M. Alain Gournac. Et aussi de surveillance !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
Il ne s’agit pas d’un pur problème technique, mais d’un problème de régulation financière et économique.
M. Alain Gournac. Oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Au demeurant, l’Europe est leader dans le monde. C’est donc à elle d’élaborer un nouveau droit de la régulation de cette forme d’échanges. Si nous voulons entraîner les États-Unis, nous devons nous montrer exemplaires.
Aujourd’hui, ce marché fonctionne probablement correctement, mais chacun sait que la dynamique des marchés peut échapper aux États. Nous en avons des exemples récents et criants sous les yeux.
La mission mixte paritaire Migaud-Arthuis, comme je l’appelle, qui travaille sur la crise, a relevé l’écart qui existe entre l’innovation financière et la capacité de régulation. Nous ne voudrions pas qu’avec le marché des quotas d’émission de CO2 se posent des problèmes de même ordre que sur d’autres segments des marchés financiers.
L’objectif de mon questionnement est d’abord que le Gouvernement prenne conscience du sujet.
M. Alain Gournac. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s’avère que nous le traitons à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances rectificative, mais il ne s’agit pas de l’y cantonner. Il y a en effet des choses que l’on a le devoir de dire.
Selon l’institut de recherche spécialisé Point Carbon, les échanges mondiaux de quotas de CO2 pèseront en 2020 de l’ordre de 565 milliards de dollars en volume annuel. Je pense d’ailleurs que cette estimation est assez prudente au regard de ce que l’on voit se développer aujourd’hui.
Notre amendement de suppression vise donc à souligner que nous sommes dans l’impossibilité totale aujourd’hui d’expertiser les conséquences économiques, pour les producteurs d’électricité et leurs clients, de la réallocation des quotas qui nous est proposée et que celle-ci se fera à leur détriment, malgré le reprofilage prudemment voté par nos collègues de l’Assemblée nationale.
Bref, au-delà de ce qu’il faut sans doute faire dans l’immédiat, des questions fondamentales se posent. Or, à ce stade, elles ne sont pas correctement traitées.
Telles sont les motivations de l’amendement de suppression que je présente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Santini, secrétaire d'État. L’article 6 s’inscrit totalement dans le cadre du paquet « énergie-climat », qui a fait l’objet d’un compromis, qualifié d’ « historique », lors du Conseil européen du 12 décembre dernier.
Ses deux volets principaux sont la vente aux enchères des quotas d’émission de CO2 aux producteurs d’électricité et leur allocation complètement gratuite pour les industries.
Je constate, monsieur le rapporteur général, que vous ne remettez pas en cause ces principes. Vous exprimez néanmoins certaines inquiétudes et vous vous interrogez sur la régulation du marché des quotas d’émission de CO2.
Cette régulation se construit progressivement, en même temps que le marché.
Ainsi, les opérateurs industriels ou financiers sont tous identifiés sur le registre tenu par la Caisse des dépôts et consignations. Les allocations dont bénéficient les entreprises sont publiques ; les volumes d’émission de CO2 de ces entreprises sont également certifiés et rendus publics.
Les échanges de quotas sur le marché sont appelés à s’intensifier à partir de 2013 grâce à la mise en œuvre du paquet « énergie-climat ». C’est pourquoi la France a obtenu l’introduction d’outils de régulation complémentaires. En particulier, la Commission européenne devra convoquer une rencontre à haut niveau si le prix du quota augmente trop rapidement.
Enfin, compte tenu des sommes en jeu et de l’importance de cette politique de gestion des quotas, il me semble indispensable, pour la clarté des comptes publics, qu’il existe un compte de commerce spécifique bien identifié.
En ce qui concerne la régulation des produits dérivés fondés sur les permis d’émission, le Gouvernement envisage, monsieur le rapporteur général, d’aborder le sujet dans le cadre de la révision de la directive sur les opérations d’initiés et les manipulations de marchés, dite « Abus de marchés », de la directive « Marchés d’instruments financiers », ou MIF, et de son règlement d’application. Les dérivés sur quotas d’émission sont couverts par ces instruments, mais ces dispositions devraient faire l’objet d’un examen plus approfondi en 2009.
