M. Bernard Cazeau. Cet amendement a pour objet que s’appliquent aussi aux femmes salariées de la fonction publique les dispositions permettant aux femmes dont il est reconnu que la grossesse pathologique est liée à l'exposition in utero au diéthylstilbestrol (DES) de bénéficier d'un congé de maternité spécifique.
M. Guy Fischer. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Favorable.
M. Guy Fischer. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Guy Fischer. Ah !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Laissez-moi le temps de m’expliquer, monsieur Fischer !
Bien évidemment, nous ne sommes pas opposés sur le fond.
Toutefois, telles qu’elle est prévue dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, la disposition accordant un congé de maternité spécifique aux femmes dont il est reconnu que la grossesse pathologique est liée à l'exposition au diéthylstilbestrol a vocation à s’appliquer à l’ensemble des salariées du privé comme aux fonctionnaires des trois fonctions publiques.
M. Nicolas About. Eh oui !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il n’y a donc pas lieu de prévoir de disposition législative supplémentaire pour ces dernières.
En la matière, l’application de la loi de 2004 s’est faite par étapes. Un décret du 30 juin 2006 a d’abord permis aux femmes salariées de bénéficier de ce congé. Un travail d’expertise a ensuite été conduit par le ministère du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, en liaison avec la direction de la sécurité sociale, pour que ce droit puisse effectivement être exercé par les fonctionnaires ayant été exposées au DES. Le décret marquant l’aboutissement de ce travail est rédigé et fait actuellement l’objet d’une consultation par les partenaires sociaux. Il doit être publié prochainement.
Par conséquent, monsieur Cazeau, votre demande est satisfaite.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je veux insister sur le problème soulevé par cet amendement.
L’article dont il est question a été adopté en 2004. Un décret concernant les personnes relevant du régime général a été pris en 2006, soit deux plus tard. Mais, pour les personnels travaillant dans les trois fonctions publiques, le décret n’a toujours pas été publié alors que nous sommes à la fin de l’année 2009, soit cinq ans après le vote de la loi en question !
Madame la ministre, mon collègue Jean-Pierre Sueur vous avait interpellée sur cette question le 5 juin 2009, lors de l’examen du projet de loi HPST.
M. Jean-Pierre Godefroy. Votre réponse fut la suivante : « Le décret concernant les salariées du secteur privé a été publié en 2006. Pour les fonctionnaires, un travail d’expertise est actuellement conduit par les services du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, en liaison avec la direction de la sécurité sociale. »
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous poursuiviez ainsi : « Ces femmes subissent une situation tout à fait injuste. Je prends donc l’engagement formel de prendre contact, dès le début de la semaine prochaine, avec Éric Woerth. »
M. Jean-Pierre Godefroy. Je n’en doute pas un instant !
Vous ajoutiez enfin : « Je ne vois pas de difficultés techniques majeures qui empêcheraient la publication du décret pour les fonctionnaires. Certes, il y a un coût financier, mais il ne doit pas entrer en ligne de compte. »
D’interpellation en interpellation, nous constatons que la situation est toujours sur le point de s’arranger mais ne s’arrange toujours pas !
Madame la ministre, dans quel délai le décret sera-t-il publié ?
M. François Autain. Voilà une question simple qui appelle une réponse simple !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur Godefroy, la publication de ce décret relevant de la responsabilité de M. Éric Woerth, je prends immédiatement l’attache de ses services afin d’être en mesure de vous apporter une réponse au cours de la journée.
M. Jean-Pierre Godefroy. Dans ces conditions, madame la ministre, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 230 est retiré.
Article 36
Pour l’année 2010, les objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès sont fixés :
1° Pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, à 178,8 milliards d’euros ;
2° Pour le régime général de la sécurité sociale, à 155,8 milliards d’euros.
