M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote sur les sous-amendements identiques nos 145 rectifié bis et 450.
M. Ivan Renar. J’ai entendu avec plaisir la douce musique de la commission. Je regrette toutefois que Mme le ministre n’ait pas eu le même élan vers le personnel et le public de RFO !
M. le président. Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 145 rectifié bis et 450.
(Les sous-amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement no 228 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote sur l'amendement no 34 rectifié.
M. Jack Ralite. Pour ce qui est de la suppression de la publicité, le Gouvernement peut souffler puisque les votes de l’Assemblée nationale et du Sénat qui lui étaient nécessaires lui seront acquis dans quelques minutes.
Cependant, les comptes ont été faits : la compensation financière n’est pas assurée, ce qui soulève un problème moral. On le sait dorénavant, le service public connaîtra un bouleversement de son équilibre et des structures de son financement. Aucune entreprise privée n’accepterait d’être traitée de cette manière !
Je me tourne maintenant vers mon collègue Jean-Pierre Fourcade – je me serais également adressé à Gérard Longuet s’il avait été présent parmi nous, car ses interventions s’inscrivent dans une perspective identique – pour lui rappeler qu’il faut être moderne et non pas archaïque.
Cette question de la modernité soulève deux difficultés.
En premier lieu, les mutations technologiques que nous connaissons, c’est vrai, sont gigantesques. De ce fait, elles sont difficiles à appréhender, tâche à laquelle, précisément parce qu’elle est malaisée, nous nous efforçons de notre mieux. Peut-être avez-vous lu à ce propos le compte rendu – que j’ai envoyé à chacun des sénateurs – de la journée d’études que nous avons organisée dans le cadre des états généraux de la culture. Y figurait notamment l’intervention d’une personnalité importante, M. Alain Le Diberder.
En vérité, le problème du financement et de la direction de France Télévisions nous a tant occupés – c’était légitime – que ces questions technologiques n’ont plus été abordées. À l’inverse de vous, mes chers collègues, nous ne les considérons pas comme un fatum. Les nouvelles technologies ne sont pas une fatalité, elles sont un nouvel outillage comme il s’en est tant succédé et comme il s’en succédera encore dans l’histoire de l’humanité.
En second lieu, j’évoquerai la manière d’aborder l’ensemble de la question. À cet égard, je ne sais qui est le plus archaïque ! Ou plutôt, je le sais, mais je resterai courtois à votre égard.
M. Alain Gournac. Quel goujat !
M. Jack Ralite. La solution retenue dans le projet de loi est idéologique. Elle ne résoudra pas le problème parce qu’elle a pris un « coup de vieux », même si, pour l’adapter, on l’a repeinte.
On s’est longtemps demandé ce qu’avait lu Nicolas Sarkozy dans la nuit du 8 janvier 2008. Or, au fur et à mesure de nos travaux, je me suis documenté, parce qu’il s’agit là d’un sujet essentiel. J’avais tout d’abord supposé que le Président de la République avait pris son petit déjeuner avec Alain Minc ; aujourd’hui, j’en suis sûr : il a lu ses livres !
Mes chers collègues, je vous en citerai deux extraits.
Le premier est tiré du livre L’après-crise est commencé, publié en 1982, qui constitue un véritable manifeste du sarkozysme.
« Le jeu libéral stricto sensu doit s’appuyer sur un État de plus en plus bouclier industriel. Cette alliance des contraires traduit l’ambivalence croissante du marché : d’une part le seul régulateur […], d’autre part un champ mondial de forces où s’affrontent des acteurs de plus en plus massifs, chacun “dopé” par son État afin d’arracher des parts de marché comme on enlevait autrefois des positions. »
Un peu plus loin, on peut lire : « C’est une guerre qui s’y mène, avec son front, la bataille pour les grandes positions mondiales, ses percées, les grands contrats d’exportation et ses arrières, le marché intérieur, aussi décisifs que dans toutes les guerres. »
Quelques pages après : « Cela rend désormais suranné le principe sacramentel sur lequel s’est bâti le welfare français : tout service collectif doit être public et non marchand, il rend inévitable un recours au marché comme régulateur social. »
