M. le président. L'amendement n° 324, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 33, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Si les médicaments visés à l'alinéa précédent sont considérés, par la commission prévue à l'article L. 5123-3 du code de la santé publique, comme n'apportant aucune amélioration du service médical rendu, leur prix ne peut être supérieur à celui du générique du médicament de référence. »
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Monsieur le président, un amendement similaire ayant déjà été défendu par nos collègues socialistes, je retire l’amendement no 325.
L’amendement n° 324, lui, est nouveau. Il vise à vous donner les moyens de faire réaliser des économies à la sécurité sociale ; elle en a bien besoin ! J’espère que vous lui réserverez un accueil plus favorable que celui que vous avez fait à tous les autres amendements que j’ai déposés sur ce projet de loi de financement de la sécurité sociale et que vous avez systématiquement rejetés.
Le présent amendement tend à conditionner le prix des nouveaux médicaments fixé par le CEPS, et remboursé par l’assurance maladie, à l’efficacité relative de ceux-ci. Cette efficacité est établie par la Commission de la transparence en fonction des médicaments de la même classe thérapeutique qui sont déjà sur le marché.
Comme vous le savez, l’inscription sur la liste des produits remboursables de médicaments nouveaux plus chers et n’offrant aucune amélioration du service médical rendu est un phénomène qui va en s’amplifiant. Les chiffres tirés des rapports annuels de la Haute Autorité de santé et relatifs aux travaux de sa Commission de la transparence sont éloquents.
En effet, alors que les médicaments d’ASMR V ne constituaient, en 2000, que 68 % de l’ensemble des médicaments examinés par la Commission de la transparence, ce pourcentage atteignait 91 % en 2006 et – c’est un record ! – 94 % en 2008. En d’autres termes, cela signifie que 94 % des médicaments mis sur le marché n’apportent aucune amélioration du service médical rendu par rapport à ceux qui existent déjà. Cela veut dire aussi que la recherche des laboratoires s’est essoufflée : on ne parvient plus à créer de nouveaux médicaments.
Or, les députés ont démontré dans un point d’information du 13 mars 2007 que les médicaments mis sur le marché deux ans auparavant et ne disposant que d’une ASMR IV ou V avaient entraîné, pour l’assurance maladie, une dépense supplémentaire de 270 millions d’euros par rapport à 2006, soit une augmentation des dépenses totales en remboursement de médicaments de près de la moitié.
L’adoption de cet amendement permettrait que les fausses innovations ne puissent pas, comme c’est le cas aujourd’hui, être vendues à un prix supérieur à celui du générique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Contrairement à ce qu’a indiqué M. Autain, il ne s’agit pas vraiment d’un nouvel amendement.
Je l’ai informé, en commission des affaires sociales, en accord avec Mme Dini, que nous demanderions à M. Noël Renaudin de venir lui expliquer pourquoi sa demande n’est pas justifiée.
La disposition proposée n’étant pas très claire et étant difficile à appliquer dans les cas de médicaments sans générique, je souhaite le retrait de cet amendement.
M. François Autain. Cela vise précisément des médicaments sans générique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je suis défavorable à cet amendement.
Je me suis déjà longuement expliquée, mais j’apporterai un complément d’information à M. Autain sur la rémunération forfaitaire.
Monsieur le sénateur, je tiens à votre disposition le Journal officiel de la République française dans lequel on peut lire que les médecins libéraux touchent un forfait de 40 euros uniquement pour leurs patients bénéficiaires de l’allocation d’éducation spécialisée, l’ALD, alors que les centres de santé perçoivent un forfait de 46 euros pour l’ensemble de leurs patients.
Non seulement les centres de santé touchent une rémunération forfaitaire supérieure à celle des médecins généralistes, mais ils la perçoivent pour l’ensemble de leurs malades : un partout, la balle au centre, monsieur Autain. (Sourires.)
M. François Autain. Je vais essayer de marquer un deuxième but, madame la ministre !
M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement no 324.
Que ceux qui sont favorables à son adoption veuillent bien lever la main.
M. François Autain. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. Je regrette, monsieur Autain, le vote est commencé.
M. François Autain. Vous n’avez pas demandé si quelqu’un voulait expliquer son vote.
M. le président. J’ai dit : je vais mettre aux voix l’amendement no 324. Il fallait demander la parole à cet instant.
M. François Autain. Vous deviez demander si quelqu’un voulait expliquer son vote.
M. le président. Vous pinaillez !
M. François Autain. Je veux simplement expliquer mon vote.
M. le président. Monsieur Autain, c’est moi qui préside et je ne vous donne pas la parole !
M. François Autain. Vous êtes pressé et, finalement, au lieu de gagner du temps, vous en perdez.
M. le président. Pas du tout ! Je n’aime pas la mauvaise foi ! Vous voulez toujours avoir le dernier mot. Il y a des limites !
