compte rendu intégral
PrÉsidence de M. Bernard Frimat
vice-président
Secrétaires :
M. Philippe Nachbar,
M. Daniel Raoul.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Organismes extraparlementaires
M. le président. J’informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de plusieurs organismes extraparlementaires.
Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite la commission de la culture, de l’éducation et de la communication à présenter des candidatures pour :
- l’Observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement, en application de l’article D. 239 27 du code de l’éducation, en remplacement de M. Pierre Martin ;
- le Haut conseil des musées de France, en application du décret n° 2002 628 du 25 avril 2002, et en remplacement de M. Philippe Nachbar ;
- la Commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à l’enfance et à l’adolescence, en application de l’article 3 de la loi n° 49 956 du 16 juillet 1949 et de l’article 1er du décret n° 50 143 du 1er février 1950, en remplacement de M. Pierre Bordier et de Mme Colette Mélot, titulaires, et de M. Louis Duvernois et Mme Brigitte Gonthier-Maurin, suppléants.
Par ailleurs, j’invite la commission des affaires sociales à présenter des candidatures pour :
- la Commission permanente pour la protection sociale des Français de l’étranger, en application de l’article 3 du décret n° 92-437 du 19 mai 1992, en remplacement de M. Jean-Pierre Cantegrit ;
- le Comité de surveillance de la caisse d’amortissement de la dette sociale, en application de l’article 3 de l’ordonnance n° 96 50 du 24 janvier 1996 et de l’article 4 du décret n° 96-353 du 24 avril 1996, en remplacement de M. Alain Vasselle, titulaire ;
- le Comité de surveillance du Fonds de solidarité vieillesse, en application de l’article R. 135-6 du code de la sécurité sociale, en remplacement de M. Dominique Leclerc, titulaire.
Les nominations au sein de ces organismes extraparlementaires auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.
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Loi de finances pour 2011
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances pour 2011 (projet n° 110 rectifié, rapport n° 111).
Nous poursuivons la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances.
TITRE IER (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
II. – RESSOURCES AFFECTÉES (suite)
A. – Dispositions relatives aux collectivités territoriales (suite)
M. le président. Hier soir, nous avons entamé l’examen des dispositions relatives aux collectivités territoriales.
Article additionnel après l'article 18
M. le président. L'amendement n° I-160, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, il est inséré un article 3 bis ainsi rédigé :
« Art. 3 bis - La taxe sur les surfaces commerciales est majorée de 10 % pour les surfaces de vente de plus de 1 000 m² lorsqu'elles se situent à plus de 800 m d'une ou plusieurs zones d'habitation peuplées au total d'au moins 5 000 habitants ou à plus de 800 m d'une station de transport en commun desservi par train, tramway ou bus fonctionnant les jours d'ouverture des commerces concernés et sur des amplitudes horaires comparables à celles des commerces concernés. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
Article 19
I. – L’article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 1613-1. – Le montant de la dotation globale de fonctionnement est fixé chaque année par la loi de finances.
« En 2011, ce montant, égal à 41 307 701 000 €, est diminué de 42 844 000 € en application du II de l’article 6 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 et du 1.2.4.2 et du II du 6 de l’article 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010. »
II. – L’article L. 3334-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En 2011, le montant de la dotation globale de fonctionnement des départements mise en répartition est augmenté de 67 millions d’euros par rapport à 2010. »
III. – Le premier alinéa de l’article L. 4332-4 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, en 2011, le montant de la dotation globale de fonctionnement des régions mise en répartition en 2010 est reconduit. »
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’an dernier, à la même époque, M. le rapporteur général de la commission des finances affirmait, au sujet des collectivités territoriales : « L’augmentation de 0,6 % de la DGF en 2010 n’est évidemment pas considérable, mais elle aura le mérite de les obliger à améliorer leur gestion. »
Nous attendons aujourd’hui de connaître quelle formule il utilisera pour nous expliquer comment l’évolution, si l’on peut dire, de 0 % de la dotation générale de fonctionnement, la DGF, contribuera à améliorer la gestion de nos collectivités.
