Sommaire
Présidence de M. Jean-Claude Gaudin
Secrétaires :
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. Daniel Raoul.
MM. Michel Charasse, le président.
3. Loi de finances pour 2010 – Suite de la discussion d'un projet de loi
Articles de récapitulation des crédits
Amendement no II-390 du Gouvernement. – MM. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État ; Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Mme Nicole Bricq. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no II-391 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur général. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no II-392 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur général. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles non rattachés (suite)
Articles additionnels avant l'article 43 (suite)
Amendement n° II-206 de M. Thierry Foucaud. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, Mme Nicole Bricq. – Rejet.
Amendement n° II-111 de M. Thierry Foucaud. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, Mme Nicole Bricq. – Rejet.
Amendement n° II-198 rectifié bis de M. Jean-Paul Fournier. – MM. Charles Revet, le rapporteur général, le ministre, Albéric de Montgolfier, Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Jacques Blanc, Robert del Picchia, Mme Nicole Bricq. – Retrait.
Amendements identiques nos II-101 rectifié bis de M. Roland Courteau et II-252 de M. Yann Gaillard. – Mme Nicole Bricq, MM. Yann Gaillard, le rapporteur général, le ministre. – Retrait des deux amendements.
Amendement n° II-209 de M. Thierry Foucaud. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° II-210 de M. Thierry Foucaud. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° II-157 de la commission. – MM. le rapporteur général, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-260 rectifié de M. Didier Guillaume. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 43
Amendements nos II-208 rectifié, II-207 rectifié de M. Thierry Foucaud, II-265 de Mme Nicole Bricq et II-158 de la commission. – M. Bernard Vera, Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre, Jean-Pierre Fourcade, Alain Lambert, Michel Charasse, Charles Revet, le président de la commission, Michel Magras. – Rejet des amendements nos II-208 rectifié, II-265 et 207 rectifié ; adoption de l'amendement no II-158 insérant un article additionnel.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° II-103 de M. Thierry Foucaud ; amendements identiques nos II-159 de la commission et II-279 de Mme Nicole Bricq ; amendements identiques nos II-160 de la commission et II-67 rectifié bis de M. Dominique Braye et ; amendements nos II-161 de la commission et II-278 de Mme Nicole Bricq. – MM. Bernard Vera, le rapporteur général, Claude Haut, Adrien Gouteyron, le ministre. – Retrait des amendements nos II-160 et II-67 rectifié bis ; rejet de l’amendement no II-103 ; adoption des amendements nos II-159, II-279, II-161 et II-278.
Adoption de l'article modifié.
Amendements identiques nos II-104 de M. Thierry Foucaud et II-280 de Mme Nicole Bricq. – MM. Thierry Foucaud, Claude Haut, le rapporteur général, le ministre, Adrien Gouteyron, Mme Nicole Bricq, M. le président de la commission. – Rejet des deux amendements.
Amendements no II-234 rectifié bis de M. Gérard Cornu. – MM. Charles Revet, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Amendement no II-162 de la commission. – M. Charles Guené. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° II-281 de Mme Nicole Bricq et II-383 de la commission. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre, le président de la commission, Mme Nicole Bricq, M. Michel Charasse. – Rejet de l’amendement no II-281 ; retrait de l’amendement no II-383.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 45
M. le rapporteur général, Mme Nicole Bricq, M. le président
M. Jean-Pierre Godefroy, Mme Raymonde Le Texier, MM. Martial Bourquin, Bernard Vera.
Amendement no II-105 de Mme Annie David. – M. Thierry Foucaud.
4. Hommage à une personnalité étrangère
5. Loi de finances pour 2010. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Articles non rattachés (suite)
Amendements identiques nos II-105 (suite) de Mme Annie David, 172 rectifié quater de M. Yvon Collin et II-261 de M. Jean-Pierre Godefroy. – MM. Michel Charasse, Jean-Pierre Godefroy, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État ; Jean-Pierre Sueur, Thierry Foucaud, Denis Badré, Mmes Raymonde Le Texier, Catherine Procaccia, M. Martial Bourquin, Mme Nicole Bricq, MM. Bernard Vera, Jean Arthuis, président de la commission des finances. – Rejet, par scrutin public, des trois amendements.
Amendements nos II-385 de la commission et II-28 rectifié de M. Jean-Jacques Jégou. – MM. le rapporteur général, Denis Badré, le ministre, Jean-Pierre Godefroy, Thierry Foucaud, Charles Guené. – Retrait de l’amendement no II-28 rectifié ; adoption de l’amendement no II-385.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° II-163 de la commission. – M. le rapporteur général, Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi ; Gérard Longuet. – Adoption de l'amendement supprimant l'article.
M. Martial Bourquin.
Amendement n° II-262 de Mme Patricia Schillinger. – MM. Jean-Marc Todeschini, le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.
Amendement n° II-173 de M. Yvon Collin. – MM. Michel Charasse, le rapporteur général, Mme la ministre. – Retrait.
Adoption de l'article.
Amendement n° II-263 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, M. le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.
Amendement n° II-106 de M. Thierry Foucaud. – MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, Mme la ministre. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 45 quinquies
Amendement n° II-271 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, M. le rapporteur général, Mme la ministre. – Retrait.
Amendement n° II-272 rectifié de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, M. le rapporteur général, Mme la ministre, M. le président de la commission. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos II-194 rectifié quinquies de Mme Catherine Procaccia et II-164 rectifié de la commission. – Mme Catherine Procaccia, M. le rapporteur général, Mme la ministre, M. Albéric de Montgolfier, Mme Nicole Bricq, M. le président de la commission. – Retrait de l’amendement no II-164 rectifié ; adoption de l’amendement no II-194 rectifié quinquies supprimant l'article.
Articles additionnels après l’article 45 sexies
Amendement n° II-204 rectifié de M. Jean-Pierre Fourcade. – MM. Gérard Longuet, le rapporteur général, Mme la ministre. – Retrait.
Amendement n° II-156 rectifié bis de M. Adrien Gouteyron. – MM. Adrien Gouteyron, le rapporteur général, Mme la ministre, MM. le président de la commission, Michel Charasse. – Retrait.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° II-165 rectifié bis de la commission. – MM. le rapporteur général, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l’article 46
Amendements nos II-38 rectifié ter de Mme Catherine Dumas et II-273 de M. François Patriat. – Mme Catherine Dumas, MM. Jean-Pierre Sueur, le rapporteur général, le ministre, Yann Gaillard, Gérard Miquel. – Adoption de l’amendement n° II-38 rectifié ter, l’amendement n° II-273 devenant sans objet.
Amendement no II-228 rectifié bis de M. Jean Bizet. – MM. Charles Revet, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Amendement no II-229 rectifié bis de M. Jean Bizet. – MM. Charles Revet, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Amendement n° II-203 rectifié de M. Jean-Paul Fournier. – MM. Charles Revet, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Amendement n° II-230 rectifié bis de M. Jean Bizet. – M. Charles Revet. – Retrait.
Amendement n° II-384 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur général. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° II-166 de la commission. – MM. le rapporteur général, le ministre, Gérard Miquel. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l’article 46 ter
Amendements nos II-211 et II-213 de M. Thierry Foucaud. – MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, le ministre. – Irrecevabilité des deux amendements.
M. Martial Bourquin
Amendement n° II-191 rectifié de M. Gérard Cornu. – MM. Robert del Picchia, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Reprise de l’amendement n° II-191 rectifié bis par M. Martial Bourquin. – MM. Martial Bourquin, Jean-Pierre Sueur. – Rejet.
Amendement n° II-394 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur général. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendements identiques nos II-108 de M. Thierry Foucaud et II-282 de Mme Nicole Bricq. – MM. Bernard Vera, François Marc, le rapporteur général, le ministre, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Marc Todeschini, le président de la commission, Gérard Miquel. – Rejet des deux amendements.
Amendement nos II-283 de Mme Nicole Bricq et II-284 de M. Thierry Repentin. – M. François Marc, Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre. – Retrait de l’amendement n° II-284 ; rejet de l’amendement n° II-283.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 48 bis
Amendement n° II-294 rectifié bis de M. Gérard Miquel. – MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre, le président de la commission, Charles Guené. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles 48 ter, 48 quater, 48 quinquies, 48 sexies. – Adoption
Articles additionnels après l'article 48 sexies
Amendement n° II-285 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre, Charles Guené, le président de la commission. – Rejet.
Amendement n° II-286 de M. Michel Sergent. – MM. Marc Massion, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Amendement n° II-296 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre, le président de la commission. – Rejet.
Amendement n° II-264 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 49
Amendement n° II-275 de Mme Nicole Bricq. –MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° II-307 de M. Philippe Adnot. – MM. Philippe Adnot, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Articles additionnels avant l'article 49 bis
Amendements nos II-197 de M. Jean Arthuis, II-109 rectifié, II-212 rectifié de M. Thierry Foucaud, II-29 rectifié à II-33 rectifié de M. Jean-Jacques Jégou et II-276 de Mme Nicole Bricq. – MM. Jean Arthuis, Bernard Vera, Denis Badré, Thierry Foucaud, Mme Nicole Bricq, MM. le rapporteur général, le ministre. – Rejet, par deux scrutins publics des amendements nos II-197 et II-30 rectifié ; rejet des amendements nos II-109 rectifié, II-29 rectifié, II-31 rectifié à II-33 rectifié et II-212 rectifié ; irrecevabilité de l’amendement n°II-276.
Articles additionnels avant l'article 50
Amendement no II-287 de M. Gérard Miquel. – MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° II-235 rectifié de M. Charles Revet. – MM. Charles Revet, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Mise au point au sujet d’un vote
MM. Robert del Picchia, le président.
Articles additionnels avant l’article 50 (suite)
Amendement n° II-293 de M. Gérard Miquel. – MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre. – Rejet.
Amendement n° II-291 de M. Gérard Miquel. – MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre. – Retrait
Amendement n° II-289 rectifié de M. Gérard Miquel. – MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre. – Retrait
Amendement n° II-292 de M. Gérard Miquel. – Retrait
MM. Charles Revet, le ministre.
Amendements nos II-39 rectifié quater et II-40 rectifié ter de M. Charles Revet. – Retrait des deux amendements.
MM. le rapporteur général, François Marc.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 50
Amendement n° II-298 rectifié de M. Thierry Repentin. – MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre. – Rejet
Amendement n° II-299 de M. Thierry Repentin. – MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre. – Rejet
Amendement n° II-250 de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Amendements nos II-267 et II-268 de M. Thierry Repentin. – MM. Jean-Marc Todeschini, le rapporteur général, le ministre. – Rejet des deux amendements.
Amendement n° II-251 de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Amendement n° II-249 de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Amendement n° II-266 rectifié de M. Thierry Repentin. – MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-269 de M. Thierry Repentin. – MM. Jean-Marc Todeschini, le rapporteur général, le ministre, Gérard Miquel. – Retrait.
Amendement n° II-231 rectifié de M. Albéric de Montgolfier. – MM. Albéric de Montgolfier, le rapporteur général, le ministre. – Retrait.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
Secrétaires :
Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
M. Daniel Raoul.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour un rappel au règlement.
M. Michel Charasse. Monsieur le président, par périodes diverses, les assemblées parlementaires de notre pays bruissent de commentaires sur la prétendue insuffisance des moyens d’expertise et des moyens techniques dont disposent les parlementaires pour travailler, tout cela aboutissant toujours à la même conclusion : il faut faire appel à des experts privés, il faut faire appel à des cabinets extérieurs privés et, parfois, « il faut augmenter les effectifs des personnels des assemblées ».
J’entendais ce matin, à la radio, que l’Assemblée nationale – mais ce sont ses affaires et je me garderai bien de juger ce qu’elle fait, en toute autonomie, tant que l’autonomie existe encore… –, l’Assemblée nationale, disais-je et plus particulièrement, me semble-t-il, sa commission des lois avaient décidé de consulter un cabinet d’expertise sur des problèmes juridiques tordus qui éviteront peut-être effectivement, à la faveur de simplifications, de supprimer maladroitement des dispositions existantes. Mais passons !
Je voudrais dire que nous sortons à peine d’un débat technique très compliqué sur la taxe professionnelle et que, quoi qu’on pense sur le fond de la réforme – et nous sommes un certain nombre ici qui ne l’avons pas votée – , il faut rendre hommage à l’équipe technique de la commission des finances.
Rien n’aurait été aussi bien fait techniquement si nous étions passés par des experts extérieurs parce que, pour aboutir au travail qui a été soumis au Sénat, il fallait connaître la vie publique, les institutions, le Parlement, de l’intérieur comme de l’extérieur, les collectivités territoriales, la matière fiscale, les systèmes de compensation, etc. Que je sache, il n’y a pas de cabinet privé qui soit capable de faire cela en disposant d’autant de connaissances sur tous ces sujets et de bien d’autres encore !
Je pense que nous avons intérêt à veiller à ce que notre assemblée conserve toujours les moyens d’avoir, à notre disposition, un personnel technicien de très haut niveau et de très haute tenue, mobilisable jours et nuits pendant plusieurs semaines.
Je voudrais donc rendre hommage aux uns et aux autres, étant précisé, bien entendu, que tous ces travaux ont été menés sous la conduite éclairée du président et du rapporteur général de la commission des finances. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. C’est exactement ce que j’allais ajouter, monsieur Charasse. Je suis toujours très impressionné par la qualité, la compétence et la dextérité dans des sujets difficiles de M. le président de la commission des finances, de M. le rapporteur général, ainsi que de M. le ministre du budget. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
3
Loi de finances pour 2010
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010 adopté par l’Assemblée nationale (nos 100 et 101).
Articles de récapitulation des crédits
M. le président. Nous en arrivons aux articles de récapitulation des crédits.
Tous les crédits afférents aux missions ayant été examinés, le Sénat va maintenant statuer sur les articles qui portent récapitulation de ces crédits.
Le service de la séance a procédé à la rectification de l’état B, compte tenu des votes intervenus dans le cadre de la seconde partie. Les états B, C, D et E ont été annexés au « dérouleur ».
J’appellerai successivement l’article 35 et l’état B annexé relatif aux crédits des missions, l’article 36 et l’état C annexé relatif aux crédits des budgets annexes, l’article 37 et l’état D annexé relatif aux crédits des comptes d’affectation spéciale et des comptes de concours financiers, l’article 38 et l’état E annexé relatif aux autorisations de découvert au titre des comptes de commerce et des comptes d’opérations monétaires, les articles 39, 40 et 41 relatifs aux plafonds des autorisations d’emplois pour 2010, l’article 42 relatif aux reports de crédits de paiement.
SECONDE PARTIE
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
TITRE IER
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2010. – CRÉDITS ET DÉCOUVERTS
I. – CRÉDITS DES MISSIONS
Article 35 et état B
Il est ouvert aux ministres, pour 2010, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 381 203 968 005 € et de 379 741 845 043 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l’article 35 et de l’état B annexé.
(L'article 35 et l’état B sont adoptés.)
Article 36 et état C
Il est ouvert aux ministres, pour 2010, au titre des budgets annexes, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 2 151 756 011 € et de 2 130 326 793 €, conformément à la répartition par budget annexe donnée à l’état C annexé à la présente loi.
État C
RÉPARTITION, PAR MISSION ET PROGRAMME, DES CRÉDITS DES BUDGETS ANNEXES
BUDGETS ANNEXES
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Contrôle et exploitation aériens |
1 952 328 588 |
1 937 460 588 |
Soutien aux prestations de l’aviation civile |
1 304 728 588 |
1 302 108 588 |
Dont charges de personnel |
1 100 475 588 |
1 100 475 588 |
Navigation aérienne |
513 799 000 |
492 929 000 |
Transports aériens, surveillance et certification |
56 619 000 |
61 876 000 |
Formation aéronautique |
77 182 000 |
80 547 000 |
Publications officielles et information administrative |
199 427 423 |
192 866 205 |
Edition et diffusion |
101 033 168 |
99 593 426 |
Dont charges de personnel |
31 359 667 |
31 359 667 |
Pilotage et activités de développement des publications |
98 394 255 |
93 272 779 |
Dont charges de personnel |
41 256 010 |
41 256 010 |
Totaux |
2 151 756 011 |
2 130 326 793 |
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l’article 36 et l’état C annexé.
(L'article 36 et l’état C sont adoptés.)
Article 37 et état D
Il est ouvert aux ministres, pour 2010, au titre des comptes d’affectation spéciale et des comptes de concours financiers, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 130 370 212 149 € et de 130 108 212 149 €, conformément à la répartition par compte donnée à l’état D annexé à la présente loi.
État D
RÉPARTITION, PAR MISSION ET PROGRAMME, DES CRÉDITS DES COMPTES D’AFFECTATION SPÉCIALE ET DES COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS
I. – COMPTES D’AFFECTATION SPÉCIALE
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route |
212 050 000 |
212 050 000 |
Radars |
196 000 000 |
196 000 000 |
Fichier national du permis de conduire |
16 050 000 |
16 050 000 |
Développement agricole et rural |
114 500 000 |
119 500 000 |
Développement et transfert en agriculture |
52 100 000 |
51 600 000 |
Recherche appliquée et innovation en agriculture |
62 400 000 |
67 900 000 |
Gestion du patrimoine immobilier de l’État |
900 000 000 |
900 000 000 |
Contribution au désendettement de l’État |
30 000 000 |
30 000 000 |
Contribution aux dépenses immobilières |
140 000 000 |
140 000 000 |
Contribution aux dépenses immobilières : expérimentations Chorus |
730 000 000 |
730 000 000 |
Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien |
600 000 000 |
600 000 000 |
Désendettement de l’État |
0 |
0 |
Optimisation de l’usage du spectre hertzien |
600 000 000 |
600 000 000 |
Participations financières de l’État |
5 000 000 000 |
5 000 000 000 |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État |
4 000 000 000 |
4 000 000 000 |
Pensions |
51 123 993 529 |
51 123 993 529 |
Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité |
46 682 000 000 |
46 682 000 000 |
Dont titre 2 |
46 681 500 000 |
46 681 500 000 |
Ouvriers des établissements industriels de l’État |
1 810 785 929 |
1 810 785 929 |
Dont titre 2 |
1 801 907 589 |
1 801 907 589 |
Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions |
2 631 207 600 |
2 631 207 600 |
Dont titre 2 |
15 100 000 |
15 100 000 |
Totaux |
57 950 543 529 |
57 955 543 529 |
II. – COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Accords monétaires internationaux |
0 |
0 |
Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine |
0 |
0 |
Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale |
0 |
0 |
Relations avec l’Union des Comores |
0 |
0 |
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics |
7 850 744 588 |
7 850 744 588 |
Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune |
7 500 000 000 |
7 500 000 000 |
Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics |
100 000 000 |
100 000 000 |
Avances à des services de l’État |
250 744 588 |
250 744 588 |
Avances à l’audiovisuel public |
3 122 754 032 |
3 122 754 032 |
France Télévisions |
2 092 233 200 |
2 092 233 200 |
ARTE France |
241 934 420 |
241 934 420 |
Radio France |
583 862 843 |
583 862 843 |
Contribution au financement de l’action audiovisuelle extérieure |
117 517 100 |
117 517 100 |
Institut national de l’audiovisuel |
87 206 469 |
87 206 469 |
Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres |
339 600 000 |
339 600 000 |
Avances au titre du paiement de l’aide à l’acquisition de véhicules propres |
339 600 000 |
339 600 000 |
Avances au titre du paiement de la majoration de l’aide à l’acquisition de véhicules propres en cas de destruction simultanée d’un véhicule de plus de quinze ans |
0 |
0 |
Avances aux collectivités territoriales |
59 991 800 000 |
59 991 800 000 |
Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie |
6 800 000 |
6 800 000 |
Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes |
59 985 000 000 |
59 985 000 000 |
Prêts à des États étrangers |
1 004 000 000 |
737 000 000 |
Prêts à des États étrangers, de la Réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d’infrastructure |
400 000 000 |
300 000 000 |
Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France |
229 000 000 |
229 000 000 |
Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers |
375 000 000 |
208 000 000 |
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés |
110 770 000 |
110 770 000 |
Prêts et avances à des particuliers ou à des associations |
770 000 |
770 000 |
Prêts pour le développement économique et social |
10 000 000 |
10 000 000 |
Prêts à la filière automobile |
100 000 000 |
100 000 000 |
Totaux |
72 419 668 620 |
72 152 668 620 |
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l’article 37 et l’état D annexé.
(L'article 37 et l’état D sont adoptés.)
II. – AUTORISATIONS DE DÉCOUVERT
Article 38 et état E
I. – Les autorisations de découvert accordées aux ministres, pour 2010, au titre des comptes de commerce, sont fixées au montant de 17 975 609 800 €, conformément à la répartition par compte donnée à l’état E annexé à la présente loi.
II. – Les autorisations de découvert accordées au ministre chargé de l’économie, pour 2010, au titre des comptes d’opérations monétaires, sont fixées au montant de 400 000 000 €, conformément à la répartition par compte donnée à l’état E annexé à la présente loi.
État E
RÉPARTITION DES AUTORISATIONS DE DÉCOUVERT
I. – COMPTES DE COMMERCE
(En euros) |
||
Numérodu compte |
Intitulé du compte |
Autorisation de découvert |
901 |
Approvisionnement des armées en produits pétroliers |
125 000 000 |
912 |
Cantine et travail des détenus dans le cadre pénitentiaire |
23 000 000 |
910 |
Couverture des risques financiers de l’État |
862 000 000 |
902 |
Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État |
0 |
903 |
Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État |
16 700 000 000 |
Section 1 Opérations relatives à la dette primaire et gestion de la trésorerie |
15 000 000 000 |
|
Section 2 Opérations de gestion active de la dette au moyen d’instruments financiers à terme |
1 700 000 000 |
|
913 |
Gestion des actifs carbone de l’État |
85 000 000 |
904 |
Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes |
0 |
905 |
Liquidation d’établissements publics de l’État et liquidations diverses |
0 |
907 |
Opérations commerciales des domaines |
0 |
908 |
Opérations industrielles et commerciales des directions départementales et régionales de l’équipement |
180 000 000 |
909 |
Régie industrielle des établissements pénitentiaires |
609 800 |
Total |
17 975 609 800 |
II. – COMPTES D’OPÉRATIONS MONÉTAIRES
|
(En euros) |
|
Numérodu compte |
Intitulé du compte |
Autorisation de découvert |
951 |
Émission des monnaies métalliques |
0 |
952 |
Opérations avec le Fonds monétaire international |
0 |
953 |
Pertes et bénéfices de change |
400 000 000 |
Total |
400 000 000 |
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l’article 38 et l’état E annexé.
(L'article 38 et l’état E sont adoptés.)
TITRE II
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2010. – PLAFONDS DES AUTORISATIONS D’EMPLOIS
Article 39
Le plafond des autorisations d’emplois de l’État pour 2010, exprimé en équivalents temps plein travaillé, est réparti comme suit :
Désignation du ministère ou du budget annexe |
Plafond exprimé en équivalents temps plein travaillé |
I. – Budget général |
2 007 745 |
Affaires étrangères et européennes |
15 564 |
Alimentation, agriculture et pêche |
33 795 |
Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l’État |
145 286 |
Culture et communication |
11 518 |
Défense |
309 562 |
Écologie, énergie, développement durable et mer |
66 224 |
Économie, industrie et emploi |
15 097 |
Éducation nationale |
963 666 |
Enseignement supérieur et recherche |
53 513 |
Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire |
615 |
Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales |
283 343 |
Justice et libertés |
73 594 |
Santé et sports |
6 401 |
Services du Premier ministre |
8 338 |
Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville |
21 229 |
|
|
II. – Budgets annexes |
12 507 |
Contrôle et exploitation aériens |
11 609 |
Publications officielles et information administrative |
898 |
|
|
Total général |
2 020 252 |
M. le président. L'amendement n° II-390, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2, tableau
1° Ligne : « I. Budget général »
Remplacer le nombre :
2 007 745
par le nombre :
2 007 698
2° Ligne : « Alimentation, agriculture et pêche »
Remplacer le nombre :
33 795
par le nombre :
33 820
3° Ligne : « Culture et communication »
Remplacer le nombre :
11 518
par le nombre :
11 496
4° Ligne : « Éducation nationale »
Remplacer le nombre :
963 666
par le nombre :
963 616
5° Ligne : « Total général »
Remplacer le nombre :
2 020 252
par le nombre :
2 020 205
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État. Cet amendement a pour objet de tirer les conséquences, sur le plafond des autorisations d’emplois, des votes intervenus lors de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances.
Il s’agit de tenir compte, d’une part, de l’augmentation de 50 équivalents temps plein travaillé du programme « Enseignement technique agricole », par redéploiement au sein de la mission « Enseignement scolaire », et, d’autre part, des ajustements liés au transfert des compétences exercées par les ministères aux collectivités locales, pour les services de l’aménagement foncier, et à des opérateurs.
Au total, le plafond des autorisations d’emplois de l’État est diminué de 47 équivalents temps plein travaillé pour 2010.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise en particulier à tirer les conséquences de l’amendement conjoint de Gérard Longuet, rapporteur spécial de la commission des finances sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire », et de Jacques Legendre, président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, tendant à transférer des emplois du budget de l’enseignement scolaire vers celui de l’enseignement agricole, de façon à honorer les engagements pris lors des assises nationales de l’enseignement agricole public.
Je crois que nous pouvons nous en féliciter et remercier le Gouvernement d’effectuer cette coordination. Notre avis est très favorable.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. En ce début de séance, permettez-moi, mes chers collègues, d’avoir recours à une formule un peu triviale : on déshabille Pierre pour habiller Paul ! L’enseignement scolaire contribue tout de même beaucoup à l’objectif de réduction drastique des dépenses du Gouvernement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 39, modifié.
(L'article 39 est adopté.)
Article 40
Le plafond des autorisations d’emplois des opérateurs de l’État pour 2010, exprimé en équivalents temps plein, est fixé à 336 163 emplois. Ce plafond est réparti comme suit :
Missions et programmes |
Plafondexprimé en équivalents temps plein |
Action extérieure de l’État |
6 510 |
Rayonnement culturel et scientifique |
6 510 |
Administration générale et territoriale de l’État |
116 |
Administration territoriale |
116 |
Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales |
16 206 |
Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires |
4 535 |
Forêt |
10 595 |
Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation |
1 069 |
Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture |
7 |
Aide publique au développement |
244 |
Solidarité à l’égard des pays en développement |
244 |
Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation |
1 445 |
Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant |
1 445 |
Culture |
17 765 |
Patrimoines |
11 146 |
Création |
3 734 |
Transmission des savoirs et démocratisation de la culture |
2 885 |
Défense |
4 767 |
Environnement et prospective de la politique de défense |
3 564 |
Préparation et emploi des forces |
2 |
Soutien de la politique de la défense |
1 201 |
Direction de l’action du Gouvernement |
643 |
Coordination du travail gouvernemental |
643 |
Écologie, développement et aménagement durables |
14 243 |
Infrastructures et services de transports |
483 |
Météorologie |
3 504 |
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
5 690 |
Information géographique et cartographique |
1 645 |
Prévention des risques |
1 497 |
Énergie et après-mines |
827 |
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer |
597 |
Économie |
3 880 |
Développement des entreprises et de l’emploi |
3 613 |
Tourisme |
267 |
Enseignement scolaire |
4 919 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale |
4 919 |
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
1 468 |
Fonction publique |
1 468 |
Immigration, asile et intégration |
1 282 |
Immigration et asile |
412 |
Intégration et accès à la nationalité française |
870 |
Justice |
533 |
Justice judiciaire |
195 |
Administration pénitentiaire |
242 |
Conduite et pilotage de la politique de la justice |
96 |
Outre-mer |
124 |
Emploi outre-mer |
124 |
Recherche et enseignement supérieur |
203 561 |
Formations supérieures et recherche universitaire |
113 535 |
Vie étudiante |
12 727 |
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
48 678 |
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
17 212 |
Recherche spatiale |
2 417 |
Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables |
4 861 |
Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle |
2 395 |
Recherche culturelle et culture scientifique |
1 192 |
Enseignement supérieur et recherche agricoles |
544 |
Régimes sociaux et de retraite |
447 |
Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins |
447 |
Santé |
2 666 |
Prévention et sécurité sanitaire |
2 444 |
Offre de soins et qualité du système de soins |
213 |
Protection maladie |
9 |
Sécurité |
131 |
Police nationale |
131 |
Sécurité civile |
121 |
Coordination des moyens de secours |
121 |
Solidarité, insertion et égalité des chances |
8 109 |
Actions en faveur des familles vulnérables |
33 |
Handicap et dépendance |
266 |
Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales |
7 810 |
Sport, jeunesse et vie associative |
1 035 |
Sport |
977 |
Jeunesse et vie associative |
58 |
Travail et emploi |
45 012 |
Accès et retour à l’emploi |
44 526 |
Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi |
96 |
Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail |
218 |
Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail |
172 |
Ville et logement |
407 |
Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables |
47 |
Développement et amélioration de l’offre de logement |
153 |
Politique de la ville |
207 |
Contrôle et exploitation aériens (budget annexe) |
529 |
Formation aéronautique |
529 |
Total |
336 163 |
M. le président. L'amendement n° II-391, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer le nombre :
336 163
par le nombre :
337 877
II. – Alinéa 2, tableau
1° Ligne : « Culture »
Remplacer le nombre :
17 765
par le nombre :
17 786
2° Ligne : « Patrimoines »
Remplacer le nombre :
11 146
par le nombre :
11 157
3° Ligne : « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture »
Remplacer le nombre :
2 885
par le nombre :
2 895
4° Ligne : « Solidarité, insertion et égalité des chances »
Remplacer le nombre :
8 109
par le nombre :
9 802
5° Ligne : « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales »
Remplacer le nombre :
7 810
par le nombre :
9 503
6° Ligne : « Total »
Remplacer le nombre :
336 163
par le nombre :
337 877
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Il s’agit de nouveau d’un amendement de conséquence, qui porte, cette fois-ci, sur les plafonds des autorisations d’emplois des opérateurs de l’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement est effectivement un amendement de conséquence de nos votes relatifs aux plafonds des autorisations d’emplois des opérateurs de l’État. Nous prenons ainsi en compte les transferts de compétences à des opérateurs dans le domaine de la culture et la majoration de 1 693 équivalents temps plein du plafond d’emplois des agences régionales de santé, qui se mettent en place, pour intégrer la participation de l’assurance maladie à leur financement.
Ces dispositions sont cohérentes avec les estimations transmises à la commission des finances lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Notre avis est donc très favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 40, modifié.
(L'article 40 est adopté.)
Article 41
I. – Pour 2010, le plafond des autorisations d’emplois des agents de droit local des établissements à autonomie financière mentionnés à l’article 66 de la loi de finances pour 1974 (n° 73-1150 du 27 décembre 1973), exprimé en équivalents temps plein, est fixé à 3 400 emplois. Ce plafond est réparti comme suit :
Missions et programmes |
Plafond exprimé en équivalents temps plein |
Action extérieure de l’État |
|
Rayonnement culturel et scientifique |
1 044 |
Aide publique au développement |
|
Solidarité à l’égard des pays en développement |
2 356 |
Total |
3 400 |
II. – Ce plafond s’applique exclusivement aux agents de droit local recrutés à durée indéterminée. – (Adopté.)
TITRE III
REPORTS DE CRÉDITS DE 2009 SUR 2010
Article 42
Les reports de 2009 sur 2010 susceptibles d’être effectués à partir des programmes mentionnés dans le tableau figurant ci-dessous ne pourront excéder le montant des crédits de paiement ouverts sur ces mêmes programmes par la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009. Ces reports seront inscrits sur les programmes correspondants de la présente loi figurant dans le tableau ci-dessous.
Intitulédu programme en loi de finances pour 2009 |
Intitulé de la missionen loi de finances pour 2009 |
Intitulédu programme en loi de finances pour 2010 |
Intitulé de la missionen loi de finances pour 2010 |
Vie politique, culturelle et associative |
Administration générale et territoriale de l’État |
Vie politique, culturelle et associative |
Administration générale et territoriale de l’État |
Équipement des forces |
Défense |
Équipement des forces |
Défense |
Soutien de la politique de défense |
Défense |
Soutien de la politique de défense |
Défense |
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local |
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local |
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État |
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État |
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
Presse |
Médias |
Presse |
Médias |
Concours spécifiques et administration |
Relations avec les collectivités territoriales |
Concours spécifiques et administration |
Relations avec les collectivités territoriales |
Intervention des services opérationnels |
Sécurité civile |
Intervention des services opérationnels |
Sécurité civile |
M. le président. L'amendement n° II-392, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2, tableau
Compléter ce tableau par 8 lignes ainsi rédigées :
Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur |
Administration générale et territoriale de l'État |
Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur |
Administration générale et territoriale de l'État |
Entretien des bâtiments de l'État |
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
Entretien des bâtiments de l'État |
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
Programme exceptionnel d'investissement public |
Plan de relance de l'économie |
Programme exceptionnel d'investissement public |
Plan de relance de l'économie |
Soutien exceptionnel à l'activité économique et à l'emploi |
Plan de relance de l'économie |
Soutien exceptionnel à l'activité économique et à l'emploi |
Plan de relance de l'économie |
Effort exceptionnel en faveur du logement et de la solidarité |
Plan de relance de l'économie |
Effort exceptionnel en faveur du logement et de la solidarité |
Plan de relance de l'économie |
Coordination des moyens de secours |
Sécurité civile |
Coordination des moyens de secours |
Sécurité civile |
Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales |
Solidarité, insertion et égalité des chances |
Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales |
Solidarité, insertion et égalité des chances |
Développement et amélioration de l'offre de logement |
Ville et logement |
Développement et amélioration de l'offre de logement |
Ville et logement |
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Cet amendement tend à compléter la liste des programmes sur lesquels les crédits peuvent être portés au-delà du seuil de 3 % fixé par la loi organique relative aux lois de finances.
Certains programmes devraient connaître des ouvertures de crédits dans le collectif budgétaire de fin d’année et les paiements correspondants pourront ne pas être intégralement effectués avant la fin de l’année. Il s’agit des programmes « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », « Coordination des moyens de secours », « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales ». Pour chacun de ces programmes, ce sont des dépenses ponctuelles et exceptionnelles qu’il est proposé de couvrir avec les crédits reportés.
La dérogation demandée pour les autres programmes est liée à la mise en œuvre du plan de relance, qui, par construction, s’étend sur les deux années 2009 et 2010.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Les services du Gouvernement ont bien voulu nous transmettre cet amendement, ce matin, à neuf heures dix. La commission n’a donc pas pu l’examiner. Toutefois, sans avoir recours, cher Michel Charasse, à un cabinet extérieur (Sourires.), nous avons pu nous livrer à un examen assez exhaustif de cette proposition.
Monsieur le ministre, avant de formuler l’avis de la commission – cet avis, du moins celui du rapporteur général, est bien entendu favorable –, je voudrais rappeler un certain nombre de points et je serais heureux, le cas échéant, de connaître vos réactions à ce sujet.
Les reports de crédits constituent évidemment une entorse au principe de l’annualité budgétaire. C’est pourquoi la loi organique relative aux lois de finances a prévu le plafond de 3 %. Seize programmes pourraient, en 2010, déroger à ce plafond de 3 %, soit deux fois plus que prévu initialement. Ce serait le nombre le plus élevé depuis l’entrée en vigueur de la loi organique, puisque neuf programmes étaient concernés en 2007, huit en 2008 et neuf en 2009.
Il serait utile que l’on puisse connaître, monsieur le ministre, le pourcentage de reports que le Gouvernement envisage pour ces programmes. Il serait également intéressant de savoir de quel montant ces reports supplémentaires majoreront les sommes disponibles pour être dépensées en 2010.
Vous axez, à juste titre, la politique du Gouvernement sur la tenue de la dépense. Il faut évidemment être vigilant ! Je suis certain que vous l’êtes, monsieur le ministre, mais il faudrait que vous nous le confirmiez, au moment où des brèches sont ouvertes dans le dispositif.
Sur le fond, il faut distinguer deux groupes de programme.
Le premier groupe correspond à des nécessités conjoncturelles : la lutte contre la grippe A/H1N1, la création des agences régionales de santé, l’indemnisation des communes au titre de la délivrance des cartes d’identité et des passeports de 1999 à 2008, une excellente disposition !
Mme Nicole Bricq. Cela reste insuffisant !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Bien entendu ! C’est toujours trop peu ! On demande toujours plus !
Le second groupe concerne des reports liés à la mise en œuvre du plan de relance. Ce dispositif d’urgence étant conçu sur deux exercices – 2009 et 2010 –, il faut accepter une certaine fongibilité des enveloppes sur les deux années.
Si vous le permettez, monsieur le ministre, je souhaiterais vous poser encore une question, relative aux crédits du plan de relance. C’est celle que posait, à juste titre, le président Jean Arthuis lors de l’examen des crédits de cette mission, dont il a bien voulu être le rapporteur. Je ne crois pas qu’il ait encore obtenu de réponse.
Cette question est la suivante : le solde de la dotation de l’État au Fonds stratégique d’investissement, soit 2,5 milliards d’euros, aujourd’hui inscrit sur le budget de la mission « Plan de relance », sera-t-il reporté sur 2010 ou sera-t-il transféré, avant la fin de l’année, sur le compte d’affectation spéciale des participations financières de l’État ?
Sous le bénéfice de ces quelques observations et en fonction de ces questions, sur lesquelles le Gouvernement apportera certainement des réponses, je crois pouvoir, avec l’accord de M. le président de la commission des finances, émettre un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Monsieur le rapporteur général, je ne suis pas en mesure, en cet instant, de vous apporter toutes les explications complémentaires que vous me demandez. Ainsi, je ne connais pas le montant exact des reports concernant les missions qui dérogent au plafond de 3 %, notamment parce que, sur la relance, les choses ne sont pas totalement figées. Je ferai en sorte que ces informations puissent vous être transmises dans la journée. (M. le rapporteur général et M. le président de la commission remercient M .le ministre.)
Je souligne simplement qu’en termes de reports – je partage votre point de vue sur ce point, monsieur le rapporteur général – il faut évidemment limiter ce qui apparaît comme une brèche dans l’annualité budgétaire.
Les reports de 2009 vers 2010 seront inférieurs aux reports de 2008 vers 2009 en globalité. Je suis d’accord pour considérer que le nombre de programmes concernés est un peu trop élevé, mais cinq programmes sont liés à la relance et deux ou trois reports, vous l’avez d’ailleurs dit vous-même, sont liés à des opérations ponctuelles, telles que la création des agences régionales de santé ou la lutte contre la grippe A.
Les crédits du fonds stratégique d’investissement seront versés au compte d’affection spéciale « Participations financières de l’État », comme le souhaitait le président de la commission des finances.
M. le président. Je mets aux voix l'article 42, modifié.
(L'article 42 est adopté.)
Articles non rattachés (suite)
M. le président. Nous allons maintenant poursuivre l’examen des articles non rattachés.
TITRE IV
DISPOSITIONS PERMANENTES
I. – MESURES FISCALES ET BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES
Articles additionnels avant l'article 43 (suite)
M. le président. Je rappelle que le Sénat a déjà examiné les articles additionnels avant l’article 43 tirant les conséquences de la suppression de la taxe professionnelle.
L'amendement n° II-206, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les h, j à m du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Les dispositifs incitatifs à la construction de logements locatifs dans le secteur dit libre constituent l’un des éléments principaux de la politique nationale du logement.
Le groupe CRC-SPG considère qu’il est tout à fait anormal que l’essentiel de l’engagement public en faveur de la construction aille à la réalisation de logements locatifs privés aux loyers souvent supérieurs aux possibilités des locataires potentiels et non à la réalisation de logements locatifs sociaux.
Depuis une quinzaine d’années, nous avons vu, sous le nom de chaque ministre du logement, apparaître un nouveau dispositif d’incitation à la réalisation de logements locatifs privés.
Nous sommes donc arrivés à une situation où la dépense fiscale destinée à aider les investisseurs immobiliers est plus importante que les crédits ouverts pour la construction et la réhabilitation de logements sociaux, ce qui a évidemment quelques conséquences que nous connaissons bien.
La moindre de celles-ci n’est pas la persistance de déficits publics élevés, dont l’un des vecteurs est précisément la dépense fiscale occasionnée par les conditions dérogatoires proposées aux investissements immobiliers.
La traduction la plus éclairante de la situation réside sans doute dans l’existence d’une forte demande sociale de logements, à laquelle l’offre, parfaitement inadaptée, s’avère incapable de répondre.
Ceux qui constatent avec amertume ou préoccupation que le droit au logement opposable risque de n’être qu’une Arlésienne, au mieux une nouvelle source de dépenses pour le budget général au travers des astreintes imposées à l’État, devraient reconnaître que l’existence de dispositifs incitatifs comme ceux auxquels je faisais allusion nous prive des moyens de mener une véritable politique du logement répondant aux besoins de la population.
Allons-nous, demain, continuer à cumuler astreintes liées au droit au logement opposable, dépenses de prise en charge des hébergements d’urgence et dépenses fiscales découlant des dispositifs Robien, Borloo, Scellier, tandis que manquent des sommes finalement guère plus importantes pour mener une véritable politique d’aide à la construction de logements sociaux ?
Les modalités ordinaires de calcul des revenus fonciers sont largement suffisantes pour donner sens aux investissements des particuliers.
Au-delà de ces modalités, ce n’est plus de l’incitation, c’est de la pure optimisation fiscale, ce qui permet à nombre de contribuables particulièrement favorisés de se retrouver avec des déficits fonciers durablement imputables sur les revenus ultérieurs.
Nous ne pensons pas, au regard de l’évaluation sociale de ces dispositifs d’incitation fiscale, qu’il soit nécessaire de persévérer dans cette voie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je rappelle que cet amendement a déjà été déposé en première partie par les mêmes auteurs – qui ont donc une belle constance dans les idées – et qu’il n’a pas été adopté. La commission, qui avait déjà émis un avis défavorable, va faire de même sur l'amendement n° II-206, en rappelant que le dispositif Robien, de toute façon, disparaîtra le 1er janvier 2010, ce qui, au demeurant, vous donne satisfaction, monsieur Vera, et devrait vous permettre de retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission. Les dispositifs d’incitation à l’investissement locatif sont très importants. Ils ont d'ailleurs été largement réaménagés ces dernières années et vont l’être encore, comme on le verra bientôt. Nous ne sommes donc pas favorables à cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Le groupe socialiste a eu maintes fois l’occasion de dénoncer les effets pervers du dispositif Robien, notamment pour ceux qui s’y sont laissé prendre. Ce dispositif était complètement inadapté à l’objectif visé, qui était d’accroître l’offre de logements et de faire en sorte qu’ils soient occupés. Les propriétaires sont nombreux à se retrouver avec ces logements Robien sur les bras. Donc, je pense qu’à titre symbolique c’est typiquement le type de dépenses fiscales qui doit disparaître.
