sommaire
Présidence de M. Jean-Léonce Dupont
Secrétaires :
MM. Hubert Falco, François Fortassin.
2. Consommation. – Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 90 rectifié bis de M. Philippe Marini. – M. Philippe Marini.
Amendement n° 4 de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. – Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois.
Amendement n° 542 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure.
Amendement n° 277 de Mme Leila Aïchi. – Mme Leila Aïchi. – Retrait.
MM. Martial Bourquin, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation ; Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques ; Mme Élisabeth Lamure. – Rejet de l’amendement n° 90 rectifié bis ; adoption de l’amendement n° 4 ; retrait de l’amendement n° 542.
Amendement n° 6 de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. – Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis ; MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Adoption.
Amendement n° 7 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. – Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Amendement n° 197 de M. Jean Bizet. – M. Jean Bizet.
Amendement n° 239 rectifié de M. Henri Tandonnet. – M. Henri Tandonnet.
Amendement n° 543 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure.
Amendement n° 276 de Mme Leila Aïchi. – Mme Leila Aïchi.
MM. Martial Bourquin, rapporteur ; M. Benoît Hamon, ministre délégué ; Jean Bizet. – Adoption de l’amendement n° 7 rectifié, les amendements nos 197, 239 rectifié et 543 devenant sans objet ; rejet de l’amendement n° 276.
Amendement n° 9 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. – Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Amendement n° 544 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure.
Amendement n° 668 de Mme Leila Aïchi. – Mme Leila Aïchi. – Retrait.
MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Adoption de l’amendement n° 9 rectifié, l'amendement n° 544 devenant sans objet
Amendement n° 545 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 546 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure.
Amendement n° 12 de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. – Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Amendement n° 669 de Mme Leila Aïchi. – Mme Leila Aïchi. – Retrait.
MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet de l’amendement n° 546 ; adoption de l’amendement n° 12.
Amendements identiques nos 198 de M. Jean Bizet et 231 rectifié de M. Henri Tandonnet. – MM. Jean Bizet, Henri Tandonnet, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet des deux amendements.
Amendement n° 199 de M. Jean Bizet. – MM. Jean Bizet, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 547 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Gérard Cornu. – Rejet.
Amendements identiques nos 195 rectifié de M. Bruno Retailleau et 232 rectifié de M. Henri Tandonnet. – MM. Bruno Retailleau, Henri Tandonnet.
Amendement n° 548 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure.
Amendement n° 202 de M. Jean Bizet. – M. Jean Bizet.
Amendement n° 233 rectifié de M. Henri Tandonnet. – M. Henri Tandonnet.
Amendement n° 670 de de Mme Leila Aïchi. – Mme Leila Aïchi. – Retrait.
Amendement n° 200 de M. Jean Bizet. – M. Jean Bizet.
MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Bruno Retailleau. – Rejet des amendements nos 195 rectifié et 232 rectifié.
Mme Élisabeth Lamure. – Rejet des amendements nos 548, 202, 233 rectifié et 200.
Amendement n° 549 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 14 de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. – Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis ; MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Adoption.
Amendement n° 234 rectifié de M. Henri Tandonnet. – MM. Henri Tandonnet, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendements identiques nos 235 rectifié de M. Henri Tandonnet et 550 de Mme Élisabeth Lamure. – M. Henri Tandonnet, Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet des deux amendements.
Amendement n° 201 de M. Jean Bizet. – M. Jean Bizet.
Amendement n° 236 rectifié de M. Henri Tandonnet. – M. Henri Tandonnet.
MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Jean Bizet, Henri Tandonnet. – Retrait de l’amendement n° 201 ; rejet de l’amendement n° 236 rectifié.
Amendements identiques nos 237 rectifié de M. Henri Tandonnet et 551 de Mme Élisabeth Lamure. – M. Henri Tandonnet, Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Retrait des deux amendements.
Amendement n° 552 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur. – Retrait.
Amendement n° 203 de M. Jean Bizet. – MM. Jean Bizet, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 553 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 158 rectifié de M. Jean-Pierre Plancade. – MM. Robert Tropeano, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Retrait.
Amendement n° 15 de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. – Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Amendement n° 159 rectifié de M. Jean-Pierre Plancade. – M. Robert Tropeano.
MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Jean-Jacques Hyest. – Adoption de l’amendement n° 15, l'amendement n° 159 rectifié devenant sans objet
Amendement n° 122 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. Robert Tropeano, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 16 de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. – Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis ; MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Adoption.
Amendement n° 17 rectifié de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. – Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis ; MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Adoption.
Amendement n° 204 de M. Jean Bizet. – MM. Jean Bizet, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 555 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Jean-Jacques Mirassou. Benoît Hamon, ministre délégué.
Adoption, par scrutin public, de l'article modifié.
Articles additionnels après l’article 1er
Amendement n° 278 de Mme Leila Aïchi. – Mme Leila Aïchi, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 509 rectifié de M. Philippe Marini. – MM. Philippe Marini, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Bruno Retailleau, Gérard Cornu. – Rejet.
Amendement n° 238 rectifié de M. Henri Tandonnet. – MM. Henri Tandonnet, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Alain Bertrand, Stéphane Mazars, Mme Mireille Schurch, MM. Alain Fouché, François Fortassin. – Adoption par scrutin public.
Amendement n° 556 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure.
Amendement n° 667 de la commission. – M. Martial Bourquin, rapporteur.
M. Benoît Hamon, ministre délégué ; Mme Élisabeth Lamure. – Rejet de l’amendement n° 556 ; adoption de l’amendement n° 667.
Amendement n° 533 rectifié bis de M. Jean-François Husson. – M. Jean-François Husson.
Amendement n° 557 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure.
MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Jean-François Husson. – Rejet des amendements nos 533 rectifié bis et 557.
Amendement n° 558 rectifié de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 153 rectifié de M. Jean-Pierre Plancade. – Retrait.
Amendement n° 446 de M. Gérard Le Cam. – MM. Gérard Le Cam, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Mme Mireille Schurch. – Retrait.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l’article 2
Amendement n° 123 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. Robert Tropeano, Martial Bourquin, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Retrait.
