Simplification et amélioration de la qualité du droit
Suite de la discussion d'une proposition de loi
(Texte de la commission)
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, de simplification et d’amélioration de la qualité du droit (proposition de loi n° 130 [2009-2010], texte de la commission n° 21, rapports nos 20, 3, 5 et 6).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 18.
Article 18
I. – Le chapitre Ier du titre III du livre III de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 1331-7, il est inséré un article L. 1331-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1331-7-1. – Le propriétaire d’un immeuble ou d’un établissement dont les eaux usées résultent d’utilisations de l’eau assimilables à un usage domestique en application de l’article L. 21310-2 du code de l’environnement, a droit, à sa demande, au raccordement au réseau public de collecte dans la limite des capacités de transport et d’épuration des installations existantes ou en cours de réalisation.
« Le propriétaire peut être astreint à verser à la collectivité organisatrice du service ou au groupement auquel elle appartient, dans les conditions fixées par délibération de l’organe délibérant, une participation dont le montant tient compte de l’économie qu’il réalise en évitant le coût d’une installation d’évacuation ou d’épuration individuelle réglementaire.
« Cette participation s’ajoute, le cas échéant, aux redevances mentionnées à l’article L. 2224-12-2 du code général des collectivités territoriales et aux sommes pouvant être dues par les intéressés au titre des articles L. 1331-2, L. 1331-3 et L. 1331-6.
« La collectivité organisatrice du service ou le groupement auquel elle appartient peut fixer des prescriptions techniques applicables au raccordement d’immeubles ou d’établissements mentionnés au premier alinéa du présent article, en fonction des risques résultant des activités exercées dans ces immeubles et établissements, ainsi que de la nature des eaux usées qu’ils produisent. Ces prescriptions techniques sont regroupées en annexes au règlement de service d’assainissement qui, par exception aux dispositions de l’article L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales, ne sont notifiées qu’aux usagers concernés » ;
2° À l’article L. 1331-8, la référence : « L. 1331-7 » est remplacée par la référence : « L. 1331-7-1 » ;
3° Le 4° de l’article L. 1331-11 est ainsi rédigé :
« 4° Pour assurer le contrôle des déversements d’eaux usées autres que domestiques et des utilisations de l’eau assimilables à un usage domestique ».
II. – Le propriétaire d’un immeuble ou d’une installation mentionnée à l’article L. 1331-7-1 du code de la santé publique qui est raccordé au réseau public de collecte sans autorisation à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, régularise sa situation en présentant au service d’assainissement chargé de la collecte des eaux usées du lieu d’implantation de l’immeuble ou de l’installation une déclaration justifiant qu’il utilise l’eau dans des conditions assimilables à un usage domestique. En l’absence de déclaration dans l’année suivant la publication de la loi n° … du … de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, l’article L. 1331-8 dudit code lui est applicable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 46 rectifié est présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Collin, Barbier et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Milhau, Plancade et Tropeano.
L'amendement n° 150 est présenté par Mmes Didier, Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour défendre l’amendement n° 150.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Encore une fois, sous couvert de clarification et de simplification du droit, il nous est proposé d’adopter des mesures qui nous semblent contestables.
En effet, l’article 18 tend à simplifier le régime applicable au déversement à l’égout d’eaux usées provenant d’activités économiques, mais dont les caractéristiques sont celles d’effluents domestiques.
Ainsi, vous supprimez la procédure d’autorisation, nécessaire à ce jour, prévue à l’article L. 1331-10 du code de la santé publique, en arguant que ce sera une source d’économies pour les collectivités.
À l’heure où les collectivités territoriales sont asphyxiées financièrement, nous trouvons étrange qu’une proposition de loi émanant de la majorité parlementaire se fonde sur de tels arguments.
Sur le fond, nous considérons qu’une telle mesure, compte tenu de son incidence potentielle sur l’environnement, aurait justifié qu’une étude d’impact soit produite afin d’éclairer les représentants de la nation que nous sommes. Tel n’a pas été le cas.
