compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
Secrétaires :
Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
Mme Sylvie Desmarescaux.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Dépôt de rapports du Gouvernement
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur l’état semestriel des sommes restant dues par l’État aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale au 31 décembre 2008 actualisé au 30 juin 2009, établi en application de l’article L.O. 111-10-1 du code de la sécurité sociale, et le rapport relatif à l’échéancier de déploiement d’une déclaration sociale nominative permettant de simplifier la gestion du revenu de solidarité active, établi en application de l’article 9 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008.
Acte est donné du dépôt de ces rapports.
Ces documents ont été transmis à la commission des affaires sociales et seront disponibles au bureau de la distribution.
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Rappels au règlement
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour un rappel au règlement.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mon intervention, qui se fonde sur l’article 36 de notre règlement, a trait à la procédure parlementaire et, plus précisément, à la mise en œuvre de la procédure accélérée, auparavant dénommée « procédure d’urgence ».
Depuis plusieurs années, nous assistons à la multiplication du nombre de projets de loi pour lesquels le Gouvernement engage cette procédure, supprimant ainsi la navette parlementaire et, de fait, empêchant l’une des deux assemblées de se saisir pleinement d’un texte modifié par l’autre.
Depuis l’application de la révision constitutionnelle votée en 2008 et présentée, de manière peu objective, comme devant renforcer les droits du Parlement, on constate une banalisation de la procédure accélérée. Rares sont maintenant les textes examinés suivant le jeu normal de la navette parlementaire. Désormais, après une seule lecture dans chaque assemblée, le texte est examiné par une commission mixte paritaire dans la discrétion la plus grande et les conclusions du rapport de cette commission mixte paritaire sont finalement adoptées, à ce stade sans droit d’amendement pour les parlementaires.
Nous avons toujours contesté le recours à la procédure d’urgence, mais sa banalisation sous la forme nouvelle de la procédure accélérée est dangereuse pour la démocratie. Les parlementaires tentent de s’y adapter en défendant, en commission mixte paritaire, des amendements, qui n’en ont d’ailleurs pas la nature sur le plan constitutionnel, puisqu’ils ne sont pas rendus publics.
Le projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports, que nous nous apprêtons à examiner, permet de bien comprendre l’absurdité de cette forme de discussion.
En effet, l’Assemblée nationale a ajouté plus de quinze articles au texte adopté par le Sénat. Des dispositions très importantes concernant le STIF, le syndicat des transports d’Île-de-France, ou le fret ferroviaire n’ont donc pas été examinées par le Sénat, ni en commission ni en séance publique. Il s’agit là d’un déni de démocratie évident.
Est-il acceptable qu’un sénateur d’Île-de-France n’ait pas eu le loisir d’examiner une telle disposition, encore moins de l’amender à ce stade du débat, alors même qu’il siège au sein d’une assemblée censée, aux termes de la Constitution, représenter les collectivités territoriales ?
Sur des questions aussi importantes pour l’avenir du transport de milliers de personnes, il n’est pas possible de se contenter des débats feutrés, souvent expéditifs, qui ont lieu en commission mixte paritaire.
Concernant le projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales, quelle importance accorder aux amendements que je qualifierai d’« écran de fumée » déposés par M. Hérisson (M. Nicolas About s’exclame) et visant, selon lui, et lui seul, à garantir le caractère public de l’entreprise, puisque le Sénat ne sera pas saisi du texte modifié par la large majorité UMP de l’Assemblée nationale ? Le Sénat ne pourra donc pas examiner les dispositions adoptées par les députés relatives au « joyau national » évoqué par M. Hérisson.
Monsieur le président, je vous demande solennellement d’intervenir fermement et fortement, au nom de notre assemblée, auprès du Gouvernement et, s’il le faut, auprès de M. Sarkozy, qui en est, apparemment, le chef – vous avez tous les pouvoirs et toute l’influence nécessaires ! –, pour que les droits élémentaires mais essentiels des parlementaires, qu’ils soient de l’opposition ou de la majorité, soient respectés, et non plus bafoués ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Mon cher collègue, je vous donne acte de votre rappel au règlement. Je transmettrai à M. le président du Sénat l’intégralité de votre intervention.