M. François Autain. J’estime que, comme n’importe quel parlementaire, j’ai le droit d’expliquer mon vote.
M. le président. Je n’ai pas la réputation de chercher à ennuyer les parlementaires ! Je m’efforce de présider avec objectivité, afin que tout se passe bien.
M. François Autain. Jusqu’à présent, cela allait, mais à présent, cela ne va plus ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 325, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 33, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Un médicament ne peut être inscrit sur la liste que s'il a fait la preuve de sa supériorité au cours d'essais cliniques le comparant aux traitements de référence en usage, s'ils existent. »
Cet amendement a été retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 329, présenté par Mme Pasquet, MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 33, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 14-10-1 du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 11° D'organiser l'analyse des coûts de revient et l'observation des différents tarifs des établissements sociaux et médico-sociaux, sur la base d'enquêtes nationales représentatives par catégories homogènes d'établissements et services ou d'interventions sociales ou médico-sociales et en tenant compte d'indicateurs relatifs à leur nature et à leur qualité, notamment pour déterminer sur des bases objectives les tarifs sociaux et médico-sociaux définis aux articles L. 314-3 et L. 314-4 et concourir à l'information des usagers, des personnes morales gestionnaires et des autorités de contrôle et de tarification. »
2° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les modalités d'organisation des enquêtes nationales définies au 11° du I, la communication de leur contenu aux associations et organismes représentés au conseil national consultatif des personnes handicapées ou dans les collèges d'organismes œuvrant au niveau national en faveur des personnes handicapées et des personnes âgées définis aux articles R. 14-10-4 et R. 14-10-5, ainsi que la publication de leurs résultats, sont établis dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Comme dans le domaine sanitaire, les personnes qui relèvent du secteur médicosocial connaissent un reste à charge important, et ce même si l’assurance maladie assure le financement de la partie « soins » des budgets des établissements du secteur médicosocial – ce qui représente tout de même 2,5 milliards d’euros –, s’il existe une prise en charge des unités de soins de longue durée et une mesure de réduction d’impôt qui prend la forme d’une baisse de la TVA pour certains appareillages, etc.
Il n’en demeure pas moins que le reste à charge est important. Il pèse de plus en plus lourd sur les personnes fragilisées et leurs familles, qui les soutiennent souvent, tout en connaissant elles-mêmes d’importantes difficultés.
Les restes à charge, souvent important, proviennent en fait de deux sections : celle de la dépendance et celle de l’hébergement. Ils sont d’autant plus pénalisants que 18 % des personnes âgées de soixante ans et plus bénéficiaient en 2006 du minimum vieillesse, dont le montant ne permet pas le financement d’un placement en établissement ; il faut savoir qu’un allocataire seul touche 610 euros par mois et qu’un couple de deux allocataires perçoit 1095 euros.
Aujourd’hui, la recherche d’un placement pour un proche s’apparente plus à la recherche d’un moindre reste à charge. Les familles tiennent compte de ces éléments financiers pour essayer de trouver une place en établissement. Cette mission pourrait être confiée à la CNSA.
M. le président. L'amendement n° 439, présenté par MM. Vall et Charasse, Mme Laborde et M. Milhau, est ainsi libellé :
Après l'article 33, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le I de l'article L. 14-10-1 du code de l'action sociale et des familles est complété par un 11° ainsi rédigé :
« 11° D'organiser l'analyse des coûts de revient et l'observation des différents tarifs des établissements et services médico-sociaux, sur la base d'enquêtes nationales représentatives par catégorie homogène d'établissements et services ou d'interventions sociales et médico-sociales de nature similaire, en tenant compte d'indicateurs relatifs à leur nature et à leur qualité, notamment pour permettre de déterminer les tarifs plafonds médico-sociaux définis par l'article L. 314-3 du code de l'action sociale et des familles et, pour ce qui concerne les établissements et services d'aide par le travail par l'article L. 314-4 du même code, ainsi que pour concourir à l'information des usagers, des personnes morales gestionnaires et des autorités de contrôle et de tarification ; ».
II. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 312-9 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ils adressent par voie électronique à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie les données nécessaires aux enquêtes mentionnées au 11° du I de l'article L. 14-10-1. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 421, présenté par MM. P. Blanc et Laménie, Mmes Debré, Hermange, Rozier et Procaccia et M. Milon, est ainsi libellé :
Après l'article 33, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
I.- Le I de l'article L. 14-10-1 du code de l'action sociale et des familles est complété par un 11° ainsi rédigé :
« 11° De réaliser, dans des conditions fixées par voie réglementaire, une étude relative à l'analyse des différents coûts de revient et tarifs des établissements et services mentionnés à l'article L. 312-1 et relevant de sa compétence, sur la base des données qu'ils lui transmettent ainsi que le prévoit l'article L. 312-9. »
II.- Après le deuxième alinéa de l'article L. 312-9 du code de l'action et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'ils relèvent de son domaine de compétence, ils transmettent à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie les données nécessaires à l'étude mentionnée au 11° du I de l'article L. 14-10-1 dans des conditions fixées par voie réglementaire. »
La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc. Alors qu'a été engagé un mouvement de rationalisation des coûts et de la convergence des tarifs pour tous les établissements et services sociaux et médicosociaux, il paraît plus que jamais nécessaire de mettre en place, dans ce domaine, un système de recensement centralisé des données comptables, permettant de comparer les tarifs pratiqués et les coûts de revient observés en distinguant, par catégorie homogène, les structures selon la nature des prestations offertes et les publics accueillis.
Outre la nécessité d'objectiver les coûts de revient des opérateurs publics et privés sociaux et médicosociaux, pour prendre en compte les réalités techniques et économiques auxquelles ils doivent faire face, cette étude pourrait servir de base de référence pour la définition des tarifs plafonds par les autorités compétentes et permettrait également de mieux appréhender les évolutions du reste à charge pour les personnes âgées ou handicapées, usagers de ces services ou établissements, et leurs familles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur. L’amendement n° 329 prévoit la réalisation d’une étude sur les coûts de revient et les différents tarifs des établissements médicosociaux, sur la base d’enquêtes nationales.
Cette proposition me paraît tout à fait pertinente à l’heure où se met en place la convergence dans le secteur médicosocial. Cette analyse pourra en effet servir à la définition des tarifs plafonds.
Par ailleurs, cette étude est de nature à améliorer l’information des usagers sur les tarifs pratiqués par les établissements et à mieux cerner les évolutions du reste à charge, encore très élevé aujourd’hui.
Toutefois, la rédaction de l’amendement n° 421 présenté par Paul Blanc, qui est sous-tendu par le même objectif, me paraît plus satisfaisante.
La commission sollicite donc le retrait de l’amendement n° 329 au profit de l’amendement n° 421.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée des aînés. Je suis défavorable à l’amendement n° 329 et j’en demande le retrait au profit de l’amendement n° 421, qui prévoit une étude ponctuelle de la CNSA pouvant servir de référence à des travaux ultérieurs.
D’une part, il ne m’apparaît pas efficient que la CNSA se voie investie d’une nouvelle mission permanente de collecte d’information, alors même que d’autres organismes ont déjà cette vocation au sein de l’appareil administratif.
D’autre part, je souhaite que la réflexion entamée avec la Caisse sur ses missions et ses moyens, dans le cadre de la préparation de la convention d’objectifs et de gestion 2010-2013, puisse aller à son terme avant que toute mission nouvelle lui soit confiée.
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote, sur l’amendement n° 329.
M. Bernard Cazeau. Mon explication de vote vaudra pour les amendements nos 329 et 421, monsieur le président, car ils sont tous les deux importants.
Le reste à charge est peut-être le problème actuel le plus aigu dans le secteur médicosocial, et les réponses de Mme la secrétaire d’État me paraissent brèves et peu argumentées
Prenons l’exemple d’un département rural…
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Au hasard !
M. Bernard Cazeau. … que je connais ; mais on pourrait en prendre d’autres, y compris le vôtre, monsieur le rapporteur général. Le montant moyen des retraites est de l’ordre de 500 à 600 euros, notamment en milieu agricole ; le prix moyen des maisons de retraite se situe entre 1 500 et 1 800 euros, et encore, elles ne sont pas chères !
J’aimerais que vous nous disiez, avant l’explosion, comment régler ce problème. Très souvent, les enfants sont eux-mêmes chargés de famille et ne peuvent faire face à la dépense. Et, concernant l’aide sociale, s’il existe le moindre petit bien que leurs parents ont mis toute une vie à payer, eh bien ! au moment du décès de ceux-ci, le bien rentre dans le patrimoine commun du département qui a fait les avances.
