M. Jacky Le Menn. Comme vous le savez, madame la ministre, car nous en avons parlé à plusieurs reprises, nous nous attachons à limiter les impacts négatifs de la T2A non seulement sur les usagers du système de santé, mais également sur les établissements publics.
Par ailleurs, nous critiquons la convergence tarifaire public-privé, et il semble que nous ayons été entendus, puisque vous avez annoncé au président de la Fédération hospitalière de France que vous acceptiez de la reporter de 2012 à 2018. Nous ne doutons donc pas que vous tiendrez également compte de nos arguments.
On le sait, l’adoption d’une tarification à l’activité des établissements de santé pour une activité de médecine, chirurgie, obstétrique a un impact non négligeable sur l’offre de soins. De fait, la répartition des ressources au sein des établissements est désormais principalement régie par les recettes constatées et attendues de l’activité.
Malheureusement, ce principe entre trop fréquemment en contradiction avec les pratiques médicales, les prises en charge pluridisciplinaires et les objectifs de santé publique.
La pensée médicale se retrouve bridée au profit d’une logique purement comptable, ce qui n’est évidemment pas acceptable.
Par cet amendement, nous vous proposons, mes chers collègues, de valoriser les principes d’une « médecine lente » dans notre système de tarification, laquelle nécessite un travail pluridisciplinaire associant médecins et personnels paramédicaux, dont je n’énumérerai pas la liste. Les actes de ces derniers ne sont parfois ni tarifés ni pris en compte dans le calcul des coûts fondant les tarifs.
Le temps de consultation et de prise en charge ambulatoire s’en trouve sensiblement allongé et sans commune mesure avec certains actes, prises en charge et séjours plus standardisés.
La prise en charge ambulatoire de certaines pathologies ne peut s’inscrire sans dommage dans la logique de la T2A. De plus, l’absence de reconnaissance de cette « médecine lente » menacerait des pans entiers d’activité hospitalière et fragiliserait l’accès aux soins de nombreux usagers de notre système de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Nous avons tous le souci que la T2A tienne compte des spécificités du secteur public, un souci d’ailleurs partagé par Mme la ministre, qui a pris, voilà quelques jours, la décision de reporter la convergence intersectorielle. Mais l’adoption de cet amendement ne résoudrait pas le problème. De plus, son rapport avec les questions abordées dans ce projet de loi n’est pas évident.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur Le Menn, j’ai déjà pris un certain nombre de dispositions visant à faire évoluer les tarifications en fonction des besoins des patients.
C’est ainsi que, dans la version 11 de la classification commune des actes médicaux, j’ai introduit deux modulations importantes, dont j’ai déjà eu l’occasion de vous parler.
Les tarifs affectés aux séjours de médecine justifiant d’un niveau de sévérité élevé – 3 ou 4 – ont progressé en 2009 aussi bien pour les établissements publics que pour ceux du secteur privé. Par ailleurs, j’ai également décidé d’identifier, dans la tarification, les financements des surcoûts engendrés par l’accueil des populations précaires, qui demandent précisément une prise en charge plus longue et un accompagnement plus important.
Véritablement, ces dispositions sont particulièrement profitables à l’hôpital public.
Les consultations dites longues sont financées dans le cadre des missions d’intérêt général ; des travaux sont actuellement en cours et pourraient trouver une réponse soit dans le cadre strict de la tarification à l’activité, soit dans le cadre du chantier qui concerne la classification commune des actes médico-cliniques.
Ces mesures relèvent du champ réglementaire et non du champ législatif. Sachez toutefois que la question de la modulation pour prendre en compte ces spécificités est vraiment très importante à mes yeux. Je ne remets pas ce chantier aux calendes grecques ; j’ai déjà commencé à agir et nombre de dispositions pratiques ont été prises.
M. le président. L'amendement n° 370 rectifié, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les établissements de santé mentionnés à l'article L. 3222-1 du code de la santé publique ne peuvent se voir appliquer les dispositions prévues au présent projet de loi.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Avec cet amendement, notre objectif est de garantir que les dispositions de ce projet de loi ne s’appliqueront pas aux établissements psychiatriques. En effet, de notre point de vue, toute réforme de la psychiatrie nécessite un large débat préalable avec l’ensemble des acteurs concernés.
À la suite du meurtre dramatique d’un étudiant par un malade mental à Grenoble, le Président de la République a annoncé, le 2 décembre 2008, une nouvelle réforme de l’hospitalisation psychiatrique concernant, notamment, l’internement d’office et l’instauration d’une obligation de soins.
