M. le président. L’amendement n° 17 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'article 15.
(L'article 15 est adopté.)
Article additionnel après l’article 15
M. le président. L'amendement n° 177, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l’article L. 2123-20, le second alinéa des articles L. 3123-18 et L. 4135-18, et le dernier alinéa de l'article L. 5211-12 du code général des collectivités territoriales sont ainsi rédigés :
« La part écrêtée du montant total des rémunérations et des indemnités de fonction visé à l’alinéa précédent ne peut faire l’objet d’un quelconque reversement, même indirect. Elle est reversée au budget des personnes publiques au sein desquelles le mandat ou la fonction a été acquis ou renouvelé le plus récemment. »
La parole est à M. Jean Louis Masson.
M. Jean Louis Masson. Cet amendement vise à supprimer le reversement de la part écrêtée des sommes perçues par les élus en situation de cumul de mandats. Ce système soulève des problèmes déontologiques, la part écrêtée étant redistribuée à droite ou à gauche selon des critères qui conduisent à des dysfonctionnements.
La loi du 28 décembre 1999 modifiant le code général des collectivités territoriales et relative à la prise en compte du recensement général de population de 1999 pour la répartition des dotations de l’État aux collectivités locales prévoit que les élus en situation de cumul d’indemnités peuvent redistribuer à d’autres élus la part écrêtée de leurs indemnités.
Ce système entraîne de nombreuses dérives, au point que l’Assemblée nationale a adopté, en juin 2011, un amendement tendant à supprimer la redistribution de l’écrêtement. Cette suppression a ensuite été entérinée par la commission mixte paritaire – avec, donc, la participation du Sénat. Toutefois, avec l’accord du Gouvernement, un amendement du président du groupe UMP du Sénat a été voté pour rétablir le statu quo. Le problème reste donc entier.
Dans un souci de moralisation, il est souhaitable de mettre fin à ces pratiques. Tel est l’objet de mon amendement, qui prévoit que les sommes écrêtées resteront dans le budget de la collectivité concernée, permettant ainsi des économies budgétaires.
En 2011, le Gouvernement et le président du groupe UMP du Sénat ont fait valoir que le système de redistribution devait être supprimé, mais que le projet de loi relatif aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique n’était pas le véhicule législatif approprié ; d’un commun accord, on était convenu que la mesure de suppression serait réintroduite dans un texte législatif à caractère général. Le présent projet de loi tombe donc à point nommé.
Mes chers collègues, tout le monde ayant été d’accord sur le principe en 2011, j’espère que personne ne se déjugera. Je n’ose pas penser un seul instant que l’argument du véhicule législatif ait pu être un simple prétexte et que la décision de la commission mixte paritaire ait pu être reportée pour d’autres raisons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Delebarre, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l’adoption de cet amendement en l’état, et ce pour des raisons que vous avez vous-mêmes évoquées dans votre intervention.
Ce qui était vrai dans le débat sur le texte relatif à la Guyane l’est encore aujourd’hui, car cette question est légitime. D’ailleurs, ce point pourra être de nouveau abordé à l’occasion de l’examen du projet de loi sur le cumul des mandats qui viendra très prochainement en discussion devant votre assemblée, dont la portée sera générale et où il trouvera naturellement sa place.
En l’état et dans ce texte-là, le Gouvernement est d’autant plus défavorable à cet amendement que, dans la pratique, une modification de ce type suppose notamment – et c’est ce que va faire le Gouvernement pour le texte sur le cumul des mandats – une concertation en amont avec les associations d’élus, et donc un travail préparatoire.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. J’avais déposé dans le cadre du projet de loi de finances un amendement qui ressemblait étrangement à celui-là, s’agissant du cumul des mandats et de l’écrêtement. Mais le Sénat n’étant pas allé au bout de la discussion budgétaire, nous n’avons pas pu l’examiner.
Je précise qu’une telle mesure vaut pour l’ensemble des mandats, et pas seulement pour ceux du conseil départemental. Il existe en effet d’autres types de mandats : ceux des présidents d’EPCI, par exemple. La discussion sur ce thème est donc légitime.