La réforme porte notamment sur les deux sujets suivants : d’abord la définition des contrats dérivés sur produits de base et celle des dérivés dits « exotiques », c'est-à-dire les dérivés sur permis d’émission ; ensuite l’opportunité d’adopter pour les marchés sous-jacents de ces dérivés des dispositions analogues à celles de la directive « Abus de marchés », qui ne couvre que les instruments financiers. Le Gouvernement envisage ainsi de demander à la Commission de présenter un rapport spécifique sur ce second point.
Je comprends donc, monsieur le rapporteur général, vos préoccupations et celles de la commission des finances. J’espère y avoir répondu. C’est pourquoi je souhaiterais que vous retiriez votre amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. L’article 6 est important, car il prévoit la création d’un compte de commerce dédié à la gestion des « actifs carbone » de l’État et il révise les allocations du plan national d’affectation de quotas, pour la période allant de 2008 à 2012, en faveur des nouveaux entrants.
M. le rapporteur général a fait état de ses interrogations, que nous partageons, sur l’émergence de ce nouveau marché qu’il faudra, comme les autres, réguler. À cet égard, l’inventivité en matière financière ayant été ce que l’on sait ces dernières années, il a raison de se méfier !
Je soulèverai à mon tour quelques interrogations, d’un autre ordre. Il convient en effet de dissiper toutes les incertitudes au moment où un accord est intervenu, sous présidence française, au sein de l’Union européenne. Je reconnais une certaine valeur à cet accord, qui ne mérite toutefois certainement pas le qualificatif d’« historique », car il a été obtenu au prix de concessions importantes.
Du reste, le compromis de Bruxelles fait dix-huit pages, et, comme nous savons que le diable est dans les détails, c’est en réalité au moment du débat sur la transcription des premières mesures consécutives au Grenelle de l’environnement qu’il sera possible de porter une appréciation plus juste, sans doute plus mesurée que celle qui a été avancée ce matin par nos collègues de l’UMP et, encore à l’instant, par M. le secrétaire d’État, s’agissant en particulier des critères d’accès aux quotas gratuits.
Cela étant, nous approuvons la création d’un compte de commerce spécifique, qui devrait permettre une meilleure lisibilité des opérations d’achat et de vente d’actifs carbone par l’État. Cependant, nous nous interrogeons sur les mouvements financiers pouvant intervenir entre le budget général et ce compte de commerce.
En effet, il est prévu que le budget général puisse venir abonder ce fonds, probablement en vue d’alimenter en quotas d’émission de gaz à effet de serre la réserve destinée aux nouveaux entrants.
Quel montant ces dépenses de l’État pourront-elles atteindre ? Nous ne le savons pas. Le rapporteur général de l’Assemblée nationale, Gilles Carrez, a indiqué que le montant de découvert autorisé que le Gouvernement souhaite inscrire au titre de l’année 2009 serait de l’ordre de 120 millions d’euros.
Si nous avons bien compris, le compte de commerce retracera également les opérations de vente de ces quotas aux entreprises de production d’électricité. À quoi les fonds de ce compte de commerce serviront-ils alors ? Si un solde existe après l’achat des quotas, cet argent pourra-t-il retourner au budget de l’État ? Servira-t-il alors à financer des dépenses du budget général, ou sera-t-il affecté à des politiques environnementales ? Il ne faudrait pas que l’État cherche sans oser l’avouer, à travers ce compte de commerce, une nouvelle recette fiscale.
En ce qui concerne la révision au profit des nouveaux entrants des allocations du plan national d’affectation de quotas, qui prévoit, après examen du texte à l’Assemblée nationale, une réduction progressive jusqu’à 60 %, en 2012, des quotas alloués aux industries du secteur de la production d’énergie, quel sera le contrôle exercé par l’État sur l’utilisation de ces quotas ?