Cela étant, j’avais cru comprendre que M. le président du Sénat avait déjà fermement demandé au Gouvernement de ne pas engager la procédure accélérée sur la réforme des territoires.
La parole est à M. Michel Teston, pour un rappel au règlement.
M. Michel Teston. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souscris totalement aux remarques qui viennent d’être formulées par notre collègue Guy Fischer ; j’aurai d’ailleurs l’occasion d’y revenir lors de l’examen du texte relatif à La Poste et aux activités postales, et, vraisemblablement, ultérieurement encore, au cours d’autres débats qui ne manqueront pas d’occuper notre assemblée.
Mon rappel au règlement concerne les conditions dans lesquelles nous allons précisément examiner le projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales.
Le Gouvernement a fait deux choix : d’une part, celui de recourir à la procédure accélérée, d’autre part, celui de concentrer les débats sur une seule semaine. Une telle organisation s’apparente à celle qui prévaut lors des sessions extraordinaires, alors que nous sommes en session ordinaire !
De ce fait, pour examiner les amendements, nous sommes invités à participer aux réunions de la commission de l’économie à chaque suspension de la séance plénière. Que diable, pourquoi une telle urgence ?
J’ai regardé de près la troisième directive postale, aux termes de laquelle le secteur réservé, c’est-à-dire le monopole résiduel des postes nationales pour la levée, le tri et la distribution des plis de moins de cinquante grammes, est supprimé au 1er janvier 2011. On peut être d’accord ou pas avec cette directive – pour ce qui nous concerne, nous sommes contre ! –, toujours est-il que la date butoir est fixée au 1er janvier 2011. Nous avons donc plus d’un an devant nous pour examiner toutes les questions relatives à l’ouverture à la concurrence du secteur postal !
Il nous semble que le Gouvernement pourrait utilement mettre ce délai à profit pour présenter un projet de loi organique afin de rendre applicable l’article 11 révisé de la Constitution. Une fois ce texte adopté par Parlement - je pense qu’il le serait -, et si les conditions fixées par l’article 11 révisé étaient réunies, il appartiendrait au Gouvernement d’organiser un référendum.
Nous souhaitons donc ne pas examiner maintenant ce projet de loi sur La Poste, mais mettre à profit le délai qui nous sépare du 1er janvier 2011 pour permettre au peuple français de se prononcer sur le fait de savoir s’il faut changer le statut de La Poste, d’autant que, comme nous avons cru le comprendre à l’issue de la récente votation citoyenne, tel n’est pas son avis. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.- M. Robert Tropeano applaudit également.)
M. le président. Mon cher collègue, je vous donne acte de votre rappel au règlement.
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Organisation et régulation des transports ferroviaires et guidés
Discussion des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports (n° 68).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Grignon, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme d’un long processus législatif qui a débuté pour le Sénat en octobre 2008. Les débats en séance publique se sont ensuite déroulés les 19 février et 9 mars 2009 ; l'Assemblée nationale a, quant à elle, examiné ce texte en septembre dernier.
La commission mixte paritaire s’est réunie mardi dernier à l’Assemblée nationale, et j’ai aujourd’hui l’honneur, et le plaisir, de vous présenter les principales conclusions de ses travaux.
Avant toute chose, cependant, permettez-moi de remercier M. le président de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, notre collège Jean-Paul Emorine, ainsi que Christian Jacob, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, qui a présidé les travaux de la commission mixte paritaire. Je tiens également à féliciter M. Yanick Paternotte, rapporteur pour l’Assemblée nationale, dont les préoccupations en matière de développement du fret ferroviaire rejoignent celles du Sénat.
Le Sénat aura d’ailleurs l’occasion d’examiner en détail la problématique du fret, puisqu’un groupe de travail constitué au sein de la commission de l’économie devra remettre un rapport sur ce sujet vraisemblablement au cours du printemps prochain.
Mes chers collègues, le travail parlementaire a permis d’enrichir ce texte de manière substantielle, puisque, de vingt-cinq articles à l’origine, le projet de loi est passé à cinquante-trois articles, et ce avec la procédure d’urgence !