J’avais calculé les économies d’écrêtement engendrées par cette mesure : elles sont de plus de 10 millions d’euros pour le Sénat et d’environ 14 millions d’euros pour l’Assemblée nationale.
J’avais proposé que ces sommes abondent un fonds de péréquation destiné aux communes endettées, car, c’est comme l’effet Matthieu, « on donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance, mais à celui qui n’a pas on ôtera même ce qu'il a ». Ce sont en effet les plus grosses communes qui peuvent bénéficier et faire bénéficier leurs collaborateurs de l’écrêtement. Finalement, plus les gens cumulent et plus ils peuvent déléguer. Il y a là une espèce de cercle vicieux !
Monsieur le ministre, j’ai bien compris vos explications et le fait que cette disposition fera partie du statut de l’élu. Je ne sais pas si M. Jean Louis Masson maintiendra ou non son amendement. Sachez qu’en toute hypothèse vous retrouverez cet amendement sur l’écrêtement dans le texte relatif au statut de l’élu. S’il n’est pas présenté sous la signature de M. Jean Louis Masson, il le sera sous la mienne !
M. le président. La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.
M. Jean-René Lecerf. Pour ma part, je soutiendrai l’amendement de notre collègue Jean Louis Masson, car la redistribution de la part écrêtée est effectivement tout à fait perverse.
Je vous donnerai deux exemples.
Le premier est le retour à l’envoyeur, si je puis m’exprimer ainsi. Il est relativement fréquent, en effet, que les bénéficiaires d’abondements opèrent une redistribution à celui qui a bien voulu leur concéder la part écrêtée.
Le second concerne les conversions miraculeuses. J’ai en tête le cas bien précis d’une personne qui a été élue avec l’appui d’une mouvance politique et qui, subitement, s’est convertie à l’autre mouvance !
M. Jacques Mézard. Les nouveaux convertis sont toujours les pires !
M. Jean-René Lecerf. Peu de temps après, on a découvert qu’il bénéficiait d’un substantiel abondement de la part du président de la collectivité !
Pour éviter ces effets pervers, qu’on supprime l’écrêtement et qu’on n’en parle plus ! (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP et de l’UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, pour explication de vote.
M. Philippe Kaltenbach. Sur le fond, le groupe socialiste est favorable à l’amendement, car la question doit être revue complètement et ce système d’écrêtement doit être supprimé. Toutefois, cet amendement n’a pas sa place dans le texte que nous examinons.
Nous aurons l’occasion de revenir prochainement sur ces questions et nous soutiendrons alors une mesure visant à mettre fin à l’écrêtement. Mais, pour l’heure, il faut que cet amendement soit retiré ; dans le cas contraire, le groupe socialiste votera contre.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. J’ai bien entendu les arguments de M. le ministre qui viennent d’être repris par M. Kaltenbach. Mais ce qui est fait n’est plus à faire !
Lors du débat que nous aurons, je serais heureux que, sur l’initiative du Sénat, les assemblées parviennent à présenter l’intérêt du cumul comme n’étant pas financier. Par conséquent, la suppression de l’écrêtement proposée par notre collègue Jean Louis Masson est extrêmement pertinente.
En effet, ce premier geste fort permettrait de montrer que, s’il y a peut-être dans le cumul des raisons politiques, ce que je pense profondément, il n’y a aucun intérêt matériel ; la suppression de l’écrêtement est précisément une des façons de le montrer.
C’est également une façon de tuer ce comportement assez général qui s’appelle l’ingratitude. Contrairement à mon collègue Jean-René Lecerf, en matière d’écrêtement, j’ai plus souvent constaté de l’ingratitude que de la dépendance. En effet, une fois l’écrêtement transmis, vous avez droit à un sourire le premier mois. Mais, assez rapidement, il en va différemment, car, à l’image de M. Perrichon sur la mer de Glace qui préférait sauver qu’être sauvé, mieux vaut être celui qui donne que celui qui reçoit !
Par conséquent, pour tuer l’ingratitude, je vous propose de voter l’amendement de Jean Louis Masson.
M. Pierre-Yves Collombat. Vous attendiez de la gratitude ? (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.
M. Hervé Maurey. Je serais tenté de faire la même remarque qu’hier soir concernant l’amendement de M. Mézard. Effectivement, ce n’est pas forcément à l’occasion de l’examen de ce projet de loi qu’il faut aborder cette question.
