M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 136 et 345.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que l’examen de l’article 13 bis, relatif à l’outre-mer, a été réservé jusqu’à la séance du jeudi 15 janvier, à quinze heures.
Article 14
L'article 98-1 de la même loi est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, les mots : « édité par la société mentionnée au 4° du » sont remplacés par les mots : « ayant pour objet de concourir à la connaissance de l'outre-mer édité par la société mentionnée au » ;
1° bis À la dernière phrase du troisième alinéa, après le mot : « numérotation », sont insérés les mots : « et le même standard de diffusion », et les mots : « que celle utilisée » sont remplacés par les mots : « que ceux utilisés » ;
1° ter Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les éditeurs de services mentionnés au premier alinéa ne peuvent s'opposer à la reprise, par un distributeur de services par voie satellitaire ou un opérateur de réseau satellitaire et à ses frais, de leurs programmes diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique au sein d'une offre de programmes répondant aux conditions prévues au précédent alinéa. » ;
2° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« Une de ces offres permet d'assurer sur tout le territoire métropolitain la réception simultanée de l'ensemble des programmes régionaux, à l'exception de ceux spécifiquement destinés à l'outre-mer, de la société nationale de programme mentionnée au I de l'article 44, moyennant compensation de l'État, spécifiquement prévue dans le contrat d'objectifs et de moyens, à cette même société. »
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par Mme Morin-Desailly et M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du 1° ter de cet article, après les mots :
à la reprise, par
insérer les mots :
au moins
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. La commission considère que l'offre TNT Sat imposée par le Sénat en 2007, qui permet de couvrir les 5 % de la population non desservie en numérique terrestre, a largement fait ses preuves. L'ensemble de cette population, soit 1,5 million de foyers, devrait bénéficier de cette offre gratuite à la fin de l’année 2009. Il ne paraît donc pas nécessaire de lancer une deuxième offre satellitaire, qui créerait une concurrence inutile et vaine pour un même accès gratuit aux chaînes de la TNT sur le satellite.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.
M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Je voudrais simplement apporter un éclairage particulier.
Les députés ont voté une disposition grâce à laquelle les Français pourront bénéficier de deux offres satellitaires.
Aujourd’hui, à défaut de pouvoir recevoir la télévision numérique au moyen d’une solution hertzienne de terre, c'est-à-dire par des émetteurs, la seule solution consiste à recourir au satellite Canalsat, qui permet d’accéder gratuitement aux dix-huit chaînes de la TNT.
Historiquement, environ 1,5 million des foyers français situés en zone d’ombre, c'est-à-dire en zones non couvertes, ne recevaient pas les chaînes analogiques au moyen de leur antenne râteau. Par conséquent, pour recevoir gratuitement ces six chaînes, ces foyers devaient acquérir et installer une parabole en la pointant non pas sur la position orbitale du satellite Canalsat Astra, mais sur celle du satellite AB3, qui appartient à Eutelsat.
Si l’amendement de la commission des affaires culturelles est adopté, il subsistera toujours une offre satellitaire, conformément à la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur. Cependant, le million de demi de foyers dont la parabole est pointée sur la position orbitale du satellite AB3 devront dépenser 100 euros en moyenne pour en modifier l’orientation et la positionner vers le satellite Canalsat. Une partie des foyers – un peu plus d’un million – prendra à sa charge cette dépense, tandis que l’État se substituera financièrement à une autre partie de ces foyers, les plus démunis et les plus fragiles, au moyen du fonds d’aide créé par la loi de mars 2007.
Faire droit à la solution proposée par la commission des affaires culturelles, c'est-à-dire en revenir à une seule offre satellitaire, aurait pour conséquence non seulement d’encourager une solution de monopole, mais surtout de créer une dépense budgétaire pour l’État, celle que je viens d’évoquer.
La bonne solution était celle des députés, qui avaient considéré qu’il valait toujours mieux laisser le choix et la liberté plutôt que de contraindre les foyers à orienter leur parabole sur une seule position orbitale, surtout quand cette contrainte a un coût.
