M. Jean-Claude Danglot. Lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie, nous avions souligné à quel point il était essentiel, en matière de fibre optique et de développement des services utilisateurs de cette technologie, de laisser aux habitants et aux assemblées générales des copropriétés le choix de supporter ou non des coûts supplémentaires pour les opérateurs nouvellement entrants.
Nous proposons donc de laisser aux impétrants la prise en charge de la totalité des coûts supplémentaires occasionnés par leurs velléités d’accès.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Retailleau, rapporteur. À mon sens, il ne servirait à rien d’entrer dans un débat sémantique pour essayer de définir ce que sont les coûts « supplémentaires », « joints », « communs » ou « spécifiques »… De toute manière, cela ne correspondrait pas forcément aux définitions proposées par Le Petit Robert. En l’occurrence, il s’agit d’une terminologie propre au régulateur : les adjectifs que je viens d’énumérer ont une acception particulière dans le langage de la régulation des communications électroniques.
Nous n’avons pas à nous substituer au pouvoir réglementaire. Il revient à la loi de poser des principes, et nous voulons poser le principe d’une prise en charge équitable. La situation serait ainsi clarifiée. Au régulateur ensuite de discuter avec les opérateurs pour trouver une base acceptable.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 23, 32 rectifié et 46.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État. Je reconnais que le sujet est complexe et la formulation difficile à trouver.
Dans l’idéal, comme l’ARCEP n’a pas achevé son travail sur les modalités de mutualisation de la partie terminale des réseaux, j’aurais préféré que le présent texte ne contienne aucune disposition relative aux modalités de partage des coûts. Je ne suis d’ailleurs pas certaine que cela soit de nature législative.
J’étais donc plutôt favorable à l’amendement déposé par M. Dominati, qui l’a malheureusement retiré avant la séance. Avouez que cela tombe mal ! (Sourires.)
M. Philippe Dominati. Mais mon amendement est repris dans celui de la commission !
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État. Pas vraiment…
Néanmoins, nous pouvons trouver en effet des solutions parmi les amendements qui restent.
Ainsi, la référence au partage « équitable » des coûts qui est proposée par M. le rapporteur me paraît utile. De même, je soutiens l’idée selon laquelle la mise à disposition d’installations et d’éléments de réseau spécifiques à la demande d’un opérateur s’effectuera dans les cas définis par l’ARCEP, car cela permet de limiter le droit à l’équipement spécifique.
J’aurais préféré la suppression pure et simple de toute référence aux coûts, mais je pense que la rédaction de M. le rapporteur est préférable aux formulations proposées par les auteurs des trois autres amendements. Je crois notamment que la solution préconisée par M. Danglot n’est pas du tout équitable : avec un tel dispositif, un opérateur demandant une fibre surnuméraire bénéficierait d’un avantage totalement injustifié !
Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis favorable sur les I et III de l’amendement n° 59, un avis de sagesse sur le II de ce même amendement et un avis défavorable sur les amendements nos 23, 32 rectifié et 46.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote sur l’amendement n° 59.
M. Hervé Maurey. Encore une fois, je crains vraiment que la rédaction de la commission n’ouvre la voie à de multiples contentieux.
Mes chers collègues, qu’est-ce qu’une « prise en charge d’une part équitable des coûts » ?
Je l’avoue, je m’inquiète que l’on se réfère ici à l’ARCEP. Autant je reconnais sa compétence sur toutes les questions techniques, autant je déplore cette tendance du législateur à transférer progressivement, et dans bien des domaines, son pouvoir normatif aux autorités administratives indépendantes. C’est précisément ce que nous nous apprêtons à faire ici : parce que nous ne nous sentons pas capables de définir la manière dont nous voulons que les coûts soient pris en charge, nous invoquons la notion floue de « part équitable », en confiant le soin à l’ARCEP de trancher.
