M. Jacky Le Menn. Très bien !
M. Jean Desessard. Excellente intervention, madame !
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 31
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle peut être représentée par un avocat.
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Puisqu’il semble que la personne souffrant de troubles psychiatriques tende à être assimilée à un délinquant, la présence d’un avocat est plus que jamais nécessaire, car propice à garantir le respect et l’effectivité des droits.
Dès lors qu’il y a judiciarisation de l’ensemble de la procédure d’admission en soins psychiatriques sans consentement, le conseil d’un avocat paraît opportun afin de garantir le principe d’égalité des armes et le droit au recours, droit garanti par l’article 8 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et par l’article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Par ailleurs, dans la mesure où nous sommes dans le cadre d’une réforme parcellaire et sécuritaire, nous souhaitons renforcer les droits des patients pour les préserver de tout préjudice et de tout abus.
En d’autres termes, nous entendons, par cet amendement, entrer dans une logique plus globale visant à garantir à celles et à ceux qui sont dans des situations d’extrême fragilité, par essence précaires, le plein exercice de leurs droits.
Ainsi, nous demandons que le malade puisse être représenté par son avocat lors du prononcé de la décision relative au maintien des soins sans consentement. La capacité à faire valoir ses droits pouvant être limitée par l’état mental, l’assistance d’un avocat est une nécessité absolue pour le patient, d’autant que ce dernier peut être isolé de sa famille et de ses proches.
Rappelons que le Gouvernement n’a avancé aucun argument pour justifier son refus de voir inscrire une telle disposition dans le texte.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et pour cause !
M. le président. L'amendement n° 41, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 35
Compléter cet alinéa par les mots :
, pour toutes les étapes de prise en charge
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Cet amendement s’inscrit dans une double logique.
Du point de vue sanitaire, il s’agit de rechercher, autant que faire se peut, le consentement du patient. Chacun le sait, et cela a été souligné lors de la discussion générale, cette alliance entre soignant et soigné constitue un élément positif, si ce n’est fondamental, dans la mise en œuvre de soins appropriés.
En outre, une telle recherche participe du respect de la dignité du patient – sujet qui nous concerne tous –, et ce conformément à l’article L. 1110-2 du code de la santé publique et à la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 27 juillet 1994.
La recherche du consentement dans le domaine psychiatrique présente un particularisme. En effet, par rapport aux autres secteurs de la médecine, les facteurs du consentement sont ici démultipliés. Le consentement d’un patient implique que ce dernier soit capable de comprendre ce qui lui est expliqué, de l’intégrer à sa situation personnelle, de mémoriser l’information reçue, de se projeter dans l’avenir, d’être capable de décider et de maintenir sa décision dans le temps.
L’ensemble de ces dimensions est évolutif. C’est pourquoi il nous semble nécessaire que, à chaque étape de la prise en charge, la recherche du consentement apparaisse comme indispensable. Dans cette optique, nous vous proposons, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 42
1° Après le mot :
conserve
insérer les mots :
pendant et
2° Après le mot :
relatives
insérer les mots :
aux modalités d’hospitalisation du présent titre Ier et
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Tel que désormais rédigé, l’alinéa 42 de l’article 1er concerne toutes les personnes faisant l’objet de soins psychiatriques en raison de troubles mentaux, et non pas seulement de soins sans consentement.
Voilà la démonstration de l’ambiguïté – intentionnelle ou non –, évoquée par moi-même et certains de mes amis de gauche lors de la discussion générale, de certains de nos collègues de l’Assemblée nationale, qui, en toute hypocrisie, ont procédé à la suppression de la moindre référence aux soins sans consentement, mais sans rien changer sur le fond.
Dans sa rédaction actuelle, l’alinéa 42 signifie la perte des droits et des devoirs de citoyen pour toute personne consultant un psychiatre. Notre amendement vise donc à garantir le respect de ces droits et devoirs.
