Article 24 ter
I. – (Supprimé)
I bis. – La première phrase de l’article L. 141-1 du code de l’action sociale et des familles est complétée par les mots : « ou de manière systématique pour les communes de plus de 50 000 habitants ».
II. – L’article L. 222-4-1 du même code est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après les mots : « établissement scolaire », sont insérés les mots : «, de prise en charge d’un mineur au titre de l’article 24 bis de la loi n° … du … d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure » ;
b) Après la même première phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :
« Un contrat de responsabilité parentale peut également être signé à l’initiative des parents ou du représentant légal d’un mineur. Un contrat de responsabilité parentale est également proposé aux parents d’un mineur de 13 ans condamné pour une infraction lorsque cette condamnation a été signalée au président du conseil général dans le cadre d’un des groupes de travail et d’échange d’informations définis à l’article L. 2211-5 du code général des collectivités territoriales et lorsque cette infraction révèle une carence de l’autorité parentale. » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le contrat n’a pu être signé du fait des parents ou du représentant légal du mineur, le président du conseil général peut également leur adresser un rappel de leurs obligations en tant que titulaires de l’autorité parentale et prendre toute mesure d’aide et d’action sociales de nature à remédier à la situation. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 40 est présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 101 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Virginie Klès, pour présenter l’amendement n° 40.
Mme Virginie Klès. Deux raisons nous poussent à présenter cet amendement de suppression.
La première vient d’être explicitée, et je ne vous irriterai pas, monsieur le ministre, en réexpliquant les motifs de notre opposition au couvre-feu, en tout cas pour les mineurs. Nous jugeons une telle mesure inutile.
La seconde tient à l’obligation, prévue désormais pour les communes de plus de 50 000 habitants, de créer un conseil pour les droits et devoirs des familles, ou CDDF. Il s’agit là encore, à notre sens, d’une mesure d’affichage, au demeurant néfaste puisqu’elle marque à nouveau une défiance à l’égard des conseils généraux et des acteurs locaux quant à leur réactivité et à leurs compétences en matière de prévention de la délinquance.
Les CDDF ne sont que des instances consultatives. Même si nous avons bien noté que la commission des lois a relevé à 50 000 habitants le seuil de population au-delà duquel la création d’un CDDF s’imposera à la commune, pourquoi rendre ces structures obligatoires, d’autant que l’on sait qu’elles ne fonctionnent bien que sur la base du volontariat ? De nombreuses collectivités ont déjà mis en place un CDDF de leur propre initiative, et je ne vois donc pas ce qui peut justifier de rendre systématique la création d’une telle instance, sauf, je le redis, à vouloir manifester de la défiance à l’égard des acteurs de terrain en matière de prévention de la délinquance.
Je profite de cette occasion pour interroger une nouvelle fois le Gouvernement sur la répartition des missions entre la protection judiciaire de la jeunesse et les conseils généraux. Que va devenir l’ordonnance de 1945 ? Jusqu’à présent, nous n’avons obtenu aucune réponse à ces questions !
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 101.
Mme Éliane Assassi. L’article 24 ter du projet de loi tend à obliger les communes de plus de 50 000 habitants à créer un conseil pour les droits et devoirs des familles, instance mise en place par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.
Comme nous l’avions indiqué à l’époque, nous sommes opposés à ce type de structures. Je rappelle que la commission des affaires sociales elle-même s’était déclarée hostile à la création d’un dispositif ouvrant aux maires la possibilité de proposer aux familles un accompagnement parental. L’Association des maires de France avait également réagi négativement et, finalement, le Gouvernement avait rendu la création de ces instances facultative. Il n’est donc pas interdit d’évoluer, monsieur le ministre !
Aujourd’hui, vous voulez rendre l’instauration d’un CDDF obligatoire dans les communes de plus de 50 000 habitants. Pour notre part, nous nous opposons à ce que les maires soient contraints d’intervenir dans la vie des familles. De plus, à l’instar de la commission des affaires sociales, nous soulignons un risque de confusion entre les pouvoirs du maire et ceux du président de conseil général.
