Article 12 ter
Le premier aliéna de l’article 79-1 du code civil est complété par la phrase suivante :
« Les critères de viabilité sont fixés par décret, conformément aux critères reconnus par l’Organisation mondiale de la santé. »
M. le président. L'amendement n° 41 rectifié quater, présenté par Mme Hermange, M. de Legge, Mme Payet, MM. Gilles et Leleux, Mme B. Dupont, MM. Darniche, Vial, Lardeux, Vasselle, Bailly, Bécot, Falco, Cazalet et de Montgolfier, Mme Des Esgaulx, M. Revet, Mme Rozier, MM. del Picchia, B. Fournier, Lorrain, Marini, Pozzo di Borgo, Laménie et Huré, Mmes Henneron et Mélot, MM. Retailleau et Badré, Mme Hummel et MM. Beaumont et P. Blanc, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.
Mme Marie-Thérèse Hermange. La commission spéciale de l’Assemblée nationale a souhaité introduire, dans l’article 79-1 du code civil, un renvoi par décret pour définir, conformément aux critères reconnus par l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, les conditions de viabilité d’un enfant. Un enfant viable bénéficiera de l’établissement d’un acte de naissance et d’un acte de décès, en cas de décès intervenant avant la déclaration de naissance à la mairie.
L’OMS a retenu à des fins strictement épidémiologiques deux seuils alternatifs : soit vingt-deux semaines d’aménorrhée, soit un poids fœtal de 500 grammes.
L’introduction de tels critères automatiques revient à exclure toute marge d’appréciation de la part du médecin qui, aujourd’hui, établit un certificat médical au cas par cas sur la capacité du nouveau-né à s’adapter à son environnement extra-utérin, de telle sorte qu’il puisse y vivre.
Une telle modification n’apparaît pas opportune au regard de la très grande diversité des situations que les familles sont amenées à vivre.
Dès 2008, le Gouvernement a adopté des dispositions pour prendre en compte la douleur des parents d’un enfant non viable. Ainsi, l’acte d’enfant sans vie permet désormais d’inscrire le prénom de l’enfant dans le livret de famille et d’organiser des funérailles. Par ailleurs, une circulaire a été adressée en mars dernier aux directeurs des caisses de sécurité sociale pour que les familles ne soient plus exclues du bénéfice des prestations sociales qui devront désormais être allouées à toute femme ayant vécu une grossesse.
Aussi, au regard de l’ensemble des améliorations apportées par le Gouvernement, une modification législative n’apparaît pas nécessaire à l’aune des difficultés juridiques qu’elle ferait naître.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Lors de la première lecture, notre assemblée avait adopté, sur l’initiative de la commission des affaires sociales et de notre collègue Jean-Pierre Godefroy, un texte qui me semblait complet pour l’article 12 ter. L’Assemblée nationale l’avait ensuite supprimé.
Sur l’initiative d’un certain nombre de nos collègues, la commission des affaires sociales du Sénat a rétabli cet article dans une rédaction différente de la précédente : « Les critères de viabilité sont fixés par décret, conformément aux critères reconnus par l’Organisation mondiale de la santé ».
Faute d’admettre les propositions de la commission des affaires sociales, on ne reconnaît pas les enfants qui sont décédés avant que leur naissance ait été déclarée, contrairement à ce qui est une demande forte des mamans.
Demander la suppression de cet article me semble illogique. La rédaction adoptée la semaine dernière sur proposition de M. Godefroy confie non à la loi mais au décret le soin de fixer les seuils de viabilité. La commission a demandé le retrait de cet amendement. Sinon, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Je suis tout à fait favorable à la demande de suppression de cet article, sur laquelle Mme Hermange vient d’argumenter.
Nous avons eu, il est vrai, l’occasion de débattre longuement sur l’opportunité d’énoncer directement des critères de viabilité dans le code civil. Le fait de les inscrire aujourd'hui dans un décret ne modifie en rien les inconvénients majeurs qui ont déjà été signalés. Cela vaut d’autant plus que le contenu du décret est énoncé dans la loi.
