Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 130 rectifié.
M. Jacques Mézard. Je considère que cet amendement a été défendu, après les très pertinentes observations que j’ai eu l’honneur de développer devant le Sénat sur l’article 29 !
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Nous avions demandé à examiner par priorité les articles 17 et 29 pour que la discussion suive une certaine logique. En adoptant l’article 29, nous venons de créer les tribunaux correctionnels pour mineurs. Par coordination, il convient désormais d’ajouter, au sein de l’ordonnance du 2 février 1945, la mention de ce nouveau tribunal à la liste des juridictions pénales compétentes pour juger des infractions commises par des mineurs. Il ne s’agit que de coordination.
Mes chers collègues, ces amendements identiques ne « tombent » pas, au sens strict, et vous avez bien sûr tout loisir de développer indéfiniment les mêmes arguments !
M. Jean-Pierre Michel. Ils pourraient tomber !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais le débat de fond a déjà eu lieu C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’avais demandé que ces deux articles soient examinés par priorité. Pourrions-nous dans ces conditions, si cela vous convient, limiter les propos répétitifs ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 21, 59 et 130 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10.
(L'article 10 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 10
Mme la présidente. L'amendement n° 61, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l’article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 7-2 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est abrogé.
II. - En conséquence, la seconde phrase du vingt-neuvième alinéa de l’article 41-2 du code de procédure pénale est supprimée.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Par cet amendement, nous souhaitons supprimer l’application aux mineurs de la procédure de composition pénale, laquelle tend à aligner la procédure de jugement des mineurs sur celle des majeurs et n’assure pas les garanties nécessaires aux droits de la défense.
En 2002 déjà, lors de l’examen du projet de loi d’orientation et de programmation pour la justice, nous nous étions vigoureusement opposés à l’adoption de la composition pénale pour les majeurs. Aujourd’hui, nous nous y opposons a fortiori pour les mineurs.
Lorsque, en 2007, la loi relative à la prévention de la délinquance a rendu la composition pénale applicable aux mineurs, rien n’était prévu pour garantir que leur âge serait pris en compte, ni pour associer les professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse à l’éventuelle enquête de personnalité.
En outre, le juge des enfants commençait déjà d’être déconsidéré, déprécié, et son rôle singulièrement réduit : en effet seule lui demeurait la mission de valider ou non, par ordonnance, la composition pénale.
Cette procédure n’est pas stricto sensu une privation de liberté, mais elle ne constitue pas une véritable alternative aux poursuites. De plus, elle emporte inscription au casier judiciaire. C’est pourquoi nous souhaitons sa suppression.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission se déclare surprise par cet amendement, qui tend à interdire au parquet de proposer au mineur auteur d’une infraction une composition pénale.
Cette mesure alternative aux poursuites offre en effet de bons résultats.
S’agissant d’un mineur, elle peut seulement être mise en œuvre avec l’accord des représentants légaux de celui-ci, et en présence d’un avocat. L’intervention éventuelle du juge des enfants est également prévue.
La composition pénale possède une réelle vertu éducative, puisqu’elle ne peut être mise en œuvre que lorsque le mineur a reconnu les faits et qu’il s’engage à accomplir un certain nombre de démarches.
Aussi ne paraît-il pas opportun à la commission de supprimer la possibilité d’y recourir.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 60, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l’article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 11 de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est ainsi modifié :
1° Les quatrième, onzième et douzième alinéas sont supprimés ;
2° Les treizième et quatorzième alinéas sont ainsi rédigés :
« En matière criminelle, la détention provisoire des mineurs de treize ans à seize ans ne peut excéder un mois.
« La détention provisoire des mineurs de seize à dix-huit ans ne peut excéder trois mois. Toutefois, à l’expiration de ce délai, la détention peut être prolongée, à titre exceptionnel, pour une durée n’excédant pas trois mois, par une ordonnance rendue conformément aux dispositions du sixième alinéa de l’article 145 du code de procédure pénale et comportant, par référence aux 1° et 2° de l’article 144 du même code, l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ; la prolongation ne peut être ordonnée qu’une seule fois. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement vise à interdire la détention provisoire pour les mineurs âgés de treize à dix-huit ans en matière correctionnelle, ainsi qu’à limiter la durée de la détention provisoire pour les mineurs en matière criminelle.