Amendement n° 340 rectifié de M. Henri Tandonnet. – MM. Henri Tandonnet, Alain Fauconnier, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l’article 3
Amendement n° 78 rectifié de Mme Catherine Procaccia. – Mme Catherine Procaccia, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendements nos 281 rectifié à 283 rectifié de M. Jean-Vincent Placé. – M. Jean-Vincent Placé.
Amendement n° 521 rectifié de Mme Delphine Bataille. – M. Jean-Jacques Mirassou.
MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Jean-Vincent Placé, Jean-Jacques Mirassou. – Retrait des amendements nos 281 rectifié à 283 rectifié et 521 rectifié.
Amendement n° 303 rectifié de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Jean-Vincent Placé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
M. Roland Courteau, Mme Muguette Dini.
Amendement n° 622 du Gouvernement. – MM. Benoît Hamon, ministre délégué ; Alain Fauconnier, rapporteur ; Yannick Vaugrenard, Bruno Retailleau, Joël Labbé, Mmes Muguette Dini, Laurence Rossignol, Mireille Schurch, M. le président de la commission. – Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Amendement n° 374 rectifié de Mme Muguette Dini. – Devenu sans objet.
Amendement n° 284 de M. Jean-Vincent Placé. – Devenu sans objet.
M. Gérard Le Cam.
Amendement n° 559 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure.
Amendement n° 341 rectifié de Mme Muguette Dini. – M. Henri Tandonnet.
MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet des amendements nos 559 et 341 rectifié.
Amendement n° 449 de M. Gérard Le Cam. – Mme Mireille Schurch, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 146 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. Alain Bertrand, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Retrait.
Amendement n° 451 de M. Gérard Le Cam. – MM. Gérard Le Cam, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Mireille Schurch, Roland Courteau, Mme Maryvonne Blondin. – Rejet.
Amendement n° 389 rectifié de Mme Muguette Dini. – MM. Henri Tandonnet, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 94 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure. – Retrait.
Amendement n° 674 de la commission. – MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Adoption.
Amendement n° 560 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure.
Amendement n° 292 de M. Jean-Vincent Placé. – M. Joël Labbé.
MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Joël Labbé. –Rejet des amendements nos 560 et 292.
Amendements nos 290 et 291 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Retrait de l’amendement n° 290 ; rejet de l’amendement n° 291.
Amendement n° 289 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 293 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 286 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Adoption.
Amendement n° 93 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Jean-Luc Fichet, Gérard Cornu. – Rejet.
Amendement n° 561 de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Adoption.
Amendement n° 294 rectifié de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; le président de la commission, Philippe Adnot. – Adoption.
Amendement n° 296 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
M. le président de la commission.
3. Engagement de la procédure accélérée pour l’examen de projets de loi
Suspension et reprise de la séance
4. Consommation. – Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.
Amendement n° 218 de M. Joël Labbé. – M. Joël Labbé.
Amendement n° 450 de M. Gérard Le Cam. – M. Gérard Le Cam.
MM. Alain Fauconnier, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation ; Joël Labbé. – Rejet des amendements nos 218 et 450.
Amendement n° 287 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 295 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 219 de M. Joël Labbé. – M. Joël Labbé.
Amendement n° 675 de la commission et sous-amendement n° 687 rectifié de M. Gérard Le Cam. – MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Gérard Le Cam.
Amendement n° 245 rectifié de M. Philippe Adnot. – M. Philippe Adnot. – Retrait.
Amendements identiques nos 330 rectifié de M. Alain Fouché et 342 rectifié de M. Jean-Jacques Lasserre. – MM. Rémy Pointereau, Henri Tandonnet. – Retrait des deux amendements.
Amendement n° 448 de M. Gérard Le Cam. – M. Gérard Le Cam.
Amendement n° 272 de Mme Bernadette Bourzai. – Mme Bernadette Bourzai. – Retrait.
MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Joël Labbé, Mme Bernadette Bourzai, MM. Gérard Cornu, Stéphane Mazars. – Retrait de l’amendement n° 219 ; rejet du sous-amendement n° 687 rectifié ; adoption de l'amendement n° 675, l'amendement n° 448 devenant sans objet
Amendement n° 220 de M. Joël Labbé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Gérard Cornu. – Rejet.
Amendement n° 453 de M. Gérard Le Cam. – Mme Mireille Schurch, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 454 de M. Gérard Le Cam. – MM. Gérard Le Cam, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Mme Mireille Schurch. – Rejet.
Amendement n° 91 rectifié bis de M. Philippe Dallier. – MM. Antoine Lefèvre, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 447 de M. Paul Vergès. – MM. Gérard Le Cam, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Mme Catherine Procaccia, M. le président de la commission. – Rejet.
Amendement n° 52 rectifié de Mme Élisabeth Lamure. – Mme Élisabeth Lamure, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Mme Michèle André. – Adoption.
Amendement n° 452 de M. Gérard Le Cam. – Mme Mireille Schurch, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 665 du Gouvernement. – MM. Benoît Hamon, ministre délégué ; Alain Fauconnier, rapporteur. – Adoption.
Amendement n° 87 rectifié bis de M. Philippe Dallier. – MM. Antoine Lefèvre, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 88 rectifié quater de M. Philippe Dallier. – MM. Antoine Lefèvre, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Mme Catherine Procaccia, MM. Gérard Cornu, Jean-François Husson, Bruno Retailleau, Christian Cambon. – Adoption.
Amendement n° 49 rectifié bis de Mme Catherine Procaccia. – Mme Catherine Procaccia, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué ; Gérard Cornu. – Rejet.
Amendement n° 288 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l’article 4
Amendements identiques nos 228 rectifié de M. Joël Labbé et 458 de M. Gérard Le Cam ; amendement n° 459 de M. Gérard Le Cam. – MM. Joël Labbé, Gérard Le Cam, Mme Mireille Schurch, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet des trois amendements.
MM. le président de la commission, Alain Fauconnier, rapporteur.
