M. le président. La parole est à M. Jackie Pierre. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jackie Pierre. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Madame le ministre, en décembre 2008, dans le cadre du plan de relance de l’économie française élaboré pour affronter la crise structurelle sans précédent qui nous a frappés, ainsi que de nombreux autres pays dans le monde, des mesures spécifiques ont été prises pour aider le secteur automobile, particulièrement touché.
Ainsi, une prime à la casse de 1 000 euros pour l’achat d’un véhicule neuf émettant moins de 160 grammes de CO2 a été instaurée. Ce dispositif, le plus populaire du plan de relance, est prévu pour durer jusqu’à la fin de 2009.
Je le rappelle, pour assurer l’avenir de notre outil industriel automobile et préserver ce secteur stratégique pour notre économie et nos emplois, un pacte automobile a été concrétisé dans le collectif budgétaire du mois d’avril dernier.
Or le ministre chargé de la mise en œuvre du plan de relance et le ministre de l’industrie viennent d’annoncer que la prime à la casse ne pourrait être maintenue indéfiniment.
Nos voisins allemands font de même, Berlin ayant exclu d’étendre ce dispositif.
Certains journaux titrent déjà sur une fin trop rapide de la prime en rappelant les effets dommageables, dans le passé, de l’arrêt de la « Balladurette » et de la « Jupette ».
En outre, ces déclarations de nos ministres n’ont pas manqué de susciter de multiples réactions chez les constructeurs, chez les sous-traitants, nombreux dans les Vosges, ainsi que dans les réseaux de vente d’automobiles, réactions à la hauteur des résultats, qui semblent positifs.
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer quel est le premier bilan de ce dispositif, sachant qu’il a été conçu pour soutenir l’activité, écouler les stocks et faire repartir la production ?
D’autre part, pouvez-vous nous préciser dans quel délai et suivant quelles modalités vous envisagez de l’arrêter ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le sénateur, le bilan de la prime à la casse est positif.
Nous nous étions fixé comme objectif de maintenir si possible la production de 2009 au niveau de celle de 2008.
Nous constatons, au terme du premier semestre de 2009, une progression de 0,2 % de la commercialisation des véhicules sur le territoire français.
Nous avions escompté que cette mesure remporterait un certain succès et nous avions prévu une enveloppe budgétaire de 220 millions d’euros. Or le succès rencontré par la prime à la casse – vous en avez rappelé les modalités : 1 000 euros pour le retour d’un véhicule de plus de dix ans d’âge en contrepartie de l’achat d’un véhicule qui ne consomme pas plus de 160 grammes de CO2 par kilomètre – a été tel que nous estimons le coût de la mesure à 390 millions d’euros pour le budget de l’État.
L’objectif que nous nous étions fixé est donc non seulement atteint, mais dépassé.
Ce résultat est bénéfique pour notre économie et pour la santé de nos entreprises, au point, d’ailleurs, qu’un certain nombre de constructeurs automobiles ont relancé la production.
Ainsi, les chaînes de fabrication des petits modèles de PSA se sont remises à tourner en horaires 2/8, et Renault a été contraint – nous en sommes heureux – de rapatrier de Slovénie à Flins une partie de la fabrication des petits véhicules.
La prime à la casse est de toute évidence un succès. Nous devons désormais absolument éviter une sortie du dispositif brutale qui se solderait, comme cela a déjà été le cas dans le passé, par une chute de la production et des ventes de véhicules de 20 %. Le retour à l’équilibre avait alors pris trois ans.
Nous étudions actuellement plusieurs dispositifs permettant une sortie « en sifflet », c’est-à-dire progressive, de ce mécanisme à partir de 2010.
Nous serons très attentifs aux modalités, au cadrage et au calendrier, et nous tiendrons compte à la fois de nos finances publiques et de la situation économique. Il est bien évident que la construction automobile est un secteur industriel que nous devons soutenir. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Bout. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Brigitte Bout. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Encore ?
Mme Brigitte Bout. Je ne poserai, moi, qu’une seule question, chère collègue.
Depuis plus d’un mois, le peuple iranien connaît une situation dramatique. Les règles élémentaires de la démocratie, comme le respect des droits de l’homme, sont bafouées.
Le 23 juin 2009, des ressortissants britanniques en poste diplomatique à Téhéran ont été expulsés du territoire iranien.
