Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bah voyons !
Mme Annie David, rapporteure. Caricature !
Mme Christiane Hummel. Madame Borvo Cohen-Seat, vous nous interrompez, vous nous moquez. Or le spectacle que vous nous offrez depuis tout à l’heure, à vous compter sans arrêt, à demander des votes par scrutin public, avant d’y renoncer, est bien triste pour ceux qui, comme moi, viennent de loin pour débattre de ce texte ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je serai bref, car je ne voudrais pas prolonger le débat jusqu’à dimanche. (Sourires.)
Nous n’avons jamais pensé que tous les métiers devaient s’arrêter le dimanche. Il est évident que, dans les loisirs, les transports, la santé – je ne vais pas tous les énumérer –, on travaille ce jour-là. Nous avons juste précisé qu’il n’est pas nécessaire que toutes les professions soient concernées…
Mme Catherine Procaccia. Ce n’est pas ce qu’on a dit !
M. Jean Desessard. … et qu’il faut garder du temps pour vivre autrement.
Vous nous reprochez d’être du XIXe siècle, d’éprouver de la nostalgie. Oui, j’ai la nostalgie d’une période où il y avait un progrès social, où le déficit n’existait pas, où tout le monde travaillait, où il y avait moins de chômage, en d’autres termes, d’une France qui fonctionnait mieux !
En réalité, vous posez une question de nature philosophique : doit-il y avoir une différence entre le dimanche, voire les jours fériés – car vous vous attaquez aussi à cet acquis –, et les autres jours de la semaine ?
Si l’on vous suivait, la vie ressemblerait à une morne plaine : on n’y trouverait ni montagnes, ni vallées, ni paysages différents. En somme, tout serait pareil. Pourtant, ce sont ces moments symboliques où l’on peut s’arrêter, ces périodes spécifiques que l’on peut prévoir, ces rituels qui rendent la vie belle.
Vous êtes en train de nous préparer une société anonyme, dépersonnalisée et dépourvue d’intérêt !
M. le président. Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
Aucun nouveau périmètre d’usage de consommation exceptionnel ne peut être délimité après l’entrée en vigueur de la présente loi.
M. le président. La parole est à Mme Christiane Hummel, sur l'article.
Mme Christiane Hummel. Avec cet article, on peut difficilement être plus directif et intransigeant. Il signifie : « Circulez, il n’y a rien à voir ! »
La proposition de loi initiale prévoyait même la disposition suivante : « Les établissements ayant bénéficié d’une dérogation préfectorale sur la base de [l’article L. 3132-25-1] en raison d’une habitude de consommation constatée alors que l’établissement méconnaissait la législation sur le repos dominical antérieurement à la loi du 10 août 2009, se voient retirer leurs dérogations. »
Pourtant, il n’a pas été noté d’accélération des demandes de classement depuis l’application de la loi Mallié. Il est étrange de constater que, dans votre texte, nous allons d’étonnement en étonnement.
Il me semblait que les sénateurs étaient les représentants des maires, des élus locaux. Or ce sont bien les maires – je pense à Plan de Campagne, qui est situé près de chez moi – qui ont demandé la création des PUCE.
M. Ronan Kerdraon. Moi, je n’ai rien demandé !
Mme Christiane Hummel. Or vous voulez les supprimer.
Mme Isabelle Pasquet. On ne demande pas de supprimer ceux qui existent !
Mme Christiane Hummel. Cette suppression aurait pour conséquence de revenir au vide juridique qui préexistait à la loi du 10 août 2009. Vous citez vous-mêmes les pratiques d’un établissement qui fonctionnait en toute illégalité en ouvrant le dimanche, alors qu’un établissement voisin restait fermé ce jour-là pour respecter la loi. C’est précisément ce que nous avons voulu faire cesser.
Mme Annie David, rapporteure. Si tout le monde est hors la loi, il n’y a plus de voyous !
Mme Christiane Hummel. Nous avons fixé un cadre juridique sécurisé. Ce sont justement les maires qui le demandaient pour leur zone de développement commercial.
Cela n’est pas le plus grave à nos yeux.