À cette fin, nous souhaitons préciser que la personne faisant l’objet de soins psychiatriques conserve pendant et à l’issue de ces soins la totalité de ses droits et devoirs de citoyen, sous réserve notamment des dispositions relatives aux modalités d’hospitalisation prévues au titre Ier.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 43, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéas 53 et 54
Rédiger ainsi ces alinéas :
« 3° Un médecin désigné conjointement par le directeur de l’établissement et le président de la commission médicale d’établissement ou de la conférence médicale d’établissement pour les établissements de santé privés d’intérêt collectif. Ce médecin peut être le président de ladite commission ou conférence, le cas échéant.
« Les modalités de désignation des membres et les règles de fonctionnement du collège sont fixées par décret en Conseil d’État, sachant que le collège peut recueillir tous les avis qu’il estime appropriés pour l’exercice de sa mission. » ;
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. En ce qui concerne la composition du collège de soignants, il est pour nous essentiel de tirer les leçons des diverses concertations effectuées avec les structures représentatives existantes. Or ces dernières sont unanimes pour estimer comme inopportune l’introduction d’un cadre paramédical en la matière.
En effet, comment ne pas percevoir le risque que ce cadre paramédical n’endosse le rôle d’arbitre entre deux médecins ? Une telle situation, qui plus est si elle se reproduit, porterait préjudice à l’unité et à la cohésion nécessaires à une telle structure et à celles des équipes concernées.
En outre, l’objet même de ce collège renvoie à la fois à l’expertise et à la responsabilité médicales. Rappelons que celui-ci aura pour mission d’éclairer le juge des libertés et de la détention ou le préfet avant toute décision concernant un patient ayant séjourné dans une unité pour malades difficiles ou ayant fait l’objet d’une décision de justice déclarant l’irresponsabilité pénale.
Nous ne pouvons exclure qu’une telle présence puisse en elle-même être source de réactions malvenues de la part de patients difficiles.
Parce que nous savons combien les cadres soignants peuvent être au fait d’autres réalités quotidiennes de la prise en charge du patient et que leur prise en compte est importante dans la dynamique de soins, nous estimons que les médecins du collège pourront recueillir tous les avis leur étant nécessaires.
Compte tenu de ces éléments, nous vous proposons, mes chers collègues, de modifier la composition dudit collège.
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 58, première phrase
Après les mots :
à tout moment
insérer les mots :
et après examen de la personne
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. L’adoption de cet amendement, que nous avions déjà déposé en première lecture, nous apparaît plus que nécessaire.
La médecine moderne, qu’il s’agisse de la psychiatrie ou de la médecine somatique, est fondée sur le principe de l’observation d’un patient par un médecin.
Le médecin rencontre le patient, établit un diagnostic et prescrit des soins. Si l’on vous suit, madame la secrétaire d'État, ces soins prennent ici la forme d’une hospitalisation complète ou d’une hospitalisation en ambulatoire. Et l’on voudrait nous faire croire que tout cela serait possible sans que le patient soit vu par le médecin : avouez que c’est plutôt troublant !
M. Jean Desessard. Et cocasse !
Mme Annie David. En première lecture, voici ce que vous nous aviez répondu : « Que se passe-t-il en pratique ? Lorsqu’un patient est en rupture et qu’il présente un danger pour lui-même, le plus souvent, le psychiatre obtient des informations de la famille, de l’entourage. Pour venir en aide au malade, les décisions sont alors parfois prises sur simple avis du psychiatre, à la lumière des informations qui lui ont été communiquées ».
Autrement dit, le médecin psychiatre décide de l’hospitalisation non pas d’une personne, mais d’un dossier, dont le contenu est fondé sur les déclarations des proches, qui peuvent être à l’origine de l’angoisse du patient ou avoir intérêt à cette hospitalisation. Avouez également que cela n’est pas sans risque !