Quant à l’extension du contrat de responsabilité parentale, mis en place par la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances, nous y sommes tout autant opposés. En effet, le contrat de responsabilité parentale fait porter la responsabilité d’un phénomène global sur la seule sphère privée, les parents de l’enfant étant considérés comme démissionnaires, n’exerçant pas leur autorité. Ce dispositif tend donc à nier la responsabilité de l’État, qui se défausse de ses devoirs. En outre, il est stigmatisant, dans la mesure où il vise les familles les plus en difficulté. Je force peut-être un peu le retrait, mais j’ai tout de même le sentiment, monsieur le ministre, que vous avez peu d’égards pour ces familles, puisque vous choisissez de fait de les maintenir dans une économie de survie.
Certes, des familles ont besoin d’être aidées, et nous sommes bien sûr favorables, à ce titre, au développement de structures telles que celles qui interviennent en matière d’aide à la parentalité, d’aide aux devoirs ou encore de soutien scolaire. Ce serait, à notre sens, bien plus positif et constructif que de suspendre les prestations auxquelles elles ont droit, en aggravant ainsi leur situation.
Nous refusons donc toute extension du champ du contrat de responsabilité parentale, qui n’offre en outre aucune garantie aux familles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission étant opposée à la suppression de l’article 24 ter, elle émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Richert, ministre. Madame Klès, je ne m’irrite pas du fait que vous réitériez la défense de certains amendements. C’est tout à fait votre droit, acceptez simplement que, pour ma part, je ne me sente pas tenu de me répéter systématiquement. Dès lors que mes interlocuteurs ne veulent pas admettre des arguments qui ont été développés à plusieurs reprises, je n’y reviens pas.
S’agissant du contrat de responsabilité parentale, un accord de principe a été trouvé entre les deux assemblées. Les auteurs des amendements sont aujourd’hui opposés à ce dispositif, mais je suis persuadé que les positions évolueront à l’avenir, comme cela a pu être le cas à propos de la vidéoprotection, qui se généralise après avoir suscité d’abord bien des cris d’orfraie !
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 40 et 101.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 122 rectifié, présenté par MM. Nègre et Bernard-Reymond et Mme Lamure, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
50 000 habitants
par les mots :
20 000 habitants
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 156, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
I bis. - Après la première phrase du premier alinéa de l'article L. 141-1 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Cette création est obligatoire dans les communes de plus de 50 000 habitants ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement rédactionnel tend à prévoir que la création du CDDF sera obligatoire dans les communes de plus de 50 000 habitants.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 123 rectifié bis, présenté par MM. Nègre et Bernard-Reymond, Mme Lamure et M. Beaumont, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Au septième alinéa de l'article L. 131-8 du code de l'éducation, le mot : « trimestriellement » est supprimé.
La parole est à M. René Beaumont.
M. René Beaumont. Cet amendement vise à revenir au texte de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance afin de redonner aux maires et aux inspecteurs d'académie la possibilité de trouver ensemble un accord qui leur convienne sur le rythme le plus adéquat de communication des informations concernant les avertissements délivrés en cas d'absentéisme scolaire.
Ce type de dispositif est essentiel, car cette communication est indispensable au maire pour exercer efficacement ses missions en matière de prévention de la délinquance. Cet amendement me paraît donc tout à fait légitime et c'est la raison pour laquelle je l’ai cosigné.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La mesure de simplification que cet amendement vise à modifier est destinée à éviter des signalements « au fil de l’eau », comme on les appelle, qui sont sources de difficultés de gestion pour les mairies.
Toutefois, la commission a décidé de s’en remettre à la sagesse bienveillante du Sénat sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Richert, ministre. Le Gouvernement partage la position de la commission et s’en remet également à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je mets aux voix l'article 24 ter, modifié.
(L'article 24 ter est adopté.)
Article 24 quinquies AA
I. – (Non modifié)
II. – (Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 41, présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. L’article 24 quinquies AA, qui résulte d’un amendement de Christian Demuynck adopté par notre assemblée en première lecture, a pour objet de prévoir que le délai de prescription d’un certain nombre de délits – abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de faiblesse, vol, escroquerie, abus de confiance, détournement de gage, recel –, lorsqu’ils sont commis à l’encontre d’une personne vulnérable, ne court qu’à partir du jour où l’infraction est révélée.
Cette disposition consacre, pour les personnes vulnérables – et uniquement pour elles – et pour certains délits, la jurisprudence de la Cour de cassation.
En effet, de manière constante depuis 1960, la jurisprudence considère que, lorsque l’infraction est occulte ou qu’elle a été dissimulée par son auteur, le point de départ est fixé au jour où le délit est apparu ou aurait pu être objectivement constaté dans des conditions permettant l’exercice de l’action publique.
