M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, avant l'article 3.
L'amendement n° 40 rectifié, présenté par Mme Demontès, M. Massion, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 200 quater B du code général des impôts, il est inséré un article 200 quater C ainsi rédigé :
« Art. 200 quater C. - 1. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt sur le revenu au titre des dépenses effectivement supportées pour réduire la vulnérabilité à des aléas technologiques de leur habitation principale.
« Ce crédit d'impôt s'applique aux dépenses payées pour la réalisation de travaux prescrits aux propriétaires d'habitation au titre du IV de l'article L. 515-16 du code de l'environnement.
« 2. Le crédit d'impôt s'applique pour le calcul de l'impôt dû au titre de l'année du paiement de la dépense par le contribuable.
« 3. Pour un même logement, le montant des dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt ne peut excéder, au titre d'une période de trois années civiles consécutives, la somme de 30 000 €.
« 4. Le crédit d'impôt est égal à 40 % du montant des dépenses.
« 5. Les 60 % du montant des dépenses restants pourront faire l'objet d'avances remboursables ne portant pas intérêt versées, tel que prévu à l'article 244 quater U.
« 6. Les travaux mentionnés au 1 s'entendent de ceux figurant sur la facture d'une entreprise.
« Le crédit d'impôt est accordé sur présentation des factures, autres que les factures d'acompte, des entreprises ayant réalisé les travaux et comportant, outre les mentions prévues à l'article 289, l'adresse de réalisation des travaux, leur nature ainsi que la désignation et le montant des travaux mentionnés au 1.
« 7. Le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt sur le revenu après imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200 bis, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires. S'il excède l'impôt dû, l'excédent est restitué.
« 8. Lorsque le bénéficiaire du crédit d'impôt est remboursé dans un délai de cinq ans de tout ou partie du montant des dépenses qui ont ouvert droit à cet avantage, il fait l'objet, au titre de l'année de remboursement et dans la limite du crédit d'impôt obtenu, d'une reprise égale à 40 % de la somme remboursée. Toutefois aucune reprise n'est pratiquée lorsque le remboursement fait suite à un sinistre survenu après que les dépenses ont été payées.
« 9. Le crédit d'impôt s'applique aux dépenses payées dans un délai de quatre ans à compter de l'approbation du plan de prévention des risques technologiques prévu à l'article L. 515-15 du code de l'environnement.
II. - L'article 200 quater A du même code est ainsi modifié :
1° Le b du 1 est abrogé ;
2° Dans le b du 5, les mots : « des travaux mentionnés au b du 1 et » sont supprimés.
III. - Après le 1 de l'article 200 quater du même code, il est inséré un 1 bis ainsi rédigé :
« 1 bis. Le crédit d'impôt ne s'applique pas aux dépenses payées ouvrant droit au bénéfice du crédit d'impôt prévu à l'article 200 quater C. »
IV. - Après le 3° du 2 du I de l'article 244 quater U du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° Soit de travaux prescrits aux propriétaires d'habitation au titre du IV de l'article L. 515-16 du code de l'environnement. »
V. - Les dispositions des I à IV ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
VI. - La perte de recettes résultant pour l'État de la création d'une réduction d'impôt au titre des dépenses payées pour la réalisation de travaux prescrits aux propriétaires au titre d'un plan de prévention des risques technologiques, est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Mes chers collègues, nous avons tous en mémoire les images de la catastrophe survenue le 21 septembre 2001 dans l’usine AZF de Toulouse, au cours de laquelle trente personnes ont trouvé la mort, des centaines d’autres ont été blessées et des milliers de logements ont été dévastés.
Si nous ne pouvons récrire l’Histoire, il est néanmoins de notre devoir de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher qu’un tel drame se reproduise. Tel était notamment l’objet de la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages. Les membres du groupe socialiste, après avoir émis un vote positif en première lecture, s’étaient abstenus lors du vote final de ce texte en raison du manque d’engagement du Gouvernement.
Plus de six ans après l’adoption de cette loi, force est de constater que nous avions raison et que tous les efforts restent à mener. Ainsi, sur les quatre cent vingt plans de prévention des risques technologiques, PPRT, qui doivent être réalisés, seuls deux cents sont lancés et quatre, approuvés.