Cette réponse se plaçait sur le seul registre sécuritaire, celui de la criminalisation de la maladie mentale, loin de l’objectif d’apaiser une souffrance, de ne pas stigmatiser ceux qui souffrent, loin aussi de la nécessité de s’attaquer à la situation catastrophique de la psychiatrie publique.
Ce drame et les annonces qui ont suivi ont suscité un grand émoi parmi les professionnels de la psychiatrie, qui ne se reconnaissent pas non plus dans les propositions du rapport d’Édouard Couty Missions et organisation de la santé mentale et de la psychiatrie en santé mentale.
Rendu public le 29 janvier 2009, ce rapport était supposé préfigurer une réforme sur les hospitalisations d’office et une réorganisation territoriale de l’offre de soins en santé mentale, réforme destinée à adapter l’organisation de la psychiatrie au projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, dit HPST.
En juin 2003, des états généraux de la psychiatrie avaient pourtant permis d’élaborer vingt-deux propositions sur l’organisation des soins en psychiatrie et en santé mentale, propositions qui ne sont absolument pas prises en compte dans le rapport Couty.
Les psychiatres réunis autour du Manifeste pour la création d’un mouvement pour la psychiatrie voient dans ce rapport l’annonce du démantèlement de la politique de secteur dans sa double dimension de proximité et de continuité des soins, pivots de la psychiatrie de secteur. Ils considèrent que les propositions du rapport Couty laissent les soignants « dans la position d’instruments d’un triple forfait [...] : évaluer, expertiser et enfermer. ».
Le 7 février, ils étaient deux mille, réunis pour dire non à une instrumentalisation de leur profession, pour rejeter l’amalgame entre folie et dangerosité, et la logique sécuritaire. Ils refusent une politique faisant de la psychiatrie une gardienne de l’ordre social, en contradiction avec les finalités du soin.
Ils demandent, avant toute mesure législative ou réglementaire, un moratoire donnant le temps d’engager un débat sérieux avec l’ensemble de la profession, seul moyen de garantir une réponse sanitaire de haut niveau aux besoins des usagers de la psychiatrie.
Monsieur le rapporteur, dans votre rapport sur la prise en charge psychiatrique en France, vous avez souligné que, compte tenu de la prévalence des troubles psychiatriques, la « santé mentale devrait être une priorité de la santé publique ».
Vous avez, entre autres difficultés, pointé « l’insuffisance des moyens hospitaliers » et le problème soulevé par la suppression « en France, entre 1985 et 2005, de près de trente mille lits et places en psychiatrie ».
Vous avez encore indiqué que les recommandations du rapport Couty ne pouvaient être imposées à la profession et vous avez proposé « l’organisation d’états généraux de la santé mentale », réunissant l’ensemble des professionnels concernés, « devant servir de base au dépôt d’un projet de loi » d’organisation territoriale.
Cela rejoint les préoccupations qui fondent notre amendement, lequel trouvera, j’en suis certaine, un écho favorable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet article additionnel avant l’article 1er présente beaucoup d’intérêt, madame la sénatrice.
Vous demandez que l’État réfléchisse avec le Parlement à un texte législatif sur les maladies psychiatriques et les questions de santé mentale. Vous avez donc lu le rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé, l’OPEPS, sur l’état de la psychiatrie en France.
Le rapport Couty est extrêmement important et intéressant à étudier, même s’il nécessite sans doute quelques aménagements. Lors du petit tour de France que j’ai fait à l’occasion du projet de loi dit HPST, j’ai rencontré de nombreux psychiatres : tous ne sont pas défavorables aux conclusions de ce rapport, bien au contraire !
Toutefois, légiférer sur la psychiatrie ou sur la santé mentale, ce n’est pas légiférer sur l’hôpital psychiatrique ! Celui-ci reste un établissement public de santé et, en tant que tel, il sera soumis aux dispositions de la future loi HPST.
Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je voudrais rappeler aux auteurs de l’amendement, particulièrement à Mme David qui l’a défendu, que la notion de centre hospitalier spécialisé a disparu depuis 1991 ; cela fait presque vingt ans ! Maintenant, le cadre juridique qui s’impose aux établissements psychiatriques est le même que pour tous les établissements publics de santé. Il n’y a donc pas lieu de créer un cadre juridique dérogatoire pour les hôpitaux psychiatriques.