Je comprends la préoccupation de notre collègue Christian Demuynck de protéger les personnes vulnérables ; toutefois la consécration de cette jurisprudence ne changera rien pour eux puisque cette dernière est constante.
Il nous paraît essentiel de veiller à la cohérence du droit de la prescription, en évitant des réformes parcellaires. Si l’on doit réformer la prescription, c’est dans un cadre global qui pourrait être, par exemple, la réforme de la procédure pénale annoncée par le Gouvernement et qui devrait être présentée sous peu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet article, qui a été inséré à l’initiative du Sénat en première lecture, vise à expliciter le droit en vigueur s’agissant de la prescription de certains délits commis contre des personnes vulnérables.
Il s’inscrit ainsi dans le cadre du plan gouvernemental d’action en faveur de la sécurité des personnes âgées, étant entendu qu’il ne modifie pas le droit en vigueur, issu de la jurisprudence de la Cour de cassation sur la prescription.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Richert, ministre. Je suis vraiment opposé à la suppression de l’article 24 quinquies AA, car il est important, notamment s’agissant de personnes fragiles qui découvrent a posteriori la commission d’un fait, que le délai prévu pour engager une procédure coure à compter du jour où l’infraction leur est révélée.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est pas une réponse !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je ne voterai pas cet amendement puisque, comme Mme Boumediene-Thiery l’a précisé, l’article 24 quinquies AA consacre une jurisprudence existante. Il la renforce en lui donnant une base légale. Je pense donc que c’est une bonne disposition.
M. le président. Je mets aux voix l'article 24 quinquies AA.
(L'article 24 quinquies AA est adopté.)
Article 24 octies A
Le code de commerce est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 443-2, il est inséré un article L. 443-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 443-2-1. – Le fait, sans autorisation du producteur, de l’organisateur ou du propriétaire des droits d’exploitation d’une manifestation sportive, culturelle ou commerciale, d’offrir, de mettre en vente ou d’exposer en vue de la vente, sur un réseau de communication au public en ligne, des billets d’entrée ou des titres d’accès à une telle manifestation pour en tirer un bénéfice est puni de 15 000 € d’amende.
« Les personnes physiques reconnues coupables de l’infraction définie au présent article encourent également la peine complémentaire de confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit. » ;
2° Après le premier alinéa de l’article L. 443-3, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnes morales déclarées responsables pénalement de l’infraction définie à l’article L. 443-2-1 encourent, outre l’amende suivant les modalités prévues par l’article 131-38 du code pénal, les peines prévues par l’article 131-39 du même code. »
M. le président. L'amendement n° 102, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. L’article 24 octies A vise à modifier le code de commerce afin de préserver le monopole de quelques grandes entreprises événementielles.
Nous pensons que c’est un cavalier législatif qui n’a strictement rien à faire dans ce projet de loi. C'est la raison pour laquelle nous en demandons la suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. De nombreuses personnes ont attiré mon attention sur les troubles à l’ordre public provoqués aux abords des stades, des salles de concert ou de halls de manifestations par des consommateurs ayant été abusés par des revendeurs de billets peu scrupuleux, agissant hors de tout cadre légal.
Le présent article, introduit à l’initiative de notre collègue Christophe-André Frassa, devrait prévenir de tels troubles. Il a pleinement sa place dans le présent projet de loi. La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les troubles à l’ordre public sont déjà réprimés par la loi !
Mme Éliane Assassi. C’est vraiment de l’affichage !
M. le président. L'amendement n° 155, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 3
1° Supprimer les mots :
culturelle ou commerciale
2° Remplacer les mots :
d'offrir, de mettre en vente ou d'exposer en vue de la vente
par les mots :
d'offrir ou de mettre en vente
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Richert, ministre. Il s’agit d’un amendement de précision.
Vous savez, mesdames, messieurs les sénateurs, que la vente illicite de billets de manifestations sportives sur internet n’est aujourd'hui réprimée par aucun texte. Elle comporte cependant des risques pour l’ordre public.
C'est la raison pour laquelle l’article 24 octies A fait de cette revente illicite, caractérisée par l’absence du droit du titulaire des droits d’exploitation de l’événement et par l’intention de faire un bénéfice, un délit passible de 15 000 euros d’amende.
