M. Michel Mercier. Ce n’est pas pareil !
M. David Assouline. Trois cinquièmes de votes positifs, ce n’est pas la même chose que trois cinquièmes de votes négatifs ! Pourquoi, ne serait-ce que par souci juridique de respecter le parallélisme des formes, n’avez-vous pas proposé le respect des mêmes conditions pour la nomination et pour la révocation ?
M. Michel Mercier. Il n’y a pas de parallélisme !
M. David Assouline. Nous n’avons donc pas de leçon à recevoir ! Nous soutenons l’amendement de la commission, mais, ce faisant, nous nous situons dans une logique, alors que vous, finalement, en soutenant cet amendement, vous faites apparaître que vous n’avez pas fait preuve de la même vigilance lors du débat sur les conditions de nomination, pendant lequel tout vous a semblé très clair, très simple et sans problème : « Il est bien que le Président de la République fasse ce qu’il veut ; le président de France Télévisions est un vrai chef nommé par un vrai Président,… Bref, circulez, il n’y a rien à voir ! Le reste, c’est l’écran noir et blanc de nos enfances ! », nous avez-vous dit en quelque sorte.
Par souci de responsabilité, nous voterons donc – et cela n’enlève rien à ce que nous avons dit jusqu’à présent de la nomination et de la révocation – l’amendement de la commission, en formant le vœu qu’il survivra à la commission mixte paritaire – où j’espère que, sur cette question comme sur d’autres, les sénateurs ne se laisseront pas marcher sur les pieds – ainsi qu’à l’examen par le Conseil constitutionnel !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Je serai bref, madame la présidente, mais certains de nos collègues nous ont beaucoup reproché hier de ne pas intervenir…
Monsieur Assouline, vous ne manquez pas de distribuer des leçons même à ceux qui ne vous en demandent pas ; cela fait partie, et je l’accepte, de votre façon de vous exprimer. Pour ma part, je ne veux donner de leçon à personne, et ce que je voudrais dire maintenant s’adresse plutôt au Conseil constitutionnel, qui sera nécessairement saisi de ce texte et à qui il faut bien que nous donnions des arguments.
Madame la ministre, je comprends votre point de vue, mais il me semble que vous vous placez dans l’état antérieur du droit, c'est-à-dire avant la réforme constitutionnelle.
Si je suis comme vous d’avis que le principe du parallélisme des formes ne s’applique pas, c’est précisément parce que la question de la nomination est traitée par la Constitution.
Mais si la Constitution prévoit la nomination du président à l'article 13, en revanche elle n’évoque pas le retrait de mandat.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Tout à fait !
M. Michel Mercier. Le concept de parallélisme des formes est donc contraire à la Constitution. Le constituant a élaboré les règles de nomination, c’est tout ! Il n’a jamais précisé les modalités d’un retrait de mandat.
Il s’agit donc pour nous de fonder la compétence du Parlement, s’agissant du retrait. On peut considérer qu’il s’agit d’une compétence générale tirée de l’ancien article 34 de la Constitution. Le retrait du mandat justifie pour le moins l’avis des commissions parlementaires compétentes. Je rappelle que, depuis la révision constitutionnelle, cet avis peut prendre la forme d’une autorisation ou d’un refus. Sans doute est-ce d’ailleurs ce point qui pose problème.
Le premier alinéa de l'article 34, tel qu’il est désormais rédigé, prévoit que « la loi fixe les règles concernant […] le pluralisme et l’indépendance des médias ».
M. David Assouline. Grâce à vous ?
M. Michel Mercier. Certainement pas grâce à M. Assouline !
J’ai pris ma part à cette révision constitutionnelle et je l’assume. Je me félicite d’avoir contribué, comme d’autres, à cette entreprise, à condition que le Parlement utilise les droits que la révision constitutionnelle lui accorde. Pour ce qui me concerne, j’ai bien l’intention de le faire !
De deux choses l’une : ou bien la précision inscrite à l'article 34 a du sens, ou bien elle n’en a pas.
M. Jean-Jacques Mirassou. Et si le Parlement n’est pas consulté ?
M. Michel Mercier. Mon cher collègue, je ne vous interromps jamais, et il vous faut apprendre à avoir un minimum de civilité ! (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP. – M. Jean Desessard s’exclame.)
M. Ivan Renar. Ce n’était qu’une ponctuation !
M. Michel Mercier. Cette disposition fait partie des droits nouveaux du Parlement. Nous avons révisé la Constitution à cette fin : il faut montrer que ces droits existent et nous en servir.
