Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Béteille, rapporteur. Les arguments que j’ai exposés tout à l’heure militent également en faveur du rejet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. La régression que représente l’article 6 est évidente ! Lorsqu’on a commencé à envisager l’institution d’un contrat du type de ce qui est finalement devenu le PACS, un rapport a été rédigé par M. Hauser, professeur de droit à Bordeaux, à la demande M. le garde des sceaux Jacques Toubon. Ce professeur de droit préconisait la signature d’un tel contrat chez le notaire parce qu’il estimait normal que des droits soient reconnus par la signature d’une convention passée devant notaire.
Toutefois, la loi votée par le Parlement en 1999 n’a pas retenu cette préconisation. Certes, elle prévoit une convention, mais qui doit être déposée dans un lieu public. Symboliquement, elle va au-delà d’une simple convention.
L’évolution qui s’est produite ensuite, y compris sous des gouvernements de droite, a été dans le même sens. Ainsi, alors que Pascal Clément était garde des sceaux, il a été prévu que le PACS serait inscrit en marge des actes d’état civil, bien qu’il ne soit pas un acte d’état civil au sens strict ; cela a encore conforté son aspect symbolique.
Aujourd’hui, pour des raisons qui m’échappent totalement – à moins qu’il ne faille croire, comme M. Mézard, que cette décision est la conséquence d’une négociation entre les professions, ce qui serait détestable ! –, on revient totalement en arrière. Le PACS ne serait plus un acte symbolique signé au greffe du tribunal ou en mairie, comme le proposait le rapport Guinchard, mais deviendrait un acte sous seing privé signé chez un notaire, point final !
Aujourd’hui, 90 % des couples qui concluent un PACS sont hétérosexuels, ce qui est d’ailleurs conforme à la répartition dans l’ensemble de la population. Au début, certains ont opté pour le PACS parce qu’ils n’avaient aucun autre moyen de faire valoir des droits, mais ce n’est plus le cas maintenant. Actuellement, ceux qui concluent un PACS pensent qu’ils signent un acte symbolique et pas seulement un acte sous seing privé !
C’est la raison pour laquelle je considère que cet article est dangereux et qu’il constitue une véritable régression. Et nous le dirons publiquement, faites-nous confiance !
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Actuellement, le PACS peut comporter des dispositions relatives aux modalités de sortie de ce pacte ou aux intérêts patrimoniaux des uns et des autres. À cette fin, nombre de personnes signent déjà une convention chez un notaire.
M. Jacques Mézard. Bien sûr, mais là n’est pas la question !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Certes, cette démarche n’est pas obligatoire, mais, à partir du moment où ce dernier prépare l’acte, il l’enregistre.
Monsieur Michel, ce n’est pas parce que les contractants déposent une convention au greffe du tribunal que leur union est une cérémonie !
Pourquoi est-ce en marge de l’état civil ? Si tel n’était pas le cas, il faudrait créer un fichier des PACS, afin d’éviter que certaines personnes ne souscrivent plusieurs PACS.
Le présent texte ne fait que confirmer ce qui existe déjà. Il ne faut pas lui faire dire plus qu’il ne dit ! Inutile de forcer le trait !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel. Monsieur le président de la commission des lois, pourquoi changer le système actuel ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais on ne change rien !
M. Jean-Pierre Michel. Lorsqu’il faut rédiger une convention compliquée devant notaire, en raison d’un mariage antérieur, de la détention de biens personnels, d’enfants issus d’un précédent mariage, on se rend ensuite au greffe du tribunal, pour formaliser ce document dans un lieu officiel de la République, en quelque sorte.
Je vous rappelle, mon cher collègue, que le PACS a été inscrit dans la partie du code civil concernant non pas les contrats, mais le droit des personnes. Et cela a été obtenu de haute lutte.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. On a eu tort !
M. Jean-Pierre Michel. Peut-être ! La droite parlementaire y était opposée, mais telle est la loi !
Aujourd’hui, il existe trois façons légales de vivre en couple : le mariage, qui reste la forme suprême, le PACS, le concubinage, inscrit dans la loi à la demande du Sénat et du doyen Gélard.