La revente illicite peut, en effet, favoriser le regroupement dans un stade de fauteurs de troubles et faire obstacle aux efforts des organisateurs pour éviter ce regroupement, dont les effets néfastes sont bien connus. Vous savez tous les nombreux débats qu’ont suscités les organisations de spectacles sportifs et le phénomène des hooligans.
Votre commission des lois a souhaité étendre ce dispositif aux manifestations culturelles et commerciales, ainsi qu’à des comportements consistant à simplement exposer des billets sur internet. Cela me paraît problématique.
En effet, la démarche n’est pas la même, notamment en ce qui concerne les manifestations culturelles ou commerciales, qui ne connaissent pas ces phénomènes de hooliganisme qui affectent le domaine sportif. Il ne me paraît pas souhaitable de mettre sur le même plan les manifestations culturelles et commerciales et les manifestations sportives. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons supprimer dans le texte la notion de manifestation culturelle et commerciale, afin de ne laisser subsister que celle de manifestation sportive.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Je regrette de devoir peiner mon ami Philippe Richert, mais cet amendement revient sur les modifications apportées en commission des lois, sur proposition de notre excellent collègue Christophe-André Frassa.
Il appelle de ma part deux remarques.
En premier lieu, la revente de billets d’accès à des manifestations culturelles ou commerciales – salon de l’agriculture, etc. – dans des conditions ne présentant aucune garantie peut, tout comme l’accès à des manifestations sportives, susciter des troubles de l’ordre public, particulièrement s’agissant de manifestations populaires dont les titres d’accès sont très recherchés du grand public.
En second lieu, les termes « exposer en vue de la vente » visent les internautes et non les plateformes de courtage ; en tant qu’hébergeurs, ces dernières ne pourront être tenues pour complices des comportements délictueux des internautes que si elles favorisent sciemment de tels comportements ou s’abstiennent en connaissance de cause d’y mettre un terme, ce qui ne devrait pas être le cas lorsqu’elles auront mis en place les systèmes de contrôles adaptés.
À mon grand regret, j’émets donc un avis défavorable – pour la première fois dans ce texte et la dernière, soyez rassuré, monsieur le ministre ! – sur votre amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 24 octies A.
(L'article 24 octies A est adopté.)
Article 24 decies A
(Non modifié)
Le premier alinéa de l’article L. 126-3 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigé :
« Le fait de troubler la tranquillité du voisinage par une occupation en réunion des espaces communs ou des parcs de stationnement souterrains ou des toits des immeubles collectifs d’habitation ayant pour effet de perturber l’accès ou la libre circulation des personnes est puni de l’amende prévue pour les contraventions de cinquième classe. »
M. le président. L'amendement n° 72, présenté par M. J. Gautier, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jacques Gautier.
M. Jacques Gautier. Cet article a été adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, supprimé par notre commission des lois en première lecture, réintroduit par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, et je vous propose de le supprimer.
Cet article prévoit en effet la transformation du délit d’occupation abusive de halls d’immeuble en contravention de cinquième classe, ce qui m’apparaît comme une fausse bonne idée. Rappelez-vous que ce délit a été créé par la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, qu’il a déjà été modifié à deux reprises, la dernière fois à l’occasion de la loi du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public.
La loi du 2 mars 2010 commence à porter ses fruits. Elle permet de mieux réprimer ce type de comportement et il me semble préférable, avant de modifier encore ce texte, de le laisser s’appliquer.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est la révolte à l’UMP !
M. Jacques Gautier. Par ailleurs, la contraventionnalisation de cette infraction diminuerait sans contexte l’efficacité de la répression, alors même que les services de police commencent à « s’approprier » cette infraction et que nombre de condamnations sont prononcées sur le fondement de ces dispositions.
De plus, l’interpellation et le placement en garde à vue des auteurs de cette infraction deviendraient impossibles dans la mesure où ces derniers sont fréquemment insolvables, ce qui limite considérablement l’effet dissuasif de la contravention.
Voilà pourquoi je vous propose, comme l’avait fait notre commission des lois en première lecture, de supprimer cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La transformation du délit d’occupation des halls d’immeubles en contravention correspond à un souhait fort de nos collègues députés, comme l’a souligné M. Jacques Gautier.
Même si la commission des lois n’avait pas souhaité s’y opposer de nouveau la semaine dernière, il est vrai que cette modification risque de soulever des difficultés.