Je soutiens donc – je le redis à l’attention du Conseil constitutionnel – que l’amendement n° 20 n’est pas contraire à la Constitution et que nous pouvons le voter. Son adoption constituera un grand progrès pour l’audiovisuel public. C’est en effet dans une distinction franche entre les procédures de nomination et de retrait de mandat des présidents des sociétés France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France que résident la liberté et l’autonomie de ces derniers. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Par une dialectique subtile, Mme la ministre cherche à nous convaincre que le retrait de mandat n’est pas la révocation. Je comprends tout à fait cette argutie, mais elle n’emporte pas l’opinion, car, dans les faits, tout le monde sait bien que c’est la même chose.
Chacun invoque le Conseil constitutionnel. Pour notre part, nous souhaitons qu’il annule l'article relatif à la nomination des présidents. Nous pensons qu’il le fera.
En effet, de notre point de vue, au regard des nouvelles dispositions prévues à l'article 34 qu’a à juste titre invoquées Michel Mercier et dont David Assouline a défendu l’introduction – il faut lui rendre cette justice, mes chers collègues –, comment soutenir qu’il est constitutionnel que le Président de la République désigne par décret les présidents des sociétés France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France...
M. Serge Lagauche. Oui !
M. Jean-Pierre Sueur. ...puisque c’est désormais contraire à « l’indépendance des médias », garantie dorénavant par la Constitution ?
Comment prétendre que les présidents de ces sociétés sont indépendants à l’égard des pouvoirs politiques, quels qu’ils soient, et accepter qu’ils soient nommés par décret du Président de la République, qui est un personnage politique éminent ?
Cette situation pose un problème constitutionnel. J’ai d’ailleurs rappelé au cours de ce débat toutes les jurisprudences du Conseil constitutionnel qui démontrent que ce nouveau dispositif constitue un retrait par rapport à l’état du droit précédent ou encore en vigueur.
Monsieur Mercier, nous vous donnons acte des efforts intellectuels que vous avez fournis pour accréditer l’idée qu’aucun parallélisme des formes n’existait. Vous vous êtes donné beaucoup de mal ! Selon vous, comme la Constitution évoque la nomination mais ne mentionne pas la révocation ou le retrait de mandat, il n’est pas nécessaire d’invoquer ce parallélisme.
Toutefois, mon cher collègue, je vous renvoie à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui, dans plusieurs décisions, considère que les actes de nomination et de retrait de mandat sont liés, nonobstant le fait que la Constitution, dans son ancienne version, ne prévoie pas les modalités du retrait du mandat ou de la révocation.
Comme mes collègues, je voterai l'amendement n° 20, dans l’esprit indiqué par M. David Assouline. Là encore, une évidence s’impose. Dans la mesure où les arguments que vous avez avancés pour démontrer la nécessité d’une majorité positive en cas de retrait de mandat sont tout à fait pertinents, personne ne comprend que la même argumentation ne vaille pas lorsqu’il est question de la procédure de nomination.
Mes chers collègues, si vous aviez voté – et nous regrettons qu’il n’en ait pas été ainsi – une procédure de nomination aux termes de laquelle le Président de la République désigne les présidents de l’audiovisuel public par décret, à condition que les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat émettent un avis favorable en se prononçant à la majorité des trois cinquièmes, nous n’aurions plus eu beaucoup d’arguments à vous opposer. En effet, cette nomination aurait été le fruit d’un consensus entre la majorité et l’opposition et n’aurait par conséquent plus constitué un enjeu politique. Au contraire, dans le sens le plus noble de la politique, un accord aurait été trouvé sur une personnalité suscitant l’assentiment à la fois de la majorité et de l’opposition, ou d’une partie d’entre elles. On aurait ainsi franchi un nouveau pas vers ce que Pierre Mendès France appelait « la République moderne », c'est-à-dire une République qui fonctionne mieux.
Je salue les arguments que vous avez développés en faveur de la majorité qualifiée des trois cinquièmes nécessaire au retrait de mandat. Mais plus vous vous prononcez en ce sens, plus faible devient l’argumentation antérieure, aux termes de laquelle ce qui vaut pour le retrait de mandat ne peut valoir pour la nomination.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.
M. Serge Lagauche. Je partage tout à fait le point de vue de mon collègue, mais nous en sommes désormais au stade suivant, celui des droits nouveaux du Parlement. Aux dires de M. Mercier, c’est l’occasion ou jamais que ceux-là s’exercent. Je peux comprendre d’ailleurs que vous ayez eu quelque difficulté s’agissant de la procédure de nomination et que, sur ce sujet, vous ayez été pris à contre-pied !