Pourquoi modifier ce qui existe aujourd’hui, si ce n’est pour faire plaisir à une profession ? Si celle-ci ne tire de cette mesure que 10 euros, alors, cette disposition n’a aucun sens !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
I. – (Non modifié) L’article 71 du code civil est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa, les mots : « par le juge d’instance du lieu de sa naissance ou par celui de son domicile » sont remplacés par les mots : « par un notaire ou, à l’étranger, par les autorités diplomatiques ou consulaires françaises compétentes » ;
2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« L’acte de notoriété est établi sur la foi des déclarations d’au moins trois témoins et de tout autre document produit qui attestent des prénoms, nom, profession et domicile du futur époux et de ceux de ses père et mère s’ils sont connus, du lieu et, autant que possible, de l’époque de la naissance et des causes qui empêchent de produire l’acte de naissance. L’acte de notoriété est signé par le notaire ou l’autorité diplomatique ou consulaire et par les témoins. »
II. – (Non modifié) L’article 72 du même code est abrogé.
III. – L’article 317 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : «, dans les conditions prévues aux articles 71 et 72, » sont supprimés ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« L’acte de notoriété est établi sur la foi des déclarations d’au moins trois témoins et, si le juge l’estime nécessaire, de tout autre document produit qui attestent une réunion suffisante de faits au sens de l’article 311-1. » ;
3° Au troisième alinéa, la fin de la phrase est complétée par les mots : «, y compris lorsque celui-ci est décédé avant la déclaration de naissance » ;
4° L’article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ni l’acte de notoriété, ni le refus de le délivrer ne sont sujets à recours. »
Mme la présidente. L'amendement n° 35, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Madame la présidente, je souhaite faire une présentation conjointe des amendements nos 35 et 36.
Mme la présidente. J’appelle donc également en discussion l'amendement n° 36.
Cet amendement, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer le mot :
notaire
par les mots :
officier d'état civil
II. - Alinéa 4, seconde phrase
Remplacer les mots :
le notaire
par les mots :
l'officier d'état civil
Veuillez poursuivre, monsieur Mézard.
M. Jacques Mézard. Il s’agit encore ici du processus qui consiste à renvoyer un certain nombre d’actes vers les notaires, sans que l’on comprenne bien quel est l’objectif poursuivi, si ce n’est cette tendance à la déjudiciarisation des actes que nous avons dénoncée.
Par conséquent, nous souhaitons la suppression de cet article et, à tout le moins, le remplacement des mots « le notaire » par les mots « l’officier d’état civil ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Béteille, rapporteur de la commission des lois. Les notaires établissent d’ors et déjà des actes de notoriété dans un certain nombre de domaines. Il s’agit effectivement d’étendre leur compétence à actes qui ne sont pas des actes d’état civil, mais des actes de notoriété qui suppléent à l’impossibilité matérielle de produire son acte de naissance.
Cela s’inscrit tout à fait dans la mission traditionnelle des notaires. Le coût de cet acte sera d’ailleurs très modeste. Par conséquent, j’aimerais que l’on cesse de répéter que les notaires obtiennent de nouvelles compétences à titre de compensation. On ne peut parler de compensation à propos d’un acte dont le coût est aussi faible !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Concernant l’acte de notoriété, le notaire est pleinement dans son rôle. Il est un officier ministériel, à qui l’on demande de constater un état de droit, sur la foi des déclarations de témoins quant aux circonstances de la naissance, à l’identité des parents, etc.
D’ailleurs, le notaire dresse déjà des actes de notoriété en matière d’héritage, et ce depuis bien longtemps. L’extension de la compétence du notaire en la matière est donc parfaitement naturelle, et elle n’aura pas de conséquences pécuniaires importantes.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Si cette évolution était si naturelle que cela, on se demande bien pourquoi on a attendu deux siècles pour lui donner force de loi ! Mais j’imagine qu’il existe de nombreuses autres dispositions qui attendront encore quelques siècles pour entrer dans la législation...
Quant à l’argument consistant à dire qu’il ne s’agit guère que de quelques dizaines d’euros et que cela ne change donc rien, j’ai du mal à l’entendre. Évidemment, on peut estimer qu’il est nécessaire de donner plus à ceux qui ont beaucoup, mais ce n’est pas vraiment convaincant. Vous savez bien que la vraie raison de cet article est tout autre.
M. Laurent Béteille, rapporteur. Ils n’en feront qu’un seul dans leur vie !
M. Jacques Mézard. La vraie question est celle du déplacement de compétences et de responsabilités des greffes des tribunaux vers les études de notaires.
Je n’ai strictement rien contre les études de notaires. J’ai dit tout à l’heure, dans la discussion générale, que cette profession avait su se moderniser afin de répondre de mieux en mieux aux attentes de nos concitoyens. Mais de là à vider systématiquement les compétences des tribunaux, il y a un pas !