Nous demandons depuis un certain temps que le Gouvernement s’empare du problème du reste à charge. Il est urgent de le régler !
M. le président. Monsieur Fischer, l'amendement n° 329 est-il maintenu ?
M. Guy Fischer. Je vais le retirer, car la rédaction de l’amendement de Paul Blanc est meilleure.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. C’est exact !
M. Guy Fischer. Nous savons que les remarques que vient de formuler M. Cazeau sont pertinentes, car nous sommes tous ici maire ou président de conseil général. Si la mission commune d’information sur la prise en charge de la dépendance, qui a été conduite par MM. Marini et Vasselle, est un peu en panne, et si le Gouvernement a retardé la présentation du projet de loi sur la dépendance, c’est parce que l’on bute sur le problème du financement.
Je ne sais quelles solutions seront envisagées par M. Vasselle, mais l’on se rend bien compte que, dès la naissance, il faudra s’assurer contre la dépendance ; nous avons eu ce débat à maintes reprises avec Paul Blanc.
M. Marini entretient des relations très étroites avec le monde de la finance… On imagine la voie dans laquelle risque de s’engager le Gouvernement. Si, aujourd’hui, il a mis le pied sur le frein, c’est parce que les difficultés sont bien réelles.
Le problème est que, bien souvent, pour payer les notes de frais dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou EPAD, compte tenu du reste à charge, il faut vendre le fruit du travail de toute une vie. La tradition, en France, est de transmettre à ses enfants un patrimoine, même relativement modeste, gagné à la sueur de son front. Mais les choses sont de plus en plus difficiles aujourd’hui.
Cela étant, monsieur le président, je retire mon amendement au profit de celui de Paul Blanc.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Guy Fischer. Si nous sommes tous sensibles à ce problème, nous divergeons sur les solutions à apporter : pour les uns, la solidarité nationale doit jouer, avec la création d’un cinquième risque ; pour les autres, nous n’avons pas les moyens de financer un tel dispositif. C’est un débat que nous aurons certainement dans les prochains mois. Peut-être Mme la secrétaire d’État pourra-t-elle nous en dire plus.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Je ne peux pas ne pas réagir à un certain nombre d’accusations de M. Cazeau.
Je voudrais vous rassurer : cette question du reste à charge est une préoccupation constante du Gouvernement, et en particulier de moi-même, qui chargée des aînés.
Tout ce que je peux vous dire, c’est que ce débat est ouvert, mais qu’il n’est pas encore clos. Je vous donne donc rendez-vous au printemps, où les propositions issues de la mission commune d’information seront évoquées. Vous serez les premiers invités à nourrir ce débat.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Je m’associe aux propos de mes deux collègues, en particulier à ceux de M. Cazeau.
Il ne s’agit pas d’accusations : c’est la réalité, telle qu’elle est vécue aujourd’hui, dans tous les départements français, par les résidents et leurs familles ! La tarification des établissements du secteur médicosocial est un problème majeur pour les personnes âgées.
Je vous avais interrogée ici même, madame la secrétaire d’État, le 27 octobre dernier, pour vous dire combien la deuxième mouture du projet de décret d’application de l’article 63 de la loi de finances adoptée l’année dernière soulevait quasiment autant d’inquiétudes que la première.
Nous savons que la pratique d’une enveloppe forfaitaire aura inévitablement pour conséquence, au vu des dépenses réelles, des reports sur la section hébergement, que risque encore d’accentuer la mise en route de la convergence tarifaire. Ni les conseils généraux ni les résidents ne seront en mesure de supporter les sommes qui leur seront demandées pour cet hébergement. Créer des places, c’est bien, mais encore faut-il que celles-ci soient accessibles aux populations concernées.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 33.
En tant que président de conseil général, je partage tout à fait les observations de mes collègues Bernard Cazeau et Yves Daudigny : c’est la réalité !
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous avez oublié M. Fischer !
M. le président. M. Fischer n’est pas président de conseil général !
L'amendement n° 422, présenté par MM. P. Blanc et Laménie, Mmes Debré, Hermange, Rozier et Procaccia et M. Milon, est ainsi libellé :
Après l'article 33, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pour 2010, le concours mentionné au b du III de l'article L. 14-10-5 du code de l'action sociale et des familles fait l'objet d'une péréquation au bénéfice des départements qui, au titre des exercices des années 2006 à 2010, présentent une dépense cumulée, relative à la prestation de compensation mentionnée à l'article L. 245-1 du même code, minorée de la baisse des montants versés au titre de l'allocation compensatrice mentionnée à l'article 95 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, excédant les concours susmentionnés versés au cours de la même période. Les modalités de cette péréquation sont définies par décret en Conseil d'État, pris après avis du conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie mentionné à l'article L. 14-10-3 du même code.