En 1992, dans un autre ouvrage, intitulé Le Média-choc,…
M. Alain Gournac. C’est incroyable !
M. le président. Ce sera votre dernière citation, mon cher collègue !
M. Jack Ralite. Bien sûr ! Cependant, monsieur le président, on nous reproche toujours de ne pas évoquer le fond du sujet : eh bien le voilà ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. Roland du Luart. On est en dehors du sujet !
M. Jack Ralite. Cela va recommencer comme hier ! Vous ne voulez donc rien apprendre !
M. Alain Gournac. Les goujats ont de bonnes oreilles !
M. Jack Ralite. Justement ! Ouvrez-les ! Au demeurant, j’en visais un seul !
M. Henri de Raincourt. Lisez donc le compte rendu des débats !
M. Jack Ralite. Cet incident y figure ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. Roland du Luart. Je vais faire un rappel au règlement !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Ralite.
M. Jack Ralite. Le Média-choc reprend la question de la régulation audiovisuelle pour inviter à « un remède de cheval, version droite ». Il ne s’agit pas de poursuivre les privatisations après celle de TF1 : « L’exemple vient une fois de plus du monde anglo-saxon […], de la Grande-Bretagne où Margaret Thatcher a essayé de redessiner le paysage audiovisuel dans une optique plus brutalement libérale. »
Cette réforme « repose sur plusieurs volets : une diffusion privée et plurielle, un secteur public producteur » – tel n’est cependant pas le cas dans le projet de loi ! – « et fonctionnant comme une agence d’achat d’heures de diffusion ; une instance de régulation toute-puissante. »
Dans cette conception, « c’est la nature des ressources, budgétaire ou publicitaires, qui fixe la vocation de la chaîne ». Ainsi, « la télévision ne connaîtrait-elle qu’une seule entreprise publique, en amont des chaînes ? Alimentée par la redevance […], cette agence agirait de la manière suivante. Elle produirait – ou plutôt commanderait – des émissions que la logique naturelle du marché ignorerait. […] À l’État resterait le rôle d’actionnaire de l’agence, puisqu’il la financerait, et donc le pouvoir de nomination de ses dirigeants ».
Cela me rappelle ce que nous disait Mme Pécresse au sujet de la recherche ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Par ce vote, nous nous apprêtons à ratifier ce que France Télévisions a d’ores et déjà décidé et mis en place. Je pensais que le Sénat, à qui l’on signifie ainsi qu’il ne sert à rien, manifesterait un certain esprit de rébellion. Toutefois, le scrutin n’ayant pas encore eu lieu, peut-être pouvons-nous espérer un sursaut !
Notre assemblée, je tiens à le souligner, aurait pu s’accorder sur cet amendement pour exiger une clause de revoyure.
En effet, la suppression de la publicité après 20 heures provoquera un bouleversement économique dont nous nous efforçons aujourd’hui d’amortir les effets. Cependant, en prévoyant qu’à compter de 2011 la publicité disparaîtra complètement, nous prenons le risque de « casser » l’équilibre de la télévision publique tel qu’il a été défini par Mme Tasca. En prenant une telle décision, qui n’est pas de bonne gestion, nous ne rendons pas service aux équipes dirigeantes de France Télévisions ni à la télévision publique. Nous aurions pu prévoir une rencontre formelle pour évoquer ces questions avant de passer à l’étape suivante.
Par ailleurs – et cela n’a rien à voir avec le service public –, l’adoption de cet amendement permettra au secteur privé de passer du système de l’heure glissante à celui de l’heure d’horloge. Loin de vous prononcer contre un excès de publicité sur France Télévisions, mes chers collègues, vous autorisez par là l’allongement de l’interminable tunnel publicitaire de TF1 ! Ce problème, que j’avais pourtant souligné, n’a pas été débattu. Encore une contradiction !