Dire que le Parlement exerce ses nouveaux droits suppose que nous ne nous retrouvions pas en commission mixte paritaire dans une situation difficile parce qu’un certain nombre de députés de la majorité hésiteraient à suivre la position du Sénat ! En d’autres termes, monsieur Mercier, il faut un accord avec l’ensemble de la majorité pour avancer sur ce sujet. Sinon, si la disposition proposée par la Haute Assemblée est refusée en commission mixte paritaire par vos collègues de l'Assemblée nationale membres de la majorité, le Sénat risque de se voir une nouvelle fois infliger un camouflet !
À nos yeux, monsieur Mercier, vous et la majorité êtes engagés : il s’agit d’une prise de position politique essentielle sur les droits nouveaux du Parlement.
Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 340, 341, 342, 263 et 343 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l’article 9, modifié.
(L’article 9 est adopté.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante,
est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Roger Romani.)
PRÉSIDENCE DE M. Roger Romani
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 10.
Article 10
À l'article 47-6 de la même loi, les mots : «, ni aux conventions conclues entre la société France Télévisions et les sociétés France 2, France 3, France 5 et Réseau France outre-mer, ainsi que les sociétés visées au dernier alinéa du I de l'article 44 » sont supprimés.
M. le président. L'amendement n° 134, présenté par M. Ralite, Mme Gonthier-Maurin, MM. Renar, Voguet et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Nous réclamons la suppression de cet article car nous nous opposons avec force au fait que le projet de loi cherche à effacer toute référence aux différentes sociétés de programme que sont France 2, France 3, France 4, France 5 et le Réseau France Outre-mer. C’est la porte ouverte au démantèlement de France Télévisions.
Le fait que le texte ne mentionne jamais l’ensemble de ces chaînes, renvoyant à un cahier des charges unique qui ne constitue, en aucun cas, une garantie du maintien du périmètre actuel du service public, pourra aisément conduire, demain, à la disparition, à la privatisation d’une ou de plusieurs chaînes.
Nous refusons une fusion-absorption qui met en péril l’identité de chacune des chaînes. Le pluralisme comme la diversité sont ainsi menacés, à l’encontre même de la convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles.
Il est évident que l’obstination du Gouvernement à gommer de la loi le nom même de nos chaînes publiques est une stratégie pour avoir les mains plus libres pour les privatiser demain. Il organise ainsi méthodiquement la casse du service public audiovisuel, et ce d’autant plus facilement que les parlementaires n’auront plus de droit de regard sur le périmètre du service public, puisque son existence n’aura plus de valeur législative.
Une fois encore on écarte le Parlement, alors même que l’exécutif exercera une tutelle économique, éditoriale et politique sans contre-pouvoir comme l’exige tout régime démocratique.
Le pire est que vous pourrez vous appuyer sur l’asphyxie financière à laquelle vous condamnez sans état d’âme France Télévisions pour réduire son bouquet de chaînes. Ce dernier est pourtant l’un des plus performants, en termes d’audience et de coût, comparé aux bouquets, souvent plus étoffés, des autres télévisions publiques européennes.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous vous invitons à supprimer l’article 10. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. La commission considère que France Télévisions n’est en rien démantelée par ce projet de loi ; cette société est au contraire confirmée. Elle émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Le Gouvernement est également défavorable. La transformation de France Télévisions en une entreprise unique ayant été adoptée précédemment, l’article 10, de coordination, ne peut être supprimé.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. La position de fond que nous avons adoptée au cours de ce débat, consiste à être partisans de l’entreprise unique et du média global, sans démantèlement des services qui existent aujourd’hui.
Lors de la discussion relative à l’entreprise unique, par le dépôt d’un certain nombre d’amendements et par nos interventions, nous avons manifesté notre souhait de voir figurer les services en tant que tels et le périmètre actuel de France Télévisions.
Nous sommes contre le démantèlement et nous pensons, nous aussi, que les formulations actuellement retenues portent en germe un certain démantèlement. Mais, fidèles à notre position de fond précitée, nous ne participerons pas au vote de l’amendement n° 134 visant à supprimer un article de coordination.
Selon nous, ce n’est pas l’entreprise unique qui est le danger. Elle est au contraire une nécessité, comme nous avons pu le constater non seulement lors du débat, mais également lors de nos discussions avec les personnels de France Télévisions. La commission Copé a eu le même point de vue lorsqu’elle s’est prononcée sur la nécessité d’avoir, pour les dix ans à venir, un service public conquérant, capable de se renouveler, de se moderniser, de rationnaliser, d’entrer dans l’ère numérique, de recourir à internet. Nous sommes donc partisans de la réforme lorsqu’elle tend à aller de l’avant.