En tant que législateur, je dois dire que cette démarche me dérange quelque peu.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bruno Retailleau, rapporteur. Je ne suis pas très friand des autorités administratives indépendantes, et c’est précisément pour cette raison que je considère qu’il faut qu’elles puissent exercer les attributions qui leur sont dévolues, mon cher collègue.
Très franchement, appartient-il au Parlement de définir si telle ou telle soudure, tel ou tel boîtier d’étage, telle ou telle boîte de brassage entraîne ou non des coûts spécifiques ? Non, c’est le travail du régulateur !
En outre, s’agissant d’un réseau en phase de déploiement, nous avons beaucoup de choses à apprendre. Le régulateur, en l’occurrence l’ARCEP, a tout intérêt à définir lui-même ce à quoi correspond cette « part équitable », au terme d’un dialogue avec les opérateurs. Le législateur, du moins dans l’idée que je m’en fais, sortirait de son rôle s’il voulait s’y essayer.
En revanche, nous avons souhaité préciser que l’opérateur prendra à sa charge une partie des coûts afin de faire échec à toute « stratégie de coucou », à tout comportement de type « passager clandestin », et afin d’encourager les investissements en faveur du déploiement du réseau.
M. le président. Nous allons donc procéder à un vote par division.
M. Michel Teston. Monsieur le président, cette procédure est-elle habituelle ?
M. le président. Monsieur Teston, permettez-moi de vous relire l’article 42, alinéa 9, du règlement : « Dans les questions complexes, la division du texte est de droit lorsqu’elle est demandée. Elle peut être décidée par le Président. »
Je mets aux voix les I et III de l’amendement n° 59.
(Les I et III sont adoptés.)
M. le président. La parole est à M. René Garrec, pour explication de vote sur le II de l’amendement n° 59.
M. René Garrec. Le mot « équitable » me gêne car il a une connotation plus morale que juridique et il n’est pas normatif. En cas de contentieux, nous laissons toute latitude au juge pour interpréter cette notion. En tant que législateur, j’avoue que cela me dérange. Je rejoins ce que disait notre collègue Hervé Maurey s’agissant du régulateur.
Ne pourrait-on pas remplacer ce mot par un autre ?
M. Pierre-Yves Collombat. Part « minimale » !
M. René Garrec. Vous parlez de la ligne de flottaison d’un navire ? (Sourires.)
M. Michel Teston. Il suffit de voter notre amendement ! L’expression « coûts supplémentaires » est beaucoup plus claire !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État. Bien que le Gouvernement ait émis un avis de sagesse, je tiens à préciser, compte tenu de ce qui vient d’être dit et pour mémoire, que, idéalement, il aurait préféré la suppression de ce II.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.
M. Hervé Maurey. J’invite MM. Garrec et Teston à voter mon amendement, puisqu’il vise à supprimer le mot « spécifiques ». On ne saurait être plus clair !
M. le président. Mon cher collègue, votre amendement est d’ores et déjà devenu sans objet à la suite de l’adoption du III de l’amendement n° 59 …
La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Pour mémoire, je rappelle que, lors de la révision constitutionnelle de juillet 2008, nous avons introduit à l’article 4 de la Constitution l’expression « participation équitable », et nous n’avons pas fini de les traîner… Aussi, restons prudents et veillons à ne pas recommencer à introduire dans nos textes de tels termes, discutés et discutables.
M. Paul Blanc. Comme « notamment » !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bruno Retailleau, rapporteur. Nous sommes en première lecture. Soit nous acceptons de supprimer le II de l’amendement, comme Mme la secrétaire d'État le demande, soit nous conservons la rédaction proposée par la commission.
Je m’en remets à la décision de M. le vice-président de la commission de l’économie.
M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission de l’économie.
M. Pierre Hérisson, vice-président de la commission de l’économie, de l'aménagement du territoire et du développement durable. Au nom du respect que nous devons au travail fait en commission, je considère qu’il faut conserver l’amendement dans sa rédaction actuelle.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 23, 32 rectifié et 46 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 1er G, modifié.