Quant aux garanties accordées aux patients hospitalisés sous contrainte, elles sont évidemment indispensables au regard des principes relatifs aux libertés individuelles. Ce qui est prévu dans le projet de loi ne les modifie ni de près ni de loin, et n’est nullement contradictoire avec le projet de réforme sur l’hospitalisation sous contrainte.
Si des dispositions législatives sont sans doute nécessaires sur la psychiatrie, ses spécificités, et sur l’hospitalisation sous contrainte, le rapport que j’ai demandé à M. Édouard Couty ne vaut pas feuille de route : c’est une base de réflexion ! Ce rapport a d’ailleurs suscité un large débat parmi les professionnels, les médecins psychiatres, bien sûr, et les organisations syndicales représentatives.
J’ai d’ores et déjà participé à plusieurs réunions de travail, dont l’une a eu lieu à l’Élysée, sous la présidence du Président de la République ; de nombreux psychiatres de toutes tendances – et elles sont nombreuses en psychiatrie ! – ont été reçus.
La discussion reste ouverte. Le projet de réforme, encore en discussion, n’est pas finalisé et fait l’objet de nombreuses concertations. Tout le monde sera entendu.
Madame la sénatrice, le point cardinal est pour moi la sectorisation. Je l’ai dit lors de la réunion de travail avec le Président de la République, nous ne reviendrons pas sur la sectorisation, qui est le fondement de la psychiatrie française et le restera.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Mme la ministre n’entend pas remettre en cause la sectorisation ; nous en prenons acte. C’était l’une des craintes que nous avions émises.
Les hôpitaux qui soignent les personnes atteintes de troubles mentaux devraient, selon nous, être préservés de l’application de ce projet de loi. En effet, ces établissements spécialisés en santé mentale sont, par nature, différents des établissements de santé « généralistes », dans la mesure où les patients qui y sont accueillis peuvent en sortir apaisés, mais rarement guéris.
M. Guy Fischer. Les différences sont telles que, jusqu’à présent, madame la ministre, les établissements psychiatriques échappaient à la tarification à l’activité, une distinction qui risque de disparaître prochainement si le Gouvernement suivait les conclusions du rapport Couty, lequel n’est rien d’autre qu’un appendice à ce projet de loi ; vous l’avez dit vous-même.
C’est toujours la même logique comptable qui sous-tend aussi bien ce rapport que votre projet de loi. La refonte de la psychiatrie, qui figure parmi les recommandations du rapport, fait exploser l’organisation spécifique de la psychiatrie publique. Si notre amendement n’était pas adopté, le projet de loi s’appliquerait également à la psychiatrie et renforcerait encore la prédominance de l’économie sur la satisfaction des besoins.
Ce rapport préconise l’application, d’ici à 2010, de la T2A au secteur psychiatrique, au moment même où celle-ci est contestée pour les activités de médecine, de chirurgie et d’obstétrique. Ce couplage avec le projet de loi nous laisse très dubitatifs.
Nous sommes en désaccord total avec la conception sécuritaire de la psychiatrie que tente d’imposer le Président de la République, car elle est en contradiction avec les besoins de la société et des patients accueillis. En revanche, elle est parfaitement compatible avec une logique de diminution des dépenses passant, notamment, par une réduction des soins.
Le Président de la République a annoncé une réforme sur l’hospitalisation sous contrainte d’ici à juin 2009. Il nous paraît indispensable que celle-ci traite à la fois de la nature des soins dispensés et – on en vient à notre amendement – de l’organisation hospitalière permettant la réalisation de ces soins.
Il convenait de le préciser après les déclarations du Président de la République. Ce dernier, en effet, entend légiférer après chaque fait divers et répond de cette manière aux problèmes de société qui se posent et qui, en particulier pour les établissements psychiatriques, ne trouvent pas de solution dans la législation proposée.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 370 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel après l'article 1er (précédemment réservé)
M. le président. Nous en revenons à l’amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 1er, qui a été précédemment réservé.
L'amendement n° 137, présenté par M. Desessard, Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les établissements privés autres que les établissements privés non lucratifs, les tarifs intègrent les honoraires des médecins libéraux. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, après l’averse d’amendements du Gouvernement qui, cet après-midi, a été à l’origine d’une suspension d’une heure trente de nos travaux, je pensais que la pluie cesserait. Eh bien ! non, il en tombe toujours, puisque l’on vient de nous distribuer l’amendement n° 1330 ! J’ignore comment nous allons pouvoir examiner tous ces nouveaux amendements...