C’est, en tout cas, à la limite de la légalité, dans la mesure où le Conseil constitutionnel, dans l’une de ses dernières décisions, a souligné que la personne faisant l’objet de soins sans consentement prenant la forme d’une hospitalisation complète a le droit à un réexamen dans de brefs délais. Or celui-ci n’a aucun sens si l’examen réside dans la seule relecture d’un simple dossier administratif.
Notre objectif est donc clair : aucun soin psychiatrique ne peut être ordonné sans que le patient ait été rencontré par un psychiatre.
M. Jean Desessard. Bravo ! Voilà une proposition sensée !
Mme Raymonde Le Texier. C’est le minimum à exiger !
M. le président. L’amendement n° 44, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 58
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La famille du patient ou la personne de confiance qu’il a désignée conformément à l’article L. 1111-6 est informée de cette décision.
La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Cet amendement participe de la logique sanitaire que nous souhaitons voir prédominer. Il s’agit, en l’espèce, de la situation dans laquelle l’état de santé du patient connaîtrait une aggravation, laquelle entraînerait une modification de son régime de prise en charge. En d’autres termes, avec la redéfinition du diagnostic, du pronostic, mais aussi des choix, notamment dans le domaine des traitements, c’est l’avenir du patient à court, voire à long terme qui est en jeu.
Si l’aggravation d’un état de santé est une situation spécifique, l’argumentation que nous avons développée au sujet de l’alinéa 31 reste valable. Nous considérons que le fait d’informer la famille ou la personne de confiance d’une décision de modification du régime de prise en charge du patient peut constituer un élément positif dans la recherche d’une amélioration de son état de santé.
Cette potentialité est renforcée par les résultats d’une enquête de l’Union nationale des amis et familles de malades psychiques, qui font apparaître que 42 % des malades psychiques vivent au sein de leur famille, 10 % à l’hôpital, 10 % dans des foyers et 20 % sont abandonnés ; seuls 20 % d’entre eux environ sont à peu près autonomes.
Au-delà de la relation médecin-malade, qui est primordiale et qui peut être perçue comme un partenariat, voire comme une alliance, le fait d’informer l’entourage s’inscrit bien dans la recherche d’une plus grande efficience de la stratégie thérapeutique que l’équipe soignante définit. En effet, ces informations peuvent être utiles au soutien du patient et participer, de fait, aux soins.
M. le président. L’amendement n° 18, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Alinéa 59, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Il s’agit du premier d’une série d’amendements que j’avais déjà déposés en première lecture. J’y reviens, car, dans un souci de protection des malades, il me semble très important de supprimer de ce projet de loi toute référence à un « avis médical » et de ne garder que la formulation « certificat médical ».
Qu’est-ce qu’un certificat médical ? C’est un document officiel qui implique l’examen par le médecin de la personne concernée.
Le certificat médical a pour objet les résultats de l’examen d’un patient par le médecin, qui constate la matérialité des faits dont il déduit son diagnostic ; constat et diagnostic constituent l’objet exclusif du certificat.
J’insiste sur la notion d’examen, car c’est une obligation déontologique, comme le rappelle l’article 76 du code de déontologie des médecins : « Un médecin ne doit jamais délivrer un certificat sans avoir vu et examiné la personne dont il s’agit. L’établissement d’un certificat est en effet un acte à part entière de l’activité médicale.
« L’examen sera soigneux et attentif, et le certificat détaillé et précis ».
D’après le texte, c’est en fonction du certificat médical établi par un ou plusieurs psychiatres que seront prises des mesures d’hospitalisation complète, de soins sous contrainte en ambulatoire et leur éventuel renouvellement.
Qu’est-ce qu’un avis médical ? Rien, si ce n’est une impression que se fait le médecin à la lecture de documents concernant le patient !