Peut-être ces précisions appelleront-elles quelques explications. Il appartient à présent au Sénat de trancher, à moins que nous ne préférions en laisser le soin à la commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. La commission souhaiterait que Mme la ministre apporte quelques précisions sur le coût, pour l’État, de cette mesure.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre. Je comprends bien les arguments développés par M. le rapporteur pour avis, mais je reste sur ma position.
J’ajoute par ailleurs qu’il serait dangereux que les chaînes de la TNT soient fournies par des offres satellitaires comme celle d’Arabsat. Ce n’est peut-être pas exactement ce que nous souhaitons.
M. Robert del Picchia. L’État paiera-t-il ?
Mme Christine Albanel, ministre. L’État paiera les sommes concernées grâce au fonds créé à cet effet.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.
M. Hervé Maurey. Je partage l’inquiétude de M. le rapporteur pour avis : deux offres valent toujours mieux qu’une. En l’espèce, une seule offre ne suffit pas à couvrir l’ensemble du territoire ; par conséquent, une partie de la population française se verra privée une fois de plus de l’accès aux nouvelles technologies, en l’occurrence la TNT.
Le repositionnement des paraboles aura un coût. M. le rapporteur pour avis a évoqué un montant de 100 euros, mais j’ai lu qu’il pourrait être de 150 euros. Au final, qui paiera ? L’État ? Les ménages ? Ou bien l’État va-t-il une fois de plus se défausser sur les collectivités locales ? Je ne comprends pas l’intérêt de revenir sur cette disposition votée par l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.
M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Il est important que l’État paie pour les ménages nécessiteux. Mais il ne faudrait pas constituer un monopole sur fonds publics. J’ai la faiblesse de penser que le texte adopté par les députés est de bons sens et équilibré.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Les mots « au moins » suggèrent qu’il peut y avoir une deuxième offre satellitaire. Au vu des explications de Mme la ministre, la commission maintient son amendement.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. M. Bruno Retailleau nous a renvoyés à la commission mixte paritaire en espérant que les députés rétabliront la rédaction de l’Assemblée nationale. Je préfère pour ma part que les sénateurs se fassent entendre et je ne veux pas attendre les députés pour instituer un dispositif logique et juste.
Monsieur Retailleau, comme c’est souvent le cas en l’absence d’enjeux idéologiques, sur des questions de bon sens ou de technique, votre argumentation est implacable.
En effet, en termes de stratégie, quel serait l’intérêt pour la France de se limiter à une seule offre satellitaire ? Il n’y en aurait aucun. Si le satellite tombe en rade, si je puis m’exprimer ainsi, nous serons confrontés à d’importantes difficultés. D’un point de vue stratégique, mieux vaut qu’il y en ait deux.
Nous allons discuter demain, dans des débats qui seront sans doute tumultueux, d’une question qui agite déjà tout le monde. Je veux, bien entendu, parler de l’éventuelle augmentation, de un ou deux euros, de la redevance sur l’audiovisuel, dans cette période de crise où les ménages sont déjà pressurés.
Pour l’heure, Mme la ministre nous dit : pas de problème ; pour le million et demi de foyers concernés, l’État payera. J’attire votre attention sur le fait qu’il va payer pour le monopole d’un satellite et non pour un service que rend l’État. J’aimerais bien connaître tous les dessous de cette décision. Il me paraît impossible que l’on nous ait tout dit, tant elle recèle d’incohérences, de considérations illogiques.
Permettez-moi de rappeler les enjeux : faut-il un ou deux satellites ? La mise en place du nouveau dispositif engendrera des frais pour le million et demi de foyers concernés, et ce chiffrage n’est pas remis en question. On peut se demander qui paiera car les foyers concernés ne sont pas parmi les plus favorisés. Et, en zones blanches, ils vivent déjà toutes les fractures, notamment la fracture numérique. Ils sont en général les derniers à avoir accès aux progrès de la numérisation.