M. le président. L'amendement n° II-111, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Avant l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux derniers alinéas du 2 du I de l'article 197 du code général des impôts sont supprimés.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Au nom d’une certaine conception de la justice fiscale et sociale, en vertu de laquelle on oublie un peu vite de supprimer le bouclier fiscal et on laisse courir les plus-values, on a procédé à la mise en cause de la demi-part fiscale accordée aux parents célibataires ou divorcés ayant élevé seuls des enfants.
Or cette disposition, qui est en vigueur depuis fort longtemps, puisqu’elle a été créée en 1945, avant même qu’existe notre actuel impôt sur le revenu, n’est pas particulièrement coûteuse.
Son coût est de 1,56 milliard d’euros pour plus de 4,4 millions de foyers fiscaux, ce qui situe l’importance de la dépense fiscale à la somme de 353 euros par contribuable, c’est-à-dire moins de 30 euros par mois. On voit d’emblée quel scandaleux privilège a ainsi été mis en question par les dispositions adoptées il y a quelques années.
La réalité, c’est que cet aménagement des règles du quotient familial n’est aucunement guidé par des impératifs de justice fiscale et sociale. D’une part, il a créé une divergence d’approche entre la situation des veuves et veufs et celle des célibataires et divorcés, ce qui n’est guère acceptable du point de vue de la morale publique comme de l’éthique. D’autre part, la mesure était dictée par un aspect d’ordre moral, qui n’est plus de notre temps.
Le fait qu’un nombre important de ménages soient constitués de parents célibataires est lié à une évolution des modes de vie et ne participe pas toujours de choix délibérés des contribuables concernés.
La discrimination créée par la rédaction actuelle de l’article 197 du code général des impôts vise des familles souvent fragilisées, souffrant parfois de difficultés d’insertion professionnelle et sociale et figurant, plus souvent qu’à leur tour, dans la liste des ménages situés sous le seuil de pauvreté.
Selon nous, la loi fiscale ne doit pas pénaliser davantage ces ménages aux revenus souvent modestes, et il nous semble préférable que les règles propres au quotient familial soient les mêmes pour tout le monde.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à supprimer le plafonnement de la demi-part pour une personne seule ayant élevé seule un enfant pendant cinq ans.
Sur ce sujet délicat, un compromis a été trouvé l’an dernier, et la commission ne souhaite pas y revenir. Le dispositif voté l’an dernier, j’en ai personnellement la conviction, est équitable et permet de revenir aux origines de cette mesure, dont l’application avait été quelque peu dévoyée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Le groupe socialiste s’est beaucoup battu l’année dernière pour le maintien de cette demi-part, qui concerne essentiellement des femmes.
Quand nous aurons à procéder à l’évaluation de l’ensemble des dépenses fiscales, il faudra bien se mettre d’accord en fonction de critères simples : efficacité économique et efficacité sociale.
À l’évidence, cette dépense avait une efficacité sociale, notre collègue Bernard Vera l’a explicité et c’est pourquoi nous soutenons l’amendement qu’il a présenté. Nous déplorons que le Gouvernement fasse une lecture sélective des dépenses fiscales en fonction d’intérêts de classe. Or il s’agissait là d’une dépense socialement juste. Nous y reviendrons quand nous procéderons à l’évaluation globale des dépenses fiscales.
M. le président. L'amendement n° II-198 rectifié bis, présenté par M. J.P. Fournier, Mme Kammermann, MM. del Picchia, Trillard, Pierre, Alduy, B. Fournier, Revet et Chatillon, Mme Bout, MM. de Montgolfier et Doligé, Mme G. Gautier, MM. Pointereau, Détraigne, Milon, Garrec, Vasselle, Jarlier, Houel, Bailly et Lefèvre, Mme Desmarescaux, MM. Beaumont, Deneux et Cléach, Mme Debré, M. P. Dominati, Mmes Hermange et Papon et MM. Couderc et Leleux, est ainsi libellé :
Avant l'article 43, insérer un article ainsi rédigé :
I. - L'article 200 quater du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« g) Aux dépenses afférentes à un immeuble achevé depuis plus de huit ans, payées entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2012, au titre de l'acquisition d'installations combinant un dispositif d'assainissement non collectif non consommateur d'énergie et un dispositif d'évacuation des eaux usées utilisés pour l'irrigation enterrée. »
2° A la fin du f du 5, après la référence : « f », est insérée la référence : « et au g ».
II. - Le I ne s'applique qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Dans le cadre du crédit d'impôt développement durable, cet amendement vise à favoriser l'installation de dispositifs d'assainissement non collectif ne consommant pas d'énergie et permettant l'évacuation des eaux usées utilisées pour l'irrigation enterrée.
L'incitation proposée permet ainsi de rendre accessible cette technologie innovante et particulièrement écologique, qui s'inscrit dans l'esprit du Grenelle de l'environnement en conciliant économie d'énergie, respect de l'environnement et préservation des ressources.
Les équipements d'assainissement non collectifs récupérateurs d'eau atténuent l'impact écologique lié au gaspillage des eaux usées. Ils permettent de valoriser ces eaux usées traitées en offrant aux usagers la possibilité de les utiliser pour l'irrigation, et ainsi de réaliser des économies substantielles à l'heure où le prix de l'eau ne cesse d'augmenter.
Cet amendement permet en outre de répondre à une exigence sanitaire. L'assainissement non collectif représente en France 5,2 millions d'installations, dont la fonction est de traiter les eaux usées de 13 millions de Français. Or on estime à environ 1 million ou 1,5 million le nombre d’installations défectueuses, voire hors d'usage, qualifiées de véritables « points noirs » pour l'environnement et la santé publique. Ces installations nécessitent urgemment d'être rénovées, et il convient de soutenir les particuliers dans cette démarche en les incitant à se tourner vers les dispositifs les plus écologiques.
Enfin, dans un contexte de maîtrise des dépenses de l'État, le coût de cette incitation fiscale reste très mesuré – environ 20 millions d'euros par an - sur la base du nombre de dispositifs qu’il est envisagé d’installer ou de rénover.
Monsieur le ministre, la France conduit une politique extrêmement vigoureuse en matière de protection de l’environnement, et l’on ne peut que s’en féliciter. Mais force est de constater que l’état du parc de l’assainissement individuel est loin d’être satisfaisant. Dans mon département, où nous avons achevé le diagnostic, il apparaît qu’un tiers des installations sont aux normes, qu’un autre tiers est défectueux et qu’un tiers enfin nécessitera des travaux de réhabilitation à court ou à moyen terme.
Or, la France s’est fixé des dates butoirs extrêmement courtes puisque l’ensemble du parc devrait être aux normes en 2015. Si nous n’encourageons pas nos concitoyens, par des incitations fortes, à se mettre aux normes rapidement – avec l’aide des collectivités, bien évidemment –, nous ne serons pas prêts à la date que nous nous sommes nous-mêmes imposée. Or, ne pas respecter un engagement européen comporte une part de risque.
Monsieur le ministre, je me permets d’insister sur cet amendement, que j’avais déjà présenté l’année dernière. Une telle mesure, dont le coût est peu élevé, constituerait un geste fort, qui permettrait à la fois de protéger l’environnement et de mettre aux normes l’ensemble de ces installations.
À une époque, on a voulu le tout-collectif, qui, on le sait maintenant, est trop coûteux. On en est donc revenu à prévoir des incitations en faveur de l’assainissement individuel. Mes chers collègues, faisons en sorte que ces installations puissent être mises aux normes rapidement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne vous le cache pas, la commission n’est pas très enthousiaste.
M. Charles Revet. C’est dommage !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Un amendement similaire, défendu par notre excellent collègue Charles Revet, a déjà été examiné l’année dernière et n’avait pas été retenu.
M. Charles Revet. Mais il avait été dit qu’on y reviendrait !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument, monsieur Revet ! Je connais votre constance et votre persévérance, auxquelles je rends hommage.
Mais l’assainissement non collectif et l’irrigation n’entrent absolument pas dans le champ du crédit d’impôt actuel, qui encourage essentiellement la rénovation thermique.
L’assainissement non collectif est déjà éligible à deux avantages fiscaux : l’éco-PTZ « travaux » et le taux réduit de TVA.
Le crédit d’impôt développement durable est l’un des plus coûteux – 2,6 milliards d’euros en 2010 – et l’heure est davantage à son recalibrage qu’à sa montée en puissance, afin d’éviter les effets d’aubaine et la captation de l’avantage fiscal par adaptation des prix des distributeurs.
Ne nous faisons pas d’illusion, donner un avantage fiscal pour un produit ou une technique spécifique incite celui qui le fournit à en tenir compte et à le vendre plus cher aux particuliers ou à la collectivité.
Monsieur Revet, pour l’ensemble de ces raisons, bien que je comprenne votre démarche et que je mesure les difficultés rencontrées, je suis tenu, à regret, d’émettre un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Comme l’an passé, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, visant à accroître une niche fiscale. Je sais bien que c’est dans la nature des choses : dès qu’une mesure est bonne, il faut aller plus loin. Si je ne suis pas opposé à l’idée, somme toute assez légitime, que les eaux usées puissent être réutilisées pour l’irrigation, le taux réduit de TVA permet déjà de prévoir de tels dispositifs.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le crédit d’impôt est plutôt destiné à des dépenses intérieures, qui réduisent la consommation énergétique des habitations. On peut toujours l’étendre à l’infini à bien d’autres domaines ! Cela étant, efforçons-nous de toujours garder à l’esprit l’état de nos finances publiques.
Si l’on veut étendre systématiquement le mécanisme du crédit d’impôt à des bonnes idées – je le répète, je n’ai rien contre la mesure proposée en elle-même – il se posera à un moment donné un problème.
Il faudrait présenter les choses différemment, retirer du crédit d’impôt développement durable un certain nombre de dispositifs pour le remplacer par celui qui est proposé par cet amendement qu’on considère comme plus important. Nous pourrions débattre d’une telle éventualité. Mais ajouter systématiquement des avantages fiscaux aux avantages existants n’est pas supportable.
L’an dernier, vous aviez voté pour le crédit d’impôt développement durable un budget de 1,5 milliard d’euros ; il sera en réalité de 2,8 milliards d’euros. Ce dispositif est extrêmement sollicité par nos concitoyens. Pour 2010, nous avons budgété 2,6 milliards d’euros. Le moins qu’on puisse dire, c’est que beaucoup d’argent est mis sur l’ensemble de ces dispositifs, dans le droit-fil de ce qui est fait pour la taxe carbone. L’ensemble est cohérent.
De grâce, n’étendons pas sans cesse les dispositifs actuels ! Cela ne pourrait être envisagé que s’il était proposé en contrepartie de diminuer un autre avantage, ce qui n’est pas le cas avec cet amendement.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.
M. Charles Revet. Je regrette beaucoup la position de la commission et du Gouvernement. Je comprends bien qu’il existe déjà des mesures incitatives du type exonérations et déductions fiscales pour l’intérieur des habitations. Elles profitent à ceux qui font ces aménagements, lesquels ne sont ni obligatoires ni soumis à des délais.
Ici, nous sommes dans un autre cas de figure. Nos concitoyens sont obligés de respecter la date butoir de 2015 que le Parlement a fixée à la demande du Gouvernement. Si nos concitoyens n’ont pas la possibilité de le faire, la France risque une condamnation européenne.
Monsieur le ministre, comment feront ces familles pour assumer ces coûts très importants ? Nous devons les aider, car nous avons nous-mêmes fixé cette date butoir.
M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour explication de vote.
M. Albéric de Montgolfier. Cet amendement a le mérite de soulever la question de la différence de traitement entre l’assainissement collectif et l’assainissement non collectif. Alors que le premier reçoit des aides très importantes des agences de l’eau, le second, dans la plupart des cas, n’en reçoit aucune.
De très nombreux propriétaires sont dans l’impossibilité de respecter la date butoir de 2015. Le dispositif fiscal permettait sans doute d’accélérer la mise aux normes et de faire respecter cette échéance. Comme Charles Revet à l’instant, je m’interroge sur la date de 2015 : ce délai, qui a certes été fixé par le législateur, ne me paraît pas réaliste compte tenu du nombre d’installations à mettre aux normes.
Par ailleurs, on ne peut qu’être sensible aux arguments de la commission des finances, qui ne souhaite pas étendre le régime des niches fiscales, et à ceux de M. le ministre, qui a évoqué le coût considérable de la mesure proposée.
Je serais favorable au retrait de l’amendement n° II-198 rectifié bis, que j’ai cosigné. Je souhaiterais toutefois que nous débattions de nouveau, peut-être à l’occasion de la discussion d’autres textes, de l’échéance de 2015, car, en l’état actuel des dispositifs d’aide, qui sont très réduits, un tel délai n’est pas réaliste.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mes chers collègues, ce débat se prolonge, mais il nous servira de référence pour un certain nombre de propositions qui viendront en discussion dans la journée.
M. Revet nous invite à légiférer d’une main tremblante lorsque nous fixons une norme, une échéance ou une contrainte supplémentaire. Il est vrai que notre démarche est quelque peu schizophrénique, dans ce domaine comme pour la loi sur les handicapés.
Mme Nicole Bricq. On va en parler justement !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous devons régler tous les problèmes à l’échéance de 2015, mais avec quels moyens ? Nous nous payons le luxe de voter des lois qui ne sont pas financièrement soutenables.
M. Charles Revet. Exactement !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Un examen de conscience s’impose : nous devons essayer de légiférer autrement !
Est-il réellement équitable d’aider ceux qui ont pris du retard pour mettre aux normes leur assainissement, comme tend à le proposer l’amendement, alors que d’autres l’ont déjà fait sans avantage fiscal ? Je n’en suis pas certain.
Je vois se développer des politiques commerciales où l’argument fiscal l’emporte finalement sur la pédagogie. On achètera une chaudière non pas en fonction de ses performances, mais seulement en fonction de l’avantage fiscal.
Je voudrais vous citer l’exemple d’un fonctionnaire international. Un artisan qu’il avait contacté pour procéder au remplacement de sa chaudière avait mis en avant l’avantage fiscal. Le fonctionnaire a expliqué à l’artisan qu’il ne payait pas d’impôts en France et qu’il ne pourrait donc pas bénéficier de cet avantage. L’artisan lui aurait dit qu’il allait revoir le prix !
Je ne dis pas que ce genre de pratique est systématique, mais nous devons garder cela à l’esprit. On fausse les prix et on empêche le vendeur de développer les bons arguments de vente : une chaudière devrait être choisie non pas parce qu’elle permet de faire jouer un avantage fiscal, mais parce qu’elle permettra de faire des économies d’énergie. Cette appétence pour l’avantage fiscal finit par nous atteindre de façon presque pathologique ! Essayons d’en sortir et, je parle sous le contrôle de François Trucy, mettons-nous à l’abri de toute forme d’addiction, y compris à l’avantage fiscal !
M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, pour explication de vote.
M. Jacques Blanc. Monsieur le président, l’intervention tout à fait pertinente du président de la commission des finances évoquant la schizophrénie et l’addiction ne peut qu’interpeller le neuropsychiatre que je suis ! (Sourires.)
Il est vrai qu’on ne pose pas les problèmes dans des termes très réalistes avant d’adopter des mesures. Monsieur le ministre, la date de 2015, évoquée par Charles Revet, correspond-elle à un engagement national ou international ?
Nous sommes tous confrontés dans nos communes rurales à ces problèmes. La mise en place des SPANC – service public d’assainissement non collectif – est une très bonne chose. Encore faut-il permettre aux intéressés de trouver le temps et les moyens nécessaires pour réaliser les travaux, ce qui est parfois très difficile, particulièrement dans les zones de montagne.
Tout le monde développe une certaine forme d’appétence. Sur la taxe carbone aussi, on a cultivé, me semble-t-il, quelques conduites addictives. Mais il faut éviter de tomber dans la dépendance, et c’est apparemment ce que vous proposez, monsieur le président de la commission des finances. Dans ces conditions, je ne peux suivre notre collègue Charles Revet. Peut-être nous montrera-t-il la voie en retirant son amendement.
M. Albéric de Montgolfier. Bien Docteur !
M. Adrien Gouteyron. Merci pour la consultation !
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. Monsieur le président, j’ai cosigné cet amendement, que, pour être honnête, je n’avais pas très bien compris.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il n’est pas nécessaire de le dire !
M. Robert del Picchia. Je dois le reconnaître. Mais, après avoir entendu les explications de MM. Woerth, Marini, Arthuis et de Montgolfier, je voterai contre cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. La norme à laquelle il a été fait référence est la directive sur l’eau, que la France a beaucoup tardé à transposer et qui a suscité des débats très serrés au Sénat. L’échéance de 2010 est maintenant proche et, comme d’habitude, la France s’y met vite, mais au dernier moment.
Le président Jean Arthuis nous fait une leçon justifiée de morale publique sur les avantages fiscaux. Mais encore faudrait-il qu’il ait une lecture universelle de ce qu’il nous propose. Il suffit d’évoquer les allégements d’ISF pour les PME.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il faut supprimer l’ISF, ainsi il n’y aura plus de niches ! La trilogie va résoudre les problèmes.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le ministre, si vous avez des difficultés à trouver dans notre architecture fiscale des moyens financiers, vous n’avez qu’à revenir sur la baisse de la TVA dans la restauration : cela rapporterait 3 milliards d’euros par an !
Et je pourrais vous citer de nombreux autres exemples.
Il faut donc évaluer toutes les dépenses fiscales. C’est un engagement que nous avons pris pour la date du 30 juin 2011 dans la loi de programmation des finances publiques. Pour nous, socialistes, ce sont l’efficacité économique et l’efficacité sociale qui justifient une dépense fiscale.
M. le président. Monsieur Charles Revet, l’amendement est-il maintenu ?
M. Charles Revet. La loi sur l’eau prévoit des diagnostics partout. Je rejoins donc M. le président Jean Arthuis quand il dit que nous devons faire preuve de cohérence dans nos démarches. Si nous ne donnons pas à nos concitoyens les moyens de mettre en œuvre dans un délai de deux ans les mesures que nous prenons, nous devons procéder aux ajustements nécessaires.
Cela étant dit, je retire l’amendement.
M. le président. L'amendement n° II-198 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-101 rectifié bis est présenté par MM. Courteau et Miquel, Mme Bourzai, M. Guillaume et les membres du groupe Socialiste.
L'amendement n° II-252 est présenté par MM. Gaillard et Leroy.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Avant l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 200 quater du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du c du 5, après l'année : « 2010 ; » sont insérés les mots : « lorsqu'ils remplacent des chaudières et équipements de chauffage ou de production d'eau chaude indépendants fonctionnant au bois ou autres biomasses ou » ;
2° Après la troisième phrase du second alinéa du 6, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Lorsqu'il s'agit de l'installation d'un appareil de remplacement mentionné à la dernière phrase du c du 5, le bénéfice du taux est subordonné à la justification de la reprise par l'installateur de l'appareil précédent en vue de sa destruction. »
II. - Le I n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l'amendement n° II-101 rectifié bis.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, il s’agit d’un amendement soutenu par nos collègues MM. Courteau et Miquel, Mme Bourzai et M. Guillaume au sujet de la filière bois. Les départements dont ils sont élus montrent qu’ils y attachent une grande importance.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit surtout d’une niche fiscale.
Mme Nicole Bricq. Nos collègues souhaitent attirer l’attention du Gouvernement sur la baisse, à compter du 1er janvier 2010, du crédit d’impôt de 40 % à 25 % concernant les équipements de chauffage au bois domestique.
On estime à 6 millions le nombre de ces appareils, parmi lesquels 4 millions ont un rendement énergétique très médiocre, avec des taux d’émissions polluantes élevés. Dans ces conditions, il est inopportun de décider d’une baisse à partir de l’année prochaine, d’autant plus que ces appareils se sont améliorés depuis la création du label de qualité Flamme verte en 2000.
C’est une filière industrielle très importante, qui représente 22 000 emplois en France pour la fabrication, la commercialisation et l’installation des appareils, selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME.
La baisse de ce crédit d’impôt nous paraît assez insensée alors que l’on encourage le recours aux énergies renouvelables. On est donc là encore dans une contradiction totale.
M. le président. La parole est donc à M. Yann Gaillard, pour présenter l'amendement n° II-252.
M. Yann Gaillard. La démonstration qu’a faite notre collègue Mme Nicole Bricq est pertinente sur le plan tant de la filière bois que du développement durable.
Nos amendements identiques ont d’ailleurs été inspirés par notre collègue M. Leroy, président du groupe d’études « Forêt et filière bois » de notre assemblée.
C’est dommage qu’un amendement socialiste dise la même chose ! (Mme Bricq s’exclame.) Mais cela montre qu’on peut parfois s’unir sur certaines considérations, même au-delà des clivages politiques.
Par ailleurs, je prends l’engagement de ne plus jamais signer d’amendements qui prévoient le maintien d’un avantage fiscal.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bravo !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue Yann Gaillard vient de dire que la plaidoirie de Mme Nicole Bricq était excellente. Pour ma part, j’estime que sa précédente plaidoirie, celle par laquelle elle protestait contre le fait de demander toujours plus de niches et d’avantages fiscaux, était encore meilleure. (Sourires sur les travées de l’UMP.)
Mme Nicole Bricq. Cette niche existe déjà !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Or que faites-vous précisément d’un amendement à l’autre ? Vous prenez des positions opposées. Ce n’est pas la cohérence !
Je solliciterai le retrait de cet amendement, sous le bénéfice des informations que nous donnera peut-être M. le ministre, car des mesures seront prévues en collectif budgétaire pour redéployer, au moins pour une part, le crédit d’impôt développement durable.
Redéployer pour affirmer des priorités quelque peu mises à jour, c’est excellent, monsieur le ministre, mais à condition que le coût total diminue. En effet, 2,8 milliards d’euros en 2009, c’est trop, et 2,4 milliards d’euros en 2010, c’est encore trop.
En attendant, je suggère à l’auteur de l’amendement de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement est en train de réfléchir à un aménagement global du dispositif, parce qu’il est très difficile de procéder par catégorie d’équipements. Comme l’a rappelé M. Philippe Marini, on est parvenu à des montants considérables de crédits d’impôt.
Nous aurons une discussion plus globale lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative. Nous ferons donc une proposition pour que cela coûte moins cher, pour être plus sélectif dans les équipements qui sont proposés. En ce qui concerne le bois, je pense que vous aurez satisfaction.
Nous nous retrouverons dans dix jours, tout au plus, pour discuter de ce sujet. Sous le bénéfice de ces explications, je vous demande le retrait de ces amendements.
M. le président. Madame Bricq, retirez-vous votre amendement ?
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, je ne suis pas une spécialiste des chaudières à bois, mais je n’aime pas trop qu’on m’accuse d’être incohérente.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Vous manquez de cohérence !
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas moi, c’est le Président de la République qui exerçait la présidence de l’Union européenne et qui s’est beaucoup vanté d’avoir réussi, au mois de décembre de l’année dernière, le compromis du paquet climat, avec notamment l’objectif d’utiliser 20 % d’énergies durables.
Ce n’est pas moi qui vais prôner la politique de la France au sommet de Copenhague. Par conséquent, s’il y a une incohérence, elle vient d’abord de l’exécutif, qui fait des proclamations et qui cherche des économies partout parce qu’il est en grande difficulté budgétaire.
Cela étant, je partage l’argument de M. le ministre sur l’évaluation globale du crédit d’impôt développement durable.
Mais gardez-vous de faire des discours qui ne sont pas suivis d’effets, par crainte de bouleverser l’architecture fiscale et de toucher aux niches fiscales improductives, qui bénéficient aux classes les plus aisées.
Cela dit, je retire notre amendement.
M. le président. L'amendement n° II-101 rectifié bis est retiré.
Monsieur Gaillard, retirez-vous également votre amendement ?
M. Yann Gaillard. Il est très difficile de ne pas le faire !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
M. le président. L'amendement n° II-252 est retiré.
L'amendement n° II-253, présenté par Mme Keller, M. Richert, Mme Henneron, MM. Grignon et Haenel et Mme Sittler, est ainsi libellé :
Avant l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 200 quater du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1 est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« g) Au coût des équipements électriques individuels permettant aux ménages de réaliser des effacements destinés à ajuster en temps réel l'équilibre entre l'offre et la demande d'électricité au niveau national :
« 1° Payés entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012 dans le cadre de travaux réalisés dans un logement achevé ;
« 2° Intégrés à un logement neuf acquis entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012 ;
« 3° Intégrés à un logement acquis en l'état futur d'achèvement ou que le contribuable fait construire, achevé entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012. »
2° Le 5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« g) 25% du montant des équipements mentionnés au g du 1. »
II. - Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° II-254, présenté par Mme Keller, MM. Poncelet et Richert, Mme Henneron, MM. Grignon et Haenel et Mmes Sittler et Troendle, est ainsi libellé :
Avant l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la seconde phrase du c du 5 de l'article 200 quater du code général des impôts, les mots : « à 25 % pour les dépenses payées à compter du 1er janvier » sont supprimés.
II. - Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° II-209, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 200 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la fin du 2, le taux : « 18 % » est remplacé par le taux : « 20 % » ;
2° Dans le 5, le taux : « 22,5 % » est remplacé par le taux : « 30 % » ;
3° Dans le 6, le montant : « 152 500 euros » est remplacé par le montant : « 50 000 euros » ;
4° À la fin du premier alinéa du 6 bis, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 40 % » ;
5° Le 7 est abrogé.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement prévoit de réviser les règles d’imposition des revenus de capitaux mobiliers. De manière générale, il s’agit pour nous de procéder au relèvement du taux des prélèvements libératoires actuellement mis en œuvre sur option et qui constituent l’une des sources d’alimentation des recettes de l’impôt sur le revenu.
Notre amendement a notamment pour objectif une harmonisation du traitement fiscal des revenus catégoriels, une amélioration du rendement de l’impôt et la mise à disposition du budget général de ressources nouvelles pouvant conduire tant à la réduction du déficit qu’au financement de nouvelles dépenses.
La première mesure consiste en une augmentation du taux d’imposition des plus-values avec une hausse de deux points du taux, ce qui, sur la base de 14 milliards d’euros de revenus déclarés, conduira à accroître d’environ 300 millions d’euros le produit de l’impôt.
La deuxième mesure est relative à la taxation des produits tirés de cessions anticipées de titres sur un PEA que nous portons à 30 %, conduisant à une recette marginale d’environ 150 000 euros.
La troisième mesure consiste en une modification du traitement fiscal des stock-options, dispositif dont le coût fiscal demeure pour le moment assez réduit mais particulièrement rentable.
Ce dispositif porte aujourd’hui sur un nombre réduit de ménages - 11 300 selon les données fournies par le ministère -, pour un coût fiscal de 40 millions d’euros, ce qui signifie que la déperdition moyenne est de 4 000 euros par ménage, c’est-à-dire plus que la cotisation moyenne d’impôt sur le revenu !
Nous sommes donc parfaitement fondés à demander que la taxation de ces plus-values, pratiquement nulle, compte tenu de l’actuel plafond, soit sensiblement relevée. Cela passe singulièrement par un abaissement du plafond d’imposition dont nous proposons qu’il soit ramené à 50 000 euros de plus-value annuelle, ce qui permettra à un nombre de contribuables plus important qu’aujourd’hui d’être concernés
Une taxation de 50 000 euros à 30 %, aujourd’hui, quand le taux marginal est de 40 % signifie que les détenteurs de stock-options économisent 5 000 euros d’imposition au regard de la situation qu’ils subiraient au titre d’une intégration dans le revenu imposable.
De fait, notre démarche peut conduire à décourager les contribuables à recourir au dispositif spécifique, et à opter pour une imposition normale de ces revenus un peu particuliers en revenant au barème de l’impôt.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, je crains que cet amendement n’ait toutes les apparences d’un dispositif de première partie, ce qui conduirait à ne pas pouvoir l’examiner en seconde partie.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° II-210, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 200 B du code général des impôts, le taux : « 16 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement conforte la position que nous avons défendue dans la présentation de l’amendement portant sur l’article 200 A et procède à l’ajustement du taux d’imposition de l’ensemble des plus-values de cessions de biens mobiliers ou immobiliers.
Notre objectif est aussi clair que pour l’amendement précédent. Il s’agit d’une mesure de justice fiscale et sociale évidente, les plus-values étant, hélas, le plus souvent, le produit d’une pure spéculation sur les actifs concernés.
Il s’agit aussi de faire contribuer ceux qui en ont le plus les moyens à l’effort de redressement des comptes publics, rendu indispensable par l’état préoccupant du déficit budgétaire, largement alimenté par les dépenses fiscales incitatives aux placements et aux rendements financiers dont notre législation est littéralement « truffée ».
Enfin, nous souhaitons clairement décourager les contribuables à opter pour le régime d’imposition séparée, l’imposition des revenus de plus-values au barème progressif constituant, en dernière instance, le meilleur moyen de préserver les intérêts des épargnants les plus modestes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, cet amendement suscite les mêmes remarques que le précédent et le même avis.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° II-157, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Avant l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 1518 bis du code général des impôts est complété par un zd ainsi rédigé :
« zd) Au titre de 2010, à 1,012 pour les propriétés non bâties, à 1,012 pour les immeubles industriels relevant du 1° de l'article 1500 et à 1,012 pour l'ensemble des autres propriétés bâties. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à reprendre à l'identique les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale concernant la revalorisation des valeurs locatives cadastrales, que le projet de loi de finances plaçait au sein de l'article 2.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Cet amendement tend effectivement à tirer les conséquences des modifications apportées à l’article 2. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 43.
Article 43
L’article 200 quater A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Aux 1°, 2° et 3° du a et aux b et c du 1, l’année : « 2009 » est remplacée par l’année : « 2010 » ;
2° À la première phrase du 4, les mots : « pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2009 » sont remplacés par les mots : « au titre d’une période de cinq années consécutives comprises entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2010 ».
M. le président. L'amendement n° II-260 rectifié, présenté par MM. Guillaume et Massion, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer l'année :
2010
par l'année :
2014
II. - Alinéa 3
Remplacer l'année :
2010
par l'année :
2014
III. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement, qui a été déposé sur l’initiative de nos collègues Didier Guillaume et Marc Massion, vise le crédit d’impôt relatif à la réalisation de travaux d’adaptation du logement au handicap.
Ce dispositif ayant été instauré initialement pour cinq ans par la loi de finances pour 2005, il arrive à échéance. Il serait totalement incohérent de ne pas le proroger au moment où le Gouvernement met en place un plan national du handicap, aux objectifs extrêmement ambitieux.
Nous le savons, les Français vivent de plus en plus vieux, ce dont il faut se réjouir, et l’on s’efforce de maintenir à domicile le plus grand nombre possible de personnes âgées. Il s’agit d’ailleurs d’un enjeu sociétal, que M. le rapporteur général mesure parfaitement puisqu’il a présidé aux destinées de la mission sénatoriale consacrée à la dépendance.
Dans certains départements, un système d’avance sur ce crédit d’impôt, sous conditions de ressources, bien-sûr, a été institué afin de permettre de financer des travaux pour les personnes les plus fragiles, dont le maintien à domicile est souvent difficile à réaliser.
Aux termes de l’article 43 du projet de loi de finances pour 2010, ce dispositif est uniquement prorogé l’année prochaine. Pour notre part, nous proposons d’aller plus loin.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Toujours plus !
Mme Nicole Bricq. Il est bien évident que les problèmes liés à la dépendance ne vont pas s’évanouir du jour au lendemain et que, compte tenu des données démographiques, nous aurons de plus en plus à intervenir.
Évidemment, on va me répondre qu’il faut évaluer ce dispositif, et il est effectivement prévu de le faire.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Absolument !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Eh oui !
Mme Nicole Bricq. Je suis pour l’évaluation. Je l’ai dit en début de séance, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il ne faut pas seulement le dire !
Mme Nicole Bricq. Il est prévu que cette évaluation sera réalisée avant le 30 juin 2011.
J’ai déploré, au cours l’examen de la première partie de ce budget, que certaines dépenses fiscales, à mes yeux totalement inopportunes, n’aient pas pu être évaluées plus tôt. Sans doute d’autres priorités, telle la suppression de la taxe professionnelle, ont-elles mobilisé les services de l’administration fiscale…
Le dispositif ici en cause répond à plusieurs critères : celui de la justice sociale en matière de dépenses fiscales, celui de l’efficacité économique, mais aussi celui de l’efficacité environnementale, compte tenu des défis énergétiques qui sont devant nous. Cela signifie que, de toute façon, vous ne pourrez faire autrement que de le reconduire bien au-delà de l’année 2010.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je crois que Mme Bricq s’attend à la réponse que je vais lui faire : une année de prorogation est suffisante pour permettre de procéder à l’évaluation de ce dispositif.
Ma chère collègue, en vertu des principes que nous professons ensemble,…
Mme Nicole Bricq. Oui, mais vous n’en tirez pas les conséquences !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … tâchons de nous aider mutuellement, plutôt que d’adopter des postures !
Si le Gouvernement propose une prorogation d’un an pour faire le point sur l’efficacité de la mesure, pourquoi prévoir cinq ans ?
La commission a donc évidemment émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Bricq. Dites-nous combien elle coûte !
Mme Nicole Bricq. Vous gaspillez 3 milliards et vous mégotez pour 30 millions !
M. Éric Woerth, ministre. C’est toujours la même histoire ! Si vous voulez que nous parlions des très grosses niches fiscales, allons-y, mais vous verrez que vous aurez la même opinion que beaucoup d’autres.
Les très grosses niches fiscales sont créées non pas pour les plus aisés, comme vous nous le reprochez si souvent, mais pour le plus grand nombre.
En l’occurrence, personne ne remet en cause la possibilité d’aider les personnes handicapées ou les personnes dépendantes à s’équiper en leur permettant de défalquer les sommes investies de leur déclaration d’impôt. Il n’en demeure pas moins que, comme pour tout dispositif, une évaluation s’impose.
Voilà pourquoi le Gouvernement propose, avec l’article 43, de proroger le dispositif d’un an. Une fois que l’inspection générale des finances aura parachevé cette évaluation, qui est en cours, nous pourrons reparler de cette niche.
Franchement, pourquoi vouloir aller au-delà d’un an ? C’est une drôle d’idée !
Mme Nicole Bricq. Parce que les gens vieillissent !
M. Éric Woerth, ministre. Si nous avions supprimé cette mesure, je pourrais comprendre votre intervention, mais nous la reconduisons pour 2010 !
M. le président. Je mets aux voix l'article 43.
(L'article 43 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 43
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-208 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa (1) de l'article 200-0 A du code général des impôts, le montant : « 25 000 euros » est remplacé par le montant : « 10 000 euros ».
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Les dispositifs correctifs de l’application pleine et entière des différents impôts et taxes inscrits dans notre législation sont manifestement l’une des sources du processus d’endettement et de déficit chronique de l’État. Ce qu’on appelle les « niches fiscales » constitue d’ailleurs, depuis quelques années, l’élément principal de mobilisation et d’utilisation de l’argent public, bien au-delà de la dépense publique directe. Cette situation n’est pas saine.
La dépense fiscale, par définition, n’a de sens que pour ceux qui ont quelque chose à payer, que ce soit sur les revenus qu’ils tirent de leur activité ou sur ceux que leur procure l’exploitation d’un capital ou d’un patrimoine, et non pour ceux dont les ressources sont si modestes que la stricte application de tel ou tel barème les exonère d’emblée.
Le développement des niches fiscales participe de la rupture du pacte républicain et des principes constitutionnels selon lesquels chacun contribue à la charge publique à la mesure de ses moyens.
Comme nous le savons, pour le seul impôt sur le revenu, les mesures de « correction » ont un coût important – aux alentours de 40 milliards d’euros, ce qui représente, dans les faits, une moins-value proche des quatre dixièmes du rendement normal de cet impôt –, et cela sans que beaucoup d’évaluations soient menées, sinon sur les dispositions générales, en tout cas sur la plupart des dispositions spécifiques touchant les revenus liés au patrimoine ou à des placements financiers.
Lorsque l’État renonce ainsi, et en vertu de dispositions légales, à 40 % des recettes que devrait lui fournir l’impôt sur le revenu, c’est un peu comme si le taux marginal supérieur n’était que de 24 %, au lieu de 40 %.
En fait, la combinaison des niches fiscales de l’impôt sur le revenu et les effets du bouclier fiscal peut produire ce résultat pour le moins étonnant : plus le revenu est élevé et le patrimoine important, plus le montant de l’imposition tend à se réduire !
Le plafonnement global des niches fiscales n’a guère eu d’effets sur le niveau global de la dépense fiscale. Il faut donc franchir désormais une nouvelle étape et décider d’un plafonnement plus contraignant, de manière à obtenir un meilleur rendement de l’impôt pour le budget général.
Ce plafonnement ne saurait évidemment nous dispenser du débat que nous devons absolument avoir sur l’ensemble des dispositifs dérogatoires, leur coût, leurs effets sur le comportement des agents économiques, leur pertinence économique et sociale.
M. le président. L'amendement n° II-265, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le mot : « supérieure », la fin du 1 de l'article 200-0 A du code général des impôts est ainsi rédigée : « à un montant de 15 000 euros ».
II. - La disposition du I est applicable à compter de l'imposition des revenus de l'année 2010.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Le Gouvernement, par votre voix, monsieur le ministre des comptes publics, a annoncé qu’il cherchait des euros. Eh bien, le dispositif que je propose va lui en fournir plusieurs centaines de millions.
Le plafonnement instauré par la loi de finances pour 2009 et en vertu duquel la réduction d’impôt sur le revenu ne peut excéder un montant de 25 000 euros majoré d’un montant correspondant à 10 % du revenu imposable, n’est pas satisfaisant. La preuve en est que le rapporteur général va nous présenter un amendement qui prend le même chemin que le nôtre, mais qui est d’une portée bien moindre et donc beaucoup moins efficace.
Le niveau retenu pour 2009 est trop élevé pour avoir un effet véritablement correctif et aboutit, tout le monde le sait, à ce que des contribuables aisés échappent totalement à l’impôt sur le revenu par le biais des dispositifs fiscaux dérogatoires.
L’étude d’impact jointe au présent projet de loi de finances estime le gain budgétaire du plafonnement global à une somme dérisoire : 22 millions d’euros. Et M. le ministre vient de nous dire que l’État n’était pas en mesure d’assumer dans la durée une exonération de 30 millions d’euros pour les personnes handicapées…
L’amendement que nous présentons vise donc à abaisser le niveau du plafonnement global instauré l’année dernière à 15 000 euros, et sans que s’y ajoute une fraction du revenu imposable. Ce dispositif permettrait aux 10 000 plus gros contribuables bénéficiaires de niches fiscales d’acquitter leur devoir de contribution aux finances publiques.
Il faut tout de même rappeler que, depuis que la droite est au pouvoir, 25 milliards d’euros de dépenses fiscales supplémentaires ont été créés. La majorité n’est donc pas très bien placée pour donner des leçons au groupe socialiste et, d’une manière générale, à l’opposition en matière de bonne gestion des finances publiques.
M. le président. L'amendement n° II-207 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le montant : « 25 000 € », la fin du premier alinéa (1) de l'article 200-0 A du code général des impôts est supprimée.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. On observera que l’ensemble des dispositifs existants dans notre législation pour les seuls réductions et crédits d’impôt sur le revenu représente un coût légèrement supérieur à 14 milliards d’euros. On pourrait donc tous les supprimer et modifier le barème d’imposition progressif dans des proportions non négligeables sans toucher au rendement de l’impôt.
En matière d’évaluation des voies et moyens, le niveau des dépenses fiscales est compris entre 41 milliards et 42 milliards d’euros, dont un tiers de réductions et de crédits, un tiers de dispositions à caractère général et un tiers de dispositions spécifiques pour certains revenus catégoriels, singulièrement les revenus du capital, du patrimoine et d’activités non salariées. La seule taxation à taux particulier des plus-values, par exemple, serait d’un coût compris entre 1,5 milliard et 2 milliards d’euros, ce qui vaut bien des mesures de réduction d’imposition.
Il faut clairement aller plus loin que la législation actuelle.
Notre position de fond est donc qu’il faut réduire la dépense fiscale, car celle-ci nuit profondément au principe d’égalité devant l’impôt, et la recycler pour dégager des marges permettant à la fois de restreindre le déficit et de repenser la dépense publique.
Paradoxe parmi d’autres : alors qu’on n’a toujours pas mis en place, avec l’allocation personnalisée d’autonomie, l’outil de prise en charge collective de la dépendance des personnes âgées, on laisse la dépense fiscale liée aux emplois à domicile croître et embellir.
Je citerai un autre exemple tiré de l’actualité récente : on taille dans le vif des crédits de la recherche, ce qui a pour effet de précariser les conditions de travail des chercheurs, mais on se félicite d’avoir réuni 90 millions d’euros de promesses de don grâce aux différentes initiatives, au demeurant très louables, prises à l’occasion du Téléthon.
Les choix budgétaires et fiscaux induits par la dépense fiscale doivent donc être révisés de manière intégrale, objective et critique. Nous devons parvenir, comme le recommandait d’ailleurs le Conseil national des impôts, dans un rapport déjà ancien, à réduire très sensiblement l’impact des allégements fiscaux figurant dans l’évaluation des voies et moyens.
M. le président. L'amendement n° II-158, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 43, insérer un article ainsi rédigé :
I. - Le 1 de l'article 200-0 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° le montant : « 25 000 euros » est remplacé par le montant : « 20 000 euros » ;
2° le pourcentage : « 10 % » est remplacé par le pourcentage : « 8 % ».
II. - Le I est applicable à compter de l'imposition des revenus de l'année 2010.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter cet amendement et donner l’avis de la commission sur les amendements nos II-208 rectifié, II-265 et II-207 rectifié.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ces amendements visent tous le même dispositif, dispositif très récent puisqu’il a été adopté dans la loi de finances pour 2009.