M. le président. L’amendement n° 535, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer le montant :
178,8 milliards d’euros
par le montant :
179,1 milliards d’euros
II. - Alinéa 3
Remplacer le montant :
155,8 milliards d’euros
par le montant :
155,7 milliards d’euros
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Dans le droit-fil des projets de loi de financement de la sécurité sociale précédents, cet amendement vise à modifier les objectifs pour 2010 des dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès. Il s’agit de tirer les conséquences des amendements votés et de rectifier un certain nombre d’erreurs matérielles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Favorable.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures trente.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous me privez du match que dispute Gaël Monfils ! (Exclamations amusées.)
M. François Autain. Désolés !
M. Guy Fischer. La responsabilité est partagée !
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, adopté par l’Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 36.
Article additionnel après l’article 36
M. le président. L’amendement n° 160, présenté par Mmes Le Texier et Jarraud-Vergnolle, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mmes Demontès, Campion, Alquier, Printz, Chevé et Schillinger, MM. Le Menn, Jeannerot, Godefroy, S. Larcher et Gillot, Mmes San Vicente-Baudrin et Ghali, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 36, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport du gouvernement sur la création d’un nouveau sous-objectif de dépenses doit permettre de distinguer, au sein de l’actuel sous-objectif relatif aux dépenses des établissements de santé, les charges respectives et l’évolution des crédits de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie relatifs aux établissements de santé publics d’une part et aux cliniques privées d’autre part.
La parole est à Mme Christiane Demontès.
Mme Christiane Demontès. Je suis désolée, madame la ministre, de vous priver du match de Gaël Monfils …
Mme Christiane Demontès. Je vous aurais volontiers accompagnée, d’ailleurs… Mais, sait-on jamais, peut-être M. le président nous communiquera-t-il les résultats, surtout s’ils sont bons, comme l’a fait hier soir le vice-président pour la rencontre de football entre la France et l’Irlande ! (Sourires.)
J’en viens à l’amendement n° 160, dont l’objet n’est évidemment pas d’opposer le secteur privé au secteur public : il s’agit avant tout d’y voir plus clair !
Les lois de financement de la sécurité sociale pour 2004 et pour 2005 avaient prévu une uniformisation progressive des tarifs, qui devait s’achever en 2012. Mais ce calendrier n’était pas tenable, et l’échéance a été repoussée.
La convergence des tarifs comporte en fait trois aspects : l’uniformisation des tarifs de l’ensemble des hôpitaux publics ; l’uniformisation des tarifs des établissements privés ; l’établissement d’un tarif commun aux hôpitaux publics et privés.
Dans le secteur public, le processus de convergence tarifaire a débuté en 2005, parallèlement à la mise en place progressive des nouvelles modalités de financement. Les établissements privés, pour leur part, sont financés à 100 % par la tarification à l’activité depuis le 1er mars 2005.
Le processus de convergence tarifaire nécessite de connaître les tarifs pratiqués dans chaque établissement de santé afin de rendre possible une comparaison du coût des services hospitaliers dans le secteur public et dans le secteur privé.
Ces écarts de coûts suscitent la polémique. Dans son rapport de juillet 2005, le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie soulignait « la grande opacité qui règne et qui ne permet pas de comprendre la grande variabilité des coûts ».
Aujourd’hui, le Parlement vote l’ONDAM, au sein duquel il fixe la part des dépenses relatives aux établissements de santé. Les dépenses du secteur privé et celles du secteur public ne sont donc pas distinguées. Aussi cet amendement vise-t-il à différencier ces dernières à l’intérieur de l’ONDAM, afin que nous puissions avoir une meilleure connaissance de ces secteurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Afin de respecter la compétence du Gouvernement en matière de définition des sous-objectifs de l’ONDAM, les auteurs de cet amendement suggèrent que le Gouvernement dépose un rapport sur la création d’un nouveau sous-objectif qui permettrait de distinguer, au sein de l’actuel ONDAM hospitalier, les crédits destinés au secteur public et ceux qui sont alloués au secteur privé à but lucratif.