Rappelons brièvement les quatre grands axes du texte.
Premier axe, il s’agit de mettre la France en conformité avec les dispositions des premier et troisième paquets ferroviaires.
Parmi les mesures prévues figure l’autorisation du cabotage international de voyageurs à partir du 13 décembre 2009. Autrement dit, toute entreprise ferroviaire qui exploite des services de transport international de voyageurs pourra, si elle le souhaite, après cette date, assurer des dessertes intérieures en France, à la condition expresse que l’objet principal du service soit le transport de voyageurs entre des gares situées dans des États membres différents de l’Union européenne et que cette activité ne porte pas atteinte à l’équilibre économique d’un contrat de service public.
Il s’agit d’un point important, et l'Assemblée nationale comme le Sénat ont bien sûr interprété l’expression « objet principal de service », comme devant correspondre à 75 % ou 80 % de l’activité de l’entreprise et non pas, comme certains puristes le voudraient, 50,001 % !
Deuxième axe, il convient d’instituer une autorité de régulation des activités ferroviaires qui sera, en quelque sorte, le « gendarme » du réseau ferroviaire national.
Afin d’organiser la concurrence entre les entreprises de fret ferroviaire et, demain, entre les entreprises de transport de voyageurs, il était en effet indispensable de créer une autorité indépendante qui veille à ce que l’accès aux capacités d’infrastructure sur le réseau soit accordé de manière équitable et non discriminatoire.
La future autorité de régulation des activités ferroviaires, l’ARAF, sera – c’est important ! –également chargée de donner un avis conforme sur les péages qui constituent la rémunération de Réseau ferré de France, RFF.
Concernant l’avis motivé de la Commission européenne adressé à notre pays voilà quelques semaines, nous avons eu ici même, le jeudi 22 octobre, un débat sur ce sujet avec la commission des affaires européennes et le secrétaire d'État chargé des transports, M. Dominique Bussereau. Je crois pouvoir dire que les dispositions du présent projet de loi répondent très largement aux préoccupations de la Commission.
Troisième axe, le texte regroupe diverses mesures relatives à la route.
D’abord, il s’agit d’aménager le régime juridique de certaines concessions routières relatives, entre autres, au tunnel du Mont-Blanc.
Ensuite, justement sur le modèle du cabotage international de voyageurs par train, le texte permet aux poids lourds internationaux de marchandises d’effectuer, sous de strictes conditions, des prestations sur le territoire français. Naturellement, l’État devra mettre en œuvre tous les moyens de contrôle dont il dispose pour s’assurer que cette mesure ne crée pas une concurrence déloyale pour les transporteurs de notre pays. À cet effet, il a été suggéré des carnets de route à souches avec des numéros bien identifiés ; nous verrons...
Quatrième et dernier axe, le texte traite de l’aviation civile, avec plusieurs objectifs.
Il redéfinit ainsi la mission d’équipage, la durée et le régime de travail du personnel navigant de l’aéronautique civile.
En outre, il modifie les règles de représentativité syndicale des personnels navigants techniques, afin de tirer les conséquences de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail.
Sur ces questions essentielles, j’ai la faiblesse de penser que le Parlement a trouvé la voie du consensus entre les principales organisations syndicales représentatives.
Voilà, brièvement rappelée, la philosophie de ce projet de loi.
La commission mixte paritaire n’a finalement apporté que deux modifications, essentiellement rédactionnelles, au texte issu des débats de l’Assemblée nationale. L’une, à l’article 23 septies, relatif aux contrats de transports de déménagement, l’autre, à l’article 26 bis, relative au volume de protection environnementale.
Si le texte d’aujourd’hui s’éloigne peu de celui qui avait été élaboré par les députés, c’est principalement parce que nos collègues de l’Assemblée nationale n’ont pas remis en cause les principaux apports du Sénat et que les dispositions qu’ils ont ajoutées étaient pertinentes et bienvenues.
Pour conclure, j’aimerais évoquer un article qui n’a pas été remis en cause en commission mixte paritaire : l’article 2 bis A (Mme Nicole Bricq s’exclame) relatif à la Régie autonome des transports parisiens et au Syndicat des transports d’Île-de-France,...
