé par M. le rapporteur.
Premièrement, monsieur le sénateur, l'information que vous proposez de communiquer à l'emprunteur vise à éclairer ce dernier au moment où il conclut son prêt, mais elle ne paraît pas indispensable pour le stock des crédits déjà contractés.
Deuxièmement, le Président de la République a demandé aux établissements bancaires, qu'il a réunis le 29 octobre dernier, de mettre en place une procédure individualisée d'examen de la situation de toutes les personnes ayant contracté des crédits immobiliers à taux variables, afin de mesurer d'éventuelles difficultés de paiement à la suite de l'augmentation récente des taux d'intérêt.
Pour toutes ces raisons, et considérant que l'amendement n° 190 rectifié que nous examinerons ultérieurement est plus adapté, je sollicite le retrait de l'amendement n° 113. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 113 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 40, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le I de cet article, insérer un I bis ainsi rédigé :
I bis. Après le sixième alinéa (4°) du même article, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :« 4 bis. Sauf si le prêteur exerce, dans les conditions fixées par l'article L. 312-9, son droit d'exiger l'adhésion à un contrat d'assurance collective qu'il a souscrit, mentionne que l'emprunteur peut souscrire auprès de l'assureur de son choix une assurance équivalente à celle proposée par le prêteur ; »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. C'est un amendement important pour l'information des emprunteurs. Souvent très attentifs au taux d'intérêt de leur emprunt, ils le sont parfois moins en ce qui concerne le taux de la prime d'assurance.
Cet amendement vise donc à améliorer l'information des demandeurs d'un prêt immobilier en matière d'assurance portant sur leur emprunt.
Il prévoit que, sauf si l'établissement de crédit exerce son droit d'imposer le recours à un contrat de groupe, l'offre de prêt devra obligatoirement comporter une mention rappelant à l'emprunteur qu'il peut souscrire une assurance auprès de l'assureur de son choix.
Cette meilleure information devrait favoriser la concurrence sur les polices d'assurance et, partant, la réduction de ce poste de dépenses, qui représente, à l'heure actuelle, une part non négligeable du coût des crédits immobiliers.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Le Gouvernement est très sensible à ce sujet de l'assurance emprunteur, qui a été mis en exergue par les associations de consommateurs.
Cet amendement, qui vise à améliorer l'information du consommateur, en lui donnant la possibilité de solliciter une offre d'assurance auprès d'un concurrent de l'établissement de crédit, va dans le bon sens, mais je ne suis pas sûr qu'il permette de résoudre complètement la question de l'assurance emprunteur.
Mme Nicole Bricq. En effet !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Afin d'avancer sur ce sujet, le Gouvernement engagera des concertations avec les établissements bancaires et les associations de consommateurs.
En attendant, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le II de cet article :
II. - Les obligations fixées par le 2 ter et le 4 bis de l'article L. 312-8 du code de la consommation entrent en vigueur le 1er octobre 2008.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 114, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le II de cet article, remplacer les mots :
neuf mois
par les mots :
un mois
La parole est à M. Bernard Dussaut.
M. Bernard Dussaut. L'article 10 bis permet de renforcer la transparence au bénéfice du consommateur pour la souscription d'un crédit immobilier à taux variable.
De tels crédits sont en plein développement. Or il ne fait aucun doute que les établissements bancaires sont actuellement en mesure de fournir à leurs clients un tel document sans qu'il soit nécessaire de prévoir un délai de mise en oeuvre de la mesure de neuf mois après la publication de la loi.
L'objet de l'amendement est donc de réduire ce délai à un mois, ce qui semble suffisant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 114 ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Nous ne sommes pas d'accord avec M. Dussaut, mais cela peut arriver ! (Sourires.)
Mme Nicole Bricq. Cela arrive même souvent !
M. Gérard Cornu, rapporteur. En effet, mais cela ne nous empêche pas de nous estimer mutuellement. (Nouveaux sourires.)
La commission émet un avis défavorable, car le délai de neuf mois prévu par l'article est techniquement nécessaire.
M. Bernard Dussaut. Ce n'est pas sûr !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements en discussion commune ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 41 rectifié.
Par voie de conséquence, il ne peut être favorable à l'amendement n° 114, qui ne devrait d'ailleurs plus avoir d'objet si le Sénat adoptait l'amendement n° 41 rectifié.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 114 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 98, présenté par Mme Bricq, MM. Marc, Dussaut, Teston, Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après l'article L. 312-14-1 du code de la consommation, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Le taux variable d'un contrat de prêt ne peut excéder, à tout moment de son exécution, un plafond correspondant au niveau mensuel moyen des taux des contrats de prêt à taux fixes conclus par l'établissement de crédit pour une durée de vingt ans au cours du mois considéré.
« Les perceptions excessives au regard de l'alinéa précédent sont imputées de plein droit sur les intérêts normaux alors échus et subsidiairement sur le capital de la créance.
« Les conditions dans lesquelles le niveau mensuel moyen permettant le plafonnement est calculé et porté à la connaissance des usagers sont précisées par décret ».
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Il s'agit des taux variables, sujet ô combien sensible.
