Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Au préalable, je rappellerai que la commission des affaires économiques a cherché à trouver un compromis entre deux positions.
D'une part, le Gouvernement, dans la rédaction actuelle de l'article 3 du projet de loi, souhaitait que l'acceptation de cession de créances reste plafonnée à 80 % de la rémunération due au titre du fonctionnement et de l'investissement. Aussi, il n'a pas voulu revenir sur le dispositif tel qu'il avait été adopté par le Parlement en juillet dernier, lors de l'examen de la loi relative aux contrats de partenariat, comme vient de le rappeler M. Sueur. En vérité, l'article 3 visait uniquement à clarifier les notions de cession de créances et d'acceptation de cessions de créances.
D'autre part, la commission des lois et la commission des finances ont présenté deux amendements identiques visant à relever ce plafond à 100 %.
L'amendement de la commission des affaires économiques a le double mérite de la simplicité et de l'efficacité.
Simplicité, tout d'abord, puisque nous avons renoncé finalement à l'idée de créer un dispositif facultatif de cessions de créances différées pour la tranche allant de 80 % à 100 % de l'acceptation.
Efficacité, ensuite, car on évite ainsi que la personne publique ne protège indûment les fonds propres engagés par le titulaire du contrat de partenariat. En effet, on observe en général que ces fonds représentent justement 10 % des assiettes d’investissements et de financement. Ainsi, le titulaire du contrat de partenariat restera en risque sur la partie de ses fonds propres.
Plus globalement, la personne publique sera protégée si le titulaire ne respecte pas les clauses du contrat, et ce grâce à plusieurs mécanismes : tout d'abord, l'acceptation de cession de créances sera plafonnée à 90 % ; ensuite, il existe une assurance garantie contre les dommages ; enfin, le contrat de partenariat doit prévoir des clauses de performances lors de la phase de fonctionnement, ce qui permettrait de sanctionner indirectement le titulaire en cas de dysfonctionnement lors de la phase de construction de l'ouvrage.
Ainsi, l'adoption de l’amendement n°5 rectifié permettrait à la fois de participer à la relance économique de notre pays et de protéger les droits des personnes publiques, notamment ceux des collectivités territoriales.
Monsieur le président, la commission demande le vote par priorité de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité présentée par la commission ?
M. Patrick Devedjian, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable tant sur cette demande de priorité de mise aux voix que sur l’amendement lui-même.
M. le président. La priorité est de droit.
L'amendement n° 42, présenté par MM. Sueur, Botrel, Raoul et Repentin, Mme Bricq, M. Courteau, Mme Herviaux, MM. Patriat, Hervé, Muller et Rebsamen, Mme M. André, MM. Marc, Guillaume, Sergent, Angels, Teston, Boutant, Fichet et Massion, Mme Le Texier, MM. Collombat, Bourquin, Jeannerot, Demerliat et Anziani, Mme Ghali et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de cet article, supprimer les mots :
et les frais financiers intercalaires, et des coûts de financements,
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Je défendrai cet amendement de repli, bien que les propos de M. le ministre laissent présager que son sort est d’ores et déjà scellé…
M. Patrick Devedjian, ministre. Mais le Gouvernement fait finalement siennes vos observations, monsieur Sueur !
M. Jean-Pierre Sueur. Certes, monsieur le ministre, mais, dans ce cas, pourquoi ne pas s’en tenir à la disposition que les sénateurs de la majorité ont votée en juillet dernier, au terme de longs échanges avec l’Assemblée nationale ?
Mme Odette Terrade. Oui !
M. Jean-Pierre Sueur. Le passage du seuil de 80 % à 90 % n’aura aucun effet sur la relance. Pour que cette disposition ait un quelconque effet, encore faudrait-il conclure, dans un premier temps, un contrat de partenariat. Or cela devient de plus en plus difficile, parce que la loi impose de procéder avant toute signature à une évaluation préalable démontrant que le recours au contrat de partenariat est plus avantageux que le recours à la procédure classique de passation de marché ou à la délégation de service public. Je félicite donc par avance celui qui pourra faire la démonstration que telle procédure sera plus avantageuse que telle autre pour les finances de la commune, du département, de la région ou de l’État dans dix, vingt ou trente ans, alors même qu’on ignore quels seront, à ces échéances, le taux d’intérêt, le prix de l’énergie, l’indice du coût de la construction ! C’est indémontrable !
Je lirai avec un intérêt croissant les publications d’un certain nombre d’instances qui s’emploient à démontrer l’avantage, à échéance de dix, de vingt ou de trente ans, du partenariat public-privé. En réalité, comme le disait Blaise Pascal à propos d’un autre sujet, c’est un pari !
Après avoir procédé à cette évaluation préalable, la collectivité locale ou l’État lancera un appel d’offre, que soumissionneront les entreprises. Au terme d’un dialogue compétitif sera arrêtée une décision.
Une fois qu’aura été réalisé le projet pour lequel l’appel d’offres avait été lancé, une décision sera prise quant à la cession de créances. À n’en point douter, c’est dans trois mois, dans six mois ou dans un an que cette mesure produira ses effets sur la relance…
Soyons sérieux ! Chacun sait que cela n’a aucun rapport. En outre, il serait de bonne méthode de ne pas modifier, six mois après qu’elle a été votée, une disposition qui n’a même pas commencé à être appliquée.
Monsieur le président, après les propos que je viens de tenir, vous comprendrez que c’est avec la force du désespoir tranquille que je m’apprête à présenter mon amendement. Celui-ci tend à retirer de l’assiette de la créance pouvant être cédée les frais intercalaires ainsi que les coûts de financement, l’objectif étant de limiter le transfert d’une trop grande part des risques financiers sur la personne publique en réduisant l’assiette et, ainsi, de limiter le déséquilibre qui pourrait en résulter au détriment des collectivités locales, dont nous sommes les défenseurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Compte tenu des arguments que j’ai développés en présentant l’amendement n° 5 rectifié, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable sur l’ensemble des autres amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre. Comme M. Sueur, et sans doute pour les mêmes raisons, je suis très hostile à une cession à 100 % des créances. Si tel devait être le cas, nous évoluerions, me semble-t-il, vers la titrisation du partenariat public-privé. Et ce n’est guère la saison !
M. Jean-Pierre Sueur. Je ne vous le fais pas dire !
M. Patrick Devedjian, ministre. Pour autant, je suis conscient du fait qu’une cession à hauteur de 80 % des créances présente des inconvénients. M. Sueur estime qu’il importe peu que ce seuil soit fixé à 90 % ou à 80 %. Je ne suis pas d’accord : la fixation du seuil à 90 % permet de réduire les coûts, et, en même temps, l’entrepreneur public est maintenu.
Par conséquent, l’amendement n° 5 rectifié me paraît parfaitement équilibré et tout à fait judicieux : il permet d’éviter les inconvénients à la fois d’un seuil à 80 %, très restrictif, comme l’a souligné avec raison M. Béteille, et d’un seuil à 100 %, qui me paraît extrêmement dangereux.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 5 rectifié et un avis défavorable sur les autres amendements.
M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur pour avis.
M. Laurent Béteille, rapporteur pour avis. La commission des lois se rallie à l’amendement de compromis no 5 rectifié, présenté par la commission des affaires économiques. Ce texte marque un progrès, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir.
Il reste une difficulté rédactionnelle liée au souhait d’éviter une répétition et une lourdeur du texte initial. Sans doute aurons-nous l’occasion d’y revenir lors de la commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote sur l’amendement no 5 rectifié.
Mme Odette Terrade. Comme je l’ai indiqué lors de la défense de notre amendement de suppression de l’article 3, notre groupe ne peut, par principe, voter cet amendement. En effet, l’encre d’une loi n’est pas encore sèche que l’on nous demande déjà d’adopter de nouvelles dispositions ! Il semble d’ailleurs que cela devienne une habitude dans cette assemblée.
Plutôt que d’abuser de la déclaration d’urgence pour faire passer des textes très vite, été comme hiver, mieux vaudrait prendre le temps de la réflexion. Dans le cas présent, donnons-nous du temps : mieux vaut ne rien changer puisque la loi de juillet n’est pas encore appliquée.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je suivrai l’avis de la commission, car ces 10 % ressemblent à une garantie de bonne fin.
Mme Lamure et M. Béteille, rapporteurs du présent texte, étaient également les rapporteurs du projet de loi de modernisation de l’économie. J’aimerais donc savoir où en sont les décrets d’application de ce texte qui devait être un moteur et un levier de l’énergie qu’il fallait démontrer cet été pour moderniser notre économie et pour favoriser la relance.
Mme Odette Terrade. Absolument !