Depuis le 1er juillet 2009, une Française, Clotilde Reiss, établie depuis cinq mois en tant que lectrice de français à l’université technique d’Ispahan, est accusée à tort d’espionnage et retenue par les autorités iraniennes, lesquelles sont en passe de faire de cette jeune femme un symbole face à l’Occident.
Originaire de la région Nord-Pas-de-Calais et ancienne élève de l’Institut d’études politiques de Lille, la jeune française doit savoir que ses compatriotes ne l’oublient pas et la soutiennent.
Monsieur le ministre, pour la deuxième fois en dix jours, vous avez pu vous entretenir avec votre homologue iranien au sujet de Clotilde Reiss.
Pouvez-vous nous tenir informés de la situation de cette jeune femme, qui n’est en rien impliquée dans les faits dont on l’accuse et mérite de recouvrer la liberté ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Didier Boulaud. Interrogez-le sur la Turquie !
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Madame le sénateur, notre ambassadeur a joint plusieurs fois au téléphone Clotilde Reiss et l’a rencontrée une fois ; vous avez bien raison de réclamer la libération immédiate de la jeune femme, puisqu’elle est innocente.
Elle est dans une prison épouvantable,…
M. Didier Guillaume. Comme en France !
M. Bernard Kouchner, ministre. … celle d’Evin. Comme elle parle couramment le persan - elle était en effet lectrice de français à l’université technique d’Ispahan -, elle peut au moins s’entretenir avec ses codétenues.
Nous l’avons trouvé résistante, vive, et évidemment désireuse, avant tout, d’obtenir sa libération.
Nous faisons tout, au plan juridique, pour répondre aux cinq chefs d’accusation qui pèsent sur elle. L’un d’eux, invraisemblable, est celui d’espionnage : elle n’a pas vingt-quatre ans, était en Iran depuis cinq mois et faisait son travail, ce que tout le monde a constaté. Pourquoi est-elle accusée d’espionnage ? Parce qu’elle a pris des photos avec son téléphone portable et les a envoyées à un ami français à Téhéran !
Cette accusation est ridicule.
Nous continuons à peser le plus possible sur le gouvernement iranien.
Je réponds au passage à Mme Voynet : oui, nous sommes témoins d’un mouvement qui nous semble promis à un avenir au sein du peuple iranien ; oui, nous constatons, pour la première fois depuis une trentaine d’années, l’existence de désaccords majeurs au sommet de la hiérarchie chiite. Il s’agit d’une lutte de pouvoir comme il s’en trouve dans tous les pays.
Nous avons appris aujourd’hui l’arrestation, le licenciement ou le limogeage, je ne sais quel terme employer, du patron de l’agence iranienne de l’énergie atomique, M. Gholamreza Aghazadeh.
Que lui reproche-t-on ? Il a simplement fait savoir publiquement au peuple iranien quelles étaient les questions que posait l’Agence internationale de l’énergie atomique au gouvernement iranien.
Encore une fois, mesdames, messieurs les sénateurs, nous prenons des nouvelles de Clotilde Reiss le plus souvent possible. Nous sommes en contact deux à trois fois par jour avec notre ambassade, notamment avec les personnes chargées du dossier, pour, un jour, le plus vite possible, faire libérer Clotilde ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
finances locales
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Frécon.
M. Jean-Claude Frécon. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
M. Didier Boulaud. Il est déjà parti !
M. Jean-Claude Frécon. Le Gouvernement devait présenter publiquement, la semaine dernière, la réforme de la taxe professionnelle. Or cette annonce a été repoussée pour permettre au Président de la République ainsi qu’à M. le Premier ministre de rendre les derniers arbitrages.
Il est urgent de jouer franc-jeu avec les collectivités territoriales, qui vont commencer d’envisager leurs projets pour 2010, qui ont répondu largement présentes dans la mise en œuvre du plan de relance et qui ne peuvent rester plus longtemps dans l’incertitude face au devenir de leur budget.
M. le Premier ministre leur doit, ainsi qu’à nos concitoyens, des réponses claires.
Tenu par la promesse électorale du candidat Nicolas Sarkozy faite au MEDEF, le Gouvernement va procéder, coûte que coûte, à la suppression de la taxe professionnelle, malgré un contexte économique des plus défavorables et des finances publiques dans un état désastreux.