Le placement en détention ruine toutes les perspectives d’avenir. La socialisation et l’éducation à la vie en société dans le respect des règles sont incompatibles avec l’enfermement, souvent vécu comme arbitraire et injuste par les plus jeunes. C’est d’autant plus le cas que la plupart des mineurs emprisonnés le sont en qualité de prévenus.
Pour que les jeunes puissent se projeter dans leur avenir, il faut cesser de les stigmatiser en les considérant comme des éléments négatifs !
Nous avons l’obligation morale de prévoir des réponses dont l’objectif soit non pas de les exclure le plus vite possible, notamment en les plaçant en détention, mais de les aider et de soigner leur souffrance.
Le choix de l’enfermement est un choix d’exclusion. C’est la voie que vous avez choisie ; ce n’est pas la nôtre et, par notre amendement, nous proposons une alternative.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Il convient de rappeler que les conditions permettant de placer un mineur en détention provisoire sont d’ores et déjà restrictives.
En particulier, il faut que la mesure soit indispensable et qu’il soit impossible de prendre toute autre disposition moins privative de liberté.
La détention provisoire des mineurs âgés de treize à seize ans n’est pas possible en matière délictuelle, sauf si le mineur s’est volontairement soustrait aux obligations d’un contrôle judiciaire ou d’une assignation à résidence sous surveillance électronique.
Des garanties existent donc. La commission craint que l’amendement de nos collègues n’aille à l’inverse trop loin, en rendant, par exemple, impossible la détention provisoire de mineurs poursuivis pour des agressions sexuelles ou des violences graves, ce qui, dans certains cas, pourrait représenter un réel danger pour les victimes.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, garde des sceaux. En complément des arguments présentés par le rapporteur, et puisque chacun invoque à son tour l’ordonnance de 1945, je veux rappeler que son article 11 prévoyait la possibilité de placer un mineur âgé de plus de treize ans à titre provisoire dans une maison d’arrêt !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 60.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 11
(Non modifié)
L’article 2 de la même ordonnance est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « le tribunal pour enfants », sont insérés les mots : «, le tribunal correctionnel pour mineurs » ;
2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans ce second cas, s’il est prononcé une peine d’amende, de travail d’intérêt général ou d’emprisonnement avec sursis, ils pourront également prononcer une sanction éducative ; »
3° Au dernier alinéa, les mots : « ne peut » sont remplacés par les mots : « et le tribunal correctionnel pour mineurs ne peuvent ».
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 22 est présenté par MM. Michel et Anziani, Mmes Klès et Tasca, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 62 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
L'amendement n° 131 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 22, étant rappelé, mes chers collègues, qu’il nous faut terminer l’examen de cet article avant minuit.
M. Alain Anziani. Madame la présidente, je serai très bref.
L’article 11 permet de prononcer cumulativement une peine et une sanction éducative. Il me semble que nous passons ainsi de la subsidiarité prévue par l’ordonnance de 1945 à un cumul, contraire à la fois à l’ordonnance et aux différentes conventions internationales.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 62.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L’article 11 vise en effet à ôter à la peine son caractère subsidiaire, et à faire en sorte que le répressif l’emporte sur l’éducatif.
Vous souhaitez en réalité élargir cette possibilité de cumul, afin qu’elle ne soit plus une exception mais devienne une pratique habituelle.
Si la détention provisoire est bien entendu toujours possible, en particulier dans les cas de crimes et lorsqu’un danger existe pour les victimes, monsieur le garde des sceaux, nous sommes totalement opposés à son extension.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est vrai !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. En effet, vous ne l’étendez pas, mais vous savez qu’elle sera étendue.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 131 rectifié.
M. Jacques Mézard. Cet amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Les dispositions de l’article 11 du projet de loi élargissent la palette des sanctions susceptibles d’être prononcées à l’encontre d’un mineur délinquant, sans pour autant renoncer, même lorsqu’une peine est prononcée, à la dimension éducative de la réponse pénale.
Elles permettront à la juridiction saisie de prononcer simultanément, par exemple, une peine d’emprisonnement avec sursis et un stage de formation civique ou un placement en internat.
Cette mesure paraissant plutôt utile, l’avis de la commission est défavorable sur ces trois amendements identiques de suppression.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 22, 62 et 131 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
5
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 19 mai 2011, à neuf heures trente, à quatorze heures trente et le soir :
- Suite du projet de loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs (Procédure accélérée) (n° 438, 2010-2011).
Rapport de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois (n° 489, 2010-2011).
Texte de la commission (n° 490, 2010-2011).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART