M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour explication de vote.
Mme Anne-Marie Payet. Je voudrais dire au ministre M. François Baroin, qui connaît bien l’outre-mer, que j’ai accordé deux ans au Gouvernement, après mon amendement voté en décembre 2008. Depuis, les choses n’ont vraiment pas bougé !
Il est vrai que M. Denis Dobo-Schoenenberg vient de rendre son rapport dans lequel il propose des modifications au décret déjà préparé par Bercy. Mais ce rapport ne me convient pas, car il supprime la clause de non-cessibilité de la licence et, surtout, il accorde au conseil général la possibilité d’attribuer des autorisations temporaires de vente lors des manifestations commerciales ou culturelles qui se tiennent dans des enceintes. Les spectateurs pourront donc acheter du tabac qu’ils ne pourront consommer sur place.
De plus, je ne vois pas pourquoi on mettrait en place une nouvelle spécificité ultramarine, une spécificité vraiment absurde ! À chaque manifestation, nous allons voir se développer une gamme de vendeurs de tabac occasionnels, alors que nous avons actuellement un point de vente pour 320 habitants à la Réunion contre un point de vente pour 3 500 habitants en métropole. La différence est énorme !
Voilà pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Il est clair que notre collègue a raison sur le plan de l’éthique. Malheureusement, ce n’est pas parce qu’on aura des licences parfaitement calibrées que l’on empêchera les citoyens de fumer et d’acheter du tabac.
Je crois qu’il faut faire confiance au Gouvernement, qui est en train de réfléchir à la question.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cela dure depuis trop longtemps !
M. Christian Cointat. Je préférerais que l’on soit beaucoup plus prudent et que l’on ne s’engage pas trop vite. Un effort est réellement entrepris par le ministère de l’outre-mer ; faisons-lui confiance et attendons. (Mme Anne-Marie Payet s’exclame.) On est sur le point d’arriver à un résultat.
En revanche, si, effectivement, on n’obtient pas satisfaction, on pourra entreprendre quelque chose, d’autant que cela fait deux années…
Mme Anne-Marie Payet. Eh oui !
M. Christian Cointat. … que vous galérez, si vous me permettez l’expression ! Ce serait vraiment dommage, je crois, de perturber cette réflexion qui, pour une fois, me paraît bien engagée.
Par conséquent, je ne voterai pas votre amendement et croyez que j’en suis tout à fait désolé.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bravo !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 17 quater.
L'amendement n° 135, présenté par MM. Patient, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 17 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1519 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les deuxième et troisième alinéas du I sont supprimés ;
2° Aux treizième et derniers alinéas du 1° du II, les mots : « mis en exploitation avant le 1er janvier 1992 » sont supprimés ;
3° Les 1°bis et 1°ter du II sont abrogés.
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps les amendements nos 135 et 136.
M. le président. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 136, présenté par MM. Patient, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, et qui est ainsi libellé :
Après l’article 17 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1587 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les deuxième et troisième alinéas du I sont supprimés ;
2° Aux treizième et dernier alinéas du 1° du II, les mots : « mis en exploitation avant le 1er janvier 1992 » sont supprimés ;
3° Les 1°bis et 1°ter du II sont abrogés.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Georges Patient. Ces amendements visent, d’une part, à étendre la redevance des mines, perçue respectivement par les communes et par les départements, au-delà d’un mille marin des lignes de base et, d’autre part, à uniformiser les tarifs applicables aux gisements de pétrole brut et de gaz naturel, sur la base du taux applicable aux gisements mis en exploitation avant le 1er janvier 1992.
Cette disposition est dans la droite ligne de l’amendement que j’avais déposé dans le cadre du Grenelle de l’environnement et qui tendait à ajouter le mot « marin » au sein du schéma minier institué par le Président de la République, afin de ne pas exclure de fait le milieu marin et son éventuel potentiel.
Alors que des explorations ont lieu actuellement en Guyane, il est plus que légitime que le conseil général et les communes guyanaises puissent bénéficier d’un retour financier de l’éventuelle exploitation des gisements de pétrole.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ces deux amendements sont de même inspiration : l’un vise à appliquer la redevance communale aux gisements offshore, tandis que l’autre a pour objet de majorer cette redevance.
Nous avions déjà examiné cette question lors de la discussion du projet de loi relatif aux collectivités de Guyane et de Martinique. Nous avions alors considéré que ces mesures ne pouvaient, pour l’heure, être adoptées, en particulier parce qu’il n’existe actuellement aucun gisement en exploitation. Par conséquent, l’adoption, dès aujourd’hui, d’une mesure fiscale de cette nature serait sans doute un mauvais signal envoyé aux futurs investisseurs.