Le rapporteur général de la commission des finances du Sénat réclame, dans un rapport que nous allons discuter cet après-midi, « d’attendre des jours meilleurs ». Les socialistes sont favorables à une réforme de la taxe professionnelle ambitieuse pour le développement des territoires et des entreprises, mais ils ne veulent pas qu’elle ait lieu dans la précipitation estivale.
Nous soutenons l’instauration d’un véritable impôt économique local, dynamique, à l’opposé de la réforme proposée.
Outre la contribution sur la valeur ajoutée, qui ne représente qu’à peine la moitié du montant de la perte de recettes fiscales, M. le Premier ministre prévoit de transférer aux collectivités territoriales des parties d’impôts nationaux et des dotations, sur lesquelles elles n’auront strictement aucune marge de manœuvre.
De plus, le Gouvernement, en proposant une réforme uniquement axée sur la taxe professionnelle, fait l’impasse sur une réforme globale de la fiscalité locale, notamment des impôts reposant sur les ménages.
Nous savons tous, ici, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, que la suppression de la taxe professionnelle aura pour conséquence inéluctable la hausse des impôts payés directement par nos concitoyens : c’est inacceptable !
M. Didier Boulaud. C’est ce qu’ils veulent !
M. Jean-Claude Frécon. Cette réforme aura aussi un coût important pour l’État, et creusera un trou qu’il faudra de toutes les manières combler.
Or nous refusons que la taxe carbone serve de palliatif budgétaire. D’ailleurs, sur ce point, tous les ministres ne sont pas unanimes.
M. le Premier ministre ne juge-t-il pas dangereux de maintenir une telle réforme, incomplète et inadaptée en ces temps de crise, alors que nos collectivités ont besoin de visibilité ? Sans visibilité, en effet, elles feront moins de projets, donc moins d’investissements.
Quel scénario va-t-il donc proposer aux collectivités locales ? Alors qu’il les a fortement sollicitées pour le plan de relance, osera-t-il porter un coup d’arrêt à l’investissement local en réduisant ainsi leurs moyens financiers ?
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Claude Frécon. A-t-il l’intention de profiter de la période estivale pour asphyxier nos collectivités territoriales ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.- Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur Frécon, vous êtes un trop fin spécialiste…
M. Jean-Marc Pastor. Cela commence mal !
Mme Christine Lagarde, ministre. … de ces questions de financement des collectivités locales et d’investissement pour ne pas être d’accord avec moi sur le constat : en France, l’investissement, qu’il soit public ou, surtout, privé, est insuffisant.
M. Jacques Mahéas. Ce sont les collectivités qui investissent le plus !
Mme Christine Lagarde, ministre. C’est précisément pour cette raison que le Président de la République avait pris l’engagement devant le pays, et non devant le MEDEF,…
M. David Assouline. On ne voit que le MEDEF !
Mme Christine Lagarde, ministre. … de stimuler l’investissement et, pour ce faire, d’éliminer la part de la taxe professionnelle assise sur les équipements et biens mobiliers, c’est-à-dire sur l’investissement productif.
Tous les gouvernements qui se sont succédé depuis vingt ans en ont parlé. La qualifiant d’absurde ou d’imbécile, tous étaient d’accord pour considérer que la taxe professionnelle, qui frappe les investissements productifs, qu’ils soient utilisés ou non, d’ailleurs, et quel que soit le degré d’amortissement, n’est pas un bon impôt
Qu’avons-nous fait ? Sur l’initiative du Président de la République et sous l’autorité du Premier ministre, le Gouvernement a engagé tout un processus.
Je tiens à m’arrêter quelques instants sur la méthode, importante à mes yeux.
J’ai, à trois reprises, rencontré en séance plénière les associations représentant les collectivités territoriales, toutes catégories confondues ; j’ai, à trois reprises, rencontré les représentants des entreprises. Je les ai écoutés, nous travaillons de concert à l’élaboration d’un projet de réforme, en partageant nos informations, notamment les données chiffrées.
En effet, je sais que la taxe professionnelle constitue une ressource très importante des collectivités locales et que nous ne réussirons une réforme fondamentale pour nos entreprises, pour notre économie et pour l’emploi, que si elle est le fruit d’une concertation intelligente.