M. Alain Gournac. Ah ?
M. Jean Desessard. Comment attribuer la même valeur à ces deux documents !
Le certificat médical est un document extrêmement important. La décision du Conseil constitutionnel rendue la semaine dernière parle même de « certificat médical circonstancié » dans le cas des décisions d’hospitalisation d’office prises par un préfet. En aucun cas, il n’est fait référence à un simple « avis » médical, établi sans même que le médecin ne rencontre le patient.
Substituer l’avis médical au certificat médical serait contraire à la déontologie des médecins, à la réalité de l’état du malade à un instant « T ». En effet, comment juger de l’état psychique d’une personne sans qu’une consultation ait eu lieu ?
En première lecture, M. le rapporteur avait fait remarquer que, parfois, le patient n’était pas joignable et ne pouvait être examiné. Quant à Mme la secrétaire d’État, elle avait argué que, « pour venir en aide aux malades en rupture », le psychiatre pouvait prendre des décisions simplement après avoir demandé des informations à la famille du malade.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est incroyable !
M. Jean Desessard. J’aimerais que l’on m’explique comment un médecin peut décider du maintien en hospitalisation d’un patient ou de la pertinence de tel ou tel traitement si le patient n’est pas là. Et quand j’entends que c’est sur la base de déclarations de la famille d’un patient en rupture que peuvent être prises des décisions aussi lourdes qu’un maintien en hospitalisation sous contrainte, je tombe des nues ! Si le patient est en rupture avec le corps médical, ne peut-il pas aussi l’être avec sa famille ? Ces justifications ne sont donc pas satisfaisantes.
Je le répète : cette disposition va à l’encontre de la déontologie médicale. C’est pourquoi je vous propose, mes chers collègues, de supprimer toute référence dans le projet de loi à ce simple « avis » médical.
Cela étant, je vous remercie, monsieur le président, de m’avoir laissé le temps de m’exprimer ; je vous en ferai gagner cet après-midi, car cette intervention vaudra pour tous les amendements qui découlent de cette disposition.
M. le président. J’en accepte l’augure ; nous aurons l’occasion de vérifier la réalité de ce propos.
Quel est l’avis de la commission sur ces seize amendements ?
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L’objet de l’amendement n° 1 étant la suppression partielle de l’article 1er, la commission ne peut émettre qu’un avis défavorable.
Les précisions proposées par les auteurs de l’amendement n° 2 ne paraissent pas utiles. Il revient au médecin de déterminer les lieux de soins les plus adaptés, dans le cadre d’un dialogue avec le patient. Si cette proposition peut paraître intéressante, comme nous l’avions dit en première lecture, le concept de « lieu de soins » relève essentiellement de la compétence médicale, et non de la loi. L’avis est donc défavorable.
Les précisions proposées par les auteurs de l’amendement n° 35 ne sont pas plus utiles, car le choix du lieu de soins relève, je le répète, de la relation médecin-patient. L’avis est donc également défavorable.
L’amendement n° 36, qui tend à prévoir un avis de la Haute Autorité de santé, avait été rejeté en première lecture. La commission reconnaît que la HAS est un organisme très important, mais, à titre personnel, je m’étonne que l’on puisse souhaiter que la vérité ne vienne que d’en haut et s’impose totalement aux soignants. Bien que les recommandations de cet organisme soient nécessaires, voire dans certains cas indispensables, elles n’entrent pas dans le cadre de l’application d’un protocole. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 37 vise à étendre le contrôle du juge des libertés et de la détention aux soins sans consentement en ambulatoire. Un recours facultatif étant cependant toujours possible, j’émets un avis défavorable.
L’amendement n° 3 vise à limiter les traitements sans consentement aux seuls soins somatiques.
Même si mon avis personnel n’a pas beaucoup d’importance, je dois dire que j’ai été choqué par les termes de « camisoles chimiques » et de « garde à vue psychiatrique ». Ces violences verbales (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe.) desservent nos travaux et stigmatisent les soignants ainsi que les personnes qui ont exercé de lourdes responsabilités dans ce domaine pendant de nombreuses années. Par ailleurs, séparer le psychique du somatique n’est pas non plus la bonne solution. J’émets donc un avis défavorable.