On peut regretter – mais c’est la nature même de ce texte – que le vote de cet amendement ne permette de régler la question que pour les assemblées départementales. Or, naturellement, le problème de l’écrêtement se pose pour toutes les autres collectivités : conseils régionaux ou communes.
Néanmoins, comme je l’avais dit pour l’amendement de M. Jacques Mézard qui visait à limiter le nombre de mandats dans le temps, je pense que c’est une bonne initiative.
Nous connaissons tous, dans cette assemblée, un certain nombre d’abus manifestes, dont certains ont été cités. Dans mon département, j’ai connu le cas d’un maire qui versait la totalité de la part écrêtée à sa seule adjointe, laquelle était, comme par le plus grand des hasards, sa compagne, ou encore celui d’un président de collectivité devenu parlementaire qui agissait de même en faveur de quelqu’un qui n’avait pu être vice-président de l’assemblée en question, cela en guise de compensation !
Tous ces exemples le montrent, ce système n’est pas sain. Par conséquent, malgré les réserves que j’ai formulées en début d’intervention, je voterai cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Sur le fond, je suis tout à fait d’accord, ce procédé a quelque chose de malsain. Mais je m’interroge sur l’art et la manière de réaliser le calcul auquel a abouti Mme Goulet : l’économie serait de 10 millions d’euros pour le Sénat. (Mme Nathalie Goulet s’exclame.) Notre collègue est vraiment formidable !
Ce qui m’étonne, c’est que personne n’ait précisé un élément important : ce reversement – si reversement il y a – ne permettra pas à un élu de toucher plus que le maximum prévu par la loi. Cet amendement a donc une portée limitée.
Je suis tout à fait d’accord pour dire que cette mesure doit effectivement figurer dans un texte relatif au cumul des mandats et au statut de l’élu.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Il est vrai que cet amendement pose un réel problème à une époque où l’on parle de transparence de la vie publique, de la vie politique.
En effet, les indemnités sont malheureusement souvent des sujets qui fâchent nos électeurs. Or nous nous devons de respecter ces derniers, et, à un moment donné, il est important que nous montrions l’exemple.
Selon moi, c’est justement ici, au sein de la Haute Assemblée qui représente l’ensemble des collectivités territoriales, que nous pouvons débattre de ces problèmes clés. Nous devons aussi croire en l’éthique et en la moralité en politique.
Par conséquent, je soutiendrai cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé, pour explication de vote.
M. Jean-Vincent Placé. Comme d’habitude, le débat est extrêmement riche,…
Mme Nathalie Goulet. Ah !
M. Jean-Vincent Placé. … compte tenu de la diversité d’opinions sur les différentes travées.
M. Bruno Sido. Surtout ce matin !
M. Jean-Vincent Placé. J’ai écouté M. Sido, qui se fait de nouveau remarquer, mais peut-être de façon plus positive que dans les débats précédents ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Mais je disais cela juste pour vous réveiller tous et vous motiver pour la suite des débats…
Très sincèrement, je ne suis pas convaincu par l’argument de mon ami Philippe Kaltenbach. Il est favorable à cette mesure mais souhaite son report à plus tard sous prétexte qu’il faut donner de la cohérence aux textes. Jeune parlementaire, j’ai déjà constaté que cet argument revenait souvent, plus souvent d’ailleurs que le texte ou l’amendement en question !
Pour ma part, je trouve qu’il s’agit d’une bonne mesure. Étant peut-être plus optimiste sur la nature humaine que M. Gérard Longuet, je ne suis pas sûr qu’il n’y ait que des ingrats dans une telle opération. En revanche, on fait sûrement des mécontents. Pour le coup, l’adoption de cette mesure réglera peut-être des problèmes de choix d’écrêtements : il y a souvent des abus, des proximités, des copinages, etc. Mais c’est la vie !
Plus sérieusement – je me tourne vers le groupe socialiste et les bancs du Gouvernement –, le président de la République a dit très clairement qu’il était favorable à un mandat parlementaire associé à un mandat local non exécutif.