Certes, la transformation de ce délit en contravention devrait faciliter le travail des enquêteurs et des magistrats, dans la mesure où l’élément intentionnel de l’infraction n’aura plus à être démontré.
Toutefois, elle risque d’affaiblir la répression, dès lors que les policiers ne pourront plus placer en garde à vue les contrevenants, qui seront la plupart du temps insolvables. Mais considérant les avantages, la commission des lois a donné un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Richert, ministre. Les occupations abusives et irrégulières de halls d’immeubles se développent dans de nombreux quartiers, engendrant d’autres délits comme les violences, les menaces ou le trafic de drogues. Alors qu’elles constituent une nuisance insupportable pour bon nombre de résidants, il est absolument regrettable de se priver d’un moyen juridique permettant de les combattre et de laisser le champ libre à ceux qui intimident les victimes et les témoins.
La contraventionnalisation de l’incrimination d’occupation abusive et irrégulière de halls d’immeubles, introduite dans le projet de loi par l’Assemblée nationale, constituerait à l’évidence un recul et ne manquerait pas d’affaiblir l’efficacité de la répression. En témoignent les nombreuses utilisations faites de ce dispositif juridique ces derniers mois, par exemple en Seine-Saint-Denis par le préfet Christian Lambert, dont je voudrais saluer l’action efficace et déterminée, et qui est, me semble-t-il, reconnue par tous ici.
Croit-on, en effet, impressionner les délinquants en cause en les menaçant à l’avenir d’une simple amende, que la plupart ne paieront d’ailleurs probablement jamais, à supposer qu’ils soient condamnés, compte tenu de l’insolvabilité de nombre d’entre eux ? Croit-on les dissuader de pourrir, par leur comportement, la vie des honnêtes gens, alors même que, passibles d’une simple contravention, leurs agissements ne pourront même plus les conduire en garde à vue ?
J’ajoute que, du fait de cette contraventionnalisation, le suivi judiciaire de ces délinquants deviendrait aléatoire et la récidive serait donc difficile à établir puisque les fichiers d’antécédents, comme le STIC – système de traitement des infractions constatées – ne peuvent enregistrer que les données portant sur les auteurs de crimes ou de délits et un nombre très restreint de contraventions.
Il convient dès lors de conserver le droit dans son état actuel, tel qu’il résulte d’ailleurs de la loi du 2 mars 2010, approuvée, il y a moins d’un an, par le Sénat. L’efficacité de ce texte, qui est avérée, devrait s’accroître dans les mois et les années qui viennent, comme tend à le démontrer l’exemple de la Seine-Saint-Denis.
Pour ces raisons, le Gouvernement est favorable à l’amendement de Jacques Gautier.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Là, je ne vous comprends plus ou, plutôt, je vous comprends trop bien ! Pour une fois que les députés souhaitent passer d’un délit à une contravention, vous considérez que c’est absolument anormal.
Pourtant, à la page 58 de votre rapport, vous écriviez, monsieur le rapporteur, à propos de cet article : « La commission des lois de l’Assemblée nationale l’a rétabli sur proposition de M. François Pupponi. Votre commission – c'est-à-dire la nôtre – ne souhaite pas s’opposer davantage à cette modification souhaitée par les députés ».
Vous nous dites fréquemment qu’il ne faut pas se répéter, mais ici, il s’agit plutôt d’une contradiction que d’une répétition !
Vous poursuiviez : « Comme elle l’avait souligné lors de l’examen du projet de loi en première lecture, la transformation de ce délit en contravention devrait en revanche présenter l’avantage de faciliter le travail des enquêteurs et des magistrats dans la mesure où, s’agissant d’une contravention, l’élément intentionnel de l’infraction n’aura plus à être démontré. Elle a adopté l’article 24 decies A sans modification. »
Ce soir, vous nous expliquez que ce que vous aviez écrit comme étant la position de la commission n’a plus aucun sens et qu’il faut changer d’avis !
En outre, je vous renvoie à l’excellente lecture que constituait Le Figaro hier matin, plus particulièrement aux déclarations du garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la garde à vue. L’objet de votre amendement s’inscrit à l’opposé de sa démarche puisqu’en cas de maintien de l’article, « l’interpellation et le placement en garde à vue des auteurs de cette infraction deviendraient impossibles ». Le garde des sceaux nous dit qu’il faut faire 300 000 gardes à vue de moins et vous, contrairement à ses vœux, vous voulez encore en rajouter, monsieur le rapporteur !