Je voudrais à cet égard vous donner un exemple qui me semble particulièrement adapté à la période dans laquelle nous sommes.
Un nouvel entrant, bénéficiant de quotas gratuits, pourra-t-il en revendre une partie, et par conséquent augmenter son profit, au détriment d’autres entreprises ?
Ainsi, le groupe Arcelor-Mittal, qui vient de réduire l’activité d’une grande partie de ses usines avec la mise au chômage technique de ses salariés, revend aujourd’hui ses quotas de CO2 excédentaires, ce qui lui rapporte entre 30 millions et 40 millions d’euros, somme qui lui permettra d’amortir le coût du chômage partiel frappant les personnels… Vous voyez que la question a bel et bien une portée pratique !
Le Gouvernement nous dit vouloir lutter contre les délocalisations, mais il ne faudrait pas, à l’inverse, qu’il crée un effet d’aubaine pour les nouveaux entrants.
C’est la raison pour laquelle nous nous interrogeons principalement sur le contrôle qui sera exercé par l’État sur ce marché, rejoignant en cela les préoccupations exprimées par M. le rapporteur général.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur général, l’amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, madame la présidente, je le retire… pour le moment !
Mme la présidente. L’amendement n° 3 est retiré.
Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
I. - L'article 53 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008 est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi rédigé :
« I. - En application des articles L. 131-7 et L. 139-2 du code de la sécurité sociale, la compensation intégrale par l'État des mesures définies aux articles L. 241-17 et L. 241-18 du même code ainsi qu'au III de l'article 1er de la loi n° 2008-111 du 8 février 2008 pour le pouvoir d'achat est effectuée, dans des conditions qui en assurent la neutralité financière et comptable pour les caisses et les régimes mentionnés au III du présent article, par une affectation d'impôts et de taxes. » ;
2° En 2008, le II est ainsi rédigé :
« II. - Les impôts et taxes mentionnés au I sont :
« 1° Une fraction égale à 87,13 % de la contribution mentionnée à l'article 235 ter ZC du code général des impôts ;
« 2° Le produit de la taxe sur la valeur ajoutée brute collectée par les producteurs de boissons alcoolisées. » ;
3° Le premier alinéa du III est complété par les mots : «, ainsi qu'à la Caisse nationale des industries électriques et gazières, au port autonome de Strasbourg et à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales » ;
4° Le IV est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour l'application de l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, la différence entre le montant définitif en droits constatés des pertes de recettes résultant des allègements de cotisations sociales mentionnés au I et le produit comptabilisé, au titre du même exercice, des impôts et taxes affectés en application du II, constitue, si elle est positive, un produit à recevoir des organismes de sécurité sociale concernés sur le produit de la contribution mentionnée à l'article 235 ter ZC du code général des impôts perçu par ces organismes au cours de l'exercice ou de l'exercice suivant.
« Si cette différence est négative, elle constitue une charge à payer des organismes de sécurité sociale concernés à l'égard de l'État. »
II. - L'article L. 139-2 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les mesures qui font l'objet d'une compensation intégrale par l'État mentionnée à l'article L. 131-7, la différence entre le montant définitif de la perte de recettes qui en résulte pour les organismes de base de sécurité sociale, du 1er janvier au 31 décembre de l'exercice considéré, et le montant des versements de l'État au titre de cette compensation, sur la même période, est retracée dans l'état semestriel des sommes restant dues par l'État transmis par le Gouvernement au Parlement avant la fin du mois de janvier de l'exercice suivant, mentionné à l'article L.O. 111-10-1.