Il subsiste cependant un mince rayon de soleil puisque la majorité a accepté d’adopter un sous-amendement, d’origine socialiste, grâce auquel RFO gardera la liberté de recourir à la publicité. C’est une bonne chose, de nature à améliorer cet article que, par ailleurs, nous souhaitons voir rejeter.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. C’était une initiative des sénateurs représentant les Français de l’étranger !
M. David Assouline. C’est le symbole de ce qui se passe depuis le début. Sur les questions fondamentales, le Sénat ratifie une réforme dont il ne voulait pas, tout au moins sous cette forme ; mais, grâce à notre opposition constructive, chaque fois nous parvenons à créer des niches et à dresser des protections. Le pire n’est donc pas certain, puisque quelques-unes de nos propositions ont été reprises par notre assemblée.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 34 rectifié, modifié.
Je suis saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin no 84 :
Nombre de votants | 335 |
Nombre de suffrages exprimés | 314 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 158 |
Pour l’adoption | 174 |
Contre | 140 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 18 est ainsi rédigé et les amendements nos 357, 362, 358, 233, 291 rectifié, 367, 359, 360, 361, 97, 418, 365, 369 et 368 ainsi que le sous-amendement no 450 n’ont plus d’objet.
Demande de réserve
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, la commission demande la réserve des amendements nos 35 rectifié et 36 rectifié, relatifs à la dénomination de la redevance, jusqu’après l’examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 19.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. le président. En application de l’article 44, alinéa 6, du règlement, la réserve est de droit.
Article 19
M. le président. L’article 19 a été supprimé par l’Assemblée nationale.
Je suis saisi de trois amendements tendant à le rétablir et faisant l’objet d'une discussion commune.
L’amendement no 37, présenté par Mme Morin-Desailly et M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
La dernière phrase du second alinéa du III de l'article 1605 du code général des impôts est ainsi rédigée : « Il est arrondi à l'euro supérieur. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. En ce qui concerne la redevance, les rapporteurs tiennent à signaler que les propositions qu’ils formulent dans le cadre de ce projet de loi ne sont pas des propositions de circonstance ou visant à faire plaisir à tel ou tel. Au contraire, elles traduisent la cohérence des travaux poursuivis par la commission des affaires culturelles depuis plusieurs années, comme l’attestent les nombreux débats qui ont eu lieu au sein de notre assemblée et dans lesquels son ancien président, Jacques Valade, et notre ancien collègue Louis de Broissia, rapporteur, se sont particulièrement impliqués, notamment sur les questions d’indexation de la redevance.
Nous considérons que la redevance constitue une ressource pérenne et dynamique qui garantit un financement stable et lisible à l’audiovisuel public. Nous formulons donc un certain nombre de propositions tendant à revaloriser son montant et à améliorer son image ainsi qu’à définir un cadre nous permettant à l’avenir, notamment en 2009, de poursuivre la réflexion sur sa modernisation, que M. le Premier ministre a évoquée et que nous souhaitons voir aboutir.
L’amendement no 37 vise à procéder à un ajustement technique afin que le montant de la redevance soit arrondi à l’euro supérieur après indexation. Cette mesure, qui, certaines années, peut avoir un impact de 20 millions d’euros, présente l’avantage de ne pas constituer une disposition ponctuelle et d’avoir des conséquences à moyen et long terme sur le montant de la redevance.
Les rapporteurs estiment que les modalités permettant de rendre la redevance dynamique sur le long terme doivent être adoptées dès maintenant et que la mesure proposée dans cet amendement est particulièrement adaptée à la réalisation d’un tel objectif.