En vertu de cette analyse, la commission vous demande, monsieur Patient, de bien vouloir retirer ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 196, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 17 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le nouveau code minier est ainsi modifié :
1° À la première phrase de l’article L. 132-16, les mots : «, à l’exception des gisements en mer, » sont supprimés ;
2° À la première phrase de l’article L. 611-34, après la référence : « L. 132-13 », est insérée la référence : «, L. 132-16 ».
La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.
M. Jean-Étienne Antoinette. Pour répondre aux sollicitations de M. le président de la commission, je présenterai en même temps les amendements nos 196 et 197.
M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 197, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, et qui est ainsi libellé :
Après l’article 17 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 4 du chapitre II du titre III du livre Ier du nouveau code minier est complétée par un article L. 132-16-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-16-1. – Pour la zone économique exclusive ou le plateau continental français au large des régions d’outre-mer et des collectivités d’outre-mer, une redevance spécifique, due par les titulaires de concessions de mines hydrocarbures liquides ou gazeux, est établie au bénéfice de la région d’outre-mer ou de la collectivité d’outre-mer concernée.
« Le barème de la redevance spécifique est, à compter du 1er janvier 2011, établi selon les tranches de production annuelle prévues à l’article L. 132-16, le taux applicable à chaque tranche étant toutefois fixé par le Conseil régional ou par l’assemblée délibérante de la collectivité d’outre-mer, dans la limite des taux prévus audit article. ».
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Jean-Étienne Antoinette. Ces deux amendements, qui visent à combler une carence du code minier, tendent à instituer une redevance due par les titulaires de concessions de mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux des gisements situés en mer.
Mon collègue Georges Patient vient de proposer un dispositif qui aurait assuré aux communes et aux départements une part des bénéfices financiers engendrés par les exploitations maritimes d’hydrocarbures. Je propose une solution complémentaire permettant d’atteindre le même objectif.
Il me paraît tout d’abord urgent de légiférer en la matière, alors que le code minier ou le code général des impôts ne prévoient rien pour les exploitations installées dans la zone économique exclusive. En effet, depuis le 25 février dernier, un forage pétrolier d’exploration a débuté à 150 kilomètres des côtes de Guyane. À terme, une plate-forme forant à plus de 6 000 mètres devrait être installée pour puiser les hydrocarbures. Or un opérateur économique ne peut construire un projet industriel sans connaître les différents paramètres qui viendront imputer son budget. Il est nécessaire de lui assurer, le plus tôt possible, une sécurité fiscale lui permettant d’investir.
Je propose deux véhicules.
Le premier, qui est porté par l’amendement n°197, prévoit, tout en respectant la limitation générale au gisement terrestre prévue à l’article L. 132–16 du nouveau code minier, de créer un article L. 132–16–1 instaurant une redevance homothétique applicable aux gisements maritimes en outre-mer.
Le second fait l’objet de l’amendement n° 196, lequel vise à supprimer l’exclusion, prévue à l’article L. 132–16 précité, du paiement de la redevance par les concessionnaires des gisements maritimes. Cette redevance serait dès lors applicable à toutes les exploitations de gisements d’hydrocarbures.
Qui serait le bénéficiaire de cette taxe ?
Si l’amendement n° 197 était adopté, la région d’outre-mer ou la collectivité régie par l’article 74 de la Constitution serait bénéficiaire de la redevance, puisque celle-ci n’est prévue que pour les gisements maritimes d’hydrocarbures en outre-mer.
Si c’est l’amendement n° 196 qui était retenu, le bénéfice de la redevance irait à l’État pour les gisements situés en métropole et aux régions ultramarines pour les gisements d’hydrocarbures situés en outre-mer.
Pourquoi assurer aux régions d’outre-mer le bénéfice d’une redevance pour l’exploitation d’un gisement maritime d’hydrocarbures liquides ou gazeux, alors que la zone économique exclusive dépend non pas des collectivités locales, mais de l’État ?
Le nouveau code minier prévoit que, dans les régions d’outre-mer, la compétence de délivrance des permis de concession appartient à ces mêmes régions. Dans ce même code, j’insiste sur ce point, elles se substituent encore à l’État pour la réparation des accidents miniers terrestres et maritimes.
Par conséquent, les régions d’outre-mer, Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion, ont compétence pour autoriser l’exploitation de gisements d’hydrocarbures et supportent tous les risques d’accident liés à ces exploitations. Dès lors, il n’est pas envisageable que l’État abandonne, en outre-mer, la charge de ses compétences, et en particulier sa responsabilité, tout en conservant le bénéfice fiscal de l’exploitation. Puisque les régions d’outre-mer prennent toutes les responsabilités, elles doivent trouver une compensation à cette délégation de compétence.