Mme Nathalie Goulet. Je souhaite donc que les rapporteurs, sinon pendant cette discussion du moins dans un délai assez bref, fassent le point de la situation, nous informent des décrets qui sont sortis et de ceux qui sont en panne. Qu’en est-il, par exemple, du statut de l’auto-entrepreneur ? Vérifier l’état de publication des décrets d’application de la loi de modernisation de l’économie serait une occasion d’améliorer le plan de relance.
M. le président. Je mets aux voix, par priorité, l'amendement n° 5 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 40, 102, 22 et 41 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement no 42.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa du I de l'article 1er de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat est ainsi rédigé :
« Le contrat de partenariat est un contrat administratif par lequel l'État ou un établissement public de l'État confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale ayant pour objet la construction ou la transformation, l'entretien, la maintenance, l'exploitation ou la gestion d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public, ainsi que tout ou partie de leur financement. »
II. - Le premier alinéa du I de l'article L. 1414-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Le contrat de partenariat est un contrat administratif par lequel une collectivité territoriale ou un établissement public local confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale ayant pour objet la construction ou la transformation, l'entretien, la maintenance, l'exploitation ou la gestion d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public, ainsi que tout ou partie de leur financement. »
La parole est à M. Yann Gaillard, en remplacement de M. Philippe Marini, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard, en remplacement de M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à faciliter les possibilités de cofinancement entre le partenaire privé et la puissance publique. Il complète les deux amendements de la commission des lois et de la commission des finances que nous avons examinés tout à l’heure.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. La mission de financement d’un projet de contrat de partenariat, en l’état actuel du droit, peut-être confiée en bloc au titulaire. Or, compte tenu de la crise financière et du manque d’activités sur les marchés bancaires, il a semblé nécessaire de permettre aux personnes publiques de supporter une partie de ces contrats en empruntant directement auprès des banques, car elles empruntent à des taux beaucoup plus faibles que les entreprises privées.
L’amendement no 25 tend à découpler, d’une manière générale et absolue, la part de financement de la personne publique et celle qui est supportée par le titulaire.
J’aurais souhaité que des limites soient apportées à ces découplages, aussi bien dans le temps que pour le partage des risques. Il ne serait pas prudent, à mes yeux, de faire supporter à la personne publique la majorité du financement définitif d’un projet. Les personnes publiques, et surtout les collectivités territoriales, risqueraient d’être incités par des candidats à contracter des crédits bancaires et à supporter une part déterminante de ce financement. Il faut éviter, me semble-t-il, que des pressions ne s’exercent sur des responsables locaux, notamment sur les maires, pour qu’ils acceptent de supporter l’essentiel de l’emprunt bancaire.
En d’autres termes, j’aurais souhaité que le titulaire du contrat de partenariat supporte la majorité du financement définitif des contrats, sauf pour les projets dépassant un seuil fixé par décret et pour lesquels les financements publics et parapublics sont structurellement majoritaires, en particulier le projet de canal Seine-Nord Europe, mais aussi des lignes à grande vitesse ou des grands stades.
Cela dit, je comprends la nécessité d’avoir des règles très souples pour faire face à une crise financière qui brouille nos repères traditionnels. À cet égard, il serait opportun que la Mission d’appui aux partenariats public-privé, la MAPPP, mette régulièrement à jour ses recommandations pour répondre aux évolutions rapides du secteur bancaire.
Pour toutes ces raisons, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui, en permettant à la collectivité de prendre part au financement, contribuera à lever certains blocages.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3.
L'amendement n° 24, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'avant-dernier alinéa de l'article 39 quinquies I du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Les entreprises titulaires d'un contrat visé à l'article 1048 ter peuvent également constituer en franchise d'impôt une provision au titre de l'exercice au cours duquel elles cèdent, autrement qu'à titre de garantie et dans les conditions prévues par les articles L. 313-23 à L. 313-35 du code monétaire et financier, les créances résultant de ce contrat qu'elles détiennent sur une personne publique. »
II. - Les éventuelles pertes de recettes pour l'État résultant du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. La commission des finances, considérant que les baux emphytéotiques constituent une forme de partenariat public-privé, souhaite qu’ils y soient assimilés et puissent bénéficier des dispositions que nous venons d’adopter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Cette mesure très technique nous semble prématurée. En effet, avant de se poser la question du traitement fiscal des cessions de créances détenues sur les personnes publiques, il convient de clarifier leur traitement comptable. L’organisme qui prendra la suite du Conseil national de la comptabilité devra se pencher sur cette question, car les incertitudes demeurent nombreuses.