À l’inverse, il était initialement prévu de renvoyer à un décret le soin de définir les utilisations de l’eau assimilables à des usages domestiques. À cet égard, nous sommes satisfaits de l’évolution favorable permise par l’adoption, par la commission de l’économie au Sénat, d’un amendement qui a pour objet, au lieu de renvoyer la définition à un décret, de faire le lien entre la notion des « usages de l’eau assimilables à un usage domestique » et la définition figurant dans le code de l’environnement.
Nous considérons également, sur le fond, qu’au regard des enjeux en termes d’environnement d’une telle mesure il est nécessaire de maintenir un régime d’autorisation par la collectivité.
Pour cette raison, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 46 rectifié.
M. Jacques Mézard. Nous demandons la suppression de l’article 18, qui permettrait, en l’état, aux propriétaires d’immeubles ou d’établissements rejetant des eaux usées assimilables à un usage domestique d’être raccordés, à leur demande, au réseau public de collecte.
En tant que président d’une communauté d’agglomération ayant la compétence en matière d’assainissement, je peux vous dire, mes chers collègues, que, d’un point de vue purement technique, ce texte va créer des difficultés importantes pour nos collectivités.
En l’état actuel du droit, un tel raccordement nécessite une autorisation délivrée par les autorités municipales ou intercommunales. Elle représente, c’est certain, une formalité administrative qui induit des coûts de traitement pouvant aller de 1 000 à 2 000 euros par dossier.
Néanmoins, ce traitement administratif est très utile, puisqu’il permet à nos collectivités d’exercer un minimum de contrôle sur les raccordements effectués au titre des effluents assimilables aux rejets domestiques.
Toutefois, même si le pétitionnaire est appelé à participer aux frais de raccordement, nous estimons critiquable d’ôter ainsi des marges de contrôle et de régulation aux autorités compétentes. Ces dernières risquent en effet de devoir faire face à des demandes qu’elles ne pourront pas honorer, et ce en contrariété avec la loi, si les communes ne disposent pas en aval des capacités nécessaires de transfert et d’épuration.
La perte financière serait alors encore plus importante que ce que représente aujourd’hui le coût du traitement administratif des demandes.
J’entends bien que les dispositions examinées par les commissions compétentes permettront à la collectivité, sur le fondement d’une analyse technique, de rejeter une demande. Mais un tel cas donnera lieu à des conflits beaucoup plus difficiles à gérer que la situation existante.
Je ne pense donc pas que cet article contribue à la simplification et à l’amélioration de la qualité du droit. S’il peut permettre, dans un premier temps, de faire faire des économies aux collectivités, il risque de mettre celles qui ont compétence en matière d’assainissement dans une situation délicate.
Tel est l’objet de l’amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Saugey, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, en l’absence du rapporteur pour avis de la commission de l’économie, Bernard Maurey, retenu pour quelques instants, je me permets, en tant que rapporteur de la commission des lois saisie au fond, de répondre à la place de ce dernier.
M. le président. Je vous en prie, monsieur le rapporteur.
M. Bernard Saugey, rapporteur. Les auteurs de ces amendements identiques affirment que ce dispositif créerait des charges pour les collectivités.
Notre rapporteur pour avis souligne que l’article vise précisément l’inverse en simplifiant le régime des autorisations de déversement pour des effluents assimilables aux rejets domestiques.
De nombreux élus locaux constatent, en effet, que les mairies doivent faire face à plusieurs milliers de demandes d’autorisation sans toujours disposer des services techniques compétents, ce que je confirme pour ma part.
M. Maurey rappelle que la commission de l’économie a profondément amendé le dispositif afin de donner à la commune la possibilité d’édicter des prescriptions techniques par branche d’activité pour le dimensionnement et l’entretien des ouvrages de collecte des eaux usées.
En conséquence, la commission de l’économie a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Tout d’abord, cet article introduit une mesure de simplification.