Évidemment, en métropole, où l’État a conservé ses compétences et demeure responsable en cas d’accident minier, le bénéfice de la redevance sur l’exploitation de gisements d’hydrocarbures lui revient.
Vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur général, le coût des différents dispositifs de défiscalisation applicables en outre-mer s’élève à plus de 3,2 milliards d’euros pour l’année 2011. Il y a donc une réflexion à mener pour trouver des leviers endogènes assurant une fiscalité en outre-mer et permettant d’accompagner le développement de ces régions.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, ma proposition ne peut que recueillir un avis favorable de votre part, dans la mesure où il ne s’agit pas de grever le déficit du budget de l’État.
M. Jean-Paul Virapoullé. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous comprenons bien la démarche de nos collègues de Guyane. C’est assurément une excellente chose pour notre pays ainsi que pour le département et la région de Guyane qu’une prospection d’hydrocarbures débute au large de ses côtes.
La question posée exige une réponse tactique. Faut-il, en effet, définir la fiscalité avant que l’exploration ne se soit avérée fructueuse ou bien est-il préférable de posséder un minimum de certitudes sur le résultat de la recherche ?
La commission des finances est hésitante sur ce sujet. Ne serait-il pas préférable, pour encourager les investisseurs, de faire en sorte qu’ils aillent au bout de leur effort d’exploration ? La commission sera naturellement très attentive, monsieur le ministre, à l’avis du Gouvernement, car elle n’oublie pas que vous avez été, voilà quelques années, un ministre de l’outre-mer remarqué.
Mme Nicole Bricq. Remarqué ou remarquable ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre. Il me sera difficile d’éclairer M. le rapporteur général, qui est également un très fin connaisseur des conditions d’accompagnement des politiques publiques sur nos territoires ultramarins.
Monsieur Antoinette, votre question est tout à fait fondée. Il s’agit très certainement, pour la Guyane, de l’un des grands dossiers offrant des possibilités de développement. La définition du plateau continental à Saint-Pierre-et-Miquelon fait également partie des grands enjeux de négociations diplomatiques, notamment avec nos voisins canadiens. Une telle problématique, riche d’incontestables perspectives d’avenir, se rencontre aussi dans l’océan Indien.
Toutefois, s’il y a un temps pour la diplomatie et un temps pour la technique et l’exploration, il convient également de ne pas se précipiter pour définir l’assiette fiscale et les modalités de la taxation et, donc, du prélèvement sur recettes de ces nouvelles activités. La redistribution de ces sommes aux fins de financement des politiques publiques permettra d’irriguer de façon vertueuse la Guyane et les autres départements et collectivités d’outre-mer.
Pour autant, est-il nécessaire, aujourd’hui, de se prononcer sur une taxe, qui, à l’heure actuelle – ayons l’honnêteté de le dire – ne repose sur rien ?
Je crois en effet, à l’instar de M. le rapporteur général, qu’il est plus sage de laisser se poursuivre le développement et l’exploitation et d’en profiter pour réfléchir, avec vous et tous les autres acteurs majeurs, aux modalités d’une telle taxe, en s’inspirant de modèles étrangers. Réalisons des études suffisamment avancées, pour être prêts le moment venu !
Essayons d’imaginer le cas de figure inverse : si la taxe était votée sur une base, une assiette et des modalités inconnues, nous serions de toute façon, le moment venu, dans l’obligation d’y revenir pour redéfinir l’ensemble de ces éléments.
Par conséquent, s’il est fondé d’éclairer la représentation nationale sur cette question, il est probablement prématuré de l’inciter à adopter une taxation.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, pour explication de vote sur l'amendement n° 196.
M. Jean-Paul Virapoullé. La mandature qui s’achève a été caractérisée par une action gouvernementale qui a permis de changer l’approche et le regard de la métropole sur l’outre-mer, ainsi que l’approche et le regard de l’outre-mer sur la métropole.
Nos départements étaient en effet considérés comme une charge. L’excellent ministre de l’outre-mer que fut M. François Baroin – il ne s’agit pas de le flatter, mais de témoigner d’un vécu – sait que nous aimerions bien nous inscrire dans un pari gagnant-gagnant avec l’État. La mère patrie a œuvré, pendant des décennies, au fil des gouvernements de toutes tendances, pour que l’outre-mer, ancienne colonie, entretienne un rapport d’égalité avec la métropole.