Je rappelle à Mme Demontès que nous avions tenté, lors de l’examen de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, d’introduire cette notion de sous-objectif.
M. Guy Fischer. Les « sous-ONDAM » !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous étions finalement convenus avec Xavier Bertrand que ces sous-ONDAM, comme vous les appelez, resteraient de l’initiative du Gouvernement.
Je ne crois pas que la réflexion ait vraiment mûri depuis. Il faudra peut-être revoir cette disposition à l’avenir.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l’amendement no 160, d’autant plus que celui-ci ne peut être adopté en l’état, son contenu relevant de la loi organique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Permettez-moi tout d’abord de vous saluer, monsieur le président. Je suis très honorée que vous présidiez vous-même cette séance dominicale.
M. François Autain. C’est la coutume !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Madame Demontès, nous avons déjà longuement débattu de la question que vous soulevez à travers l’amendement n° 160. Le Gouvernement ne souhaite pas créer de sous-objectifs de l’ONDAM, ce qui ne l’empêche pas de suivre avec une grande attention l’évolution des masses financières allouées aux deux secteurs public et privé. L’avis est donc défavorable.
Je profite également de cette intervention pour répondre plus précisément à deux questions qui m’ont été posées ce matin, puisque je dispose maintenant des éléments nécessaires.
Monsieur Godefroy, les services de M. Woerth m’informent que le décret visant à permettre aux salariées de la fonction publique de bénéficier de la disposition accordant un congé de maternité spécifique aux femmes dont il est reconnu que la grossesse pathologique est liée à l’exposition au diéthylstilbestrol sera présenté au Conseil supérieur de la fonction publique le 17 décembre prochain et publié au tout début de 2010.
Monsieur Autain, vous m’avez pour votre part interrogée sur la rémunération des directeurs généraux des agences régionales de santé.
S’agissant tout d’abord de la méthode retenue, le mode de rémunération est calqué sur celui des directeurs d’établissements publics et des directeurs d’administration centrale tel qu’il est prévu dans une circulaire de 2008. Le traitement comprend deux parts, l’une fixe et l’autre variable.
La part fixe est elle-même composée de deux éléments : une part fonctionnelle, variant selon la catégorie d’ARS – il en existe cinq –, comprise entre 91 000 euros et 140 000 euros bruts annuels ; une part personnelle, variant selon le cursus et la situation professionnels antérieurs, destinée à assurer un niveau de rémunération aussi proche que possible de celui dont bénéficiait le directeur dans ses fonctions précédentes.
La part variable, qui peut atteindre 20 % de la part fonctionnelle – sauf exception, pour les directeurs les mieux rémunérés –, dépend des résultats (MM. François Autain et Guy Fischer s’exclament.) obtenus par le directeur général en fonction des objectifs fixés, en liaison avec l’intéressé, par le Conseil national d’orientation. J’ai d’ailleurs eu l’occasion au cours de la discussion d’égrener quelques-uns des critères susceptibles d’être pris en compte ; j’ai en particulier indiqué à Mme Hermange que les progrès effectués en matière de dialyse à domicile en seraient un.
S’agissant maintenant de la fourchette des rémunérations, qui varieront donc en fonction des situations individuelles et des résultats obtenus, elle ira d’un minimum de 96 000 euros bruts annuels, dans l’hypothèse d’une part variable nulle, jusqu’à un maximum de 204 000 euros bruts annuels, dans l’hypothèse où la part fixe est à son plafond et où la part variable atteint son plus haut niveau possible, ce qui se produira quand les objectifs auront été respectés.
Les rémunérations des préfigurateurs seront établies selon les mêmes principes et la même grille. Elles seront calculées au prorata du temps passé et tiendront compte de la satisfaction des objectifs contenus dans le cahier des charges de la période de préfiguration, lesquels, bien évidemment, différeront de ceux qui seront assignés aux directeurs généraux des ARS lorsqu’ils seront opérationnels.