Monsieur le rapporteur général, l’article 19 incite les collectivités territoriales à « être pleinement associées à l’effort de maîtrise des dépenses publiques ».
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Eh oui !
Mme Marie-France Beaufils. Voilà le sempiternel dogme que vous nous assénez depuis votre arrivée au pouvoir pour nous faire « avaler » les critères de Maastricht. L’on voit aujourd’hui où ils nous ont conduits : une situation dégradée des économies européennes, lorsqu’elles ne sont pas au bord de l’implosion, comme c’est le cas de la Grèce, de l’Irlande ou du Portugal.
Monsieur le rapporteur général, vous partez du principe que nos budgets locaux participeraient largement au déficit de la nation alors qu’ils ne représentent guère que 10 % de l’endettement de notre pays.
Quelle sera la capacité de nos collectivités à répondre aux besoins de nos concitoyens, alors que le « panier du maire » est généralement estimé au double de l’inflation et que nos ressources vont être amputées de fait ? Une augmentation de la DGF de 0 %, si l’on peut appeler cela une augmentation, alors que l’inflation globale sera de 2 %, ne nous permettra pas d’apporter à nos concitoyens des réponses de nature à remédier à la situation de plus en plus critique qui est la leur. Je sais bien que l’augmentation annoncée pour la DGF est légèrement supérieure à 0 %, mais elle porte sur la masse globale, qui tient compte de l’évolution de la population de notre pays.
Au cours des derniers budgets, la DGF a évolué, passant de 2 % à 0,6 % l’an dernier. En proposant aujourd’hui 0 %, vous nous annoncerez peut-être l’an prochain, si vous suivez la même tendance, une évolution négative,… toujours afin de mieux nous aider dans notre gestion, bien évidemment !
Le gel en valeur des dotations aux collectivités locales, auquel vont s’ajouter une baisse de garantie et des réductions de dotations de compensation, placera les collectivités locales dans une situation où elles ne pourront pas faire face à l’évolution de leurs coûts de fonctionnement et leur interdira toute possibilité d’investissement. Vous savez que nombre de nos charges sont incompressibles, que les augmentations des tarifs du gaz et de l’électricité, du coût de l’énergie, dont vous êtes les principaux décideurs, nous placent dans l’obligation soit d’augmenter les impôts, soit de supprimer des services.
Nous considérons pour notre part que ces services de proximité utiles, efficaces et à la disposition de l’ensemble de la population, permettent l’atténuation des inégalités, comme le montre l’étude France, portrait social réalisée par l’INSEE, dont l’édition 2010 a été rendue publique ces derniers jours.
C’est donc bien d’une politique de rigueur pour les collectivités et leurs habitants dont il faut parler. Dans un article intitulé La rigueur n’épargne pas les finances locales, paru dans un journal économique et faisant notamment référence à la note de conjoncture de Dexia, on pouvait lire : « En 2011 et au cours des années suivantes, compte tenu du gel des dotations, du renforcement de la péréquation, du moratoire sur les normes mais également des impacts de la mise en place des réformes fiscale, territoriale et de la dépendance, les budgets locaux devraient être revus à la baisse. »
Le gel des dotations de l’État aura obligatoirement des conséquences graves sur nos budgets. L’an dernier, la progression de la DGF, de 0,6 %, s’est traduite par une baisse de la dotation pour environ 16 000 communes. Combien d’entre elles supporteront les conséquences du gel prévu cette année ? On peut craindre que 6 000 collectivités, dont le potentiel financier est supérieur de 75 % à la moyenne nationale, ne voient leur dotation réduite de 5 %, voire de 6 %.
L’indexation que nous proposons permettrait, à compter de 2011, que la dotation globale de fonctionnement soit calculée sur la base de la DGF inscrite dans la loi de finances de l’année précédente, en fonction d’un indice faisant la somme du taux prévisionnel d’évolution du prix à la consommation des ménages hors tabac, pour la même année, et de la moitié de la croissance prévue du produit intérieur brut marchand. Ce mode de calcul permettrait aux collectivités de retrouver des marges de manœuvre pour mener à bien leur action.