« Pour l'application de l'alinéa précédent, les versements ou reversements effectués par l'État ou les organismes concernés en application d'une loi de finances rectificative ou d'une loi de financement de la sécurité sociale sont réputés intervenir à la date de publication de ladite loi. »
III. – En 2008, le produit de la taxe sur les véhicules de société mentionnée à l'article 1010 du code général des impôts est affecté à hauteur d'un montant maximum de 753 423 455,26 €, au titre du financement des sommes restant dues par l'État aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale retracées dans l'état semestriel au 31 décembre 2007 prévu à l'article L.O. 111-10-1 du code de la sécurité sociale et estimé au 30 juin 2008, selon la répartition suivante :
1° 395 826 320,81 €, au régime social des indépendants ;
2° 4 087 798,76 €, à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales ;
3° 5 920 241,49 €, à la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines ;
4° 37 129 567,90 €, à la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires ;
5° 21 018 446,12 €, à l'Établissement national des invalides de la marine ;
6° 1 076 067,55 €, à la Caisse nationale des industries électriques et gazières ;
7° 1 950 249,42 €, au régime de sécurité sociale d'entreprise de la Régie autonome des transports parisiens ;
8° 47 793 082,08 €, au régime de sécurité sociale d'entreprise de la Société nationale des chemins de fer français ;
9° 238 559 841,55 €, à la Caisse de retraite et de prévoyance du personnel de la Société nationale des chemins de fer français ;
10° 47 538,46 €, à la Caisse de prévoyance du personnel titulaire du port autonome de Bordeaux ;
11° 14 301,12 €, à la Caisse nationale des barreaux français.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. Cet article 7 donne de fait, et de manière rétroactive, raison à notre groupe. En effet, il constitue la preuve de l’incapacité où se trouve le Gouvernement, par dogmatisme et manque de volontarisme, de répondre durablement à l’une des plus importantes préoccupations de nos concitoyens, à savoir le pouvoir d’achat.
Souvenez-vous, mes chers collègues, des débats que nous avons eus lors de l’élaboration de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA. Il s’agissait là, selon vous, de la traduction dans les faits de la promesse présidentielle selon laquelle il deviendrait possible de « travailler plus pour gagner plus ».
Vous entendiez, disiez-vous, permettre ainsi aux salariés de notre pays de gagner plus si telle était leur volonté, comme si, pour gagner plus, les salariés n’avaient d’autre solution que de travailler plus ; comme si l’idée de réorienter la distribution de l’argent, afin de la rendre plus utile et plus juste, était irrémédiablement devenue obsolète.
Vous aviez d’ailleurs fait de l’adoption de l’article 1er – ô combien symbolique – de cette loi la justification de l’ensemble du texte, en présentant le dispositif en question comme étant au service des salariés, alors que, dans les faits, la quasi-totalité des mesures visaient les plus riches de nos concitoyens : je pense notamment aux moyens de contourner l’ISF et aux exonérations de frais de succession et de droits sur les donations.
À l’époque, nous dénoncions quant à nous un dispositif taillé sur mesure pour les redevables relevant des tranches d’imposition les plus élevées, qui ne répondrait pas aux difficultés rencontrées par les salariés de notre pays en matière de pouvoir d’achat et qui, en raison des multiples exonérations de cotisations sociales prévues, pèserait sur les comptes sociaux, ainsi que sur l’emploi.
Le présent article démontre le bien-fondé de l’analyse que nous avions faite alors. En effet, il ne s’agit en réalité de rien d’autre que de constater l’inutilisation partielle du dispositif d’exonération des heures supplémentaires et de réaffecter aux comptes sociaux les sommes excédentaires. Or, si la somme de 1 milliard d’euros n’a pas été consommée, c’est que les employeurs n’ont pas eu recours dans la mesure que vous escomptiez aux heures supplémentaires.
Par voie de conséquence, les salariés n’en ont pas bénéficié. Ils n’ont pas vu croître, contrairement à votre promesse, leur pouvoir d’achat. Je dirais même que, pour nombre de salariés qui faisaient déjà des heures supplémentaires, celles-ci ont simplement été enfin déclarées, ce qui ne favorise guère le pouvoir d’achat !
Cela est tellement vrai que, malgré les trois textes qui ont suivi l’adoption de la loi TEPA, tous censés permettre de redynamiser le pouvoir d’achat, les Français continuent de voir celui-ci baisser en raison de la hausse des prix. Ils doivent effectuer des choix, retarder certains achats ou, plus grave encore, reporter des soins médicaux.
La mesure la plus efficace, la plus égalitaire, serait l’augmentation des salaires, mais évidemment vous vous y refusez !
En ce qui concerne la réaffectation aux comptes sociaux du milliard d’euros en question, si nous sommes d’accord sur le principe, la manière dont la chose est présentée nous laisse circonspects.
Il s’agirait, selon vous, d’une mesure presque généreuse. Mais il ne faut pas s’y tromper : ce milliard n’est rien par rapport aux 42 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales que vous avez offerts aux patrons à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 et aux exonérations supplémentaires que vous vous apprêtez à accorder aux petites entreprises.
Vous appauvrissez les comptes sociaux pour rendre notre système de protection sociale moins efficace, et ce n’est malheureusement pas ce milliard d’euros qui permettra d’inverser cette logique.
Mme la présidente. L'amendement n° 60, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du II de cet article, avant les mots :
les mesures
insérer les mots :
les prestations versées pour le compte de l'État ou pour
et après les mots :
montant définitif de la
insérer les mots :
dépense ou de la
La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Le paragraphe II de l’article 7 clarifie les conditions de présentation de l'état semestriel des créances des organismes de sécurité sociale sur l'État. Je rappelle que ce document, qui a été institué par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, la LOLFSS, est très utile pour suivre l’évolution des relations financières entre l’État et la sécurité sociale.
Le présent amendement vise à compléter le contenu de ce document en prévoyant qu'y figureront dorénavant, outre les exonérations de cotisations sociales, les remboursements des prestations versées au titre de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, de l’allocation de parent isolé, ou API, et de l’aide médicale de l’État, l’AME, qui ne sont pas mentionnées dans la rédaction actuelle du texte.
Je ferai remarquer par ailleurs à notre collègue du groupe CRC-SPG que si une recette supplémentaire de 1 milliard d’euros a pu être dégagée, c’est plus en raison de la dynamique des recettes que parce que le dispositif de la loi TEPA n’a pas fonctionné.
Nous ne pouvons que nous réjouir que le Gouvernement use de cette somme pour honorer une partie des dettes que l’État a contractées envers la sécurité sociale, mais il n’y a pas lieu de voir dans cette situation le signe d’un échec de la loi TEPA. Je pense qu’une bonne partie de nos concitoyens adhère à ce dispositif et qu’il convient donc de continuer à le soutenir.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s’agit là d’une précision utile, la rédaction actuelle n’étant absolument pas claire. L’avis de la commission est donc favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article additionnel après l'article 7
Mme la présidente. L'amendement n° 117, présenté par M. Vera, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 1er de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat est abrogé.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er de la loi TEPA.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est incroyable ! Ils veulent absolument supprimer cette malheureuse loi ! (Sourires.)
M. Bernard Vera. Avec cet article, au-delà de la régularisation d’heures supplémentaires effectuées par les salariés mais non déclarées, on a permis aux employeurs de bénéficier de plus de souplesse dans la gestion des ressources humaines.
Votre préoccupation principale n’était pas de renforcer le pouvoir d’achat des salariés ; c’était plutôt de permettre aux employeurs de disposer d’un outil de plus pour faire varier la durée légale du temps travail et mettre ainsi un terme à l’application des 35 heures.
Ainsi, le Gouvernement avait affirmé, durant les débats sur le projet de loi TEPA, qu’accomplir des heures supplémentaires relèverait du volontariat, argument que l’on invoque maintenant pour le travail dominical.