Amendement n° 457 de M. Gérard Le Cam. – MM. Gérard Le Cam, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 504 de M. Gérard Le Cam. – Mme Mireille Schurch, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 260 rectifié de Mme Catherine Procaccia. – Mme Catherine Procaccia, MM. Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Retrait.
Amendement n° 455 de M. Gérard Le Cam. – MM. Gérard Le Cam, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 456 de M. Gérard Le Cam. – Retrait.
Amendement n° 307 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. Joël Labbé, Alain Fauconnier, rapporteur ; Benoît Hamon, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 520 de Mme Delphine Bataille. – Mme Delphine Bataille, M. Benoît Hamon, ministre délégué. – Retrait.
MM. Antoine Lefèvre, Christian Cambon, Alain Fauconnier, rapporteur.
Amendement n° 503 de M. Gérard Le Cam. – M. Gérard Le Cam.
Amendement n° 313 rectifié de M. Charles Revet. – M. Rémy Pointereau.
Amendements identiques nos 343 rectifié de M. Jean-Jacques Lasserre, 502 de M. Gérard Le Cam et 597 rectifié bis de M. Ladislas Poniatowski. – M. Henri Tandonnet, Mme Mireille Schurch, M. Antoine Lefèvre.
Amendement n° 79 rectifié de M. Christian Cambon. – M. Christian Cambon.
Amendement n° 676 de la commission. – M. Alain Fauconnier, rapporteur.
Amendement n° 312 rectifié de M. Charles Revet. – M. Rémy Pointereau.
M. Alain Fauconnier, rapporteur ; Mme Sylvia Pinel, ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme.
M. le président de la commission.
Suspension et reprise de la séance
MM. Jean-Claude Requier, Christian Cambon, Martial Bourquin, Joël Labbé, Jean-Jacques Mirassou, Alain Bertrand, Philippe Adnot, Gérard Le Cam, Mme Valérie Létard. – Retrait de l’amendement n° 503 ; rejet de l’amendement n° 313 rectifié ; adoption, par scrutin public, des amendements identiques nos 343 rectifié, 50 et 597 rectifié bis ; rejet de l’amendement n° 79 rectifié, adoption de l’amendement n° 676 ; rejet de l’amendement n° 312 rectifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Léonce Dupont
vice-président
Secrétaires :
M. Hubert Falco,
M. François Fortassin.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Consommation
Suite de la discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la consommation (projet n° 725, texte de la commission n° 810, rapport n° 809, avis nos 792, 793 et 795).
Nous poursuivons la discussion des articles.
Article 1er (suite)
M. le président. Hier, nous avons entamé l’examen de l'article 1er, dont je rappelle les termes :
Le titre II du livre IV du code de la consommation est complété par un chapitre III ainsi rédigé :
« Chapitre III
« Action de groupe
« Section 1
« Champ d’application de l’action de groupe et qualité pour agir
« Art. L. 423-1. – Une association de défense des consommateurs représentative au niveau national et agréée en application de l’article L. 411-1 peut agir devant une juridiction civile afin d’obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des consommateurs placés dans une situation similaire ou identique et ayant pour cause commune un manquement d’un même professionnel à ses obligations légales ou contractuelles :
« 1° À l’occasion de la vente de biens ou de la fourniture de services ;
« 2° Ou lorsque ces préjudices résultent de pratiques anticoncurrentielles au sens du titre II du livre IV du code de commerce ou des articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.
« Seule la réparation des préjudices matériels résultant d’une atteinte au patrimoine des consommateurs et résultant d’une des causes mentionnées aux 1° et 2° peut être poursuivie par cette action.
« Lorsque plusieurs associations introduisent une action portant sur les mêmes faits, elles désignent l’une d’entre elles pour conduire celle qui résulte de la jonction de leurs différentes actions. À défaut, cette désignation est effectuée par le juge.
« Art. L. 423-2. – (Non modifié) L’action de groupe est introduite selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État.
« Section 2
« Jugement sur la responsabilité
« Art. L. 423-3. – Dans la même décision, le juge constate que les conditions de recevabilité mentionnées à l’article L. 423-1 sont réunies et statue sur la responsabilité du professionnel. Il définit le groupe des consommateurs à l’égard desquels la responsabilité du professionnel est engagée et en fixe les critères de rattachement.
« Le juge détermine les préjudices susceptibles d’être réparés pour chaque consommateur ou chacune des catégories de consommateurs constituant le groupe qu’il a défini, ainsi que leur montant ou tous les éléments permettant l’évaluation de ces préjudices. Lorsqu’une réparation en nature du préjudice lui paraît plus adaptée, le juge précise les conditions de sa mise en œuvre par le professionnel.
« À cette fin, à tout moment de la procédure, le juge peut ordonner toute mesure d’instruction légalement admissible nécessaire à la conservation des preuves et de production de pièces, y compris celles détenues par le professionnel.
« Le juge ordonne, aux frais du professionnel, les mesures adaptées pour informer, par tous moyens appropriés, les consommateurs susceptibles d’appartenir au groupe, de la décision rendue.
« Les mesures de publicité du jugement ne peuvent être mises en œuvre qu’une fois que la décision sur la responsabilité n’est plus susceptible de recours ordinaires ou de pourvoi en cassation.
« Le juge fixe les délais, qui ne peuvent être inférieurs à deux mois ni supérieurs à six mois à compter des mesures de publicité ordonnées par lui, et les modalités selon lesquels les consommateurs peuvent adhérer au groupe en vue d’obtenir réparation de leur préjudice. Il détermine notamment si les consommateurs s’adressent au professionnel soit directement, soit par l’intermédiaire de l’association ou du tiers mentionné à l’article L. 423-4. Il fixe le délai dans lequel les contestations portant sur les demandes d’indemnisation individuelle lui sont adressées. L’adhésion au groupe vaut mandat au profit de l’association requérante aux fins d’indemnisation ; elle ne vaut ni n’implique adhésion à celle-ci.