Le gel de la DGF que vous proposez aura des conséquences catastrophiques pour les finances de toutes les collectivités locales. Or, ces dernières permettent aux entreprises de continuer leur activité, en particulier dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.
C’est pourquoi nous considérons que votre décision de geler la DGF constitue une mise en cause des possibilités dont disposent les collectivités pour répondre sur le terrain aux besoins des habitants de l’ensemble de notre pays.
M. le président. L'amendement n° I-170, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gérard Miquel.
M. Gérard Miquel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cet amendement de principe vise à supprimer l’article 19, qui prévoit une évolution faible de la DGF pour 2011.
Dans la continuité de la politique menée par les différents gouvernements depuis 2007, la DGF sert, cette année encore, de variable d’ajustement du budget de l’État.
Après avoir supprimé, en 2009, l’indexation de la dotation globale de fonctionnement sur l’inflation majorée de 50 % de la croissance du produit intérieur brut, le PIB, mise en œuvre sous Lionel Jospin, le Gouvernement supprime aujourd’hui, dans l’article 19, l’indexation automatique de la DGF et plonge ainsi les collectivités territoriales dans l’imprévisibilité budgétaire, puisqu’il reviendra dorénavant à la loi de finances annuelle d’en fixer le montant.
Eu égard à la politique d’austérité budgétaire à laquelle le Gouvernement contraint les collectivités territoriales par l’application du gel en valeur à l’ensemble des concours financiers de l’État, il y a fort à parier que, dans les années à venir, l’évolution de la DGF sera égale ou proche de zéro. Pour 2011, le Gouvernement proposait initialement une évolution réduite à 0,2%, soit seulement 86 millions d’euros.
Toutefois, le quasi-gel de la DGF n’est pas la seule menace qui pèse sur les recettes budgétaires des collectivités territoriales. Chaque année, un besoin de financement important se manifeste au sein de la DGF : prise en compte du recensement rénové, qui pèse pour plus de 73 millions d’euros sur la DGF des communes et des départements ; montée en puissance de l’intercommunalité, avec les prévisions de regroupements de communautés de communes, qui coûtera en 2011 89 millions d’euros ; prise en compte du coefficient d’intégration fiscal le plus élevé pour le calcul de la nouvelle DGF ; évolution faible de la péréquation verticale, pour un montant inférieur à 180 millions d’euros.
Pour parvenir à financer cette augmentation interne à la DGF en restant dans une enveloppe fermée, le Gouvernement a pris une double décision.
En premier lieu, il a décidé de geler le montant des composantes de la dotation forfaitaire de la DGF perçue par les communes et les départements, et de diminuer la dotation des régions.
En second lieu, il a décidé de réduire la dotation de compensation de la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle perçue par les communes et leurs groupements, et d’écrêter le complément de garantie perçu par les communes.
Ces mesures d’économies entraîneront donc une perte de recettes budgétaires pour les collectivités territoriales, particulièrement pour les communes dont la population stagne ou diminue.
Sur l’initiative du rapporteur général de la commission des finances à l’Assemblée nationale, Gilles Carrez, et du rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », les députés ont été contraints, cette année encore, à de nombreuses contorsions budgétaires pour tenter de ramasser ici et là quelques millions d’euros. Ils ont notamment dénoncé la gestion opportune du Gouvernement qui comptait conserver pour l’État le bénéfice de la diminution de la dotation de compensation pour pertes de bases, à la suite de la suppression de la taxe professionnelle, pour un montant de 149 millions d’euros.
Ainsi, l’Assemblée nationale a choisi, au motif qu’ils disposaient encore de sommes inutilisées, de diminuer, d’une part, le Fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des catastrophes naturelles et, d’autre part, le Fonds d’aide au relogement d’urgence, le FARU.
Dans tous les cas, puisque la DGF et les concours financiers évoluent au sein d’une enveloppe fermée, l’augmentation d’une dotation se fait toujours au détriment d’une autre. C’est un jeu à somme nulle pour le Gouvernement, mais cela se traduit par des pertes bien réelles pour les collectivités territoriales.