Je vous prie de bien vouloir excuser la longueur de cette intervention, monsieur le président, mais je souhaitais répondre à M. Godefroy et à M. Autain de la manière la plus complète et la plus transparente possible.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote sur l’amendement no 160.
M. François Autain. Je vous remercie de ces explications, madame la ministre. Elles montrent que les directeurs généraux des agences régionales de santé sont mieux rémunérés que les préfets ! Ces derniers sont totalement désintéressés, si je puis m’exprimer ainsi, puisque leur salaire n’est indexé ni sur la baisse de la criminalité ni sur la façon dont ils ont interdit ou contenu telle ou telle manifestation, à l’occasion de telle ou telle visite officielle…
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre, et M. Nicolas About. Indexer le salaire des préfets sur leurs résultats, voilà une bonne idée !
M. François Autain. Mieux vaut donc être directeur général d’agence régionale de santé que préfet !
Je regrette, madame la ministre, que vous n’ayez pas émis un avis favorable sur l’amendement n° 160, pas plus que sur l’amendement similaire que nous avons présenté voilà quelques heures.
M. François Autain. Leur adoption nous aurait peut-être permis de combattre les slogans de la récente campagne de publicité de la Fédération de l’hospitalisation privée, la FHP. Souvenez-vous, mes chers collègues : « Pour faire du bien à la Sécu, venez en clinique »… Ou bien : « Arrêtons de jouer avec notre Sécu ! » Ou encore : « Un séjour dans un hôpital public coûte 60 % plus cher que dans une clinique ou un hôpital privé, honoraires médicaux et dépassements d’honoraires inclus. Sur ces bases, le surcoût pour l’assurance maladie est de 8 milliards d’euros par an »… Rappelez-vous, mes chers collègues, nous avions reçu les documents de cette campagne accompagnés d’une boîte de Playmobil… ! Il est certain que la Fédération hospitalière de France ne nous a jamais rien envoyé de tel. Serait-ce parce qu’elle n’a pas suffisamment d’argent ? (Sourires.)
Je regrette aussi que soit refusée la séparation, au sein de l’ONDAM, des crédits des hôpitaux publics de ceux des établissements privés. Elle nous aurait sans doute permis de vérifier l’exactitude des assertions de la FHP !
Je déplore enfin que le Gouvernement n’ait pas pris position sur cette campagne publicitaire. Est-ce à dire qu’il y souscrit ou, au contraire, qu’il la désapprouve, voire la trouve abusive ? Le silence du Gouvernement face à des messages aussi agressifs ne laisse pas de m’inquiéter, et il me semble, madame la ministre, que cette discussion vous offre l’occasion de faire connaître publiquement votre position. Car je ne sache pas que vous vous soyez exprimée sur le sujet ; et si je me trompe, je serai très heureux de me reporter à vos déclarations.
M. le président. Je vous rappelle, mon cher collègue, que nous sommes censés examiner l’amendement présenté par Mme Demontès ! (Sourires.)
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je crains que M. Autain n’accorde pas suffisamment d’intérêt à mes déplacements, et j’en suis plus que navrée : j’en suis chagrinée… (Nouveaux sourires.)
Il aurait dû m’accompagner au congrès de l’Union des régions hospitalières du Sud-Est, qui s’est tenu à Clermont-Ferrand. (M. Jean-Marc Juilhard marque son approbation.) Outre des représentants de la Fédération hospitalière de France, assistait à cette réunion Jean-Loup Durousset, le président de la FHP, en présence de qui j’ai condamné publiquement la campagne publicitaire particulièrement inappropriée qu’a engagée sa fédération.
M. François Autain. Très bien ! C’est tout ce que je voulais savoir !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Aussi, monsieur Autain, je ne comprends pas le procès qui m’est fait.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 160.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 37
Pour l’année 2010, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base et ses sous-objectifs sont fixés comme suit :
(En milliards d’euros) |
|||
Objectif de dépenses |
|||
Dépenses de soins de ville |
75,2 |
||
Dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l’activité |
52,4 |
||
Autres dépenses relatives aux établissements de santé |
18,8 |
||
Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées |
7,0 |
||
Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées |
7,9 |
||
Autres prises en charge |
1,0 |
||
Total |
162,4 |
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, sur l’article.