Dans un cas comme dans l’autre, on fait dépendre la viabilité de seuils dont je voudrais essayer de vous montrer qu’ils sont arbitraires et générateurs de difficultés.
Sur un plan purement médical, cette disposition ne m’apparaît pas pertinente du fait de son effet automatique. En effet, la viabilité, c’est la capacité effective du nouveau-né de s’adapter à son environnement extra-utérin. Chacun comprend qu’on ne peut pas caractériser la viabilité par l’application de critères de poids ou de durée de gestation déconnectés de toute appréciation médicale.
Ainsi, quelle que soit la gravité de la pathologie affectant le fœtus, celui-ci devrait être considéré comme viable dès lors que la durée de gestation de vingt-deux semaines, par exemple, serait atteinte. Une telle rigidité dans un domaine aussi sensible ne m’apparaît pas souhaitable.
Ensuite, les progrès médicaux font reculer les limites de viabilité. Dès lors, pourquoi figer une définition dans une règle de droit ? On a pu très récemment observer en Allemagne qu’un enfant né à vingt et une semaines et qui pesait moins de 500 grammes pouvait être viable. Pour être exceptionnelle, cette situation n’en prouve pas moins que seul le médecin peut apprécier la viabilité d’un nouveau-né ! Ce n’est pas l’affaire d’un texte, quelle que soit sa nature, réglementaire ou législative. On voit bien, dans la réalité des faits, que ce n’est pas aussi facile ou aussi binaire ! J’en suis, pour ma part convaincue, seul le médecin peut, au cas par cas, déterminer si un enfant est viable.
Je voudrais attirer votre attention sur un autre point. Je redoute, en effet, les incidences dans la prise en charge des prématurés et des difficultés d’ordre éthique.
À cet égard, les personnels de santé n’hésiteront-ils pas à intervenir en cas de grande prématurité en deçà du seuil de viabilité là où, aujourd'hui, ils estiment parfois pouvoir prendre le risque de la réanimation ? À l’inverse, au-delà du seuil de viabilité, ils pourraient être enclins à des conduites d’acharnement thérapeutique quand bien même l’enfant ne possèderait pas les capacités anatomiques et physiologiques pour survivre.
Enfin, comment articuler ces seuils de viabilité avec les situations dramatiques d’interruption médicale de grossesse qui peuvent intervenir jusqu’à un stade très avancé de celle-ci ? Certes, les interruptions médicales de grossesse ne seront pas remises en cause sur le plan du droit, mais n’y aura-t-il pas pour autant tendance à les anticiper afin de ne pas franchir le seuil qui aura été instauré ? N’y aurait-il pas un effet culpabilisant pour les parents devant y recourir ?
Vous le voyez, nous devons maintenir le texte en vigueur, lequel prévoit l’appréciation de la viabilité par le médecin. Il appartient bien à celui-ci de déterminer, dans chaque situation, en fonction d’éléments cliniques et physiologiques, la capacité pour un nouveau-né de s’adapter à l’environnement extra-utérin afin de pouvoir y vivre.
J’émets, au nom du Gouvernement, un avis tout à fait favorable sur l’amendement n° 41 rectifié quater.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l’amendement n° 41 rectifié quater.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est un sujet important et difficile sur lequel notre groupe, notamment avec Jean-Pierre Godefroy, avait déjà, dans le passé, déposé plusieurs amendements. Ils avaient donné lieu et ont donné lieu encore très récemment à des études particulièrement poussées, notamment des services du Médiateur de la République, que je tiens ici à saluer.
La question est très importante. Il s’agit de définir les conditions auxquelles un enfant né vivant mais décédé avant la déclaration de naissance à l’état civil peut disposer de la personnalité juridique. Cette dernière confère aux parents une série de droits importants : l’établissement d’un acte de naissance et de décès, l’octroi d’un nom ou seulement d’un prénom dans le cas d’un acte d’enfant sans vie, le droit aux funérailles, la reconnaissance de droits sociaux, l’inscription sur le livret de famille, les conséquences en matière de succession.