On nous dit que l’État est prêt à payer les 100 euros nécessaires à la mise en place du nouveau dispositif pour les foyers en difficultés, les autres foyers devant payer eux-mêmes. Et il ne serait pas possible de demander deux euros de plus par an au titre de la redevance ! C’est absolument illogique. Je ne comprends pas pourquoi des sénateurs compétents plaident en faveur d’une telle démarche. Peut-être serons-nous éclairés à l’issue de la commission mixte paritaire ? Pour l’heure, il me paraît préférable de rejeter l’amendement de la commission. Une fois n’est pas coutume, l’Assemblée nationale me semble avoir raison.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Monsieur Assouline, le coût global du repointage est minime pour plusieurs raisons. Ainsi, un tiers des utilisateurs du satellite AB3 ont déjà migré vers TNTSat ; un tiers d’entre eux bénéficient d’une double réception, en provenance des satellites Astra ou HotBird. Ils n’auront donc pas à réorienter leur parabole.
Telles sont les précisions que je puis apporter à nos collègues qui maîtrisent la technique, domaine dans lequel excelle M. Bruno Retailleau.
M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.
M. Pierre Hérisson. Je souscris à l’argumentaire qui a été présenté par M. Retailleau. En qualité d’élu d’une zone de montagne, je ne peux qu’être particulièrement sensible à la problématique qu’il a développée. Je joindrai donc ma voix à la sienne.
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. On nous dit que 1,5 million de foyers seront concernés, pour un coût de 100 euros par foyer. La facture, qui s’élèverait donc à 150 millions d’euros, sera payée soit par l’État, soit par les familles.
Il s’agit de sommes considérables. Un précédent intervenant s’est interrogé sur l’éventualité de solliciter les collectivités territoriales pour acquitter une partie de cette facture.
M. David Assouline. C’est ce qui sera fait !
M. Éric Doligé. Nous sommes confrontés à une problématique similaire en matière de haut débit. Pour couvrir des zones blanches, nous sommes obligés de recourir à la diffusion satellitaire, qui représente à peu près une dépense de 300 à 350 euros par foyer, bien souvent payés par les collectivités.
Le nombre de foyers concernés n’est peut-être pas aussi important – quoique ! – mais il s’agit néanmoins d’un véritable enjeu économique.
Je souhaite donc avoir des chiffres plus précis. Aujourd’hui, nous discutons surtout des principes, les coûts n’étant qu’évoqués. Mais, si la facture est bien de 150 millions, il faut savoir qui va payer.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Monsieur Doligé, un tiers des utilisateurs du satellite AB3, soit 500 000 foyers, ne reçoivent aujourd’hui encore que les chaînes analogiques. Nombre d’entre eux devront de toute façon changer de parabole pour passer au numérique.
Le coût de l’opération de repointage est en tout état de cause inférieur à 100 euros et cette opération ne devra être effectuée qu’une seule fois.
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Mme le rapporteur indique que le coût du repointage d’une parabole devrait être inférieur à 100 euros. Mais, à un moment donné, le million et demi de personnes concernées ne recevront plus aucun programme. Or, il s’agit souvent de personnes isolées, qui vivent dans des lieux reculés. Il va donc falloir les prévenir que, si elles ne changent pas d’abonnement, à un moment donné, elles ne recevront plus rien.
Le coût d’une telle campagne d’information est considérable. Nous avons déjà évoqué cette question dans la commission du dividende numérique pour ce qui concerne le passage au tout numérique.
En Grande Bretagne, la campagne d’information a duré deux ans. Des personnes habilitées se sont rendues dans les familles résidant dans les quartiers où l’information passe le moins bien, dans les villages les plus reculés. Elles expliquaient aux gens ce qui allait se passer et leur disaient que, si elles voulaient continuer à recevoir la télévision, elles devaient s’équiper auprès de telle ou telle société. C’est un travail considérable.
Je demande donc à Mme Morin-Desailly et à Mme la ministre ce qui est prévu pour avertir ces foyers qu’ils vont devoir changer leurs équipements, pour leur expliquer dans quelles conditions cela se fera et qui payera ?
Nous pourrions nous épargner tout ce travail si nous nous en tenions à la rédaction de l’Assemblée nationale. Peut-être, madame la ministre, madame la rapporteur, avez-vous un éclairage particulier sur cette question ?
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Tout d’abord, je rappelle qu’un fonds d’aide est constitué à partir du GIP France Télé numérique et qu’il devrait être alimenté par une partie des recettes de la redevance.
Nous avons privilégié un objectif pédagogique simple. Avec le dispositif que nous proposons, lors du changement, le repointage se fera toujours dans la même direction, ce qui rendra les opérations plus aisées.
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.
M. Serge Lagauche. Sur les questions culturelles, les deux commissions ont souvent été en accord.
La présente discussion porte sur des données purement techniques. Je considère que nous, membres de la commission des affaires culturelles, devrions suivre la proposition de M. Retailleau, qui me paraît excellente. Je ne suis en effet pas persuadé que, derrière certaines propositions, ne se cachent pas des problèmes de concurrence ou des intérêts particuliers.
En raison de ce doute, et parce que je m’intéresse davantage aux questions culturelles qu’aux données techniques et financières, je fais confiance à M. Retailleau.
M. le président. Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 14
M. le président. L'amendement n° 25 rectifié bis, présenté par Mme Morin-Desailly et M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 9 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel est consulté sur les projets de loi modifiant la présente loi et sur les projets d'actes règlementaires pris pour son application et participe à leur mise en œuvre. Cette disposition n'est pas applicable aux décrets portant nomination des membres du Conseil supérieur de l'audiovisuel, aux décrets nommant les représentants de l'État aux conseils d'administration des sociétés et organismes du secteur public de la communication audiovisuelle ainsi qu'aux décrets portant approbation des statuts des sociétés nationales de programme. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Le présent amendement a pour objet de reconnaître en droit au CSA une compétence dont il dispose déjà largement de fait.
Le CSA est en effet systématiquement consulté par le Gouvernement sur les projets de loi concernant le secteur qu'il régule. Il est également souvent consulté, sur la base de dispositions expresses de la loi de 1986, sur les projets de décrets relatifs à la communication audiovisuelle. Ce pouvoir pourrait donc lui être reconnu formellement, de la même manière qu'il l'est pour d'autres autorités administratives indépendantes, l'ARCEP par exemple.
La commission souhaite renforcer le pouvoir de régulation du CSA sur l'ensemble de l'audiovisuel français. Il lui paraît en effet que, dans un contexte de mutation rapide des technologies, la régulation doit être revue et modernisée. Elle a donc proposé plusieurs amendements que nous évoquerons à plusieurs endroits de ce texte.
Ces amendements visent à permettre au CSA d'avoir un droit de regard sur le financement de l'audiovisuel public, de disposer de pouvoirs d'enquête renforcés, et à lui conférer le droit de prononcer des astreintes en cas de décision dans une procédure de règlement des différends.
Le but est de confirmer le régulateur dans son rôle et dans ses fonctions et de lancer un avertissement aux acteurs de l'audiovisuel français signalant l'importance pour le législateur de la bonne application de la loi du 30 septembre 1986 au quotidien.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.
M. Ivan Renar. Nous sommes défavorables à une partie de cet amendement.
Il est certes normal que le CSA soit mis à contribution en amont sur les projets de loi et de décret, sous réserve des exceptions précisées dans la rectification de l’amendement initial. En revanche, sa participation à leur mise en œuvre reviendrait à lui conférer un véritable pouvoir de cogestion, ce qui me paraît difficile à accepter.
Le CSA n’a pas vocation à être un gestionnaire. Je suis donc prêt à voter cet amendement, mais à la condition que la commission accepte un sous-amendement visant à supprimer les mots « et participe à leur mise en œuvre ».
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14.