Le vrai problème est inscrit dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014. Il s’agit du gel en valeur de l’ensemble des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales. Tant que vous ne permettrez pas une évolution dynamique des dotations, vous serez condamnés tous les ans à gérer la pénurie budgétaire, et les collectivités territoriales seront condamnées à voir diminuer le montant de leurs recettes. Dans ces conditions, toute volonté de renforcer la péréquation est vouée à l’échec !
Notre groupe s’est vivement opposé au gel en valeur des dotations dans le projet de loi de programmation des finances publiques.
Dans cet esprit, il ne peut accepter aujourd’hui le quasi- gel de la dotation globale de fonctionnement et les nombreuses manœuvres budgétaires qu’il induit.
Au-delà de tout ce que je viens d’énoncer, il en va de l’avenir de l’investissement des collectivités, avec les répercussions que la baisse de ce dernier aura sur l’activité des entreprises et sur l’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Comme l’a indiqué très justement M. Gérard Miquel, c’est un amendement de principe. Je vais donc y apporter une réponse de principe ! (Sourires.)
Compte tenu des difficultés des finances publiques, les collectivités locales sont traitées ni plus, ni moins comme l’État. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.) Comment voulez-vous qu’elles soient exonérées de la contrainte commune et comment envisagez-vous de dire à nos concitoyens que les collectivités territoriales peuvent en être exemptées ? C’est totalement contraire au bon sens !
Dans cette discussion du volet du projet de loi de finances relatif aux collectivités territoriales, nous allons bien entendu faire au mieux et éventuellement apporter quelques rectifications. Toutefois, vous connaissez le cadre macroéconomique actuel. Il n’y a pas de surprise ! Nous appliquons simplement la clause d’égalité de traitement. Il est quand même bien naturel que tous les budgets publics soient soumis aux mêmes contraintes. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État auprès du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, chargé de la fonction publique. Mesdames, messieurs les sénateurs, je profiterai de cette première intervention sur le sujet des collectivités territoriales pour préciser un ou deux points déjà énoncés par M. le rapporteur général et pour évoquer le cas particulier de la DGF. Cela me permettra de faire ensuite des réponses plus laconiques.
Monsieur le sénateur, vous proposez la suppression de l’article 19 et donc le rétablissement de l’indexation de la DGF sur l’inflation, avec une progression de 1,5 % en 2011.
Tout d’abord, je voudrais vous dire la même chose que le rapporteur général – cela ne vous surprendra pas –, à savoir que l’objectif de maîtrise des dépenses publiques impose un effort évidemment partagé et auquel les collectivités territoriales sont associées. Ce n’est pas simplement une vue de l’esprit, c’est surtout un principe de cohérence puisque, pour le budget de l’État, l’effort historique de stabilisation de la dépense en valeur sur trois ans, hors charge de la dette et pensions, a été décidé.
Il ne faut pas oublier que les concours aux collectivités territoriales constituent le deuxième poste des dépenses de l’État, après celui de l’éducation nationale. Dès lors, il se situe devant la charge de la dette et le budget de la défense. La DGF représente 75 % de ces concours. Aussi, lorsque l’on évoque ce sujet, on n’est pas en train de parler de montants secondaires, loin s’en faut !
Par définition et comme l’a affirmé très justement M. le rapporteur général, l’objectif du « zéro valeur » suppose tout naturellement que la règle soit également appliquée sur l’ensemble des concours de l’État aux collectivités territoriales. C’est un effort qui doit être partagé ; je pense que nous sommes tous bien conscients du fait que, si l’on veut – et on le veut ! – aboutir à un rétablissement des comptes publics, il faut, de fait, que l’État ne soit pas le seul à s’imposer cet exercice.
En revanche, je voudrais souligner deux points qui sont, me semble-t-il, de nature à amoindrir un peu la portée de la critique que vous avez développée dans votre argumentation : d’une part, la stabilisation en valeur des concours financiers de l’État n’empêche pas une progression modérée de la DGF ; d’autre part, un effort significatif en faveur de la péréquation est effectué.