(L'article 1er G est adopté.)
Article 1er H (nouveau)
L'article L. 34-8-3 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'autorité peut préciser les modalités de l'accès prévu au présent article, en vue notamment d'assurer la cohérence des déploiements et une couverture homogène des zones desservies. »
M. le président. L'amendement n° 33 rectifié, présenté par MM. Teston, Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Collombat, Courteau, Raoul, Patriat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. L’article 1er H du projet de loi vise à préciser une disposition introduite par la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie dans le code des postes et des télécommunications électroniques.
À l’époque, de longs débats avaient eu lieu pour savoir où pouvait être situé le point de mutualisation. Nous avions alors focalisé l’attention sur l’intérieur des propriétés privées ; ce faisant, nous avions peut-être fait l’erreur de penser que, s’agissant du domaine public, tout serait plus simple.
En conséquence, il n’avait pas été prévu de confier à l’ARCEP un pouvoir de réglementation sur la localisation du point de mutualisation. Or, comme l’indique Bruno Retailleau dans son rapport, « les intérêts des opérateurs peuvent en effet diverger selon la position qu’ils détiennent sur la boucle locale cuivre ». C’est le moins que l’on puisse dire !
Si nous sommes d’accord pour considérer que le régulateur a vocation à préciser les règles qui s’appliquent, en concertation avec les opérateurs et les collectivités, nous pensons qu’il convient d’encadrer plus strictement ses pouvoirs en la matière. Je rejoins à cet égard les remarques qu’a faites Hervé Maurey au sujet de l’article précédent.
En l’état actuel des choses, nous estimons que cet article confère des pouvoirs démesurés à l’ARCEP et qu’il n’est donc pas satisfaisant. Pourtant, des solutions existent, notamment la mutualisation des installations électriques. Nous demandons donc la suppression de cet article, à défaut de pouvoir nous prononcer sur une solution offrant de meilleures garanties à tous.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Retailleau, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.
Le 22 juin dernier, l’ARCEP a soumis à consultation publique un projet de règlement portant sur la mutualisation en zone I. Nous proposons ici de confier à l’ARCEP la responsabilité de définir le point de mutualisation, qui revêt une importance capitale dans les zones II, celles qui se situent entre les zones denses et les zones très peu denses.
Lors de la discussion générale, j’indiquais que seule la collaboration des différents opérateurs permettrait la couverture rapide de cette zone par la convergence et la mutualisation de leurs investissements. C’est ce à quoi nous les incitons par ces mesures. Il faut faire en sorte que ces opérateurs ne déploient pas plusieurs réseaux en parallèle et que le point de mutualisation soit très haut dans le réseau, afin que la boucle locale couvre une grande partie de logements. Ce ne sera pas rentable si l’on multiplie les points de mutualisation. Cela peut avantager tel ou tel opérateur, mais, si l’on rapproche trop le point de mutualisation d’un logement, comme en zone dense, il faudra alors multiplier les investissements, ce qui ne serait pas raisonnable.
C’est donc un modèle économique coopératif que nous souhaitons promouvoir.
Il appartient à l’ARCEP de définir, en fonction de la topographie et de la densité en logements de la zone considérée, ce point de mutualisation. Le Parlement ne pourra pas le faire de façon aussi précise. On y revient, c’est le rôle du régulateur, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État. Pour des raisons identiques à celles qui viennent d’être excellemment énoncées par M. le rapporteur, le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er H.
(L'article 1er H est adopté.)
Article additionnel après l'article 1er H
M. le président. L'amendement n° 58, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Les collectivités territoriales et leurs groupements sont autorisés à détenir, séparément ou à plusieurs, au plus la moitié du capital et des voix dans les organes délibérants de sociétés commerciales ayant pour objet l'établissement et l'exploitation d'infrastructures passives de communications électroniques destinées à être mises à disposition d'opérateurs déclarés en application de l'article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques, notamment pour la fourniture de services de communications électroniques à très haut débit en fibre optique à l'utilisateur final.