À titre d’exemple, sur le territoire de ma commune, est implantée une usine AZF plus importante que celle de Toulouse. Or la procédure du PPRT n’a toujours pas été lancée et les mesures de sécurité ne sont pas adoptées. Localement, on m’explique que cela tient au fait que l’État n’a pas d’argent. Alors, les mesures de sécurité pour les populations concernées attendent…
Une fois défini, le PPRT peut prescrire des mesures foncières, notamment le délaissement et l’expropriation lorsque les personnes sont exposées à de graves dangers. Il peut également prévoir des prescriptions obligatoires sur les habitations et sur les constructions soumises à des aléas importants, même si ces dernières ont été construites avant l’implantation de l’installation industrielle à l’origine des risques.
Pour les personnes concernées par l’obligation de réalisation de travaux, la loi prévoit actuellement un crédit d’impôt sur le revenu, que la loi de finances pour 2010 a d’ailleurs prorogé d’un an. Mais cette mesure paraît particulièrement inadaptée à la situation financière des contribuables résidant dans le périmètre de ces plans.
En premier lieu, le taux de 15 % de ce crédit d’impôt est inadéquat, car les ménages résidant dans le périmètre d’un PPRT sont rarement aisés ; ils ne disposent donc généralement pas des disponibilités financières leur permettant de faire face au financement des travaux prescrits. Or la réalisation de ces travaux est obligatoire.
En second lieu, le plafond du crédit d’impôt, fixé à 5 000 euros pour une personne seule et à 10 000 euros pour un couple, s’avère, lui aussi, inadapté à la réalité des situations. En effet, le coût des travaux peut atteindre 10 % de la valeur de l’habitation.
Enfin, l’expérience des PPRT montre que le système actuel peut être ressenti par les particuliers comme profondément injuste au regard des autres aides susceptibles d’être octroyées. Ainsi, les industriels peuvent bénéficier d’une subvention de l’État ou des collectivités atteignant 67 % des mesures de prévention qu’ils réaliseraient.
C’est la raison pour laquelle nous proposons d’améliorer ce crédit d’impôt en relevant son taux à hauteur de 40 % des dépenses, dans la limite d’un plafond rehaussé à 30 000 euros par logement, sans considération de la composition du foyer. Les 60 % de dépenses non prises en compte pour le bénéfice du crédit d’impôt pourraient être financés via l’éco-prêt à taux zéro.
Tout en restant fidèles à nos convictions – le développement des crédits d’impôt, qui doivent tous être évalués au regard de leur efficacité économique et sociale –, nous vous proposons de moderniser celui qui est ici en question, afin qu’il puisse véritablement bénéficier à l’ensemble de nos concitoyens résidant dans le périmètre d’un PPRT.
Nous nous réjouissons que ce sentiment soit partagé par nombre d’entre nous. En effet, un amendement identique avait été déposé lors de l’examen la loi de finances rectificative par trois collègues de la majorité, mais il n’avait pas été soutenu. Plus récemment, les députés, sur l’initiative du rapporteur, M. Pancher, ont adopté, à l’occasion de l’examen en commission du développement durable et de l’aménagement du territoire du projet de loi portant engagement national pour l’environnement, un amendement identique à la proposition que nous vous soumettons aujourd’hui. Monsieur le ministre, votre collègue M. Borloo, ministre d’État, s’est déclaré favorable à cette mesure s’il se dégageait un consensus en séance publique.
Nous souhaiterions connaître aujourd’hui votre position sur notre proposition d’un crédit d’impôt rénové.
J’ajouterai pour finir qu’aucune date n’étant pour l’heure prévue pour l’adoption définitive du Grenelle 2, il est sans doute plus sûr, si l’on souhaite sa mise en œuvre rapide, d’adopter cette mesure à l’occasion de la discussion du présent projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cette disposition constitue une nouvelle niche fiscale !
M. Jean-Louis Carrère. C’est une tuile fiscale ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Comment voulez-vous, dans ces conditions, que la commission n’émette pas un avis défavorable ?