Lorsqu’il nous a été soumis, l’an dernier, nous lui avons trouvé des vertus : pour la première fois, une contrainte globale – plafond en valeur absolue, plafond en valeur relative par rapport aux revenus déclarés – était posée et destinée à s’appliquer au plus grand nombre – pas à la totalité – des niches fiscales au titre de l’impôt sur le revenu.
La question est aujourd'hui de savoir, monsieur le ministre, si le plafond tel qu’il a été établi par nos votes l’année dernière est au bon niveau.
Mme Nicole Bricq. Non !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Attendez que j’aille au bout de mon raisonnement, ma chère collègue ! (Sourires.)
J’ai tendance à penser, moi aussi, qu’il s’agit d’un manteau un peu trop large. (Mme Nicole Bricq opine.) Interrogés sur le rendement budgétaire de ce double plafond, les services du ministère avancent la somme de 22 millions d’euros : c’est tout de même le signe que la contrainte est plutôt légère…
Le problème me paraît donc mériter d’être soulevé.
L’instauration d’un plafond global est une très bonne chose, car cela incite le contribuable à choisir le régime préférentiel auquel il veut être rattaché. Il ne peut pas bénéficier de toutes les niches fiscales : il lui faut faire un choix.
Bien entendu, je ne partage pas du tout l’avis de M. Vera, notamment à propos des emplois à domicile. Il s’agit là d’une vieille controverse entre nous.
M. Charles Revet. En effet, ce n’est pas nouveau !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Du côté droit de l’hémicycle, on s’intéresse à ceux qui, grâce aux allégements fiscaux, parviennent à trouver du travail et ne sont plus cantonnés au travail au noir ; on y voit donc une mesure profondément sociale. Du côté gauche, on y voit un cadeau fait aux riches, qui peuvent ainsi employer à bon compte du personnel à domicile. Caricature ! Vu la situation de l’emploi qui est la nôtre, l’intérêt des mesures incitatives en faveur de l’emploi à domicile, quelles qu’en soient les formes, est tout à fait évident.
Il n’en demeure pas moins, monsieur le ministre, que l’on s’interroge sur le bon niveau du plafond global. J’ai donc expérimenté différentes formules.
L’amendement n° II-158 de la commission vise à abaisser le plafond en valeur absolue de 25 000 euros à 20 000 euros et le plafond en valeur relative de 10 % à 8 % du revenu imposable.
J’ai demandé à vos services, monsieur le ministre, de chiffrer l’effet de cette mesure. On m’a répondu qu’il serait fort modeste : 10 millions d’euros. Ces 10 millions d’euros viendraient donc s’ajouter aux 22 millions d’euros d’économies de dépense fiscale réalisées l’année dernière. Il n’y aurait donc là rien de bien dramatique. Ce qui est en jeu, en l’occurrence, c’est plutôt la volonté que manifesterait le Sénat, s’il consentait à suivre la commission des finances en adoptant son amendement, de limiter progressivement tous ces régimes préférentiels et de diminuer la dépense fiscale.
Nous sommes très vigilants en matière de dépenses budgétaires, de même que vous l’êtes, vous tout particulièrement, monsieur le ministre, qu’il s’agisse des dépenses des services ministériels ou de celles des opérateurs de l’État, et c’est ainsi que, année après année, nous dégagerons des marges, mais nous aimerions que la même rigueur s’applique à la dépense fiscale. Cet amendement est donc un signal.
Dans mon rapport écrit figure d’ailleurs un graphique qui montre comment agit ce double plafonnement par rapport à la dispersion des revenus imposables. L’hypothèse de travail de la commission des finances – un plafond de 20 000 euros et de 8 % du revenu imposable – s’inscrit parfaitement dans la continuité des dispositions que nous avons votées l’année dernière. Il s’agirait d’un réajustement tout à fait mineur. Le niveau de revenu imposable à partir duquel la mesure serait sensible correspondrait, pour une personne seule, à 116 000 euros et, pour un couple marié avec un enfant, soit deux parts et demie, à 160 000 euros.
L’adoption de ce dispositif n’entraînerait donc pas de perturbation majeure.
Bien entendu, la commission préfère son amendement aux autres, qui vont un peu trop loin et sont trop contraignants. En ce qui concerne l’emploi à domicile en particulier, leur adoption aurait une influence critiquable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. J’émets le même avis que la commission des finances sur les amendements nos II-208 rectifié, 265 et II-207 rectifié.
Je ne suis pas favorable non plus à l’amendement de la commission.
Bien sûr, dès lors qu’il y a un curseur, on peut le faire bouger, mais la question est de savoir où l’on doit le placer, car le curseur n’est pas, en lui-même, la vérité. La seule vérité, c’est celle du chiffrage.
Je vous rappelle que, voilà seulement un an, nous avons définitivement plafonné l’ensemble des niches fiscales, ce que personne n’avait jamais fait. Certaines niches étaient plafonnées, d’autres ne l’étaient pas. Nous avons donc instauré un plafonnement global.
On ne peut pas considérer le plafonnement global sans tenir compte dans le même temps des plafonnements niche par niche. Dans l’esprit du législateur, comme dans celui du Gouvernement, le plafonnement global est une sorte de voiture-balai, qui arase définitivement l’avantage fiscal à un certain niveau, après le passage du peloton des plafonnements niche par niche.
Nous avons ainsi, et M. le rapporteur général le sait parfaitement, plafonné le « Malraux » – que les mânes d’André Malraux me pardonnent de parler ainsi ! (Sourires.) – et réduit globalement de 10 millions d’euros l’avantage des contribuables bénéficiant de cette niche. De même, nous avons plafonné la réduction d’impôt au titre des investissements dans les DOM-TOM, cette niche fiscale étant la plus critiquée, probablement parce qu’elle donnait lieu au plus grand nombre d’abus.
À cet égard, je suis sensible à ce qu’a dit tout à l'heure le président Arthuis lorsqu’il a dénoncé les officines spécialisées dans l’optimisation fiscale. Nous recevons tous des offres de leur part, y compris par téléphone : ce sont quasiment des centres d’appel qui sollicitent ainsi à longueur de journée les contribuables !
Bien sûr, il faut bien qu’il existe des avantages fiscaux pour encourager certaines initiatives. Ainsi, il est important d’investir dans les DOM-TOM. Mais, en même temps, il ne faut pas que les niches fiscales ainsi constituées donnent lieu à une sorte de spéculation.
L’avantage fiscal lié à l’investissement dans les DOM-TOM a été réduit de 167 millions d’euros. Ce n’est pas rien ! Et la voiture-balai, c'est-à-dire le plafonnement global, a permis de réaliser une économie supplémentaire de 22 millions d’euros. En effet, lorsque les bénéficiaires de l’avantage fiscal lié à l’investissement dans les DOM-TOM atteignent le plafond de cette niche – notre souhait n’était pas que le plafonnement global corresponde au plafond d’une niche, car cela n’aurait pas eu de sens –, ils se reportent, comme M. le rapporteur général l’a rappelé, sur d’autres niches fiscales : le dispositif Malraux ou l’emploi d’un salarié à domicile, par exemple. Ils atteignent alors très vite le niveau du plafond global.
Je ne suis pas favorable à ce que l’on revoie tout de suite ce dispositif. Il n’est pas exclu que nous ayons à le faire plus tard, si nous jugeons que c’est nécessaire. Encore une fois, nous l’avons instauré ensemble l’année dernière seulement. On ne peut pas le modifier chaque année ! Et nous n’avons pas suffisamment de recul pour le faire dès maintenant : nous sommes vraiment le nez contre la vitre ! Pour 2009, les compteurs ne sont même pas encore complètement arrêtés.
Tenons-nous en donc au plafonnement global de 25 000 euros et 10 % du revenu imposable, et faisons en sorte d’avoir au moins deux années de recul avant de songer à le modifier éventuellement.
Les plafonnements spécifiques à certaines niches mériteraient peut-être aussi d’être revus – le « Malraux », les investissements dans les DOM-TOM et d’autres encore –, mais il est trop tôt pour le faire. En modifiant ces dispositifs tous les ans, nous signifierions simplement que nous voulons leur mort.
Les niveaux des plafonds que nous avons fixés me paraissent importants et efficaces. Il n’est donc pas utile de les revoir cette année.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le ministre, je suis navré, mais je n’ai pas été convaincu par votre argumentation.
Connaissant un peu la sociologie de notre pays et de nos assemblées, je pense que l’examen niche par niche ne donnera jamais de résultat en ce qui concerne l’impôt sur le revenu, le souhait de créer des niches nouvelles étant beaucoup plus fort que celui de les plafonner !
C’est la raison pour laquelle j’ai approuvé l’année dernière la proposition du Gouvernement et des commissions des finances du Sénat et de l’Assemblée nationale d’instaurer un plafonnement global, qui présente deux avantages.
Premièrement, ce plafonnement global laisse la liberté aux redevables de choisir les niches auxquelles ils ont recours. Certains choisissent de bénéficier des avantages fiscaux liés au changement de leur installation de chauffage, d’autres préfèrent le faire en contribuant au denier du culte,…
M. Michel Charasse. Où ça va se nicher ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Fourcade. … d’autres encore en cotisant à une organisation syndicale ou politique, etc.
Cela étant dit, je pense que les plafonds que nous avons instaurés l’année dernière sont beaucoup trop élevés. C’est pourquoi la position de la commission des finances, qui souhaite envoyer un signal, me paraît raisonnable.
En matière de niches fiscales, nous sommes tout de même les champions d’Europe ! Le total de la dépense fiscale liée à l’impôt sur le revenu est aujourd'hui légèrement supérieur au produit total de cet impôt ! Je ne connais pas d’autre pays européen où le total de la dépense fiscale – 70 milliards d’euros me dit-on – sur un seul impôt soit supérieur au produit de cet impôt !
Monsieur le ministre, vous considérez qu’il faut attendre deux ans avant de modifier les plafonds. Or les plafonds que nous avons fixés l’an dernier sont très hauts et ils n’ont pas une grande efficacité, comme le démontrent amplement les chiffres donnés par vos services.
Nous savons tous qu’il nous sera difficile de plafonner certaines niches. Jouons donc sur le plafonnement global et adoptons, mes chers collègues, l’amendement de la commission des finances, en attendant les rapports techniques de l’inspection générale des finances sur l’ensemble des niches fiscales.
M. le président. La parole est à M. Alain Lambert, pour explication de vote.
M. Alain Lambert. Je suivrai bien entendu la commission.
Toutefois, à la différence de M. Fourcade, je pense que nous devons nous méfier du principe du plafonnement global, dont l’effet probable à terme serait de voir toutes les administrations de l’État appuyer leur politique sur des exonérations fiscales. Nous risquons d’aboutir ainsi, au sein de l’exécutif, chargé d’assumer la gouvernance des finances publiques et des recettes fiscales, à une forme d’éclatement du pouvoir fiscal entre les différents ministères.
En contrepartie, c’est sur le contribuable qu’on fait reposer la responsabilité de vérifier s’il n’a pas dépassé le montant global du plafonnement et, éventuellement, de trier entre les avantages qui lui sont proposés.
Je souhaite donc attirer l’attention de la commission et du Gouvernement sur ce point. Il faudrait tout de même que les administrations d’État soient capables de se contraindre, de se maîtriser elles-mêmes, faute de quoi nous risquons de voir, ici, le ministère des sports, là, tel ou tel ministère social essayer de fonder leur stratégie et leurs nouvelles politiques sur de la dépense fiscale.
Par conséquent, je voterai l’amendement de la commission, mais je ne suis pas certain que le plafonnement global soit, à terme, la solution idéale.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Je trouve cette discussion un peu surréaliste. Et je pense qu’il ne faut tout de même pas trop à prendre les contribuables pour ce qu’ils ne sont pas !
Au début de cette matinée, nous avons entendu qu’il ne fallait pas toucher à la demi-part des veuves parce qu’elle a été adoptée l’année dernière. On nous a dit : « Cela vient d’être voté ; on ne va pas remettre en cause le dispositif un an après ! »
Et là, il est urgent de remettre le plafonnement en cause un an après qu’il a été institué…
Comment voulez-vous que les contribuables aient une idée un peu nette et claire de la manière dont nous manipulons la justice fiscale ? Je trouve que ce n’est pas sérieux !
À partir du moment où M. le rapporteur général nous a dit qu’il ne fallait pas toucher au dispositif adopté l’année dernière en ce qui concerne la demi-part des veuves, je considère qu’il ne faut pas non plus toucher au plafonnement.
Parce que si l’on s’amuse tous les ans à revenir là-dessus,… attendez ! L’année dernière, nous avons eu le courage de mettre 25 000 euros de plafonnement. Ah oui, mais il y en a à qui ça ne convient pas ! Et, permettez-moi de vous le dire, ce sont les plus favorisés de la catégorie ! Et, eux, ils savent téléphoner, et ils ont des amis ! Et, bien entendu, leur prendre 3,50 euros de plus, c’est odieux et insupportable !
Alors, bien sûr, là, pour eux, comme on tape sur les riches et les plus favorisés, il faut surtout remettre en cause ce qui a été voté voilà un an !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est le contraire, monsieur Charasse !
M. Michel Charasse. Mais, pour les veuves, les circonstances sont différentes, alors peu importe, ça peut attendre, on ne va pas remettre en cause une réforme tous les ans !
Par conséquent, monsieur le rapporteur général, et vous savez l’estime et l’amitié que j’ai pour vous – j’ai habitude de vous soutenir quand il le faut –, je dois tout de même vous dire qu’il y a des choses qui sont un peu contradictoires !
Sauf si je n’ai pas compris la portée essentielle de votre amendement… Mais, même en aggravant le système voté l’an dernier, comme semble le dire M. le président de la commission, revenir dessus un an après, c’est un peu court !
M. le président. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.
M. Charles Revet. Je partage la position qui vient d’être exprimée par Michel Charasse.
À mon sens, le Gouvernement a souhaité développer les mesures d’aide aux familles ou d’aide à domicile, notamment, que la situation de nombreuses personnes rend aujourd'hui de plus en plus nécessaires. Il faut donc les maintenir.
Le plafonnement global a été adopté voilà seulement un an. Nous avons besoin de nous laisser du temps pour l’évaluer. C’est pourquoi je ne voterai aucun des amendements qui nous sont proposés.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J’apprécie d’ordinaire chacune des déclarations de Michel Charasse, car elles me donnent des arguments supplémentaires pour me convaincre d’aller dans la bonne direction. Pourtant, aujourd'hui, je perçois comme un soupçon de contradiction dans son propos.
En effet, comme nous l’avons bien précisé, nous voulons limiter les avantages dont peuvent se prévaloir un certain nombre de nos compatriotes, ceux que l’on pourrait qualifier de « plutôt fortunés ». Le fait d’abaisser le plafond n’est pas de nature à les réjouir ; pour eux, l’entaille sera un peu plus vive. C’est cela notre préoccupation, monsieur Charasse.
M. Michel Charasse. J’aurais compris l’inverse de ce que vous voulez faire ?... (Sourires.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je le crains, en effet, mon cher collègue. Mais peut-être cette précision sera-t-elle de nature à inverser votre vote…
La France n’est pas championne seulement dans la catégorie bien particulière qu’a évoquée M. Fourcade ; elle est également capable d’afficher des barèmes d’imposition parmi les plus élevés du monde tout en ayant le plus faible niveau de rendement ! Tout cela parce que nous multiplions les mesures dérogatoires, les allégements, les dégrèvements – je serai, malgré tout, prudent dans l’utilisation de ce mot (Sourires) –, les réductions, les crédits d’impôt…
L’économie de certains territoires – je pense notamment à l’outre-mer – peut s’en trouver bouleversée. Ainsi, notre collègue de Saint-Barthélemy nous a souvent indiqué qu’il allait bientôt falloir construire des parkings à plusieurs étages pour y loger toutes les automobiles achetées en défiscalisation !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est un scandale !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On active ainsi une économie complètement artificielle et je ne suis pas certain que les territoires ultramarins en tirent des bienfaits. Il va donc falloir que cela change.
De surcroît, que constatons-nous si nous prenons la peine d’analyser la chaîne de traitement dans les opérations défiscalisées ? Entre l’organisme financier, qui reçoit sa commission, le monteur d’opération, qui perçoit ses honoraires, et les « officines » diverses, qui font de la publicité pour les différents produits, on achète des investissements au kilo parce que cela ouvre droit à autant d’allégements d’impôts, sans se rendre compte qu’on paiera au final sans doute le double ou le triple des investissements achetés !
Tout cela confine à l’absurde. Et le législateur, qui vote toutes ces dispositions fiscales, devient le complice de tant et tant de turpitudes. Il va donc falloir y mettre un terme, monsieur le ministre.
Au demeurant, je pense que toutes ces mesures dérogatoires désarment le ministre du budget. En effet, monsieur le ministre, vous faites un effort admirable – je veux ici rendre hommage à votre engagement, à votre rigueur et à votre sens pédagogique – pour tenir la dépense publique. Mais tous vos collègues ministres passent leur temps, pour accompagner leurs très belles lois, à défaut de disposer de crédits pour concrétiser leurs ambitions, à miner les recettes budgétaires à venir, en les transformant en une dentelle qui, pour le coup, n’est pas d’Alençon ! (M. Alain Lambert sourit.)
Vous le voyez, monsieur le ministre, en proposant une telle mesure, nous sommes totalement à vos côtés. Il s’agit, en quelque sorte, d’adresser un signal. Notre vision de la fiscalité, c’est un barème aussi modique que possible et une absence de mesures dérogatoires.
Tel est notre horizon fiscal et tel est l’objet de l’amendement déposé par la commission des finances.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement n’est pas convaincu par ce plaidoyer, aussi brillant soit-il. (M. le président de la commission des finances s’exclame.)
À mon sens, le plafonnement global joue simplement, je l’ai dit, le rôle d’une voiture-balai. L’essentiel est de regarder jusqu’où il va niche par niche.
Qu’il s’agisse du dispositif DOM-TOM – c’est le plus important, et il est à l’origine d’un quasi-marché –, de l’exonération de TVA ou du régime applicable aux fonctionnaires du FMI, chaque dispositif produit ses propres abus, et il faut les combattre. C’est ce que nous faisons.
Au fond, quel que soit le niveau auquel vous fixerez le plafonnement global, son rendement sera toujours relativement faible. D’ailleurs, plus il se rapprochera du plafonnement d’une seule niche, plus son rendement propre diminuera. De plus, les gens optimisent différemment selon les dispositifs applicables. À partir du moment où il existe un plafonnement global, ils en tiennent compte dans leurs calculs. Le rendement du plafonnement global sera donc toujours, mécaniquement, assez faible.
C’est pourquoi je pense qu’il ne faut pas trop se focaliser sur les 22 millions d'euros de recettes supplémentaires.
En outre, je souhaite attirer l’attention du Sénat sur un point auquel je sais M. le président de la commission des finances extrêmement sensible : le changement de législation fiscale crée une instabilité fiscale porteuse de risques.
M. Albéric de Montgolfier. C’est le meilleur argument !
M. Éric Woerth, ministre. L’an dernier, beaucoup ne voulaient pas des plafonnements. Et, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, vous avez tenu bon pour instituer de tels dispositifs face à ceux qui n’en voulaient pas du tout ou à ceux qui ont essayé de les réduire. En particulier, plusieurs de vos collègues ne voulaient pas de plafonnement de la niche relative aux investissements en outre-mer.
Nous avons tenu bon ensemble parce que nous considérons que, dans un système qui abrite trop de niches fiscales, il est indispensable de les plafonner. Comme l’a souligné M. Fourcade, il faut effectivement une approche globale. Nous avons besoin d’un dispositif qui arase les avantages fiscaux.
Tel est l’objet du plafonnement global. Beaucoup n’en voulaient pas et, en particulier, ne voulaient pas d’un tel mode de calcul pour l’outre-mer. D’autres modes de calcul permettaient d’échapper totalement au plafonnement. Mais le dispositif nous a tout de même épargné 167 millions d'euros de dépense fiscale ; c’est bien la preuve qu’il fonctionne !
Nous ne pouvons pas créer d’instabilité fiscale en permanence. Le dispositif a été adopté voilà à peine un an. Peut-être pourrions-nous le modifier s’il avait été voté voilà dix, cinq ou même trois ans… Mais pas au bout d’un an seulement !
En outre, mesdames, messieurs les sénateurs, si vous décidez de voter l’amendement de la commission, je vous recommande d’être extrêmement vigilants quant à l’assiette. En effet, des investissements, notamment en outre-mer, ont été effectués sur la base de ce plafonnement l’année dernière ou voilà deux ans. Il risque donc de se poser un problème de stocks et de flux.
Mme Nicole Bricq. Où est le risque ? Le dispositif ne profite de toute manière pas aux populations ultramarines !
M. Éric Woerth, ministre. Nous serions alors obligés de revoir la rédaction du texte.
Pour ma part, je préférerais que l’amendement de la commission soit retiré ou rejeté, ne serait-ce que pour des raisons de stabilité fiscale. D’ailleurs, le Gouvernement a bien veillé, dans l’ensemble des dispositifs prévus pour cette année, à ne pas créer d’instabilité par rapport aux mesures adoptées l’année dernière.
M. le président. La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.
M. Michel Magras. Je souscris aux propos de M. le président de la commission des finances et je souhaite le conforter dans son analyse.
Comme vous le savez, il m’arrive souvent, lors de mes interventions, de me trouver en contradiction avec les autres sénateurs d’outre-mer. En l’occurrence, à Saint-Barthélemy, nous avons justement demandé à pouvoir délibérer – nous nous apprêtons d’ailleurs à le faire dans les jours à venir – sur la détermination des secteurs dans lesquels nous souhaitons une défiscalisation.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Michel Magras. Selon les chiffres qui nous ont été communiqués par le service circulation de la collectivité, ce sont plus de 1 500 véhicules qui ont été défiscalisés en 2009 ! Et les sociétés qui organisent tout cela – elles sont d’ailleurs domiciliées non pas à Saint-Barthélemy, mais en métropole et dans d’autres départements ou collectivités d’outre-mer – ont déjà commencé à investir pour anticiper sur la décision de la collectivité de Saint-Barthélemy, qui entrera en vigueur au 1er janvier 2010.
Nous avons là un exemple flagrant. Vous imaginez-vous ce que représentent 1 500 véhicules sur un territoire de 24 kilomètres carrés ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'amendement n° II-265.
Mme Nicole Bricq. Vous le savez, les socialistes sont très attachés au retour à une fiscalité progressive, ne serait-ce que parce que cela relève de l’article XIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, aux termes duquel chacun doit contribuer à la dépense publique en fonction de ses capacités.
Monsieur le ministre, l’occasion vous est offerte aujourd'hui d’indiquer au moins une direction pour revenir à plus d’équité fiscale. Et, à cette fin, nous nous appuyons sur un chiffre que, pour une fois, vous ne contestez pas puisqu’il est annexé au projet de loi de finances. Nous savons en effet que le plafonnement instauré l’an dernier a permis d’économiser 22 millions d’euros de dépense fiscale en 2009.
Or, je me permets de le rappeler, il y a un an, pour nous « vendre » ce plafonnement, vous nous aviez assuré qu’il permettrait d’en économiser 200 millions ! On est loin du compte !
L’argument qui consiste à ne pas vouloir introduire d’instabilité dans la lecture fiscale ne tient pas. Les contribuables qui bénéficient de cette niche fiscale, l’exposé des motifs de l’amendement de la commission des finances l’énonce clairement, ont recours à des cabinets d’optimisation fiscale. Ces cabinets, que M. le rapporteur général nomme des « officines », sont très prompts à réagir. Du reste, il n’est que de lire les suppléments du type « Votre argent » que des quotidiens et des hebdomadaires publient en fin d’année pour se rendre compte que l’on sait très bien lire les lois de finances et déceler les avantages fiscaux !
Le mécanisme proposé vous donne l’occasion de revenir à plus d’égalité. Si vous refusez cette proposition, cela signifie peut-être que votre souhait inavoué est de transformer la France en paradis fiscal, notamment pour les plus riches.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. N’exagérons rien !
Mme Nicole Bricq. L’amendement n° II-265 du groupe socialiste est sévère, car il abaisse le niveau de plafonnement à 15 000 euros et supprime la part variable, quand le rapporteur général nous propose de fixer le plafond à 20 000 euros, au lieu de 25 000 euros, et la part variable à 8 % du revenu imposable, au lieu de 10 %.
Autrement dit, ces amendements vont dans le même sens, mais le nôtre est plus radical. C’est pourquoi, s’il n’est pas adopté, comme je le crains, nous voterons l’amendement n° II-158 de la commission. Il est très insuffisant, mais il va néanmoins dans le sens d’une plus grande équité fiscale.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 43.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l’examen du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l’Assemblée nationale.
Dans la suite de la discussion des articles de la seconde partie non rattachés aux crédits, nous en sommes parvenus à l’article 44.
Article 44
L’article 199 septvicies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I, les mots : «, entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012, » sont supprimés ;
2° La dernière phrase du dernier alinéa du I est complétée par les mots : « et aux logements financés au moyen d’un prêt mentionné à l’article R. 331-1 du code de la construction et de l’habitation » ;
3° La dernière phrase du premier alinéa du IV est supprimée ;
4° Après le premier alinéa du IV, sont insérés six alinéas ainsi rédigés :
« Le taux de la réduction d’impôt est de :
« – 25 % pour les logements acquis ou construits en 2009 et 2010 ;
« – 15 % pour les logements acquis ou construits en 2011 ;
« – 10 % pour les logements acquis ou construits en 2012.
« Toutefois, lorsque le contribuable acquiert ou fait construire un logement neuf dont le niveau de performance énergétique globale, déterminé dans des conditions fixées par décret et justifié par le bénéficiaire, est supérieur à celui qu’impose la législation en vigueur, le taux de la réduction d’impôt est majoré de dix points pour les logements acquis ou construits en 2011 et 2012.
« Pour les logements acquis ou construits à compter de 2013, le taux de la réduction d’impôt est égal à 15 %. » ;
5° Les avant-derniers alinéas du IV et du VIII sont complétés par les mots : « pour autant que l’immeuble soit maintenu à la location pendant lesdites années » ;
6° Le deuxième alinéa du VIII est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :
« Le taux de la réduction d’impôt est de :
« – 25 % pour les souscriptions réalisées en 2009 et en 2010 ;
« – 15 % pour les souscriptions réalisées en 2011 ;
« – 10 % pour les souscriptions réalisées en 2012.
« Toutefois, lorsque 95 % de la souscription servent exclusivement à financer des logements mentionnés au sixième alinéa du IV, le taux de la réduction d’impôt est majoré de dix points pour les logements acquis ou construits en 2011 et 2012.
« Pour les souscriptions réalisées à compter de 2013, le taux de la réduction d’impôt est égal à 15 %. » ;
7° Au premier alinéa du XI, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « huitième ».
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-103, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les dispositions de l’article 199 septvicies du code général des impôts sont abrogées.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement complète ceux que nous avons présentés en première partie.
Si l’on se réfère aux intentions affichées dans le projet de loi de finances et que l’on analyse la portée de l’article 44, il s’agirait de « maîtriser » la dépense fiscale associée à la mise en œuvre des dispositifs d’incitation à l’investissement locatif, qu’ils s’appellent Robien, Borloo ou encore Scellier.
Le « verdissement » du dispositif Scellier, préconisé par le présent article, nous révèle au moins deux choses.
En premier lieu, quelques fiscalistes ont pu estimer que les dispositifs incitatifs en matière d’investissement immobilier finissaient par représenter un coût trop élevé et, au moins, trop « voyant » par rapport aux autres dépenses fiscales. Ce coût est d’autant plus élevé qu’il faut le comparer avec le mouvement, en pratique inverse, des crédits budgétaires ouverts pour le financement du logement locatif social.
En second lieu, les dispositifs incitatifs semblent avoir permis de financer des opérations de construction de logements ne présentant pas toutes les qualités du point de vue du respect de l’environnement, ni de la performance énergétique des immeubles. En clair, le véhicule fiscal aurait été utilisé pour réaliser des programmes de médiocre qualité architecturale et des équipements finalement assez sommaires.
Ce double constat, portant sur le niveau élevé de la dépense fiscale – en elle-même supérieure aux crédits ouverts pour la construction et la réhabilitation de logements, comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner ce matin – et les médiocres performances environnementales, nous incite donc, non pas à « recentrer les dispositifs incitatifs », mais plutôt à mettre purement et simplement un terme à leur existence.
Tel est le sens de cet amendement qui tend à supprimer, une bonne fois pour toutes, des outils fiscaux de pure optimisation qui ne répondent aucunement aux exigences d’une véritable politique du logement !
M. le président. Les amendements nos II-159 et II-279 sont identiques.
L’amendement n° II-159 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° II-279 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
II. En conséquence, alinéas 11 et 19
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° II-159.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances essaie d’être cohérente avec ses principes. Nous avons voté le dispositif Scellier l’an dernier et le Gouvernement nous propose de le modifier légèrement pour tenir compte des objectifs environnementaux : cet aménagement nous paraît tout à fait justifié, surtout s’il permet de réaliser, au passage, une petite économie sur la dépense fiscale, à laquelle nous serions naturellement favorables !
Nous pensons que ce régime, comme les autres, doit se soumettre à la discipline de l’évaluation, c’est pourquoi il ne nous paraît pas souhaitable de le rendre permanent. Il est actuellement prévu que le dispositif Scellier cessera d’être applicable après le 31 décembre 2012 et il n’y a pas lieu, pour nous, de revenir sur cette date limite : il sera temps, d’ici là, de requalifier ce dispositif au vu des évaluations auxquelles il aura été procédé.
La commission des finances considère donc qu’il serait tout à fait prématuré et même inopportun de pérenniser ce régime, bien qu’il nous semble particulièrement important du point de vue de l’activité et de l’emploi, dans la conjoncture économique que nous connaissons actuellement.
M. le président. La parole est à M. Claude Haut, pour présenter l’amendement n° II-279.
M. Claude Haut. Cet amendement est identique à celui que vient de présenter M. le rapporteur général, mais je voudrais apporter quelques précisions complémentaires.
L’article 44 prévoyait initialement de limiter la réduction d’impôt sur le revenu au titre de l’investissement locatif, dite « Scellier », pour les logements qui ne respecteraient pas la norme « bâtiment basse consommation », ou BBC. Cette mesure visait donc à anticiper l’application obligatoire de cette norme à compter de 2013.
Or, au détour d’un amendement déposé par le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, la dépense fiscale « Scellier » a non seulement perdu de son ambition écologique, mais surtout a été pérennisée au-delà du 31 décembre 2012, date à laquelle le dispositif devait en principe prendre fin.
La crise économique que nous traversons a eu d’importantes répercussions sur le marché immobilier et a accentué la crise du logement. À la fin du mois de septembre 2009, le nombre de mises en chantier de logements avait ainsi accusé un recul de 20 % sur un an. Le Gouvernement prétend que ces dispositifs d’aide à l’investissement auraient permis de réduire le manque de logements dans notre pays, mais nous doutons de cette affirmation. Surtout, l’ensemble de ces dispositifs, hors Scellier, ont représenté un coût global pour l’État de 600 millions d’euros en 2009.
Le coût du dispositif Scellier, comme vous l’indiquez dans votre rapport, monsieur le rapporteur général, est très élevé : de l’ordre de 60 millions d’euros en 2010. Vous rappelez même que le coût total « d’une génération de Scellier » est estimé à 2,8 milliards d’euros pour seulement 50 000 logements construits ! Cette dépense fiscale élevée fait donc du dispositif Scellier un régime d’aide à l’investissement beaucoup plus couteux – près de quatre fois plus – que les dispositifs actuels Robien et Borloo. Par ailleurs, son application est loin d’être satisfaisante, puisque seulement un tiers des logements sont construits en zone intermédiaire.
Malgré ce constat accablant, le texte adopté par l’Assemblée nationale tend à prolonger ce dispositif ad vitam aeternam, sans disposer par ailleurs de plus amples évaluations sur son application. C’est la raison pour laquelle notre amendement vise également à supprimer cette prorogation injustifiée et à maintenir la date limite initialement prévue à la fin de l’année 2012.
Enfin, les députés ont proposé de conserver un taux élevé de réduction fiscale pour l’année prochaine, sans qu’il soit tenu compte des critères environnementaux définis par le texte initial.
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° II-160 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° II-67 rectifié bis est présenté par MM. Braye, Brun, Detcheverry, Leleux, Gouteyron, Le Grand, Béteille, Milon, Bécot, Houel, Mayet, Grignon, Laménie, Couderc, Lardeux, Alduy, Demuynck, Gournac et Dubois, Mmes Bout, G. Gautier, Malovry et Lamure, Mlle Joissains, Mme Bruguière et M. Vial.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. Alinéa 3
Supprimer cet alinéa
II. En conséquence, après l’alinéa 12
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Le V est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les logements faisant l’objet d’une convention mentionnée au 3° ou au 5° de l’article L. 351-2 du code de la construction et de l’habitation ne bénéficient pas de la prolongation de réduction d’impôt prévue au présent V. Cette disposition s’applique aux logements acquis ou construits à compter du 1er janvier 2010, à l’exception de ceux pour lesquels un contrat préliminaire tel que prévu à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation, une promesse d’achat ou une promesse synallagmatique a été souscrit par l’acquéreur en 2009. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° II-160.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. À l’heure actuelle, deux types d’avantages peuvent se cumuler pour les investisseurs privés : premièrement, la réduction d’impôt Scellier et, deuxièmement, les aides bénéficiant aux logements sociaux conventionnés financés par des prêts locatifs sociaux, ou PLS. Ces dernières réalisations bénéficient du taux réduit de TVA et de l’exonération de taxe foncière jusqu’à un maximum de vingt-cinq ans.
Or, les conditions d’occupation d’un logement financé par un PLS sont plus strictes que celles afférentes au dispositif Scellier de niveau intermédiaire et, a fortiori, que celles du dispositif Scellier pour le logement libre. Ainsi, des investisseurs en logements financés par des PLS peuvent bénéficier automatiquement des avantages de la réduction d’impôt Scellier, sans contrepartie sociale supplémentaire. Nous critiquons ce cumul d’avantages, car il induit un coût fiscal élevé et permet une rentabilité à notre avis excessive, susceptible d’atteindre 10 % par an.
C’est pourquoi la commission des finances propose d’interdire le cumul de ces deux dispositifs. Dès lors, si elle est suivie, un contribuable pourra continuer à cumuler la réduction d’impôt pour le dispositif Scellier dit « de base » et la déduction de 30 % sur les loyers correspondant aux logements financés par des PLS.
M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron, pour présenter l’amendement n° II-67 rectifié bis.
M. Adrien Gouteyron. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-161, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. Alinéa 7
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« - 25 % pour les logements acquis ou construits en 2009 ;
« - 20 % pour les logements acquis ou construits en 2010 ;
II. En conséquence, alinéa 5
Remplacer les mots :
six alinéas
par les mots :
sept alinéas
III. Alinéa 10
Remplacer les mots :
dix points
par les mots :
cinq points
et après les mots :
construits en
insérer l’année :
2010,
IV. Alinéa 15
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« - 25 % pour les souscriptions réalisées en 2009 ;
« - 20 % pour les souscriptions réalisées en 2010 ;
V. Alinéa 18
Remplacer les mots :
dix points
par les mots :
cinq points
et après les mots :
construits en
insérer l’année :
2010,
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à revenir au texte initial du Gouvernement, qui prévoyait opportunément, pour 2010, une baisse de 5 % de la réduction d’impôt pour les investissements dans le régime « Scellier » concernant des logements ne répondant pas à la norme « bâtiment basse consommation », ou BBC.
Comme nous sommes soucieux de « verdir » plus vite tout ce dispositif et que nous voulons nous inscrire, spécialement aujourd’hui, dans les impératifs du développement durable, nous attachons une importance toute particulière au respect des engagements du Grenelle de l’environnement.
Il nous semble donc, monsieur le ministre, que le Gouvernement avait tout à fait raison d’établir, dès 2010, un différentiel de 5 % de réduction d’impôt supplémentaire au profit du « Scellier BBC », sans remettre en cause l’intérêt d’un avantage fiscal déjà très attractif.
M. le président. L'amendement n° II-278, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre 2010, un rapport d'évaluation du dispositif d'aide à l'investissement locatif prévu à l'article 199 septvicies du code général des impôts.
La parole est à M. Claude Haut.
M. Claude Haut. Par cet amendement, nous réaffirmons notre volonté de procéder à une évaluation des niches fiscales au regard de leur efficacité économique et de leur utilité sociale.
Force est de constater que les premiers chiffres qui nous parviennent sur l’application du dispositif Scellier sont loin de donner entière satisfaction.
Nous le disions à l’occasion de la défense de notre amendement précédent, son efficacité économique n’est pour l’heure pas avérée. Le coût pour l’État est très important, supérieur à tous les autres dispositifs, pour un nombre de logements construits relativement faible.
S’agissant de son utilité sociale, nous sommes, pour l’heure, obligés de faire le même constat. Seul un tiers des logements construits bénéficie aux zones tendues, le reste correspondant à du logement en zone libre. De surcroît, nous l’avons souligné à plusieurs reprises, aucune contrepartie sociale n’est imposée aux investisseurs, puisque le choix des locataires n’est soumis à aucune condition de ressources.
Dans ces conditions, un tel système ne pourra certainement pas être maintenu au-delà de l’année 2012, qui est actuellement prévue.
Si notre amendement n° II-279 n’était pas adopté, nous souhaiterions qu’un rapport du Gouvernement puisse, avant ce terme, fournir au Parlement les éléments d’évaluation du dispositif Scellier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous sommes favorables à l’amendement n° II-278 prévoyant un rapport d’évaluation.
L’amendement n° II-67 rectifié bis est identique à l’amendement n° II-160 de la commission. Nous remercions ses auteurs de bien vouloir nous prêter leur concours.
L’amendement n° II-279 est identique à l’amendement n° II-159 de la commission. Nous ferons donc un bout de chemin ensemble, du moins je l’espère !
À l’inverse, nous sommes défavorables à l’amendement n° II-103, qui vise à supprimer purement et simplement le dispositif Scellier, alors que nous souhaitons lui donner une jolie petite tonalité verte !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Nous sommes défavorables à l’amendement n° II-103 tendant à supprimer le dispositif Scellier.
Les amendements nos II-159 et II-279 visent à supprimer les dispositions tendant à pérenniser le dispositif Scellier au-delà de 2012 adoptées par l’Assemblée nationale, ce qui n’était pas prévu dans le texte initial du Gouvernement. Je m’en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
Il est toujours préférable d’évaluer un dispositif avant de le pérenniser. Nous devons observer les effets de cette incitation, dont chacun s’accorde à dire qu’elle est puissante, sur le marché immobilier – c’est grâce à elle que le marché immobilier se porte bien en France – avant de prendre toute décision.
Je suis plus réservé sur les amendements nos II-160 et II-67 rectifié bis. Il est toujours très délicat de cumuler deux avantages. Vous tendez à réduire ce cumul, qu’il faudrait, selon moi, totalement supprimer.
Le cumul entre le dispositif Scellier intermédiaire et le PLS aboutit à un taux subvention de 65 %. Dans vos amendements, il s’agit du dispositif Scellier non intermédiaire, l’intermédiaire n’étant pas cumulable. Cependant, le dispositif Scellier classique, cumulé avec le PLS, représente tout de même un taux de subvention de 53 %. Le Scellier intermédiaire seul permet un taux de 37 %, ce qui, pour le Gouvernement, est tout à fait suffisant. Le cumul conduirait à une superposition injustifiée d’avantages aux objectifs différents. Je vous remercie d’avoir évoqué le sujet, mais il serait préférable de continuer à en discuter.
J’en viens à l’amendement n° II-161 et au verdissement du dispositif Scellier via la recomposition du barème et la prise en compte de la norme « bâtiment basse consommation ». Dans cet amendement, monsieur le rapporteur général, vous rectifiez la grille qui a été votée à l’Assemblée nationale après être passée par plusieurs versions différentes.
Mme Nicole Bricq. Oui !
M. Éric Woerth, ministre. En 2010, les logements relevant du dispositif Scellier répondant à la norme BBC bénéficieront d’un avantage fiscal de 25 % ; pour ceux qui ne répondent pas à la norme BBC, vous faites passer cet avantage à 20 % quand l’Assemblée nationale le maintient à 25 %.
Pour 2011, votre proposition reprend la grille proposée par le Gouvernement : le Scellier BBC bénéficiera d’un avantage fiscal de 20 %, de 15 % puis de 0 % ; le Scellier non-BBC de 15 %, de 10 % puis de 0 % en 2013. Le dispositif sera réévalué lors du projet de loi de finances pour 2013.
Dans ces conditions, et compte tenu du débat à l’Assemblée nationale, je m’en remets à la sagesse du Sénat sur cet amendement n° II-161.
Enfin, nous sommes favorables à l’amendement n° II-278 prévoyant un rapport d’évaluation, quoique les délais pour réaliser ce rapport soient courts. Mais, me direz-vous, à l’impossible nous sommes tenus…
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-159 et II-279.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour explication de vote sur les amendements nos II-160 et II-67 rectifié bis.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je souhaiterais éclairer un peu le débat.
M. Michel Charasse. Ah !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il existe trois approches possibles : d’abord, le droit existant, qui permet complètement ce cumul, si je ne me trompe ; ensuite, la version votée par nos collègues de l’Assemblée nationale, qui l’interdit complètement ; enfin, la version que la commission a proposée, de même que M. Gouteyron, qui serait, en quelque sorte, une cote mal taillée…
Monsieur le ministre, je crois comprendre que vous êtes favorable à la version la plus rigoureuse, celle qui assure le moins de cumul d’avantages et donc le moins de dépenses fiscales. C’est bien cela ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président de la commission, sommes-nous susceptibles de retirer cet amendement ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-160 est retiré.
Monsieur Gouteyron, l'amendement n° II-67 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Adrien Gouteyron. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-67 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° II-161.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 44, modifié.
(L'article 44 est adopté.)
Article 44 bis (nouveau)
I. – Le X de l’article 199 septvicies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, cette réduction d’impôt est également acquise au titre des logements situés dans les communes mentionnées au premier alinéa lorsqu’ils ont fait l’objet d’un agrément délivré par le ministre chargé du logement, dans des conditions définies par décret, après avis du maire de la commune d’implantation ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale territorialement compétent en matière d’urbanisme. La décision du ministre de délivrer ou non l’agrément doit tenir compte des besoins en logements adaptés à la population. »
II. – Le I s’applique à compter de l’imposition des revenus de 2010.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-104 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° II-280 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l’amendement n° II-104.