Ces sociétés exercent leur activité sur le marché des communications électroniques dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires.
Leur intervention se fait en cohérence avec les réseaux d'initiative publique établis ou exploités en application de l'article L. 1425 - 1 du code général des collectivités territoriales, garantit l'utilisation partagée des infrastructures établies ou acquises en application du présent article et respecte le principe d'égalité et de libre concurrence sur le marché des communications électroniques.
II. – Les élus locaux agissant en tant que mandataires des collectivités territoriales ou de leurs groupements présentent une fois par an aux assemblées délibérantes le rapport présenté par le conseil d'administration ou le directoire à l'assemblée générale des actionnaires. Ce rapport comporte notamment en annexe le bilan, le compte de résultat et le rapport des commissaires aux comptes du dernier exercice clos. Il fait état également d'une présentation de l'activité prévisionnelle de la société au cours des deux prochains exercices.
III. – Toute collectivité territoriale ou groupement de collectivités territoriales actionnaire a droit au moins à un représentant au conseil d'administration ou au conseil de surveillance, désigné en son sein par l'assemblée délibérante concernée.
Dans une proportion au plus égale à celle du capital détenu par l'ensemble des collectivités territoriales ou de leurs groupements actionnaires par rapport au capital de la société, les statuts fixent le nombre de sièges dont ils disposent au conseil d'administration ou de surveillance, ce nombre étant éventuellement arrondi à l'unité supérieure. Les sièges sont attribués en proportion du capital détenu respectivement par chaque collectivité ou groupement.
Si le nombre des membres d'un conseil d'administration ou d'un conseil de surveillance prévus aux articles L. 225-17 et L. 225-69 du code de commerce ne suffit pas à assurer, en raison de leur nombre, la représentation directe des collectivités territoriales ou de leurs groupements ayant une participation réduite au capital, ils sont réunis en assemblée spéciale, un siège au moins leur étant réservé. L'assemblée spéciale désigne parmi les élus de ces collectivités ou groupements le ou les représentants communs qui siégeront au conseil d'administration ou de surveillance.
Les personnes qui assurent la représentation d'une collectivité territoriale ou d'un groupement au sein du conseil d'administration ou de surveillance de la société visée au I doivent respecter, au moment de leur désignation, la limite d'âge prévue au premier alinéa des articles L. 225-19 et L. 225-70 du code de commerce.
Ces personnes ne peuvent être déclarées démissionnaires d'office si, postérieurement à leur nomination, elles dépassent la limite d'âge statutaire ou légale.
Il n'est pas tenu compte de ces personnes pour le calcul du nombre des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance qui peuvent demeurer en fonction au-delà de la limite d'âge, en vertu soit des statuts de la société, soit, à défaut de dispositions expresses dans les statuts, des articles précités du code de commerce.
Par dérogation à l'article L. 225-20 du même code, la responsabilité civile qui résulte de l'exercice du mandat des représentants incombe à la collectivité territoriale ou au groupement dont ils sont mandataires. Lorsque ces représentants ont été désignés par l'assemblée spéciale, cette responsabilité incombe solidairement aux collectivités territoriales ou aux groupements membres de cette assemblée.
Les élus locaux agissant en tant que mandataires des collectivités territoriales ou de leurs groupements au sein du conseil d'administration ou du conseil de surveillance des sociétés visées au I et exerçant, à l'exclusion de toute autre fonction dans la société, les fonctions de membre du conseil d'administration ou du conseil de surveillance ne sont pas considérés comme entrepreneurs de services municipaux, départementaux ou régionaux au sens des articles L. 207, L. 231 et L. 343 du code électoral.
Ces représentants peuvent percevoir une rémunération ou des avantages particuliers à condition d'y être autorisés par une délibération expresse de l'assemblée qui les a désignés ; cette délibération fixe le montant maximum des rémunérations ou avantages susceptibles d'être perçus ainsi que la nature des fonctions qui les justifient.