« Lorsqu’il statue sur la responsabilité, le juge peut condamner le professionnel au paiement d’une provision à valoir sur les frais non compris dans les dépens exposés par l’association, y compris ceux afférents à la mise en œuvre de l’article L. 423-4.
« Il peut ordonner, lorsqu’il la juge nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire, la consignation à la Caisse des dépôts et consignations d’une partie des sommes dues par le professionnel.
« Art. L. 423-4. – (Non modifié) L’association peut s’adjoindre, avec l’autorisation du juge, toute personne appartenant à une profession judiciaire réglementée dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État, pour l’assister, notamment afin qu’elle procède à la réception des demandes d’indemnisation des membres du groupe et plus généralement afin qu’elle représente les consommateurs lésés, auprès du professionnel, en vue de leur indemnisation.
« Section 2 bis
« Procédure d’action de groupe simplifiée
« Art. L. 423-4-1. – Lorsque l’identité et le nombre des consommateurs lésés sont connus et lorsque ces consommateurs ont subi un préjudice d’un même montant ou d’un montant identique par période de référence, le juge, après avoir statué sur la responsabilité du professionnel, peut condamner ce dernier à les indemniser directement et individuellement, dans un délai et selon des modalités qu’il fixe.
« Préalablement à son exécution par le professionnel et selon des modalités et dans le délai fixé par le juge, cette décision, lorsqu’elle n’est plus susceptible de recours ordinaires ou de pourvoi en cassation, fait l’objet de mesures d’information individuelle des consommateurs concernés, aux frais du professionnel, afin de leur permettre d’accepter d’être indemnisés dans les termes de la décision.
« En cas d’inexécution par le professionnel, à l’égard des consommateurs ayant accepté l’indemnisation, de la décision rendue dans le délai fixé, les articles L. 423-6 et L. 423-7 sont applicables et l’acceptation de l’indemnisation dans les termes de la décision vaut mandat aux fins d’indemnisation au profit de l’association.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application de la présente section.
« Section 3
« Liquidation des préjudices et exécution
« Art. L. 423-5. – (Non modifié) Le professionnel procède à l’indemnisation individuelle des préjudices subis par chaque consommateur, dans les conditions, limites et délais fixés par le jugement mentionné à l’article L. 423-3.
« Art. L. 423-6. – (Non modifié) Le juge ayant statué sur la responsabilité tranche les difficultés qui s’élèvent à l’occasion de la phase de liquidation des préjudices.
« Il statue dans un même jugement sur toutes les demandes d’indemnisation auxquelles le professionnel n’a pas fait droit.
« Art. L. 423-7. – L’association requérante représente les consommateurs membres du groupe qui n’ont pas été indemnisés par le professionnel dans les délais fixés, aux fins de l’exécution forcée du jugement mentionné au second alinéa de l’article L. 423-6.
« Section 4
« Médiation
« Art. L. 423-8. – Seule l’association requérante peut participer à une médiation, dans les conditions fixées au chapitre Ier du titre II de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative, afin d’obtenir la réparation des préjudices individuels mentionnés à l’article L. 423-1.
« Art. L. 423-9. – Tout accord négocié au nom du groupe est soumis à l’homologation du juge, qui vérifie s’il est conforme aux intérêts de ceux auxquels il a vocation à s’appliquer et lui donne force exécutoire. Cet accord précise les mesures de publicité nécessaires pour informer les consommateurs concernés de la possibilité d’y adhérer, ainsi que les délais et modalités de cette adhésion.
« Section 5
« Modalités spécifiques à l’action de groupe intervenant dans le domaine de la concurrence
« Art. L. 423-10. – Lorsque les manquements reprochés au professionnel portent sur le respect des règles définies au titre II du livre IV du code de commerce ou des articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’action mentionnée à l’article L. 423-1 ne peut être engagée devant le juge que sur le fondement d’une décision constatant les manquements, qui n’est plus susceptible de recours et qui a été prononcée à l’encontre du professionnel par les autorités ou juridictions nationales ou de l’Union européenne compétentes.
« Dans ces cas, les manquements du professionnel sont réputés établis de manière irréfragable pour l’application de l’article L. 423-3.
« Art. L. 423-11. – L’action prévue à l’article L. 423-1 ne peut être engagée au-delà d’un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la décision mentionnée à l’article L. 423-10 n’est plus susceptible de recours ordinaires ou de pourvoi en cassation.
« Art. L. 423-11-1 (nouveau). – Le juge peut ordonner l’exécution provisoire du jugement mentionné à l’article L. 423-3 pour ce qui concerne les seules mesures de publicité, afin de permettre aux consommateurs de se déclarer dans le délai imparti.
« Section 6
« Dispositions diverses
« Art. L. 423-12. – (Non modifié) L’action mentionnée à l’article L. 423-1 suspend la prescription des actions individuelles en réparation des préjudices résultant des manquements constatés par le jugement prévu aux articles L. 423-3 ou L. 423-4-1.
« Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter de la date à laquelle, selon le cas, le jugement rendu en application des articles L. 423-3 ou L. 423-4-1 n’est plus susceptible de recours ordinaire ou de pourvoi en cassation ou de l’homologation prévue à l’article L. 423-9.
« Art. L. 423-13. – (Non modifié) Les décisions prévues aux articles L. 423-3 et L. 423-4-1 ainsi que celle résultant de l’application de l’article L. 423-9 ont également autorité de la chose jugée à l’égard de chacun des membres du groupe dont le préjudice a été réparé au terme de la procédure.
« Art. L. 423-14. – L’adhésion au groupe ne fait pas obstacle au droit d’agir selon les voies de droit commun pour obtenir la réparation des préjudices n’entrant pas dans le champ défini par la décision du juge mentionnée à l’article L. 423-3 ou d’un accord homologué en application de l’article L. 423-9.
« Art. L. 423-15. – N’est pas recevable l’action prévue à l’article L. 423-1 lorsqu’elle se fonde sur les mêmes faits, les mêmes manquements et la réparation des mêmes préjudices que ceux ayant déjà fait l’objet du jugement prévu à l’article L. 423-3 ou d’un accord homologué en application de l’article L. 423-9.