Nous avons réussi à faire que, dans les zones commerciales, les salariés volontaires voient leurs conditions de travail singulièrement améliorées. Malgré vos déclarations, notre intention n’a jamais été d’étendre le travail du dimanche, il s’agissait d’adapter le droit à une réalité de terrain avec, je le répète, des garanties substantielles pour les salariés, notamment en promouvant le volontariat.
Nous sommes des sénateurs ; de ce fait, nous représentons les élus locaux. Nous devons le faire avec respect pour leurs responsabilités.
M. Ronan Kerdraon. On ne manque de respect à personne !
Mme Christiane Hummel. Il est bien difficile d’être maire, de résoudre les problèmes de ses administrés, en particulier ceux qui sont liés au travail. Or vous faites fi de la demande de nos collègues maires, en supprimant les PUCE. Je ne vous rappellerai pas le nombre de maires socialistes ou communistes qui ont poussé à leur création.
Au-delà de la demande de ces élus qu’il faut respecter, il y a celle des salariés qui souhaitent continuer à travailler le dimanche, en cette période où il est beaucoup question de pouvoir d’achat. C’est une nécessité financière pour certains.
Mme Isabelle Pasquet. Il faut augmenter les salaires pour améliorer le pouvoir d'achat !
Mme Christiane Hummel. Par ailleurs, une organisation familiale permet souvent aux femmes d’avoir leur mercredi pour rester avec leurs enfants.
En outre, la fréquentation des magasins le week-end est une habitude pour les achats à caractère familial, qui sont difficilement réalisables en semaine.
Enfin, c’est aussi une demande des consommateurs, qui plébiscitent l’ouverture dominicale.
Vous dites que les consommateurs reporteront leurs achats. Si les consommateurs viennent le dimanche, c’est parce qu’ils ne peuvent pas faire autrement : ils ne pourront pas venir le lendemain !
M. Ronan Kerdraon. Ils viendront le surlendemain !
Mme Christiane Hummel. Sans les consommateurs, la question que nous évoquons ici ne se poserait pas.
Tant pis pour ceux qui demandent l’ouverture dominicale : maires, salariés, consommateurs ! Vous décidez, on ferme !
Vous n’avez pas jugé bon, avant de prendre votre décision, d’attendre la publication du rapport d’évaluation de la loi.
En proposant la suppression des PUCE, ce texte est source d’insécurité juridique majeure et nie non seulement les réalités de ces zones, mais aussi le désir des familles de consommateurs. Cela, nous ne pouvons l’accepter. (M. Pierre Charon et Mme Marie-Annick Duchêne applaudissent.)
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Gilles, Mmes Debré, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Dériot, Mme Deroche, M. Fontaine, Mmes Giudicelli, Hummel, Jouanno et Kammermann, MM. Laménie, Léonard, Lorrain, Milon et Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Villiers et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière.
Mme Marie-Thérèse Bruguière. J’interviens au nom de mon collègue Bruno Gilles.
L’article 5 concerne le dispositif des périmètres d’usage de consommation exceptionnel prévu par la loi Mallié du 10 août 2009.
Les PUCE, qui n’ont rien à voir avec des brocantes, permettent de prendre en compte les habitudes de consommation dans les agglomérations de Paris, Marseille-Aix et Lille et d’accorder des dérogations administratives temporaires à la règle du repos dominical. De telles dérogations y sont accordées au vu d’un accord collectif ou, à défaut, d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum.
Il ne s’agit en rien d’étendre inconsidérément le travail du dimanche ; il faut adapter le droit à une réalité du terrain avec des garanties substantielles pour les salariés en se fondant sur la notion du volontariat.
La nouvelle rédaction de l’article 5 prévoit que toute nouvelle création de PUCE sera désormais interdite. On nous précise que cela ne vise pas les PUCE bénéficiant déjà de dérogations temporaires. Bien sûr ! Si celles-ci ne sont pas évoquées à cet article, c’est parce qu’elles ont été remises en cause à l’article 2, où leur suspension a été assujettie à vos injonctions, à savoir « la présentation à l’autorité administrative d’un accord conforme » aux dispositions prévues à l’article L. 3132-27-2 du code du travail.