Ces conditions sont mentionnées à l’article 79-1, alinéa 1, du code civil : il faut produire un certificat médical attestant que l’enfant est né vivant et viable. Pour être vivant, il faut qu’il ait respiré à la naissance. Les critères de viabilité étaient, avant la décision de la Cour de cassation, définis par voie de circulaire. Aujourd'hui, les choses sont différentes.
Je tiens à rappeler – et je m’étonne, madame la secrétaire d'État, que vous n’y ayez pas fait allusion – que la circulaire du 22 juillet 1993 est toujours en vigueur.
Cette circulaire s’applique. Que dit-elle ? « Je vous propose – c’est le ministre délégué à la santé qui s’exprime – de retenir comme limite basse d’enregistrement des enfants nés vivants, le terme de 22 semaines d’aménorrhée ou le poids de 500 grammes à l’exclusion de tout autre critère, en particulier les malformations. Cette information figure dans le modèle du certificat. Il s’agit bien d’un seuil d’enregistrement pour l’état civil, qui ne doit pas être considéré comme un seuil de prise en charge médicale. »
Voilà, madame la secrétaire d'État, les termes de la circulaire aujourd'hui en vigueur.
Pour notre part, il nous paraît très utile de suivre la commission et le rapporteur sur ce sujet. Le fait de renvoyer à un décret en précisant que celui-ci devra respecter les normes édictées par l'OMS apporte toute la clarté nécessaire.
Si l'amendement n° 41 rectifié quater était adopté, la France se distinguerait des autres pays européens qui donnent une définition légale ou réglementaire de la viabilité par référence à des seuils. Le Sénat a d'ailleurs mené une étude de législation comparée tout à fait lumineuse à cet égard.
De surcroît, si nous refusions de partager la position de la commission, la responsabilité des médecins risquerait d’être aggravée, et ce dans un contexte de développement du contentieux médical. On pourrait courir le risque qu’aucun médecin n’ose déclarer viable un enfant décédé à la naissance, puisqu’il devrait se prononcer sur la viabilité effective du fœtus et non appliquer des seuils qui auraient été fixés en vertu d'un décret reprenant la décision de l'OMS.
Cela entraînerait par ailleurs une inégalité de traitement entre les personnes. En effet, les médecins n’ont pas à justifier leur position : le certificat médical se limite à un simple formulaire sur lequel l’autorité médicale appose une croix. Par conséquent, les personnes concernées ne disposeraient pas de voie de recours, alors même qu’elles se verraient privées de droits importants, avec tout le risque d'arbitraire que cela pourrait comporter.
En outre, il n'est pas exact de soutenir que la question des droits sociaux est réglée par l’instruction diffusée par la direction de la sécurité sociale.
Enfin, nous nous trouvons actuellement dans une situation juridique tout à fait absurde. Mes chers collègues, je vous rappelle que l'acte d'enfant sans vie, qui ne confère pas la personnalité juridique au fœtus décédé, a donné lieu au décret du 20 août 2008 et à une circulaire de treize pages. Dans le même temps, il n'y a rien – pas une ligne ! – sur les conditions d'application du premier alinéa de l'article 79–1 du code civil, alors que l’enjeu est l’acquisition de la personnalité juridique, avec toutes les conséquences juridiques que j'ai exposées au début de mon intervention.
Pour toutes ces raisons qui nous paraissent devoir être prises en compte, notre groupe soutient pleinement la position de la commission.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Nous suivrons également l'avis de la commission sur cet amendement.
Je tiens à revenir sur certains propos qui ont été tenus voilà quelques instants, car je n’ai pas dit que je voulais éradiquer une population de notre pays.
Mes chers collègues, si vous voulez que nous respections vos convictions, respectez les nôtres ! Certes, elles sont totalement différentes, c’est d’ailleurs bien pourquoi nous ne siégeons pas sur les mêmes travées dans cet hémicycle. Pour autant, j’entends que vous n’insultiez pas les opinions que nous défendons. Jamais je n’ai parlé d’éradiquer qui que ce soit ; ce n’est pas du tout mon point de vue.