Comme nous l’avons déjà indiqué, la vision de l’entreprise unique du Gouvernement, soutenu par la majorité, comporte des risques de démantèlement. Nous sommes d’accord avec les membres du groupe CRC sur ce point. En revanche, nous ne pensons pas que la notion d’entreprise unique, en tant que telle, contienne de tels risques, qui résultent, en réalité, des termes retenus lors de la rédaction des textes. Nous aurions aimé que soient mentionnées France 2, France 3, France 5, etc. Mais nous pourrons rouvrir ce débat qui a déjà eu lieu.
M. le président. Je mets aux voix l'article 10.
(L'article 10 est adopté.)
CHAPITRE II
Des fréquences et de la diffusion
Article 11
Le II de l'article 26 de la même loi est ainsi modifié :
1° Aux premier et cinquième alinéas, après les mots : « à l'article 44 », sont insérés les mots : « ou à leurs filiales répondant à des obligations de service public » ;
2° La seconde phrase du premier alinéa est supprimée.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l'article.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet article n’a pas justifié le dépôt d’amendements puisqu’il a sa logique et son utilité. En particulier, il permet de garantir à RFI, ravalée au rang de filiale, un juste accès aux fréquences.
Cependant, il mérite que soit engagée une réflexion contextuelle. Il s’agit de l’attribution de la ressource radioélectrique, qui est un bien commun, même si elle est moins bien identifiée que l’eau de la planète ou l’air que nous respirons. Il est donc tout à fait normal que les sociétés publiques aient un droit d’usage de cette ressource, aux termes de la loi de 1986.
Il est aussi logique que les opérateurs privés doivent postuler dans le cadre de procédures d’appel à candidatures pour utiliser cette ressource. Le CSA veille sur les ressources pour diffusion ; l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, veille sur les ressources pour transmission.
L’article 11 apporte une précision : le droit d’usage des sociétés publiques s’étend désormais aux filiales. Pour RFI, c’est bien la moindre des choses.
Mais souvenez-vous de nos débats sur l’article 3 ! Il s’agissait, là aussi, de filiales, plus particulièrement de celles de toutes les sociétés de programme. Vous aviez alors rejeté un amendement qui tendait à ce que ces filiales respectent les règles de missions de service public. Le rapporteur avait soutenu qu’une filiale de diversification avait par nature des objectifs commerciaux et que la soumettre aux missions de service public la gênerait. Mme la ministre avait affirmé qu’il fallait distinguer entre sociétés et filiales ; seules les premières sont financées par des deniers publics en contrepartie de l’accomplissement de missions de service public.
En conséquence, il est utile d’insister, en cet instant, sur le strict caractère de filiales de service public, tel que mentionné dans le texte. L’unanimité doit donc se dégager sur ce point, sans qu’il y ait aucune tentative de fragilisation sinon, demain, le démantèlement en filiales privées, avec apport d’argent public pouvant utiliser la ressource radioélectrique nous menacerait.
Certes, tel n’est pas le cas aujourd’hui, mais le principe de précaution exige cette précision.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, sur l’article.
M. David Assouline. Je souhaite revenir sur un point qui n’a pas reçu de réponse hier et qui s’inscrit dans le droit-fil du sujet que nous évoquons en ce moment.
M. Longuet nous a expliqué que les ondes n’appartiennent à personne, même pas à l’État, ondes que nous considérons comme un bien public qui doit être régulé par la puissance publique. Il a tenu un propos qui ne m’a pas étonné car il est de tradition très libérale. Il a ainsi soutenu que, si à un moment donné la régulation était justifiée, y compris lors de la privatisation de TF1 et de l’établissement de son cahier des charges, tel n’était plus le cas à l’heure numérique où il n’y a plus pénurie mais, au contraire, abondance et possibilité sans fin d’accès. Cette conception n’est absolument pas logique et ne relève pas de notre tradition.
De surcroît, pourquoi distinguerait-on des biens publics, comme l’air ou l’eau, de la ressource radioélectrique ?
Hier, nous avons omis de relever l’affirmation selon laquelle, dorénavant, point ne serait besoin de régulation parce qu’un bien n’appartenant à personne appartiendrait au privé. Nous ne partageons pas ce point de vue, et nous reviendrons sur ce point au cours du débat. Cette idée est source de dérives et notamment de risque de démantèlement du service public, y compris par le biais des filiales.