M. le président. L’amendement no 183, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L'exonération de la redevance ne s'applique pas aux abonnés des chaînes cryptées.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Cet amendement tend à éviter que les personnes ayant souscrit un abonnement à une chaîne cryptée puissent ne pas être redevables de la redevance audiovisuelle. Il est en effet paradoxal d’exonérer de la redevance des téléspectateurs qui s’abonnent à des chaînes cryptées pour des montants très supérieurs à celui de la redevance et qui, de fait, profitent gratuitement des chaînes publiques.
L’abonnement à une chaîne cryptée coûte entre 30 et 80, voire 90 euros par mois. Or une grande partie des abonnés sont exonérés de la redevance audiovisuelle. S’ils l’acquittaient, ils ne paieraient que 10 euros de plus par mois. Lorsque l’on souscrit un abonnement qui s’élève à 40 à 80 euros par mois, on peut tout de même ajouter 10 euros au titre de la redevance !
Actuellement, 15 % des téléspectateurs sont dispensés de la redevance pour des raisons sociales. On estime par ailleurs que 7 millions de foyers français bénéficient d’une offre payante de Canal Plus ou de Canal Satellite. En outre, 4 millions de téléspectateurs bénéficient, moyennant le paiement de l’accès, des chaînes de l’ADSL via Free ou d’autres opérateurs.
Parmi les 11 millions de foyers qui, d’après les sondages – les chiffres n’ont pas été faciles à obtenir ! –, bénéficient d’une offre payante, environ 800 000 foyers sont exonérés de la redevance. L’inégalité de traitement qui en résulte entre la télévision publique et les chaînes commerciales représente pour la télévision publique une perte d’environ 90 millions d’euros.
Certes, l’article 53 de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 pose le principe de la prise en charge intégrale par l’État des exonérations de redevance audiovisuelle décidées pour des motifs sociaux. Toutefois, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2006, un plafond annuel a été fixé afin de limiter le montant des dégrèvements de redevance pris en charge par le budget général. En pratique, les sommes allouées en remboursement de dégrèvements ont souvent été inférieures au total des dégrèvements accordés, ce qui a entraîné des pertes de recettes substantielles pour l’audiovisuel public.
Cet amendement, qui, à mes yeux, est important, peut permettre de pallier la non-compensation chronique des financements.
M. le président. L’amendement no 372, présenté par MM. Assouline, Bel et Bérit-Débat, Mmes Blandin, Blondin et Bourzai, MM. Boutant, Domeizel et Fichet, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, M. Sueur, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le III de l'article 1605 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans son rapport annuel rendu public conformément à l'article 18 de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le Conseil supérieur de l'audiovisuel propose, au regard des rapports d'exécution des contrats d'objectifs et de moyens des sociétés de l'audiovisuel public, prévus au I de l'article 53 de la même loi, les modalités de revalorisation du montant de la redevance. La revalorisation ne peut être inférieure à l'évolution de l'indice des prix à la consommation hors tabac, tel qu'il est prévu dans le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l'année considérée. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Comme nous avons déjà eu l’occasion de le démontrer au cours de ce débat, l’une des deux conditions nécessaires mais non suffisantes de l’indépendance des organismes de l’audiovisuel public est l’assurance d’un régime de financement sûr et pérenne leur garantissant les moyens utiles à l’accomplissement de leurs missions de service public et dont les modalités de fixation et d’allocation ne sauraient dépendre du bon vouloir du Gouvernement en place.
Nous savons que la commission partage largement cette orientation, qui, les recommandations réglementaires de l’Union européenne de radiodiffusion, l’UER, le montrent, fait figure de norme dans le paysage européen de l’audiovisuel public.
C’est pourquoi, rejoignant l’esprit de l’amendement no 27 rectifié de la commission, approuvé par le Sénat, nous estimons qu’il revient à une autorité indépendante du Gouvernement, comme c’est le cas en Allemagne, de déterminer le niveau des ressources publiques nécessaires pour financer les organismes du secteur public de la communication audiovisuelle.