Je demande donc à M. le ministre de bien vouloir éclairer le Sénat. La commission s’en remettra à son avis.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre. Le Gouvernement partage votre expectative, madame le rapporteur. Le traitement comptable de ces opérations n’est pas encore finalisé. La mesure prévue dans cet amendement est donc pour l’heure sinon dangereuse, du moins prématurée.
La prise de position officielle des autorités comptables devrait intervenir d’ici peu. Peut-être le Gouvernement proposera-t-il alors lui-même cette mesure qu’il est contraint de refuser aujourd’hui. Pour l’heure, il émet un avis défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Après le premier alinéa de l'article L. 1615-13 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation, les baux emphytéotiques passés en 2009 et en 2010 sont éligibles au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée quel que soit leur montant. »
II. - Les éventuelles pertes de recettes pour l'État résultant du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à rendre les baux emphytéotiques administratifs éligibles au FCTVA. Mais je crains qu’il ne subisse le même sort que l’amendement précédent...
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Je comprends l’initiative de M. Philippe Marini, au nom de la commission des finances, mais l’adoption de son amendement reviendrait à suspendre temporairement deux garde-fous qui avaient été institués lors de l’examen du projet de loi relatif aux contrats de partenariat : d’une part, le seuil de 10 millions d’euros, même si le décret n’est pas encore intervenu, et, d’autre part, l’évaluation préalable obligatoire. Ce n’est qu’à ces deux conditions que les baux emphytéotiques administratifs devenaient éligibles au Fonds de compensation pour la TVA.
La dispense d’évaluation préalable de ce type de contrat ne me paraît pas souhaitable. En effet, le Conseil constitutionnel est favorable à l’idée d’une évaluation préalable des PPP, qui sont une forme dérogatoire au sein de la commande publique, afin de déterminer le type de contrat le plus adapté au projet à réaliser.
Certes, la phase d’évaluation préalable peut durer quelques semaines, voire quelques mois, mais elle est bénéfique à long terme puisqu’elle évite dans certains cas de s’engouffrer dans des dossiers très onéreux, mal gérés, qui sont ensuite stigmatisés par la Cour des comptes et par l’opinion publique.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre. Je partage l’avis de Mme le rapporteur.
En ce qui concerne le FCTVA, le Gouvernement a eu son compte hier soir. (Sourires.) Il ne souhaite donc pas aggraver la situation.
J’ajoute que cet amendement recèle peut-être un effet pervers dans la mesure où l’éligibilité au FCTVA conduirait à dévitaliser les PPP, ce qui n’est sans doute pas l’objectif recherché par l’auteur de l’amendement.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3 bis
En 2009 et 2010, par dérogation aux articles 7 et 8 de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat et L. 1414-7 à L. 1414-9 du code général des collectivités territoriales, la personne publique peut prévoir que les modalités de financement indiquées dans l'offre finale présentent un caractère ajustable. Mention en est portée dans l'avis d'appel public à la concurrence.
Le candidat auquel il est envisagé d'attribuer le contrat présente le financement définitif dans un délai fixé par le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice. À défaut, le contrat ne peut lui être attribué et le candidat dont l'offre a été classée immédiatement après la sienne peut être sollicité pour présenter le financement définitif de son offre dans le même délai.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 129, présenté par MM. Sueur, Botrel, Raoul et Repentin, Mme Bricq, M. Courteau, Mme Herviaux, MM. Patriat, Hervé, Muller et Rebsamen, Mme M. André, MM. Marc, Guillaume, Sergent, Angels, Teston, Boutant, Fichet et Massion, Mme Le Texier, MM. Collombat, Bourquin, Jeannerot, Demerliat et Anziani, Mme Ghali et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. J’ai l’impression que, avec l’article 3 bis, les rédacteurs du projet de loi cherchent à faire encore plus fort.
Il ne vous aura pas échappé, mes chers collègues, que cet article vise à permettre à un candidat à un contrat de partenariat de présenter des offres finales qui ne seront pas accompagnées du bouclage financier définitif. Cette disposition est exorbitante. La conclusion d’un contrat de partenariat ne va pas sans difficulté : il faut prouver qu’il est plus avantageux pour la collectivité, il faut choisir « en bloc », en une seule fois, l’architecte, toutes les entreprises qui assureront les travaux publics, la banque ou les banques qui financeront le projet, l’exploitant, les entreprises qui assureront l’entretien, la maintenance.