Les élus locaux agissant en tant que mandataires des collectivités territoriales ou de leurs groupements au sein du conseil d'administration ou de surveillance des sociétés visées au I et exerçant les fonctions de membre du conseil d'administration ou du conseil de surveillance ne sont pas considérés comme étant intéressés à l'affaire, au sens de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales, lorsque la collectivité ou le groupement délibère sur ses relations avec ladite société.
Toutefois, ils ne peuvent participer aux commissions d'appel d'offres ou aux commissions d'attribution de délégations de service public de la collectivité territoriale ou du groupement lorsque la société précitée est candidate à l'attribution d'un marché public ou d'une délégation de service public dans les conditions prévues aux articles L. 1411-1 et suivants.
En cas de fin légale du mandat de l'assemblée, le mandat de ses représentants au conseil d'administration ou au conseil de surveillance est prorogé jusqu'à la désignation de leurs remplaçants par la nouvelle assemblée, leurs pouvoirs se limitant à la gestion des affaires courantes.
Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires se prononcent sur le rapport écrit qui leur est soumis au moins une fois par an par leurs représentants au conseil d'administration ou au conseil de surveillance, et qui porte notamment sur les modifications des statuts qui ont pu être apportées à la société. Lorsque ce rapport est présenté à l'assemblée spéciale, celle-ci assure la communication immédiate aux mêmes fins aux organes délibérants des collectivités et groupements qui en sont membres.
Toute prise de participation de cette société dans le capital d'une autre société commerciale fait préalablement l'objet d'un accord exprès de la ou des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires disposant d'un siège au conseil d'administration, en application du premier alinéa du III du présent article.
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État. Au préalable, je voudrais rendre hommage à Pierre Hérisson. Il avait initialement déposé un amendement identique à celui-ci, que la commission des finances avait cependant déclaré irrecevable. Le Gouvernement tient à cet amendement et le soutient aujourd'hui en son nom.
Cet amendement reprend les conclusions des travaux que j’ai conduits depuis plusieurs mois. Je le crois utile pour les raisons que je vais maintenant détailler.
Actuellement, en matière de numérique, une collectivité est placée devant un tout ou rien : soit elle prend toute la responsabilité, soit elle n’en prend aucune.
Cette situation n’est pas satisfaisante. Certaines collectivités d’abord intéressées ont battu finalement en retraite, considérant qu’elles n’ont pas la compétence technique ou que ce domaine ne relève pas de leur cœur de responsabilité. Ce faisant, elles se privent des chances d’engager une dynamique et laissent les citoyens, qui attendent l’intervention de la collectivité, dans un état de frustration.
Il existe une zone grise dans laquelle il est difficile pour un opérateur de prévoir quelle sera la rentabilité de la construction d’un réseau. Pourra-t-il intervenir seul ? Aura-t-il besoin d’un petit coup de pouce ? Nous souhaitons donc, pour des raisons politiques et de lisibilité, permettre aux collectivités qui le souhaitent de prendre des participations minoritaires. Elles auront ainsi un rôle d’impulsion, démontreront leur engagement et entraîneront peut-être des opérateurs a priori hésitants.
En outre, afin que cette possibilité d’intervention financière ne soit pas utilisée à mauvais escient, nous avons prévu des garanties : restriction aux réseaux dits passifs et incitation à la cohérence avec les réseaux d’initiative publique déployés par ailleurs, pour éviter les interférences.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, vice-président de la commission de l’économie. Madame la secrétaire d’État, votre amendement est fidèle à l’esprit de l’amendement que j’avais moi-même déposé. Il a été examiné tout à l’heure en commission ; ses dispositions me paraissent raisonnables et devraient recueillir un large accord.
L’objet de cet amendement est de permettre aux collectivités locales de jouer un rôle précis, mesuré et juridiquement sain. En effet, et cela a été souligné à plusieurs reprises, toutes les forces doivent converger pour dégager des solutions à même de renforcer la solidarité territoriale.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.