Si le dispositif français actuel en matière de taux variables est certainement plus protecteur que le système nord-américain, il n'en reste pas moins que les emprunteurs ne sont pas assez sécurisés.
Les contrats de prêts à taux variables sont offerts à des emprunteurs souvent modestes, qui se laissent séduire par des échéances initiales peu élevées. Or, en cas d'évolution défavorable des taux, la situation de ces ménages peut rapidement devenir intenable.
Pour les protéger, il existe, dans le système français, des clauses de plafonnement du taux applicable, mais elles font référence aux taux courts - notamment, le taux Euro interbank offered rate ou Euribor - et, par conséquent, ne permettent pas une réelle protection des emprunteurs en cas d'inversion de la courbe des taux.
Nous proposons donc d'instaurer un autre type de plafond, qui sera calculé en référence aux taux longs applicables aux nouveaux emprunts offerts par l'établissement pour des emprunts immobiliers de long terme.
Il s'agit de prévoir un encadrement qui protège tant les emprunteurs que les prêteurs. À l'heure actuelle, personne n'a intérêt à multiplier les risques de défaut de paiement, comme l'illustre la crise dite des subprimes qui, partie des États-Unis, commence à faire lourdement sentir ses répercussions en Europe.
Il faut stabiliser le système bancaire et limiter au maximum les risques de pertes résultant des situations de surendettement des ménages les plus modestes.
D'ailleurs, vous en êtes parfaitement conscient, monsieur le secrétaire d'État, puisque vous avez indiqué à l'Assemblée nationale que vous étiez sensible à la nécessité de réfléchir au meilleur moyen de plafonner les taux variables. Vous avez même dit que la question « méritait d'être approfondie ».
Je vous propose donc, plutôt que de repousser une nouvelle fois ce débat important, d'émettre un avis favorable sur notre amendement, ce qui nous permettra de nous rejoindre dans l'intérêt des emprunteurs et des prêteurs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Le problème soulevé est en effet important, puisqu'il concerne les prêts à taux variables consentis à des consommateurs qui ne savent pas toujours comment fonctionne le système. Ils sont contents quand le taux variable baisse, mais ils le sont moins quand ce dernier monte !
Madame Bricq, vous proposez la généralisation des prêts dits « capés ».
La commission estime au contraire que les offres de prêts « capés » participent de la concurrence entre les établissements bancaires, c'est-à-dire entre ceux qui en proposent et ceux qui n'en proposent pas.
Ce système est donc favorable aux consommateurs, qui peuvent choisir d'assurer ainsi leurs prêts, en contrepartie d'un coût légèrement plus élevé.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Cet amendement vise à protéger les emprunteurs dans des cas qui sont tout de même assez rares. Avant cet été, c'est-à-dire à la suite de la crise survenue sur les marchés financiers, cela faisait dix ou quinze ans que les taux courts n'avaient pas été supérieurs aux taux longs.
Par ailleurs, toutes les personnes souscrivant des prêts à taux variables ne sont pas forcément en situation financière fragile. Par exemple, celles qui investissent dans l'immobilier à titre de placement financier ou celles qui souhaitent s'agrandir et achètent un nouveau logement avant d'avoir vendu celui qu'elles occupent utilisent des prêts à taux variable depuis longtemps. Pourquoi faudrait-il restreindre systématiquement cette offre de crédit ?
C'est la raison pour laquelle, sur le principe, le Gouvernement n'est pas favorable à cette disposition.
Cela étant, comme M. le rapporteur l'a excellemment expliqué, c'est évidemment prendre un risque que d'opter pour les taux variables. Le consommateur doit être bien informé et conscient des conséquences de ses choix. À cet égard, l'adoption par l'Assemblée nationale de l'amendement de M. Lefebvre apporte une réelle amélioration.
Enfin, je le rappelle, le Président de la République a exigé des banques qu'elles s'engagent dans un traitement au cas par cas des situations de difficultés de paiement consécutives à la suite de la crise survenue cet été. Les établissements bancaires s'y emploient.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le secrétaire d'État, si vous aviez pratiqué comme moi l'octroi de crédits immobiliers, vous sauriez faire la différence entre les clients. Je pense aux jeunes couples, qui veulent obtenir un prêt à taux variable, parce qu'ils espèrent voir leur condition matérielle s'améliorer, dans la perspective d'une promotion professionnelle ou d'une augmentation de salaire, par exemple. En général, ce sont des ménages modestes, et je sais de quoi je parle !
Par ailleurs, je veux reprendre vos propos concernant la crise des subprimes et ses répercussions dans l'économie réelle et, en premier lieu, dans le secteur bancaire.
En effet, je ne pense pas que l'on puisse en parler au passé. Jusqu'à présent, lors de chacune de ses interventions sur ce sujet au Sénat, Mme Lagarde s'est toujours montrée très optimiste quant à ses conséquences. Il semble en aller différemment aujourd'hui, j'en veux pour preuve la réunion, avant-hier, des responsables des banques centrales. Or la situation est telle d'ores et déjà que nous ne sommes pas à l'abri de ce que l'on appelle un credit crunch, ce que je ne souhaite en aucune façon, parce que c'est très grave !