Ensuite, il fixe clairement le pouvoir des autorités locales compétentes, qui pourront, par le biais du règlement de service, édicter si nécessaire des prescriptions particulières pour le raccordement des établissements concernés, notamment dans le secteur tertiaire, qu’il s’agisse, par exemple, des commerces, des hôtels, des restaurants. La collectivité conservera ainsi la possibilité d’établir des règles sur la nature des effluents déversés à l’égout.
C’est donc un bon article ; en conséquence, j’émets un avis défavorable sur les amendements visant à le supprimer.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. À l’heure actuelle, les eaux usées domestiques sont obligatoirement raccordées au réseau public de collecte quand il existe. C’est le fameux problème des services publics d’assainissement non collectif, les SPANC, mais ce n’est pas le sujet qui nous occupe aujourd’hui
S’agissant des effluents non domestiques, une autorisation de rejet à l’égout des eaux usées, émanant du maire ou de l’EPCI compétent, est nécessaire en vertu de l’article L. 1331-1 du code de santé publique.
À des fins d’allégement des procédures administratives et d’économie budgétaires, cette exigence d’autorisation de déversement serait supprimée.
Cette suppression pour de tels motifs me paraît particulièrement grave au regard des effets de la pollution. Il s’agit tout de même de la santé de nos concitoyens ! Je suis très étonné que l’on puisse, sous couvert d’économies, mettre de tels enjeux en balance.
Au sein de la commission de l’économie, qui a été saisie pour avis sur cet article, nous avons estimé, avec raison, me semble-t-il, que des précisions importantes auraient dû y être apportées, de façon à éviter plusieurs inconvénients.
Tout d’abord, il importe d’empêcher la confusion entre la participation pour raccordement à l’égout, la fameuse PRE, et le remboursement du coût des travaux effectués pour le compte du propriétaire par le service public d’assainissement lorsqu’il réalise la partie des branchements situés sous la voie publique.
Ensuite, il convient d’éliminer les possibilités de contentieux pour définir les responsabilités de chacun. S’il n’y a plus d’exigence d’autorisation, qui est responsable ?
Enfin, il faut se garder de mettre en difficulté les collectivités territoriales qui disposent de stations d’épuration aux capacités limitées. S’il n’y a plus d’autorisation préalable de déversement, qui gère sans aucun contrôle les capacités de nos stations d’épuration ?
Telles sont les raisons pour lesquelles je soutiens ces deux amendements de suppression.
En tout état de cause, les choses ne sont pas mûres, ni techniquement ni sur le plan administratif.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est pour cela que nous avons demandé une étude d’impact !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Je souhaite mettre en évidence une contradiction dans l’exposé même de la commission de l’économie.
M. le rapporteur pour avis de la commission de l’économie indique, dans son rapport : « De nombreux élus locaux constatent que les mairies doivent faire face à plusieurs milliers de demandes d’autorisation, sans toujours disposer des services techniques compétents. » Il ajoute : « les collectivités concernées n’arrivent pas à accorder toutes ces autorisations dans des délais raisonnables » et, un peu plus loin « Cette simplification est par ailleurs souhaitée par les acteurs économiques. »
Ces derniers, on les comprend, ont en effet tout intérêt à ce qu’il y ait le moins de contrôles possible et que l’autorisation soit quasi automatique ! Force est de constater qu’une telle disposition va totalement à l’encontre de tous les efforts qui ont été faits dans le cadre du Grenelle de l’environnement.
De surcroît, on peut lire dans ce même rapport qu’il convient de « préciser que le droit au raccordement au réseau public de collecte est soumis à l’existence de capacités de transfert et d’épuration en aval. »
M. Daniel Raoul. Oui !
M. Jacques Mézard. Autrement dit, le raccordement peut se faire sans avoir à demander une autorisation, mais les communes et les intercommunalités peuvent préciser que ce raccordement est soumis à l’existence de capacités de transfert et d’épuration en aval.
Si l’on voulait fabriquer du contentieux et compliquer la tâche de nos collectivités, on ne s’y prendrait pas autrement !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah oui !