M. Michel Teston. Nous avons découvert cet amendement une heure avant la réunion de la commission. Le libellé en est très long, accompagné de nombreuses explications, comme si l’on voulait nous rassurer quant à la faisabilité du montage juridique proposé.
En fait, on nous demande d’autoriser les collectivités locales à prendre une participation minoritaire dans des sociétés commerciales dont l’objet social est l’établissement et l’exploitation d’infrastructures passives de communications électroniques destinées à être mises à la disposition d’opérateurs intervenant en application de l’article L. 33-1 du code des postes et communications électroniques.
Nous ne sommes pas favorables à ce dispositif. Il existe d’autres moyens. De nombreuses collectivités se sont d’ores et déjà organisées pour réaliser des réseaux. Elles ont lancé des appels à candidatures et attribué des délégations de service public. Les délégataires sont souvent appelés à apporter une contribution financière relativement élevée. Je ne vois donc pas pourquoi il faudrait, du jour au lendemain, revenir sur des dispositifs bien rodés.
Néanmoins, Mme la secrétaire d’État souhaitera peut-être nous convaincre de l’intérêt de cette nouvelle disposition, et nous sommes prêts à l’écouter, même si ses explications sont plus longues que celles qui figurent dans son amendement. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie d’avoir repris cet amendement, même s’il est très long et même si, faute de temps, nous n’avons pas eu le temps de l’analyser dans le détail.
Permettez-moi de vous faire part de mon expérience. Voilà quelques années, j’ai décidé d’attribuer une délégation de service public, ou DSP. J’aurais bien voulu, alors, pouvoir prendre une participation restreinte dans le capital de la société délégataire afin d’en connaître l’organisation interne. Dans la mesure où nous avions prévu des clauses de retour à meilleure fortune, cela nous aurait permis de suivre très précisément le fonctionnement de la société et d’avoir la possibilité d’intervenir dans les débats.
Les délégations de service public sont un bon outil, mais le délégant n’a aucune visibilité sur le délégataire. Pour ma part, je préfère être à l’intérieur plutôt que de rester à l’extérieur.
Il en est de même pour les sociétés concessionnaires d’autoroutes ; je regrette que les collectivités ne puissent pas être de vrais partenaires, d’autant qu’on leur demande des subventions d’équilibre relativement importantes. Il n’y a pas de honte pour une collectivité à entrer dans le capital d’une société privée et de prendre une faible participation. Cela permet de protéger plus facilement les deniers de la collectivité.
M. Jacques Blanc. Très bien !
M. Paul Blanc. Oui, Très bien !
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.
M. Hervé Maurey. J’observe que le Gouvernement reprend des amendements frappés ici par l’article 40. Je ne peux que regretter qu’il n’ait pas repris ceux qui concernaient l’extension du service universel à la téléphonie mobile et à l’internet haut débit. Il n’est pas trop tard pour réparer cet oubli, madame la secrétaire d’État. (Sourires.)
Sur le fond, cette disposition me semble aller dans le bon sens.
Sur la forme, en revanche, j’ai été choqué de découvrir en commission cet amendement extrêmement long, que, contrairement à ce qu’a dit M. Pierre Hérisson, nous n’avons pas pu vraiment examiner, faute de temps. Cette manière de procéder me paraît quelque peu cavalière.
Tout à l’heure, M. le rapporteur rappelait que le législateur devait s’abstenir de trop entrer dans le détail. Cet amendement, fort long, entre, lui, dans le menu détail puisque l’on va même jusqu’à expliquer que les élus pourront percevoir des indemnités : c’est tout juste si l’on n’en fixe pas le montant !
Je ne suis pas hostile au principe posé dans cet amendement, mais la méthode me rend quelque peu méfiant : pourquoi un amendement de dernière minute et pourquoi aussi long ? Permettez-moi de vous le dire avec Talleyrand, souvent, la forme tue le fond !