En résumé, vous voulez vous-mêmes dicter aux partenaires sociaux les éléments qui doivent figurer dans les accords collectifs. J’ai déjà livré mon sentiment sur ce que je pensais de telles injonctions. Nous n’avons pas la même culture, il est vrai...
Les faits démontrent, en ce qui concerne les PUCE, que les allégations des parlementaires de gauche ayant saisi le Conseil constitutionnel sur la loi Mallié ne faisaient pas et ne font toujours pas l’unanimité au sein de la gauche. En effet, sur les trente-deux PUCE qui ont été délimités à la demande des maires concernés, douze l’ont été à la demande de maires socialistes et deux à la demande de maires appartenant au parti communiste, le parti des auteurs de la proposition de loi que nous discutons aujourd’hui.
Mme Isabelle Pasquet. Vous l’avez dit et répété, on le sait !
Mme Marie-Thérèse Bruguière. Les PUCE contiennent un dispositif bien encadré, favorable au consommateur, au salarié volontaire, à l’entreprise et à beaucoup d’étudiants qui financent ainsi leurs études.
Dans une période de récession économique et de chômage galopant, peut-on s’autoriser à renoncer à un dispositif qui permet à nos compatriotes qui le souhaitent d’améliorer leurs revenus ou d’avoir un emploi ? À l’évidence, non !
Pour toutes ces raisons, le groupe de l’UMP demande la suppression de l’article 5.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Annie David, rapporteure. Comme pour tous les amendements de suppression, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nadine Morano, ministre. L’article 5 vise à supprimer toute délimitation de nouveaux périmètres d’usage de consommation exceptionnel.
Je constate que les auteurs de la proposition de loi ont évolué, puisque le texte initial, avant le passage en commission des affaires sociales, prévoyait de supprimer purement et simplement le dispositif des PUCE, en interdisant, d’une part, toute nouvelle délivrance d’autorisation administrative après le 1er janvier 2012, et en supprimant, d’autre part, la possibilité de renouveler une autorisation obtenue avant cette date. Par ce revirement, la majorité de gauche fait preuve de sa gêne…
M. Jean-Marc Todeschini. Quelle gêne ?
Mme Nadine Morano, ministre. … à supprimer totalement un dispositif correspondant à une forte demande sociale et s’inscrivant dans une logique gagnante pour les citoyens de grandes métropoles ainsi que pour les salariés. Ceux-ci souhaitent pouvoir travailler le dimanche, dans des conditions permettant de maintenir les emplois, d’en créer de nouveaux et d’améliorer les conditions salariales.
Il est heureux que la gauche ait au moins compris qu’il serait délicat de supprimer les PUCE existants, sachant que près de la moitié des périmètres créés depuis la loi de 2009 l’ont été sur l’initiative de maires qui siégeraient sur les travées de la gauche, s’ils étaient sénateurs. (Rires sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Le dispositif des PUCE traduit l’évolution des habitudes de consommation préexistant à la loi. Le développement de nouvelles zones commerciales n’était pas l’objet de la loi de 2009 ; elle n’a d’ailleurs pas eu cet effet. En témoigne d’ailleurs la localisation des PUCE, créés à Plan de Campagne, en périphérie de Marseille, ainsi qu’en région parisienne, où l’éloignement des centres-villes est une réalité bien connue des Franciliens.
Parallèlement, les demandes de création de PUCE, notamment motivées par une volonté de développer une zone commerciale, ont été refusées.
Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement de suppression. Il estime pertinent de maintenir la législation actuelle, qui permet la création encadrée de nouveaux PUCE.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je serai brève, Mme la ministre ayant été très exhaustive.
M. Jean-Marc Todeschini. Oh oui !
Mme Catherine Procaccia. L’adoption de l’article 5 serait problématique pour l’avenir des PUCE et dommageable pour les salariés comme pour les entreprises.
Madame la rapporteure, pensez aux ventes par internet, qui sont de plus en plus nombreuses. Avez-vous prévu d’interdire à tous les sites qui utilisent des plateformes téléphoniques de faire travailler leurs salariés le dimanche ? Soit dit par parenthèse, la convivialité et le sens du contact ne sont pas très développés avec le commerce électronique, alors que la plupart des zones commerciales sont des lieux d’animation et de vie sociale.