M. Bruno Sido. Et non rémunéré !
M. Jean-Vincent Placé. De fait, implicitement, cela signifie qu’il est favorable à la fin de l’écrêtement.
Aussi, pour anticiper – vous savez combien nous, les écologistes, sommes soucieux de soutenir l’action et la parole du Président de la République, notamment sur le sujet du non-cumul des mandats (Rires.) –, et voulant faire preuve de volontarisme, nous souhaitons que la Haute Assemblée vote cet amendement qui paraît extrêmement utile et qui, de toute façon, aura vocation à s’appliquer – le plus vite possible je l’espère – lorsque le non-cumul des mandats sera voté en mars 2014. C’est, je crois, le souhait du président du groupe socialiste et de nombreuses personnalités, dont le maire de Paris. Je m’associe également à ce vœu. (Mme Hélène Lipietz applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Vous votez pour, monsieur Masson ?
M. Jean Louis Masson. Je remercie M. Gérard Longuet des propos qu’il a tenus et je le rassure : je voterai effectivement pour !
Selon certains orateurs, la mesure ne s’appliquerait qu’aux conseillers généraux. Mais, si vous lisez bien l’amendement, elle s’appliquera en fait à tout le monde. C’est l’amendement qu’avait déposé M. Dosière, soutenu par le groupe socialiste de l’Assemblée nationale. Je ne comprendrais donc pas que, dans un combat d’arrière-garde, nos collègues socialistes soient pratiquement les seuls dans cette instance à défendre les bénéficiaires de l’écrêtement. Je n’invente rien !
Nos collègues socialistes nous parlent souvent de la moralisation de la vie publique, etc. Si moralisation il y a, on est en plein dedans ! Vous ne pouvez pas – notre collègue Jean-Vincent Placé l’a fort bien expliqué – toujours reporter l’adoption de cette mesure sous prétexte que ce n’est jamais le bon moment !
Je pense au contraire que c’est vraiment le bon moment. La mesure ne concerne pas la Guyane et elle règle tout de même un certain nombre de problèmes.
Madame Goulet, les députés et les sénateurs ne sont pas les seuls concernés par l’écrêtement, loin de là ! En effet, dans les collectivités locales, il y a beaucoup d’élus qui, sans être parlementaire, sont maire d’une grande ville, président d’une intercommunalité, président de ceci, président de cela, et qui sont souvent bien plus concernés par l’écrêtement que le député ou le sénateur de base. Il est bon aussi de le dire pour qu’on n’ait pas l’impression que cela concerne toujours les députés ou les sénateurs !
Par conséquent, j’en appelle bien évidemment à nos collègues socialistes qui, s’ils ne sont pas favorables à cette mesure, pourraient au moins s’abstenir. Cela ferait vraiment mauvais effet qu’un article additionnel de moralisation tel que celui-là soit repoussé par le groupe socialiste, alors même que M. Dosière et certains membres socialistes de l’Assemblée nationale nous parlent matin, midi et soir des problèmes de moralisation !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, je reprends la balle au bond pour répondre en même temps à nos collègues Bruno Sido et Jean Louis Masson.
En réalité, les calculs, s’agissant des parlementaires, étaient faciles à faire. L’écrêtement est de 8 512 euros et, s’ils cumulent, leurs fonctions sont encadrées par décret. C’est sur ces éléments que j’ai demandé à quelqu’un sachant faire des additions de calculer l’écrêtement. C’est ainsi que je suis arrivée à ce chiffre, et je tiens mes comptes à votre disposition !
J’avais bien compris, cher Jean Louis Masson, que cela concernait l’ensemble des élus et pas seulement les parlementaires. Cela me fait soutenir doublement votre amendement, et je regrette triplement de ne pas avoir pu examiner la seconde partie du budget !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Quand j’entends en début d’intervention les mots « sincèrement », « honnêtement » et « moralisation », je suis toujours un peu inquiet ! (Sourires.)
J’ai bien entendu les propos de notre excellent collègue M. Jean-Vincent Placé et je suis heureux de constater son opposition formelle à tout marchandage dans toutes les questions de vie publique. (Rires.) C’est effectivement une éthique et, je crois, une information importante ce matin. Nous saluons ce grand progrès démocratique !