« Art. L. 423-16. – (Non modifié) Toute association de défense des consommateurs représentative au niveau national et agréée en application de l’article L. 411-1 peut demander au juge, à compter de sa saisine en application de l’article L. 423-1 et à tout moment, sa substitution dans les droits de l’association requérante, en cas de défaillance de cette dernière.
« Art. L. 423-17. – (Non modifié) Est réputée non écrite toute clause ayant pour objet ou effet d’interdire à un consommateur de participer à une action de groupe.
« Section 7
« Dispositions relatives aux outre-mer
« Art. L. 423-18. – (Non modifié) Le présent chapitre est applicable dans les îles Wallis et Futuna. »
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 90 rectifié bis, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 10
Insérer douze alinéas ainsi rédigés :
« Section ...
« Jugement sur la recevabilité
« Art. L. 423-... – Le juge saisi d’une action de groupe visée à l’article L. 423-1 statue, après un débat contradictoire, sur la recevabilité de l’action dans un délai de deux mois à compter de sa saisine.
« Le juge déclare l’action de groupe recevable s’il constate que :
« 1° Les conditions mentionnées à l’article L. 423-1 sont réunies ;
« 2° Les questions juridiques et factuelles communes aux futurs membres du groupe prédominent sur les questions individuelles ;
« 3° L’action de groupe est une procédure supérieure comparée aux actions en justice individuelles ;
« 4° Il existe un groupe de demandeurs identifiable.
« Dans la même décision, le juge définit le groupe des consommateurs à l’égard desquels la responsabilité du professionnel pourrait être engagée et en fixe les critères de rattachement.
« Le juge ordonne, aux frais du professionnel, les mesures adaptées pour informer, par tous moyens appropriés, les consommateurs susceptibles d’appartenir au groupe, de la décision rendue.
« Les mesures de publicité du jugement ne peuvent être mises en œuvre qu’une fois que la décision sur la recevabilité n’est plus susceptible des voies de recours ordinaires et de pourvoi en cassation.
« Le juge fixe les délais, qui ne peuvent être inférieurs à deux mois ni supérieurs à six mois à compter des mesures de publicité ordonnées par lui, et les modalités selon lesquelles les consommateurs peuvent adhérer au groupe.
II. – Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 423-3. – Une fois que la décision sur la recevabilité n’est plus susceptible des voies de recours ordinaires et de pourvoi en cassation, le juge statue sur la responsabilité du professionnel.
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, si vous me le permettez, je présenterai en même temps l'amendement n° 677, qui est la conséquence de l'amendement n° 90 rectifié bis.
Pour ce qui concerne l'action de groupe, l’article 1er que nous sommes en train d’examiner ne prévoit pas de phase préliminaire de recevabilité distincte de celle du jugement sur la responsabilité éventuellement encourue.
Selon les avis que j'ai recueillis, l’absence d’une phase propre à la recevabilité de l’action de groupe peut faire courir au présent projet de loi un risque d’inconstitutionnalité.
En effet, dans sa décision du 25 juillet 1989 relative à une loi permettant aux syndicats d’introduire des actions en justice en faveur des salariés sans avoir à justifier de mandat, le Conseil constitutionnel, appliquant le principe selon lequel nul ne plaide par procureur, avait considéré que toutes les personnes ayant un intérêt dans l’action en justice devaient être informées de leur droit dès le début de la procédure.
Or le mécanisme actuellement prévu par le texte que nous étudions se heurte à cette jurisprudence constitutionnelle, puisque les consommateurs ne pourront être informés qu’après le jugement sur la responsabilité, c'est-à-dire à un stade bien plus avancé de la procédure.
En outre, dans un système ne prévoyant pas de séparer la phase de recevabilité de celle du jugement sur la responsabilité, le professionnel ne connaît pas tous les demandeurs alors même que le juge statue sur sa responsabilité : une telle asymétrie de l’information au détriment du défendeur peut porter atteinte aux principes constitutionnels du respect du contradictoire et de l’égalité des armes entre les plaidants.
Le présent amendement a donc pour objet d’éviter que l’article 1er ne tombe sous les fourches caudines du Conseil constitutionnel et vise à instituer une phase préliminaire de recevabilité, distincte de celle du jugement sur la responsabilité.
Enfin, je souligne que la Commission européenne va dans le même sens. Dans sa recommandation du 11 juin 2013 portant sur les recours collectifs dans l’Union européenne, elle indique en effet que les États membres devraient prévoir une vérification, au stade le plus précoce possible de l’instance, des conditions de recevabilité de l’action de groupe et le rejet, le cas échéant, des demandes manifestement infondées.
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Le juge statue sur la responsabilité du professionnel au vu des cas individuels présentés par l’association requérante.
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Aux yeux de la commission des lois, la mention selon laquelle le juge constate que les conditions de recevabilité de l’action de groupe sont réunies est inutile puisque cette obligation incombe, par définition, à tout juge saisi d’un litige, quel qu’il soit.
En revanche, la commission des lois considère qu'il convient de préciser que le juge statue sur la responsabilité du professionnel au vu des cas individuels qui lui sont soumis par l’association requérante. En effet, il faut éviter que des actions de groupe ne prospèrent de manière artificielle, sans préjudice réel constaté.
Je précise que cet amendement reprend une disposition déjà adoptée par le Sénat en 2011.
M. le président. L'amendement n° 542, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Remplacer les mots :
à l’article L. 423-1
par les mots :
aux articles L. 423-1, L. 423-15 du présent code et L. 211-15 du code de l’organisation judiciaire
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. L’amendement n° 542 vise à préciser le principe en vertu duquel nul ne peut être poursuivi ou puni à raison des mêmes faits.
Ce principe garantit à une entreprise qui aurait été reconnue responsable dans le cadre d’une action de groupe et qui aurait indemnisé les consommateurs membres du groupe de ne pas être exposée à une deuxième action de groupe identique à la première.