Je vais continuer d’appliquer cette méthode, fondée sur la concertation et la consultation, que j’ai faite mienne depuis le 5 février dernier, date à laquelle le Président de la République a pris cet engagement devant le pays.
Quels sont les principes qui nous guident ? Ce sont toujours les mêmes.
Premièrement, nous entendons supprimer la taxe professionnelle sur les investissements productifs.
Deuxièmement, nous voulons maintenir un lien étroit entre les entreprises et les territoires par le biais des collectivités territoriales.
Troisièmement, nous souhaitons maintenir l’autonomie financière des collectivités territoriales.
Quatrièmement – ce principe a été rappelé par M. le Premier ministre –, nous voulons maintenir le financement des collectivités locales par niveau de collectivités.
Nous travaillons en considération de ces quatre principes. Nous réfléchissons également à la reliaison des taux, indispensable, selon nous, pour parvenir à une fiscalité équilibrée, qui permettra d’attirer les entreprises dans une bonne intelligence fiscale.
Notre objectif est très clair : grâce à cette méthode, nous voulons encourager les entreprises et l’emploi, et soutenir l’investissement. Le projet de loi de finances pour 2010 sera élaboré selon ces mêmes principes, et tendra à répondre à cet objectif que – je l’espère – nous cherchons tous ensemble à atteindre. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
5
Allocution de M. le président du Sénat
M. le président. Mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, il y a un peu plus de neuf mois, je traçais devant vous ce qui, à mes yeux, devait être un « nouveau cap » pour le Sénat. J’articulais cette ambition collective autour de deux idées : le retour du politique, l’image de notre assemblée.
C’est autour de ces deux thèmes initiaux que je voudrais organiser ce point d’étape en forme de compte rendu des engagements pris avec vous.
Notre action collective a été intense. Je ne sais s’il faut s’en féliciter, mais nous avons battu cette année le record du nombre d’heures et de jours de séance depuis le début de la Ve République : 950 heures et 124 jours. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Nous avons crevé le plafond de 120 jours de séance !
M. David Assouline. Au détriment de la qualité !
M. le président. Au nombre moyen habituel de 5 500 amendements s’est substitué le chiffre de 11 000, dont 3 000 en commission, depuis le 1er mars.
En outre, 94 % des amendements adoptés dans cet hémicycle ont été retenus par l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Parallèlement, le temps du contrôle en séance publique a été multiplié par trois depuis le mois de mars, sous l’effet notamment des possibilités nouvelles qui nous ont été données en matière d’ordre du jour. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)
Mais, au-delà de ces chiffres, qui ne me semblent pas éloignés d’un point de rupture, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, ce qui importe, c’est la qualité de notre bilan législatif.
Le Sénat a imposé sa marque.
Au cours de quelque 106 heures de débat, avec sa commission des affaires sociales, le Sénat a contribué à modifier de manière équilibrée l’efficacité de la gestion future de nos hôpitaux publics. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Le Sénat a confirmé son engagement de toujours en faveur de la défense des libertés publiques et de la vie privée. Il l’a fait, par exemple, avec sa commission des lois, dans la loi pénitentiaire et dans le rapport remarqué sur le développement du numérique.
Avec sa commission des finances, le Sénat a mis en exergue l’effort nécessaire en faveur des petites et moyennes entreprises et de la fiscalité environnementale.
Avec sa commission de la culture, le Sénat a réussi, dans des conditions difficiles, notamment au départ, à imposer un financement pérenne pour la télévision publique ; ce n’était pas évident.
Avec sa commission de l’économie, le Sénat a confirmé le principe de 20 % de logements sociaux dans les communes de plus de 3 500 habitants.
Un sénateur socialiste. Ce n’était pas facile ! Merci l’opposition !
M. le président. Avec sa commission des affaires étrangères, le Sénat a mis en œuvre sur le Moyen-Orient – dossier ô combien sensible ! – les tandems de rapporteurs majorité-opposition que nous appelions de nos vœux.
Les trois secteurs privilégiés d’intervention que je vous avais invité à partager, le 14 octobre dernier, ont fait l’objet de missions communes d’information.
La mission commune d’information sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales a permis au Sénat de jouer tout son rôle dans les réflexions préalables sur les réformes annoncées. Et ce n’est pas fini !
La mission commune d’information sur la situation des départements d'outre-mer a amorcé une action de longue haleine. Nous la poursuivrons.