Vous évoquez l’intérêt du justiciable, qui dépenserait peu en allant chez le notaire. Mais la vraie raison de cette opération, c’est que vous voulez retirer du travail et des responsabilités aux greffes des tribunaux d’instance, parce que vous connaissez les problèmes de ces derniers et que vous entendez les résoudre par la « déjudiciarisation » massive. Ayez au moins le courage de le reconnaître, plutôt que de nous « servir » des arguments concernant le coût de ces actes de notoriété, les unités de valeurs, etc.
Tout cela relève en fait d’un choix politique, et ce choix politique, nous ne le partageons pas.
M. Jean-Pierre Michel. Très bien !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
(Non modifié)
Après l’article 4 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat, il est rétabli un article 5 ainsi rédigé :
« Art. 5. – À la demande de l’intéressé, les agents diplomatiques et consulaires peuvent faire appel à un notaire pour l’exercice de leurs pouvoirs notariaux. Un décret en Conseil d’État précise les modalités de rémunération du notaire par l’intéressé. » – (Adopté.)
Article 8 bis
(Non modifié)
Après l’article 4 de la loi du 25 ventôse an XI précitée, il est rétabli un article 6 ainsi rédigé :
« Art. 6. – Les notaires contribuent à la diffusion des informations relatives aux mutations d’immeubles à titre onéreux. Ils transmettent au conseil supérieur du notariat les données nécessaires à l’exercice de cette mission de service public dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État. » – (Adopté.)
Article 9
(Supprimé)
Article 9 bis
(Non modifié)
L’ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat est ainsi modifiée :
1° L’article 6-1 devient l’article 6-2 ;
2° Après l’article 6, il est rétabli un article 6-1 ainsi rédigé :
« Art. 6-1. – Dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, le conseil supérieur du notariat centralise et diffuse les données visées à l’article 6 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat.
« La mise en œuvre de cette mission de service public peut être déléguée par le conseil supérieur du notariat à tout organisme de droit privé placé sous son contrôle. » – (Adopté.)
Chapitre III bis
Dispositions relatives à la profession d’huissier de justice
(Division et intitulé nouveaux)
Article 9 ter (nouveau)
Le 1° de l’article 6 de l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers de justice est supprimé. – (Adopté.)
Article 9 quater (nouveau)
L’article 7 bis de l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 7 bis. – L’ensemble des huissiers de justice relevant de chaque chambre régionale se réunit pour élire le délégué appelé à faire partie de la chambre nationale, dans les conditions prévues par un décret en Conseil d’État. » – (Adopté.)
Article 9 quinquies (nouveau)
Le premier alinéa de l’article 9 bis de l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi rédigé :
« Il est institué une caisse ayant pour objet de consentir des prêts aux aspirants aux fonctions d’huissier de justice et aux huissiers de justice en activité pour l’acquisition d’une étude individuelle ou de parts sociales d’une structure d’exercice de la profession. »
Mme la présidente. L'amendement n° 41, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le mot :
Le
par les mots :
La première phrase du
et le mot :
rédigé
par le mot :
rédigée
La parole est à M. le rapporteur.
M. Laurent Béteille, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 9 quinquies, modifié.
(L'article 9 quinquies est adopté.)
Chapitre IV
Dispositions relatives aux professions d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire
Article 10
Le titre Ier du livre VIII du code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 811-4 est ainsi modifié :
a) Le septième alinéa est ainsi rédigé :
« – deux professeurs ou maîtres de conférences de droit, de sciences économiques ou de gestion, désignés par le ministre chargé des universités ; » ;
b) Le dixième alinéa est ainsi rédigé :
« Lorsqu’elle est saisie en application de l’article L. 811-6 ou siège comme chambre de discipline, la commission comprend en outre trois administrateurs judiciaires inscrits sur la liste, élus par leurs pairs dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. » ;
2° L’article L. 812-2-2 est ainsi modifié :
a) Le septième alinéa est ainsi rédigé :
« – deux professeurs ou maîtres de conférences de droit, de sciences économiques ou de gestion, désignés par le ministre chargé des universités ; » ;
b) Le dixième alinéa est ainsi rédigé :
« Lorsqu’elle est saisie en application de l’article L. 812-4 ou siège comme chambre de discipline, la commission comprend en outre trois mandataires judiciaires inscrits sur la liste, élus par leurs pairs dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. » ;
2° bis (nouveau) L’article L. 811-11 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les administrateurs judiciaires établissent, au terme de chaque exercice, une situation financière qu’ils communiquent au conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires, au plus tard dans les six mois de la clôture de l’exercice. Le contenu de cette situation financière, défini par décret, est adapté selon que l’administrateur tient une comptabilité d’encaissement ou d’engagement. » ;
3° La dernière phrase du dernier alinéa de l’article L. 813-1 est supprimée ;
4° L’article L. 811-14 est complété par les mots et un alinéa ainsi rédigé : « à compter de la commission des faits ou, lorsque les faits se rapportent à l’exercice professionnel, à compter de l’achèvement de la mission à l’occasion de laquelle ils ont été commis.