Je le répète, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme aux libertés la loi de 2009.
Vous refusez de prendre en compte le premier bilan de la création des PUCE établi par le rapport du comité de suivi. Ce dernier fait état de dix projets de PUCE en instance de délibération et de dix-sept demandes d’ores et déjà refusées. C’est la preuve que de tels périmètres ne sont pas créés partout et n’importe comment. À titre d’illustration, je reprendrai de nouveau l’exemple du Val-de-Marne, où nombre de maires ne partagent pas votre opinion.
Pour toutes ces raisons, le groupe de l’UMP ne peut pas accepter cet article.
M. Pierre Charon. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 5.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
L’article L. 3132-25-3 du code du travail est abrogé.
M. le président. L'amendement n° 10, présenté par Mmes Bruguière, Debré et Bouchart, MM. Cardoux et Dériot, Mme Deroche, M. Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel, Jouanno et Kammermann, MM. Laménie, Léonard, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Villiers et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière.
Mme Marie-Thérèse Bruguière. La loi Mallié a trouvé un équilibre entre simplification et efficacité par la définition des activités autorisées. Seule la catégorie du commerce de détail a été retenue comme activité permettant de travailler le dimanche, et ce en conciliant trois principes : le respect de l’initiative locale pour l’activité, le respect des droits du salarié, la prise en compte des demandes des consommateurs.
Il est évident que le texte, dont l’objet est de définir plus rigoureusement les possibilités de déroger à la règle du repos dominical dans les communes touristiques n’apporte rien. Il est de surcroît contesté par les faits.
Il est également contredit au regard de la décision du 6 août 2009 du Conseil constitutionnel.
Il est démenti en outre par les conclusions même du rapport d’évaluation. Alors que vous aviez prétendu, durant toute la discussion de la proposition de loi Mallié, que ce texte conduirait à généraliser le travail du dimanche, on s’aperçoit qu’il n’en est rien, puisque le rapport précise qu’il n’y a pas eu d’accélération des demandes de classement en communes et zones d’intérêt touristique depuis l’entrée en vigueur de la loi.
Au 1er juin 2011, cinq cent soixante-quinze communes étaient classées comme « communes d’intérêt touristique ou thermales » pour l’intégralité de leur territoire communal, dont huit ont été classées d’intérêt touristique depuis l’adoption de la loi Mallié. De plus, on dénombrait trente-quatre zones touristiques avant la loi ; il y en a aujourd’hui seulement sept de plus.
Par ailleurs, il appartiendrait à chaque établissement souhaitant déroger au repos dominical d’adresser une demande d’autorisation à l’administration.
Je note que les mesures transitoires, consistant à prévoir un réexamen par l’administration de la situation des commerces autorisés à ouvrir le dimanche, avant le 1er janvier 2013, ont été supprimées par la commission, considérant, à juste titre, qu’elles n’avaient pas d’utilité réelle.
L’adoption de cette proposition de loi va aboutir à une remise en cause de l’équilibre trouvé entre le respect du droit des salariés et la prise en compte des demandes des consommateurs.
Au prétexte d’offrir de nouvelles garanties et protections aux salariés, ce texte n’apporte, en réponse à la simplification des mesures votées dans la loi Mallié, qu’incohérences et insécurité juridique. C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l’article 6.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Annie David, rapporteure. Je pensais que cet amendement n’avait plus d’objet en raison du rejet de l’amendement n° 5, qui visait à supprimer l’article 2.
Si l’article 6 était supprimé, nous nous retrouverions en présence de deux articles du code du travail contradictoires.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
L’article L. 3132-25-4 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 3132-25-4. – Les autorisations prévues aux articles L. 3132-20, L. 3132-25 et L. 3132-25-1 sont accordées pour une durée limitée, après avis du conseil municipal et de la chambre de commerce et d’industrie, de la chambre des métiers et des syndicats d’employeurs et de salariés intéressés de la commune. »
M. le président. L'amendement n° 11, présenté par M. Lorrain, Mmes Debré, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel, Jouanno et Kammermann, MM. Laménie, Léonard, Milon et Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Villiers et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Christiane Kammermann.