La mission commune d’information sur la crise financière a pris la forme originale et sans précédent de ce que j’avais appelé un « groupe de contact paritaire », entre députés et sénateurs.
Je crois qu’il nous faut continuer à oser des initiatives inédites.
Nous avons, en outre, décidé de mettre en place une quatrième mission pour réfléchir aux possibilités d’insertion de notre jeunesse. Je pense qu’il s’agit là d’un défi majeur.
Mais, surtout, nous avons donné un sens quotidien à ce qui, pour moi, constitue l’un des points majeurs de la « noblesse » de la politique : les vertus de la collégialité.
Ensemble, au sein de notre bureau, nous avons institué une gouvernance refondée : clarté, responsabilité à l’égard des deniers publics, collégialité ont été parmi les mots-clés de l’action que nous avons conduite.
Nous nous sommes attachés à poursuivre l’auto-réforme en renforçant nos contrôles internes, mais aussi en recourant – quand cela est apparu utile – à l’apport d’expertises extérieures. Je citerai l’audit annuel de nos comptes, l’analyse de notre politique de communication, l’étude sur l’adéquation de nos moyens à nos missions, l’audit sur le musée du Luxembourg.
Nous nous sommes recentrés sur notre cœur de métier : la loi, le contrôle, la prospective.
Et, ensemble, nous avons commencé à faire évoluer nos méthodes de travail. Hier soir encore, la conférence des présidents y a consacré une grande part de son temps.
L’esprit de dialogue a prévalu au sein du groupe chargé de l’élaboration de notre règlement, sous l’égide des deux rapporteurs, Jean-Jacques Hyest et Bernard Frimat.
Préférant les équilibres négociés aux solutions imposées, nous avons fait le pari de l’intelligence collective pour l’exercice de nos nouveaux pouvoirs. Nous avons recherché une meilleure maîtrise de notre temps et, de ce fait, une plus grande lisibilité et un intérêt accru de nos débats pour nos concitoyens. Nous avons voulu que cette démarche n’affecte pas le droit d’amendement et qu’elle renforce la dimension politique de nos travaux.
Je souhaite que ce choix pragmatique et de principe puisse servir la démocratie parlementaire.
Le rôle accru de la conférence des présidents devient une évidence : les décisions y sont désormais prises à la proportionnelle des groupes.
Nous avons recherché des moyens pour que les propositions de loi de l’opposition soient effectivement discutées.
Le Sénat a, de manière très concrète, accompagné la présidence française de l’Union européenne avec sa commission des affaires européennes, en confortant différentes initiatives lancées par les présidents Christian Poncelet et Bernard Accoyer.
Ensemble, il nous faudra confirmer l’état d’esprit de concertation que nous avons mis en place.
Ensemble, il nous faudra franchir une étape de plus dans l’organisation de notre travail législatif.
Nous devons mieux lier le travail en commission et le travail en séance publique (Mme Fabienne Keller approuve), ne serait-ce que pour la gestion du bien qui nous est compté, le temps, mais aussi au nom de la transparence que nous devons à nos concitoyens.
Ensemble, il nous faudra mieux équilibrer le travail du Sénat entre son rôle législatif et sa mission de contrôle.
Le Sénat n’a pas attendu la réforme pour faire du contrôle l’une de ses priorités permanentes. Il a su le faire par des moyens de plus en plus diversifiés. Il faudra qu’il puisse continuer de valoriser cette spécificité dans le contexte d’un accroissement de ses missions.
Ensemble, il nous faudra coordonner au mieux le rôle d’impulsion de nos groupes politiques – renforcé par la révision constitutionnelle – avec l’expertise et l’espace de dialogue propres à nos commissions permanentes.
Il faudra que, dans la concertation avec chacun, nos délégations trouvent toute leur place.
Où, sinon au sein de la conférence des présidents, pourrons-nous y parvenir?
Ayant mis l’accent sur notre travail, nous serons plus forts pour renforcer notre communication sur l’essentiel et pour tenter de gagner la bataille de l’image.
Nous devons veiller à renforcer les modes de communication sur le travail sénatorial. Notre bureau a ouvert ce matin la voie à la réalisation de cet objectif. Pour l’atteindre, il nous faudra la contribution de chacune et de chacun d’entre vous.