« Si l’administrateur judiciaire est l’auteur de faits ayant donné lieu à une condamnation pénale, l’action se prescrit par deux ans à compter de la date à laquelle cette condamnation est devenue définitive. » ;
5° Après l’article L. 814-11, sont insérés les articles L. 814-12 et L. 814-13 ainsi rédigés :
« Art. L. 814-12. – Tout administrateur judiciaire ou mandataire judiciaire inscrit sur les listes qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.
« Art. L. 814-13. – Un décret détermine la liste des actes de procédure envoyés ou reçus par les administrateurs judiciaires, les mandataires judiciaires et les personnes désignées en application du deuxième alinéa de l’article L. 811-2 ou du premier alinéa du II de l’article L. 812-2 qui peuvent faire l’objet d’une communication par voie électronique.
« Les administrateurs judiciaires et les mandataires judiciaires procèdent par voie électronique lorsque les tiers destinataires ou émetteurs des actes ont expressément demandé ou consenti à ce qu’il soit procédé selon cette voie. À cette fin, ils utilisent le portail mis à leur disposition par le conseil national en application de l’article L. 814-2. Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, fixe les conditions d’application du présent alinéa. » ;
6° (nouveau) L’article L. 814-2 est ainsi modifié :
a) À la fin du premier alinéa, les mots : «, de contrôler leurs études et de rendre compte de l’accomplissement de ces missions dans un rapport qu’il adresse chaque année au garde des sceaux, ministre de la justice. » sont remplacés par les mots : « et de contrôler leurs études. » ;
b) Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Au plus tard le 1er janvier 2014, le conseil national met en place, sous sa responsabilité, un portail électronique offrant des services de communication électronique sécurisée en lien avec les activités des deux professions. Ce portail permet, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, l’envoi et la réception d’actes de procédure par les administrateurs judiciaires, les mandataires judiciaires et les personnes désignées en application du deuxième alinéa de l’article L. 811-2 ou du premier alinéa du II de l’article L. 812-2.
« Le conseil national rend compte de l’accomplissement de ces missions dans un rapport qu’il adresse chaque année au garde des sceaux, ministre de la justice. » – (Adopté.)
Chapitre IV bis
Dispositions relatives à la profession de conseil en propriété industrielle
(Division et intitulé nouveaux)
Article 10 bis (nouveau)
Au second alinéa de l’article L. 422-13 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « avec les fonctions d’enseignement, ainsi qu’avec celles », sont remplacés par les mots : « avec la profession d’avocat et avec les fonctions d’enseignement, ».
Mme la présidente. L'amendement n° 12 rectifié, présenté par MM. Yung et Michel, Mme Klès, MM. Anziani, Sueur et Peyronnet, Mmes Bonnefoy et Boumediene-Thiery, M. Bérit-Débat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Supprimer cet article.
II. - En conséquence, supprimer le chapitre IV bis.
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Cet amendement est très largement inspiré par notre collègue Richard Yung, qui ne pouvait pas être présent parmi nous ce soir.
L’article 10 bis prévoit de rendre compatibles les professions d’avocat et de conseil en propriété industrielle, ou CPI. Concrètement, il vise à faire disparaître la profession de CPI en créant une profession d’avocat spécialiste en propriété industrielle. Cet objectif était également celui des articles 32 à 50 de la proposition de loi de M. Laurent Béteille relative à l’exécution des décisions de justice et aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées.
Ces articles, qui avaient été introduits en 2009 sur l’initiative de notre collègue M. Zocchetto, ont été supprimés en juin 2010 par l’Assemblée nationale, après que Mme Alliot-Marie, alors garde des sceaux, se fut exprimée contre la fusion des deux professions.
Les dispositions de l’article 10 bis ne sont pas plus acceptables que celles des articles 32 à 50, car elles nient la spécificité des deux professions. Il serait contreproductif d’autoriser le double exercice, car il est difficile de « marier » deux professions culturellement différentes.