Mme Christiane Kammermann. Il s’agit d’un article de coordination avec les dispositions de l’article 4, qui revient sur les modalités de dérogation au repos dominical dans les communes et zones touristiques, issues de la loi du 10 août 2009.
Nous avons exprimé, lors du vote sur l’article 4, notre profond désaccord avec ce retour en arrière. En toute logique, nous sommes donc opposés à l’article 7, qui en est sa conséquence.
Je rappelle que le dispositif antérieur à la loi de 2009 s’était révélé, en pratique, complexe, difficilement compréhensible et source d’insécurité juridique. Avant 2009, les possibilités de dérogation étaient enfermées dans des conditions strictes, ne permettant pas de répondre aux réalités commerciales.
La France est la première destination touristique au monde, avec 60 millions de visiteurs par an. Quel magnifique atout pour notre économie ! Nos communes touristiques, nos stations thermales, nos espaces préservés, notre patrimoine culturel sont autant de joyaux qui font l’attrait de notre pays et son rayonnement à travers le monde.
M. Jean Desessard. Comme c’est intéressant…
Mme Christiane Kammermann. En effet, et il est bon de le rappeler !
Mme Isabelle Debré. Absolument !
Mme Christiane Kammermann. Or, malgré cela, notre pays ne se situe qu’en troisième position en matière de recettes générées par le tourisme.
La loi du 10 août 2009 est venue remédier à un état de fait devenu intenable, tant pour l’économie de notre pays que pour l’attractivité de notre territoire. Nous continuons à défendre l’idée selon laquelle les touristes qui ne passent qu’un week-end en France doivent pouvoir consommer chez nous.
J’ajoute que la loi de 2009 s’est appuyée sur les recommandations du Conseil économique, social et environnemental, qui préconisaient d’instituer une ouverture collective le dimanche, pour l’ensemble des commerces des zones ou communes touristiques.
Chers collègues de gauche, de grâce, n’invoquez pas le spectre de la généralisation du travail dominical ! Je tiens à rappeler que le nombre des communes et zones touristiques concernées par le dispositif a très peu évolué depuis 2009, puisque seules huit communes et sept zones ont été classées.
Nous sommes fermement opposés à un retour au droit antérieur, qui conduirait à restaurer un système ayant montré ses faiblesses et ses contradictions, sans compter que cela risquerait d’engendrer des conséquences néfastes pour l’emploi. Nous ne pouvons pas le tolérer !
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 7. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Annie David, rapporteure. L’article 7 prévoit notamment des consultations obligatoires, ce dont vous n’avez absolument pas parlé, madame Kammermann. Si le Sénat adoptait cet amendement, il supprimerait alors ces consultations, qui existent déjà dans le code du travail.
Il s’agit ici d’un article de coordination avec certaines dispositions déjà votées. La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
(Supprimé)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. Compte tenu de l’heure, je serai brève. « Ventre affamé n’a point d’oreilles », vous risqueriez de ne pas être très attentifs si je parle trop longtemps, mes chers collègues.
La loi du 10 août 2009 mérite certainement d’être encore améliorée. Le comité parlementaire de suivi, chargé de veiller au respect du principe du repos dominical, fera certainement des propositions en ce sens.
Je regrette très sincèrement que, pour des raisons, dirais-je, politiques, politiciennes ou idéologiques, pour reprendre le vocabulaire de M. Desessard, cette proposition de loi soit arrivée aussi vite dans notre hémicycle. Il aurait mieux valu attendre les conclusions du comité parlementaire.
Le groupe de l’UMP votera bien évidemment contre ce texte, et je compte sur l’aide de nos collègues députés. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Comme l’avait déjà souligné notre collègue Hervé Maurey lors de la discussion générale, ce texte est un peu trop politicien à notre goût. Il s’inscrit véritablement dans la stratégie de la nouvelle majorité sénatoriale, consistant à remettre systématiquement en cause tout ce que la Haute Assemblée a pu voter depuis cinq ans.