M. Thierry Foucaud. Sur le principe, cet amendement de suppression est évidemment lié à notre position de fond sur le dispositif Scellier d’incitation à l’investissement locatif. Nous avons proposé, par cohérence, la suppression de l’article 44 bis, puisque nous sommes favorables à la suppression pure et simple de l’article 199 septvicies du code général des impôts qui définit le cadre fiscal de ce dispositif.
S’il fallait trouver quelque raison supplémentaire de supprimer ce dispositif, elle figurerait en bonne place dans cet article ajouté par l’Assemblée nationale, dans lequel il est prévu que le dispositif Scellier puisse s’appliquer, dans des conditions particulières, dans les communes où l’on constate un profond déséquilibre entre l’offre et la demande !
Soyons clairs : les logements Scellier sont exactement ceux dont n’ont pas besoin les habitants des communes où sévit le plus durement la crise du logement, et notamment celles où se font jour les tensions inévitables nées de l’application pour le moins complexe de la loi DALO instituant le droit au logement opposable.
Il est particulièrement discutable, sinon condamnable, de favoriser la réalisation de ce type de programmes, qui vient ajouter son pouvoir de nuisance aux autres phénomènes que nous observons, comme la vacance spéculative ou encore la tension continue sur les loyers de relocation.
Nous ne pouvons donc que confirmer notre opposition aux dispositions de l’article 44 bis.
M. le président. La parole est à M. Claude Haut, pour présenter l'amendement n° II-280.
M. Claude Haut. L’article 44 bis prévoit l’application du dispositif d’aide à l’investissement Scellier dans les zones C du territoire, qui ne sont pas caractérisées par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements.
Dès la création du dispositif en loi de finances pour 2009, le problème de l’exclusion des communes situées en zone C a été posé. On reprochait alors principalement aux dispositifs Robien et Borloo leur coût important, dans des zones où les besoins ne se font pas sentir.
Un arrêté du 30 décembre 2008 a donc exclu les communes de la zone C du bénéfice du dispositif Scellier. Néanmoins, les élus locaux, soumis à de fortes pressions de la part des investisseurs à la recherche d’opérations toujours plus rentables, ont amené les députés à atténuer ce dispositif par l’adoption d’un amendement, dans le cadre du plan de relance, visant à permettre au préfet d’accorder des dérogations, dans la zone C, au cas par cas. Nous nous étions alors opposés à cette possibilité, qui avait donc été supprimée.
Aujourd’hui, les députés proposent que la responsabilité revienne non plus au préfet, mais au ministre du logement après avis du maire de la commune d’implantation du logement. Il ne s’agit pas de savoir si le ministre du logement sera soumis à moins de pressions que le préfet pour accorder cette dérogation, il s’agit d’une question de principe : les zones C sont celles qui ne présentent pas de déséquilibre de l’offre de logement.
La conclusion à en tirer est simple : nous n’avons pas à autoriser la spéculation immobilière dans ces territoires, au risque de multiplier, demain, les cas de particuliers qui, floués par des investisseurs peu scrupuleux, ne pourront pas louer leur logement, perdront le bénéfice de l’avantage fiscal et se retrouveront à payer des crédits qu’ils ne pourront pas rembourser.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument !
M. Claude Haut. Du reste, monsieur le ministre, la discussion d’aujourd'hui n’aura peut-être aucun effet quand on se rappelle ce que vous avez annoncé, ici même, lors de la discussion du plan de relance : « Toutefois, pour accompagner le plan de relance, le Gouvernement a décidé de différer le déclassement des 442 communes, qui, selon les critères qui ont été retenus, doivent descendre de la zone B en zone C. Autrement dit, ces communes ne seront pas déclassées pendant la période de relance. »
Puisque certaines mesures du plan de relance sont reconduites en 2010, pourriez-vous nous indiquer si le gel de l’application de la zone C sera maintenu, voire prolongé, l’année prochaine ?
Pour finir, je reprendrai les propos qu’a tenus M. le secrétaire d’État chargé du logement et de l'urbanisme, M. Apparu, vendredi soir dernier, à l’occasion de la discussion des crédits de la mission « Ville et logement » : « Nous avons observé qu’un dispositif d’investissement immobilier, sans zonage, devenait une niche fiscale. En effet, les investissements sont réalisés partout sur le territoire et nous nous retrouvons avec d’innombrables logements vides, qui ne sont pas loués par les propriétaires ! »
Mme Nicole Bricq. Voilà !
M. Claude Haut. Monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe socialiste renouvelle son opposition à toute extension du dispositif Scellier et demande, par cohérence, la suppression de l’article 44 bis.
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cela a été rappelé, le dispositif Scellier est une incitation fiscale forte destinée à améliorer l’offre de logements dans les zones tendues, dans celles où le marché immobilier pose vraiment des problèmes d’équilibrage de l’offre et de la demande.
L’an dernier, cette question du zonage avait fait l’objet, ici même, de débats très nourris. Nous avions alors fait confiance au Gouvernement pour la traiter après qu’il s’était engagé à prendre un arrêté ministériel pour revoir la délimitation des zones concernées. Cet arrêté a bel et bien été publié, et le redéploiement qui a été opéré a eu pour conséquence, si ma mémoire est bonne, de faire entrer dans les secteurs éligibles à l’avantage Scellier un grand nombre de communes, beaucoup plus en tout cas qu’il n’en a fait sortir.
En poussant le raisonnement jusqu’à sa limite, ces amendements identiques de suppression pourraient recueillir notre adhésion. Cela étant, il est préférable de rechercher une approche plus fine : en ce sens, la nouvelle rédaction de l’article 44 bis proposée par la commission au travers de son amendement n° II-162 me semble répondre aux problèmes posés.
Il ne faut certainement pas aller trop loin, car le Gouvernement doit pouvoir, malgré tout, garder une faculté d’appréciation dans ce domaine, à condition que ce ne soit pas au coup par coup, opération par opération, ce qui serait susceptible d’aboutir à quelques abus ou, à tout le moins, à des décisions ne respectant pas complètement le principe d’égalité.
Par conséquent, la commission n’est pas favorable aux amendements nos II-104 et II-280 et préférerait que son propre amendement, qui viendra en discussion dans quelques instants, puisse être adopté.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, les amendements identiques nos II-104 et II-280 me gênent un peu – je sais bien que tel n’est pas votre but… –, car, au fond, je suis assez de votre avis : dans un système, le mieux est probablement de ne prévoir aucune dérogation, sinon tout le monde finit par vouloir la sienne !
Le fait de multiplier les dérogations a des incidences assez perverses, au sens où cela peut aboutir à considérer que le marché immobilier est tendu sur l'ensemble du territoire, auquel cas l’avantage fiscal vaut la peine d’être accordé partout, ce qui aiguise l’appétit des investisseurs. D’un dispositif censé répondre à la demande de logement, on en arrive alors à un pur produit d’investissement. C’est là qu’est le danger, car ceux qui investissent dans le Scellier risquent de se retrouver avec des logements…
Mme Nicole Bricq. Sur les bras !
M. Éric Woerth, ministre. …non loués, vides. Or tel n’est évidemment pas l’objectif recherché.
Il convient, par ailleurs, de tenir compte du débat qui a eu lieu à l’Assemblée nationale. M. le rapporteur général l’a rappelé, le Gouvernement a effectivement pris un arrêté, le 29 avril dernier, révisant les critères et modifiant le zonage.
Pour être précis, 774 communes sont passées de la zone C à la zone B2 ou B1 pour être rendues éligibles au dispositif Scellier. En fonction de la conjoncture, mais également à la demande d’élus locaux, le Gouvernement a décidé de différer le déclassement des 442 communes, qui, selon les critères retenus, auraient dû passer de B en C et, donc, devenir inéligibles. Par rapport à l’ancien zonage, le nombre de communes éligibles a donc augmenté.
L’Assemblée nationale, après une longue discussion, a finalement adopté un amendement prévoyant un certain nombre de dérogations très limitées. La commission des finances du Sénat propose, par l’amendement n° II-162, de rééquilibrer le dispositif, en proposant que l’agrément délivré par le ministre chargé du logement porte sur l’ensemble des logements d’une même commune. Je me rends à ses arguments.
M. Adrien Gouteyron. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron, pour explication de vote sur les amendements identiques nos II-104 et II-280.
M. Adrien Gouteyron. Je tiens à me réjouir de la position prise par la commission, à laquelle M. le ministre vient de souscrire.
Le Gouvernement a en effet décidé de différer le déclassement prévu et accepté de classer tout de suite un nombre relativement important de communes. Il n’en reste pas moins que, dans la quasi-totalité des départements, notamment dans le mien, des communes ne sont toujours pas éligibles au dispositif Scellier alors qu’elles mériteraient d’en bénéficier, surtout dans la conjoncture actuelle.
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. Adrien Gouteyron. Je reconnais cependant que, sur ce sujet, mieux vaut avancer prudemment. À mes yeux, la procédure retenue présente suffisamment de garanties : le ministre chargé du logement ne délivrera son agrément qu’après avoir recueilli l’avis du maire de la commune concernée, lequel n’aura pas intérêt à favoriser des opérations déraisonnables.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. L’année dernière, cette histoire de zonage en zones A, B1, B2 et C avait donné lieu en commission mixte paritaire à de longues discussions avec nos collègues députés. Nous, sénateurs socialistes, nous étions dits convaincus que, zonage ou pas, le dispositif Scellier portait en lui les mêmes défauts que son prédécesseur, le Robien.
D’ailleurs, monsieur le ministre, vous avez parfaitement bien identifié le problème qui ne manquera pas d’advenir : il y aura de plus en plus de pressions pour classer, reclasser et déclasser ; au final, le dispositif répondra non plus à la demande des personnes en attente d’un logement, mais à celle des investisseurs. Cela aboutira aux mêmes effets pervers que ceux que l’on a connus avec le Robien.
Il suffit de se rendre dans les zones touristiques, où il n’y a personne l’hiver, pour constater la multiplication des grands panneaux publicitaires vantant l’intérêt d’investir dans du Scellier. Et pendant ce temps, nous le savons, on ne construit pas assez de logements sociaux dans notre pays, notamment dans les zones tendues, lesquelles ne profiteront donc pas de ce dispositif qui entraîne pourtant une dépense fiscale très importante.
Contrairement à ce que certains veulent faire croire, ce n’est pas en améliorant prétendument des dispositifs en faveur du parc privé que l’on va permettre aux personnes occupant un logement social d’y accéder. Les loyers proposés dans le cadre du Scellier restent en effet encore très onéreux.
Par conséquent, il faudra bien un jour supprimer ce dispositif Scellier, qui, je le répète, a les mêmes effets pervers que le Robien. J’espère que le ministre arrivera à des conclusions identiques dans le rapport qu’il nous remettra.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Les aléas de l’inscription des amendements en séance font que les amendements nos II-234 rectifié bis et II-162 ne sont pas en discussion commune. Or, à mon sens, ils devraient être pris en considération pour avoir une vision d’ensemble de ce qui est proposé et, donc, être en mesure de se décider.
À cet égard, l’amendement no II-234 rectifié bis, défendu fort bien par notre collègue Adrien Gouteyron,…
M. Adrien Gouteyron. Je ne l’ai pas défendu !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … nous semble aller trop loin : l’automaticité qu’il vise à établir aboutirait, en réalité, à détruire le principe du zonage.
La carte que j’ai dans les mains représente les zones ayant fait l’objet de programmes locaux de l’habitat ou de SCOT. Un simple regard suffit pour se rendre compte que cela concerne, au moins pour les SCOT, l’essentiel de la France. La proposition de nos collègues ne s’inscrit donc pas dans l’esprit du dispositif Scellier.
La commission est, certes, favorable à la souplesse, mais dans le cadre de la décision ministérielle d’agrément, qui, à nos yeux, doit porter sur un territoire communal, et non sur une opération.
Tel est le sens de l’amendement n° II-162, que je n’ai pas encore présenté, mais qui me paraît de nature à apporter une solution satisfaisante. Nous préférerions donc que l’amendement n° II-234 rectifié bis puisse être retiré.
M. Charles Revet. Il n’a pas encore été présenté, monsieur le rapporteur général !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Dès lors qu’il y a une vision globale, il est préférable de faire confiance à la sagesse du Gouvernement, pour cela comme pour le reste, d’ailleurs.
Je me permets d’insister, tant il est vrai que l’extension automatique du dispositif à tous les PLH et à tous les SCOT serait excessive. Comme l’un ou l’autre le disait tout à l’heure, les collectivités territoriales n’ont aucun intérêt à voir le marché immobilier local inondé par des opérations lancées par des promoteurs grâce à une espérance d’avantage fiscal.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Par conséquent, je le répète, la commission souhaiterait que l’amendement n° II-234 rectifié bis puisse être retiré.
M. Charles Revet. Il n’a pas encore été défendu !
M. le président. Monsieur le rapporteur général, nous n’en sommes pas encore parvenus à l’examen de l’amendement n° II-234 rectifié bis. Pour l’instant, la discussion porte toujours sur les amendements nos II-104 et II-280.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, mes chers collègues, le dispositif Scellier a véritablement toutes les caractéristiques de ce que nous avons dénoncé ce matin.
Mme Nicole Bricq. C’est une carotte !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il a été voté l’année dernière – y compris par moi, je l’avoue ! –, au mois de décembre,…
M. Denis Badré. À quelques jours de Noël !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. … à l’occasion du collectif, alors qu’il avait été rédigé presque sur un coin de table…
Mme Nicole Bricq. C’est toujours mauvais signe de procéder ainsi !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. … et que nous étions encore sous le choc de la faillite de Lehman Brothers.
Mme Nicole Bricq. Qui datait de septembre !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Le fait de pouvoir obtenir une réduction d’impôt pouvant aller jusqu’à 25 % du prix du logement est franchement excessif. Par conséquent, tout ce qui va dans le sens d’une restriction du Scellier a mon approbation absolue.
M. Bernard Vera. Même sa suppression ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est un dispositif qui a son côté pratique : l’année n, on construit, donc on crée de l’emploi et de l’activité, l’État récupère de la TVA sans avoir à subir d’effet négatif sur le produit de l’impôt sur le revenu. Tout cela vient un peu plus tard.
Monsieur le ministre, il faudra tout de même se défaire un jour d’un tel sparadrap. Ce n’est pas une bonne manière de faire.
Mme Nicole Bricq. Bien sûr !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il n’y a d’ailleurs pas non plus d’effet sur les prix eux-mêmes, car les épargnants voient débouler des armées de commerciaux qui les poussent à se lancer dans le Scellier en leur faisant miroiter un gain de 25 %. Cet argument fausse complètement le marché. Nous avons l’intention de restreindre progressivement ces dispositions.
Je vais relayer certaines inquiétudes et vous poser une question, monsieur le ministre. Jusqu’à présent, il était possible de combiner le dispositif Scellier et le prêt locatif social, le PLS, avec une TVA au taux de 5,5 %. Quel sera le régime appliqué aux programmes qui ont été engagés ? Pourriez-vous apaiser les craintes des opérateurs en leur confirmant la reconduction des dispositions en vigueur en faveur des programmes déjà lancés ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Je réponds à la question de M. le président de la commission : cela s’appliquera non sur le stock, mais sur le flux. Les programmes engagés continueront de bénéficier du régime actuel.
M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron. Je veux clarifier les choses. Je n’étais pas cosignataire de l’amendement n° II-234 rectifié bis et je l’ai d’autant moins défendu qu’il n’a pas encore été présenté !
Si je prends la parole, c’est simplement pour annoncer mon ralliement à la position de la commission, que M. le rapporteur général a exposée avant même de présenter explicitement l’amendement n °II-162. J’adhère au processus qu’il propose et en particulier à la globalisation commune par commune et non pas opération par opération. Cette dernière formule serait porteuse de tous les dangers !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-104 et II-280.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout ça pour ça !
M. le président. L'amendement n° II-234 rectifié bis, présenté par MM. Cornu, César, Dulait, del Picchia, Bécot et Doligé, Mme Panis, MM. Revet, Carle, Pierre, B. Fournier, Martin, Ferrand et Chauveau, Mme G. Gautier et MM. Courtois, J. Blanc, de Legge et Milon, est ainsi libellé :
I.- Alinéa 2, première phrase
après le mot :
acquise
insérer les mots :
au titre des logements situés dans les communes comprises dans le périmètre d’un schéma de cohérence territoriale ou d’un programme local de l’habitat, dont la commune centre est une commune classée dans une zone géographique se caractérisant par un déséquilibre entre l'offre et la demande de logements et
II.- Pour compenser la perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…- La perte de recettes résultant pour l’État de l'alinéa 2 du présent article est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits créés par les articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Il est vrai, monsieur le rapporteur général, que vous avez donné l’avis de la commission avant que cet amendement n’ait été présenté. (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je suis confus, monsieur le sénateur !
M. Charles Revet. Je vais maintenant le présenter, au nom de mes collègues cosignataires.
Afin d’adapter l’offre de logements aux besoins et de protéger les acquéreurs ainsi que les recettes de l’État – dont nous nous soucions particulièrement dans la situation actuelle – le dispositif d'aide à l'investissement locatif, voté dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2009, a prévu de réserver la réduction d’impôt aux logements situés dans les zones du territoire se caractérisant par un déséquilibre entre l'offre et la demande de logements.
L'arrêté de zonage paru le 29 avril 2009 s’est néanmoins borné à reproduire dans ses grandes lignes le zonage antérieur. Puisque le Gouvernement n’est pas parvenu à la définition d’un zonage national satisfaisant, exercice effectivement difficile, un élément de souplesse a été introduit par l’Assemblée nationale à l’article 44 bis. Une procédure locale de dérogation a été introduite en ouvrant le bénéfice de la réduction d’impôt à des logements situés dans la zone dite C dès lors que le programme immobilier a fait l’objet d’un agrément ad hoc par le ministre, après avis du maire ou du président de l’EPCI compétent. Cet agrément permettra de tenir compte de critères plus précis que ne peut le faire un zonage national ; je pense, par exemple, à la taille des logements.
L’amendement ici présenté vise à assouplir les critères du dispositif Scellier en permettant aux communes incluses dans un schéma de cohérence territoriale, SCOT, ou dans un programme local de l’habitat, PLH, d’y avoir accès, dans la mesure où la commune centre du SCOT ou du PLH dont elles font partie est située dans le zonage visé par cette réduction d’impôt. Cela permettrait de rétablir un équilibre face à ce dispositif entre des communes comprises dans un SCOT et dans un PLH.
Vous le voyez, cette proposition, bien cadrée, pose des limites et requiert l’agrément du ministre, après l’avis du maire et du président de l’EPCI. Elle me paraît importante, notamment parce qu’elle prend en compte les inquiétudes exprimées tout à l’heure. C’est dans cet esprit que je la défends.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je suis confus à l’égard des auteurs de l’amendement et encore davantage envers M. Gouteyron : j’ai brûlé les étapes et anticipé un avis réservé sur l’amendement n° II-234 rectifié bis en souhaitant son retrait au bénéfice de l’amendement n° II-162 que j’ai déjà présenté et sur lequel le ministre s’est exprimé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je me suis, en effet, déjà exprimé puisque ces amendements avaient, en quelque sorte, un dénominateur commun. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° II-162, qui permet de la souplesse. En ce sens, il vous donne en partie satisfaction, monsieur le sénateur, puisque j’ai cru comprendre que tel était votre souhait. Dans ces conditions, je vous suggère de retirer l’amendement n° II-234 rectifié bis.
M. le président. Monsieur Revet, l’amendement n° II-234 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Charles Revet. Nous souhaitons, en effet, assouplir le dispositif. Compte tenu des aménagements qui sont prévus et de ceux que pourra prendre directement le Gouvernement, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° II-234 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° II-162, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer les mots :
lorsqu'ils ont fait l'objet d'un agrément
par les mots :
lorsqu'elles ont fait l'objet d'un agrément
Cet amendement a déjà été défendu et le Gouvernement s’est exprimé.
La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.
M. Charles Guené. Je voterai l’amendement présenté par M le rapporteur général, dans la mesure où il me paraît sage.
Je voudrais, à cette occasion, revenir sur l’amendement n° II-234 rectifié bis. La discussion a mis en évidence le caractère un peu trop monolithique du texte, qui ne prend en compte ni la subtilité ni la diversité de nos territoires. On voit bien qu’il y a quelque chose à faire dans ce domaine, tout en s’employant à supprimer les effets d’aubaine constatés.
Nous pourrions nous inspirer du dispositif actuellement appliqué aux opérations touristiques. Il serait bon de faire en sorte que les promoteurs assurent la gestion pendant un certain nombre d’années, ce qui permettrait de limiter le volume des constructions et des opérations à leur potentiel de gestion.
M. le président. Je mets aux voix l'article 44 bis, modifié.
(L'article 44 bis est adopté.)
Article 45
I. – Le dernier alinéa du V de l’article 200 quaterdecies du code général des impôts est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, pour les logements acquis neufs, en l’état futur d’achèvement ou que le contribuable fait construire :
« 1° Lorsque l’acquisition ou la construction porte sur un logement mentionné au troisième alinéa du III, le taux mentionné au premier alinéa du présent V est porté à 40 % ;
« 2° Lorsque l’acquisition ou la construction porte sur un logement autre que celui visé au 1°, les taux mentionnés aux premier et deuxième alinéas sont respectivement ramenés à :
« – 15 % et 30 % pour les logements acquis ou construits en 2010 ;
« – 10 % et 25 % pour les logements acquis ou construits en 2011 ;
« – 5 % et 15 % pour les logements acquis ou construits en 2012. »
II. – À la seconde phrase du 1° du II de l’article 200 quaterdecies du même code, les mots : « premier alinéa du » sont supprimés.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-281, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article 200 quaterdecies du code général des impôts est abrogé.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Il s’agit, ce qui ne vous surprendra pas, de revenir sur le paquet fiscal instauré en juillet 2007 dans le cadre de la loi dite TEPA, qui a autorisé des crédits d’impôt sur le revenu au titre des intérêts d’emprunts pour l’acquisition de la résidence principale. L’article 45 du présent projet de loi de finances propose un verdissement du dispositif, ce dont nous ne saurions nous contenter.
Lorsqu’il fut soumis au Sénat, ce crédit d’impôt fit l’objet de discussions assez mouvementées, y compris du côté de la majorité ! Beaucoup de voix se sont élevées, pressentant que ce crédit d’impôt coûterait très cher aux finances de l’État. Elles n’ont pas été démenties. Il convient d’ajouter que cet avantage fiscal, consenti sans aucune condition de ressources, ne se limite pas à une première accession à la propriété.
Or les bénéficiaires de cet avantage ne sont pas les ménages qui ont du mal à se loger puisque les accédants à la propriété ont déjà un revenu au moins trois fois supérieur au SMIC, voire plus !
Outre qu’elle n’a pas de justification sociale, cette dépense fiscale n’a pas davantage de justification économique ! En effet, il est clair que, en cas de reprise de l’immobilier, ce dispositif aura un effet inflationniste sur les prix.
En régime de croisière, ce crédit d’impôt est évalué à 3,7 milliards d’euros. C’est énorme ! Je ne pense pas que les comptes publics, très détériorés, permettent d’autoriser pour l’avenir de telles largesses. Nous proposons donc de le supprimer.
M. Michel Charasse. Très bien !
M. le président. L'amendement n° II-383, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. Le I de l'article 200 quaterdecies est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent I s'applique aux intérêts des prêts émis avant le 1er juillet 2010. »
B. Après l'article 244 quater U, il est inséré un article 244 quater V ainsi rédigé :
« Art. 244 quater V. - I. - Les établissements de crédit mentionnés à l'article L. 511-1 du code monétaire et financier passibles de l'impôt sur les sociétés, de l'impôt sur le revenu ou d'un impôt équivalent, ayant leur siège dans un État membre de la Communauté européenne, ou dans un autre État partie à l'accord sur l'espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale, peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre d'avances remboursables ne portant pas intérêt consenties à des personnes physiques pour l'acquisition ou la construction d'une résidence principale versées au cours de l'année d'imposition ou de l'exercice. Le montant de l'avance remboursable sans intérêt peut, le cas échéant, financer l'ensemble des travaux rendus nécessaires par la mise aux normes telles que définies au deuxième alinéa ou prévus par le bénéficiaire de cette avance lors de l'acquisition de cette résidence.
« Le logement doit, au jour de l'affectation à l'usage d'habitation principale du bénéficiaire de l'avance, satisfaire à des normes minimales de surface et d'habitabilité définies par décret en Conseil d' État.
« Le montant de l'avance remboursable sans intérêts est fonction du nombre des personnes destinées à occuper à titre principal la résidence des bénéficiaires de l'avance et de la localisation du bien immobilier. Il ne peut excéder 29 250 euros. Par dérogation, ce montant est majoré d'un montant maximum de 20 000 euros pour les opérations portant sur la construction ou l'acquisition de logements neufs ou en l'état futur d'achèvement dont le niveau élevé de performance énergétique globale, justifié par le bénéficiaire de l'avance, est supérieur à celui qu'impose la législation en vigueur.
« Un décret en Conseil d'État définit les caractéristiques financières et les conditions d'attribution de l'avance remboursable sans intérêt.
« II. - Le montant du crédit d'impôt est égal à la somme actualisée des écarts entre les mensualités dues au titre de l'avance remboursable sans intérêts et les mensualités d'un prêt consenti à des conditions normales de taux à la date d'émission de l'offre de l'avance remboursable sans intérêts.
« Les modalités de détermination du taux mentionné au précédent alinéa et de calcul du crédit d'impôt sont fixées par décret en Conseil d'État.
« Le crédit d'impôt résultant de l'application des premier et deuxième alinéas fait naître au profit de l'établissement de crédit une créance, inaliénable et incessible, d'égal montant. Cette créance constitue un produit imposable rattaché à hauteur d'un cinquième au titre de l'exercice au cours duquel l'établissement de crédit a versé des avances remboursables sans intérêt et par fractions égales sur les exercices suivants.
« En cas de fusion, la créance de la société absorbée est transférée à la société absorbante. En cas de scission ou d'apport partiel d'actif, la créance est transmise à la société bénéficiaire des apports à la condition que l'ensemble des prêts à taux zéro y afférents et versés à des personnes physiques par la société scindée ou apporteuse soient transférés à la société bénéficiaire des apports.
« III. - Le bénéfice du crédit d'impôt est subordonné à la conclusion d'une convention entre l'établissement de crédit mentionné au I et l'État, conforme à une convention type approuvée par arrêté conjoint du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé du logement.
« IV. - Une convention conclue entre l'établissement de crédit mentionné au I et l'organisme chargé de gérer le Fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété mentionné à l'article L. 312-1 du code de la construction et de l'habitation définit les modalités de déclaration par l'établissement de crédit des avances remboursables, le contrôle de l'éligibilité des avances remboursables et le suivi des crédits d'impôt.
« V. - L'organisme chargé de gérer le Fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété mentionné au IV est tenu de fournir à l'administration fiscale dans les quatre mois de la clôture de l'exercice de chaque établissement de crédit les informations relatives aux avances remboursables sans intérêt versées par chaque établissement de crédit, le montant total des crédits d'impôt correspondants obtenus ainsi que leur suivi.
« VI. - Lorsque les sociétés de personnes mentionnées aux articles 8 et 238 bis L, ou groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater B et 239 quater C ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés, le crédit d'impôt peut être utilisé par les associés proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements, à condition qu'il s'agisse de redevables de l'impôt sur les sociétés ou de personnes physiques participant à l'exploitation au sens du 1° bis du I de l'article 156.»
C. Après l'article 199 ter S, il est inséré un article 199 ter T ainsi rédigé :
« Art. 199 ter T.- I. - Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater V est imputé à hauteur d'un cinquième de son montant sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle l'établissement de crédit a versé des avances remboursables dans les conditions prévues à cet article et par fractions égales sur l'impôt sur le revenu dû au titre des quatre années suivantes.
« II. - 1. Si, pendant la durée de remboursement de l'avance, et tant que celle-ci n'est pas intégralement remboursée, il apparaît que les conditions mentionnées au I de l'article 244 quater V fixées pour l'octroi de l'avance remboursable n'ont pas été respectées, le crédit d'impôt est reversé par l'établissement de crédit.
« 2. Si, pendant la durée de remboursement de l'avance, et tant que celle-ci n'est pas intégralement remboursée, les conditions relatives à l'affectation du logement et à ses caractéristiques mentionnées au I de l'article 244 quater V fixées pour l'octroi de l'avance remboursable ne sont plus respectées, les fractions de crédit d'impôt restant à imputer ne peuvent plus être utilisées par l'établissement de crédit.
« 3. L'offre de l'avance remboursable sans intérêt émise par l'établissement de crédit peut prévoir de rendre exigible cette avance auprès des bénéficiaires dans les cas mentionnés aux 1 et 2 selon des modalités définies par décret en Conseil d'État.
« III. - En cas de remboursement anticipé de l'avance remboursable mentionnée à l'article 244 quater V intervenant pendant la durée d'imputation du crédit d'impôt, les fractions de crédit d'impôt restant à imputer ne peuvent plus être utilisées par l'établissement de crédit.»
D. Après l'article 220 Z bis, il est inséré un article 220 Z ter ainsi rédigé :
« Art. 220 Z ter.- Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater V est imputé sur l'impôt sur les sociétés dû par l'entreprise dans les conditions prévues à l'article 199 ter T.»
E. Le 1 de l'article 223 O est complété par un z bis ainsi rédigé :
« z bis. Des crédits d'impôt dégagés par chaque société du groupe en application de l'article 244 quater V ; les dispositions de l'article 220 Z ter s'appliquent à la somme de ces crédits d'impôt.»
II. - Les B à E du I s'appliquent aux avances remboursables émises à compter du 1er juillet 2010.
III. - Les dispositions du I et du II ne sont applicables qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
IV. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l’amendement n° II-383 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-281.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission ne partage ni les préventions, ni les hostilités de Mme Bricq, qui poursuit, à l’encontre de l’excellente loi TEPA, un travail de critique et de « détricotage » permanent. Ayant rapporté avec conviction ce texte, j’ai naturellement beaucoup de peine à m’associer à ce comportement qui m’attriste.
Mme Nicole Bricq. Cela viendra !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je voudrais en venir à l’amendement n° II-383, dont je reconnais la complexité.
M. Michel Charasse. Plus compliqué en tout cas que celui de Mme Bricq ! (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je voudrais, en quelques mots, exposer l’objectif du dispositif, que je présente ce jour plus à titre de test que dans l’intention de le faire aboutir immédiatement.
Dans le système de déductibilité des intérêts d’emprunt, on apporte un pouvoir d’achat supplémentaire à l’acquéreur, mais cela n’améliore pas nécessairement les conditions d’examen du dossier de financement par la banque. En effet, la déductibilité est décalée par rapport au montage de l’opération elle-même. Sa finalité est bien de desserrer quelque peu la contrainte financière subie par l’emprunteur une fois qu’il a souscrit l’emprunt dont il doit rembourser les intérêts.
Le dispositif proposé ici est différent puisqu’il transformerait le système de déductibilité, ou de crédit d’impôt pour les personnes non imposables, en une sorte de nouveau prêt à taux zéro, en ce sens qu’il se situerait un peu en amont et que son effet serait intégré à l’examen du dossier de financement.
En outre, selon un mécanisme comptable dont je reconnais le caractère complexe, inusuel en tout cas, le crédit d’impôt, par conséquent la créance constatée dans les écritures de la banque, serait, pour celle-ci, imposable à l’impôt sur les sociétés. Ainsi, les plateaux de la balance prendraient un positionnement plus favorable au regard des exigences des finances publiques.
On peut considérer que ce système créerait une base taxable supplémentaire à l’impôt sur les sociétés, compte tenu de cette assimilation comptable un peu étrange, je le reconnais, entre une créance sur l’État qui deviendrait en quelque sorte un produit d’exploitation de la banque, imposable au titre de l’impôt sur les sociétés.
Voilà, monsieur le ministre, mes chers collègues, les quelques éléments d’explication que je peux vous donner.
La commission des finances a considéré que ce dispositif était susceptible d’apparaître comme un progrès dans la mesure où il permet une meilleure utilisation de l’argent public en même temps qu’une atténuation du coût de cette disposition de l’excellente loi TEPA.
Mme Nicole Bricq. Pas si excellente !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. M. le rapporteur général propose de remplacer le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt par un renforcement du PTZ, avec un avantage important pour l’emprunteur puisque les sommes qu’il pourra ainsi mettre en support du prêt viendront augmenter sa « base éligible » alors que les banques ne tiennent pas compte du crédit d’impôt pour apprécier sa capacité d’emprunt.
Cette mesure très intéressante, d’abord discutée à l’Assemblée nationale et que vous reprenez après l’avoir retravaillée et améliorée, a donc pour objectif de renforcer la capacité d’emprunt de celui qui sollicite un prêt. Pour autant, le mécanisme de la réduction d’impôt est très simple et lisible alors que, vous le dites vous-même, monsieur le rapporteur général, celui du PTZ est beaucoup plus complexe.
C’est une mesure évidemment ambitieuse, qui refonde assez largement les dispositifs fiscaux en faveur de l’accession à la propriété, et il me paraît nécessaire de prendre un peu de temps pour conduire une réflexion et des expertises approfondies, en particulier pour mesurer très précisément son incidence sur les autres dispositifs d’accès à la propriété.
Il convient en outre de déterminer si la meilleure solution est le renforcement du PTZ proposé par le rapporteur général ou s’il convient au contraire de faire en sorte que le crédit d’impôt soit mieux pris en compte par les banques. Il s’agit en effet bien d’une créance qui si elle était prise en compte pourrait se traduire pour les accédants à la propriété par un supplément de solvabilité, donc par un renforcement de leur capacité d’emprunt.
Je tiens à vous dire, monsieur le rapporteur général, que le Gouvernement est prêt à travailler à toutes ces questions qui, grâce à votre initiative, ont été soulevées aujourd'hui et par conséquent à examiner la manière d’assurer une meilleure prise en compte par les banques des dispositifs d’aide et d’incitation à l’investissement destinés aux ménages.
C’est bien là l’objectif politique que vous avez fixé et, sous le bénéfice de ces précisions et de cet engagement, je vous saurais donc gré de bien vouloir retirer votre amendement afin que nous puissions examiner sereinement la façon d’atteindre cet objectif.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Les observations de M. le ministre me touchent directement ! (Sourires.)
Au fond, le prêt à taux zéro n’est qu’une des variantes de niches fiscales. On parle de « prêt », mais c’est en fait une réduction de l’impôt sur les sociétés des banques, puisque ces établissements consentent un avantage en renonçant à l’intérêt.
L’orientation prise dans cet amendement n° II-383 devrait d’ailleurs susciter la sympathie de Nicole Bricq, car c’est une façon de faire évoluer une des dispositions de la loi TEPA dont certains, dont je suis, ont contesté l’opportunité.
Cette évolution, monsieur le rapporteur général, va dans la bonne direction, mais je crois en effet que notre texte est perfectible dans la mesure où il consent aux banques un avantage immédiat : le crédit d’impôt correspond au montant des intérêts que ne percevra pas la banque et qui viendront en déduction de ses bénéfices mais s’étale sur la durée du prêt, alors que, avec la rédaction que nous proposons, la banque prendrait tout de suite un crédit correspondant à ces intérêts et elle en déduirait le cinquième sur cinq ans, d’où un décalage dans la fixation de la base imposable à l’IS qui engendrerait peut-être un avantage excessif au profit des banques.
Je suggère donc, monsieur le rapporteur général, que nous renoncions à cet amendement dans l’immédiat, même si je crains que nous ne soyons pas en mesure de le reprendre dans le cadre du collectif budgétaire, les 17 et 18 décembre…
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement, un peu exploratoire, joue son rôle, et je remercie M. le ministre du commentaire, dans l’ensemble positif, qu’il a bien voulu formuler.
Il me semble que l’on doit pouvoir trouver un dispositif du même ordre que celui que nous avons proposé. Naturellement, le plus tôt serait le mieux, mais il faut sans doute que l’on approfondisse encore certains aspects, notamment de comptabilité et de fiscalité, du côté des banques qui distribueraient ce produit.
N’aurait-on pas, monsieur le ministre, de rendez-vous en vue un peu plus proche que le projet de loi de finances pour 2011, car décaler d’un an serait tout de même gênant ? Je conçois que le collectif budgétaire, qui sera examiné dans quelques jours seulement, ne soit pas une option complètement réaliste, mais, finalement, monsieur le ministre, nous en venons à souhaiter qu’il y ait un collectif budgétaire tous les mois… (Sourires.)
Mme Nicole Bricq. Il y aura bien d’autres occasions !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il faut reconnaître que, de ce point de vue, l’année 2009 a été excellente : elle nous a donné tant d’occasions de rendez-vous… « grâce » à la crise ! (Nouveaux sourires.)
Justement, est-il concevable d’attacher au texte sur le grand emprunt quelques dispositions fiscales diverses ? Ce serait peut-être une bonne opportunité, car cela nous laisserait quelques semaines de travail supplémentaire et il vaudrait mieux nous fixer un tel rendez-vous que de décaler le débat d’une année.
Il s’agit en effet de mettre en place un dispositif motivant pour les emprunteurs, qui associe le système bancaire à la distribution d’un produit mais aussi qui coûte moins cher à l’État, car, il ne faut pas s’y tromper, l’objectif principal est de réduire le coût de la mesure !
Cependant, je ne conteste pas qu’il puisse y avoir lieu d’approfondir le dispositif et de rechercher les modalités les plus adéquates – et, bien entendu, je serai amené à retirer l’amendement –, mais je voudrais en savoir un tout petit plus sur le moment où pourra se situer le dénouement de cette question.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Avant qu’il ne soit retiré, je tiens à dire que l’amendement n° II-383 montre bien que, contrairement à ce que disait tout à l’heure M. le rapporteur général, le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt a beaucoup de défauts. Au moins, comme l’affirmait notre collègue Michel Charasse, l’amendement du groupe socialiste avait le mérite de la simplicité : il supprimait cet avantage fiscal.
La rédaction proposée par le rapporteur général pourrait effectivement avoir pour effet un moindre coût pour l’État, mais j’attire l’attention de mes collègues sur le fait qu’il s’agit pour les banques de déduire les intérêts d’emprunt de l’impôt sur les sociétés qu’elles versent à l’État, et c’est ce qui m’ennuie.
On sait l’abondance, en cette période, des liquidités mises à la disposition des banques et des établissements financiers, notamment de la part de la Banque centrale européenne ! Les banques et établissements financiers non seulement reconstituent leurs marges, mais les accroissent, la demande de crédit étant ce qu’elle est, c'est-à-dire plus faible, parce que l’on n’est certainement pas sorti de la crise économique.
Or cet amendement vise encore à donner aux banques, même s’il est moindre que celui dont elles bénéficient actuellement, un avantage. C’est donc ce qui m’ennuyait déjà à l’origine dans le dispositif qui continue à m’ennuyer, et nous aurons, je l’espère, l’occasion d’en reparler bientôt à l’occasion de l’examen d’un collectif budgétaire puisque l’annonce du montant de l’emprunt « Sarkozy » est imminente.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Mon explication de vote portera sur l’amendement n° II-281 de Mme Bricq, qui vient avant celui du rapporteur général.
Lorsque le conseil des impôts, qui s’appelait toujours ainsi puisque c’était avant que le président Arthuis propose d’en modifier le nom, avait été saisi d’un certain nombre de niches fiscales, il avait écrit que la déduction fiscale des intérêts d’emprunt de l’habitation principale était une des atteintes parmi les plus importantes, dans le dispositif fiscal français, à la progressivité de l’impôt sur le revenu.
Je rappelle en outre que le caractère de l’impôt progressif n’a jamais été remis en cause par un gouvernement, ni à droite, ni à gauche, ce qui veut dire que nous restons, les uns et les autres, attachés au principe de la progressivité de l’impôt sur le revenu.
Cette disposition sur la déduction des emprunts, qui datait, monsieur le président, de la loi de finances pour 1965 – c’était le Président Giscard d’Estaing alors ministre des finances qui l’avait faite voter –, a été abrogée à la suite de ce rapport du conseil des impôts, sauf erreur de ma part, sous le gouvernement de M. Jospin dans les années 1997-2002, pour des raisons tenant justement à son caractère d’atténuation de la progressivité de l’impôt.
Rétablie en 2007, elle entraîne la même atteinte à la progressivité de l’impôt. Je dirai, d’ailleurs, qu’en 1965 le contexte était sans doute très différent de celui dans lequel a été votée, en 2007, la loi TEPA.
Or, je crois que la crise implique, si l’on veut que ses effets soient équitablement partagés et que l’unité nationale lui résiste, que la justice fiscale soit la plus scrupuleuse possible.
J’ajoute que la perte de recettes entraînée par cette mesure avait été chiffrée dans la loi TEPA – je n’ai pas eu, monsieur le rapporteur général, d’autres chiffrages depuis – aux alentours de 3,5 milliards d’euros,…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est bien de cet ordre.
M. Michel Charasse. … ce qui n’est quand même pas rien !
Alors, mes chers collègues, cette affaire est vraiment un peu chère, et même très chère dans les circonstances actuelles et compte tenu de la situation dégradée de nos finances publiques !
Je vais donc voter l’amendement n° II-281 de suppression de cet avantage fiscal véritablement contraire à toutes les mesures d’équité fiscale et à la justice fiscale.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Monsieur le rapporteur général, je le dis franchement, je ne suis pas en mesure de vous donner un calendrier précis.
Il va en effet certainement y avoir un collectif concernant le grand emprunt, mais je doute qu’un dispositif aussi complexe ne soit « mûr » à temps. Nous aurons cependant d’autres rendez-vous financiers dans le courant de l’année 2010 et, quand on aura abouti à quelque chose qui tienne vraiment debout – ce à quoi vous pourrez, bien sûr, monsieur le rapporteur général, contribuer avec vos collègues de l’Assemblée nationale –, le résultat pourra alors probablement être présenté au Parlement, avec le soutien du Gouvernement.
Mme Nicole Bricq. Ce sera pour la prochaine fois !
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° II-383 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-383 est retiré.
Je mets aux voix l'article 45.
(L'article 45 est adopté.)