L'amendement n° 26, présenté par Mme Morin-Desailly et M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 46 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 46. - Dans les conditions fixées par son cahier des charges, la société nationale de programme France Télévisions crée en son sein un Conseil consultatif des programmes composé de téléspectateurs, chargé d'émettre des avis et des recommandations sur les programmes.
« Chaque année, le président de la société nationale de programmes France Télévisions rend compte de l'activité et des travaux de ce conseil à l'occasion de la présentation du rapport sur l'exécution du contrat d'objectifs et de moyens de la société devant les commissions chargées des affaires culturelles et des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Cet amendement s'inscrit dans une « saga » déjà riche de deux épisodes.
En 2000, le législateur avait prévu, de sa propre initiative, la création d'un Conseil consultatif des programmes placé auprès de France Télévisions, qui devait être composé de téléspectateurs, tirés au sort parmi les personnes acquittant la redevance, selon une procédure définie par décret en Conseil d'État. Bien entendu, ce décret ne fut jamais pris, tant il était complexe d'organiser ainsi une sorte de loterie nationale de la redevance.
Quatre ans après, le législateur retenta sa chance : il supprima le tirage au sort et décida que la composition du conseil en question serait définie par décret. Mais ce fut un nouvel échec, le pouvoir règlementaire n’étant jamais parvenu à définir une composition représentative du conseil. La disposition est par conséquent demeurée lettre morte.
La commission vous propose donc de modifier une nouvelle fois l'article 46 de la loi de 1986 pour insuffler enfin la vie au Conseil consultatif des programmes. Il est en effet bon que le législateur s'entête, puisque ce conseil doit permettre d'associer les téléspectateurs à la définition de la ligne éditoriale du service public.
Aujourd'hui, France Télévisions fait des sondages, organise des enquêtes qualitatives à grande échelle ; mais le groupe ne fait pas assez l'effort d'interroger les téléspectateurs sur leur vision du service public et ne recueille pas assez leur sentiment sur la conception qu'ils s’en font. Il s’agit pourtant, pensons-nous, d’enjeux importants : quelle émission relève du service public et laquelle n'en relève pas ? Quels programmes faut-il diffuser et à quelle heure ?
Ce sont de telles questions qui pourraient être traitées au sein de ce conseil, dont l'existence contraindrait les dirigeants de France Télévisions à venir régulièrement expliquer leurs choix et présenter leurs politiques éditoriales à quelques téléspectateurs en chair et en os. Cela nous paraît essentiel, le service public n’étant réellement digne de ce nom que lorsque les usagers se l'approprient.
Bien entendu, ce conseil n'aurait aucun pouvoir décisionnel. Il s’agirait avant tout d’une instance consultative. C'est pourquoi la commission souhaite sortir des questions juridiques insolubles qu'a posées le renvoi au décret : la loi fera simplement obligation à France Télévisions de créer ce conseil et de rendre compte aux commissions des affaires culturelles et des finances, chaque année, de son fonctionnement. En quelque sorte, la loi posera donc une obligation de résultat, et il restera à France Télévisions à rechercher la meilleure solution pratique.
Or la constitution d'un tel conseil ne nous semble pas poser de difficultés particulières : il suffit par exemple de proposer aux téléspectateurs qui le souhaitent de se porter volontaires en ligne, à partir du site de France Télévisions, pour disposer d'un vivier de membres suffisants.
Envisagée sous l'angle juridique, la question est impossible à résoudre : sur quels critères constituera-t-on un conseil représentatif ? Mais, en pratique, telle n'est pas la question, puisque l'objet du conseil est de prévoir un dialogue entre France Télévisions et les téléspectateurs et non d'instituer une forme de « parlement des téléspectateurs ».
Pour toutes ces raisons, la commission vous propose, mes chers collègues, de persister dans l'intention qui fut par deux fois la vôtre et de prévoir la création de ce conseil, cette fois sans mesures réglementaires d'application.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Il est favorable.