Mme Bernadette Dupont. C’est moi qui ai utilisé cette expression !
Mme Annie David. Oui, c’est vous ! Alors que nous avions initialement proposé un dépistage systématique de l'ensemble des femmes enceintes et que, selon moi, l’adoption de l’amendement que vous présentiez aboutirait à une stigmatisation de la trisomie, vous avez affirmé que nous souhaitions éradiquer une population !
Mes chers collègues, si, dans ce débat, nous devions en être réduits à employer des termes aussi radicaux, la qualité de nos échanges en pâtirait. Par conséquent, eu égard au respect pour toutes les convictions qui sont exprimées, je vous demande d’éviter de tenir des propos blessants ou choquants et je vous en remercie.
M. le président. En conséquence, l'article 12 ter est supprimé.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 6 rectifié est présenté par MM. Collin, Baylet, Detcheverry et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Tropeano et Vall.
L'amendement n° 14 est présenté par MM. Godefroy et Cazeau, Mme Le Texier, M. Michel, Mmes Cerisier-ben Guiga, Alquier, Printz et Schillinger, MM. Kerdraon et Le Menn, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, MM. Desessard et Mirassou, Mmes Blandin, Blondin, Bourzai et Lepage, MM. C. Gautier, Collombat, Guérini, Madec, Marc, Massion, Mazuir, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après l'article 336-1 du code civil, il est inséré un article 336-2 ainsi rédigé :
« Art. 336-2. – Lorsque l’état civil de l’enfant a été établi par une autorité étrangère en conformité à une décision de justice faisant suite à un protocole de gestation pour autrui, cet état civil est transcrit dans les registres français sans contestation possible aux conditions que la décision de justice soit conforme aux lois locales applicables, que le consentement libre et éclairé de la femme qui a porté l’enfant soit reconnu par cette décision et que les possibilités de recours contre cette décision soient épuisées. »
Compte tenu de l’adoption de l'amendement n° 41 rectifié quater, ces amendements n'ont plus d'objet.
TITRE IV
INTERRUPTION DE GROSSESSE PRATIQUÉE POUR MOTIF MÉDICAL
Article 13
(Non modifié)
Le deuxième alinéa de l’article L. 2213–1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « trois personnes qui sont un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique, » sont remplacés par les mots : « quatre personnes qui sont un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique, membre d’un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, un praticien spécialiste de l’affection dont la femme est atteinte, » ;
2° Au début de la seconde phrase, les mots : « Les deux médecins précités » sont remplacés par les mots : « Le médecin qualifié en gynécologie-obstétrique et le médecin qualifié dans le traitement de l’affection dont la femme est atteinte ». – (Adopté.)
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TITRE V
ANONYMAT DU DON DE GAMÈTES
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Article 18 bis
L’article L. 1244–6 du code de la santé publique est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« En application de la loi n° 78–17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, toute personne, autorité publique, service ou organisme, et notamment les centres d’études et de conservation des œufs et du sperme humains, qui recueille et conserve des données à caractère personnel relatives aux donneurs de gamètes ou d’embryons, aux couples receveurs ou aux personnes issues des techniques d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur est soumis au contrôle de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
« Celle-ci contrôle les conditions dans lesquelles est effectué le recueil des données à caractère personnel à l’occasion des procréations médicalement assistées. La mise en place de tout traitement automatisé concernant ces données est soumise au respect des modalités de déclarations et d’autorisations préalables selon le type de données conservées, en application de la loi n° 78–17 du 6 janvier 1978 précitée. La commission peut réaliser des contrôles sur place afin de s’assurer de la bonne conservation de ces données, quel qu’en soit le support.
« En cas de non-respect de cette même loi, elle peut mettre en œuvre les mesures prévues aux articles 45 à 52 de ladite loi.
« Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’Informatique et des Libertés, précise les modalités d’application du présent article. »
M. le président. L'amendement n° 52 rectifié quater, présenté par Mme Hermange, M. de Legge, Mme Payet, MM. Gilles et Leleux, Mme B. Dupont, MM. Vial, Lardeux, Vasselle, Bailly, Bécot, Falco, Cazalet et de Montgolfier, Mme Des Esgaulx, M. Revet, Mme Rozier, MM. del Picchia, Darniche, B. Fournier, Lorrain, Marini, Pozzo di Borgo, Laménie et Huré, Mmes Henneron et Mélot, MM. Retailleau et Badré, Mme Hummel et MM. Beaumont et P. Blanc, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Cet amendement vise à supprimer le dernier alinéa de l'article 18 bis, qui conditionne l'entrée en vigueur des dispositions relatives au contrôle des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains, les CECOS, par la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, à la publication d'un décret. Or ce dernier est inutile puisque la loi Informatique et libertés est déjà applicable, même si elle n'est pas respectée.
La CNIL s'est déjà par deux fois reconnue compétente pour contrôler les CECOS : en 1992, en annonçant qu'elle mènerait une enquête à la suite d’une divulgation par un centre de conservation du sperme à Marseille du nom de 120 enfants conçus par insémination artificielle avec donneur ; au mois de juin 2010, en acceptant d'instruire une plainte, toujours en cours, relative au contrôle des CECOS.
L'article 18 bis tend seulement à réaffirmer la compétence de la CNIL pour contrôler les CECOS. Depuis 33 ans, les CECOS se sont affranchis du respect de la loi Informatique et libertés, puisqu'ils n'ont procédé à aucune déclaration de fichiers concernant les données à caractère personnel qu'ils conservent.
Toutefois, renvoyer à un décret d'application l’entrée en vigueur des dispositions relatives au contrôle des CECOS aboutirait à l'effet inverse de celui qui est recherché. Car, chacun le sait, un tel décret d'application peut tarder à être publié, ce qui signifie que, pendant ce temps, les CECOS ne seront pas contrôlés. En outre, il pourrait prévoir un régime dérogatoire moins favorable que celui qui découle actuellement de la loi Informatique et libertés : le rapport de la commission des lois de l'Assemblée nationale a même évoqué la suppression de la conservation des noms par les CECOS.
Il est indispensable et urgent que la CNIL contrôle de manière effective la façon dont les CECOS recueillent et conservent les données à caractère personnel relatives aux couples, aux donneurs et aux enfants, afin d'éviter, d’une part, la perte des dossiers – c’est déjà prévu – et, d’autre part, la divulgation de données à caractère personnel, comme cela s'est produit en 1992 à Marseille.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La mention d'un décret d'application à l'article 18 bis a été précisée dans le texte de la commission la semaine dernière sur l'initiative de Mme Hermange, pour que la CNIL se prononce sur le contenu de ce décret.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Oui, mais j'ai réfléchi depuis !
M. Alain Milon, rapporteur. Maintenant, la réflexion aidant – c’est normal ! –, Mme Hermange en demande la suppression... (Sourires.)
Le Gouvernement pourrait sans doute apporter ici même la garantie que ce décret ne limitera pas l'accès à l'information au-delà de ce qui est strictement nécessaire et permettra à la CNIL d'exercer pleinement son contrôle, d'autant que le président de cette instance nous a informé qu'il venait de commencer le contrôle des CECOS.
Par conséquent, sur cet amendement, la commission s'en remet à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le renvoi à un décret spécifique précisant les conditions de mise en œuvre du contrôle des CECOS par la CNIL peut sembler inutile, puisque c'est déjà prévu. Toutefois, on peut également considérer que, compte tenu du caractère spécifique des données qui sont conservées par les CECOS, il convient de prévoir un encadrement réglementaire adapté.
En tout état de cause, le décret sera soumis à l’avis de la CNIL. Il faut rappeler que, même si cette instance peut procéder à ce contrôle, sur des données aussi sensibles, il n'existe pas de référentiel qui soit déterminé et homogène au sein de chaque CECOS. Un tel décret pourrait donc être utile pour encadrer la conservation de ces informations.
C'est la raison pour laquelle, sur cet amendement, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.