Aujourd’hui, on veut gagner la bataille de l’égalité économique et de la dignité par le travail. Pour ce faire, il faut mettre en valeur nos ressources : celles de la pêche dans l’océan Indien, des hydrocarbures en Guyane, et, plus globalement, celles des hommes.
Je salue les amendements déposés par nos collègues de Guyane. Permettez-moi, à ce propos, d’évoquer une anecdote : quand je suis arrivé en Guyane, à Kourou, j’ai demandé à mes interlocuteurs combien leur rapportaient les milliards que je voyais s’envoler vers le ciel. Ils m’ont répondu « rien, excepté un développement limité de la zone ».
J’estime qu’une telle approche ne permet pas de valoriser l’outre-mer par rapport, d’une part, à l’ensemble de nos compatriotes de métropole et, d’autre part, aux besoins des ultramarins en matière de politiques publiques.
Je le sais, on ne vote pas une loi approximative qui devra être, par la suite, précisée. Mes collègues décideront de l’avenir de leur amendement. S’ils le maintiennent, je le voterai, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur. Je tiens en effet à envoyer un signal à l’ensemble de l’outre-mer. Je lui dirai que le Gouvernement et le Sénat ont décidé, ce soir – c’est nouveau –, que l’outre-mer est un partenaire économique intégré au développement national. Je lui dirai qu’une part de nos richesses reviendra à la nation, qui nous a beaucoup donné et à laquelle nous tenons à « renvoyer l’ascenseur ». En matière d’hydrocarbures, nous parlons non pas de milliers d’euros, mais de millions et peut-être de milliards ! Je lui dirai également que, dans le cadre de la décentralisation qui permet aux collectivités locales de s’administrer librement, les collectivités régionales ayant la charge de gérer cette ressource ont reçu, ce soir, un signal fort.
Bien sûr, lorsque l’exploitation aura débuté, nous pourrons adopter des dispositions plus précises. Mais je tiens beaucoup à ce signal, parce que je suis un militant du travail, de la dignité et de la responsabilité, comme beaucoup d’entre vous ici.
Ce signal permettra à la population d’attendre avec moins d’impatience les décisions futures. Tel est mon point de vue.
M. le président. La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette, pour explication de vote.
M. Jean-Étienne Antoinette. Je souhaite expliquer à la Haute Assemblée et à mon collègue Jean-Paul Virapoullé les raisons pour lesquelles je maintiendrai ces amendements.
Depuis quelques années, certaines interventions ont laissé entendre que les outre-mer, qui pratiqueraient systématiquement la politique de la main tendue, étaient un peu les « danseuses » de la République.
Tout à l’heure, M. le rapporteur général nous a rappelé que les politiques de défiscalisation applicables en outre-mer coûtaient à l’État plus de 3,2 milliards d’euros.
Dans ce cas précis, il s’agit non pas de pratiquer la politique de la main tendue, mais de poser les fondements du développement économique des départements d’outre-mer.
Lorsqu’il est question de leur attribuer des dotations spécifiques, on nous dit que, une fois encore, les outre-mer demandent davantage à la nation. Quand il est envisagé d’augmenter des taux dans un cadre fiscal existant – cette situation se produira tout à l’heure –, on nous répond qu’il est préférable d’attendre.
En l’occurrence, il s’agit de favoriser un développement économique endogène.
Nous avons l’occasion d’envoyer un signal très fort : les richesses tirées de l’exploitation de nos ressources naturelles peuvent être partagées au profit de la nation comme des collectivités territoriales.
Pour cette raison, j’attends de la Haute Assemblée qu’elle prenne une position.
M. le président. Quel est, en définitive, l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission suit totalement l’avis du Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 194, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 17 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa du 1° du II de l’article 1519, les mots : « 41,9 euros par kilogramme d’or » sont remplacés par les mots : « 104,5 euros par kilogramme d’or » ;
2° Au deuxième alinéa du 1° du II de l’article 1587, les mots : « 8,34 euros par kilogramme d’or » sont remplacés par les mots : « 20,85 euros par kilogramme d’or ».
La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.
M. Jean-Étienne Antoinette. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements nos 194 et 195.
M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 195, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, et qui est ainsi libellé :
Après l’article 17 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 2° du II de l’article 1599 quinquies B du code général des impôts, les mots : « ne peut être supérieur à 2 % » sont remplacés par les mots : « est compris entre 4 et 5 % ».
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Jean-Étienne Antoinette. La redevance instituée au profit des collectivités locales sur le territoire desquelles est réalisée une extraction aurifère est trop faible ; beaucoup trop faible, même, et déconnectée des cours mondiaux de l’or.