L’amendement n° 38 tend à instaurer une durée de quarante-huit heures suivant l’admission en soins psychiatriques en hospitalisation complète pour l’établissement du deuxième certificat médical. Cette durée, trop brève, ne permettrait pas de prendre les décisions les plus favorables à l’intérêt du patient. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 4 vise à ramener la durée de la période d’observation de soixante-douze à quarante-huit heures. Une fois encore, cette durée trop brève ne permettrait pas de prendre les meilleures décisions dans l’intérêt du patient. L’avis est donc défavorable.
L’information systématique de la famille sur les projets de décision concernant le malade, prévue à l’amendement n° 39, pourrait être contre-productive. Dans certains cas, le malade ne souhaite pas que sa famille soit informée et une telle information ne sert pas toujours ses intérêts. Par ailleurs, il paraît difficilement envisageable qu’un patient, dans un moment de crise, puisse désigner en toute conscience une personne de confiance. J’émets donc un avis défavorable.
L’amendement n° 40 tend à prévoir une substitution de l’avocat au patient lors de l’information sur les mesures de soins. Je rappelle que cette notification relève de la relation entre le patient et le psychiatre, que nous avons tenté de renforcer tout au long de nos travaux. L’avis est donc défavorable.
M. Jean Desessard. Vous ne pourriez pas être un peu plus positif ?
Mme Raymonde Le Texier. Dites que les amendements de la gauche devront systématiquement être rejetés ; nous gagnerons du temps !
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L’amendement n° 41 tend à préciser que l’avis du patient est pris en considération à chaque étape de la prise en charge.
Cette proposition est recevable, mais elle ne paraît pas utile, dans la mesure où l’alinéa 35 dispose déjà que « l’avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible ». La commission n’a pu donc émettre qu’un avis défavorable.
La modification rédactionnelle proposée à l’amendement n° 42 n’apparaît pas comme un véritable progrès. On nous dit que le projet de loi, en la matière, est régressif et limitatif. Or il ne modifie pas le droit en vigueur sur ce point. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 43 vise à intégrer un troisième médecin dans le collège, plutôt qu’un non-médecin. Les arguments invoqués à l’encontre de cette pluralité ne manquent pas de m’étonner. Les médecins, eux aussi, sont capables de dialoguer lorsqu’ils sont d’avis contraire ! En outre, nous ne devons pas discréditer les non-médecins, qui ont une compétence complémentaire au vu du concept actuel d’élargissement du soin. Ils ne doivent pas être perçus comme des concurrents.
Sans être discourtois vis-à-vis des auteurs de l’amendement, je tiens à indiquer que l’éthique est avant tout du domaine pluridisciplinaire. J’émets donc un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 5, il est évident que le psychiatre procédera à l’examen du patient avant de modifier, si nécessaire, la forme de prise en charge, sauf si cette personne ne peut être jointe ; je pense notamment aux personnes en situation de grande exclusion, dont la souffrance est considérable. Je n’imagine pas que des choix puissent être effectués à l’encontre des patients, en particulier en matière de soins. J’émets donc un avis défavorable.
L’amendement n° 44 tend à prévoir une obligation d’information de la famille sur les projets de décision concernant le malade.
Une telle disposition, là encore, pourrait être contre-productive. La famille n’est pas toujours un environnement idéal ; elle peut aussi être un lieu de conflit, de rupture et de violence. Dans ce type de circonstances, le malade peut ne pas souhaiter que sa famille soit informée et il n’est pas nécessairement de son intérêt qu’elle le soit obligatoirement, d’où l’avis défavorable de la commission.
S’agissant de l’amendement n°18, je dirai d’abord que j’apprécie le verbe haut, mais que ce n’est pas parce qu’une parole est bruyamment martelée qu’elle mérite d’être inscrite dans le marbre !