M. Jacques Mézard. En l’occurrence, il s’agit non pas d’un affrontement entre la majorité et l’opposition, mais bien de la gestion quotidienne de nos services d’assainissement.
J’espère, par ces arguments, avoir convaincu la commission des lois, le Gouvernement et nos collègues de la sagesse de ces amendements de suppression.
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 46 rectifié et 150.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 18.
(L'article 18 est adopté.)
Article 19
I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après la première phrase de l’article L. 1334-3, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Dans le cas où le représentant de l’État a fait réaliser les travaux nécessaires en application du dernier alinéa de l’article L. 1334-2, ce contrôle est aux frais du propriétaire, du syndicat des copropriétaires ou de l’exploitant du local d’hébergement. » ;
2° L’article L. 1334-1-1 tel qu’il résulte de la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services, est ainsi rédigé :
« Art. L. 1334-1-1. – Le diagnostic prévu à l’article L. 1334-1 et le contrôle prévu à l’article L. 1334-3 sont réalisés par des opérateurs répondant aux conditions fixées à l’article L. 271-6 du code de la construction et de l’habitation. » ;
3° Le 5° de l’article L. 1334-12 est supprimé.
II. – (nouveau) Le III de l’article 38 de la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services est abrogé.
M. le président. L'amendement n° 94 rectifié bis, présenté par M. Sueur, Mme Blandin, MM. Collombat, Peyronnet, Anziani et Yung, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Ries, Lagauche, Daunis, Michel, Botrel et Percheron, Mme Blondin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement vise à supprimer l’article 19.
Nous savons que le plomb et les sels de métaux lourds issus de ce métal provoquent de graves contaminations. Nous savons aussi que la détection du plomb dans l’habitat est un problème de santé publique et nous soutenons ces démarches indispensables.
Cependant, l’article 19 de la proposition de loi vise simplement à modifier les mécanismes d’agrément de ceux qui pratiquent cette détection. Je voudrais attirer votre attention sur un contexte très particulier. Jusqu’en juillet 2005, on utilisait des appareils à tubes. Après cette date, l’homologation n’a plus été délivrée qu’à d’autres appareils, qui présentent des risques beaucoup plus importants. Je veux parler d’appareils à source radioactive qui contiennent du cadmium 109, du cobalt 57, et qui émettent 5 à 45 millisieverts par heure. En conséquence, le Gouvernement a très sérieusement encadré l’utilisation de ces appareils.
Je vous décris la nature de l’agrément : l’autorisation est délivrée pour une durée de deux à trois ans par la direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, la DGSNR, au nom du ministère de la santé, après instruction du dossier. L’instruction est, bien sûr, confiée aux divisions « sûreté nucléaire » des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement, les DREAL, qui ont remplacé les directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement, les DRIRE.
Or, selon les termes actuels de l’article 19 du texte, désormais, il n’y a plus besoin d’agrément. J’ai consulté sur ce sujet l’Autorité de sûreté nucléaire. Son président, M. André-Claude Lacoste, qui a été auditionné par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, dit totalement adhérer à l’objectif social de la détection mais constate que l’usage de sources radioactives pour détecter le plomb est particulièrement dangereux, car il entraîne une dissémination incontrôlée.
J’ai également interpellé le ministre de la santé et le préfet de ma région. L’un et l’autre m’ont répondu, pour me rassurer que l’agrément était bien conçu. L’on demande, en effet, la traçabilité des mouvements des appareils, reproduits dans un registre des sorties qui spécifie l’heure et la date. Il existe une procédure lourde de stockage. Ceux qui détectent le plomb n’ont le droit ni de laisser les appareils dans le coffre de leur voiture ni de les emporter dans les transports en commun. S’ils vont au restaurant, ils sont priés de laisser leurs appareils à l’extérieur. Et en cas de vol, il leur faut faire une déclaration immédiate. Cet agrément, ce n’est donc pas du luxe !