La DGF va progresser en 2011 à hauteur de 210 millions d’euros, soit 0,5 %. En plus de cette augmentation prévue dans le projet de loi de finances, l’Assemblée nationale a créé un nouveau prélèvement sur recettes de 115 millions d’euros qui abondera également la DGF. En outre, 8 millions d’euros seront prélevés sur différents fonds et lui seront affectés en 2011. La progression de cette dotation continue donc d’être assurée.
Par ailleurs, cette stabilisation des dotations forfaitaires s’accompagne d’un renforcement de la péréquation dont les dotations, elles, continueront de progresser. Ainsi, la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, la DSU, et la dotation de solidarité rurale, la DSR, progresseront l’une et l’autre de 6 % en 2011. Par conséquent, un effort est nécessaire et celui-ci doit être partagé par les collectivités territoriales. Par définition, la DGF représentant le concours le plus important, il va de soi qu’elle doit être affectée par cet effort. La progression de la DGF et le renforcement simultané des dispositifs de péréquation font que l’on comprend la logique de l’article 19.
Monsieur le sénateur, je ne peux que préconiser le retrait de l’amendement n° I-170, faute de quoi le Gouvernement émettra un avis défavorable sur celui-ci.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je ne ferai cette déclaration qu’une seule fois alors même qu’elle serait à mon avis également valable pour l’évolution de la dotation générale de décentralisation, la DGD.
Personne ne souhaite plus que moi voir la dépense publique maîtrisée et accompagner le Gouvernement dans cet effort ; mais cela supposerait que ce dernier s’engage à ne pas laisser filer l’augmentation des dépenses.
Or j’ai décidé de tenir une main courante de ce qui nous arrive tous les jours. La commission d’évaluation des normes se réunira demain et, la semaine prochaine, nous aurons une réunion de la commission d’évaluation des charges. Tous les jours, le Gouvernement créé des dépenses supplémentaires qui s’imposent aux collectivités locales ! Monsieur le rapporteur général, il n’est pas possible de dire qu’il faut que les collectivités participent à l’effort si, en même temps, la charge ne cesse continuellement d’augmenter.
Je vais illustrer mon propos par quelques exemples. L’État n’a pas assez d’argent pour s’occuper des jeunes mineurs délinquants et il les met donc à charge du département, avec l’obligation conséquente d’en couvrir la dépense.
De même, il existait autrefois des volontaires civils chez les sapeurs pompiers dans les services départementaux ; or l’État vient de supprimer la possibilité d’utiliser les volontaires du service civil. En outre, nous venons de voter la réforme des retraites ; mais tout trimestre supplémentaire avant la retraite est une augmentation du revenu de solidarité active, le RSA, non compensée. On pourrait allonger comme cela la liste. Il n’y a d’ailleurs pas un seul jour où l’on ne constate pas une nouvelle augmentation de charge !
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai une seule demande à vous faire, et je ne vous la répéterai pas : il n’est pas possible de vous aider à maîtriser la dépense si vous ne prenez pas l’engagement d’arrêter le massacre, de faire cesser l’augmentation permanente des charges supportées par les collectivités territoriales.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai bien entendu ce que vous avez dit sur la stabilisation en valeur, sur le prélèvement sur recettes et sur les modifications apportées par l’Assemblée nationale. Mais vous oubliez que, comme l’ensemble des mesures sont toujours dans l’enveloppe normée, ce sont les autres collectivités qui supportent l’impact des augmentations. Par exemple, pour la DSU et la DSR, l’augmentation de 6 % se fait au détriment de la dotation des autres collectivités qui auront moins de marge de manœuvre pour améliorer la solidarité en direction de ces communes.
Vous nous dites également que vous allez conserver des moyens pour la péréquation. Mais c’est Mme Lagarde elle-même qui, lors de sa présentation au comité des finances locales, affirmait que cette loi de finances parvenait difficilement à opérer une véritable péréquation à l’égard des communes et que c’est un travail qui allait devoir être mené.