Mme Nicole Bricq. Il nous intéresse particulièrement !
M. Francis Grignon, rapporteur. … un article introduit à l’Assemblée nationale par voie d’amendement gouvernemental…
Mme Nicole Bricq. Un amendement scélérat !
M. Francis Grignon, rapporteur. … qui a suscité bien des interrogations.
Au préalable, je dois avouer qu’il eût été préférable d’examiner ces dispositions très importantes au mois de février dernier, au Sénat,…
Mme Nicole Bricq. Ah, quand même !
M. Francis Grignon, rapporteur. … plutôt que de les découvrir en commission mixte paritaire.
Mme Nicole Bricq. C’est scandaleux !
M. Yvon Collin. On l’a souvent dit !
M. Francis Grignon, rapporteur. Je souhaite que le Gouvernement, à l’avenir, s’attache autant que possible à anticiper les transpositions des directives et la bonne application des règlements communautaires.
J’en viens maintenant au fond.
Je tiens à déclarer très clairement que les choix retenus sont tout à fait justifiés et que les inquiétudes et les craintes exprimées ici et là sont infondées.
Quel est, finalement, l’objet de cet article? Il est double.
D’une part, il s’agit d’aménager intelligemment la fin du monopole des opérateurs historiques dans le domaine du transport public urbain en Île-de-France. Ainsi, les contrats en cours conclus avec les entreprises de transport par bus se poursuivront pendant encore quinze ans au plus à compter de l’entrée en vigueur de la loi, cette période étant portée à vingt ans pour le tramway et à trente ans pour le métro et le RER exploités par la RATP.
Je précise, à cette occasion, que tous les projets de construction de nouvelles lignes seront soumis à des appels d’offres ouverts à la concurrence, ce qui fera de Paris l’une des villes les plus concurrentielles en Europe sur cette question.
D’autre part, il s’agit de répartir les actifs entre la RATP et le STIF. En contrepartie du transfert du matériel roulant de la RATP vers le STIF, …
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas une contrepartie !
M. Francis Grignon, rapporteur. … la Régie se voit confier la mission de gérer l’ensemble du réseau d’infrastructures de transport francilien. Cet échange équilibré est tout à fait pertinent, car il garantit l’unité de gestion de ce réseau et protège la capacité d’emprunt du STIF sur les marchés financiers.
Voilà, monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les éléments que je souhaitais mettre en exergue.
En définitive, la commission mixte paritaire a élaboré un texte équilibré dans lequel sont pleinement pris en compte les souhaits du Gouvernement ainsi que les préoccupations des députés et des sénateurs. C’est pourquoi, mes chers collègues, je ne peux que vous inviter à le voter. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à excuser mon collègue Dominique Bussereau, qui n’a pu être présent aujourd’hui. Il représente en effet la France en Syrie, où il défend les intérêts de notre pays pour la réalisation du métro de Damas et pour le port de Lattaquié.
Nous voilà arrivés au terme de notre parcours législatif sur le projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports.
En premier lieu, je tiens à vous remercier pour le travail approfondi qui a été fourni par la Haute Assemblée, plus particulièrement par la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, son président, Jean-Paul Emorine, et son excellent rapporteur, Francis Grignon.
Cette future loi restera une étape importante dans le domaine des transports. En effet, elle traite des transports ferroviaires et guidés, des transports urbains, des transports routiers, des transports aériens et de l’École nationale supérieure maritime. Il n’y manque que le mode fluvial.
Elle permettra de transposer dans la législation française plusieurs directives et règlements européens, notamment le troisième paquet ferroviaire évoqué par M. le rapporteur. Grâce à elle, la France va se mettre en conformité avec les exigences européennes, comme vous l’a expliqué Dominique Bussereau le 22 octobre dernier, ici même.
Qu’apportera cette future loi ?
D’abord, elle permettra la poursuite du processus d’ouverture progressive à la concurrence des transports. Commencée voilà quelques décennies sous l’impulsion de l’Union européenne, cette ouverture a d’abord concerné le transport routier puis le transport aérien ; elle s’exerce dans le domaine ferroviaire de marchandises depuis le 31 mars 2006.