Cet amendement permet en effet de redonner vie au Conseil consultatif des programmes et renvoie au cahier des charges le soin de fixer les modalités de sa création.
Par ailleurs, l’exposition des travaux de ce comité par le président de France Télévisions chaque année lors de la présentation du rapport d’exécution du contrat d’objectifs et de moyens devant les commissions parlementaires semble adaptée à l’objectif poursuivi.
La suppression de la publicité en soirée permet certes de se détacher des contraintes liées au marché publicitaire, mais la satisfaction du public et le suivi de la qualité des programmes resteront des exigences fortes pour France Télévisions, qui doit bien sûr s’adresser à l’ensemble des publics.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Nous soutenons d’autant plus la proposition de la commission que c’est la première fois, dans nos débats sur ce texte, qu’elle manifeste l’intention, qu’il sera d’ailleurs intéressant de confronter avec la réalité de son application, de reconnaître l’existence des téléspectateurs et d’accepter l’idée que ces derniers peuvent avoir leur mot à dire.
En d’autres occasions, on nous avait pourtant refusé l’introduction de cette idée. Voilà un bon point de départ, à partir duquel on pourra ensuite juger quelle sera la meilleure façon de représenter les téléspectateurs, autrement que par des associations assez limitées par rapport à la masse qu’ils représentent aujourd’hui, ce que font certains pays, notamment l’Allemagne.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.
M. Ivan Renar. Il est évident que cette proposition est séduisante, mais je trouve qu’elle pose problème, et je tiens à expliquer pourquoi.
Il faut savoir qu’une telle disposition existait déjà dans la loi promulguée le 1er août 2000, qui n’a jamais été appliquée, faute de modalités de désignation satisfaisantes. En effet, qui garantit la représentativité du « peuple des téléspectateurs » ?
Le peuple de gauche, ou encore le peuple français, on sait ce que sait. Mais les téléspectateurs n’ont pas d’organisation de caractère syndical, ce qui ouvre la possibilité d’une représentation par des lobbies, voire des sectes ou des groupuscules gauchistes. (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
Je suis tout à fait sérieux, mes chers collègues : je sais ce qui est arrivé au système de formation d’EDF, dont se sont emparées les sectes. Celles-ci, je vous le garantis, savent y faire !
Je pense qu’il aurait été préférable qu’on dise clairement – je prends quelques exemples, sans prétendre qu’il faudra procéder de la sorte – que France Télévisions crée en son sein un Conseil consultatif des programmes composé de personnalités indépendantes, nommées en raison de leurs compétences par son conseil d’administration et provenant du monde des arts, des lettres et de la culture, des sciences sociales, de l’information, des sciences, ou encore du monde du travail, chargées d’émettre des avis et des recommandations sur la programmation.
Voilà qui eût été beaucoup plus clair et enrichissant pour France Télévisions et l’ensemble du dispositif.
Je suis donc réservé sur l’amendement qui nous est proposé. Bien que je le trouve séduisant, je crois qu’il est, dans l’état actuel des choses, totalement inapplicable, voire dangereux.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Il est toujours difficile de fabriquer des instances démocratiques nouvelles, surtout quand on ne dispose pas déjà de l’assise, des procédures, des techniques de représentativité qu’ont eues les syndicats par le passé.
Je prendrai l’exemple du Grenelle de l’environnement, pour lequel la question de la représentativité des associations s’est trouvée directement posée. Lesquelles devait-on consulter, et comment ? Ne risquait-il pas d’y avoir des fantaisistes dans le lot ?
Malgré de nombreuses interrogations, nous y sommes arrivés, tant bien que mal. Je pense que, dans le cas présent, il faut agir de même, et que nous pouvons, à cet égard, nous en remettre au décret.
Vos propositions, monsieur Renar, sur la représentation des téléspectateurs issus du monde du travail et des luttes sociales, comme du monde de la culture, restent tout à fait pertinentes ; le décret pourra en tirer profit.
Telles sont les raisons pour lesquelles les Verts soutiennent totalement cette proposition de la commission.