Un tel mélange des genres mettrait d’ailleurs la France en complet décalage par rapport à ses partenaires européens. En effet, contrairement à ce que certains laissent croire, aucun État membre, en dehors du Portugal et de la Grèce – dont on connaît la faiblesse des filières « propriété industrielle » –, n’a mis en œuvre la fusion des professions d’avocat et de CPI. En Allemagne, par exemple, les Patentanwälte et les Rechtsanwälte exercent deux métiers distincts.
La réforme qu’il nous est proposé d’adopter poserait également des problèmes en termes de formation des futurs professionnels et, d’après la commission Darrois, elle ferait peser un risque d’« assèchement du recrutement des ingénieurs ».
D’aucuns affirment que cette fusion permettrait aux CPI de lutter contre la déréglementation. Or, dans les faits, cette profession est déjà déréglementée : les CPI exerçant dans d’autres États membres peuvent en effet venir exercer en France.
Par conséquent, la fusion risquerait d’entraîner, d’une part, la fuite à l’étranger des CPI refusant de devenir avocats et, d’autre part, un renforcement de l’activité des CPI étrangers en France. En d’autres termes, la fusion risquerait de provoquer une perte de compétitivité de la filière française de la propriété industrielle.
Par ailleurs, il importe de rappeler que l’idée de fusionner ces deux professions est très loin de faire l’unanimité parmi les professionnels concernés. La grande majorité des avocats spécialisés en propriété industrielle et des CPI exerçant leur activité dans les entreprises sont également opposés à la fusion.
Quant aux usagers de la propriété industrielle, ils y sont aussi défavorables, y compris le MEDEF ou l’AFEP, l’Association française des entreprises privées. (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP.)
L’initiative prise par notre rapporteur ne permettra pas de combler les lacunes qui ont été mises en exergue par la commission Darrois. Force est de constater que les dispositions de l’article 10 bis ne répondent pas à l’impérieuse nécessité de gagner la « bataille de l’intelligence ».
En conséquence, nous vous proposons d’adopter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous avons débattu de ces questions de nombreuses fois. Notre excellent collègue François Zocchetto avait déjà pris cette initiative, mais elle n’avait pas abouti à l’Assemblée nationale. Laurent Béteille, faisant preuve d’une belle persévérance, a déclaré que, s’il n’était plus question de fusionner les professions, il fallait modifier la loi de telle manière qu’elles puissent être exercées concurremment, à condition que l’on remplisse les conditions pour être avocat. Cela n’avait pas manqué de séduire la commission, au départ.
Je note au passage que M. Yung est inspiré par l’AFEP et le MEDEF : cela mérite tout de même d’être relevé ! (Sourires.) Je ne le souligne, au demeurant, que parce que vous-même avez cité ces deux organisations patronales, monsieur Anziani.
Il est vrai que nous avons prévu l’interprofession capitalistique. À partir de ce moment-là, les avocats et les CPI auront la possibilité de travailler ensemble, au sein de la même structure capitalistique. Hélas, il n’y a toujours pas d’accord véritable entre le barreau et les CPI, bien qu’on ait pu croire à un moment que c’était le cas.
Dans ces conditions, la commission des lois a donné ce matin un avis favorable sur cet amendement de suppression. Pour le moment, la situation n’est pas encore mûre, mais il n’est pas exclu qu’elle évolue. En effet, d’autres systèmes existent à l’étranger, et M. Anziani en a d’ailleurs cité certains. M. Yung est d’ailleurs expert en la matière, compte tenu de son expérience d’ancien directeur des affaires internationales de l’Office européen des brevets ; il a donc une parfaite connaissance des législations européennes sur la propriété industrielle.
Nous nous garderons donc d’insister, monsieur le ministre, d’autant que cet amendement risquerait de ne pas rencontrer plus de faveur auprès de certains membres de l’Assemblée nationale.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, garde des sceaux. L’exposé du président de la commission des lois est particulièrement éclairant sur cette affaire : plus on s’approche du résultat, plus on s’en éloigne, et le phénomène se répète à peu près à chaque fois qu’il est question de ce sujet. Cela signifie que les esprits ne sont pas tout à fait mûrs et qu’il existe un fossé important entre les annonces et ce que l’on souhaite réellement.
La commission semble se diriger vers un système qui présente au moins l’avantage de recueillir un accord général de base. Puisqu’il en est ainsi, et compte tenu des souhaits exprimés par le Gouvernement devant le Sénat lors le la première lecture de la proposition de loi et de ce qui s’est passé ensuite à l’Assemblée nationale, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.