Vous passez votre temps à nous expliquer que, tels Diogène avec sa lanterne, vous cherchez 50 milliards d’euros…
M. Jean-Louis Carrère. Nous les avons trouvés !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais, en l’espèce, mon cher collègue, vous êtes en train de creuser le déficit ! D’un côté, vous cherchez de l’argent ; de l’autre, vous le dépensez ! Si on vous laissait faire, vous en dépenseriez plus que vous ne pourriez en trouver ! Nous le savons bien, car vous l’avez prouvé dans le passé. (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.)
La commission émet donc un avis défavorable.
M. Jean-Louis Carrère. Vous, bien sûr, vous n’êtes que vertu !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Il s’agit de l’extension d’un crédit d’impôt. Un travail indéniable a été effectué sur ce sujet. Cependant, la mesure proposée soulèverait un certain nombre de difficultés au regard de l’article 200 quater B du code général des impôts, qui permet la déductibilité d’un certain nombre d’investissements.
En l’espèce, il s’agit d’une dépense obligatoire. Or un crédit d’impôt relatif à une telle dépense correspond à une subvention et non à une incitation, et la différence entre les divers taux serait très élevée.
Cela dit, c’est un sujet dont le Gouvernement se préoccupe. Ainsi, Chantal Jouanno a organisé une table ronde sur les risques industriels dont les travaux seront suivis par un comité stratégique installé auprès du Conseil supérieur des installations classées.
Quoi qu’il en soit, à ce stade, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Marc Massion, pour explication de vote.
M. Marc Massion. Il s’agit tout de même de la vie des gens…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cela vaut pour tous les articles d’un projet de loi de finances !
M. Marc Massion. … qui habitent à proximité d’usines dangereuses !
Sur le territoire de ma commune se trouve une usine AZF. Le PPRT n’a pas encore été établi. Cependant, un périmètre Seveso a été défini dans lequel sont implantés un hypermarché, un complexe cinématographique, une brasserie, un bowling, deux écoles.
M. Bruno Sido. Qui les a autorisés ?
M. Marc Massion. Et on y trouve aussi 4 000 habitants. Or on ne peut rien faire dans ce périmètre. Les résidants ne savent pas quels travaux effectuer dans leur habitation parce que, depuis la loi de 2003, l’État n’a pas été capable de mettre en place un PPRT.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cela ne nécessite pas un crédit d’impôt !
M. Marc Massion. Que se passera-t-il si le Sénat ne donne pas suite à notre proposition ? Nos concitoyens ont l’obligation d’aménager leur résidence afin de faire face aux aléas technologiques, mais encore faut-il qu’ils puissent assumer les dépenses occasionnées, ce qui n’est pas le cas de la plupart d’entre eux, comme je l’ai indiqué précédemment. Par conséquent, ils vont demander le rachat de leur maison, comme ils en ont le droit. Normalement, l’opération de rachat est réalisée par le biais d’un fonds alimenté par l’industriel concerné, par la commune et par l’État. Pour ce qui concerne le cas particulier de ma commune, on m’a déjà précisé que l’État ne disposait pas de moyens financiers à cette fin. Quant à l’industriel, nul ne sait s’il acceptera de contribuer… La charge financière sera donc, encore une fois, supportée par la collectivité locale.
Je pense que vous ne prenez pas vos responsabilités ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue Marc Massion a raison, mais le crédit d’impôt est-il le bon instrument ?
Mes chers collègues, je souhaite vous citer le cas de la commune de Trosly-Breuil, située dans la vallée de l’Aisne, sur le territoire de laquelle un établissement est classé Seveso. Un atelier de menuiserie implanté à proximité de ce site emploie une quinzaine de personnes. Le chef d’entreprise souhaite déménager pour installer sa société 250 mètres plus loin. Son établissement serait toujours dans le périmètre de protection, mais les contraintes seraient allégées. L’administration accepte que son usine continue à fonctionner à proximité immédiate de l’installation dangereuse, mais refuse de lui octroyer le permis de construire lui permettant d’édifier un établissement quelques mètres plus loin. Où est la cohérence ?
Le principe de précaution conduit des agents de l’administration à empiler, empiler, empiler sans fin les procédures.
Mme Nicole Bricq. Un vrai millefeuille !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Les maires ne savent plus comment faire !