La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc. Il s’agit d’un amendement un peu plus technique.
L'article L. 14-10-7 du code de l'action sociale et des familles a fixé les critères selon lesquels sont répartis les concours versés aux départements par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie pour couvrir les dépenses relatives à la prestation de compensation du handicap, ou PCH, minorées de la baisse des montants versés au titre de l’allocation compensatrice pour tierce personne, ou ACTP. Un décret en Conseil d'État a défini les pondérations appliquées à chacun de ces critères – potentiel fiscal, population, bénéficiaires de la PCH et montant versés, etc. –, en visant une certaine équité de traitement des départements.
Pourtant, à la fin de 2008, une grande disparité de situation apparaît selon les départements.
Certains présentent un excédent de trésorerie sur les exercices 2006, 2007 et 2008, avec un taux de couverture cumulé des dépenses de PCH – minorées de la baisse des montants versés au titre de l'ACTP – par les contributions de la CNSA supérieur à 100%, ce taux pouvant excéder 150% dans certains cas – par exemple dans le Pas-de-Calais –, tandis que quelques départements présentent un déficit cumulé plus ou moins important, avec un taux de couverture, sur les trois exercices, inférieur à 100%, de l'ordre de 90% ; ce taux est même de 70 % pour le département du Lot.
Au terme de l'exercice 2010, les projections réalisées par la CNSA prévoient une augmentation du nombre de départements concernés par un déficit cumulé de trésorerie : près d'un tiers d'entre eux présenteraient, sur les cinq exercices de 2006 à 2010, un taux de couverture des montants versés au titre de la PCH par les concours cumulés de la CNSA inférieur à 100 %, le taux avoisinant, dans certains cas, seulement 70 %.
C'est la raison pour laquelle cet amendement prévoit la possibilité, pour 2010, d'opérer une péréquation ponctuelle au profit de ces départements en augmentant le concours qui leur sera versé au titre de 2010, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État, après avis du conseil de la CNSA, où siègent des représentants des conseils généraux.
Autrement dit, en 2010, on essaie de remettre les compteurs à zéro en instaurant cette possibilité par décret.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur Malgré la complexité de l’amendement, nous avons tous compris, car M. Paul Blanc a très bien expliqué la situation. (Sourires.)
Cet amendement prévoit le concours de la CNSA au bénéfice des départements au titre de la PCH, et vous souhaitez, monsieur Paul Blanc, que ce concours fasse l’objet d’une péréquation dès 2010. Les modalités de ce dispositif seraient définies par un décret en Conseil d’État après avis de la CNSA.
Comme vous l’avez souligné, il y a une très grande disparité des taux de couverture de la PCH par la CNSA selon les départements. Il est vrai que la mise en place d’un mécanisme de péréquation pourrait être une mesure d’équité.
En outre, vous garantissez que les conseils généraux seraient associés à cette décision, puisqu’ils donneraient un avis dans le cadre du Conseil d’État.
Toutefois, il me semble un peu prématuré de voter un tel dispositif au détour d’un amendement, sans concertation préalable avec les départements, alors que nous sommes tous attachés à la concertation.
Tout en partageant votre point de vue, monsieur le sénateur, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée, en attendant l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, vous connaissez très bien le problème et c’est un débat que nous devons engager, me semble-t-il, collectivement. Mme le rapporteur a raison de rappeler que nous devons engager une concertation. Surtout, il faudra procéder à une expertise approfondie du dispositif.
La solution que vous proposez aurait pour effet de diminuer sensiblement, pour les deux tiers des départements, le concours de 2010. Une telle décision, prise à deux mois du début de l’exercice, pourrait déséquilibrer de façon importante les comptes des conseils généraux concernés, sans leur laisser de réelle possibilité de se retourner et sans qu’une concertation préalable ait pu avoir lieu.
D’abord expertisons, ensuite procédons à une concertation, enfin adaptons le dispositif.
Monsieur le sénateur, je vous demande de retirer votre amendement et je prends devant vous l’engagement de mener une expertise sur ce dispositif, expertise à laquelle vous serez associé.