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Le certificat médical, même avec ses limites, ses éventuels défauts de rédaction ou ses insuffisances, reste effectivement un document fondamental.
M. Alain Gournac. Bien sûr !
Mme Raymonde Le Texier. Pourquoi « bien sûr », monsieur Gournac ?
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Mais lorsqu’il est impossible d’examiner physiquement la personne ou de lui parler, il est évident que la possibilité d’établir un avis médical constitue pour le moins une solution de repli.
Je souligne en outre qu’un avis médical n’est pas l’expression d’une impression subjective. Il ne s’agit pas du café du commerce ! Derrière un avis médical, il y a bien sûr une part de choix personnel, mais il y a aussi et surtout des connaissances, une technicité, un professionnalisme.
M. Alain Gournac. Tout à fait !
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Qu’un avis médical soit sollicité quand une situation l’impose constitue déjà un engagement, et un engagement très fort puisqu’il engage la responsabilité de celui qui l’émet.
Donc, chers collègues de l’opposition, pas de leçon de déontologie !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pas de leçon de morale, monsieur le rapporteur !
M. Alain Gournac. Pas de leçon tout court !
M. Jean Desessard. Nous sommes bien là dans le cadre du code de déontologie médicale, monsieur le rapporteur !
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Je ne crois pas que l’avis du Conseil de l’ordre sera éloigné du nôtre, qui est, vous l’aurez compris, défavorable !
M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous le connaissons déjà !
Mme Raymonde Le Texier. Répondez en bloc, madame la secrétaire d’État !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Si je réponds trop vite, vous me reprochez de ne pas avancer d’arguments !
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 1, qui tend à supprimer des modalités de prise en charge des soins ambulatoires à domicile.
Il l’est également aux amendements nos 2 et 35 : le CMP et l’hôpital de jour ne sont pas les seuls lieux de prise en charge. Il y a aussi les appartements thérapeutiques ou les CATTP.
Mme Annie David. C’est précisément ce que prévoit l’amendement n° 2 !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Madame David, la détermination du lieu de prise en charge relève de la prescription médicale ; c’est au médecin qu’il appartient d’apprécier quelle est la meilleure stratégie thérapeutique et notamment de décider du lieu de la prise en charge.
Je suis défavorable à l’amendement n° 36, qui prévoit l’intervention de la HAS, car le contenu des programmes de soins n’est pas de la compétence de celle-ci. Ces programmes, je le rappelle, sont élaborés par les médecins à l’issue de l’entretien, de l’examen, et l’on voit mal comment l’HAS pourrait exprimer un avis sur la pertinence des modalités de soins proposées.
Le décret prévu à l’alinéa 19 n’indiquera évidemment pas comment les malades doivent être soignés ; il précisera l’ensemble des mentions qui devront figurer dans le « protocole », même si le mot a été supprimé dans le projet de loi, qu’est le programme de soins et qui, lui, est défini par le médecin.
S’agissant de l'amendement n° 37, je ne crois pas qu’il entre dans les compétences du juge des libertés et de la détention saisi des conditions de faisabilité d’un programme de soins de donner un avis préalable au psychiatre. L’avis est donc défavorable.
J’avoue avoir été un peu heurtée par l'amendement n° 3, qui vise à interdire que tout traitement médical « autre que somatique » puisse être imposé à une personne admise en soins psychiatriques. On ne devrait donc rien faire lorsqu’un patient en observation délire et est en souffrance ?
Cette proposition me paraît contraire à la déontologie médicale. Ce qui est « dégradant » pour le malade, puisque le mot a été employé, c’est d’être abandonné au regard du public pendant un épisode délirant, épisode dont, souvent, il se souvient. Bien entendu, il y a aussi une prise en charge somatique, mais le malade qui a été admis dans un service en vue d’une hospitalisation l’a été avant tout pour recevoir des soins psychiatriques.