Il ne s’agit pas de se cacher derrière l’Union européenne, qui nous imposerait une concurrence que nous serions contraints de subir. Je crois profondément aux avantages de la concurrence pour le développement des transports : elle profitera à ses clients, les chargeurs comme les voyageurs.
De fait – qui peut le nier ? –, c’est grâce à la concurrence que le transport aérien est devenu accessible à tous et qu’il n’est plus réservé à une clientèle d’affaires. La concurrence a incité les compagnies aériennes à trouver des modes d’exploitation plus efficaces, comme les hubs, qui offrent aux clients un maximum de destinations à choisir ; elle les a aussi amenées à innover avec le modèle low cost.
De la même manière, le transport ferroviaire de fret a bénéficié de l’ouverture à la concurrence avant, bien évidemment, que la crise économique ne vienne brutalement le frapper. En Allemagne, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas, la concurrence dans le transport de marchandises a entraîné une hausse sensible des trafics.
Aujourd’hui, en France, sept entreprises ferroviaires autres que la SNCF circulent sur notre réseau ferré national. Leur part de marché s’est déjà sensiblement développée, puisqu’elle est passée de 5 % environ en 2007 à près de 10 % en 2008, pour même atteindre 13,4 % en juillet dernier.
La loi précisera donc les modalités d’ouverture à la concurrence des services ferroviaires internationaux de voyageurs à compter du 13 décembre prochain et des transports collectifs urbains en Île-de-France à compter du 3 décembre prochain.
Permettez-moi de m’arrêter quelques instants sur cette dernière disposition que les circonstances n’ont pas permis d’examiner ici. Je souhaite en clarifier la portée exacte.
Cet article a pour objet de préparer l’ouverture à la concurrence des transports urbains dans la région d’Île-de-France, ouverture imposée par la réglementation européenne à compter du 3 décembre 2009, c’est-à-dire dans un mois. Il ne concerne ni le réseau RFF, ni la SNCF. Il se borne à transcrire, pour l’Île-de-France, une situation qui existe dans toutes les agglomérations françaises.
Le choix du Gouvernement est une ouverture équilibrée dans l’intérêt des usagers, avec la mise en concurrence pour les nouveaux services institués à compter du 3 décembre 2009 et une ouverture progressive sur les services existants – les bus, dans quinze ans, les tramways, dans vingt ans et les métros, dans trente ans –, cela afin de ne pas désorganiser les services en place de la RATP.
Par ailleurs, le Gouvernement confie à la RATP la responsabilité de la gestion des infrastructures. C’est une évidence que la RATP doit avoir cette gestion pour des raisons de cohérence et de sécurité, parce que nous croyons, nous, au service public du transport en région d’Île-de-France.
Mme Nicole Bricq. Parce que nous, nous n’y croyons pas ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Cet article ne spolie nullement le STIF de ses actifs. Il assure une répartition des biens qui donne au STIF les moyens concrets de mettre en concurrence de futurs exploitants et à la RATP les moyens de jouer pleinement son rôle de gestionnaire de l’infrastructure.
Mme Nicole Bricq. Il faut dire merci, en plus !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Le STIF devient propriétaire du matériel roulant, actuellement propriété de la RATP, et la RATP devient propriétaire de toute l’infrastructure, sachant qu’aujourd’hui elle en est déjà propriétaire de la moitié.
Cet échange de biens, qui se fait dans les deux sens, est équilibré. (Mme Nicole Bricq le conteste.)
Cet article donne ainsi au STIF la capacité de confier l’exploitation des nouvelles lignes et, à terme, des lignes existantes après mise en concurrence, et de jouer pleinement son rôle d’autorité organisatrice.
Certains auraient aimé aller plus loin et ouvrir à la concurrence les transports ferroviaires régionaux de voyageurs.
M. Guy Fischer. Il ne manquerait plus que cela !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Dominique Bussereau a dit à plusieurs reprises qu’il y était favorable. Le comité des parties prenantes, présidé par M. Francis Grignon, doit en préciser les modalités pratiques concernant les personnels, les matériels roulants et les services en gare, modalités qui présideront à une future expérimentation.