C’est ignorer la situation de subordination dans laquelle se trouvent les salariés par rapport à l’employeur ! Souvent, ils subissent des conditions de travail contraires à leurs intérêts, précisément parce qu’ils ne sont pas en mesure de s’opposer à leurs employeurs, particulièrement dans un contexte d’explosion du chômage et de la précarité.
Affirmer que les salariés pourront demander de faire des heures supplémentaires est donc tout à fait inexact. Vous devriez plutôt dire que les employeurs pourront imposer des heures supplémentaires à leurs salariés. Mais encore faudrait-il que les carnets de commandes les rendent nécessaires !
Mme Lagarde affirmait que ce projet de loi était destiné à « encourager et à valoriser tout au long de leur vie […] les femmes et les hommes de France les plus courageux, les plus entreprenants », mais, curieusement, vous refusez systématiquement les propositions que nous faisons pour limiter le recours au temps partiel imposé. Quand des hommes et des femmes, principalement dans le secteur des services à la personne et la grande distribution, demandent à travailler plus afin de passer d’un temps partiel à un temps plein, l’État est impuissant.
Toutefois, cette impuissance dissimule en réalité un véritable projet politique : le morcellement du temps de travail et la substitution de la pleine activité au plein emploi. Vous avez, avec le revenu de solidarité active, généralisé la précarité et institué le travail à temps partiel.
Voilà le véritable sens de la loi TEPA et de son article 1er. Ce dispositif pèse sur l’emploi, et vous faites de la précarité, avec ses conséquences sur la rémunération du salarié, un mode normal de gestion d’entreprise. C’est l’aveu du renoncement du politique devant l’économique.
Quant à la formule « travailler plus pour gagner plus », elle ne correspond pas aux besoins que connaissent les salariés de notre pays. La réalité, c’est que beaucoup de Français ne parviennent plus à vivre du fruit de leur travail. À ceux-là, vous dites de travailler plus, comme s’ils étaient les seuls responsables de leur paupérisation.
Les actionnaires qui imposent la compression des salaires pour multiplier leurs bénéfices ne sont soumis, quant à eux, à aucune contribution ; ils ne fournissent aucun effort supplémentaire.
Nous sommes opposés à cette logique, c’est pourquoi nous proposons la suppression de l’article 1er de la loi TEPA.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, dans sa majorité, est convaincue des grandes vertus de la loi TEPA ; elle est par conséquent opposée à cet amendement de suppression.
MM. Denis Badré et François Trucy. Très bien !
Mme Nicole Bricq. On verra dans quelques mois !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Santini, secrétaire d'État. M. Vera propose de supprimer l’article 1er de la loi TEPA, c’est-à-dire le dispositif d’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires et complémentaires de travail.
Mme Nicole Bricq. Il a raison !
M. André Santini, secrétaire d'État. Bien évidemment, nous n’y sommes pas favorables. Je l’ai déjà indiqué ce matin à Mme Michèle André et à Mme Marie-France Beaufils.
Cette mesure emblématique, monsieur le sénateur, notamment en ce qu’elle traduit les engagements pris à l’égard du pays par le Président de la République, a permis de redonner toute sa place au travail comme valeur et outil d’amélioration du pouvoir d’achat. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bricq. Les plans sociaux se multiplient !
M. André Santini, secrétaire d'État. Ainsi, le recours aux heures supplémentaires n’a cessé de progresser. Depuis la mise en œuvre du dispositif, en octobre 2007, environ 6 millions de personnes, ce qui correspond à 4 millions de foyers, ont déclaré des heures supplémentaires exonérées, pour un montant total de 1,54 milliard d’euros, soit près de 400 euros par foyer.
Mme Marie-France Beaufils. Combien de personnes faisaient déjà des heures supplémentaires ?
M. André Santini, secrétaire d'État. En cette période de difficultés économiques, il ne peut être envisagé de supprimer un dispositif qui soutient l’activité économique et augmente le pouvoir d’achat des salariés.
Vous comprendrez donc, monsieur le sénateur, que je vous invite à retirer votre amendement.