Mais est-ce par la création d’un crédit d’impôt supplémentaire qu’il faut traiter ce problème ? Sincèrement, je ne le crois pas. S’il y a une table ronde sur les PPRT – et c’est sans doute utile –, il devrait être possible de dégager des solutions pour des situations comme celle que nous évoquons.
Je connais d’ailleurs d’autres sites où la rigueur est moindre. Tout dépend du service régional et du préfet qui interprètent la réglementation. Quand c’est à Verberie, dans la circonscription du ministre, cela se passe d’une certaine façon (Sourires.) ; quand c’est à Trosly-Breuil, dans une autre circonscription, cela se passe d’une autre façon ! Il est vrai que cela n’est pas acceptable, et vous avez tout à fait raison de le souligner, monsieur Massion. Mais ce n’est pas une raison pour créer un crédit d’impôt !
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par Mme Demontès, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 1383 G du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : «, à concurrence de 15 % ou de 30 % » et les deux dernières phrases sont supprimés.
2° Après les mots : « et fixe un taux », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « d'exonération variable pour les constructions situées dans le périmètre visé au premier alinéa, en fonction de la nature des risques auxquels le foncier bâti est exposé. »
III. - Les conséquences financières résultant pour les collectivités locales de la fixation d'un taux variable d'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, pour les constructions situées dans le périmètre d'un plan de prévention des risques technologiques, sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. - Les conséquences financières résultant pour l'État de la majoration de la dotation globale de fonctionnement sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 33 rectifié, présenté par M. Etienne, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa du I de l'article 1519 H du code général des impôts est complété par les mots : « et des stations appartenant aux éditeurs des services de radio édités par une association et accomplissant une mission de communication sociale de proximité visés au quatorzième alinéa de l'article 29 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication. »
II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée par la création, à due concurrence, d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Etienne, rapporteur pour avis.
M. Jean-Claude Etienne, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Cet amendement vise à exclure les radios associatives dites « de type A », selon la terminologie du Conseil supérieur de l’audiovisuel, du champ des redevables de la taxe sur les stations radioélectriques.
Si je vous fais cette proposition, ce n’est pas seulement parce que ces stations n’étaient pas jusqu’ici soumises à la taxe professionnelle. Naturellement, j’ai bien compris depuis hier soir que ce seul fait ne pouvait pas constituer un argument pour demander que ces radios sortent du champ des redevables, et j’en conviens moi-même.
En réalité, cet amendement me paraît nécessaire surtout parce qu’il s’agit de radios non commerciales, et qu’on ne voit pas la légitimité de fond qu’il y aurait à taxer un service uniquement destiné à une programmation de communication sociale et de proximité. En effet, les ressources de ces radios viennent principalement, et presque uniquement, du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, géré par le ministère de la culture et de la communication !
M. le président. L'amendement n° 118 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article 1519 H du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le I est complété par les mots : « et des stations relevant de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ».
2° Le deuxième alinéa du III est supprimé.
II. La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée par la création, à due concurrence, d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Le présent amendement porte sur le même sujet. Plus large que le précédent, il vise à exclure l’ensemble des services de communication audiovisuelle du champ des redevables de la taxe sur les stations radioélectriques qui a été instituée à l’article 1519 H du code général des impôts par la loi de finances pour 2010 du 30 décembre 2009 afin de compenser la suppression de la taxe professionnelle.
Je rappelle que le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, le 17 novembre 2009, visait seulement, s’agissant de cette taxe, les opérateurs de téléphonie, et ne concernait pas les services de radio et de télévision. Or le Sénat a adopté un sous-amendement de deux de nos collègues, tendant à inclure ces radios dans le champ de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau, l’IFER.
Cette mesure, je le souligne, a été prise sans grande connaissance du modèle économique de ce secteur et sans étude d’impact approfondie, alors même que ces radios devront payer non seulement la contribution économique territoriale, certes plafonnée à 3% de la valeur ajoutée, mais aussi cette imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau qui, j’y insiste, n’était absolument pas prévue à l’origine. Je trouve dommage que ces sous-amendements aient été ainsi adoptés sans étude préalable ni consultation des commissions compétentes qui connaissent bien le secteur.