Nous avons bien compris – non pas à travers la loi, mais à travers les explications du rapporteur – que ce qui était visé, ce n’était pas la seule suppression de l’agrément mais la mise en conformité avec les normes de l’Union européenne. Or, cette dernière ne veut pas qu’on délivre un agrément limité à un territoire circonscrit.
Vous aviez toute possibilité d’écrire, dans un simple décret, qu’un agrément préfectoral pour un appareil à source radioactive vaut pour tout le territoire français. Il suffit de cette mention dans un décret pour se mettre en conformité avec les normes européennes.
Mais la suppression de l’agrément de la diffusion sur tout le territoire français de sources radioactives suscite l’unanimité : que ce soit l’Institut de radioprotection de sûreté nucléaire, l’IRCN, l’Autorité de sûreté nucléaire, l’ASN, l’ex-ministre de la santé ou les préfets, tout le monde s’accorde sur le fait que vous transgressez la loi relative à la politique de santé publique et la loi relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire !
M. Daniel Raoul. C’est vrai !
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’économie ?
M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Je vous prie d’excuser mon retard et je remercie M. Saugey d’avoir bien voulu me remplacer. Je précise, notamment à l’intention de mes collègues de l’opposition, que j’avais une bonne excuse puisque le Président de la République était dans le département de l’Eure. Je ne pouvais pas faire moins que d’être à ses côtés ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Cela explique ce léger retard.
M. Jean-Pierre Michel. Le Parlement passe avant !
M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis. Après ce préambule assez long, je vais m’exprimer brièvement sur l’amendement. Comme cela a déjà été dit hier soir, nous considérons qu’il faut transposer cette directive, même si, dans l’idéal, nous aurions préféré une grande loi de transposition. Quoi qu’il en soit, la transposition a commencé. Nous sommes en retard et, de ce fait, exposés à des pénalités.
La commission de l’économie n’est donc pas favorable à cet amendement, car elle considère qu’il faut transposer cette directive.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je remercie Mme Blandin d’avoir longuement présenté cet amendement dont j’ai perçu toute la technicité. Je dois indiquer au Sénat que cette disposition se situe dans le cadre de l’application d’une directive européenne.
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Si, c’est l’application d’une directive européenne ! Le Gouvernement a d’ailleurs veillé à ce que le Parlement tienne, dans les travaux de transposition de cette directive, toute la place qui lui revient. Les assemblées ont été informées de façon détaillée et argumentée sur les dispositions soumises à leur vote et qui visent à transposer cette directive.
Le Gouvernement a été constamment guidé par un souci de transparence et d’efficacité qui exigeait qu’il réalise un travail fin et précis, secteur d’activité par secteur d’activité, pour tenir compte des situations spécifiques de chacun d’entre eux.
La suppression de cette disposition ne pourrait que constituer une méconnaissance par la France de son obligation communautaire et conduire la Commission européenne à saisir la Cour de justice de l’Union européenne.
En outre, le fondement conventionnel de l’obligation de transposition est relayé et soutenu par le Conseil constitutionnel, qui a affirmé, le 30 novembre 2006, qu’il existe une exigence constitutionnelle de bonne transposition des directives communautaires.
Dans ce cadre, je suis conduit à émettre un avis défavorable sur l’amendement n° 94 rectifié bis.
M. Daniel Raoul. Il a bon dos, le Conseil constitutionnel !
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Sans revenir sur les arguments très pertinents de ma collègue Marie-Christine Blandin, je dirai qu’il existe d’autres façons de se mettre en conformité avec la directive. En tout cas, ce n’est pas en ne veillant pas à la non-dispersion de tous ces produits radioactifs que vous y parviendrez ! Je peux vous assurer, pour en avoir utilisé certains dans un laboratoire du temps où j’exerçais une activité professionnelle, qu’on ne savait même pas où ils allaient en fin de vie, après usage !