Pour en revenir à ce débat, autant je ne suis pas favorable, tout le monde le sait, à une loi sur le non-cumul des mandats, autant je suis partisan d’une limitation du cumul, et surtout de la suppression du cumul des indemnités.
Ce qui a été dit sur les indemnités horizontales, dont on ne parle d’habitude jamais, est tout à fait pertinent. M. Jean-Vincent Placé a rappelé à cet égard l’objectif du Président de la République ; mais, si j’ai bien compris, ne seront concernés ni les conseillers généraux ni les conseillers régionaux, qui pourront continuer de siéger en tant que parlementaires, ce qui constitue une situation que je qualifierai d’ « imposture totale ».
Par ailleurs, personne n’est obligé d’utiliser l’intégralité des indemnités accordées par les collectivités locales. Dans la collectivité que je préside, nous dépensons simplement, depuis onze ans, la moitié de l’enveloppe. On peut donc envoyer des signes de moralisation par les pratiques que nous adoptons, et non pas seulement par les discours.
Cela étant, l’écrêtement et la redistribution des sommes en question se font souvent sans transparence à l’égard de nos concitoyens. Une évolution doit avoir lieu en la matière, qui sera d’ailleurs plus facile à réaliser si le cumul des indemnités est supprimé. Il faudra attendre le débat sur ce thème pour montrer comment on lave plus blanc que blanc.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Le groupe CRC s’abstiendra sur cet amendement.
Autant le Sénat peut encourager certaines réformes, autant celles-ci doivent-elles être menées dans l’ordre. On ne peut pas soulever le problème des écrêtements et des indemnités des élus sans d’abord prendre le temps de poser la question du statut de l’élu, de l’encadrement de la fonction et de la possibilité pour celles et ceux qui travaillent d’être mis en disponibilité.
Nous devons également veiller à éviter à cet égard, y compris dans nos discussions, tout populisme et toute démagogie. N’oublions pas que nous risquerions alors de scier la branche sur laquelle nous sommes assis !
Coup de hasard, je relisais ce matin le discours du Président de la République devant le congrès des maires de France, dans lequel François Hollande rappelait à ces élus, et à travers eux à l’ensemble des Français, la nécessité d’un statut de l’élu. En effet, pour que nos compatriotes aient des représentants remplissant effectivement les missions pour lesquelles ils ont été désignés, il faut un statut et des moyens adéquats pour les élus.
Sur la question de l’écrêtement et des « petits arrangements entre amis », je rappelle que, en la matière, les décisions font l’objet d’une délibération et sont publiques. Et s’il y a bien une question, au sein du conseil régional Rhône-Alpes, qui fait débat et dont l’issue de la délibération est connue de tous, c’est bien celle de l’écrêtement ! Tout se sait !
Madame Goulet, si le problème de l’endettement des collectivités pouvait être résolu uniquement par la suppression de la redistribution de la part écrêtée, ce serait magnifique ! Nous aurions trouvé la recette miracle. Malheureusement, je crois que cela ne suffirait pas.
Bien que je m’étende rarement sur mes expériences personnelles, je souhaite faire une exception aujourd’hui. Quand, avant d’être élue sénatrice, j’étais déjà conseillère régionale, j’ai bénéficié de la part écrêtée des indemnités de Jean-Jack Queyranne, président socialiste du conseil régional, qui m’avait confié un certain nombre de délégations. M. Queyranne, par cette décision qui m’a permis de réduire mon activité professionnelle – un tiers-temps au lieu d’un mi-temps –, m’a donné la possibilité de remplir les missions qu’il m’avait déléguées, au nom de l’intérêt général de la collectivité.
Lorsque l’on avance des arguments, il faut tout prendre en compte ! Au final, il s’agit de savoir quelle catégorie de la population nous voulons comme élus de la République de demain !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je souhaite préciser brièvement la position du Gouvernement dans cette affaire.
S’il fallait illustrer la nécessité d’avoir un débat plus large, le témoignage qui vient d’être donné permettrait de le faire.