J’en viens à l’amendement que j’ai déposé à temps pour permettre à tous mes collègues, à la commission et au Gouvernement de l’examiner.
L’un des arguments le plus souvent avancés en faveur de la convergence tarifaire entre les hôpitaux et les cliniques privées, via le passage à 100% de tarification à l’activité, la T2A, repose sur une comparaison des coûts de prise en charge des patients. Mais cet argument est biaisé.
D’abord, les types de pathologies prises en charge par les hôpitaux publics et la diversité des catégories de patients accueillis, du point de vue tant de la lourdeur de leur pathologie que de leurs difficultés sociales, donnent à l’hôpital un rôle beaucoup plus large que celui qui consiste à être un simple lieu de délivrance de soins.
De plus, les honoraires des médecins sont inclus dans la tarification des actes hospitaliers, mais ne le sont pas dans les prix des cliniques privées.
Aussi, si l’on doit rapprocher le mode de fonctionnement des hôpitaux publics de celui des établissements privés à but lucratif, cette convergence doit également pouvoir s’effectuer dans l’autre sens, en imposant aux cliniques privées d’inclure dans leur tarification les coûts des honoraires des médecins libéraux qui y exercent.
C’est ce que nous vous proposons avec cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Toutes les études sur la convergence intégrant évidemment cette particularité, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Comment les études peuvent-elles comparer le prix de l’acte dans les cliniques privées et celui des actes des médecins libéraux ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. J’ai déjà répondu à cela !
M. Jean Desessard. Les études sont-elles sérieuses ? Comment sont-elles réalisées ? À la louche ? Est-ce que l’on fait des estimations, des moyennes ? Une consolidation du coût des actes et de l’ensemble des services assurés par les médecins libéraux et tarifés a-t-elle été réalisée ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur Desessard, l’ATIH, l’Agence technique pour l’information hospitalière, établit un rapport régulier sur la T2A J’ai remis ce rapport à ceux de vos collègues de l’Assemblée nationale qui m’en avaient fait la demande lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale et je vous le donnerai bien entendu sans aucune difficulté. Vous pourrez ainsi constater les écarts qui existent entre les établissements publics et privés, et qui sont très largement en faveur de l’hôpital public, ce qui est bien normal.
M. Jean Desessard. Alors, pourquoi ne pas le mettre dans la loi ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 137.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels après l'article 3 (précédemment réservés)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 215, présenté par M. Vanlerenberghe, Mmes Dini et Payet, M. J. Boyer et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 6152-6 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 6152-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 6152-7. - Dans un délai de deux ans suivant leur démission, il est interdit aux praticiens hospitaliers à titre permanent d'ouvrir un cabinet privé ou d'exercer une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un laboratoire privé d'analyses de biologie médicale ou une officine de pharmacie où ils puissent rentrer en concurrence directe avec l'établissement public dont ils sont démissionnaires.
« Les modalités d'application de cet article sont fixées par voie réglementaire. »
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. L'objet de cet amendement est simple : il vise à créer une clause de non-concurrence temporaire à l’égard des médecins au profit du service public hospitalier.
Une telle clause existe dans beaucoup d’autres professions, et je m’étonne de ne pas la voir appliquée aux médecins hospitaliers démissionnaires pendant un délai d’au moins deux ans.
M. le président. L'amendement n° 318, présenté par MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Le Texier et Printz, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de 2 ans suivant leur démission, il est interdit aux praticiens hospitaliers à titre permanent d'ouvrir un cabinet privé ou d'exercer une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un laboratoire privé d'analyses de biologie médicale ou une officine de pharmacie où ils puissent rentrer en concurrence directe avec l'établissement public dont ils sont démissionnaires. Les modalités d'application de cet article sont fixées par voie réglementaire.
La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.
M. Jean-Jacques Mirassou. Cet amendement est de la même inspiration que le précédent. Il a lui aussi pour objet de permettre l’introduction d’une disposition visant à protéger le service public hospitalier en cas de démission de praticiens hospitaliers contre une concurrence « déloyale » de ces derniers, qui seraient tentés d’ouvrir un cabinet libéral ou d’exercer une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un laboratoire privé de biologie médicale ou une officine de pharmacie.