Article additionnel après l'article 45
M. le président. L’amendement n° II-255 rectifié, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
Après l'article 45, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le quatrième alinéa du II de l'article 1408, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° Les habitants des logements sociaux des zones sensibles bénéficiant du programme national de rénovation urbaine prévu par la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, exonérés auparavant de taxe d'habitation et relogés pour cause de destruction et rénovation de quartiers. »
2° L'article 1414 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« V. - Les contribuables dont la résidence principale était située dans les logements sociaux en zone sensible bénéficiant du programme national de rénovation urbaine prévu par la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine et relogés pour cause de destruction et rénovation de leur quartier bénéficient d'un dégrèvement égal à la différence entre le montant de la nouvelle taxe d'habitation exigée et le montant dont ils s'acquittaient. »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une augmentation des taxes locales.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n’est pas soutenu.
M. Michel Charasse. Très bon amendement, qui pose un vrai problème !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. J’ai envisagé un instant de le reprendre.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Nous avons été confrontés, hier, à un cas similaire : on nous a expliqué que, pour être repris, un amendement devait être présenté. En l’occurrence, cet amendement ne peut être repris, car son auteur ne l’a pas soutenu !
M. le président. Je vous rappelle, madame Bricq, que la commission peut déposer des amendements à tout moment.
Mme Nicole Bricq. Alors, ce n’est pas une reprise d’amendement !
M. le président. C’est inscrit dans le règlement, et vous pouvez compter sur moi pour l’appliquer !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
Article 45 bis
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° À l’article 80 quinquies, les mots : « qui, mentionnées au 8° de l’article 81, sont allouées aux victimes d’accidents du travail et de celles » sont supprimés ;
2° Au 8° de l’article 81, après le mot : « temporaires, », sont insérés les mots : « pour la part qui excède la fraction du gain journalier de base mentionné à l’article L. 323-4 du code de la sécurité sociale, les ».
II. – Le I s’applique aux indemnités versées à compter du 1er janvier 2010.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, sur l’article.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous en arrivons à l’examen d’un article qui a déjà fait couler beaucoup d’encre ; au Sénat, le débat n’est pas nouveau, mais je dois avouer qu’il me choque toujours autant, comme il choque nos concitoyens : il suffit pour s’en convaincre de lire le sondage publié ce matin dans Le Parisien.
Il s’agit, en l’occurrence, de fiscaliser les indemnités journalières perçues par les victimes d’accidents du travail, au nom d’une prétendue équité fiscale. Le gain attendu est de 150 millions d’euros, c’est-à-dire une goutte d’eau.
Cette mesure est d’autant plus choquante que, depuis 2007, notre système fiscal n’a jamais été aussi injuste : le bouclier fiscal remet en cause l’un de ses principes fondamentaux, celui de l’universalité de l’impôt ; il protège les plus riches de nos concitoyens alors que, dans le même temps, les salariés malades ne cessent d’être taxés, au travers notamment des franchises médicales, de la hausse du forfait hospitalier et des déremboursements de médicaments, autant de mesures qui pèsent de plus en plus sur les ménages modestes.
Mais, en fait, le problème n’est pas fiscal, il est juridique. Comme l’a justement écrit notre collègue Gérard Dériot dans son rapport relatif aux accidents du travail et maladies professionnelles, à propos du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, « l’idée de soumettre à l’impôt sur le revenu les indemnités journalières perçues au titre d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle repose sur une analogie que l’on peut qualifier de trompeuse car le régime applicable aux indemnités servies par l’assurance maladie ne peut être de la même nature que celui qui est applicable aux sommes versées par la branche AT-MP ».
En effet, l’assurance maladie indemnise un risque social, sans faute imputable, et a pour but de maintenir un niveau de revenu jusqu’à la guérison et le retour à un emploi rémunéré. La branche AT-MP a été créée, quant à elle, pour rembourser un préjudice dont la responsabilité est présumée imputable à l’employeur. Il est apparemment bon de vous rappeler ce principe, qui est l’un des piliers de notre système de protection sociale depuis la loi de 1898, texte qu’il faudra peut-être moderniser. C’est la garantie d’une indemnisation sans recours à une procédure contentieuse qui justifie son caractère forfaitaire.
Ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que les victimes d’accidents du travail sont bien des victimes ; en conséquence, les indemnités qu’elles perçoivent à ce titre ne doivent pas, même lors d’une interruption temporaire d’activité, relever d’un traitement fiscal différent de celui des autres indemnités obtenues, par exemple, à l’occasion d’un accident de la circulation.
C’est d’ailleurs ce que prévoit explicitement l’article 885 K du code général des impôts, qui dispose : « La valeur de capitalisation des rentes ou indemnités perçues en réparation de dommages corporels liés à un accident ou à une maladie est exclue du patrimoine des personnes bénéficiaires ou, en cas de transmission à titre gratuit par décès, du patrimoine du conjoint survivant ». Il est donc contraire à la nature de ces indemnités versées au titre de la branche AT-MP qu’elles soient soumises à l’impôt sur le revenu, à l’inverse des autres prestations de sécurité sociale.
Je pourrais m’arrêter là, mais puisque vous voulez parler d’équité, mes chers collègues, je souhaite tout de même vous rappeler que les indemnités journalières visées par cet article 45 bis présentent un caractère forfaitaire limité à 60 % du salaire plafonné, et à 80 % à partir du 29e jour, alors que les autres victimes de dommages corporels ont droit à une réparation intégrale.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils ne le savent pas !
M. Jean-Pierre Godefroy. Ces indemnités ne compensent donc que très partiellement la perte de rémunération due à l’accident, et leur défiscalisation contribue à atténuer la perte de revenu ainsi engendrée. C’est ça, l’équité !
À l’inverse, et comme le note très justement M. Marini dans son rapport, « [...] le dispositif adopté par l’Assemblée nationale pourrait entraîner de fortes disparités de traitement entre les assurés. En effet, compte tenu des différences de calcul [...], la part de l’indemnité journalière-accident du travail équivalant à l’indemnité journalière maladie qui sera in fine imposée variera fortement d’un assuré à l’autre. Ainsi, par exemple, selon les données transmises par le ministère du budget, un salarié touchant une rémunération inférieure au plafond de la sécurité sociale sera fiscalisé à hauteur de 83 % du montant de l’indemnité journalière-accident du travail qu’il recevra, contre 28 % s’agissant d’un salarié dont la rémunération est trois fois supérieure à ce plafond ».
Une fois de plus, les salariés dont les revenus sont les plus faibles seront les plus pénalisés. Bien souvent, ces mêmes salariés sont les plus exposés au risque d’accident du travail, que ce soit dans le secteur des travaux publics, de la manutention, etc. Comment peut-on parler d’équité, alors qu’il s’agit en fait d’une double peine pour ces travailleurs ?
Je conclus en vous rappelant que votre projet fait l’unanimité contre lui. Comme l’a reconnu le MEDEF lui-même – que je cite pourtant rarement ! –, si ces indemnités devaient être soumises à l’impôt, les organisations syndicales paraîtraient fondées – et elles le seront ! – à revendiquer une hausse du montant alloué aux salariés, ce qui ne manquerait pas d’engendrer un accroissement des cotisations des employeurs et, partant, – pour reprendre votre credo, monsieur le ministre ! – une perte de compétitivité des entreprises. Voilà pourquoi le MEDEF est contre ce projet, de même que l’ensemble des organisations syndicales, les associations de victimes et le Conseil économique, social et environnemental !
Alors que, sur tous les sujets, le Gouvernement prône le développement du dialogue social et de la concertation avec les partenaires sociaux, en l’occurrence, aucune concertation n’a été engagée avec eux. Vous me permettrez, en tant que président de la mission d’information du Sénat sur le mal-être au travail, de me demander ce qu’il y a de cohérent dans la démarche consistant à annoncer que l’on veut travailler « main dans la main » avec les partenaires sociaux sur la question du mal-être au travail et, dans le même temps, à ne pas les concerter sur la principale conséquence de la souffrance au travail : l’arrêt de travail.
Nous souhaitons donc que l’article 45 bis soit supprimé et que s’ouvre un véritable dialogue avec toutes les organisations professionnelles concernées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Thierry Foucaud. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, sur l’article.
Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le ministre, vous avez déclaré devant l’Assemblée nationale, s’agissant de l’imposition des indemnités journalières des accidentés du travail, ne pas comprendre « pourquoi toutes les indemnités sont fiscalisées et pas celles-ci ».
L’incompréhension que vous manifestez ici ne peut être, de mon point de vue, qu’un symptôme de fatigue, de surmenage ou les effets secondaires de l’action en service commandé. Dans un souci de bonne pratique républicaine, je vais donc à mon tour rappeler les raisons de cette exonération.
À la différence des indemnités versées en cas d’arrêt maladie ou de congé maternité, les indemnités pour accidents du travail ne sont pas fiscalisées, car ce sont non pas des revenus de remplacement du travail, comme vous l’affirmez, mais bien des revenus de réparation. Quand vous subissez un préjudice – et les accidents du travail sont clairement un préjudice ! –, vous obtenez une réparation ; ce qui n’est pas le cas pour la maladie ou la grossesse. Il y a là une différence de nature (M. le ministre fait un signe de dénégation) et, en France, la réparation n’est pas fiscalisée.
Dans son avis, le bureau du Conseil économique, social et environnemental ne s’y est pas trompé : « [...] les victimes d’accidents du travail demeurent des victimes et les indemnités qu’elles perçoivent à ce titre ne doivent pas [...] relever d’un traitement fiscal différent de celui des indemnités obtenues, par exemple, à l’occasion d’un accident de la circulation ». On ne peut être plus clair !
C’est d’ailleurs en cela que votre projet est moralement scandaleux, et j’y insiste : vouloir taxer les indemnités des accidentés du travail revient à nier leur statut de victimes. Et nier ce statut, c’est tenter de remettre en cause la responsabilité a priori de l’entreprise, telle qu’elle est définie dans notre droit depuis la loi de 1898. Ainsi, au détour de ce petit amendement budgétaire, dont on claironne qu’il est l’incarnation même de l’équité,...
Mme Nicole Bricq. Quelle honte !
Mme Raymonde Le Texier. ... ce n’est rien de moins que l’un des principes fondamentaux de notre droit social que vous attaquez.
Comme nous le savons tous, le régime des indemnités pour accident du travail est un régime forfaitaire qui ne couvre que 60 % à 80 % du salaire plafonné. Cela signifie que, dans un contexte difficile, souvent chargé de souffrances physiques et psychologiques, qui s’accompagnent d’une large augmentation des frais médicaux et, quelquefois, des frais d’aménagement de vie, l’on ne perçoit plus qu’une fraction de ses revenus habituels. Dès lors, le Conseil économique, social et environnemental estime qu’il serait « injuste de stigmatiser » les accidentés du travail et rappelle que « la défiscalisation contribue à atténuer la perte de revenu » due à l’accident. Ce n’est donc ni par hasard ni par iniquité que les indemnités d’accidents du travail ne sont pas imposables ! Cette exonération est à la fois une compensation et une partie essentielle de la réparation.
En outre, ce que l’on sait moins, c’est que les accidentés du travail sont également pénalisés en matière de droits à retraite, car les périodes d’arrêt consécutives à un accident du travail sont exclues de l’assiette des cotisations. À la perte de revenus s’ajoute donc la perte de temps cotisé.
Enfin, si tous ces arguments ne suffisaient pas à vous éclairer, monsieur le ministre, je vous en présente un dernier.
Reprenant les chiffres transmis par votre ministère, le rapport de notre collègue Philippe Marini est sans équivoque : « [...] un salarié touchant une rémunération inférieure au plafond de la sécurité sociale sera fiscalisé à hauteur de 83 % du montant de l’indemnité journalière-accident du travail qu’il recevra, contre 28 % s’agissant d’un salarié dont la rémunération est trois fois supérieure à ce plafond ».
Autrement dit, les moyens et bas salaires seront trois fois plus imposés que les hauts revenus ! Cette mesure, à l’opposé de toute équité, est d’une injustice sociale patente ! Ce sont encore les petits revenus et ce qu’il reste des classes moyennes, cette France qui se lève tôt, que vous entendez ponctionner, quand les détenteurs du sacro-saint bouclier fiscal continueront de bénéficier de leur immunité !
Force est de noter qu’en l’an III de la présidence Sarkozy, ce n’est plus seulement la droite décomplexée qui est à l’œuvre, c’est aussi l’injustice sociale qui est célébrée.
Les élus socialistes vous demandent solennellement, monsieur le ministre, de retirer cette mesure du projet de loi de finances. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, sur l’article.
M. Martial Bourquin. À travers cet article, nous avons un aperçu très significatif de vos priorités budgétaires.
Je dois vous le dire, je suis outré par le cynisme dont vous faites preuve.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. N’en faites pas trop ! (M. François Trucy opine.)
M. Martial Bourquin. Il n’y a pas de petites économies, me direz-vous.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il y a des mots vraiment excessifs !
M. Martial Bourquin. Oui, je suis outré, monsieur Marini, quand je pense à toutes celles et ceux qui sont victimes d’accidents du travail et qui apprennent de telles nouvelles !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Alors, c’est vous qui avez le monopole du cœur ; c’est toujours la même histoire ! (Sourires.)
M. Martial Bourquin. Nous parlons de questions très sérieuses ! Je trouve assez scandaleux qu’une telle mesure arrive aujourd’hui au Sénat...
Vous dites qu’il faut rétablir l’égalité entre les salariés. Or un salarié peut-il imaginer, un seul instant, qu’une telle mesure a pour objectif d’instaurer une quelconque égalité ?
Cette mesure ne servira qu’à financer les très coûteuses priorités budgétaires défendues par le candidat à la présidence de la République en 2007.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Pour financer le bouclier fiscal, bien sûr ! Et la loi TEPA, tant qu’on y est...
M. Martial Bourquin. Mais évidemment !
Mme Raymonde Le Texier. Et les niches fiscales !
M. Martial Bourquin. De même que les niches fiscales, en effet !
Monsieur le ministre, nous sommes tout prêts à vous aider à y voir clair et à faire des économies. Nous vous proposons, par exemple, de remettre en cause le bouclier fiscal.
Je suis élu d’un bassin d’activité industrielle où les pertes d’emplois et les licenciements sont très nombreux. Et, pendant ce temps, la défiscalisation des heures supplémentaires – qui est un authentique scandale ! – est toujours à l’œuvre...
S’il y a des économies à trouver, c’est bien en supprimant ces lois iniques, et non en s’en prenant aux salariés victimes d’accidents du travail !
La France qui vous intéresse, ce n’est pas la France qui se lève tôt et qui travaille plus, c’est la France qui se tait et accepte, la France qui se résigne.
Ce qui me préoccupe encore plus, c’est que cet article tend ni plus ni moins à banaliser complètement les accidents du travail, en soumettant les indemnités compensatrices y afférentes au même régime fiscal que les autres revenus. Cette banalisation en elle-même est insupportable.
Les professions les plus fréquemment touchées par les accidents du travail sont souvent très dangereuses, comme celles du bâtiment. Quant aux salariés qui exercent ces métiers, ils sont souvent usés avant l’âge et travaillent dans des conditions déplorables...
M. Martial Bourquin. C’est à eux que l’on s’attaque aujourd’hui ! (M. le ministre soupire.) Adopter cet article reviendrait à s’en prendre à ceux qui travaillent le plus durement, dans des conditions qui sont, je le répète, déplorables.
Nicole Bricq a fait des propositions, tout à l’heure, pour dégager de véritables économies, en s’attaquant au bouclier fiscal et à la loi TEPA. Or personne, à droite, ne l’a suivie, car il faut respecter les engagements du Président de la République.
Cette proposition est une honte ! J’ai eu des mots assez durs, tout à l’heure ; j’ai parlé notamment de cynisme... Cet article 45 bis, en tout état de cause, s’apparente bel et bien à du cynisme ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Pierre Sueur. C’est vrai ! Il dit la vérité !
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, sur l'article.
M. Bernard Vera. Par cet article, vous voulez supprimer la défiscalisation des indemnités journalières versées par la sécurité sociale aux salariés victimes d’un accident de travail.
Cette suppression est à la fois une mesure indécente et très injuste, ainsi qu’un message de mépris envers les victimes du travail. Elle pourrait même se révéler être une erreur politique, si l’on en croit un sondage paru ce matin, selon lequel 65 % de nos concitoyens, dont plus de 70 % des salariés, toutes professions confondues, y sont opposés.
De plus, elle est relayée par une communication basée sur une analyse délibérément tronquée du dispositif. En effet, pour justifier cette réforme, vous n’hésitez pas à parler de « mesure d’équité » envers l’ensemble des salariés, ou encore « d’anomalie fiscale » qu’il faut au plus vite corriger. Et pour étayer votre raisonnement, vous soulignez que les indemnités journalières versées en cas de maladie ou de maternité sont déjà fiscalisées. Ainsi, les accidentés du travail seraient des privilégiés !
Cependant, en raisonnant ainsi, vous feignez d’oublier que les salariés qui se voient attribuer ces indemnités journalières ont été victimes d’un accident du travail et que ces femmes et ces hommes ont subi un dommage corporel ou un préjudice ouvrant droit à réparation.
Les indemnités journalières acquittées en raison d’un accident du travail ne sont pas de simples « revenus de remplacement », comme le sont celles qui sont versées en cas de maladie ou de maternité. Elles revêtent un double caractère : il s’agit d’un revenu de remplacement et de la réparation d’un préjudice subi. Vouloir les aligner sur le régime des autres indemnités journalières, c’est nier cette réparation ; cela revient aussi à vous en prendre aux victimes plutôt qu’aux personnes responsables des conditions de travail.
Faut-il vous rappeler que depuis la mise en place du régime d’indemnisation des « mutilés du travail » en 1898 les victimes d’accident du travail n’ont droit qu’à une réparation forfaitaire ? C’est le résultat d’un compromis : la preuve de l’accident sur le lieu de travail est facilitée, mais l’indemnisation n’est que forfaitaire. Comme ces indemnités ne réparaient que partiellement les préjudices subis, il avait alors été décidé de ne pas les fiscaliser. Voila la raison d’être de cette mesure : compenser une inégalité d’indemnisation !
Si maintenant vous entendez intégrer ces indemnités dans le calcul de l’impôt sur le revenu, il faudrait alors que les entreprises assument la réparation intégrale du préjudice subi.
Mme Raymonde Le Texier. C’est pour ça que le MEDEF est contre !
M. Bernard Vera. De plus, vous ne pouvez pas oublier que derrière un accident du travail, il y a une faute, une négligence ou, en tout cas, une très mauvaise organisation du travail imputable à l’employeur ; c’est une situation très différente de la maladie ou de la maternité. Or selon les principes de la responsabilité civile, celui qui subit un préjudice causé par la faute d’un autre a droit à une réparation intégrale de son dommage.
Votre méthode est bien rodée : présenter partiellement le dispositif pour mieux faire accepter la réforme, sous couvert d’équité, d’égalité ! Mais vous invoquez toujours ces notions à sens unique, pour réduire un droit, dans un perpétuel nivellement par le bas.
Vous avez utilisé le même raisonnement pour remettre en cause la majoration des durées d’assurance dont bénéficient les femmes en matière de retraite : réduire leur droit, pour, prétendument, faire avancer celui des hommes...
Alors que les niches fiscales et sociales représentent encore 120 milliards à 130 milliards d'euros, alors que la mesure proposée ne devrait rapporter que 150 millions d’euros, pourquoi lancer un tel signal de mépris envers les travailleurs et les victimes du travail ? Est-ce vraiment ainsi que vous pensez récompenser la valeur travail ?
En revanche, et toujours au nom de la valeur travail, vous défiscalisez les revenus obtenus suite à l’accomplissement d’heures supplémentaires. Dans ce cas, la défiscalisation vous convient. Vous avez l’égalité sélective !
On l’aura bien compris : selon la politique que vous menez, tant que l’on peut travailler et que l’on est en bonne santé, on est intéressant et encouragé. Mais si un jour on est malade ou accidenté, même si c’est à la suite d’un trop long travail ou de l’exercice de son métier dans des conditions dangereuses pour la santé, on perd alors toute valeur !
Il existait pourtant un consensus à l’égard du régime que vous voulez remettre en cause. Vouloir le modifier est indécent. Décidément, ce gouvernement ose tout ! C’est pourquoi les membres du groupe CRC-SPG voteront contre l’article 45 bis. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° II-105 est présenté par Mme David, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
L'amendement n° II-172 rectifié quater est présenté par MM. Collin, Charasse, Mézard, Plancade, Tropeano, Alfonsi, Vendasi et Chevènement.
L'amendement n° II-261 est présenté par MM. Godefroy, Sueur et Patriat, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Foucaud pour présenter l’amendement n° II-105.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement tend à la suppression de l’article 45 bis qui, comme l’ont rappelé nos collègues, comporte une mesure particulièrement injuste, obscène et inacceptable : la fiscalisation des indemnités journalières perçues en cas d’accident du travail.
D’un côté, vous voulez faire adopter cette mesure et, de l’autre, vous refusez de taxer les parachutes dorés.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ah !
M. Thierry Foucaud. Telle est la réalité, monsieur le rapporteur général !
Le salarié blessé, accidenté était déjà perdant, ce qui est anormal. Aujourd’hui, la droite va plus loin que la droite, si je puis dire, et durcit sa politique ultralibérale en proposant de taxer l’accidenté, alors que ce dernier devrait toucher davantage que son indemnité en guise de réparation.
Selon nous, votre proposition est une véritable provocation. Nous en sommes outrés. Cette mesure rapporterait 150 millions d’euros. Or parallèlement, comme l’a rappelé Bernard Vera, les niches fiscales, dont le nombre dépasse cent soixante, représentent plus de 70 milliards d’euros de recettes qui pourraient être ajoutées au budget.
Bernard Vera a également rappelé le sondage paru aujourd’hui dans un journal. Relevons aussi la position de la Fédération nationale des accidentés du travail et handicapés, la position, unanime, des organisations du travail et la position de certaines personnalités de droite. Ainsi Bernard Accoyer, président de l’Assemblée nationale, considère que cette mesure est « une erreur politique, humaine et sociale ». Je partage ce point de vue.
En 2007, chaque jour, deux salariés ont péri à la suite d’un accident du travail. Depuis 1995, le nombre des maladies professionnelles reconnues a doublé. D’ici à 2020, on dénombrera, selon certaines estimations, le décès de 80 000 à 100 000 salariés exposés à l’amiante et qui auront développé de ce fait un cancer.
Je voudrais maintenant vous citer un propos entendu lors de l’inhumation d’un salarié tué sur son lieu de travail. Le prêtre citait la Jeunesse ouvrière chrétienne : « la vie d’un travailleur vaut mieux que tout l’or du monde ». Bien sûr, je fais mienne cette citation, loin des pensées de certains, et qui se suffit à elle-même.
Je veux également souligner les propos mensongers tenus par M. Copé.
Quoi qu’il en soit, il ne faut pas perdre de vue la vie, tout simplement. Or souvent, la vie n’est plus jamais comme avant lorsqu’une personne a eu la jambe ou les bras broyés lors d’un accident du travail, a dû faire face à un cancer, aux douleurs, aux opérations. Des couples se défont. La mort survient parfois.
Dans notre société, les conditions de travail tuent en toute impunité. Face à cela, vous voulez taxer les accidentés du travail.
La mesure rapportera 150 millions d’euros. La défiscalisation des heures supplémentaires coûte, quant à elle, 4 milliards d’euros. Vous savez que les heures supplémentaires ont un coût pour la sécurité sociale en raison de la survenance d’accidents du travail supplémentaires. (Mme Catherine Procaccia s’impatiente.)
On pourrait croire que votre proposition consiste à taxer de 150 millions d’euros les salariés accidentés pour donner toujours aux mêmes et augmenter, en quelque sorte, leurs profits.
Malgré le scandale que provoque cette disposition, vous semblez vouloir l’adopter par pure idéologie, pour montrer que vous êtes capables de tout oser.
Pour toutes ces raisons, les membres du groupe CRC-SPG s’opposent à cette proposition et demandent la suppression de l’article 45 bis. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
4
Hommage à une personnalité étrangère
M. le président. Mes chers collègues, j’ai le grand plaisir, au nom du Sénat tout entier, de saluer la présence dans notre tribune officielle de M. Mehmet Simsek, ministre des finances de Turquie – accompagné par notre éminent collègue M. Jacques Blanc –, qui participe cet après-midi, salle Clemenceau, à un colloque sur l’état et les perspectives des investissements France-Turquie.
Nous sommes particulièrement sensibles à l’intérêt et à la sympathie qu’il porte à notre institution.
Au nom du Sénat de la République, je lui souhaite la bienvenue dans notre pays. (M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
5
Loi de finances pour 2010
Suite de la discussion d’un projet de loi
Articles non rattachés (suite)
Article 45 bis (suite)
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2010.
Au sein de l’article 45 bis, nous poursuivons l’examen de trois amendements identiques.
L’amendement n° II-105 a été présenté.
La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter l'amendement n° II-172 rectifié quater.
M. Michel Charasse. Cet amendement a le même objet que le précédent : il tend à la suppression de l’article 45 bis.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter l'amendement n° II-261.
M. Jean-Pierre Godefroy. Comme nous venons de vous le dire, monsieur le ministre, nous sommes opposés à la fiscalisation des indemnités journalières perçues par les victimes d’accidents du travail ; c’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 45 bis introduit à l’Assemblée nationale.
Pour justifier cette mesure, vous invoquez le « courage politique » qui vous dicterait, contre l’avis de tous, de fiscaliser les indemnités journalières des victimes du travail. C’est particulièrement choquant à l’heure où les inégalités ne cessent de se creuser dans notre pays.
Aujourd’hui, vous inventez une « équité à géométrie variable », en oubliant sciemment de préciser que les victimes du travail ne sont pas intégralement indemnisées de leurs préjudices, qu’elles ne reçoivent aucune indemnisation au titre des préjudices personnels, comme la douleur, le préjudice moral, le préjudice esthétique. De plus, ces périodes d’arrêt de travail, exclues de l’assiette de cotisations et sans report de salaire au compte, pénalisent les salariés en matière de droits à retraite.
En aucun cas il ne s’agit d’équité ou de courage ; il s’agit tout simplement de choix politiques, qui conduisent à fiscaliser les indemnités journalières plutôt que les heures supplémentaires, à taxer les victimes du travail plutôt que les banques, à conserver un bouclier fiscal critiqué, y compris dans la majorité, et à adopter une succession de mesures visant à diminuer la réparation des victimes du travail, telles que celle qui est envisagée à propos du calcul du montant de l’allocation de cessation d’activité anticipée des travailleurs de l’amiante.
Mes chers collègues, vous avez tous entendu parler de l’accident qui est survenu le 23 novembre dernier dans une usine chimique classée « Seveso » située à Andrézieux-Bouthéon, dans le département de la Loire, et qui a fait quatre blessés graves, dont une personne brûlée au visage.
Ces quatre salariés vont bénéficier d’indemnités journalières mais n’auront aucune autre indemnisation de leurs préjudices. En effet, le salarié brûlé au visage ne recevra, par exemple, aucune indemnisation au titre de la douleur qu’il endure ou de son préjudice esthétique, puisque même la rente d’accident du travail ne les indemnise pas. Il lui appartiendra donc d’aller devant les tribunaux pour faire éventuellement reconnaître, et au bout de plusieurs années de procédure, la faute inexcusable de son employeur.
En revanche, mes chers collègues, si dans quelques instants l’article 45 bis est adopté par le Sénat, ces quatre salariés blessés seront bientôt imposés sur leurs indemnités journalières. C’est scandaleux !
Contrairement à ce que vous affirmez, la rédaction actuelle de l’article 45 bis ne limite pas la fiscalisation aux seuls arrêts de moins de vingt-huit jours et donc aux seules victimes d’accidents dits « bénins ». Ce sont bien toutes les victimes, quelle que soit la gravité de leur accident et de leurs séquelles ou la durée de leur arrêt, qui sont visées.
De toute façon, on ne peut se limiter à parler des accidents du travail en les comparant aux entorses que l’on peut se faire en jardinant, ni soutenir qu’il est équitable de traiter de la même manière quelqu’un atteint d’une grippe saisonnière et quelqu’un qui subit des brûlures au visage en travaillant. Alors que les conditions de travail se dégradent – plusieurs enquêtes récentes l’ont montré –, la seule mesure concrète que vous proposez est la fiscalisation des indemnités journalières.
C’est désastreux et c’est d’autant plus choquant qu’aucune mesure concrète n’est, par ailleurs, prise ou proposée par le Gouvernement pour améliorer la réparation des victimes du travail. De plus, cette sanction financière sera sans conséquence sur une évolution quelconque du volume ou de la gravité des accidents de travail dans notre pays. C’est pourquoi nous vous invitons à adopter l’amendement n° II-261.
Mes chers collègues, un accident du travail est toujours un drame pour une famille.
M. Sarkozy avait évoqué, naguère, « la France qui se lève tôt ». Mais un salarié qui, le soir, rentre chez lui blessé, c’est un drame pour toute une famille, notamment sur le plan économique, car cela signifie des ressources en moins et des perspectives de dépenses qui ne pourront être assumées. Et vous voudriez en plus fiscaliser ces indemnités ?
La loi de 1898 a prévu une indemnisation forfaitaire. De grâce, ne revenons pas sur ce point. Nous pouvons discuter de nouveau des modalités de l’indemnisation, mais pas maintenant, pas à la va-vite, pas à la sauvette !
Monsieur le ministre, vous commettez une grave erreur, me semble-t-il. Il faut prendre les sondages pour ce qu’ils sont, certes, mais je lisais ce matin dans Le Parisien que 65 % des Franciliens étaient opposés à cette mesure. Même dans votre camp, une majorité y est hostile !
Vous feriez donc bien, ici, au Sénat, de revenir sur cette disposition, qui, me semble-t-il, a été adoptée trop vite. Il y a eu beaucoup d’emballement autour de cette question, et ce sont malheureusement les victimes des accidents du travail qui en feront les frais. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Comme toujours, j’ai entendu avec intérêt les différents orateurs s’exprimer, d'abord sur l’article, puis sur ces amendements de suppression.
Bien sûr, il faut toujours faire la part de la rhétorique, qui est indispensable dans une assemblée parlementaire. Toutefois, certaines expressions sont de trop, me semble-t-il, en particulier lorsqu’on nous parle d’un débat mené « à la sauvette ».
En effet, je veux le rappeler, la mesure dont il s'agit a déjà été votée trois fois par la commission des finances du Sénat et au moins une fois par la Haute Assemblée dans son ensemble ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bricq. Nous nous y étions opposés !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, le Sénat a déjà adopté cette mesure ! Vous trouverez l’historique complet de ce dossier dans le rapport de la commission, aux pages 108 et suivantes.
N’évoquez donc pas un débat mené « à la sauvette » : ce problème est soulevé depuis un certain nombre d’années déjà, en particulier sur l’initiative de notre excellent et courageux collègue Jean-Jacques Jégou, et nous nous sommes efforcés de le traiter.
M. Bernard Vera. Hélas !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances n’éprouve donc aucune sorte de difficulté à être solidaire tant du Gouvernement que de l’Assemblée nationale : nous nous sommes livrés à une analyse de fond, qui est rappelée dans le rapport de la commission.
Aux termes de l’article L. 431-1 du code de la sécurité sociale, les indemnités dont il s'agit sont rangées en deux catégories : d'une part, des prestations en nature ; d'autre part, des indemnités financières, qui se subdivisent elles-mêmes en deux fractions : des indemnités journalières et une allocation en capital, le cas échéant une rente.
En ce qui concerne leur régime fiscal et social, – je réponds ici en particulier à Mme Raymonde Le Texier – ces indemnités sont assujetties à la CSG et à la CRDS. Par ailleurs, elles font jusqu’à présent l’objet d’un traitement spécifique par rapport aux autres indemnités journalières et au régime de la fonction publique.
Mes chers collègues du groupe socialiste, vous qui êtes si enclins à défendre les personnels de la fonction publique, il est tout de même surprenant que, à ma connaissance, vous ne vous soyez pas élevés contre l’assujettissement à l’impôt sur le revenu de la même prestation quand elle est allouée aux personnels de la fonction publique,… (Sourires sur les travées de l’UMP.)
M. Gérard Longuet. Il fallait le rappeler !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … et je parle naturellement ici sous le contrôle du ministre qui est en charge de ce dossier.
Votre indignation me semble donc en partie de circonstance.
M. Jean-Pierre Godefroy. Certainement pas !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. D'ailleurs, la commission propose, à la suite de l’Assemblée nationale, de clarifier encore davantage ce dispositif, au travers d’un amendement que je soutiendrai dans quelques instants.
En effet, nous considérons que dans ce domaine, comme en matière de maladie, il faut fiscaliser le revenu de remplacement, et lui seul. Nous estimons – je m’efforcerai de vous en administrer la preuve, mes chers collègues – qu’en fixant un taux d’imposition de 50 %, nous respecterions pleinement ce principe de fiscalisation du seul revenu de remplacement. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)
J’ai entendu les propos fort émouvants tenus en particulier par Thierry Foucaud. Toutefois, je voudrais le rappeler, il est question ici de l’impôt sur le revenu, qui est progressif ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Bricq et M. Martial Bourquin. De moins en moins !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Pardonnez-moi, mes chers collègues, mais l’échelle de l’impôt sur le revenu est progressive !
M. Jean-Pierre Godefroy. Pas la CSG et la CRDS !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La CSG et la CRDS sont déjà acquittées par les titulaires de ces indemnités dans le droit existant !
M. Jean-Pierre Godefroy. Et le bouclier fiscal ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, vous vous efforcez de nous tirer toutes les larmes du corps en évoquant les salariés les plus modestes et les personnes les plus précaires, mais ceux-ci, naturellement, ne sont pas imposés à l’impôt sur le revenu…
Mme Raymonde Le Texier. Bien sûr que si ! Vous dites n’importe quoi !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … ou ne le sont que dans les tranches les plus réduites du barème !
Par conséquent, nous devons soigneusement distinguer le revenu de remplacement et l’indemnité réparatrice et appliquer dans ce domaine les principes qui ont déjà cours ailleurs et qui sont conformes à notre droit fiscal.
C’est pour cette raison que nous évoquons une « mesure d’équité », et cette expression me semble parfaitement fondée. La commission est donc, bien entendu, tout à fait défavorable à ces amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État. Ces amendements de suppression ont été présentés, me semble-t-il, de manière très caricaturale.
M. Thierry Foucaud. Allez-donc sur les lieux de travail !
M. Éric Woerth, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, il est toujours très difficile de débattre d’un sujet que vous abordez d’une manière totalement erronée. Il est très dur d’avoir prise sur vos propos, car nous ne discutons pas de la même mesure ! Vous réclamez la suppression d’un dispositif que nous n’avons pas l’intention de mettre en œuvre !
Nous ne voulons pas fiscaliser la compensation du préjudice subi, qui restera exonérée. Nous souhaitons soumettre à l’impôt le revenu de substitution au travail, comme c’est déjà le cas pour les arrêts liés aux congés maternité ou aux maladies dont on ne considère pas qu’elles sont causées par des accidents du travail. Si vous attrapez une grippe au bureau, ce qui revient un peu au même qu’un accident du travail, il y a fiscalisation.
Le complément qui est en général versé par l’entreprise est fiscalisé, même dans le cas d’un accident du travail. De même, les indemnités des fonctionnaires victimes d’un arrêt de travail, comme l’a rappelé M. le rapporteur général de la commission des finances, sont déjà soumises à l’impôt depuis des années, et vous n’avez jamais trouvé cette disposition injuste, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition !
J’ai donc un peu de mal à vous suivre. Il est facile de citer des cas qui, naturellement émeuvent tout le monde, mais qui sont hors sujet. L’objet de la réforme, c’est de distinguer, d'une part, les revenus qui se substituent au travail et il n’y a aucune raison de les taxer moins que ce dernier, et, d'autre part, les indemnités qui servent à compenser un préjudice, et qui ne seront pas fiscalisées. Telle est la réalité de la réforme que nous vous proposons.
C’est donc un véritable torrent de démagogie qui coule sur ce sujet. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Mme Nicole Bricq s’esclaffe.)
M. Jean-Pierre Godefroy. Allez dire cela aux victimes d’accidents du travail !
M. Éric Woerth, ministre. Depuis le début, on essaie de faire passer ceux pour qui une telle idée est intéressante, même si elle n’est pas facile à mettre en œuvre, pour d’affreux méchants dépourvus de générosité. Et on leur oppose une gauche qui susciterait un débat fécond où le cœur aurait ses raisons, même si je ne vois vraiment pas lesquelles !
C’est là une manière tout à fait honteuse de présenter la question, me semble-t-il (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Mme Nicole Bricq s’esclaffe de nouveau), parce que ce n’est pas ainsi que celle-ci se présente. Bien sûr, il est toujours difficile de prendre des mesures qui ne vont pas dans le sens de l’opinion publique. En tout cas, c’est bien plus dur que de surfer sur une vague de démagogie !
Comme l’a souligné Philippe Marini, la Haute Assemblée a examiné et voté ce dispositif à plusieurs reprises, en commission comme en séance publique, puisque Jean-Jacques Jégou a suscité, ici même, il n’y a pas si longtemps, un débat sur cette question, qui a été posée très clairement. Vous avez donc, au fond, déjà accepté ce dispositif.
En ce qui concerne l’impôt sur le revenu, celui-ci est bien sûr progressif, mais il ne l’est pas pour les gens qui ne le paient pas ! Plus de 50 % des contribuables ne sont pas imposables à cet impôt, ce qui signifie qu’une proportion équivalente, peut-être même supérieure, des salariés qui seront victimes d’accidents du travail n’acquitteront pas cette imposition sur les indemnités journalières qu’ils percevront.
Et comme ce sont les personnes qui gagnent le plus qui paient l’impôt sur le revenu, ce seront elles qui seront taxées. En la matière, nous visons bien l’équité.
Je suis particulièrement choqué, car ce n’est pas le premier débat auquel je participe sur ce sujet, par la volonté de manipulation de l’opinion publique dont fait preuve la gauche, une fois encore. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Robert del Picchia applaudit.)
Mme Nicole Bricq. C’est excessif !
M. Christian Cambon. Démagos !
M. Éric Woerth, ministre. Je le dis comme je le pense : il est trop simple d’opposer ceux qui ont du cœur à ceux qui en seraient dépourvus ! Pour notre part, nous nous efforçons d’introduire de l’équité dans les différents impôts.
Aujourd'hui, il n’est ni équitable ni normal que les revenus de substitution au travail ne soient pas soumis à l’impôt.
Je rappelle d'ailleurs que cette proposition est d’origine parlementaire : c’est l’Assemblée nationale qui a adopté ce dispositif imposant environ 50 % des indemnités versées.
Je le répète, il s'agit de distinguer, d'une part, le supplément de revenu qui est versé à la personne cessant le travail, par comparaison avec l’indemnité offerte en cas d’arrêt maladie, et qui pourrait donc être assimilé à la réparation d’un préjudice, et, d'autre part, la partie « socle » de cette allocation, qui doit être considérée comme un revenu de substitution au travail.
M. le rapporteur général de la commission des finances défendra dans quelques instants un amendement tendant à rendre opérationnel ce dispositif, et nous nous y rallierons.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements de suppression.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, toute la communication du monde ne pourra dissimuler la réalité !
À l’heure où l’on veut nous faire croire que la seule question d’actualité est celle de l’identité nationale, nous constatons l’angoisse que créent le chômage, le mal-vivre, la détresse et la précarité chez des millions d’hommes et de femmes de notre pays.
Dans ce contexte, un seul mot me vient à l’esprit, que je répète avec force : injustice ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Christian Cambon. Vous faites de la démagogie !
M. Jean-Pierre Sueur. Non, ce n’est pas de la démagogie, mon cher collègue !
M. Christian Cambon. Mais si !
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, vous nous accusez de manipulation. Pardonnez-moi, mais lorsque vous décidez de fiscaliser les indemnités liées aux accidents du travail, alors que vous offrez des cadeaux fiscaux en grand nombre, tout le monde le sait, à ceux de nos concitoyens qui se portent le mieux, vous suscitez un profond sentiment d’injustice.
Tout le monde le comprend ! Dans un journal, ce matin, je lisais que 65 % des habitants de l’Île-de-France désapprouvent cette mesure, mais dans toutes les régions la situation est la même, tout le monde nous l’affirme ! Nous manipulerions l’opinion parce que nous disons cette vérité ? Mais où sommes-nous ?
Mes chers collègues, je vais vous lire une lettre que m’a adressée le président d’une association de handicapés, qui habite dans les Bouches-du-Rhône, près d’Aix-en-Provence.
« En 1994, alors jeune directeur d’exploitation au sein d’un grand groupe de presse, ma vie bascula en une fraction de seconde. Je venais d’être percuté et écrasé par un semi-remorque, sur mon trajet de travail...
« […] Comme si une injustice de la vie ne suffisait pas, [on veut] infliger une injustice supplémentaire aux personnes handicapées et accidentées de la vie déjà lourdement "frappées" par le handicap.
« […] Une victime d’accident du travail perd déjà une partie de sa rémunération liée à l’activité, ainsi que les primes et heures supplémentaires. […] En aucun cas, ces indemnités [ne] peuvent être "amalgamées" à un salaire, [c’est] une indemnité réparatrice d’un préjudice subi.
« […] Le ministre – vous-même, monsieur Woerth – ose parler de "revenu de remplacement" ! Que propose le ministre en "remplacement" d’un handicap à vie [...] ? »
C’est peut-être de la manipulation, monsieur le ministre, mais celui qui s’exprime a vécu cela dans sa chair !
C’est peut-être de la démagogie, mes chers collègues, mais c’est la réalité !
Il y a bien d’autres mesures à prendre, au lieu de fiscaliser ce que perçoivent les accidentés du travail.
Je poursuis la lecture de cette lettre : « [En] 2005, M. Copé, alors ministre délégué au budget [...] déclarait : "Personne ne comprendrait que l’on engage la fiscalisation des victimes d’accidents du travail". »
Le président de cette association conclut ainsi : « Devant le nombre de protestations de grande ampleur des Français, comme de parlementaires aussi bien de droite, comme de gauche, de syndicats et d’associations [...] concernant l’amendement de ce projet fiscal irrespectueux à l’égard de la dignité humaine des personnes à mobilité réduite, je sollicite chaque homme et femme parlementaire du Sénat [et leur demande de] se désolidariser de l’amendement » voté à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Bernard Vera applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Je ne peux laisser de tels propos sans réponse. C’est mensonger, honteux et scandaleux ! On peut faire pleurer n’importe qui sur n’importe quoi.