Chers collègues de gauche, depuis que vous formez la nouvelle majorité ici même, nous assistons à un « détricotage » méthodique des textes adoptés auparavant. Cela ne peut que nuire, je vous l’assure, à l’image générale de notre assemblée, à laquelle je vous sais très sensibles, comme nous le sommes tous. Faites très attention : si, au cours des six prochains mois, le Sénat continue de fonctionner ainsi, l’opinion publique va finir par se demander à quoi nous servons. Je me permets de vous le dire, car l’enjeu est important. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Christiane Kammermann. Tout à fait !
M. Yves Pozzo di Borgo. Sur le fond, cette proposition de loi remet en cause la loi du 10 août 2009, laquelle avait pourtant une visée pragmatique et répondait aux besoins évidents de nombre de commerces, de communes et de consommateurs.
La loi Mallié ne remet pas du tout en cause le principe du repos dominical. Elle ne fait qu’en assouplir les modalités dans des zones strictement délimitées, les communes touristiques et les PUCE.
Le texte que vous nous proposez revient sur les assouplissements ainsi opérés pour les communes touristiques. C’est défendre une vision trop idéologique. Je regrette que le groupe communiste, qui est souvent beaucoup plus pragmatique, ait choisi de s’engager dans un tel débat.
À nos yeux, le Gouvernement n’est pas non plus exempt de tout reproche. Je tiens à reprendre à cet égard l’argumentaire qu’avait développé Hervé Maurey lors de la discussion générale.
Voici ce que notre collègue disait : « Je regrette, en revanche, que l’on n’ait pas progressé en matière d’harmonisation des contreparties accordées aux salariés travaillant le dimanche et sur le nécessaire respect du volontariat. Les dérogations au principe du repos dominical nécessitent en effet une harmonisation des contreparties.
« Au fil des années et des gouvernements, y compris de gauche, les dérogations se sont multipliées – plus de 180 – et les garanties également. De ce point de vue, la loi Mallié est encore venue diversifier les situations en prévoyant des dispositions différentes entre les salariés selon qu’ils travaillent dans un PUCE ou dans une commune touristique.
« J’avais, à l’époque, lors de la discussion, attiré l’attention du Gouvernement sur ce sujet et il s’était engagé à transmettre au Sénat les éléments relatifs "aux différentes contreparties du travail dominical, à leur nature et à leur niveau" dans un volet spécifique du bilan annuel de la commission nationale de la négociation collective.
« Si le bilan a bien été transmis au Parlement, monsieur le ministre, aucune des informations promises n’y figure. »
Madame la ministre, nous renouvelons donc aujourd'hui la demande que nous avions formulée auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
J’en viens maintenant à la situation spécifique de Paris, dont je suis l’élu, en rappelant, d’abord, qu’il s’agit du premier département touristique de France.
À Paris, nous avons besoin de la loi Mallié dans sa forme actuelle. Moi-même et les membres du groupe Centre et indépendants au Conseil de Paris venons de déposer, lundi dernier, un vœu pour que le maire de Paris qualifie de zone touristique le secteur des grands magasins du boulevard Haussmann. Il faut y expérimenter l’ouverture dominicale des commerces de détail, pour renforcer l’attractivité de la capitale face à la concurrence internationale, notamment celle de Londres.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Heureusement que le maire de Paris est vigilant !
M. Yves Pozzo di Borgo. Concernant les PUCE, la présente proposition de loi est bancale. D’un côté, elle en reconnaît l’utilité puisqu’elle ne propose pas de les supprimer. De l’autre, elle prévoit d’en sanctuariser aujourd’hui le nombre. Comme si l’activité économique n’était pas en évolution constante et que les zones de commerces ne changeaient pas en permanence. C’est totalement irréaliste !
Par ailleurs, le présent texte crée un régime universel de contrepartie au travail du dimanche. Cet aspect n’est évidemment pas inintéressant, mais le dispositif mis en œuvre est très maladroit. En effet, des négociations sont en cours entre les partenaires sociaux et la contrepartie imposée en l’espèce pourrait avoir des conséquences désastreuses sur certains commerces et, partant, pénaliser l’emploi.
Madame la ministre, mes chers collègues, une fois pour toutes, faisons confiance à la démocratie sociale. Pour toutes ces raisons, le groupe de l’Union centriste et républicaine votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)