M. le président. L'amendement n° 36 rectifié, présenté par Mmes Bricq et Alquier, MM. Le Menn et Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le deuxième alinéa du III de l'article 1519 H du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les stations destinées à la diffusion de services de radios associatives et de radios locales, régionales et thématiques indépendantes ne sont pas imposées.»
II. - Les conséquences financières résultant pour l'État du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement est dans la même veine que les amendements nos 33 rectifié et 118 rectifié, mais il se situe à mi-chemin. Le premier est très réduit, puisqu’il tend à exclure uniquement les radios de type A ; le deuxième est beaucoup plus large. Quant au nôtre, il vise deux catégories de radios.
Pourquoi poser ce problème maintenant ? En commission des finances, on m’a opposé que, avec la clause de revoyure concernant les conséquences de la loi de finances pour 2010 portant suppression de la taxe professionnelle, il serait toujours temps de se pencher sur le régime des IFER.
Il reste que nous sommes obligés de gérer l’adoption très improvisée de la suppression de la taxe professionnelle, et de le faire sans trop tarder. En effet, on s’aperçoit que ce qui compenserait très partiellement la suppression de la taxe professionnelle – je veux parler de toute la série d’IFER concernant les entreprises de réseau des stations radioélectriques – pénalisera la diffusion des radios associatives et indépendantes, locales, régionales et thématiques « multiville ».
Nous voulons, quant à nous, exonérer ce type de radios. Si nous ne le faisons pas, ces radios se retourneront vers les collectivités locales. Mes collègues me disent d’ailleurs que c’est déjà le cas.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Et les collectivités locales répondront : « Non » ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bricq. Les collectivités locales seront donc encore plus désavantagées. Et si elles se voient imposer une phase d’austérité et de resserrement de leur budget que vous annoncez, ces radios ne diffuseront plus, tant leur situation économique est précaire. Dès lors, on pénalisera la vie locale et tout un réseau qui maintient une certaine cohésion sociale.
C’est pourquoi nous plaidons pour exonérer de l’IFER ces radios de type associatif, comme celles qui couvrent plusieurs réseaux de ville. En Seine-et-Marne, par exemple, nous avons deux radios locales actives et très écoutées, l’une au nord du département, l’autre au sud. Ne prenons pas le risque de désertifier un peu plus le territoire de nos départements !
Nous souhaitons donc, à l’occasion de l’examen du présent projet de loi de finances rectificative, que soit révisé ce schéma qui, d’après ce que j’ai compris, n’est pas encore arrêté par le Gouvernement en ce qui concerne la totalité des IFER.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je souhaite rappeler deux principes.
Tout d’abord, nous avons fait la réforme de la taxe professionnelle à droit constant, ce qui signifie que les agents économiques qui bénéficiaient d’une exonération ou d’une réduction dans le cadre de la taxe professionnelle ont retrouvé la même exonération ou la même réduction dans le cadre de la contribution économique territoriale. C’est simplement ce qui est demandé par le rapporteur pour avis, M. Etienne, dans son amendement n° 33 rectifié.
Ensuite, le second principe est le renvoi à ce que j’appellerai la « loi de revoyure » de l’ensemble des sujets d’application de la réforme de la taxe professionnelle. Or les amendements nos 118 rectifié et 36 rectifié sont des amendements de fond, qui font évoluer les dispositions qui étaient en vigueur sous le régime de la taxe professionnelle. Pour nous prononcer sur ces propositions, il nous faut une mise en perspective avec des simulations.
Vous le savez, et l’on en entend beaucoup parler dans nos départements, il y aura bien des ajustements à opérer en matière d’IFER, qu’il s’agisse de l’énergie ou des télécommunications. Il faut que nous soyons capables de mettre à plat tout ce sujet. Le traiter de façon parcellaire ne serait certainement pas une bonne méthode.
Par conséquent, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 33 rectifié.
En revanche, elle demande le retrait des amendements nos 118 rectifié et 36 rectifié, afin que nous puissions débattre à nouveau de cette question à l’occasion de l’examen de la loi de revoyure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. S’agissant de l’amendement n° 33 rectifié, je précise que ne sont redevables de l’IFER que les personnes disposant de stations radioélectriques pour les besoins de leur activité professionnelle.