M. le président. L'amendement n° 277, présenté par Mme Aïchi, M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 14, seconde phrase
Remplacer cette phrase par trois phrases ainsi rédigées :
Il intègre par défaut au groupe tous les consommateurs à l’égard desquels la responsabilité du professionnel est engagée, ceux-ci ayant la faculté de s’exclure s’ils ne souhaitent pas être partie à l’instance engagée. Le juge fixe les délais et modalités selon lesquels les consommateurs peuvent obtenir réparation de leur préjudice. Il détermine notamment si les consommateurs doivent s’adresser au professionnel directement ou par l’intermédiaire de l’association.
La parole est à Mme Leila Aïchi.
Mme Leila Aïchi. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 277 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 90 rectifié bis, 4 et 542 ?
M. Martial Bourquin, rapporteur de la commission des affaires économiques. L’amendement n° 90 rectifié bis tend à apporter une précision quant au contrôle de la recevabilité de l'action de groupe par le juge et à introduire dans la procédure une phase préliminaire de recevabilité distincte de celle du jugement.
Il soulève plusieurs problèmes.
Tout d’abord, les conditions de recevabilité prévues, certes très strictes, sont cependant très floues. Que signifie ainsi la nécessité pour le juge de constater que « l’action de groupe est une procédure supérieure comparée aux actions en justice individuelles » ou, dans la même veine, que « les questions juridiques et factuelles communes aux futurs membres du groupe prédominent sur les questions individuelles » ? On peut s'interroger sur la portée juridique des termes « supérieure » et « prédominent ».
La commission, estimant ces éléments restrictifs, a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
S'agissant de l'amendement n° 4, il tend à apporter une précision utile sur le contrôle de la recevabilité de l'action de groupe par le juge qui statue sur la responsabilité du professionnel au vu des cas individuels présentés par l’association requérante. La commission y est favorable.
S’il est adopté, l'amendement n° 542 deviendra sans objet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. Vous l’aurez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement a délibérément choisi d'exclure une phase de recevabilité de la procédure d'action de groupe. C'est la raison pour laquelle il est défavorable à l'amendement n° 90 rectifié bis.
En effet, il a considéré qu’une telle phase n'était pas nécessaire compte tenu des critères précis d'ores et déjà retenus par le texte pour déterminer le champ d'application de cette procédure et la qualité pour agir.
Je comprends que des inquiétudes puissent exister quant au caractère plus ou moins farfelu d'un certain nombre de procédures, mais nous considérons que le juge disposera de la totalité des moyens pour distinguer les actions fondées de celles qui ne le seront pas.
Je le répète, lors de l'examen de l'affaire au fond, il statuera sur la recevabilité de l'action dans les conditions de droit commun. Dans son jugement déclaratoire de responsabilité, il définira le groupe et fixera les conditions d'indemnisation des consommateurs victimes du préjudice économique.
En outre, ayant le souci de mettre en œuvre une procédure permettant un traitement aussi rapide que possible des contentieux de consommation de masse, le Gouvernement considère que la diffusion d'informations sur l'existence et la recevabilité d'une action de groupe avant que toute décision soit rendue est susceptible de porter gravement atteinte à la réputation du professionnel alors même que sa responsabilité pourrait finalement ne pas être retenue. On ne maîtrise pas la publicité qui pourra, le cas échéant, être faite sur cette phase de recevabilité… Je pense, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous pouvez entendre cet argument.
C'est pourquoi dans le schéma prévu dans le projet de loi les consommateurs ne seront informés de l'existence de l'action de groupe qu’après la décision définitive rendue au fond et selon les modalités décidées par le juge.
Tel est le garde-fou que nous avons mis en place pour éviter toute tentation d’engager de multiples procédures, parfois même sur l’initiative d’un concurrent qui voudrait attaquer une autre entreprise par le biais d'une association de consommateurs.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Il est également défavorable à l'amendement n° 4, car la rédaction actuelle de l'alinéa 14 de l’article 1er vise justement à ne pas mettre en place de phase de recevabilité de l'action. Par cohérence avec l'avis défavorable donné à l'amendement n° 90 rectifié bis, nous ne voulons pas instaurer de phase supplémentaire qui, de surcroît, allongerait les délais.
Par ailleurs, l'amendement n° 4 tend à ce que la responsabilité du professionnel soit établie au vu de cas individuels présentés par l'association requérante. Or cette précision est, à nos yeux, inutile, car c'est au vu des éléments que cette dernière apporte que le juge doit définir le groupe de consommateurs lésés, à l'égard desquels la responsabilité du professionnel est retenue. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j’avais, hier, émis un avis défavorable sur un amendement de Mme Lamure relatif au fait que l'association de consommateurs et le juge doivent être dûment saisis.
Il est clair que la procédure retenue oblige d’ores et déjà l'association à présenter un certain nombre de réclamations qui justifient une saisine du juge.
Enfin, comme M. le rapporteur, j’émets un avis défavorable sur l'amendement n° 542, puisque le principe non bis in idem est déjà consacré à l’alinéa 50 de l'article 1er du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, mes chers collègues, une proposition de loi relative aux soins psychiatriques doit être discutée vendredi matin. Or des dérives ne sont pas impossibles...
Je vous propose de relever un challenge, à savoir terminer l’examen du présent texte, sur lequel il nous reste à examiner quelque six cents amendements, dans la nuit de jeudi à vendredi, sinon la discussion sera repoussée à vendredi après-midi, à une heure indéterminée.
J’invite donc mes collègues à faire preuve de concision lors de la présentation de leurs amendements et des explications de vote, ainsi que les rapporteurs et les membres du Gouvernement lorsqu’ils feront part de leur avis.
J’ajoute que, samedi, le Sénat participe aux Journées européennes du patrimoine…
M. Jean-François Husson. On nous verra travailler !
M. Philippe Marini. Et nous faisons partie du patrimoine ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Je retire l'amendement n° 542, car il est satisfait par l'amendement de la commission des lois.