M. Bernard Cazeau. Arrêtons-nous un instant, mes chers collègues, sur cet article 37, qui traite de la fixation de l’ONDAM.
De notre point de vue, il s’agit de l’article majeur de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale puisqu’y sont déterminées les dépenses que la nation engagera en 2010 au titre de l’assurance maladie de base.
Madame la ministre, vous nous proposez cette année un ONDAM de 162,4 milliards d’euros, soit une hausse de 3 %, avec des objectifs quelque peu angéliques de 2,8 % de progression pour la médecine de ville et pour les établissements de santé. Comme la FHF, nous estimons que l’ONDAM hospitalier, qui est resté identique à celui de 2008, est notoirement insuffisant : il devrait être augmenté d’au moins 4 %.
Ce projet de loi de financement appelle deux remarques.
Tout d’abord, les chiffres correspondent, comme d’habitude, à un ONDAM rationalisé puisqu’ils résultent d’un taux d’augmentation arbitraire appliqué aux dépenses estimées en octobre de l’année en cours. Depuis au moins 2002, d’ailleurs, ils sont systématiquement sous-estimés tout en étant présentés comme réalistes. Le résultat est que vingt-neuf des trente et un CHU se sont trouvés en déficit en 2008, alors qu’ils n’étaient que seize dans ce cas en 2005. Pour 2009, l’AP-HP prévoit un trou de plus de 100 millions d’euros tandis que, selon la conférence des directeurs d’hôpitaux qui s’est tenue en juillet dernier, le déficit des CHU a été de 418 millions d’euros en 2008 et atteindra 480 ou 490 millions d’euros cette année.
Ensuite, cet ONDAM, élaboré par Bercy, n’est pas construit par rapport aux besoins médicaux pour l’année 2010 ; il est purement comptable. Une seule obsession vous guide, somme toute compréhensible : réduire à tout prix les dépenses de soins.
À cet égard, l’article 37 renforcera encore le trouble déontologique des professionnels hospitaliers. Jusqu’à l’adoption de la loi HPST, ils avaient encore le sentiment de pouvoir soigner les patients correctement, au prix d’un accroissement des cadences et de la dégradation de leurs conditions de travail. Aujourd’hui, « il n’y a plus de gras », pour reprendre une expression de ma région : vous attaquez l’os !
Avec l’aggravation programmée des pénuries d’effectifs – M. Fischer l’a évoquée – et les tensions permanentes sur les ressources, on touche au cœur de la relation thérapeutique et à la perception qu’ont les professionnels de la qualité de leurs services. (Mme Christiane Demontès applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 161, présenté par Mmes Le Texier et Jarraud-Vergnolle, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mmes Demontès, Campion, Alquier, Printz, Chevé et Schillinger, MM. Le Menn, Jeannerot, Godefroy, S. Larcher et Gillot, Mmes San Vicente-Baudrin et Ghali, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Il est instauré une péréquation interrégionale de l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie hospitalier, dont la répartition repose sur des indicateurs permettant de tenir compte des besoins de santé publique suivant les différentes régions.
La parole est à Mme Christiane Demontès.
Mme Christiane Demontès. Cet amendement tend à ce que l’enveloppe de l’ONDAM fasse l’objet d’une meilleure répartition entre les régions – d’une péréquation, en quelque sorte –, pour qu’à terme nous disposions de ce que l’on pourrait appeler un « ORDAM », un objectif régional des dépenses de l’assurance maladie qui permettrait de tenir compte des spécificités de chaque région en termes d’indicateurs de mortalité, de démographie, etc.