Il ne faut pas que nos concitoyens pensent que l’écrêtement ne relèverait que d’arrangements entre amis pour parvenir soit à la gratitude, soit à l’indépendance. La transparence existe. D’abord, la décision est prise après délibération. Ensuite, dans certaines situations, les sommes en question permettent à des élus ne bénéficiant normalement pas d’indemnités d’assurer en toute légalité une activité publique, tout le monde n’ayant pas les moyens de supporter une perte de salaire.
Cette question aura donc naturellement sa place dans un débat plus général relatif au statut de l’élu. Sur ce point, la position du Gouvernement est claire.
Le débat sur l’écrêtement est légitime. Le Gouvernement considère que ce sujet doit notamment être examiné lors de la discussion du texte sur le cumul des mandats. Dans ce cadre, l’écrêtement, ce sera la cerise sur le gâteau, si vous me passez l’expression ! Mais je ne voudrais pas que certains, sans limites, pensent aujourd’hui pouvoir simplement manger la cerise pour, demain, refuser le gâteau ! (Exclamations amusées.) Quoi qu’il en soit, c’est à ce moment-là que nous aurons un débat de fond.
Mme Cécile Cukierman. C’est gâteau et cerise !
M. Gérard Longuet. Je laisse le gâteau, c’est un étouffe-chrétien !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15.
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉLECTION DES CONSEILLERS MUNICIPAUX, DES DÉLÉGUÉS COMMUNAUTAIRES ET DES MEMBRES DU CONSEIL DE PARIS
CHAPITRE IER
Élection des conseillers municipaux
Article additionnel avant l'article 16
M. le président. L'amendement n° 344, présenté par M. Gorce, est ainsi libellé :
Avant l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le début du quatrième alinéa de l’article L. 238 du code électoral est ainsi rédigé :
« Le nombre ... (le reste sans changement) »
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article 16
(Non modifié)
Dans les intitulés du chapitre II et du chapitre III du titre IV du livre Ier et à l’article L. 252 du code électoral, le nombre : « 3 500 » est remplacé par le nombre : « 1 000 ».
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, sur l'article.
M. Dominique de Legge. L’article 16 vise à répondre, me semble-t-il, à deux objectifs, qui renvoient à deux problèmes.
Le premier tient à la désignation des conseillers communautaires, deux thèses s’affrontant en quelque sorte dans cette affaire.
La première thèse consiste à considérer que les conseillers communautaires, du fait de l’importance de l’intercommunalité et des sommes en jeu, devraient être désignés au suffrage universel, ce qui aurait ipso facto pour conséquence de faire de l’intercommunalité des collectivités territoriales de plein exercice, en concurrence vraisemblablement avec les communes.
Selon la seconde thèse, l’intercommunalité reposerait sur les principes de subsidiarité, de coopération et de mutualisation. Sa légitimité découlerait de la représentation des communes au sein de l’intercommunalité, les conseillers communautaires devant par conséquent être désignés au sein du conseil municipal.
Cette affaire a suscité de longs débats. Sur le fond, un compromis semble aujourd’hui se dessiner : lors de l’élection des conseillers municipaux, il conviendra d’indiquer celles et ceux qui ont vocation à siéger au sein de l’intercommunalité.
Il faut bien le reconnaître, comme dans tout compromis, cette solution ne donne véritablement satisfaction à personne : les tenants de la thèse selon laquelle les conseillers communautaires doivent être élus au suffrage universel nous expliquent, comme le fait l’ADCF, l’Assemblée des communautés de France, qu’il s’agit d’une première étape et que, tôt ou tard, il faudra aller vers une désignation au suffrage direct. Ceux qui considèrent que l’intercommunalité repose sur la mutualisation voient dans cette réforme un premier pas vers le démantèlement ou la disparition des communes.
Quoi qu’il en soit, si l’on retient le fléchage, il convient d’adopter un mode d’élection différent et, par conséquent, d’étendre le principe du scrutin de liste.
Le second problème posé est celui du mode d’élection actuel, communément appelé « tir au pigeon » ; ce mode d’élection aboutit souvent à ce que les élus les plus actifs qui ont assumé leurs responsabilités – bien souvent les maires et les adjoints – soient rayés de la liste, leurs collègues moins actifs, n’ayant donc pas déplu, réalisant en général de meilleurs scores.