Vous ne pouvez pas nous dire une chose et son contraire ! La réalité, aujourd’hui, comme vient de le rappeler M. le rapporteur général, est que vous voulez faire participer les collectivités territoriales à la réduction des dépenses publiques. Vous oubliez que, si le budget de l’État est en grande fragilité aujourd’hui, c’est quand même en raison de l’importante diminution des recettes qui l’alimentaient que nous observons depuis votre arrivée au Gouvernement.
Ces décisions-là, les collectivités ne les ont pas prises. Je ne connais pas de collectivités ayant baissé leurs impôts et donc leurs ressources ! Aujourd’hui, vous leur demandez d’assumer des décisions que vous avez prises et qui ont des conséquences sur l’ensemble de votre activité.
J’ajouterai un dernier mot pour expliquer pourquoi notre groupe votera en faveur de cet amendement. La possibilité donnée aux collectivités territoriales d’intervenir grâce à leurs moyens financiers en investissement est en train de se réduire, comme l’Observatoire des finances locales a pu le démontrer. Sur le fond, cela signifie que l’on va observer une diminution des interventions en direction de nombreuses entreprises qui, aujourd’hui, fonctionnent et vivent grâce aux marchés des collectivités territoriales. Je vous rappelle tout de même que l’investissement des collectivités territoriales représente le maintien de 800 000 emplois dans le secteur privé ! L’impact risque donc d’être plus lourd que vous ne le pensez !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vais reprendre l’argumentation qui a été développée par mes deux précédents collègues.
Monsieur le secrétaire d’État, vous voulez entraîner les collectivités locales dans ce que vous appelez un cercle vertueux sur le plan budgétaire, avec à la clé des économies substantielles ; néanmoins, je tiens à rappeler le chiffre qui a été évoqué tout à l’heure. Pour employer une expression un peu triviale, je serais tenté de dire qu’en termes d’endettement les collectivités locales ne « boxent » pas dans la même catégorie que le Gouvernement puisque seulement 10 % de l’endettement du pays est tributaire de ce qui se passe dans les collectivités territoriales.
Ensuite, quand vous nous dites que l’on doit « scotcher » les collectivités à l’État, c’est négliger quelque peu le fait que, en période de difficultés budgétaires et de crise sociale, les dépenses sociales et de solidarité explosent à l’échelon des départements, augmentant de manière exponentielle. Ce constat est vrai, et personne ne peut le nier ! Mais là où il s’aggrave, monsieur le secrétaire d’État, c’est que l’allocation personnalisée d’autonomie, ou APA, le RSA et la prestation de compensation du handicap, ou PCH, sont des responsabilités que le Gouvernement a déléguées aux départements et auxquelles ces derniers ne peuvent pas échapper. Les départements sont donc obligés de supporter l’augmentation considérable de charges qui leur ont été déléguées par un État qui refuse de les aider à assumer ces missions. Vous comprendrez donc facilement que nous dénoncions cette injustice !
Par ailleurs, le gel des dotations va entraîner un affaiblissement du fonctionnement des collectivités territoriales, ce qui aura un contrecoup sur l’investissement. Il n’est pas inutile de rappeler que de 60 % à 70 % des investissements pratiqués dans ce pays, notamment dans le bâtiment, le sont par les collectivités territoriales.
À force de réduire la voilure des deux côtés, arrivera un moment où il sera extrêmement difficile d’expliquer aux collectivités territoriales qu’elles doivent toujours faire mieux avec des moyens qui sont rognés budget après budget. Je vous signale au passage que, sur les prestations que j’évoquais tout à l’heure – cela a déjà été dit et ce sera sans doute répété de nombreuses fois après moi –, la dette de l’État par rapport aux collectivités est immense. À titre d’exemple, pour le seul département de la Haute-Garonne, le manque à gagner pour le RSA, l’APA et la PCH depuis l’exercice 2008 s’élève à 400 millions d’euros.
Vous comprendrez bien que, pour toutes ces raisons, nous voterons avec conviction cet amendement.