M. le président. L'amendement n° 542 est retiré.
L'amendement n° 6, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois. Cet amendement tend à supprimer une mention que la commission des lois estime inutile et qui pourrait même devenir dangereuse. En effet, l'alinéa 14 ne rappelle que partiellement la règle de l’article 143 du code de procédure civile, qui vaut pour toutes les instances civiles et qui s'appliquera, sans qu’il soit besoin de le préciser, à la procédure d'action de groupe, comme aux autres actions civiles. Ce rappel pourrait donc suggérer, par un raisonnement a contrario, que les autres règles d’administration de la preuve ne s’appliqueraient pas à la procédure d’action de groupe.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Mettant en œuvre les recommandations de M. le président de la commission des affaires économiques, je dirai simplement que je suis favorable à cet amendement qui vise à fluidifier et alléger le projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 7 rectifié, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 17
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 423-3-1. – S’il juge que la responsabilité du professionnel est engagée, le juge ordonne par la même décision les mesures adaptées pour informer de cette décision les consommateurs susceptibles d’appartenir au groupe.
II. - Alinéa 18
1° Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
« Les mesures de publicité du jugement sont à la charge du professionnel. Elles ne peuvent…
2° Remplacer le mot :
ou
par le mot :
ni
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois. Cet amendement rédactionnel a pour objet d’isoler, à des fins de clarté, l’ensemble des dispositions relatives à la publicité du jugement et à la jonction au groupe.
M. le président. L'amendement n° 197, présenté par MM. Bizet et Houel, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Remplacer les mots :
tous moyens appropriés
par les mots :
l’intermédiaire d’un huissier de justice
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Cet amendement tend à permettre le dépôt du jugement auprès d’une étude d’huissier de justice qui en assurera la diffusion à l’échelon national par l’intermédiaire d’un site dédié et mis en œuvre par la Chambre nationale des huissiers de justice. Les consommateurs répartis sur le territoire national pourront ainsi bénéficier de la même information. La portée de la décision du juge y gagnera. Vous pouvez constater ma concision, mes chers collègues…
M. le président. L'amendement n° 239 rectifié, présenté par M. Tandonnet, Mmes Létard, Dini et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces mesures peuvent être assorties d'une exécution provisoire.
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement a pour objet de redonner un peu de pouvoir au juge et de lui offrir la possibilité de déclencher la mise en œuvre des mesures de publicité en en demandant une exécution provisoire.
M. le président. L'amendement n° 543, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il prend en compte la possibilité d’une information individuelle des membres du groupe au bénéfice desquels a agi l’association, l’engagement du défendeur d’avertir tous ses clients lorsque leur identification ne fait aucun doute, le coût des différents modes de publicité et le risque d’atteinte à l’image du professionnel.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à mieux encadrer les mesures de publicité à la charge du professionnel. Ainsi, le juge pourra décider au cas par cas une information individuelle des consommateurs concernés ainsi que les mesures de publicité les plus adaptées à la situation, sans que celles-ci s’avèrent dommageables pour l’image de l’entreprise.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 276 est présenté par Mme Aïchi, M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 508 rectifié est présenté par Mme Jouanno, M. Deneux et Mme N. Goulet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 18
Supprimer les mots :
ou de pourvoi en cassation
II. – Alinéa 26
Supprimer les mots :
ou de pourvoi en cassation
III. – Alinéa 41
Après le mot :
recours
insérer le mot :
ordinaire
La parole est à Mme Leila Aïchi, pour présenter l’amendement n° 276.
Mme Leila Aïchi. Cet amendement vise à raccourcir les délais de la procédure. Pour le consommateur, attendre la fin du pourvoi en cassation peut allonger la procédure d'une ou deux années. Il s'agit en l’occurrence de lutter contre les procédures dilatoires puisque l'action pourrait être poursuivie ou engagée par les consommateurs même si le professionnel s'est pourvu en cassation.
M. Martial Bourquin, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement n° 7 rectifié.
Je souhaite maintenant régler une bonne fois pour toutes la question des huissiers de justice, qui sont visés dans de nombreux amendements.
Pourquoi limiter le choix du juge ? C'est à lui qu’il revient non seulement de juger, mais aussi de faire connaître ses décisions ; nul besoin de recourir pour cela aux huissiers de justice, qui assument d'autres charges.
La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 197.
Pour ce qui concerne l'amendement n° 239 rectifié, qui tend à ce que les mesures de publicité prononcées par le juge puissent faire l'objet d'une exécution provisoire, il est incompatible avec l'alinéa 18. Sur le fond, il remet en cause l'article 1er et il n’est pas souhaitable de permettre la publicité d'un jugement sur la responsabilité d'un professionnel tant que ce jugement n’est pas définitif. L'avis est donc également défavorable.
La commission, très sceptique quant à l'utilité de l'amendement n°543, qui vise à mieux encadrer les mesures de publicité du jugement, pense qu’il faut laisser totale liberté au juge. Par conséquent, je vous demande, madame Lamure, de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
J’en viens à l’amendement n° 276, qui vise à permettre à l'action de groupe d’être poursuivie, même si le professionnel se pourvoit en cassation à la suite du jugement sur sa responsabilité.
L’objectif poursuivi est louable, car la procédure pourrait être longue du fait des recours. Mais en matière de consommation, les mesures de publicité ne pourront être mises en œuvre qu’une fois que le jugement ne sera plus susceptible de recours.
Selon la commission, la mise en œuvre des mesures de publicité portera nécessairement atteinte à l'image du professionnel. Il convient ainsi d'en rester à l'équilibre du projet de loi. C’est pourquoi je vous demande, madame Aïchi, de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Pour satisfaire la demande de M. le président de la commission des affaires économiques, je serai bref, mais je dois tout de même donner certains arguments.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 7 rectifié.
Il est défavorable à l'amendement n° 197, qui vise à préciser que les mesures de publicité de la décision déclaratoire seront mises en œuvre par l’intermédiaire d’un huissier de justice. Le Gouvernement considère que le recours exclusif à un huissier de justice n’est absolument pas adapté, ni en termes de moyens, ni en termes de coût, au traitement de contentieux de masse et pourrait nuire gravement à l’efficacité de la procédure d'action de groupe.