L’amendement n° 194 porte sur la redevance due aux communes et aux départements.
Rappelons l’historique de cette redevance à partir de 2006.
Les communes percevaient alors 41,40 euros par kilogramme d’or extrait. Or le cours de l’or s’est établi en 2007 à 15 000 euros pour un lingot du même poids.
Un arrêté du 9 décembre 2009 a porté la redevance à 54,30 euros par kilogramme d’or extrait. Au même moment, le lingot d’or se négociait à plus de 25 000 euros.
Le dernier arrêté en date, l’arrêté du 25 juin 2010, a majoré la redevance de 1,10 euro. Mais, en juin 2010, le lingot d’or se négociait à un cours supérieur de 2 500 euros à celui enregistré au moment de l’arrêté précédent.
La redevance due aux départements a connu, pour sa part, des hausses tout aussi faibles : alors qu’elle s’établissait à 8,34 euros en 2006, elle atteint aujourd’hui 11 euros par kilogramme d’or extrait.
Sans doute n’est-il pas absurde de ne pas répercuter intégralement et immédiatement les évolutions du cours de l’or sur le niveau de la redevance due aux départements et aux communes, les entreprises d’extraction minière ayant pu vendre leur production à terme.
Il est toutefois inconcevable que la redevance progresse seulement de 32 % quand le cours de l’or augmente de plus de 130 % – ce qui s’est produit entre 2006 et 2011.
Hier, le cours du lingot a presque atteint 35 000 euros ! Je vous propose, sinon de prévoir nous-mêmes le rattrapage du retard pris par ces redevances par rapport au cours de l’or, du moins d’indiquer au ministère de l’écologie, compétent pour fixer leur niveau, la direction qui doit être suivie.
Le niveau de la redevance perçue par la région relève en revanche de notre compétence : il appartient en effet au législateur de déterminer un plafond exprimé sous la forme d’un pourcentage du cours de l’or au tarif de la redevance que fixe par arrêté le ministère de l’écologie.
Aujourd’hui, le problème est double : le plafond est trop bas et il n’existe pas de plancher.
L’absence de plancher est préjudiciable car les tarifs fixés par le ministère de l’écologie ne suivent pas le cours de l’or. C’est ainsi que le dernier arrêté, daté du 29 juillet 2010, fixe à 448,36 euros par kilogramme d’or extrait le tarif de la redevance due par les entreprises d’extraction qui ne sont pas des petites et moyennes entreprises.
Ce tarif représente moins de 1,3 % du cours actuel de l’or, quand le plafond législatif est fixé à 2 %... Aussi convient-il d’encadrer le tarif par la fixation d’un plancher : de cette façon, l’inertie du ministère de l’écologie ne portera pas atteinte au niveau des recettes perçues par les régions aurifères.
En ce qui concerne le plafond, je considère qu’il doit être augmenté dans le cas d’une redevance acquittée par une entreprise de grande taille.
J’ai entendu l’argument avancé par M. le rapporteur : en l’absence d’étude d’impact évaluant les effets possibles d’une hausse de la redevance sur les petites et moyennes entreprises, il est préférable de ne pas faire courir de risque aux artisans aurifères.
Mais quant aux sociétés multinationales, comme Areva, FRANC’OR, WMC, Cambior, Golden Star, Euro Ressources ou Asarco, il n’y a aucun risque de les voir cesser leur activité.
Ainsi Golden Star exploite en Guyane une concession d’une superficie de 150 kilomètres carrés ; de son côté, Euro Ressources affiche un chiffre d’affaires de 28,8 millions d’euros et un bénéfice net supérieur à 18 millions euros en 2010. (Plusieurs sénateurs de l’UMP marquent leur impatience et montrent au président de séance un des afficheurs de chronomètre.)
Pour ces entreprises, il me semble tout à fait possible de fixer la redevance à un taux compris entre 4 et 5 % ; de cette façon, le taux d’imposition de l’extraction aurifère s’établirait en France au niveau du taux mondial moyen calculé par la Banque mondiale dans un rapport rendu public en 2006.
L’extraction d’or est une activité hautement polluante, mais extrêmement lucrative pour les compagnies minières.
S’il convient de lutter activement contre l’orpaillage illégal, il importe également de taxer de manière équitable les concessionnaires légaux. Ces derniers en effet extraient chaque année trois tonnes d’or – une ressource non renouvelable, dont l’exploitation détériore durablement l’écosystème.
Il s’agit enfin de mettre en pratique l’un des grands principes du Grenelle de l’environnement, le principe pollueur-payeur.