Dans un monde touché hier par la crise financière, aujourd’hui par la crise économique et sociale, le Sénat, s’il occupe toute sa place, me semble avoir un rôle important à jouer, celui de « passeur » entre le vécu quotidien dans les territoires et les décisions prises à l’échelon national.
Par son rapport particulier au temps et aux territoires, le Sénat est aussi le lieu naturel de la réflexion sur l’avenir, en particulier lorsque les événements obligent à repenser l’économie et la société et à sortir de nos habitudes. Notre rôle de passeur n’est pas à sens unique. Il ne s’agit pas de nous faire seulement l’interprète des attentes et parfois des angoisses des populations, nous devons aussi éclairer nos concitoyens.
Les 343 sénatrices et sénateurs sont donc, oui, les « passeurs », dans les décisions nationales, de ce que vous avez appelé ici, à l’occasion d’une mission commune d’information, « l’intelligence territoriale ».
Je souhaite rendre publiquement hommage à nos collaborateurs : fonctionnaires du Sénat, collaborateurs de nos groupes politiques, assistants parlementaires.
Tous, à la place qui est la leur, ils ont su – souvent au prix d’un considérable investissement personnel – faire preuve d’une parfaite conscience professionnelle, mais aussi d’adaptation et d’inventivité face au changement. Ils auront encore à le faire en fonction des orientations données ce matin par le bureau du Sénat.
J’adresse également mes remerciements à la chaîne parlementaire Public Sénat, à son ancien et à son nouveau président, aux correspondants de la presse écrite et audiovisuelle accrédités au Sénat et à tous ceux qui ont bien voulu observer ce que nous faisons et en rendre compte.
Je souhaite que nous poursuivions les actions qu’ensemble nous avons entreprises et que nous continuions comme nous avons commencé, en « jouant collectif », dans le respect, bien entendu, des convictions et des engagements de chacun.
Si nous y parvenons, alors, plus personne ne se demandera à quoi sert le Sénat. J’ai envie de vous faire partager cette conviction.
M. René Garrec. Très bien !
M. le président. Mes chers collègues, beaucoup vous a été demandé, je sais que le Gouvernement en a conscience. Encore quelques jours et vous tous, comme votre président, allez pouvoir prendre des semaines de vacances estivales amplement méritées : je vous les souhaite très sincèrement revigorantes ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
La parole est à M. le ministre. (Marques de satisfaction sur les travées de l’UMP.)
M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président, je vous ai écouté avec l’attention que requièrent tout à la fois l’important bilan que vous avez dressé et les perspectives que vous avez tracées.
Je me trouve en cet instant dans une situation assez singulière, puisque, à quelques semaines près, j’aurais pu, tirant le bilan de la session ordinaire qui s’est achevée, me reconnaître dans les acteurs qui ont nourri et fait vivre le travail du Sénat. Je me sens d’autant plus fier de pouvoir m’adresser, au nom du Gouvernement, à ceux qui étaient il y a peu encore mes collègues et qui tiennent toujours une grande place dans mon cœur. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Monsieur le président, du fond du cœur, je remercie les sénatrices et les sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent.
Vous le savez, j’apprécie à la fois la qualité du travail qui est ici mené, le sens du dialogue, le respect mutuel et, ce qui est très important, l’écoute : chacun a sa sensibilité, ses engagements politiques, mais, sur l’idéal, pas grand-chose ne nous sépare, sinon, éventuellement, les voies et moyens. Mais n’est-ce pas cette divergence des points de vue qui nourrit la démocratie ?
Monsieur le président, je souhaite également – c’est la première fois que je puis le faire publiquement dans cette enceinte – vous remercier. Je sais la passion que vous nourrissez pour cette maison, je sais tout le travail que vous y accomplissez pour que le Sénat remplisse pleinement son rôle au service de la République. Au cours de la première session ordinaire de votre présidence, vous avez, avec les membres du bureau, avec vos collaborateurs, avec chacune et chacun, engagé un certain nombre de changements et de réformes qui ont tous pour ambition de mettre le Sénat aux avant-postes de la République.
Mes remerciements iront encore aux présidents des groupes et à leurs collaborateurs – je sais la difficulté de la tâche, je ne l’ai pas oubliée -, ainsi qu’aux présidents des commissions, à tous les commissaires, et à l’ensemble des fonctionnaires du Sénat.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous venons de vivre une session parlementaire tout à fait inédite, et ce pour deux raisons.