La complexité tient aussi au fait qu’il faut présupposer que l’agrégat présenté par l’entreprise A est de meilleure qualité que celui de l’entreprise B.
Il en va tout autrement lorsque l’on procède par choix successifs. On commence par choisir un architecte – la profession est d’ailleurs inquiète –, puis on choisit les entreprises les mieux-disantes pour réaliser les travaux, les banques qui apporteront les financements, éventuellement après les avoir mises en concurrence, les entreprises qui assureront l’exploitation, la maintenance, l’entretien.
Ces règles sont claires. Ce sont les règles des marchés publics et des délégations de service public.
Mes chers collègues, les PPP offrent bien sûr une facilité. Aujourd’hui, pour les prisons, par exemple, c’est magnifique : vous construisez et vous ne payez rien ! On dit au maire : vous allez construire cet équipement, et cela ne va rien coûter pour le moment !
On parle souvent du développement durable dans cette enceinte, comme dans beaucoup d’autres, mais à qui laissera-t-on la facture ? Qui va payer dans dix ans, dans vingt ans, dans trente ans, voire dans quarante ans ? C’est comme le crédit revolving : cher client, on vous accorde un prêt, mais rassurez-vous, pour le moment, cela ne vous coûtera rien !
Il y a déjà un pari, en raison d’un certain nombre d’aléas inévitables ; or, pour relancer l’activité dans notre pays, vous proposez de surcroît, monsieur le ministre – j’en suis d’ailleurs très étonné –, un dispositif sans précédent dans notre droit, qui n’existe dans aucune procédure relative aux marchés publics : les candidats pourraient présenter leur candidature et être éventuellement choisis, sans fournir le bouclage financier définitif avant six mois !
Vous vous êtes émus tout à l’heure du délit de favoritisme, mes chers collègues. J’estime que ce type de dispositif où l’on est candidat sans annoncer son financement et où l’on peut réajuster ce dernier après présente un grand risque eu égard au délit de favoritisme.
Si vous voulez encombrer les tribunaux administratifs, les cours administratives d’appel, le Conseil d’État, sans parler des instances pénales, il faut voter ce type de disposition qui est, je le répète, tout à fait exorbitante !
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par Mme Lamure, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Pour les contrats de partenariat dont l'avis d'appel public à la concurrence est publié antérieurement au 1er janvier 2011, par dérogation aux articles 1er, 7 et 8 de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat et aux articles L. 1414-1 et L. 1414-7 à L. 1414-9 du code général des collectivités territoriales, la personne publique peut prévoir que l'offre finale des candidats garantit au moins un tiers du besoin de financement du projet.
Dans ce cas, le candidat ayant présenté l'offre la plus avantageuse soumet le financement définitif dans un délai fixé par le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice et qui ne peut être supérieur à six mois. Le financement définitif doit être assuré au moins à 80 % par le candidat et ne peut conduire à un bouleversement des conditions de son offre finale.
Si le candidat ne respecte pas les dispositions de l'alinéa précédent, le contrat ne peut lui être attribué et le candidat dont l'offre a été classée immédiatement après la sienne peut être sollicité pour présenter le financement définitif de son offre dans les conditions de l'alinéa précité.
La mention de l'ensemble de ces dispositions est portée dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans un avis rectificatif.
La parole est à Mme le rapporteur, pour défendre l’amendement n° 6 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 129.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Dans la mesure où le Sénat a adopté l’amendement n° 23, la commission retire l’amendement n° 6.
S’agissant de l’amendement n° 129, la commission émet un avis défavorable, car il lui paraît nécessaire, en période de crise financière, d’assouplir certaines règles.
M. le président. L’amendement n° 6 est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 129 ?
M. Patrick Devedjian, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable. Tout d’abord, la disposition est temporaire, puisqu’elle n’est prise que pour cette période de crise. Par ailleurs, elle ne fait que refléter la situation actuelle : les taux financiers changent très vite en ce moment, le marché étant extrêmement mobile.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. On nous dit qu’il est nécessaire, en période de crise, d’assouplir les procédures. Je veux bien l’admettre. Mais aux termes de la disposition que vous vous apprêtez à voter, mes chers collègues, on pourra présenter une offre sans en annoncer les modalités financières, et le candidat retenu pourra présenter dans les mois suivants de nouvelles modalités de financement. Mes chers collègues, je vous assure qu’il ne faut pas voter une telle mesure, et ce n’est pas une question de politique ! Je pense avoir ainsi tout dit !