Il nous semble cependant souhaitable de compléter le dispositif mis en place par l’amendement précité de la commission, que je soutiens, en précisant que le CSA, c’est-à-dire l’autorité indépendante en question, est investi de la responsabilité de proposer, au regard des conditions d’exécution des contrats d’objectifs et de moyens des sociétés de l’audiovisuel public, les modalités de revalorisation annuelle du montant de la redevance, la revalorisation proposée ne pouvant être inférieure à la prévision d’évolution de l’indice des prix figurant dans le rapport économique et financier annexé chaque année à la loi de finances initiale. Ainsi, le champ de compétences du CSA serait comparable à celui qu’a en Allemagne la commission pour l’évaluation des besoins budgétaires des établissements de radiodiffusion, la KEF.
En effet, outre-Rhin – mes chers collègues, vous feriez bien d’écouter ce qui se passe en Allemagne, car c’est intéressant ! –, la redevance télévisuelle présente la particularité de voir son montant fixé par la commission indépendante qu’est la KEF.
Celle-ci recommanda, pour la période 2005-2008, une hausse de 1,07 euro du montant de la redevance, qui devait ainsi atteindre 17,22 euros par mois et par foyer, soit une hausse de 6 % permettant une augmentation des recettes des radiodiffuseurs publics d’environ 400 millions d’euros par an. Jusqu’alors, les parlements régionaux avaient toujours suivi les recommandations de la KEF. Cependant, les ministres-présidents des Länder, réunis en octobre 2004, décidèrent de limiter la hausse à 0,88 euro, alors que les chaînes ARD et ZDF avaient fait savoir que leurs besoins de financement ne seraient couverts qu’avec une redevance mensuelle de 18 euros. Estimant que cette décision remettait en cause leur indépendance, les opérateurs audiovisuels publics saisirent la Cour constitutionnelle, qui, dans un arrêt de septembre 2007, leur donna raison.
C’est vers ce modèle garantissant réellement au service public de l’audiovisuel les moyens de financer de manière pérenne ses besoins de développement que nous souhaitons voir notre législation évoluer, et tel est l’objet de notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l’amendement no 372. En effet, s’il est constant qu’en matière fiscale les exonérations ne sont pas toujours, comme on pourrait s’y attendre, subordonnées à un usage pertinent, il est tout aussi évident que la loi n’a pas à définir des foyers modestes vertueux et d’autres qui ne le sont pas : c’est aussi une question de liberté individuelle qui se pose. Croiser les fichiers des abonnés au câble et les fichiers de ceux qui paient la redevance soulève une vraie question ; celle-ci pourra être évoquée au sein du groupe de travail.
L’avis est également défavorable sur l’amendement no 372, que nous considérons comme satisfait par un amendement de la commission tendant à insérer un article additionnel après l’article 14.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’amendement no 37.
Il est défavorable à l’amendement no 183, car il lui paraît difficile de lier une exonération fiscale à un profil de consommation. Outre que les exonérations peuvent concerner des personnes immobilisées chez elles, le contrôle et la communication aux services fiscaux des fichiers des abonnés des chaînes à péage posent un problème important, tous éléments qui rendent les choses complexes.
Enfin, il ne nous semble pas qu’il appartienne au CSA de proposer des revalorisations de redevance : cela relève de la compétence de l’État et du Parlement. Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur l’amendement no 372.
M. le président. La parole est à M. Michel Billout, pour explication de vote sur l'amendement no 37.
M. Michel Billout. En décembre dernier, la commission des affaires culturelles avait déjà adopté à l’unanimité, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2008, un amendement identique que, finalement, elle avait retiré en séance à la demande du Gouvernement et de la commission des finances.
Pourtant, nous aurions pu le faire adopter, car le second amendement défendu par la commission avait alors recueilli 161 voix pour et 136 contre. Mon groupe avait d’ailleurs défendu à cette occasion un sous-amendement que nous avions également proposé lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances.