La dissémination de tous ces produits radioactifs dans la nature pose un véritable problème. Et ce problème, vous pouviez le régler par un décret plutôt qu’au travers de cet article ! Quoi qu’il en soit, je trouve cela inélégant, voire imprudent !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. J’ai bien entendu la réponse de M. le ministre sur la transposition d’une directive : « il n’y a pas de problème » ! Simplement, quand la transposition aboutit à supprimer l’agrément pour l’utilisation d’un appareil porteur de sources radioactives, elle se heurte au droit français, qui n’autorise pas la libre circulation de ce type de produits !
Un an après le choix fait par la France – ce n’est pas notre faute si la France a pris cette option un peu stupide ! –, trois de ces appareils avaient déjà été perdus dans le métro !
De plus, il aurait fallu modifier les articles L.133-1 et L.133-4 du code de la santé publique, qui seront concernés par la promulgation des dispositions contenues dans le texte que vous allez faire voter. Ces deux articles, il va falloir les rédiger autrement et faire savoir à tous les détenteurs d’une petite source radioactive – les dentistes, les radiologues, par exemple – qu’ils peuvent en disposer partout, en toute tranquillité !
Franchement, vous pouviez vous conformer à la directive en disant que l’agrément s’étend à tout le territoire ou même qu’il s’étend à toute l’Union européenne. Il n’y aurait aucun problème. Mais ne pas conserver l’agrément, c’est vraiment prendre des risques considérables !
M. Daniel Raoul. C’est grave !
Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le ministre, s’il y a des accidents, je serai personnellement là pour vous le rappeler !
M. Daniel Raoul. Ce n’est pas possible !
M. le président. L'amendement n° 191, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
La première phrase de l'article L. 1334-3 du code de la santé publique est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« À l'issue des travaux ou au terme du délai indiqué dans la notification de sa décision, le représentant de l'État procède ou fait procéder au contrôle des locaux, afin de vérifier que le risque d'exposition au plomb est supprimé. Dans le cas où le représentant de l'État a fait réaliser les travaux nécessaires en application du dernier alinéa de l'article L. 1334-2, ce contrôle est aux frais du propriétaire, du syndicat des copropriétaires ou de l'exploitant du local d'hébergement. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Cet amendement est relatif aux organismes chargés de contrôler l’exposition au plomb. Il est destiné à permettre qu’en cas de travaux d’office le contrôle de la bonne réalisation de ces travaux soit également à la charge du propriétaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’économie ?
M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis. L’argument du Gouvernement vise surtout, si j’ai bien compris, à changer les règles actuellement en vigueur en matière d’accréditation, de certification des opérateurs chargés d’effectuer les diagnostics et les contrôles relatifs au plomb. C’est un système, reconnaissons-le, assez complexe.
Le Gouvernement veut rétablir l’accréditation pour les opérateurs chargés du diagnostic et du contrôle en matière de plomb.
Avant la loi relative aux réseaux consulaires, les opérateurs chargés du diagnostic et du contrôle étaient soumis à un régime d’agrément. En application de la directive, il fallait revenir sur cette disposition puisque l’agrément était décerné dans le cadre départemental et que la directive prévoit que l’autorisation doit permettre d’exercer sa mission sur l’ensemble du territoire.
L’article 19 de la proposition de loi votée par les députés prévoyait que l’on allait substituer un régime de certification au régime d’agrément. La loi sur les chambres de commerce et d’industrie, votée depuis, prévoit, quant à elle, un dispositif d’accréditation.
Lors de sa réunion du 5 octobre dernier, la commission de l’économie a jugé qu’il convenait de revenir au texte initial de la présente proposition de loi.
L’accréditation que propose le Gouvernement aurait l’inconvénient de risquer d’éliminer les petites structures. En effet, le régime proposé a un coût plus élevé – entre 5 000 et 10 000 euros – alors que le coût du système proposé par la commission se limite à 500 euros environ. Il y a un risque d’éliminer du marché les petites structures qui ne pourraient pas passer par le système d’accréditation en raison de son coût élevé.
J’émets donc, au nom de la commission de l’économie, à regret, un avis défavorable sur l’amendement n° 191.