D’abord, depuis le printemps, se met progressivement en place la réforme constitutionnelle qui a été votée par le Congrès en juillet 2008. Ensuite, le Parlement, singulièrement le Sénat, a su répondre présent dans la crise financière, économique et sociale que nous traversons.
Sans être liés, ces deux éléments ont néanmoins permis au Sénat, dans une période de transition quant à ses méthodes de travail, de montrer un nouveau visage, en alliant sa vocation naturelle d’approfondissement à une très grande réactivité par rapport aux événements.
En premier lieu, s’agissant de la réforme de la Constitution, avec la loi organique, avec la réforme du règlement du Sénat, ce qui est en jeu, conformément à la volonté du Président de la République, du Premier ministre et du gouvernement à l’époque, c’est de permettre au Parlement d’être véritablement la caisse de résonance, autant que possible en temps réel, des problèmes que rencontre notre société.
Il importe de supprimer le décalage souvent observé entre le moment où l’on constate une situation et celui où le Parlement s’en saisit, décalage qui pourrait être interprété comme une distance par rapport à nos compatriotes et qui ne donne pas une image fidèle de la démocratie telle que nous la concevons en ce début du XXIe siècle.
Certes, nous, Gouvernement et Parlement, sommes dans une période de rodage, où il nous faut inventer, imaginer de nouvelles méthodes de travail, accroître notre confiance mutuelle, faire en sorte que l’hémicycle soit véritablement le cœur du débat républicain. Le Sénat – j’ai quelques raisons de le savoir – s’est engagé résolument et efficacement.
À l’évidence, avec de la bonne volonté et cette confiance que j’évoquais, nous parviendrons à atteindre cet objectif, même si quelques ajustements sont encore nécessaires.
En second lieu, je tiens à saluer la réactivité du Parlement, en l’occurrence du Sénat, face à la crise.
J’en veux pour preuve les délais très brefs dans lesquels, une fois arrêtées à l’échelon national, des dispositions importantes, pour le Gouvernement comme pour tous les Français, ont été examinées dans cette enceinte. Je veux parler, notamment, du plan de sauvetage du secteur bancaire, du plan de relance, ou des mesures prises en matière de logement.
Le Parlement s’est montré très en phase avec les mesures indispensables qui devaient être prises rapidement pour que leur efficacité soit garantie.
Monsieur le président, vous avez également rappelé, illustrant la densité de cette session, certaines lois très importantes votées par le Sénat, notamment des textes économiques, les lois relatives à l’outre-mer et à l’hôpital, qui ont fait l’objet d’un travail approfondi dans cette maison, travail que je tiens à saluer.
J’ajoute, s’agissant singulièrement des dispositions du projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, que la validation imminente du Conseil constitutionnel sera aussi comme un hommage au travail qui a été accompli par le Gouvernement et par le Parlement, en particulier par les commissions compétentes et leurs rapporteurs.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous dire – cela soulèvera chez vous beaucoup d’enthousiasme, j’en suis persuadé – que l’ardeur réformatrice du Gouvernement ne s’est pas éteinte avec l’achèvement de la session ordinaire ! (Sourires sur les travées de l’UMP.) Vous pouvez le mesurer à l’occasion de la présente session extraordinaire. (Nouveaux sourires sur les mêmes travées.) Des textes majeurs sont en effet soumis à votre appréciation.
Je peux vous l’assurer, le Gouvernement a l’intention d’inscrire à l’ordre du jour du Sénat, dès cet automne, des textes de grande portée, dont certains sont attendus depuis longtemps, qu’il s’agisse du Grenelle II, de la formation professionnelle continue ou de l’indispensable réforme des collectivités territoriales, qui donnera certainement lieu ici à des débats passionnants et éclairants, sans parler du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Voilà le travail qui nous attend !
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous souhaite à toutes et à tous de prendre un repos bien mérité (Exclamations sur les travées de l’UMP), en espérant vous retrouver en pleine forme à la rentrée !
Monsieur le président, à ceux qui se demanderaient encore à quoi sert le Sénat, je répondrai avec vous tout simplement qu’il sert la République, ce qui est déjà formidable ! (Vifs applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. - Certains sénateurs du groupe socialiste applaudissent également.)