Cette redevance, qu’elle soit rebaptisée ou non, est en quelque sorte un actionnariat populaire qui a supporté la charge de l’ensemble du développement de la télévision. Sachant que les 450 millions d’euros prévus par le Gouvernement ne suffiront ni à redresser les finances de la télévision française ni à en assurer le développement, la redevance doit être relevée. Comment, sinon, oser prétendre vouloir créer un grand service public de l’audiovisuel ?
Qui plus est, la compensation dont il est question repose sur les taxes affectant les ressources publicitaires des chaînes privées et le chiffre d’affaires des fournisseurs d’accès à internet, dont on a vu à l’Assemblée nationale, mais aussi dans cette enceinte, le peu d’enthousiasme qu’elles suscitaient. Il ne faut pas non plus oublier l’avis que la Commission européenne portera sur ces taxes ! Rien n’est donc acquis.
C’est pourquoi, à travers des amendements qui seront examinés après l’article 19, mon groupe demandera que la redevance augmente de 4 euros : 2 euros correspondant à l’inflation arrondie au chiffre supérieur et 2 euros constituant un surcroît net de recettes.
L’augmentation de la redevance est nécessaire. Si vous ne la mettez pas en œuvre, ce sera comme si vous refusiez de satisfaire des désirs de création au bénéfice de désirs de simple « reproduction ». Avec une telle démarche, on maintient le statu quo au lieu d’avancer vers l’avenir !
Il ne faut pas oublier que l’État, s’il se refuse à augmenter la redevance, continue dans le même temps de plafonner les remboursements des dégrèvements de la redevance : rien n’a changé à cet égard depuis 2006 ! Or la loi no 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi de 1986 relative à la liberté de communication dispose que « les exonérations de redevance audiovisuelle décidées pour des motifs sociaux donnent lieu à remboursement intégral du budget général de l’État ».
L’amendement présenté par les rapporteurs est donc un premier pas, certes insuffisant, mais qui doit être franchi. Nous le soutenons donc.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Je dois dire combien j’ai été, à un moment, étonné, amusé par le débat qui semblait s’ouvrir dans notre pays sur la paternité de la réflexion consacrée à une éventuelle augmentation de la redevance.
Cette recherche en paternité, je souhaiterais qu’elle aboutisse au constat que c’est depuis des années une position constante de la commission des affaires culturelles, de son président d’alors, Jacques Valade, et de son rapporteur de l’époque, Louis de Broissia ; je voudrais leur rendre hommage.
M. Yannick Bodin. Je l’ai dit tout à l’heure !
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. En effet, pourquoi ont-ils souhaité maintenir l’indexation, voire faire un petit effort dans ce domaine ? Non pas parce que la commission se préoccupait exclusivement de la culture, sans le moindre souci du contribuable ou de l’économie, mais simplement parce qu’elle pensait que, lorsqu’une société de télévision devait réaliser un programme, il fallait lui donner les moyens correspondants. Sans un effort supplémentaire, elle n’était pas sûre que les moyens seraient au rendez-vous et, si effort il y avait, elle craignait qu’il ne soit demandé d’une manière beaucoup plus anonyme, au détriment de la justice fiscale.
Par conséquent, nous souhaitons que celui qui veut accéder aux programmes de la télévision publique consente un effort qui soit en rapport avec le service qu’il aura choisi de demander à la télévision publique, comme il a le droit de le demander par ailleurs à la télévision privée en consentant à payer les sommes correspondantes.
Je tenais à rappeler quels ont été les pères de cette demande. Celle-ci, c’est un fait, a suscité des débats et trouvé un soutien dans tous les groupes. J’appelle aujourd’hui la Haute Assemblée à se rassembler sur un constat très simple : nous voulons la réussite de la télévision publique au service des téléspectateurs, et nous voulons lui assurer les moyens de cette réussite.
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.