Nous devons veiller à ce que la concurrence dans les transports s’effectue dans des conditions équilibrées, loyales et parfaitement transparentes, grâce à des dispositifs de régulation efficaces.
Je voudrais notamment insister sur deux points.
Premièrement, pour ce qui est du secteur ferroviaire, les deux mesures phare de ce texte sont, bien entendu, la création d’une autorité indépendante de régulation ferroviaire et la création, au sein de la SNCF, d’une direction de l’exploitation. Ce service spécialisé, séparé du reste de l’entreprise, aura pour mission de gérer le trafic et la circulation sur le réseau ferroviaire national.
Le Parlement a également insisté sur la neutralité de la gestion des gares pour une bonne concurrence. La création d’une direction des gares au sein de la SNCF va dans ce sens.
Vous avez également souhaité un rapport du Gouvernement sur un éventuel transfert des gares fret à RFF. Bien entendu, le Gouvernement mènera les travaux nécessaires à la remise de ce rapport. Il ne juge toutefois pas opportun de décider un tel transfert au moment où, avec l’ensemble des opérateurs, au premier rang desquels Fret SNCF, il engage un grand plan de redynamisation du fret.
Deuxièmement, pour ce qui concerne le transport routier de marchandises, l’encadrement du cabotage permettra à la profession d’envisager la concurrence européenne avec plus de sérénité. La future loi prévoit également des dispositions permettant de mieux contrôler le respect de la réglementation de ce secteur.
Pour conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à souligner que l’élaboration de ce texte a donné lieu à une concertation particulièrement riche et fructueuse. Je salue à nouveau le travail réalisé par votre rapporteur, qui a su être à l’écoute de tous les acteurs pour aboutir à une solution équilibrée et consensuelle. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Nicolas About applaudit également.)
M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, près d’une année après l’examen par la Haute Assemblée de ce texte qui avait fait l’objet d’une déclaration d’urgence, nous voici réunis pour l’adopter dans sa forme définitive, à l’issue des travaux de la commission mixte paritaire.
La déclaration d’urgence pour le projet de loi qui nous intéresse aujourd’hui visait plus à priver les assemblées d’une seconde lecture qu’à accélérer le processus législatif, qui a été bien long. Nous déplorons cette nouvelle pratique, qui prive les parlementaires de leurs prérogatives. De plus, une seconde lecture aurait été utile au regard des nombreuses évolutions du texte. Je pense notamment à l’introduction d’un titre entier dans le projet de loi.
Pourtant, sur le fond, la philosophie de ce texte reste la même : il s’agit d’ouvrir à la concurrence non seulement les transports ferrés internationaux de voyageurs, mais aussi, à la suite de l’adoption de nombreux amendements déposés par le Gouvernement, les transports routiers de voyageurs.
Pour notre part, nous continuons de penser que, avant toute nouvelle déréglementation, un bilan des libéralisations aurait dû être réalisé, afin d’étudier les conséquences concrètes en matière d’environnement, d’emploi et de service public des politiques européennes, qui font de la concurrence libre et non faussée l’alpha et l’oméga de toute politique publique.
En effet, depuis maintenant des décennies, les institutions européennes, au sein desquelles le Gouvernement intervient, s’acharnent mécaniquement à prôner le démantèlement des services publics nationaux au nom de la modernité et de l’efficacité. C’est vrai pour le rail en général, c’est vrai pour le fret en particulier, mais c’est vrai aussi pour La Poste, comme nous le verrons tout à l’heure.
Mais que constate-t-on ? L’ouverture à la concurrence aura eu pour seul effet de permettre désormais à des opérateurs privés de réaliser des bénéfices dans des secteurs auparavant réservés à l’intervention de la seule puissance publique. Pour les usagers, c’est la double peine : les tarifs augmentent et les services rendus se détériorent !
Objet de la première directive de libéralisation, le fret ferroviaire n’a cessé de décliner depuis son ouverture à la concurrence. À la politique de volume impulsée par le ministre des transports Jean-Claude Gayssot, ce gouvernement a substitué une politique de rentabilité économique, favorisant les autoroutes ferroviaires et abandonnant l’activité de wagon isolé.