M. Christian Cambon. Voilà !
M. Éric Woerth, ministre. Le cas que vous citez ne sera pas fiscalisé : il s’agit d’une rente. Cela n’a rien à voir, c’est de la manipulation !
M. Christian Cambon. C’est de la désinformation !
M. Jean-Pierre Sueur. Vous avez mal entendu ! Il parle de tous les membres de son association !
M. Éric Woerth, ministre. C’est inacceptable ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Raymonde Le Texier. Vous avez du mal à assumer !
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Puisqu’il est question de démagogie et de mensonge, je ferai remarquer que le sondage organisé sur la mesure que prévoit l'amendement de Jean-François Copé – car le Gouvernement n’a même pas eu le courage d’aller au bout de sa démarche en proposant lui-même cette disposition – révèle que cette proposition ne convainc que les sympathisants du front national – 50 % d’avis favorables – et n’est parvenue à recueillir l’adhésion que de 47,3 % des sympathisants de l’UMP. Tout est dit ! (Mme Raymonde Le Texier s’exclame.) Cela s’inscrit effectivement dans la continuité du débat sur l’identité nationale.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L’identité nationale, c’est d’abord payer l’impôt !
M. Thierry Foucaud. Alors que le Gouvernement a lui-même évalué à 10 % l’augmentation nécessaire des contributions des employeurs à la branche AT-MP pour maintenir le pouvoir d'achat des victimes d’accidents du travail – il n’est qu’à lire l’annexe budgétaire de la loi de finances pour 2008 – et que le Président de la République a fait du maintien du pouvoir d'achat un axe fort de sa politique, 63 % des salariés se déclarent aujourd'hui favorables à ce que les employeurs soient mis à contribution afin d’augmenter les indemnités journalières pour compenser la baisse de pouvoir d'achat induite par la fiscalisation de ces indemnités. Il est pourtant à craindre que les victimes d’accidents du travail n’y perdent, puisque les recettes que permettra de dégager cette mesure sont estimées à 150 millions d'euros.
Dans ce débat, les organisations syndicales se sont mobilisées. La Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés, la FNATH, a rappelé que, contrairement aux assurances du président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, qui jurait – on jure souvent à droite, en traitant les autres de démagogues ! – ne vouloir fiscaliser que les arrêts de travail de moins de vingt-huit jours, c'est-à-dire ceux qui concernent les victimes d’accidents bénins, l'amendement adopté par la commission des finances de l'Assemblée nationale visait sans aucune distinction toutes les victimes d’accidents du travail, quelles que soient la gravité des séquelles et la durée de l’arrêt de travail provoqués par cet accident.
Ainsi, un ouvrier de vingt ans écrasé par un ascenseur ou défiguré par une explosion – on va me taxer de faire du misérabilisme, alors que c’est la réalité quotidienne puisque l’on dénombre en France plus de 650 morts par accident du travail chaque année –, que ce soit ou non dans une usine de type Seveso, et dont l’arrêt de travail pourra se prolonger des années durant, verra ses indemnités journalières imposées. Voilà la réalité ! Mais je me demande si M. le ministre sait que de telles situations existent.
Je conclurai en revenant sur le mode opératoire du Gouvernement. Selon une technique bien rodée, le Gouvernement commence par ouvrir une brèche, en l’occurrence il a fiscalisé les indemnités journalières versées en cas d’arrêt maladie. La machine ensuite s’autoalimente. Quelques années après, il s’étonne de cette situation injuste : les indemnités journalières perçues en cas de maladie sont imposées alors que celles qui sont versées à la suite d’un accident du travail ne le sont pas ? Le Gouvernement a alors beau jeu de déclarer qu’il faut fiscaliser toutes les indemnités, au nom de l’équité. Et le tour est joué ! Voilà comment le Gouvernement nivelle par le bas ! Et l’on ose nous parler de démagogie ?
Monsieur le ministre, une fois de plus, j’ai honte et je tiens à vous dire que c’est révoltant ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. – Mme Raymonde Le Texier et M. Martial Bourquin applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Comme l’ont rappelé à juste titre le ministre et le rapporteur général, il faut raison garder. Je le dis avec force et sérénité, comme l’aurait fait mon collègue et ami Jean-Jacques Jégou, s’il avait été présent. Il aurait d’ailleurs certainement trouvé les arguments pour replacer le débat et éviter qu’il ne dérive ainsi. Nous n’avons rien à y gagner, et les victimes d’accidents du travail encore moins.
Dès lors qu’il s’agit de justice fiscale – et c’est bien de cela qu’il est question ici –, Jean-Jacques Jégou est toujours en première ligne, prenant même le risque de l’impopularité. C’est avec le même allant et le même enthousiasme qu’il monte au front quand il faut témoigner de la compassion ou porter secours et assistance aux victimes, qu’elles soient victimes de la vie ou victimes d’accidents du travail.
Et je précise à mes collègues siégeant sur les travées de gauche que Jean-Jacques Jégou n’est pas spontanément disposé à voler au secours de toutes les propositions avancées par le Président de la République. Il n’est qu’à se rappeler, par exemple, les débats sur la loi TEPA.
Je veux me faire aujourd'hui l’interprète de mon collègue. Il est vrai qu’il est largement à l’origine de ce débat, qu’il porte depuis des années. Mais il aurait souhaité qu’il se développât dans la clarté, loin de toute guerre de religion, de toute accusation d’obscénité ou de scandale, que sais-je encore !
Ce débat d’importance ne doit pas être caricaturé, et je reprends à dessein ce terme que vous avez employé tout à l’heure, monsieur le ministre. Sur cette matière, nous ne devons pas légiférer en fonction des sondages ; Jean-Pierre Godefroy l’a reconnu incidemment, en rappelant qu’il fallait aussi faire la part de ce qu’ils pouvaient signifier.
M. Thierry Foucaud. Les sondages, ça coûte cher !
M. Denis Badré. Si l’on demande aux Français s’il faut faire une mauvaise manière aux victimes d’accidents du travail, 99 % d’entre eux répondront « non » ; mais si on leur demande s’ils veulent plus de justice fiscale, ils seront tout aussi nombreux à dire « oui » !
La question est complexe. Il convient donc de faire le départ entre ce qui relève de la fiscalité, ce qui relève d’un traitement social ou ce qui, le cas échéant, relève du pénal.
Monsieur Foucaud, vous avez évoqué les accidents de type Seveso. Si la faute incombe à l’employeur, la voie pénale existe ! Il n’est pas question de modifier le statut fiscal de l’employeur pour autant. De la même façon, si la perte de cotisations sociales entraîne une injustice manifeste, la voie sociale est là aussi. À utiliser la voie fiscale à tout bout de champ, nous prenons le risque d’une législation qui n’aura plus ni queue ni tête et qui ira à l’encontre de toute justice. (Mme Lucienne Malovry et M. Christian Cambon applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour explication de vote.
Mme Raymonde Le Texier. Au nom du groupe socialiste, je rappellerai une dernière fois les principaux arguments de notre opposition, dont chacun pourrait justifier à lui seul cet amendement de suppression de l’article 45 bis.
Tout d’abord, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, je persiste et je signe : vous entendez taxer les indemnités des accidents du travail comme tous les revenus de remplacement, alors qu’il s’agit non pas d’un revenu de remplacement mais d’un revenu de réparation. Je ne reviens pas plus longuement sur ce point.
Ensuite, avec une prévision de recettes de 150 millions d’euros, ce nouvel impôt n’a peu ou pas d’intérêt budgétaire.
Lorsqu’il s’agit d’argent public, chaque euro devrait compter ; je parle au conditionnel, car, depuis un certain temps, on n’a guère l’impression que c’est le cas. Il n’en reste pas moins qu’aller chercher 150 millions d'euros sur le dos des victimes d’accidents du travail quand plus de 73 milliards d'euros partent dans les niches fiscales,...
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’en est une !
Mme Raymonde Le Texier. ... c’est non seulement dérisoire, mais surtout indécent ! À quand une refonte de la fiscalité à la hauteur des enjeux et des déficits abyssaux que vous avez creusés à force de cadeaux fiscaux aux plus riches ?
Enfin, comme le souligne le rapport de la commission des finances, cette proposition sera profondément injuste, car elle taxera trois fois plus les petits et moyens salaires que les hauts revenus.
En ce sens, cet article n’est qu’une nouvelle étape dans votre politique d’inégalité fiscale qui veut que, chaque année, que vous protestiez ou non, 70 % des déductions d’impôts profitent aux 20 % des foyers les plus aisés.
De plus, contrairement à ce que prévoit la loi sur le dialogue social – feu la loi, devrais-je dire –, aucune concertation, aucune négociation n’a eu lieu avec les partenaires sociaux avant que soit imposée cette mesure qui a pourtant de lourdes incidences sur notre droit social. De même, vous n’avez pas voulu prendre le temps de réaliser une étude d’impact préalable, comme l’exige pourtant la révision constitutionnelle de 2008. Afin de pouvoir ignorer ces deux contraintes, d’éviter de vous soumettre aux règles de fonctionnement démocratique de notre pays, vous avez choisi de faire passer cette mesure par le biais d’un simple amendement.
Résultat, votre mesure rencontre l’opposition de tous les syndicats, y compris le MEDEF,...
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ah bon, vous êtes à la remorque du MEDEF ? C’est curieux !
Mme Raymonde Le Texier. ... de toutes les associations spécialisées, de nombre de partis politiques, de certains élus de la majorité, ainsi que du Conseil économique, social et environnemental, qui a été on ne peut plus explicite en appelant purement et simplement à l’« abandon » de cette mesure.
Pourquoi une telle réaction ? Parce qu’il est clair pour tous, même pour ceux qui prétendent et continueront de prétendre le contraire, que votre mesure est tout sauf équitable.
Dans ce contexte, comment expliquer cet acharnement à vouloir imposer une mesure si critiquable et si impopulaire ? Comment ne pas s’interroger sur les véritables motifs qui sont ici à l’œuvre ?
Nous voyons bien que cette mesure, qui va prétendument de soi et qui est présentée comme évidente, est une première étape dans la remise en cause de la responsabilité a priori de l’entreprise dans les accidents du travail. Ce travail de sape commence par une réforme fiscale faussement anodine. Même si vous vous drapez dans un impétueux souci d’équité, nous savons bien que vous continuez, lentement mais sûrement, de déconstruire notre droit du travail en général et la protection des salariés en particulier, au nom de la flexibilité et d’un libéralisme sans garde-fou. Nous savons bien tout cela, qui est hélas ! habituel.
La seule petite nouveauté, c’est l’acharnement de M. Copé à défendre cette mesure, lui qui, en 2005, alors qu’il était ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, affirmait que « personne ne comprendrait que l’on engage la fiscalisation des victimes d’accidents du travail ». En réalité, après les turbulences qu’a connues votre majorité récemment, il a eu besoin d’une démonstration d’autorité en direction du président Sarkozy pour montrer qu’il tenait ses troupes. Il est allé pour cela jusqu’à soutenir mordicus – littéralement, en mordant avec les dents et sans rien lâcher – une mesure qu’il sait inepte, injuste, inacceptable. Notre démocratie en est là !
Mes chers collègues, nous savons que vous êtes nombreux dans les rangs de la majorité à rejeter cette mesure qui accroît davantage encore une fiscalité de classe. Nous vous appelons donc à voter cet amendement de suppression. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Vous nous dites que c’est horrible, que nous allons taxer les plus faibles. Or, les plus faibles ne payant pas l’impôt sur le revenu, – je tiens à le rappeler encore une fois – ils ne sont donc pas concernés.
Par ailleurs, avec votre amendement, c’est-à-dire si cette disposition était supprimée, vous permettez, par exemple, à un trader arrêté trois semaines pour la fracture d’un orteil survenue au cours d’un accident de trajet au volant de sa Porsche d’échapper à l’assujettissement de ses indemnités journalières à l’impôt sur le revenu !
Mme Nicole Bricq. On va vous en parler, des traders !
M. Éric Woerth, ministre. Telle serait bien la conséquence de votre amendement s’il était adopté ! (Exclamations indignées sur les travées du groupe socialiste. – M. Gérard Longuet applaudit.)
Mme Raymonde Le Texier. Vous protégez les traders !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. C’est un débat que nous avons depuis plusieurs années, et la commission des affaires sociales s’est toujours prononcée contre la fiscalisation des indemnités journalières d’accidents du travail.
Mme Raymonde Le Texier. La majorité, oui !
Mme Catherine Procaccia. L’an passé, j’ai voté contre la fiscalisation.
M. Bernard Vera. Très bien !
Mme Catherine Procaccia. J’ai été battue, mais j’ai constaté avec plaisir que la commission mixte paritaire était revenue sur cette disposition.
Cette année, quand j’ai appris, notamment par la presse, que l’Assemblée nationale allait l’introduire dans le projet de loi de finances pour 2010, je comptais maintenir la position que j’avais adoptée l’année dernière, qui était celle de la majorité de la commission des affaires sociales depuis plusieurs années.
Or, depuis le début de cette discussion, après avoir écouté les différents intervenants, les propos de M. le ministre, et pris connaissance des amendements afférents à cet article, je crois que nous ne pouvons pas nous prononcer aussi simplement sur la suppression de cette disposition.
En outre, il a été clairement expliqué que, contrairement à ce qui est écrit dans la presse ou à ce que veulent nous faire croire nos collègues de gauche, il ne s’agit pas d’une imposition totale de l’ensemble des indemnités versées au titre des accidents du travail.
Aussi, pour avoir un débat complet, nous devons étudier les propositions qui sont faites, lesquelles tendent à présenter des solutions pour rendre le système plus juste. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)
Lorsqu’il s’agit d’une maladie contractée dans l’entreprise, par exemple un rhume ou une grippe, les indemnités sont fiscalisées. En cas d’accident du travail – j’ai été victime d’un lumbago au bureau, qui peut vous immobiliser pendant près d’un mois –, pourquoi ne le seraient-elles pas ?
Telles sont les raisons pour lesquelles, alors que je m’apprêtais à me prononcer en faveur de ces amendements de suppression, je ne les voterai pas.
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. François Autain. Quel dommage !
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Si le débat est aussi passionné, c’est parce qu’il est très important. Il touche à des victimes, des personnes qui, dans leur chair, ont subi ou subissent des accidents du travail.
Un tel débat n’est jamais simple : s’en prendre à des victimes, c’est très grave. En fait, il n’y a rien de pire !
Monsieur le ministre, dans le grand bassin d’emploi de ma région, siège du constructeur automobile PSA Peugeot Citroën, sur les 15 000 ouvriers travaillant sur le site de Sochaux, nombreux sont ceux qui paient l’impôt sur le revenu.
Revêtir la fiscalisation des accidents du travail du sceau de la justice fiscale, c’est un subterfuge extraordinaire ! Il est inconcevable de présenter une injustice, qui ajoute de la souffrance à la souffrance, comme une mesure de justice fiscale !
L’ensemble du monde du travail, de tous côtés et quelles que soient les opinions, y compris le patronat, se demande pourquoi aller jusque-là. C’est une levée générale de boucliers dans le pays !
M. Martial Bourquin. En tant que parlementaire, j’ai été contacté par des associations, des syndicats, qui me disent : « Vous n’allez tout de même pas voter cela ! Vous n’allez pas ajouter de la souffrance à la souffrance ! ».
Pourtant, on s’apprête à le faire et à adopter la mesure proposée.
Monsieur le ministre, si nous défendons une position contraire, ce n’est pas par démagogie. Nous avons de la compassion pour la souffrance, tandis que d’autres se livrent à un raisonnement froid,…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Oh là là !
M. Martial Bourquin. … invoquant la justice fiscale.
Je préfère notre position et, d’ailleurs, je considère – quitte à choquer M. le rapporteur général – qu’il faut avoir un certain cynisme pour aller jusque-là afin de trouver des produits fiscaux, alors que, dans le même temps, comme l’ont souligné précédemment plusieurs intervenants, notamment Nicole Bricq, on ne va pas chercher les niches fiscales là où elles sont, on ne s’attaque toujours pas au paquet fiscal ! Dans mon bassin d’emploi, le chômage a augmenté de 30 %,…
M. Martial Bourquin. … on licencie d’un côté, on paye des heures supplémentaires de l’autre, et malgré tout cela, on dit que c’est la normalité.
M. Martial Bourquin. Aujourd’hui, il nous est proposé de frapper des victimes d’accidents du travail. C’est une position moralement inacceptable et insoutenable. Vous la soutenez, prenez-en la responsabilité, mais je vous souhaite bien du plaisir pour l’expliquer dans vos circonscriptions ! (Mme Raymonde Le Texier et M. Marc Massion applaudissent.)
M. François Autain. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le ministre, jusqu’à présent, le Gouvernement s’était toujours opposé, dans cette enceinte, à la fiscalisation des indemnités journalières d’accidents du travail. Or il a fallu que, à l’Assemblée nationale, le président du groupe UMP, principale formation de soutien au Gouvernement, introduise cet amendement pour que vous l’acceptiez.
À vrai dire, et sans faire un point d’histoire, M. Copé est passé maître dans l’art d’ajouter quelques milliards d’euros – 25 milliards d’euros depuis 2002 – en matière de dépenses fiscales.
En effet, c’est lui qui a fait voter par l’Assemblée nationale cet amendement qui est indigne, et, à cet égard, la commission des affaires sociales a présenté une excellente démonstration juridique sur le fond. C’est également lui qui avait introduit, dans le collectif budgétaire pour 2004, une dépense fiscale, que j’ai évoquée lors de l’examen de la première partie de ce projet de loi de finances, visant à exonérer les plus-values de cession de titres de participations, dépense s’élevant, si ma mémoire est bonne, à 12 milliards d’euros une année et à 8 milliards d’euros en 2008 – vous connaissez les chiffres, monsieur le ministre du budget –, soit un total de 20 milliards d’euros.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ces chiffres sont faux ! On vous l’a bien expliqué en première partie : ils ne veulent rien dire !
Mme Nicole Bricq. Nous avons défendu des amendements, en première partie, tendant à imposer les revenus liés aux bonus, aux retraites « chapeau » et tutti quanti, ainsi que d’autres amendements, aujourd'hui, visant des dépenses fiscales onéreuses, improductives et injustes.
Or vous nous dites qu’il faudrait voter la mesure proposée. Si elle résulte de la coproduction législative, bravo !
Faire preuve de courage, ce n’est jamais s’attaquer aux faibles, c’est s’attaquer aux forts. Prenez-vous-en aux traders dont vous avez cité l’exemple et qui bénéficient de tous les conseils fiscaux pour échapper à l’impôt et éviter de contribuer aux finances publiques. Ce faisant, vous serez courageux. Mais vous ne pouvez pas nous dire que vous l’êtes aujourd’hui !
Soyons clairs : il y a un marqueur social, un marqueur politique ; assumez votre choix ! C’est la raison pour laquelle nous demandons un scrutin public sur ces trois amendements de suppression.
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote.
M. Bernard Vera. Je veux rappeler que, en 2008, selon les chiffres officiels, ont été dénombrés plus de 700 000 accidentés du travail. Parmi ceux-ci, 569 n’ont pas survécu et, comme l’a souligné tout à l’heure Thierry Foucaud, deux salariés meurent chaque jour au travail.
En outre, plus de 44 000 salariés ont subi une mutilation en 2008, ayant entraîné une incapacité permanente.
L’ensemble de ces accidents du travail ont représenté, en moyenne, 35 millions de journées d’indemnisations.
À ces chiffres, il faudrait ajouter les suicides causés par la souffrance, l’épuisement et la non-reconnaissance au travail, ainsi que, bien entendu, les maladies professionnelles, tant physiques que mentales.
Tels sont les chiffres concernant les mutilés du travail jugés par la majorité comme des « privilégiés ».
Mais, pour nous, à l’évidence, il s’agit non pas de chiffres, mais de vies, qui se brisent en raison d’une organisation dégradée et déshumanisée du travail.
Or ce sont les maigres indemnisations de ces victimes que vous entendez aujourd’hui taxer.
Plutôt que de faire les fonds de poche de ces victimes, pour obtenir, comme cela a été dit, 150 millions d’euros, savez-vous qu’il existerait un meilleur moyen d’obtenir de nouvelles recettes ?
Cette solution serait de réduire le nombre d’accidents du travail par une politique volontariste. Si nous parvenions, par exemple, à en faire baisser le nombre ne serait-ce que de 3,5 %, les 150 millions d’euros que rapportera la fiscalisation envisagée seraient largement économisés.
Mme Raymonde Le Texier. Très bien !
M. Bernard Vera. Pour réduire le nombre d’accidents du travail, il faudrait agir sur plusieurs axes : adopter des mesures strictes de protection de tous les travailleurs, améliorer les conditions de sécurité dans les métiers à risques et permettre plus de contrôles dans les entreprises.
Il faudrait également interdire ou, du moins, encadrer strictement les nouvelles formes de management, qui aggravent la dangerosité tant physique que mentale au travail.
Mais, au contraire, vous vous félicitez de la mise en place de nouvelles méthodes de travail, comme le « lean management », méthode grâce à laquelle une chaîne automobile sortira une voiture toutes les quarante-huit secondes, au lieu d’une par minute auparavant. Douze secondes gagnées sur une minute, c’est énorme ; et je vous laisse en imaginer la traduction en termes d’aggravation des conditions de travail pour tous les salariés maillons de cette chaîne.
Savez-vous que certaines entreprises respectent l’obligation légale de salarier 6 % de personnes atteintes d’un handicap d’une étrange manière : on maintient dans l’entreprise des salariés handicapés qui ont été victimes d’une mutilation au sein même de cette entreprise !
La mesure que vous envisagez rapporterait donc 150 millions d’euros. La simple défiscalisation des heures supplémentaires coûte 4 milliards d’euros et les niches fiscales représentent plus de 120 milliards d’euros.
Nous voudrions évoquer un dernier chiffre : celui du recul du capital des entreprises participant au financement de notre protection sociale.
Aujourd’hui, plus de 40 % du revenu total des grandes entreprises échappent aux prélèvements sociaux et, donc, au financement de la sécurité sociale. L’entreprise qui dégage des bénéfices en bourse, grâce au jeu de la financiarisation de l’économie, ne participe en rien à la solidarité nationale.
Si toutes les ressources financières des entreprises, y compris celles qui sont issues des plus-values boursières, étaient réinjectées dans notre système de protection sociale, cela rapporterait aux alentours de 70 milliards d’euros.
Voilà une belle niche à laquelle il faudrait s’attaquer, plutôt que de fiscaliser les indemnités journalières des accidentés du travail ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. – Mme Raymonde Le Texier ainsi que MM. Jean-Pierre Godefroy et Martial Bourquin applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je voudrais resituer le débat. Vous vous apprêtez à fiscaliser les indemnités de personnes qui, à la suite d’un accident du travail, voient leurs ressources amputées de 40 % : telle est bien votre proposition. (M. le rapporteur général de la commission des finances s’exclame.)
Certes, monsieur le ministre, certaines de ces personnes ne sont pas imposables, mais, pour autant, elles ne peuvent considérer avec plaisir la diminution de leurs revenus, de 40 % pendant les vingt-huit premiers jours de leur arrêt de travail, puis de 20 %. Chacun peut le comprendre.
Un accord était intervenu en 1898 prévoyant, en contrepartie de l’absence d’indemnisation intégrale, un dispositif de non-fiscalisation. Si vous voulez le remettre en cause, il faudrait mener une étude approfondie.
Mais, aujourd'hui, à l’inverse, vous voulez fiscaliser pour faire entrer de l’argent dans le budget, sans engager aucune négociation entre les salariés et le patronat, sans instaurer aucune discussion, sans prendre aucune mesure pour lutter contre les accidents du travail. Autrement dit, vous décidez de fiscaliser sans aucune concertation. Cela, c’est totalement injuste !
L’exemple que vous avez cité du trader qui se fracture un doigt de pied pourrait prêter à rire si l’on ne savait ce que représente un accident du travail. J’ai tenté de vous le faire comprendre tout à l'heure : quand une personne rentre chez elle accidentée du travail, c’est bien souvent une catastrophe pour sa famille ! Malgré cela, vous allez fiscaliser ! Et il n’est même pas sûr que cela rapportera 150 millions d’euros. Si l’amendement de M. le rapporteur général devait être adopté, ce serait vraisemblablement beaucoup moins.
Y a-t-il une estimation du nombre de personnes qui ne seraient pas fiscalement touchées par cette mesure ? Disposez-vous de chiffres que vous pourriez nous communiquer ? Non ! Vous avez simplement décidé de fiscaliser ! Pourquoi ? On ne sait pas trop !
Comme l’ont précédemment précisé certains de nos collègues, une décision politique a été prise au sein du groupe UMP à l’Assemblée nationale. Mais c’est votre problème, mes chers collègues de la majorité ! Je rappelle que les membres de la commission des affaires sociales du Sénat – ma collègue Catherine Procaccia l’a rappelé – se sont toujours opposés à cette disposition. Chaque fois que M. Jean-Jacques Jégou a déposé un amendement, nous avons eu un débat.
Ce qui est tout à fait dommage d’ailleurs, c’est que parmi les amendements qui ont été déposés, et qui ne me satisfont pas, beaucoup ne seront sans doute pas défendus.
Or le rapporteur de la mission commune d’information « amiante » par ailleurs rapporteur de la branche AT-MP dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, notre collègue Gérard Dériot, n’a pas déposé sans raison un amendement tendant à ne soumettre à fiscalisation que les indemnités journalières qui excèdent 86 % du revenu journalier antérieur. L’ancien président de la commission des affaires sociales, notre collègue Nicolas About, n’a pas lui non plus proposé sans raison d’ajouter le seuil de 1,6 SMIC.
Cela répond à un souci de justice sociale, qui n’est pas pris en compte dans la position que l’on veut nous faire adopter, car je ne crois pas que l’amendement de M. Marini, que nous examinerons ultérieurement, réglera ce problème.
Si MM. Dériot et About ont pris la décision de déposer de tels amendements, c’est qu’ils savent bien que des gens modestes vont être pénalisés. Évidemment, tout dépend de la définition que l’on donne au terme « modeste »… Quoi qu’il en soit, des gens seront pénalisés ! Je voudrais insister sur le fait que ces personnes dont vous voulez fiscaliser les indemnités journalières verront d’un coup leur revenu chuter.
Par ailleurs, notre collègue Denis Badré a évoqué la voie pénale. Certes, elle est tout à fait envisageable. Toutefois, permettez-moi de vous le dire, mes chers collègues, faire reconnaître la faute inexcusable de l’employeur dans le cas de l’amiante nous a demandé plus d’une dizaine d’années. La démarche sera encore plus complexe pour un salarié isolé dans une entreprise. C’est d’ailleurs pour cette raison, nous le savons très bien, qu’un nombre considérable d’accidents du travail ne sont pas déclarés.
Je voudrais donc vous convaincre de ne pas toucher à ce qui constituait un équilibre entre les partenaires sociaux. Si vous souhaitez vraiment une évolution, dans ce cas, demandez-leur de se réunir et de mettre sur la table le montant de l’indemnité. Demandez aux représentants du MEDEF s’ils sont d’accord pour le faire ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste. – M. Bernard Vera applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Avec ces amendements, nous abordons un sujet particulièrement sensible.
Monsieur Godefroy, on ne peut pas prétendre que le niveau des indemnités est fixé en fonction du barème de l’impôt sur le revenu.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je n’ai pas dit cela !
M. Jean Arthuis, président de la commission. Cette situation serait trop profitable à ceux qui ont des revenus très élevés, alors que les plus modestes échappent à l’impôt progressif ou ont une contribution très faible.
Mme Nicole Bricq. Ils contribuent, eux, au moins !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On ne peut donc pas mettre un tel argument en avant.
En taxant, à 50 % de son montant, l’indemnité qui vient compenser le revenu, il me semble que nous sommes bien dans la reconnaissance d’une situation délicate pour ceux qui sont victimes d’un accident du travail.
Je voudrais par ailleurs livrer au dossier une pratique dans le sport de haut niveau.
M. Albéric de Montgolfier. Le football !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Un président de club professionnel m’a un jour expliqué qu’il était de pratique courante qu’au lendemain du dernier match de la saison nombre de footballeurs professionnels se retrouvent en arrêt pour accident de travail. Avez-vous conscience, mes chers collègues, des sommes que cela peut représenter ? Sous la dénomination « accidents du travail », on peut donc trouver des coutumes parfois étranges.
En conscience, la commission des finances vous propose un amendement qui est un aménagement très sensible de la disposition que nous votions, chaque année depuis trois ans, et qui consistait purement et simplement à imposer l’intégralité de l’indemnité. En prévoyant un taux forfaitaire d’imposition de 50 %, nous rendons plus opérant le dispositif adopté par nos collègues députés, qui pouvait effectivement être préjudiciable à ceux dont la rémunération est relativement modeste.
Par conséquent, c’est également en conscience que je voterai l’amendement de la commission des finances.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-105, II-172 rectifié quater et II-261.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe socialiste et, l’autre, du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 97 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 337 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 169 |
Pour l’adoption | 156 |
Contre | 181 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-385, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Rédiger ainsi ces alinéas :
1° À l'article 80 quinquies, les mots : « des indemnités qui, mentionnées au 8° de l'article 81, sont allouées aux victimes d'accidents du travail et de celles » sont remplacés par les mots : « de la fraction des indemnités allouées aux victimes d'accidents du travail exonérée en application du 8° de l'article 81 et des indemnités » ;
2° Au 8° de l'article 81, les mots : « les indemnités temporaires, prestations et rentes viagères » sont remplacés par les mots : « les indemnités temporaires, à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les prestations et rentes viagères, ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, je voudrais tout d’abord relever plusieurs points.
Le revenu de remplacement et le revenu de réparation sont deux éléments différents. D’ailleurs, pour qu’il y ait revenu de réparation, il faut que l’état physique de la personne se soit stabilisé. Le revenu de réparation ne peut intervenir qu’à partir de ce moment-là et sur la base des expertises qui seront, hélas ! pratiquées. J’ai entendu tout à l’heure des propos tendant à créer une ambiguïté entre ces deux notions, à en faire un amalgame. (Mme Raymonde Le Texier s’exclame.) C’est un point qui m’a paru tout à fait inacceptable dans certaines interventions !
Par ailleurs, j’ai entendu évoquer une opération « à la sauvette ». Je crois que nous avons montré, par les références à nos débats antérieurs, que ce n’est pas le cas.
J’ai également entendu dénoncer une décision prise « par le biais d’un simple amendement ». Pourquoi siège-t-on au Parlement, si les amendements doivent être récusés au motif qu’ils sont des amendements ? Il s’agit là de l’exercice du droit d’initiative des députés, comme des sénateurs. Je ne comprends pas qu’un parlementaire dénigre le droit d’amendement !
M. Gérard Longuet. La IIIe République est née de l’amendement Wallon !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument ! Même sous la Ve République, nous en avons fait la preuve la semaine dernière, le droit d’amendement est une réalité. Il faut s’en réjouir et en aucun cas dénigrer ce droit !
Mme Nicole Bricq. Vous avez voté une loi sur le dialogue social et vous vous asseyez dessus !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous ne sommes pas nécessairement à la remorque des organisations que vous avez citées. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Ce ne sont pas le MEDEF et les organisations syndicales qui, en principe, font la fiscalité, comme vous nous le conseilleriez ici.
Mme Nicole Bricq. Non, nous vous demandons de les écouter !
M. Jean-Pierre Sueur. On veut les écouter !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est une grave contradiction !
Enfin, j’ai entendu l’expression « fiscalité de classe ». Cela m’a fait réagir. L’impôt sur le revenu au taux progressif constitue-t-il une fiscalité de classe ?
Mme Nicole Bricq. Vous n’arrêtez pas de diminuer la progressivité ! Vous ne cessez pas de lui porter des coups à ce pauvre impôt !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet impôt, est-ce une fiscalité de classe ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Nous avons cité différents cas de figure de personnes qui ont la chance de bénéficier de revenus relativement élevés. S’il leur arrive, hélas ! un problème, il est logique et normal que le revenu de remplacement suive le même sort que le revenu qui est remplacé.
J’en viens à l’amendement n° II-385.
L’Assemblée nationale, je le rappelle, a veillé à introduire une distinction entre, d’une part, l’indemnité journalière pour la partie relative à la compensation du préjudice subi et, d’autre part, la même indemnité en ce qu’elle correspond à un revenu de remplacement. C’est une bonne chose !
Notre excellente collègue député Marie-Anne Montchamp a considéré que ce revenu de remplacement était l’équivalent de l’indemnité qui serait versée en cas de maladie. L’Assemblée nationale a donc décidé de ne fiscaliser que la part de l’indemnité journalière-accident du travail équivalant à l’indemnité journalière de maladie, aujourd’hui soumise à l’impôt sur le revenu. Cette solution présente l’avantage de ne fiscaliser que partiellement les indemnités journalières-accident du travail.
Toutefois, ce dispositif pose des difficultés techniques de mise en œuvre et des difficultés en termes d’équité.
C’est pourquoi je suis amené à vous soumettre le présent amendement : nous conservons le principe d’une fiscalisation partielle des indemnités journalières-accident du travail et nous proposons de fixer la base imposable de ces indemnités forfaitairement, et non plus en valeur.
Le taux forfaitaire serait de 50 %, ce qui correspond à la moyenne entre la part maximale et la part minimale que peut représenter l’indemnité journalière de maladie au sein de l’indemnité journalière-accident du travail, quelle que soit la durée de l’arrêt de travail.
Ce dispositif offre une solution simple, qui pourra être appliquée dans tous les cas de figure, et qui paraît conforme à l’équité. En effet, à l’examen de la version qui nous a été soumise, les rémunérations relativement basses seraient moins bien traitées qu’elles ne le seront avec la formule forfaitaire à 50 %.
Telle est, monsieur le ministre, la nature de la proposition élaborée par la commission des finances pour arriver à un équilibre raisonnable dans cette affaire.
M. le président. L'amendement n° II-28 rectifié, présenté par MM. Jégou, Badré, Détraigne, Dubois, Merceron et Soulage et Mmes Dini et Payet, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
1° À l'article 80 quinquies, après les mots : « alloués aux victimes d'accidents du travail », sont insérés les mots : « qui ne bénéficient pas du maintien de la totalité de leur salaire par l'employeur en vertu d'un contrat individuel ou collectif de travail, des usages ou de sa propre initiative ».
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Jean-Jacques Jégou a soulevé, voilà quelques années, un vrai problème de justice fiscale. Une réflexion sur ce thème a fini par s’engager dans un cercle qui s’élargit régulièrement. Je note qu’un certain nombre de personnalités éminentes de la commission des affaires sociales qui, jusqu’à présent, étaient assez opposées à l’ouverture de ce débat - Mme Procaccia le rappelait tout à l’heure –, notamment le rapporteur général de la commission des affaires sociales, Alain Vasselle, et l’ancien président de la commission des affaires sociales, Nicolas About, ont présenté des amendements. Ces propositions nous ont permis d’avancer et de sortir du débat opposant la commission des finances, qui cherche uniquement à faire entrer de l’argent, à la commission des affaires sociales, laquelle s’efforce exclusivement de traiter le sort des malheureux. Cela n’est pas le sujet. Le sujet, c’est la justice fiscale.
Dans ce contexte, Jean-Jacques Jégou, fidèle à sa réflexion de départ mais profitant des apports de tous ceux qui ont bien voulu apporter leur contribution au débat, propose simplement, en complétant l’amendement de la commission des finances, de n’assujettir que les personnes qui bénéficient du maintien de la totalité de leur salaire.
M. le président. L'amendement n° II-225, présenté par MM. About, Biwer, Détraigne, Maurey, Pozzo di Borgo, Borotra, Deneux, Dubois, C. Gaudin, Merceron et Pignard et Mme Payet, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
pour la part qui excède la fraction du gain journalier de base mentionné à l'article L. 323-4 du code de la sécurité sociale
par les mots :
lorsque leur montant n'excède pas 86% du gain journalier de base mentionné à l'article L. 323-4 du code de la sécurité sociale ni la rémunération mentionnée au troisième alinéa du III de l'article L. 241-13 du même code
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° II-34 rectifié ter, présenté par M. Dériot, Mmes Bout, Debré, Desmarescaux et Rozier et MM. Cantegrit et Vasselle, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
pour la part qui excède la fraction du gain journalier de base mentionné à l'article L. 323-4 du code de la sécurité sociale
par les mots :
lorsque leur montant n'excède pas 86 % du gain journalier de base mentionné à l'article L. 323-4 du code de la sécurité sociale
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° II-28 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement, qui est dans le même esprit que celui de la commission, prévoit un principe différent de fiscalisation. Toutefois, il n’est pas certain que la formule proposée permette d’aboutir à une solution totalement incontestable.
À titre d’exemple, deux salariés qui recevraient la même indemnité pourraient être traités différemment en termes d’imposition, en fonction d’une circonstance extérieure à cette indemnité, selon qu’ils sont couverts ou non par une convention collective. Cet amendement – même si je partage les intentions de son principal auteur – me paraît présenter un risque de complexité. Il est beaucoup plus simple de ne fiscaliser que 50 % de l’indemnité journalière par référence à la proportion moyenne que représenteraient les indemnités maladie par rapport au total des indemnités accident du travail.
La commission souhaite donc que les auteurs de l’amendement n° II-28 rectifié veuillent bien le retirer au bénéfice de son propre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos II-385 et II-28 rectifié ?
M. Éric Woerth, ministre. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, le Gouvernement est favorable à l’amendement présenté par la commission, qui a le mérite de la simplicité. Il prend en compte la discussion qui a eu lieu à l’Assemblée nationale et, en fixant un taux forfaitaire d’imposition de 50 %, permet que la mesure soit le plus opérationnel possible. En effet, c’est assez compliqué, il y a des seuils qui varient, etc.
Aux termes de cet amendement, tout ce qui excède la rémunération ou la substitution au travail dans le cadre d’une maladie normale peut être considéré comme un supplément dû au fait qu’il s’agit d’un accident du travail. Dans ce cas-là, on considère – et l’on pousse le raisonnement très loin – que ce n’est pas un revenu de substitution, que cela prend en compte en partie les raisons de l’arrêt de travail – cela n’est pas fiscalisable – et le reste est fiscalisable sur le socle de maladies normales. Avec un forfait à 50 %, on obtient un bon résultat, et c’est simple.
Voilà pourquoi, monsieur Badré, je souhaiterais que vous optiez pour l'amendement de la commission.
M. le président. Monsieur Badré, l’amendement n° II-28 rectifié est-il maintenu ?
M. Denis Badré. J’ai bien entendu la suggestion qui m’a été faite par M. le rapporteur général et M. le ministre de retirer cet amendement, auquel tient beaucoup Jean-Jacques Jégou. Si l’amendement de la commission des finances est adopté, le débat s’ouvrira de nouveau en CMP. Jean-Jacques Jégou pourra, d’ici à la CMP, faire valoir d’autres arguments. Je pense donc ne pas trop m’avancer en retirant cet amendement.
Jean-Jacques Jégou a déjà la satisfaction de voir le débat dans lequel il s’est engagé il y a quelques années progresser sur les vrais sujets, de la bonne manière, sans arrière-pensée et sans susciter de guerre de religion. C’est pour lui une manière de montrer qu’il a posé une bonne question pour laquelle s’élaborent de vraies réponses.
D’autres solutions avaient été envisagées qui n’ont pas pu être défendues à l’instant. C’est notamment le cas de l'amendement n° II-225 de Nicolas About qui pourrait éventuellement être pris en compte pour partie lors de la discussion en CMP. Je ne l’avais pas signé parce que je restais fidèle à l’amendement de la commission.
M. le président. L’amendement n° II-28 rectifié est retiré.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l'amendement n° II-385.
M. Jean-Pierre Godefroy. Premier point : monsieur le rapporteur général, quel va être le rendement fiscal pour l’État de la disposition que vous proposez ? Si l’on en avait une idée à partir de la proposition issue de l’Assemblée nationale, ce n’est pas le cas ici.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Environ 135 millions d'euros !
M. Jean-Pierre Godefroy. Second point : quand on lit les trois autres amendements, même si deux d’entre eux n’ont pas été défendus, on s’aperçoit que leurs auteurs, notamment notre collègue Jean-Jacques Jégou, qui était très favorable à cette fiscalisation, ont prévu des garde-fous afin d’éviter que les revenus les plus modestes ne soient pénalisés, car, comme nous le disions déjà tout à l’heure, ce risque est réel.
L’ancien président de la commission des affaires sociales Nicolas About a, quant à lui, prévu que ne seraient fiscalisées que les indemnités journalières excédant 1,6 SMIC. Cela veut donc dire que la fiscalisation va aller très bas et toucher des revenus très modestes, contrairement à ce que l’on essaie de nous faire croire. Le rapporteur pour les accidents du travail et maladies professionnelles sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, notre collègue Gérard Dériot, a proposé que soient fiscalisées les indemnités journalières excédant 86 % du revenu journalier antérieur.
On voit bien que tous nos collègues – même ceux qui sont favorables à cette fiscalisation – prennent de réelles précautions pour éviter que ne soient pénalisées – c’est le risque que nous dénonçons depuis le début de cette discussion – les personnes les plus fragiles. La preuve est donc faite que ce risque est avéré.
Donc, pour ce qui nous concerne, nous ne voterons pas ces amendements qui ne sont que des propositions de rattrapage, pour essayer de ne pas trop faire souffrir les plus modestes, mais qui visent surtout à mettre de l’huile dans les rouages !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Le dispositif tel qu’il a été revu et corrigé par le Sénat se traduira par une économie de 135 millions d'euros pour le budget de l’État.
M. Jean-Pierre Godefroy. Alors, ça ne sert pas à grand-chose !
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Après le paysan de l’Île-de-Ré contraint de payer l’impôt de solidarité sur la fortune, voici le trader victime d’un accident du travail en se cassant un doigt de pied au volant de sa Porsche !
Mme Nicole Bricq et M. Albéric de Montgolfier. Un doigt de la main !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce sont les footballeurs qui travaillent avec leurs pieds – et non avec leurs mains, en principe… (Sourires.)
M. Thierry Foucaud. À moins qu’il ne tape sur son clavier avec ses pieds ! (Nouveaux sourires.)
L’amendement présenté par M. le rapporteur général ne change rien. La réparation de l’entier préjudice – dont nous avons parlé tout à l’heure – de l’accidenté du travail n’existe pas et vous voulez encore diminuer ses droits. Rogner sur ses droits, c’est, d’une certaine manière, affirmer qu’il a commis une faute en se blessant.
C’est pourquoi nous désapprouvons cet amendement et, comme nos collègues du groupe socialiste, nous voterons contre.
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.
M. Charles Guené. Je remercie M. le rapporteur général de nous faire revenir au droit, ce qui, en ce lieu, est important et n’exclut pas la compassion à l’égard des victimes d’accidents du travail.
Cet amendement ne remet aucunement en cause l’indemnisation du préjudice qui, bien sûr, ne sera pas soumise à l’impôt. Mais il s’agit de trouver une voie de droit pour que les indemnités des accidents du travail soient soumises au régime qui leur est applicable.
L’Assemblée nationale, par une construction assez subtile, a essayé de nous ramener dans le droit. Nous avons emprunté ce chemin. Il était important de trouver un système opérationnel, ce qu’a fait M. le rapporteur général avec cette proposition ; par conséquent, je la voterai
M. le président. Je mets aux voix l'article 45 bis, modifié.
(L'article 45 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 45 bis
M. le président. L'amendement n° II-306, présenté par MM. Adnot et C. Gaudin, est ainsi libellé :
Après l'article 45 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À l'article 93 du code général des impôts, le 1 bis est rétabli dans la rédaction suivante :
« 1 bis.- Les fonctionnaires qui sont autorisés à apporter leur concours scientifique à une entreprise qui assure la valorisation de leurs travaux au titre de l'article L. 413-8 du code de la recherche, peuvent demander que le revenu provenant de cette activité soit soumis à l'impôt sur le revenu selon les règles prévues en matière de traitements et salaires. Cette option est subordonnée à la condition que les rémunérations perçues soient intégralement déclarées par l'entreprise qui les verse.
« La demande doit être adressée au service des impôts du lieu du domicile avant le 1er mars de l'année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est établie. L'option demeure valable tant qu'elle n'a pas été expressément dénoncée dans les mêmes conditions. »
II. La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article 45 ter
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa de l’article 199 decies E est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L’indexation de tout ou partie du loyer sur le chiffre d’affaires ou le résultat ne fait pas obstacle à l’imposition dans la catégorie des revenus fonciers. » ;
2° Le 1 de l’article 199 decies F est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les logements visés aux a et c, l’indexation de tout ou partie du loyer sur le chiffre d’affaires ou le résultat ne fait pas obstacle à l’imposition dans la catégorie des revenus fonciers. »
II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. L'amendement n° II-163, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous voici parvenus dans un domaine différent puisque l’article 45 ter que nous voulons supprimer concerne le régime fiscal dit « Demessine » relatif aux résidences de tourisme.
La commission a été dubitative sur la proposition votée à l’Assemblée nationale et qui permettrait de déclarer, au titre des revenus fonciers, les loyers qui seraient indexés sur le chiffre d’affaires ou le résultat de l’exploitant.
On est dans le cas de figure un peu particulier de résidences de tourisme qui connaissent des problèmes de rentabilité et où des investisseurs se retrouvent en quelque sorte pris au piège. À ce moment-là, il s’agit de monter une formule de reprise.
Vous savez, mes chers collègues, qu’en première partie nous avons voté un amendement qui a pour objet d’allonger la période pendant laquelle cette reprise peut être élaborée. Par cet article, sans doute sous la même inspiration, il nous est proposé de faire une exception assez importante, à mon avis sans précédent, à la définition du revenu foncier. Le revenu foncier est fixe ; en tout cas, ce n’est pas un revenu indexé sur le chiffre d’affaires ou sur le résultat de la société qui l’encaisse.
Tout en comprenant bien que cet article a sans doute été introduit dans le souci de faciliter des reprises d’opérations compromises, nous nous interrogeons sur la portée de cette modification : la notion de revenu foncier recevrait alors une interprétation différente qui s’imposerait erga omnes.
Une telle mesure ne serait pas applicable seulement au cas de figure des résidences de tourisme : elle pourrait constituer un précédent pour d’autres opérations immobilières.
D’une façon générale, l’introduction de telles clauses par les exploitants montre bien que les investisseurs se trouvent en situation de faiblesse. Ainsi, dans le régime Demessine, les investisseurs sont prêts à accepter des dispositions contractuelles inusuelles, voire à caractère léonin, pour conserver leur avantage fiscal et éviter la requalification.
Nous sommes donc dubitatifs sur cet article. Nous ne souhaitons pas qu’il devienne un précédent, ouvert à partir d’une niche fiscale, qui modifierait de manière plus globale les rapports locatifs.
Des mesures de protection des investisseurs de bonne foi ont déjà été votées à l’article 9 bis, et d’autres seront examinées à l’article 45 quater. C'est la raison pour laquelle nous estimons que le présent article n’est pas indispensable, et peut-être même quelque peu dangereux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement a examiné très attentivement l’amendement de la commission, sur lequel il a émis un avis favorable, et ce pour trois raisons.
Premièrement, l’article 45 ter du projet de loi de finances présente certaines incohérences. Il ferait double emploi avec le dispositif applicable aux investisseurs qui acquièrent des logements destinés à être loués meublés, adopté en loi de finances pour 2009.
Deuxièmement, il ferait également double emploi avec l’article 45 quater du projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale, qui permet aux investisseurs représentant au moins 50 % des copropriétaires de substituer au gestionnaire défaillant une ou des entreprises locales qui assurent les mêmes prestations, sur les mêmes périodes, dans des conditions fixées par décret.
Troisièmement, ce type de baux à loyer variable a déjà été expérimenté et présente l’inconvénient de donner lieu chaque année à de multiples discussions entre les propriétaires et l’exploitant sur la réalisation ou non des critères de performance choisis.
Pour l’ensemble de ces raisons, l’amendement n° II-163 nous paraît très judicieux.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. L’adoption de l’amendement n° II-163 entraînera la suppression de l’article 45 ter. Je souhaitais simplement savoir si serait tout de même maintenue, par une autre voie, la possibilité de soutenir les propriétaires investissant dans l’immobilier de tourisme dans des régions qui ne sont pas naturellement favorisées et où le risque économique est sans doute plus élevé que dans les stations établies de montagne ou de bord de mer.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur Longuet, les dispositions déjà votées à l’article 9 bis et celles que nous allons examiner à l’article 45 quater me semblent effectivement de nature à répondre à votre préoccupation. Vous vous en souvenez certainement, nous avons en particulier porté à trois ans la période nécessaire pour trouver un nouveau mode d’exploitation.
M. le président. En conséquence, l'article 45 ter est supprimé.
Article 45 quater
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après la quatrième phrase du cinquième alinéa de l’article 199 decies E, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :
« La réduction pratiquée ne fait pas l’objet d’une reprise si les copropriétaires substituent au gestionnaire défaillant de la résidence de tourisme une ou un ensemble d’entreprises qui assurent les mêmes prestations sur la période de location restant à couvrir conformément aux prescriptions légales, dans des conditions fixées par décret. Cette faculté leur est ouverte dès lors que la candidature d’un autre gestionnaire n’a pu être retenue après un délai d’un an et qu’ils détiennent au moins 50 % des appartements de la résidence. » ;
2° Le 4 de l’article 199 decies F est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La réduction pratiquée ne fait pas l’objet d’une reprise si les copropriétaires substituent au gestionnaire défaillant de la résidence de tourisme une ou un ensemble d’entreprises qui assurent les mêmes prestations sur la période de location restant à couvrir conformément aux prescriptions légales, dans des conditions fixées par décret. Cette faculté leur est ouverte dès lors que la candidature d’un autre gestionnaire n’a pu être retenue après un délai d’un an et qu’ils détiennent au moins 50 % des appartements de la résidence. » ;
3° Au a de l’article 261 D, les mots : « exploitant qui a » sont remplacés par les mots : « ou plusieurs exploitants qui ont ».
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, sur l'article.
M. Martial Bourquin. Cet article tend à améliorer l’aide apportée aux petits propriétaires, dont beaucoup ont choisi l’investissement dans les résidences de tourisme pour s’assurer un complément de retraite et se sont fait piéger par le miroir aux alouettes de la défiscalisation immobilière. Chacun d’entre nous peut comprendre leur désarroi.
Je note pourtant que les conditions sont nombreuses pour pouvoir bénéficier des dispositions prévues, y compris sur le plan fiscal. Je m’interroge sur les estimations dont le ministère pourrait déjà disposer. Combien de petits propriétaires saisiront réellement l’occasion de cogérer ces résidences ?
Je suis favorable à l’amendement déposé, notamment, par ma collègue Patricia Schillinger et qui vise à accorder plus de temps aux propriétaires pour s’organiser.
Si cet article me paraît de nature à réparer certaines injustices, qui mettent en péril les petits propriétaires, nous ne nous attaquons pas pour autant au fond du problème : la promesse de la niche fiscale en zone rurale, qui a donné lieu à de très nombreux abus et conduit à une déréglementation immobilière, responsable des défaillances des investisseurs.
Les mesures prévues par cet article ne résoudront pas le fait que la demande de résidences de tourisme dans certaines zones est structurellement très inférieure à l’offre. Le mode de gestion des résidences de tourisme n’est pas de nature à modifier en amont notre politique d’aménagement du territoire.
Aussi, j’attends avec beaucoup d’impatience l’évaluation du dispositif des zones de revitalisation rurale qui doit nous être proposée et qui devrait être utilement mise en relation avec cet article.
Les erreurs du passé ne doivent pas se répéter. L’euphorie immobilière est contreproductive pour nos territoires comme pour les investisseurs, quelles que soient leurs motivations d’origine.
M. le président. L'amendement n° II-262, présenté par Mmes Schillinger et Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ils disposent d'une année pour constituer une structure adaptée, après qu'il a été constaté qu'aucun repreneur ne s'est manifesté, sans pour autant réduire la durée de l'engagement de neuf ans.
II. - Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ils disposent d'une année pour constituer une structure adaptée, après qu'il a été constaté qu'aucun repreneur ne s'est manifesté, sans pour autant réduire la durée de l'engagement de neuf ans.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Cet amendement a pour objet, une fois qu’a été constatée la défaillance d’un gestionnaire, de permettre aux propriétaires d’une résidence de tourisme de disposer d’une année pour se constituer en société coopérative d’intérêt collectif, après qu’il a été constaté qu’aucun repreneur ne s’est manifesté.
Il s’agit d’améliorer le dispositif Demessine, qui a institué une réduction d’impôt pour favoriser le développement des résidences de tourisme dans les zones de revitalisation rurale, ou ZRR. II est bon de rappeler que ce dispositif a joué un rôle clé dans le développement du tourisme dans ces zones, notamment pour les stations de montagne.
Cependant, les difficultés de certains opérateurs immobiliers et la défaillance de certains gestionnaires placent aujourd’hui les particuliers concernés dans une situation très difficile. En effet, ces défaillances se manifestent généralement en deux temps : l’arrêt du paiement des loyers suivi de celui de l’activité commerciale. Partant, les locaux ne sont plus loués, les loyers non payés, et ce définitivement.
Les propriétaires investisseurs se retrouvent donc avec une perte en termes de loyers, tout en ayant à leur charge les frais d’entretien et le remboursement de leurs emprunts. Qui plus est, ils risquent la reprise de leur avantage fiscal si la résidence n’a pas de repreneur dans un délai d’un an.
Près de 5 400 copropriétaires des Alpes du Nord et du Sud sont ainsi actuellement victimes d’une certaine précarisation du dispositif Demessine.
L’Assemblée nationale a, certes, permis d’assouplir les conditions de reprise de l’activité d’un gestionnaire défaillant. Ainsi, les copropriétaires devraient désormais pouvoir se substituer au gestionnaire défaillant d’une résidence de tourisme en faisant reprendre son activité par une entreprise, ou par un ensemble d’entreprises, qui assure les mêmes prestations sur la période de location restant à couvrir, conformément aux prescriptions légales.
Toutefois, l’organisation d’un tel processus de reprise n’est pas aisée, surtout pour des propriétaires qui ne sont généralement pas des professionnels de l’immobilier. Pour cette raison, après avoir pris acte qu’aucun repreneur ne s’est manifesté, il est important pour les propriétaires de disposer d’une année supplémentaire, après la constatation de la défaillance, pour obtenir l’autorisation préfectorale nécessaire et s’organiser afin de constituer une société coopérative d’intérêt collectif, sans pour autant réduire la durée de l’engagement de neuf ans prévu par le dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je voudrais rappeler en quelques mots le dispositif de l’article 45 quater adopté à l'Assemblée nationale.
À l’article 9 bis, nous avons porté à trois ans le délai de reprise de la réduction d’impôt pour l’acquisition de résidences de tourisme dans les ZRR en cas de rupture de l’engagement de location liée à la défaillance de l’exploitant. Pendant ce délai, l’administration fiscale ne requalifiera pas les investissements de ceux qui, entrés dans cette niche fiscale, ne s’y épanouissent pas. Sur l’initiative de notre commission, l’assouplissement du régime de reprise en faveur des propriétaires de bonne foi a été étendu à la réduction d’impôt pour travaux.
La commission des finances de l'Assemblée nationale, sur l’initiative de notre excellent collègue Michel Bouvard, a complété ce régime de protection de l’investisseur en supprimant la reprise de la réduction d’impôt pour investissement dans une résidence de tourisme en ZRR dès lors que les copropriétaires substituent au gestionnaire défaillant une ou plusieurs entreprises.
Par ailleurs, l’article 45 quater introduit la notion de pluralité d’exploitants : il précise que l’exonération de la TVA ne s’applique pas aux prestations d’hébergement fournies dans les hôtels de tourisme classés et villages de vacances classés ou agréés, ainsi que dans les résidences de tourisme classées lorsque ces dernières sont destinées à l’hébergement des touristes et qu’elles sont louées par contrat d’une durée d’au moins neuf ans à un ou plusieurs exploitants. Comme vous le voyez, ce régime est d’une simplicité biblique !
L’amendement n° II-262 vise à encadrer la constitution d’une structure de remplacement du gestionnaire défaillant et à accorder une année supplémentaire pour la mise en place du nouveau gestionnaire.
Je n’ai pas très bien compris comment s’enchaînent ou se coordonnent les différents délais, à savoir ceux de l’article 9 bis, de l’article 45 quater dans sa version initiale et, le cas échéant, du présent amendement.
En outre, la notion de « structure adaptée » me paraît floue d’un point de vue juridique.
Je souhaiterais donc connaître l’avis du Gouvernement avant de livrer un avis définitif sur cet amendement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. L’article 45 quater a pour objet de faire en sorte, en cas de difficultés rencontrées par les propriétaires pour l’exploitation en vue de la location de résidences de tourisme situées en ZRR, qu’un délai d’une année leur soit accordé pour trouver d’autres gestionnaires, constituer une société et remettre à la location ces résidences.
À titre liminaire, j’indiquerai qu’il est de l’intérêt de tous que l’opération s’effectue le plus rapidement possible. Si l’on ajoute du temps au temps, les résidences en question finiront par être inexploitées, laissées en déshérence ou utilisées à d’autres fins.
Même si l’intention de ses auteurs est bonne, je ne suis pas favorable à l'amendement n° II-262 qui tend à ajouter une année supplémentaire pour la constitution de la société.
Tout d’abord, dans la rédaction actuelle de l’amendement, il doit avoir été constaté qu’aucun repreneur ne s’est manifesté pour permettre au copropriétaire de s’organiser en vue de substituer au gestionnaire défaillant des prestataires de services locaux. Il s’agit d’une condition supplémentaire. Je ne pense pas que tel soit l’objectif recherché !
Ensuite, les copropriétaires disposent d’une année de plus pour constituer la nouvelle entité. Or, comme je l’ai souligné au début de mon propos, il est de l’intérêt de tous que l’opération s’effectue le plus rapidement possible. Il ne me paraît donc pas souhaitable de rajouter une année. Dans un délai de douze mois, les copropriétaires peuvent tout à fait constituer une société et substituer un nouveau gestionnaire au gestionnaire défaillant.
Par conséquent, je vous propose de retirer cet amendement, monsieur Todeschini. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Au regard de l’explication donnée par le Gouvernement, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Jean-Marc Todeschini, l’amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Marc Todeschini. Oui, monsieur le président, je le maintiens.
M. le président. L'amendement n° II-173, présenté par MM. Collin et Charasse, Mme Escoffier et MM. Mézard, Plancade, Tropeano et Vendasi, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
1° bis L'article 199 decies E est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les classements touristiques visés par le présent article doivent être demandés dans le délai d'un mois. Ils doivent être obtenus dans un délai compatible avec les exigences administratives et au maximum neuf ans après le début de l'activité. »
II. - Après l'alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les classements touristiques visés par le présent article doivent être demandés dans le délai d'un mois. Ils doivent être obtenus dans un délai compatible avec les exigences administratives et au maximum neuf ans après le début de l'activité. »
III. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. En application de la loi Demessine, des particuliers ont investi dans des résidences de tourisme principalement situées dans les zones de montagne. D’autres dispositifs prévoient également l’obligation de l’obtention d’un classement touristique.
Dans le cadre du régime Demessine, les investisseurs se sont engagés à louer des logements acquis dans une résidence de tourisme classée. Mais il s’avère que, dans de nombreux cas, les demandes de classement n’ont pu être obtenues rapidement pour des raisons totalement indépendantes de la volonté des investisseurs concernés.
Dans ce contexte, il semble opportun d’éviter des rappels fiscaux qui seraient fondés sur une interprétation littérale du texte imposant un classement quasi immédiat des résidences. De tels rappels remettent en cause la pérennité de ces résidences ou incitent les propriétaires et les exploitants à renoncer à obtenir les classements.
Il est pourtant dans l’intérêt des territoires concernés, de leurs populations et de la situation de l’emploi, que ces investissements puissent se concrétiser par l’exploitation de résidences de qualité garantie par les classements.
L’amendement n °II-173 tend donc à préciser que l’obligation de classement se comprenne comme imposant une demande de classement dans le premier mois d’exploitation, un classement dans des délais compatibles avec les procédures et demandes de l’administration, avec, bien entendu, comme objectif, l’obtention d’un classement dans un délai maximum de neuf ans après le début d’activité de la résidence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission craint que ce dispositif ne soit facteur d’insécurité juridique pour les investisseurs. Le régime Demessine est déjà assez pousse-au-crime pour un certain nombre d’intermédiaires, crime économique, s’entend, et présumé, et les investisseurs se retrouvent alors pris au dépourvu. Si l’on ne fait pas très attention à la nature des biens qui vont être acquis et que l’on n’est pas exigeant quant au classement, on ouvre une zone de risque supplémentaire.
Nous observons, au travers de divers exemples, que des personnes ont été prises au piège. Le procédé dont elles sont victimes est d’ailleurs toujours le même : une prospection active sur le fondement de l’avantage fiscal, soit une vente de défiscalisation.
Si l’on ne resserre pas les critères, le danger ne fera que s’accroître. C’est la raison pour laquelle la commission n’a pas été très convaincue et souhaiterait le retrait de l’amendement, sauf dans l’hypothèse où le Gouvernement nous indiquerait qu’il s’agit d’une bonne initiative.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement et en sollicite également le retrait.
En effet, les délais d’obtention de classement sont bien souvent le fait non pas de l’administration elle-même, mais des gestionnaires qui tardent à fournir les informations. Étendre le délai ne les incitera pas à se mettre aux normes et à fournir les documents plus rapidement.
M. le président. Monsieur Charasse, l’amendement est-il maintenu ?
M. Michel Charasse. À la lumière de ces indications, je suggérerai à ceux qui m’ont aidé à rédiger l’amendement de trouver une formule un peu plus convaincante pour le collectif budgétaire.
Par conséquent, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-173 est retiré.
Je mets aux voix l'article 45 quater.
(L'article 45 quater est adopté.)
Article 45 quinquies
À la fin de la première phrase du premier alinéa du II de l’article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, l’année : « 2010 » est remplacée par l’année : « 2012 ».
M. le président. L'amendement n° II-263, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. L’article 45 quinquies prévoit de prolonger jusqu’à la fin de l’année 2012 la validité du dispositif d’investissement en fonds propres dans les PME ouvrant droit à une réduction d’impôt sur le revenu, plus connu depuis plusieurs années sous le nom de dispositif Madelin ; celui-ci devait s’interrompre à la fin de l’année 2010.
Ce matin, le groupe socialiste a présenté un amendement visant à proroger le crédit d’impôt concernant les travaux nécessaires à l’adaptation des logements pour les handicapés, et il a essuyé un refus ; il s’agissait d’une dépense fiscale à hauteur de 30 millions d’euros. Dans le cas présent, la dépense fiscale s’élève à 185 millions d’euros.
Le dispositif Madelin date de près d’une vingtaine d’années. Depuis lors est intervenue, précisément dans la loi TEPA, une disposition consistant à orienter une part de l’impôt de solidarité sur la fortune, qui est certes un impôt sur le patrimoine, vers le financement des PME.
Du reste, on y revient chaque année, car ce dispositif permet une importante optimisation fiscale et les intermédiaires se « sucrent » au passage. Il n’a plus de raison d’être et fait partie des dépenses fiscales qui méritent d’être regardées de près. Il n’y a donc pas lieu de le prolonger.
En acceptant une dépense fiscale de 185 millions d’euros, alors que vous avez adopté tout à l’heure l’amendement de M. le rapporteur général qui vise à fiscaliser une partie des indemnités du travail, pour 135 millions d’euros, vous faites clairement une lecture sélective des dépenses fiscales. On ne peut comparer l’indemnité journalière pour accident du travail à une niche fiscale !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Le droit existant prévoit que le dispositif Madelin est applicable jusqu’à la fin de l’année 2010. Faut-il, comme le prévoit l’article 45 quinquies, le prolonger dès maintenant jusqu’au 31 décembre 2012 ? La commission, soucieuse de maintenir de bonnes relations avec l’Assemblée nationale, a exprimé un avis plutôt défavorable, mais, je l’avoue, rapide à l’encontre de votre amendement, ma chère collègue.
Cela étant, faut-il décider, un an à l’avance, la reconduction du régime ?
Mme Nicole Bricq. Il faut l’évaluer !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce n’est pas évident !
Et puis, on peut dire qu’un régime proche de son terme est un régime plus incitatif. Si l’on pense que l’État a de grandes chances de ne pas renouveler le régime, on va se précipiter puisqu’il est avantageux. Ce sera peut-être profitable pour les entreprises, madame le ministre. Cet argument n’a pas été utilisé par Mme Bricq.
Mme Nicole Bricq. Mais il est bon !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. À l’expérience, c’est un argument qui fonctionne.
Pourquoi reconduire le dispositif dès cette année ? Après tout, les investisseurs verront bien s’il est prorogé ou non !
J’ai de la peine à comprendre ces lois de finances où l’on prend des mesures qui seront appliquées dans un autre contexte. Que seront les finances publiques dans un an ? Serons-nous sur le chemin de la convergence ? Quel sera le déficit proposé pour l’année 2011 ? Nous rapprocherons-nous des 3 % ? De tout cela, il est assez difficile de préjuger.
Nos collègues députés, dont je partage la vision et notamment celle de Nicolas Forissier, nous rappellent que ce régime est utile au renforcement des fonds propres des petites et moyennes entreprises. C’est incontestable ! Mais faut-il pour autant anticiper ? Après tout, à chaque jour suffit sa peine !
Par conséquent, madame la ministre, après ces quelques considérations dont j’ai conscience qu’elles sont un peu contradictoires, je me tourne vers vous pour connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement avait donné un avis favorable à cette proposition à l’Assemblée nationale et, bien entendu, il maintient son avis, tout simplement parce que l’argument invoqué par M. Forissier correspond bien à la réalité économique : les entreprises, on ne cesse de le répéter, ont besoin d’un renforcement de leurs fonds propres.
Un certain nombre de canaux sont utilisés pour renforcer les fonds propres des entreprises, en particulier des PME. Or, pour ces dernières, la mesure représente environ 1 milliard d’euros de fonds propres supplémentaires, c’est-à-dire à peu près autant que ce que la mesure « ISF-PME » leur a rapporté.
Il me paraît important de prolonger le dispositif, car cela permet à chacun d’anticiper et de vérifier auprès des apporteurs de fonds, qui sont généralement les mêmes dans les PME du fait de la relation de confiance qui s’instaure, qu’il s’agisse du dispositif « Madelin » ou de la mesure « ISF-PME », que la consolidation des fonds propres se poursuit.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est favorable à cette extension dès maintenant.
M. le président. L'amendement n° II-106, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les dispositions de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts sont abrogées.
La parole est à M. Thierry Foucaud
M. Thierry Foucaud. Comme ma collègue Nicole Bricq, je pense que la dépense fiscale prend parfois un caractère surprenant. L’article 199 terdecies-0A du code général des impôts, est l’un des exemples les plus intéressants d’une dépense fiscale importante, puisque supérieure à 300 millions d’euros, dont l’efficacité économique reste à prouver. En effet, l’effet levier des investissements visés est sans doute assez faible.
Bien sûr, nous ne mettons pas en cause les épargnants qui participent aux fonds d’investissement de proximité et aux fonds commun de placement dans l’innovation, structures qui sont concernées par le dispositif.
Mais force est de constater que le coût pour les finances publiques de ce faible dispositif, qui représente un peu moins d’un milliard d’euros de ressources pour nos PME, et au mieux 8 à 10 milliards d’euros en levier, équivaut à celui qui est constaté pour la collecte des livrets défiscalisés, qui drainent, pour leur part, plus de 260 milliards d’euros de crédits à l’économie.
Une solution plus efficace à tous points de vue serait sans doute de concevoir, s’agissant de la collecte du livret de développement durable, une ligne prioritaire destinée à financer les entreprises cibles des fonds d’investissement de proximité et les FCPI.
Au demeurant, cela ne serait pas impossible au moment où la banalisation du livret A a conduit à mettre en œuvre une centralisation plus importante des dépôts, tant du livret A que du livret de développement durable.
Cette solution, nettement moins coûteuse que la disposition que nous proposons de supprimer, serait la bienvenue dans un contexte économique marqué par la raréfaction des crédits aux PME.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cette fois-ci, je n’ai pas d’états d’âme. Il n’est pas souhaitable, surtout sans examen, de supprimer une mesure si utile du jour au lendemain.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 45 quinquies.
(L'article 45 quinquies est adopté.)
Articles additionnels après l'article 45 quinquies
M. le président. L'amendement n° II-271, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 45 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, il est inséré un 2 ter ainsi rédigé :
« 2 ter. À compter du 1er janvier 2011, pour l'application du 1 et du 2 du présent article, les charges d'intérêts liées à l'émission d'emprunts par une société sont admises, en déduction pour le calcul du bénéfice net, dans la limite de 50 % du montant émis et de 50 % du bénéfice avant charges d'intérêts liées à l'émission d'emprunts. »
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Le système fiscal actuel encourage les entreprises à la sous-capitalisation en leur permettant de déduire les intérêts d’emprunt de leur bénéfice imposable, sans plafonnement. Pour bénéficier d’une telle déduction, l’acquisition d’une société par de la dette remboursable est financée par les résultats futurs de la société acquise au travers des distributions de dividendes, ce qui limite les capitaux propres.
Avec un tel système, un entrepreneur a tout intérêt à ne pas réinvestir ses bénéfices et à s’endetter afin de réduire l’assiette de son impôt. Ce phénomène a été mis en évidence depuis longtemps, dans les années quatre-vingt.
Plus récemment, le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires d’octobre 2009 a montré que les solutions proposées jusqu’à maintenant n’étaient pas suffisantes pour renforcer les fonds propres des entreprises. Les réductions fiscales mises en place pour inciter les particuliers à investir dans les PME n’ont pas permis à celles-ci d’augmenter leurs fonds propres. L’afflux de capitaux a davantage bénéficié aux cessions et aux successions qu’aux créations d’entreprises ou à leur développement.
L’amendement que nous présentons vise donc à limiter les avantages d’un financement lié à l’emprunt à compter de 2011 – il faut en effet laisser le temps nécessaire aux agents économiques de s’adapter – en plafonnant à 50 %, d’une part, la déductibilité des sommes empruntées et, d’autre part, la réduction d’assiette liée à cet emprunt.
En résumé, pour bénéficier de la déduction des intérêts d’emprunt du bénéfice imposable sans plafonnement, cet amendement prévoit que l’acquisition d’une société par de la dette remboursable ne soit plus financée par les résultats futurs de la société acquise au travers de distribution de dividendes et qu’un mécanisme permettant de renforcer les capitaux propres lui soit préféré. Il s’agit de rendre moins intéressant l’emprunt et la déductibilité des intérêts qui y est attachée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission est un peu perturbée : tantôt il faut interrompre le régime des investissements en fonds propres, tantôt il faut éviter de trop avantager fiscalement le financement par l’emprunt.
Mme Nicole Bricq. Mais ce régime est pervers !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Dans ces conditions, que doit faire la malheureuse entreprise ? Doit-elle se tourner vers les investissements ou vers l’emprunt ?
M. Claude Haut. Elle n’est pas malheureuse !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Tout dépend lesquelles, mon cher collègue ! Après tout, il vaudrait peut-être mieux que les taux de fiscalité soient beaucoup plus bas et que tous ces régimes particuliers disparaissent.
Je reviens à la question posée par Mme Bricq, qui est fort intéressante.
Si ma mémoire est bonne, madame la ministre, ce sujet a dû être examiné, parmi d’autres, dans le cadre de la revue générale des prélèvements obligatoires, dont vous avez été chargée.
La déductibilité des intérêts versés peut créer un biais dans les modes de financement et renforcer la tendance, très fréquente en France, notamment dans les petites ou moyennes entreprises, de se tourner davantage vers la banque pour trouver un bon endettement plutôt que d’ouvrir son capital et donc de partager son pouvoir avec d’autres. Ce régime n’est-il pas légèrement pervers ?
En outre, dans un contexte de concurrence fiscale accrue, la déductibilité telle qu’elle est pratiquée incite effectivement les multinationales à sous-capitaliser leurs filiales dans les pays où le taux d’impôt sur les sociétés est le plus élevé dans la mesure où les charges d’intérêt viendront en déduction de leurs résultats imposables.
On peut imaginer que des politiques d’allocation des fonds propres dans les groupes soient influencées par cette réalité. À telle enseigne que certains États ont modifié leur législation. Si je ne me trompe, l’Allemagne a mis en place, en 2008, simultanément à la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés, un plafonnement à hauteur de 30 % de la déductibilité des charges d’intérêt net des produits au-delà d’un montant de 1 million d’euros.
À ce stade, la commission n’a pas de conviction bien établie. Elle souhaiterait donc vous entendre, madame la ministre, tout en considérant que la question posée est utile et qu’elle pourrait alimenter des réflexions ultérieures.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Madame Bricq, la question que vous posez mérite en effet une réflexion approfondie. En attendant, je ne suis pas favorable à votre amendement pour deux raisons.
La première est que notre droit fiscal dispose déjà d’un certain nombre d’armes anti-abus. Ainsi, le projet de loi de finances pour 2007, applicable à compter du 1er janvier 2008, a créé un dispositif appelé « anti sous-capitalisation », qui limite la déductibilité des charges financières supportées par les entreprises sous-capitalisées. En outre, l’amendement « Charasse », aménagé en 2005 et 2006, limite également cette déductibilité en cas d’achat par l’entreprise de ses propres titres et dans certaines conditions.
Comme vous le voyez, il existe déjà des outils permettant d’éviter à une entreprise de s’endetter excessivement au détriment du renforcement de ses fonds propres.
La seconde raison est que votre amendement fait référence à un plafonnement de « 50 % du montant émis ». Je suppose que votre intention était plutôt de viser « 50 % des intérêts ». L’amendement tel qu’il est rédigé ne me paraît donc pas correspondre exactement à l’objectif que vous poursuivez.
Je suis tout à fait ouverte à l’idée d’un débat pour approfondir la question, monsieur le rapporteur général, à la lumière de notre souhait, à savoir privilégier le renforcement des fonds propres au détriment d’un endettement parfois excessif.
Quoi qu’il en soit, cette année, les entreprises ont fait beaucoup moins appel à l’endettement et davantage au marché obligataire, y compris les petites et moyennes entreprises pour lesquelles l’accès au marché Alternext en particulier a constitué une bonne alternative. Il en est bien souvent résulté un renforcement de leurs fonds propres.
M. le président. Madame Bricq, l’amendement est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. Mme la ministre s’oppose à cet amendement, notamment parce qu’il ne lui paraît pas techniquement parfait. Je veux bien en convenir, car mon objectif était avant tout de souligner un problème et de tenter d’y voir clair. C’est en effet notre rôle de parlementaire d’évaluer les dispositifs et de les contrôler.
Cela étant, j’accepterai de retirer cet amendement si j’ai l’assurance que nous travaillerons ensemble sur ce sujet au sein de la commission des finances.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je confirme à Mme Bricq que ce sujet pourrait en effet s’intégrer dans notre programme de travail des prochains mois.
M. le président. Que décidez-vous finalement, madame Bricq ?
Mme Nicole Bricq. Je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-271 est retiré.
L'amendement n° II-272, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 45 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport d'évaluation du crédit d'impôt recherche est transmis au Parlement avant le 30 juin 2010.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Madame la ministre, quand vous êtes arrivée aux responsabilités, vous avez engagé une réforme en profondeur du crédit d’impôt recherche, mécanisme qui existait depuis fort longtemps, en expliquant que c’était essentiel.
Notre collègue Christian Gaudin, rapporteur spécial de la commission des finances, nous a présenté un rapport d’étape sur le crédit d’impôt recherche. Malheureusement, en raison du secret fiscal, il n’a pas eu accès à l’identité des bénéficiaires et a dû se contenter d’interroger quelques entreprises et administrations. Il nous a également indiqué que la mesure de remboursement anticipé du crédit d’impôt recherche inscrite dans le plan de relance brouillait un peu la vision de la situation.
Nous lisons régulièrement dans des journaux économiques sérieux que le crédit d’impôt recherche bénéficierait davantage aux grandes entreprises de services ayant des filiales industrielles. Cette mesure coûte quand même 2 milliards d’euros environ. M. le rapporteur général a même estimé que, en période de croisière, elle reviendrait à 4 milliards d’euros. Or est-ce que le crédit d’impôt recherche bénéficie vraiment à l’industrie ? Rien ne nous permet de le dire aujourd’hui. À quelles industries ? On ne le sait pas.
Même si nous avons certainement besoin de recul, nous devons avoir une vision claire de ce dispositif et savoir à qui il profite. Voilà pourquoi un rapport d’évaluation doit être remis au Parlement. Au reste, Mme Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, s’est engagée à rédiger tous les ans un rapport concernant le crédit d’impôt recherche.
Ce rapport nous sera certainement bien utile, même s’il ne doit pas nous empêcher de mener notre mission de contrôle et d’évaluation, comme l’a fait notre collègue Christian Gaudin.
Il faudra aussi que le débat sorte du seul cadre et la commission des finances et devienne public.
Telles sont les raisons pour lesquelles j’ai déposé cet amendement au nom du groupe socialiste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission est généralement favorable aux rapports. Notre excellent collègue Christian Gaudin a fait de son mieux en nous apportant des éléments d’appréciation tout à fait utiles dans son rapport d’étape.
Le rapport que préconise le présent amendement pourra certainement nous apporter des informations complémentaires. J’espère que nous aurons la capacité de l’absorber.
La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement cherche non pas à se dérober, mais à faire œuvre utile. Madame Bricq, je vous propose de rectifier votre amendement en reportant la date butoir au 31 décembre 2010. En effet, dans le courant du mois de mai 2010, nous ne disposerons pas de tous les éléments chiffrés relatifs au crédit d’impôt recherche en 2008. La date que je vous suggère me semble plus pertinente.
Par ailleurs, je vous indique que, selon l’étude du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, on trouve des groupes industriels derrière pratiquement toutes les holdings. Seuls 3 % de l’ensemble des sommes consacrées au crédit d’impôt recherche correspondent à des groupes financiers purs.
Cela étant, je suis tout à fait d’accord avec votre proposition, madame la sénatrice. Le crédit d’impôt recherche est une mesure déterminante et il faut absolument en évaluer l’efficacité. Mais nous ne devons pas introduire de l’insécurité ou de l’instabilité dans ce mécanisme, dont l’une des vertus a été de permettre aux entreprises de s’inscrire dans le temps et d’engager des recherches sur le long terme en ayant la certitude d’être accompagnées.
J’émets donc un avis favorable sur cet amendement, sous réserve de la modification de la date d’échéance.
M. le président. Madame Bricq, acceptez-vous de modifier votre amendement dans le sens suggéré par Mme la ministre ?
Mme Nicole Bricq. La date du 31 décembre n’est pas très sérieuse !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Vous préféreriez le 24 décembre ?
Mme Nicole Bricq. J’ai bien compris l’impératif technique et je suis d’accord pour modifier la date figurant dans mon amendement. Mais peut-être pourrions-nous décider que ce rapport d’évaluation sera transmis au Parlement avant l’adoption du projet de loi de finances pour 2011, qui est en général voté définitivement vers le 20 décembre ?
M. le président. Vous devez fixer une date, madame Bricq !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Le 31 octobre 2010 ?...
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° II-272 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, et qui est ainsi libellé :
Après l'article 45 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport d'évaluation du crédit d'impôt recherche est transmis au Parlement avant le 31 octobre 2010.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je formulerai deux souhaits auprès de Mme la ministre.
Tout d’abord, concernant le crédit d’impôt recherche, je souhaiterais que l’on s’assure que les dépenses engagées par les entreprises correspondent bien à des recherches conduites sur le territoire national. Certains groupes ont en effet beaucoup externalisé la recherche-développement. J’aimerais être sûr que ces externalisations ne s’opèrent pas vers l’Europe centrale ou d’autres pays.
Ensuite, développer la recherche, c’est formidable, mais je voudrais être sûr qu’il y a un bon enchaînement entre la recherche et les processus industriels. De nombreux travaux de recherche sont très coûteux en termes de crédit d’impôt recherche et, lorsqu’il s’agit de passer à l’étape industrielle et à la production, les entreprises se rendent d’emblée en Europe centrale ou en Asie.
M. Adrien Gouteyron. Vaste sujet !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 45 quinquies.
Article 45 sexies
I. – Le b du 1 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts est complété par les mots : «, à l’exception du recours à une entreprise pour des activités de soutien scolaire à domicile ou de cours à domicile ».
II. – Le I entre en vigueur à compter du 1er janvier 2011.
M. le président. L'amendement n° II-194 rectifié quinquies, présenté par Mme Procaccia, MM. Carle et Cambon, Mmes Sittler, Rozier, Mélot et Bout, MM. Houel et Dériot, Mme Desmarescaux, M. Gournac, Mmes Hermange, Henneron et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Madame la ministre, une fois n’est pas coutume, je propose la suppression d’un article.
À l’Assemblée nationale, Lionel Tardy a fait voter un amendement visant à supprimer la possibilité de déduire de l’impôt sur le revenu le recours à une entreprise pour des activités de soutien scolaire à domicile ou de cours à domicile.
Je fais partie de ces parents qui ont eu recours à des cours à domicile pour leurs enfants ; ils ont réussi à avoir leur baccalauréat avec mention et sont aujourd'hui en faculté.
Au total, vingt et un secteurs d’activité sont concernés par cette déductibilité fiscale. Pourquoi supprime-t-on celle-ci uniquement pour les cours de soutien à domicile ? Cela signifie que l’on peut dépenser 12 000 euros pour avoir recours aux services d’une femme de ménage, d’un jardinier ou d’un coach sportif – j’ai découvert, à ma grande surprise, que le coach sportif était un emploi à domicile, même si l’on va faire du jogging dans les bois (Sourires.) – et bénéficier d’une déduction fiscale, mais que cette dernière n’est pas possible lorsqu’il s’agit de donner des cours à domicile à ses enfants pour leur permettre de se remettre à niveau ou de réussir.
Le secteur du soutien scolaire compte 1 200 entreprises, 2 000 salariés à plein-temps, 50 000 intervenants, soit 5 000 équivalents temps plein, les étudiants pouvant donner des cours à domicile.
La commission des finances a déposé un amendement tendant à plafonner la part des dépenses supportées pour des activités de soutien scolaire à domicile ou de cours à domicile. Mais pourquoi plafonner les dépenses de ce seul secteur et non celles de tous les secteurs ? Ce que je remets en cause, c’est non pas le plafonnement, mais le fait qu’il ne s’applique qu’à un seul secteur.
En outre, en tant que membre de la commission des affaires sociales et travaillant beaucoup sur l’emploi, il me semble que cette mesure est en contradiction avec le plan emploi qui a été lancé par le Gouvernement, notamment par Laurent Wauquiez, en mars 2009.
Mon collègue Jean-Claude Carle partage mon point de vue et suggère la constitution, si nécessaire, d’une mission parlementaire chargée de procéder à une évaluation dans ce secteur.
Cela étant, je considère que cette mesure ne peut pas s’appliquer à un seul secteur. Je propose donc de supprimer l’article 45 sexies.
M. le président. L'amendement n° II-164 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
I. - Le premier alinéa du 3 de l'article 199 sexdecies du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans la limite précitée, les dépenses supportées pour des activités de soutien scolaire à domicile ou de cours à domicile, sont plafonnées à 3.000 euros ».
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-194 rectifié quinquies.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La mesure que notre collègue député Lionel Tardy a fait voter est, dans son principe, vertueuse puisqu’elle vise à revenir sur un avantage fiscal. Il est rare qu’un parlementaire ose demander la réduction d’un avantage fiscal ! Il m’a donc semblé qu’il ne fallait pas décourager de telles initiatives, quel qu’en soit l’objet.
Toutefois, en y regardant de plus près, j’ai eu le sentiment, partagé par la commission, que l’article adopté par l’Assemblée nationale n’était pas acceptable, en particulier parce qu’il introduit une discrimination pour un même service, selon la façon dont il est effectué. Il prévoit en effet que la totalité de la réduction d’impôt existante est maintenue pour les associations et les organismes sans but lucratif. En revanche, il sanctionne – si tant est qu’être traité selon le droit commun de l’impôt soit une sanction, mais c’est un autre débat – les entreprises de ce secteur. Cela ne paraît pas correct puisqu’il s’agit d’un même service. À mon sens, le principe d’égalité devant l’impôt ne permet pas une telle discrimination.
Alors que nous nous efforçons de favoriser le travail à domicile dans ses différentes spécialités, pourquoi le soutien scolaire effectué par des entreprises ferait-il l’objet d’une discrimination ? De tels services se développent et c’est une très bonne chose pour l’emploi.
Après réflexion, la commission a pensé qu’il ne fallait pas traiter de manière différenciée le soutien scolaire selon la nature juridique des organismes qui l’apportent ou même lorsque la prestation est assurée directement à domicile par un étudiant, un enseignant ou une personne quelconque directement rémunérée, par exemple, par un chèque emploi service universel.
Ensuite, nous nous sommes interrogés sur le traitement qu’il fallait réserver à ce secteur. Nous vous proposons, par l’amendement n° II-164 rectifié, d’instaurer un sous-plafond de 3 000 euros, qui interviendrait dans la limite plus globale de 12 000 euros fixée pour l’ensemble des dépenses relatives à l’emploi d’un salarié à domicile. Ce plafond correspond à quatre heures de soutien scolaire par semaine pendant toute l’année scolaire, ce qui est substantiel.
Mme Catherine Procaccia. Et si l’on a plusieurs enfants ayant besoin de soutien scolaire ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il ne faut pas en vouloir à la commission des finances, mais à chaque fois qu’elle examine un sujet, elle essaie de limiter la dépense publique, qu’il s’agisse de la dépense fiscale ou de la dépense budgétaire. Si nous ne le faisons pas, personne ne le fera ! Je doute que de nombreuses bonnes volontés se manifestent spontanément en ce sens…
Tel est le dispositif que nous vous proposons. Il n’est certainement pas idéal, mais la solution de l’Assemblée nationale ne nous a pas semblé acceptable. Quant à la proposition de Mme Procaccia de revenir au statu quo complet, nous pouvons la comprendre, mais ce n’est pas en maintenant toutes les niches et avantages fiscaux que nous réduirons le déficit budgétaire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est très favorable à l’amendement présenté par Mme Procaccia, et ce pour deux raisons.
D’abord, il ne semble pas justifié d’exclure de l’avantage fiscal une prestation en raison du seul mode d’intervention : il n’y a pas de raison que le service ne puisse pas bénéficier du dispositif parce qu’il est rendu par le salarié d’une société de prestation de services de cours à domicile plutôt que par une personne indépendante.
Ensuite, comme Mme Procaccia l’a très justement fait remarquer, Laurent Wauquiez et moi essayons par tous les moyens de développer les activités de services à la personne. À ce titre, nous avons étendu la liste des activités entrant dans le champ d’application de la mesure en mars 2009, afin d’y inclure, notamment, les prestations de service à domicile dans le domaine informatique. Il ne nous paraîtrait donc pas logique, d’un côté, de restreindre les activités concernées et, de l’autre, de les étendre.
Pour ces raisons, la solution proposée par Mme Procaccia nous paraît plus carrée que le sous-plafonnement envisagé par la commission. Je rappelle que le plafonnement existant est extrêmement propice à l’emploi, en particulier dans le secteur des cours à domicile, car il permet à de jeunes étudiants d’être rémunérés au titre des services qu’ils rendent tout en suivant leurs études.
M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour explication de vote.
M. Albéric de Montgolfier. Comme l’a indiqué M. le rapporteur général, nous avons débattu de cette question en commission des finances. Nous partageons tous la même préoccupation concernant les niches fiscales. Néanmoins, je m’interroge sur l’utilité d’instaurer un sous-plafond spécifique de 3 000 euros à l’intérieur du plafond de 12 000 euros pour les cours à domicile, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, un tel sous-plafond est peu clair.
Ensuite, pourquoi le fait de prendre des cours de soutien scolaire à domicile serait-il moins favorisé que celui d’avoir une femme de ménage ou un jardinier ? C’est une question de principe !
En outre, ce dispositif est-il même applicable ? C’est la vraie question ! Je rappelle que les services à la personne relèvent d’un régime déclaratif : le contribuable se borne à indiquer le nom de la personne et le montant du salaire. Dès lors, pourra-t-on contrôler que le salarié donne effectivement des cours à domicile et qu’il ne s’agit pas d’une femme de ménage ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce n’est pas faux…
M. Albéric de Montgolfier. Dans la pratique, ce dispositif paraît très difficilement applicable.
On ne peut être que favorable à une mesure qui encourage le travail à domicile, mais également le travail déclaré. Je soutiens donc l’amendement de Mme Procaccia, mais je ne suis pas favorable à l’instauration d’un sous-plafond, pour des raisons de clarté et, surtout, d’efficacité.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Au groupe socialiste, nous estimons que les députés ont bien agi en insérant un tel article dans le projet de loi de finances. Peut-être M. Lionel Tardy a-t-il obéi à un mouvement d’humeur, mais celui-ci a, semble-t-il, été suivi, puisque le dispositif a été voté par tous les groupes de l’Assemblée nationale.
De mon point de vue, une telle décision est justifiée. En effet, le 16 septembre dernier, l’une des plus importantes sociétés dispensant du soutien scolaire privé sous forme de prestations payantes en France a lancé une campagne de publicité dont le slogan était : « Devenez bachelier ou soyez remboursé » ! Sincèrement, quand on voit que l’argent du contribuable, donc de la nation, peut servir à financer ce type de publicités, on comprend pourquoi les députés ont inséré un tel article dans le projet de loi de finances !
La mesure de soutien scolaire en question figurait dans le plan de cohésion sociale de M. Borloo. Il faudra, à un moment donné, que nous examinions de manière attentive l’ensemble des dispositions en faveur des emplois à domicile.
Les sociétés concernées demandent environ 3 000 euros par an ; je ne sais pas si vous vous rendez compte de ce que cela représente dans un budget. Ce ne sont évidemment pas les familles modestes qui peuvent dépenser près de 300 euros par mois, voire plus si on calcule en fonction de l’année scolaire.
En outre, selon les calculs qui ont été effectués par une chercheuse – peut-être ne disposait-elle pas des bons chiffres – le coût pour l’État d’un tel avantage fiscal s’élèverait à 300 millions d’euros.
L’entreprise qui domine le marché du soutien scolaire à domicile a tout de même réalisé quelques millions d’euros de bénéfices. Et c’est elle qui a lancé la publicité dont je parlais tout à l’heure ! Du reste, interrogé sur le sujet, M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, s’est déclaré hostile à toute forme de marchandisation du baccalauréat. En l’occurrence, nous sommes bien dans la marchandisation d’un domaine qui devrait relever seulement de l’éducation nationale.
Au demeurant, quand on examine les choses de près, on constate que nombre d’actions sont menées au niveau local pour des cours de soutien scolaire gratuits ou modulés selon le revenu des familles. Ainsi, l’Association de la fondation étudiante pour la ville, l’AFEV, dispose d’un réseau de 7 500 étudiants bénévoles. Et la grande entreprise que j’évoquais tout à l’heure a également recours à des étudiants…
Par conséquent, je pense que la démarche de nos collègues députés était parfaitement fondée. Nous ne sommes donc pas favorables à la suppression de l’article 45 sexies et nous voterons contre l’amendement de Mme Procaccia.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce débat est tout à fait intéressant, car il nous permet de percevoir les conséquences de tels avantages fiscaux.
À la vérité, comme M. le rapporteur général l’a rappelé, la commission des finances a surtout voulu encourager l’initiative de nos collègues députés, qui allait dans le sens de la ferme volonté du Gouvernement de maîtriser la dépense fiscale.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cela vaut également pour les sénateurs !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. En effet, monsieur le rapporteur général !
Le mécanisme demeure malgré tout un peu compliqué et l’argumentation développée par M. de Montgolfier est tout à fait pertinente.
Madame la ministre, si nous adoptons un tel dispositif, il faudra prévoir des cases spéciales dans les déclarations de revenus. Au fond, nous nous rendrions coupables d’une complexification supplémentaire. Faisons donc attention !
Certes, on pourrait dire que la somme de 3 000 euros vaut pour tous les enfants. Mais, dans ce cas, la famille ayant de nombreux enfants susceptibles d’avoir besoin d’un soutien scolaire périphérique serait fortement défavorisée par rapport à la famille n’ayant qu’un seul enfant.
Monsieur le rapporteur général, peut-être ces différents arguments justifient-ils le retrait de l’amendement n° II–164 rectifié de la commission…
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je vous le concède, le dispositif que nous proposions, avec un sous-plafond de 3 000 euros, n’était évidemment pas la panacée. Mais nous tenions essentiellement à adresser un signal.
Il s’agissait de montrer une nouvelle fois que toute démarche de réduction des avantages fiscaux était très difficile à mettre en œuvre. Et pourtant, nous allons bien être obligés de nous livrer à ce type de démarches. C’est inéluctable ! Nous ne pouvons pas maintenir le système actuel, qui ronge les assiettes de tous les impôts pour satisfaire des besoins particuliers dans chaque domaine.
La seule bonne méthode pour y parvenir est de reconsidérer complètement – je dis bien « complètement » ! –nos différents impôts, en balayant la quasi-totalité des systèmes préférentiels, et d’abaisser les taux des impôts, ce qui serait un facteur de compétitivité, en laissant aux gens la liberté d’utiliser leur argent à leur guise. (M. Gérard Longuet applaudit.)
Cela étant, monsieur le président, je retire évidemment l’amendement n° II–164 rectifié. Un tel dispositif complexifierait effectivement davantage le système et il serait très difficile de s’assurer de la véracité des déclarations.
Il n’en reste pas moins, mes chers collègues, que toutes les initiatives allant dans le sens d’une réduction des avantages fiscaux catégoriels seront les bienvenues. La commission a simplement voulu montrer à notre excellent collègue Lionel Tardy qu’elle avait pris très au sérieux son initiative, car celle-ci va dans le bon sens.
M. le président. L'amendement n° II-164 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° II-194 rectifié quinquies.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 45 sexies est supprimé.
Mme Nicole Bricq. Les lobbies ont bien fait leur travail ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Mme Catherine Procaccia. Mais non ! Pas du tout !
M. le président. L'amendement n° II-204 rectifié, présenté par MM. Fourcade et Longuet, est ainsi libellé :
Après l'article 45 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 199 duovicies du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - 1° Les contribuables domiciliés fiscalement en France bénéficient d'une réduction d'impôt sur le revenu égale à 66 % du montant des cotisations versées aux associations de défense des consommateurs visées à l'article L. 411-1 du code de la consommation, dans la limite d'un plafond annuel de 100 €.
« 2° Le bénéfice de la réduction d'impôt est subordonné à la condition que soit joint à la déclaration des revenus un reçu de l'association de défense des consommateurs conforme à un modèle fixé par un arrêté, mentionnant le montant et la date de la cotisation, ainsi que l'identification des bénéficiaires.
« Par dérogation aux dispositions du 2°, les contribuables qui transmettent la déclaration de leurs revenus par voie électronique, en application de l'article 1649 quater B ter, sont dispensés de joindre à cette déclaration les reçus délivrés par les syndicats. La réduction d'impôt accordée est remise en cause lorsque ces contribuables ne peuvent pas justifier du versement des cotisations par la présentation des reçus mentionnés au cinquième alinéa. »
II. - Les dispositions du I s'appliquent à compter de l'imposition des revenus de 2010.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et du II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Cet amendement est porté par notre collègue Jean-Pierre Fourcade. Il s’agit de rappeler que les associations de défense des consommateurs effectuent un travail extraordinaire et permettent de contribuer à assainir l’économie de marché en fixant des règles. En outre, indépendamment d’une éventuelle extension de leurs droits, qui se produira peut-être un jour, les associations ont la possibilité d’ester en justice pour défendre les intérêts collectifs des consommateurs.
L’objet de cet amendement est – hélas, monsieur le rapporteur général ! (Sourires.) – de permettre aux associations de bénéficier d’un avantage fiscal dont disposent les formations politiques et les organisations syndicales. En effet, mon collègue Jean-Pierre Fourcade demande d’accorder une réduction d’impôts de 66 % aux particuliers qui adhéreraient à de telles associations, et ce dans la limite très raisonnable d’un plafond annuel de 100 euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. En attendant le grand soir (Sourires), nous pouvons vivre une petite soirée et éviter de créer des dispositifs exceptionnels supplémentaires. C’est le point de vue constant de la commission. D’ailleurs, M. Longuet le connaît fort bien et s’y associe souvent.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement a le même avis que la commission.
En outre, un grand débat sur le rôle des consommateurs, leur implication dans la vie de la société civile et leurs rapports avec la distribution a actuellement lieu, sous l’autorité de M. Hervé Novelli. Je pense que la question du financement de telles associations sera évoquée dans ce cadre-là.
Sous le bénéfice de ces observations, je sollicite le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Longuet, l'amendement n° II-204 est-il maintenu ?
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, fort des ouvertures très claires qui viennent d’être annoncées par Mme la ministre, je ne crois pas trahir le sentiment de M. Fourcade en acceptant de retirer l’amendement, sous réserve d’un éventuel rendez-vous lorsque les dispositions auront été présentées si, par mésaventure, elles n’étaient pas satisfaisantes pour les associations, ce que je ne puis imaginer.
M. le président. L'amendement n° II-204 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-156 rectifié bis, présenté par MM. Gouteyron, Bécot, Bernard-Reymond et Billard, Mme Bout, MM. Braye, Buffet, Cazalet, César et Dallier, Mme Debré, MM. Doligé, Doublet, Dulait, A. Dupont, Duvernois, Faure, Ferrand, Fourcade, B. Fournier, Frassa et Gaillard, Mme G. Gautier, M. Gélard, Mmes N. Goulet et Henneron, MM. Houel, Houpert, Lardeux, Laurent, Le Grand, Lefèvre, de Legge, Leleux, Leroy, du Luart, Merceron et Milon, Mmes Morin-Desailly et Papon, MM. Pierre, Pintat, Portelli et Revet et Mmes Rozier, Sittler et Troendle, est ainsi libellé :
Après l'article 45 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 1649 quater B quater du code général des impôts, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre... :
« Mise sous condition de l'avantage fiscal attaché aux dons
« Art.... - Lorsque la Cour des comptes ne peut attester, à l'issue du contrôle des comptes d'un organisme visé à l'article L. 111-8 du code des juridictions financières, de la conformité des dépenses engagées aux objectifs poursuivis par l'appel à la générosité publique ou de la conformité des dépenses financées par les dons ouvrant droit à un avantage fiscal aux objectifs de l'organisme, les dons, legs ou versements à cet organisme postérieurs à la date de publication des observations définitives ne peuvent ouvrir droit aux dispositions des articles 200, 238 bis, 795 et 885-0 V bis A du code général des impôts.
« Un décret en Conseil d'État fixe la forme que prend l'attestation mentionnée au premier alinéa ainsi que les conditions dans lesquelles elle est délivrée et révisée. Il précise également les conditions dans lesquelles elle est portée à la connaissance du public. »
II. - Les dispositions du I s'appliquent aux dons réalisés à compter du 1er janvier 2010.
La parole est à M. Adrien Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron. En l’occurrence, ce n’est pas une niche que je vais proposer. (Sourires.)
Cet amendement, qui est cosigné par un nombre certain de collègues, est issu d’une proposition de loi que j’avais déposée et qui avait également été cosignée par nombre de nos collègues parmi les plus éminents ; je ne les nommerai pas pour ne pas les gêner. (Sourires.) Par conséquent, je reprends dans cet amendement certaines des dispositions de la proposition de loi, qui n’a pas été débattue en séance.
J’ai pris l’initiative de déposer cet amendement, car je crois qu’il est urgent d’agir. Nous constatons actuellement un grand trouble chez nos compatriotes.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est le moins que l’on puisse dire !
M. Adrien Gouteyron. Les Français sont enclins à la générosité et ils donnent volontiers. Selon les informations dont je dispose, plus de 5 millions de foyers fiscaux donnent aux associations faisant appel à la générosité publique.
Comme vous le savez, de tels dons font l’objet d’avantages fiscaux importants. D’après les chiffres qui m’ont été communiqués, les réductions d’impôts au titre des dons aux associations représenteraient plus de 1,4 milliard d’euros en 2010, dont 960 millions d’euros au titre de l’impôt sur le revenu, 340 millions d’euros au titre de l’impôt sur les sociétés et 50 millions d’euros au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune. C’est donc considérable !
Comme j’ai eu l’occasion de l’indiquer, il est important, pour ne pas dire essentiel – cela correspond à une aspiration fondamentale dans notre société –, de sécuriser les dons et de tranquilliser les donateurs. Je pense que toutes les associations sérieuses y ont le plus grand intérêt.
L’objet de cet amendement est de mieux informer les éventuels donateurs en se fondant sur les observations de la Cour des comptes et, le cas échéant, de sanctionner les errements ou irrégularités constatés. Nous avons tous des précédents en mémoire : une association dont je tairai le nom a récemment défrayé la chronique…
Je fais partie de ceux qui ont été indignés par les attaques portées contre le Téléthon. Je crois qu’il n’est pas du tout sain d’opposer une cause à une autre.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Bien sûr !
M. Adrien Gouteyron. C’est dans ce contexte qu’intervient la discussion de cet amendement, mais mon initiative était antérieure.
Bien entendu, il n’est pas question de stigmatiser telle ou telle association, et surtout pas les associations locales, qui ont besoin d’être aidées. Le dispositif proposé concerne les grandes associations nationales qui font appel à la générosité publique. Je propose que soient publiées les observations de la Cour des comptes et, lorsque cette dernière émet des réserves importantes sur l’utilisation des dons, de retirer l’avantage de la réduction fiscale aux associations concernées.
Ma proposition n’a rien de démagogique.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est vrai !
M. Adrien Gouteyron. C’est le moins qu’on puisse dire !
Un tel dispositif nécessite de nombreuses explications, mais je pense que les Français sont capables de comprendre si on leur explique bien. Il s’agit non pas de supprimer la réduction d’impôts, mais tout simplement de sécuriser les dons et de s’assurer qu’ils seront bien utilisés dans le sens souhaité par les donateurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Naturellement, la commission souscrit à cette initiative, et ce pour une raison simple : il n’est en aucun cas acceptable que l’État encourage par une dépense fiscale, qui est identique à une dépense budgétaire, des associations qui ne respecteraient pas le but d’intérêt général qu’elles se sont fixé. C’est un principe absolu !
Divers régimes, à un titre ou à un autre, ont été créés pour favoriser les dons, legs ou versements à des œuvres d’intérêt général, et différentes réductions d’impôts existent au titre de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt de solidarité sur la fortune, des droits de mutation.
La moindre des choses est que la confiance et la générosité de nos concitoyens ne soient pas trahies. Madame le ministre, l’État est responsable et doit faire respecter ce principe. Toute sa vigilance doit être dirigée dans ce sens.
Dans cet amendement, Adrien Gouteyron reprend une proposition de loi qu’il a déposée il y a un certain temps et que les mystères de la confection de l’ordre du jour, même depuis la révision constitutionnelle, n’ont pas permis de faire émerger pour le moment. Notre collègue utilise donc à bon escient le projet de loi de finances pour nous proposer ce débat.
Il souhaite que les prises de position de la Cour des comptes aient des conséquences concrètes si cette dernière émet des doutes, des jugements ou des appréciations défavorables sur la conformité des dépenses engagées. Il en résulterait, pour l’avenir et non pour le passé, bien sûr, la non-déductibilité des dons et l’inapplicabilité des différents régimes fiscaux favorables qui existent en la matière.
Cette initiative me semble très judicieuse.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Gouteyron, je suis extrêmement sensible à votre proposition, que je trouve également particulièrement judicieuse. Pour autant, je souhaite vous faire une suggestion : travaillons ensemble à la reformulation de cet amendement et introduisons dans le projet de loi de finances rectificative l’obligation d’information que vous appelez de vos vœux.
Ce qui me gêne un peu dans votre amendement, c’est qu’il sanctionne, finalement, le donateur, c'est-à-dire celui fait œuvre de générosité et pour le compte duquel le crédit était prévu. Or seul l’organisme collecteur se rend coupable d’abus et de trahison.
Je vous propose de chercher ensemble une nouvelle formulation, afin d’aboutir à un texte qui sanctuarise l’obligation d’information, sanctionne le défaut d’information et tire toutes les conséquences de la mauvaise gestion dont s’est rendu coupable le collecteur.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J’ai signé la proposition de loi d’Adrien Gouteyron, …
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Moi aussi !
M. Jean Arthuis, rapporteur de la commission des finances. … car elle nous indique le cap à tenir. Néanmoins, nous sommes en train de faire en séance un travail de commission !
Toutes les associations sont tenues d’obtenir la certification de leurs comptes par un commissaire aux comptes. Mais si le commissaire aux comptes ne certifie pas la sincérité de ceux-ci, aucune sanction n’est prévue. Les donateurs ne sont pas non plus informés.
Dans la mesure où la Cour des comptes ne peut pas effectuer des contrôles chaque année, il faut prévoir un dispositif formalisant l’obligation d’information en l’absence de certification, de telle sorte que nous ayons en permanence l’assurance que la gestion est assurée conformément à l’objectif fixé et qu’il n’y a pas détournement de la générosité publique et de la contribution apportée par l’État avec les 66 % de réduction d’impôt.
Monsieur Gouteyron, peut-être faut-il momentanément renoncer à voter un tel dispositif, car il n’atteint que partiellement l’objectif que vous poursuivez. Prenons le temps de mettre au point des dispositions plus conformes à votre préoccupation.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. L’initiative de notre ami Adrien Gouteyron est très intéressante, mais elle est en l’état à la fois trop sévère et trop imprécise.
Je connais un peu le sujet pour avoir été associé de près aux activités d’une grande association caritative dont il m’arrive de m’occuper encore. Cette association, les Restaurants du cœur, a été contrôlée par la Cour des comptes et elle a suivi scrupuleusement les demandes formulées par cette dernière. Il y a six mois, un nouveau rapport de contrôle a été publié par la Cour des comptes, dont les conclusions sont très positives. Il faut dire que seuls des détails techniques sans importance avaient été relevés et que l’association a mis en œuvre rapidement et dans un esprit ouvert toutes, je dis bien toutes, les observations de la Cour des comptes.
Cette association n’aurait donc pas de difficulté aujourd'hui si l’amendement Gouteyron était adopté. Néanmoins, M. le rapporteur général ou Mme le ministre l’ont souligné, les associations, dans le total de leurs dépenses, peuvent en compter certaines qui sont conformes aux objectifs poursuivis. Il faudrait donc préciser, au lieu « des dépenses engagées », que « toutes les dépenses engagées » doivent être conformes aux objectifs poursuivis par l’appel aux dons. Le champ couvert par l’amendement d’Adrien Gouteyron est donc un peu imprécis.
Par ailleurs, l’adoption de cet amendement pourrait conduire à une grande inégalité de traitement entre les associations, car la Cour des comptes n’en contrôle qu’une ou deux par an. Il peut ainsi s’écouler quelquefois un an, deux ans, trois ans, cinq ans, six ans, voire sept ans entre chaque contrôle !
Les donateurs d’une association contrôlée par la Cour des comptes et qui n’aura pas obtenu le brevet de conformité perdront le bénéfice de l’avantage fiscal, tandis que les autres associations pourront continuer à ne pas respecter le but d’intérêt général qu’elles se sont fixé tant qu’elles ne sont pas contrôlées. Or le président et le rapporteur général de la commission des finances savent bien que la LOLF nous interdit d’imposer à la Cour des comptes un calendrier de travail. Nous porterions atteinte à l’indépendance de cette juridiction si nous l’obligions à contrôler les associations tous les ans ou tous les deux ans, donc à un rythme imposé par la loi.
En outre, cher ami Adrien Gouteyron, les Restaurants du cœur, et j’y suis sensible, est l’association caritative dont les frais de fonctionnement sont les plus bas, soit 8 %.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument !
M. Michel Charasse. La raison en est que son action repose essentiellement sur 55 000 bénévoles entièrement gratuits et que les salaires versés sont extrêmement faibles non seulement parce qu’il y a très peu de permanents rémunérés, mais encore parce que les rémunérations de ceux-ci sont modestes.
Il faut contrôler à la fois les dépenses de fonctionnement et les rémunérations, car certains responsables d’associations caritatives, qui s’occupent de personnes très démunies, n’oublient pas toujours de se servir au passage !
M. Adrien Gouteyron. Ce n’est pas le problème !
M. Michel Charasse. Si, cher ami, c’est le problème ! Nous ne pouvons pas demander à la Cour des comptes de constater la conformité des dépenses si l’on accepte de fermer les yeux, par exemple, sur les salaires parfois élevés que se versent les responsables, le directeur, les deux ou trois principaux permanents d’une association. Cela créerait une inégalité incroyable avec les associations qui gèrent les dons d’une façon beaucoup plus stricte et réservent l’argent collecté en priorité aux bénéficiaires des actions caritatives.
Mes chers collègues, en tant qu’auteur de la loi « Coluche » en 1988, je suis très favorable à la démarche intellectuelle d’Adrien Gouteyron et de plusieurs de ses collègues.
Mme Isabelle Debré. C’est un très bon amendement !
M. Michel Charasse. Néanmoins, dans la mesure où nous pourrions retravailler cette proposition, notamment dans le cadre du collectif budgétaire, pourquoi ne pas prendre le temps de trouver une solution qui établirait des critères définissant la bonne gestion ? Cela pourrait également se faire par voie réglementaire.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Établir des critères de bonne gestion serait un peu trop compliqué ! Nous y serions encore dans dix ans !
M. Michel Charasse. En tout cas, nous ne pouvons pas laisser à la Cour des comptes le soin de décider au coup par coup !
Par conséquent, la démarche est heureuse, mais elle est prématurée. Je suis prêt, si Adrien Gouteyron et ses amis le souhaitent, à travailler avec eux, car les hasards de la vie m’ont conduit à connaître le sujet d’assez prêt. Je suis tout à fait disposé à apporter ma contribution à ce genre travail.
Quoi qu’il en soit, j’insiste : les dépenses doivent être conformes aux objectifs, mais toutes les dépenses, donc également les frais de fonctionnement et les rémunérations !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Madame le ministre, nos avis convergent : il s’agit d’une bonne initiative. Il reste à préciser les conditions d’application de la mesure, mais il faut agir rapidement. Comme vous l’avez proposé, madame le ministre, nous pourrions insérer une telle mesure dans le projet de loi de finances rectificative, c'est-à-dire dans deux semaines. Si nous cherchons à définir les critères de bonne gestion, nous y serons encore dans dix ans !
Je propose à Adrien Gouteyron de travailler ensemble sur sa proposition et qu’elle fasse l’objet d’un amendement de la commission des finances, qu’il pourra cosigner.
Je souhaite insister sur la double information.
L’information sur la gestion doit être le fait des commissaires aux comptes. Peut-être faut-il veiller à ce que ces derniers s’acquittent pleinement de leur mission et en rendent compte aux assemblées générales ainsi qu’au public ?
Par ailleurs, si quoi que ce soit dans la gestion traduit une méconnaissance de l’objet social de l’association ou si des abus significatifs sont constatés, cela doit être porté à la connaissance du public par le commissaire aux comptes ou par la Cour des comptes.
Le souscripteur, qui sera sanctionné par l’adoption d’une telle mesure, ne doit pas être pris en traître et doit disposer de toute l’information nécessaire.
Sur la base de tels principes, nous devrions pouvoir trouver une rédaction satisfaisante d’ici à quelques jours.
M. le président. Monsieur Gouteyron, l'amendement n° II-156 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Adrien Gouteyron. Tout d’abord, je me réjouis de ce débat. Je m’attendais à ce que Michel Charasse intervienne, car je sais combien le sujet lui tient à cœur et quelle est son expérience en ce domaine.
Je ne vous reprendrai que sur un mot, cher ami : la mesure n’est pas prématurée, elle est opportune ! C'est pourquoi, madame la ministre, je n’accepterai de retirer cet amendement qui si le Gouvernement s’engage fermement, comme vous le demandent le rapporteur général et le président de la commission des finances, à accepter un futur amendement qui irait dans le sens de ce que je vous propose aujourd'hui, mais qui serait peut-être plus précis, de manière à éviter certaines inégalités de traitement.
Je retirerai mon amendement, madame la ministre, à condition que vous réitériez à la fin de ce débat l’engagement que vous avez pris tout à l’heure d’intégrer ma proposition, retravaillée, dans le projet de loi de finances rectificative.
J’apprécie, monsieur le rapporteur général, monsieur le président de la commission, que la commission accepte de prendre cette affaire en charge. Il y va en effet de l’intérêt des associations et du mouvement de générosité qui porte les Français à faire des dons, même dans des périodes très difficiles.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. À la demande de M. Adrien Gouteyron, je réitère bien volontiers l’engagement que j’ai pris au début de ce débat. Nous examinerons cette proposition, qui fera l’objet d’un amendement de la commission des finances au projet de loi de finances rectificative, c'est-à-dire dans les tout prochains jours.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Nous sommes face à un public très sensible : les bénévoles des associations. Je suggère, madame le ministre, que vous consultiez préalablement certaines d’entre elles ou le Comité de la charte du don, qui regroupe la plupart des associations soumises au contrôle de la Cour des comptes.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. On y sera encore dans trois ans ! Ils trouveront tous les prétextes pour ne rien faire !
M. Michel Charasse. Sur le fond, je partage les objectifs d’Adrien Gouteyron et de la commission des finances, mais il faut éviter toute maladresse.
Il est difficile d’intervenir dans ce domaine sans recueillir au minimum l’avis des principales organisations. Évitez de vous mettre l’association Emmaüs et autres sur le dos ! Ce n’est pas la peine de susciter une bataille de polémiques que nous risquons de perdre !
M. le président. Monsieur Adrien Gouteyron, compte tenu de l’engagement de Mme le ministre, l’amendement est-il maintenu ?
M. Adrien Gouteyron. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-156 rectifié bis est retiré.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l’Assemblée nationale.
Dans la suite des articles de la seconde partie non rattachés aux crédits, nous en sommes parvenus à l’article 46.
Article 46
I. – Au IV de l’article 93 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, l’année : « 2009 » est remplacée par l’année : « 2012 ».
II. – Au début du seizième alinéa du I de l’article 244 quater J du code général des impôts, l’année : « 2010 » est remplacée par l’année : « 2012 ».
III. – Le I de l’article 30 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 est ainsi rédigé :
« Le plafond mentionné au quatorzième alinéa du I de l’article 244 quater J du code général des impôts est porté à 65 100 € pour les avances remboursables émises entre le 15 janvier 2009 et le 30 juin 2010 et à 48 750 € pour les avances remboursables émises entre le 1er juillet 2010 et le 31 décembre 2010, pour la construction ou l’acquisition de logements neufs ou en l’état futur d’achèvement. Ces montants sont, le cas échéant, majorés dans les conditions prévues aux quinzième, seizième et dix-septième alinéas du même I. »
M. le président. L’amendement n° II-165 rectifié bis, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
IV.- Le I de l’article 244 quater J du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les établissements de crédit mentionnés à l’article L. 511-1 du code monétaire et financier passibles de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt sur le revenu ou d’un impôt équivalent, ayant leur siège dans un État membre de la Communauté européenne, ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale, peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre d’avances remboursables ne portant pas intérêt consenties à des personnes physiques, soumises à des conditions de ressources, pour l’acquisition ou la construction d’une résidence principale en accession à la première propriété et versées au cours de l’année d’imposition ou de l’exercice.
2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le montant de l’avance remboursable sans intérêt peut, le cas échéant, financer l’ensemble des travaux prévus par le bénéficiaire de cette avance lors de l’acquisition de cette résidence. »
3° Le douzième alinéa est ainsi rédigé :
« Dans le cas où la composition du ou des foyers fiscaux des personnes mentionnées au huitième aliéna incluait, l’année retenue pour la détermination du montant total des ressources, des personnes qui ne sont pas destinées à occuper à titre principal le bien immobilier, le ou les revenus fiscaux de référence, au sens du 1° du IV de l’article 1417, concernés sont corrigés afin de ne tenir compte que des personnes mentionnées au huitième alinéa, le cas échéant de manière forfaitaire. »
4° Dans la première phrase du seizième alinéa, les mots : « le montant de l’avance remboursable sans intérêt est majoré d’un montant maximum » sont remplacés par les mots : « le montant plafond de l’avance remboursable sans intérêt est majoré d’un montant »
5° Au dix-septième alinéa, les mots : « Le montant de l’avance remboursable sans intérêt est majoré, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, d’un montant maximum » sont remplacés par les mots : « Le montant plafond de l’avance remboursable sans intérêt est majoré d’un montant »
V.- Les dispositions du IV s’appliquent aux offres d’avances émises à compter du 1er juillet 2010.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement apporte plusieurs simplifications au dispositif du prêt à taux zéro.
Tout d’abord, il aligne les modalités d’octroi de ce prêt sur les conditions des prêts classiques : en particulier, l’obligation d’état des lieux dans l’ancien de plus de vingt ans nous semble devoir être supprimée, dans la mesure où les obligations de diagnostic de droit commun se sont renforcées au cours de la période récente. Ensuite, il procède à une clarification législative du principe d’individualisation des ressources. Enfin, il comporte une amélioration rédactionnelle.
Ces dispositions s’appliqueraient à compter du 1er juillet 2010, afin de tenir compte des délais nécessaires à l’élaboration et à la publication des mesures d’application.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Cet amendement apporte des précisions utiles. En conséquence, le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 46, modifié.
(L’article 46 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 46
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-38 rectifié ter, présenté par Mmes Dumas, Hummel, Bruguière, Morin-Desailly, Hermange, Sittler, Desmarescaux, Panis, Rozier, Bout, Mélot, Dini, Giudicelli, Debré et Papon, MM. Frassa, Pozzo di Borgo, Grignon, Gaillard, Alduy, B. Fournier, Bécot, Leleux, Pointereau, Ferrand, Couderc, Dulait, Brun, Beaumont, Garrec, Jarlier, Doublet, Laurent, Richert, Portelli, Laménie, Pinton, P. Dominati, Paul, Nachbar, Cambon, Duvernois, Martin, Cléach, Cazalet, Chatillon, Milon, Lefèvre, Braye, Houpert, Cornu, Detcheverry, Houel, du Luart, Trillard, Thiollière, Courtois, Faure, Leroy et César, Mmes Malovry et Troendle, MM. Legendre, Pierre et A. Dupont, Mlle Joissains et MM. J. Blanc, Longuet, Zocchetto, Doligé et J.C. Gaudin, est ainsi libellé :
Après l’article 46, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 244 quater O du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les dispositions du présent article s’appliquent aux crédits d’impôt calculés au titre des dépenses exposées par les entreprises mentionnées au III jusqu’au 31 décembre 2015. »
II. - Les dispositions du I ne s’appliquent qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévue aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Dumas.
Mme Catherine Dumas. Cet amendement, s’il est adopté, n’induira aucune dépense supplémentaire sur le budget de 2010. En effet, il vise simplement à donner un peu de visibilité aux entreprises du secteur des métiers d’art, en leur indiquant que le crédit d’impôt création, qui devait s’éteindre le 31 décembre 2010, sera prorogé jusqu’en 2015.
Ce dispositif fiscal, plébiscité par la profession, récompense les entreprises des métiers d’art et les incite à investir dans la recherche de nouveaux modèles, de nouveaux brevets ou de nouvelles collections. Ce comportement économique est indispensable pour maintenir la compétitivité de nos entreprises sur le marché international, mais également pour lutter contre le fléau de la contrefaçon mondialisée.
Il est donc indispensable, compte tenu du contexte économique difficile, que le Parlement, en adoptant cet amendement, envoie un signal positif fort à cette filière, car l’effort de l’État doit d’abord se concentrer sur les métiers où la France est championne, les secteurs où nous sommes « sur le podium » !
Mes chers collègues, quel que soit le côté de l’hémicycle où nous siégeons, lequel d’entre nous ne connaît pas, dans son département, plusieurs activités de métiers d’art, du marqueteur au facteur d’orgues, du plumassier au bronzier d’art, du forgeron au joailler ? Ces artisans d’art, souvent de réputation internationale, participent à l’activité économique de nos territoires en offrant des emplois à très forte valeur ajoutée et, dans le même temps, renforcent le label « Fabriqué en France », synonyme de perfection à l’étranger.
Cet amendement a été cosigné par soixante-dix sénatrices et sénateurs, mais je sais que beaucoup d’autres sont conscients que la filière des métiers d’art a besoin d’être encouragée, parce qu’elle est synonyme de dynamisme pour notre économie locale et d’avenir pour notre jeunesse.
Si nous voulons redorer le blason des métiers manuels et des formations professionnelles, nous devons inscrire le développement de ces métiers dans la durée, en donnant des perspectives et de la visibilité, tant économique que fiscale, aux entreprises concernées. Alors, mes chers collègues, en votant pour cet amendement, nous donnerons un signal fort aux 217 métiers concernés et nous jouerons pleinement notre rôle de représentants des territoires !
M. le président. L’amendement n° II-273, présenté par MM. Patriat, Sergent, Rebsamen, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 46, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 244 quater O du code général des impôts est complété par un paragraphe VIII ainsi rédigé :
« VIII. - Les dispositions du présent article s’appliquent aux crédits d’impôt calculés au titre des dépenses exposées par les entreprises mentionnées au III jusqu’au 31 décembre 2014. »
II. - Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Je souhaite abonder dans le sens de notre collègue Catherine Dumas. En effet, 217 métiers sont reconnus comme métiers d’art et ils ne doivent surtout pas être perçus sous l’angle du passé. Au contraire, ils représentent un savoir-faire, une excellence et de très nombreuses « pépites » d’innovation, pour le plus grand bien de l’image de notre pays, mais aussi de l’emploi. Le secteur des métiers d’art compte plus de 37 000 entreprises, souvent très petites. Il pèse de manière significative dans nos exportations. Il représente 43 000 emplois et réalise un chiffre d’affaires de 8 milliards d’euros.
Par ailleurs, il faut également remarquer l’importance de ce secteur sous l’angle de la formation. Je sais que beaucoup de régions s’y intéressent : nos collègues François Patriat et François Rebsamen, qui signent avec moi cet amendement, soulignent les efforts de la région Bourgogne pour soutenir les métiers d’arts ; je peux dire que la région Centre en fait autant.
Partout, que ce soit en Franche-Comté, en Lorraine ou en Bretagne, prévaut la même volonté de présenter les métiers d’art comme un vecteur d’avenir et, surtout, de soutenir les formations. Ainsi, un certain nombre de rectorats, par exemple celui de Dijon, ont créé un label « excellence métier d’art », pour promouvoir des formations de haut niveau dans ces domaines.
Les entreprises du secteur créent, sur tous les territoires, des emplois qui présentent l’avantage d’être à haute valeur ajoutée, le plus souvent « indélocalisables » – si je puis me permettre ce néologisme –, car ces métiers sont intrinsèquement liés à un savoir-faire et à un territoire, bref, à une certaine idée de notre pays.
Enfin, ce secteur est jeune, contrairement à ce que l’on dit parfois, puisque les trois quarts des artisans d’art sont âgés de moins de quarante-quatre ans, et il offre de nombreux emplois à des femmes.
Tous ces arguments nous incitent à penser que cette filière mérite d’être soutenue. C’est pourquoi, mes chers collègues, le présent amendement vise à prolonger jusqu’en 2014 le dispositif du crédit d’impôt en faveur des métiers d’art, initialement institué à titre temporaire pour les années 2006 et 2007 et qui avait été prorogé jusqu’en 2010.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. En toute franchise, cette cause est très bonne, mais elle n’est pas défendue par les bons moyens. Certes, il nous faut donner des perspectives de développement à ces métiers, car certains sont en voie de raréfaction. Par ailleurs, des améliorations doivent sûrement être apportées en matière de formation professionnelle, et le rapport remarquable de Catherine Dumas, récemment remis au Premier ministre, montre la connaissance très précise de celle-ci de tous les enjeux.
Faut-il pour autant renouveler avant terme ce crédit d’impôt qui existe déjà ? Telle est la question que nous pouvons nous poser ensemble, même si le sujet mérite certainement une grande sympathie sur les différentes travées de cette assemblée.
Le crédit d’impôt en faveur des métiers d’art a été établi pour trois ans, avec une date d’échéance au 31 décembre 2010. Nous avions d’ailleurs fait prévaloir dans plusieurs textes une idée du Sénat, les « niches à durée déterminée », ou NDD : un engagement est pris pour une période déterminée, puis on procède en temps utile, avant la date limite, à l’évaluation de la mesure et on décide, au vu du bilan des avantages et des inconvénients, si elle doit être renouvelée.
Or ces amendements tendent à anticiper d’une année le terme du dispositif et à renouveler celui-ci non pas pour trois ans, mais pour quatre ou cinq ans, sans que l’évaluation préalable prévue, notamment, par la loi de programmation des finances publiques ait été réalisée !
Vous comprendrez donc que, tout en éprouvant la même sympathie que vous pour ces différentes professions, je ne puisse émettre un avis favorable sur les amendements, pour des raisons de méthode et par fidélité à la doctrine de la commission des finances, en espérant que notre assemblée voudra bien suivre sa commission des finances.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Pourquoi cette précipitation ? En effet, comme l’a très bien dit M. le rapporteur général, le dispositif vaut encore pour l’année prochaine.
Ce dispositif est encadré par un délai ! J’ignore pour quelle raison, en France, on ne respecte pas les délais fixés. Or ce délai doit permettre une évaluation de la mesure, qui, en fonction de cette évaluation, sera renforcée, poursuivie ou arrêtée. Telle me semble être la méthode de travail la plus sérieuse.
Je sais bien que chacun a envie de faire plaisir à telle ou telle profession. C’est bien légitime, car ces métiers irriguent à peu près tous les départements de France et de Navarre, ils font vivre des gens qui sont les héritiers d’une longue culture française.
Mais nous parlons de fiscalité ! Une date a été fixée : le 31 décembre 2010. À cette date, nous aurons adopté la loi de finances pour 2011 : lors de l’élaboration de ce texte, nous procéderons à une évaluation du dispositif et il sera prolongé s’il s’avère utile, ce qui, a priori, devrait être le cas ; peut-être même sera-t-il renforcé ou adapté à la situation. Pourquoi faudrait-il tout d’un coup se mettre à trembler à la perspective de l’échéance ? Est-ce une raison pour proroger toutes les exonérations, ne plus rien changer, ne plus rien évaluer ? Telle n’est pas la méthode que nous devons adopter !
Respectez les délais que vous vous fixez – c’est déjà suffisamment difficile ! – et, l’année prochaine, nous examinerons la situation. Je vous ferai d