Il convient de noter que le code de déontologie médicale admet une restriction au principe de liberté d’installation des médecins afin de les protéger de la concurrence déloyale que pourrait leur faire un autre confrère. Or, en l’état, le service public hospitalier ne bénéficie d’aucune protection de cette nature, alors que le risque évoqué est tout à fait évident.
J’ajoute que les situations de démission de praticiens hospitaliers au profit de structures concurrentes sont d’autant plus problématiques que les établissements privés qui les recrutent sont, eux, protégés par des clauses de non-concurrence.
M. le président. L'amendement n° 401, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 6152-6 du code de la santé publique, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Dans un délai de deux ans suivant leur démission, il est interdit aux praticiens hospitaliers titulaires d'ouvrir un cabinet privé ou d'exercer une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un laboratoire privé d'analyse de biologie médicale ou une officine de pharmacie où ils puissent entrer en concurrence directe avec l'établissement public de santé dont ils sont démissionnaires.
Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application de cet article. »
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Les cliniques privées sont aujourd’hui plus que tentées de débaucher des médecins hospitaliers, notamment lorsqu’ils ont des spécialités chirurgicales, en faisant de l’argument financier le principal moteur de ce débauchage.
Or nous connaissons un déficit de médecins hospitaliers en raison du numerus clausus ou encore du nombre important de départs à la retraite. C’est d’ailleurs en partie pour cette raison que les hôpitaux recrutent des médecins étrangers, auxquels, de surcroît, ils versent des salaires moins élevés qu’aux médecins français.
Aujourd’hui, les CHU forment des internes et des chefs de clinique et cette formation est reconnue par tous comme étant de qualité.
Les cliniques privées ne s’y trompent pas : elles n’hésitent pas à approcher ces praticiens hospitaliers en leur faisant miroiter des salaires attractifs et des dépassements d’honoraires très rentables. C’est une véritable saignée de l’hôpital public qui est ainsi organisée.
Si rien n’est fait, c’est la garantie d’une mort programmée de l’hôpital public, car il est sous-financé, les salaires n’y sont pas suffisamment élevés et les conditions de travail y sont dégradées.
Afin de prévenir une pénurie de praticiens hospitaliers dans nos hôpitaux publics, il convient de les protéger de toute concurrence déloyale avec les cliniques privées.
Le principe d’une protection contre toute concurrence déloyale constitue déjà une dérogation au principe de libre installation des médecins.
Les établissements de santé privés sont, eux aussi, protégés par des clauses de non-concurrence. De manière générale, ces clauses de non-concurrence existent dans les entreprises, mais je n’ai pas l’impression, madame la ministre, que vous les considériez comme « se heurtant aux principes généraux de la liberté d’entreprendre et de la liberté du travail ».
Lorsqu’il est question du secteur privé, les clauses de non-concurrence destinées à lutter contre toute concurrence déloyale ne semblent guère vous gêner. En revanche, elles semblent impossibles à mettre en œuvre quand il s’agit de protéger l’hôpital public.
Mme Mireille Schurch. Nous demandons donc, par cet amendement, que si un praticien hospitalier démissionne, il ne puisse pas, pendant deux ans, ouvrir un cabinet privé ou exercer une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un laboratoire privé d’analyse de biologie médicale ou une officine de pharmacie.
M. le président. L'amendement n° 598 rectifié ter, présenté par MM. Chevènement, Marsin, Mézard, Milhau, Vall et Charasse, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 6152-5 du code la santé publique, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les praticiens mentionnés au 1° de l'article L. 6152-1 qui démissionnent de leurs fonctions ne peuvent, durant une période de deux ans suivant leur démission, ouvrir un cabinet privé ou exercer une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un laboratoire privé d'analyses de biologie médicale ou une officine de pharmacie situés dans le même territoire de santé, au sens de l'article L. 1434-14, ou dans le même secteur que l'établissement public de santé où ils étaient affectés. Les modalités d'application de cet article sont fixées par voie réglementaire. »
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
M. Jean-Pierre Chevènement. Cet amendement a un objet similaire à celui des amendements précédents, à commencer par celui de M. Jean-Marie Vanlerenberghe : il vise à établir une clause de non-concurrence pour les praticiens démissionnant d'un établissement public, comme il en existe déjà pour les médecins exerçant en libéral ou les praticiens du secteur privé. C’est là une mesure de bon sens.
En réalité, tous ces amendements n’en forment qu’un seul. Je retire donc mon amendement, monsieur le président, au profit de celui de M. Vanlerenberghe.