Dès lors, deux situations doivent être distinguées pour les stations appartenant aux associations accomplissant une programmation de communication sociale dite de proximité.
Dans le premier cas, les radios associatives qui n’étaient pas redevables de la taxe professionnelle car elles n’exerçaient pas d’activité lucrative ne sont pas assujetties à l’IFER, puisqu’elles sont considérées comme ne disposant pas de station radioélectrique pour les besoins de leur activité professionnelle.
Dans le second cas, les radios associatives exerçant une activité lucrative, qui étaient redevables à ce titre de la taxe professionnelle, sont assujetties à l’IFER dès lors qu’elles disposent de stations pour les besoins de leur activité professionnelle.
L’IFER ne pénalisera pas les radios associatives qui n’étaient pas incluses jusqu’à présent dans le champ d’application de la taxe professionnelle. Tel est l’état actuel du droit.
Votre amendement, monsieur le rapporteur pour avis, peut évidemment être adopté, et c’est au Parlement d’en juger, mais il est déjà satisfait.
Quant aux amendements nos 118 rectifié et 36 rectifié, ils visent à changer l’état du droit actuel et, comme M. le rapporteur général l’a très bien dit, ils relèvent du champ de la taxe professionnelle. Le Sénat a particulièrement tenu à une clause de rendez-vous, qui permettra d’aborder ce sujet ; n’allons donc pas dénaturer ce rendez-vous !
Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Madame Morin-Desailly, l'amendement n° 118 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Morin-Desailly. J’avoue ne pas bien comprendre le raisonnement qui nous est tenu.
M. le rapporteur général nous affirme qu’il s’agit bien d’une question de fond et qu’il faut tout mettre à plat. Mais c’était précisément avant l’instauration de cette taxe – elle n’était pas prévue à l’origine dans le texte du Gouvernement, je tiens à le souligner – qu’il aurait fallu mettre à plat ce dispositif et examiner ses implications économiques pour l’ensemble du secteur !
En effet, je le rappelle, ces radios qui payaient la taxe professionnelle auront également à s’acquitter de la contribution économique territoriale.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mais pas sur la valeur ajoutée !
Mme Catherine Morin-Desailly. Elles pourront, de ce fait, se trouver encore plus pénalisées.
Je rappelle également que l’IFER porte sur chaque émetteur. On peut donc imaginer que l’instauration de cette taxe pénalisera aussi un certain nombre de radios installées dans des régions montagneuses ou vallonnées, où la couverture est rendue difficile par le relief et où des émetteurs sont nécessaires pour que les émissions puissent être au rendez-vous. À l’heure où nous discutons de la fracture numérique et de l’égal accès de tous aux services audiovisuels, vous mettez en place une taxe qui va pénaliser les radios installées dans ces secteurs isolés ! Et cela, vous le faites à l’heure où le lancement de la radio numérique terrestre est en préparation et où ces radios devront supporter le coût d’une double émission, analogique et numérique, et ce pendant un certain temps !
Je le répète, avant d’adopter le sous-amendement, il aurait fallu « mettre à plat » toutes ces questions. Encore une fois, monsieur le rapporteur général, ce n’était pas un amendement que vous aviez proposé dans le cadre du projet de loi de finances.
Je maintiens donc notre amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je voudrais tenter de vous convaincre, madame Morin-Desailly.
D’abord, les entreprises en cause seront soumises à la cotisation foncière des entreprises, qui est une fraction très allégée du montant de la taxe professionnelle qu’elles acquittaient jusqu’à la fin de l’année 2009.
Ensuite, elles ne paieront pas la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, car leur niveau de chiffre d’affaires les en exonère ou leur permet un dégrèvement très significatif.
Je crois donc qu’il faut attendre de mesurer les effets de l’IFER, comme cela a été prévu dans le cadre de l’examen de la loi de finances pour 2010 que nous avons votée cet automne.
Nous pourrions donc prendre rendez-vous à l’automne prochain, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2011.
Sous le bénéfice de ces observations, peut-être pourriez retirer votre amendement ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.