À l’intérieur d’une politique qui doit rester nationale et continuer d’être déterminée à ce niveau, il est utile de pouvoir encourager certaines actions spécifiques et appropriées. Il s’agit de se donner les moyens de réduire de la façon la plus efficace possible les inégalités de santé, qui sont de plus en plus criantes. Comme dans d’autres domaines, cela passe par une péréquation des dotations régionalisées.
Il s’agit pour les parlementaires que nous sommes d’un débat fondamental : est en jeu la reconnaissance publique d’inégalités sanitaires, lesquelles ne se réduisent pas à l’accès aux soins, bien que nos discussions se cristallisent souvent sur ce point.
Les indicateurs d’espérance de vie sont certes les plus simples, mais on observe aussi que certaines maladies sont plus ou moins présentes selon les régions. Les explications ne vont d’ailleurs pas toujours de soi – je pense par exemple aux taux de suicide.
On peut en effet envisager des objectifs régionaux différenciés : hospitalier, de ville et médico-social. Nous proposons aujourd’hui de n’ouvrir la réflexion que pour une première étape, et non pour une décentralisation immédiate.
Cohérents dans nos positions, nous sommes favorables à la régionalisation des fonds, comme nous étions favorables aux agences régionales de santé, les ARS, mais à des ARS moins centralisées que celles que vous avez mises en place, madame la ministre. Nous souhaitions en effet que les politiques soient définies dans un cadre régional : les ARS auraient pu jouer ce rôle tout en gardant, bien évidemment, un lien avec le cadre national.
L’amendement ne vise à rien d’autre qu’à instaurer une péréquation interrégionale, à l’instar des péréquations qui existent, notamment, pour les taxes. Cette première étape lancerait le débat sur la régionalisation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La loi organique du 22 juillet 1996 relative aux lois de financement de la sécurité sociale fixe, pour l’ensemble des régimes obligatoires de base, un objectif national de dépenses d’assurance maladie. Le législateur n’a pas jugé bon, en son temps, d’y inscrire également l’objectif régional que vous demandez aujourd’hui, madame Demontès. Toute modification pérenne allant dans ce sens devrait donc être débattue dans le cadre de l’examen d’un nouveau projet de loi organique.
Cela étant, rien n’interdit au Gouvernement ni à la commission d’anticiper le dépassement du strict cadre de la loi organique dans le sens que vous suggérez !
Par ailleurs, ma chère collègue – et je réponds là également à M. Cazeau –, j’imagine difficilement que leur situation déficitaire interdise à certains établissements de soigner les patients qui se présentent à eux ! Je m’inscris en faux contre une telle affirmation.
Quant à établir une péréquation de la dotation régionale entre les différents établissements d’une même région en fonction de leur situation comptable, cela ne me paraît pas très vertueux. Les établissements déficitaires seraient encouragés à le demeurer, tandis que ceux qui ne le sont pas auraient tout intérêt à le devenir puisque ce serait pour eux la garantie de se voir attribuer l’année suivante un ONDAM supérieur à celui de l’année en cours.
Mme Christiane Demontès. C’est votre interprétation !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, c’est une interprétation possible ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Qui plus est, il serait surprenant que Mme la ministre et Mme Podeur, directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins, ne tiennent pas compte de certaines spécificités régionales dans l’attribution des moyens. La loi HPST a introduit cette notion de spécificité régionale en matière de gestion du risque. Dès lors, j’imagine que, lorsqu’elle répartit l’enveloppe de l’ONDAM entre les établissements hospitaliers publics et privés, Mme la ministre tient compte de ces spécificités et des besoins particuliers de telle ou telle région !
La disposition législative que vous proposez d’introduire dans ce projet de loi ne me paraît donc pas a priori nécessaire, car Mme la ministre, qui accomplit en la matière un excellent travail, procède avec un soin particulier à la répartition des crédits. Ainsi qu’elle l’a reconnu, nous disposons d’importantes marges d’efficience.
Pour toutes ces raisons, madame Demontès, la commission ne peut accéder à votre demande et vous saurait gré de bien vouloir retirer votre amendement.