M. le président. Je mets aux voix l'article 11.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
Le I de l'article 34-2 de la même loi est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, les mots : « les services spécifiquement destinés au public métropolitain édités par la société mentionnée au 4° du » sont remplacés par les mots : « le service de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre en mode numérique ayant pour objet de concourir à la connaissance de l'outre-mer spécifiquement destiné au public métropolitain édité par la société mentionnée au » ;
1° bis Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il propose une offre en mode numérique haute définition, il met également gratuitement à la disposition des abonnés à cette offre les services de ces sociétés diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique haute définition. » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « Réseau France outre-mer » sont remplacés par les mots : « mentionnée au I de l'article 44 ».
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par Mme Morin-Desailly et M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du 1° bis de cet article, remplacer les mots :
en mode numérique haute définition
par les mots :
comprenant des services de télévision distribués en haute définition
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de nature rédactionnelle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 135, présenté par M. Ralite, Mme Gonthier-Maurin, MM. Renar, Voguet et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer le 2° de cet article.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Avec cet amendement, nous nous inscrivons dans la logique qui sous-tendait notre amendement de suppression de l’article 1er de ce projet de loi.
En effet, le présent projet de loi tend à retirer de l’article 44 de la loi du 30 septembre 1986 toute référence aux entités mêmes que sont les chaînes France 2, France 3, France 4, France 5 et RFO, visées à l’article 34-2 de la loi de 1986.
La disparition de l’inscription dans la loi de l’entité « RFO » laisse craindre aux personnels, à terme, la disparition de leur chaîne.
En ce sens, l’omission, dans l’exposé des motifs du présent projet de loi, de la référence à RFO et à sa mission dans la future entreprise unique, tout comme celle à France Ô, n’a pas manqué d’accréditer et d’alimenter cette inquiétude.
Cette omission a été rattrapée a minima, puisque l’exposé des motifs ne contient que deux phrases lapidaires : « Réseau France Outre-mer (RFO) demeure le réseau des télévisions et radios d’outre-mer, France Ô est la chaîne de l’outre-mer et de la diversité en métropole. »
L’ambiguïté qui prévaut sur la nature de France Ô depuis sa création ne reste pas tranchée avec ce rajout car, dans le même temps, à l’article 12 du projet de loi, France Ô est définie par les termes suivants : « services de télévision diffusés en clair par voie hertzienne terrestre en mode numérique ayant pour objet de concourir à la connaissance de l’Outre-mer spécifiquement destinés au public métropolitain ». Qu’en est-il de la notion de diversité ?
En outre, cet article ne comporte pas un mot sur les deux autres services de télévision édités par RFO que sont Tempo et Télé pays.
À ces cafouillages est venu s’ajouter l’amendement du Gouvernement adopté à l’Assemblée nationale visant à supprimer la publicité sur RFO, ce qui n’était pas prévu dans le texte initial.
Que va donc devenir RFO ? Je vous le demande, madame la ministre. Que prévoit le contrat d’objectifs et de moyens ?
À RFO comme à France 3, il existe actuellement des cellules de production, des personnels dédiés et des moyens afférant à cette activité, autant de forces créatrices en mesure de garantir la diversité des productions au sein de France Télévisions qui a été inscrite dans la loi.
Que valent les principes si, en même temps, on coupe les moyens pour y parvenir, d’autant que, madame la ministre, vous avez refusé d’inscrire dans la loi à l’article 1er l’obligation de production et de fabrication pour France Télévisions ?
Ce projet de loi n’apporte donc aucune garantie quant à la pérennité de ces activités qui donnent la possibilité aux publics ultramarins et métropolitains de se retrouver dans des productions qui ont du sens pour eux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Je ferai la même réponse qu’à la question qui a été posée au sujet de France 3 : le maintien de programmes spécialement destinés à l’outre-mer n’est en rien compromis par le présent projet de loi, qui, d’ailleurs, les mentionne à l’article 13.
Je renvoie également les auteurs de cet amendement au point 5 de l’article 2 du cahier des charges, où sont décrites très explicitement les missions de RFO.
Je tiens à ajouter que la commission Copé a beaucoup travaillé sur l’identité des chaînes et leur renforcement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Il est également défavorable, pour les raisons que vient d’exposer Mme le rapporteur : le présent projet de loi ne menace en rien RFO.
M. le président. L'amendement n° 344, présenté par MM. Assouline, Bel et Bérit-Débat, Mmes Blandin, Blondin et Bourzai, MM. Boutant, Domeizel et Fichet, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, M. Sueur, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le second alinéa du II du même article est ainsi rédigé :
« Les coûts de diffusion et de transport depuis le site d'édition et la numérisation éventuelle sont à la charge du distributeur. »
La parole est à M. David Assouline.