L'exécution provisoire des mesures de publicité, que souhaite introduire M. Tandonnet, a été acceptée dans le domaine de la concurrence dans le cadre d'un jugement définitif de l’Autorité de la concurrence. Mais en matière de consommation, il me paraît extrêmement risqué d’instaurer un tel système, qui pourrait nuire gravement aux intérêts des professionnels dès lors que la décision de condamnation serait réformée en appel. Pour le Gouvernement, ce qui est valable dans le domaine de la concurrence ne l'est pas dans celui de la consommation. C'est pourquoi il émet un avis défavorable sur l’amendement n° 239 rectifié.
Pour les mêmes motifs que la commission, il est défavorable à l'amendement n° 543 ainsi qu’à l'amendement n° 276.
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Je suis surpris par l’avis de la commission et du Gouvernement sur mon amendement n° 197. En effet, en vertu de l'ordonnance de novembre 1945, texte un peu ancien il est vrai, les huissiers de justice sont les seuls officiers ministériels ayant qualité pour signifier les actes et les exploits. Je ne trouvais pas superfétatoire de le souligner.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié ayant été adopté, les amendements nos 197, 239 rectifié et 543 n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 276.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 9 rectifié, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 423-3-… . – Dans la même décision prononçant la responsabilité du professionnel, le juge fixe le délai dont disposent les consommateurs pour adhérer au groupe afin d’obtenir la réparation de leur préjudice. Ce délai ne peut être inférieur à deux mois ni supérieur à six mois après l’achèvement des mesures de publicité ordonnées par lui.
« Il détermine les modalités de cette adhésion et précise si les consommateurs s'adressent directement au professionnel ou par l'intermédiaire de l'association ou du tiers mentionné à l'article L. 423-4.
« L’adhésion au groupe vaut mandat aux fins d’indemnisation au profit de l’association requérante. Le juge détermine à cet effet les conditions dans lesquelles, le cas échéant, l’association perçoit, gère et reverse aux intéressés les indemnités qui leur sont dues.
« L’adhésion au groupe ne vaut ni n’implique adhésion à l’association requérante.
« Art. L. 423-3-…. – Le juge fixe le délai dans lequel doit intervenir la réparation des préjudices des consommateurs lésés, ainsi que celui ouvert, à cette échéance, pour le saisir en application de l’article L. 423-6, des demandes d’indemnisation non satisfaites.
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois. Cet amendement vise à rédiger de façon différente les dispositions relatives à l’action de groupe tout en en conservant l’esprit.
Il tend à préciser que, lorsque l’indemnisation est d’abord versée à l’association, le juge fixe les conditions dans lesquelles celle-ci perçoit, gère et reverse les fonds versés par le professionnel. Le projet de loi n’indiquait rien sur ce point.
En outre, il a pour objet d’apporter certaines clarifications, de préciser que le délai ouvert pour l’adhésion au groupe court à compter de l’achèvement des mesures de publicité, de prévoir que le juge fixe à la fois le délai dans lequel l’indemnisation doit intervenir et celui qui est ouvert pour contester les refus d’indemnisation opposés par le professionnel et, enfin, d’isoler l’ensemble de ces dispositions dans deux articles distincts, et ce pour plus de lisibilité.
M. le président. L'amendement n° 677, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Alinéa 19, première et deuxième phrases
Après les mots :
Le juge
supprimer les mots :
fixe les délais, qui ne peuvent être inférieurs à deux mois ni supérieurs à six mois à compter des mesures de publicité ordonnées par lui, et les modalités selon lesquels les consommateurs peuvent adhérer au groupe en vue d’obtenir réparation de leur préjudice. Il
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 544, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 19, deuxième phrase
Après les mots :
notamment si les consommateurs
insérer les mots :
qui se font connaître
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Une fois que le juge a retenu la responsabilité du professionnel et a défini le groupe, les consommateurs doivent manifester expressément leur volonté d’adhérer au groupe afin d’être indemnisés. Seuls les consommateurs ayant fait la démarche d’adhérer au groupe doivent être indemnisés par le professionnel.
Cet amendement vise donc à s’assurer que la procédure d’opt in est bien respectée tout au long de la procédure d’action de groupe.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 668 est présenté par Mme Aïchi, M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 671 est présenté par Mme Jouanno, M. Deneux et Mme N. Goulet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 19, deuxième phrase
Compléter cette phrase par les mots :
ou du groupement de consommateurs
La parole est à Mme Leila Aïchi, pour présenter l'amendement n° 668.
Mme Leila Aïchi. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 668 est retiré.
L’amendement n° 671 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 9 rectifié et 544 ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. L’amendement n° 9 rectifié de la commission des lois, qui tend à une réécriture des dispositions relatives à l’action de groupe, comporte des précisions juridiques très importantes. La commission des affaires économiques a donc émis un avis favorable.
Par ailleurs, la précision que Mme Lamure souhaite apporter par le biais de l'amendement n° 544 me semble satisfaite par cet amendement de la commission des lois.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 9 rectifié.
Il émet le même avis défavorable que la commission sur l’amendement n° 544.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 544 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 545, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« À l’expiration du délai fixé par le juge, celui-ci établit la liste des consommateurs recevables à obtenir une indemnisation du professionnel qu’il transmet alors au professionnel concerné aux fins d’indemnisation.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à apporter davantage de précision dans la chronologie de la procédure.
Dans sa rédaction actuelle, l’article 1er prévoit que le juge fixe des délais pour que les consommateurs puissent adhérer au groupe afin d’obtenir réparation. Il semble qu’il convienne de préciser les suites que le juge doit donner à la procédure en disposant que celui-ci, une fois le délai expiré, doit établir la liste des consommateurs recevables à obtenir une indemnisation du professionnel.
Cette précision vise à combler un vide, puisque l’article 1er est muet quant aux conséquences du délai fixé par le juge.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Cet amendement est partiellement satisfait par le texte.
D’une part, dans le cas où les consommateurs s’adressent au professionnel pour adhérer au groupe, il n’est pas utile de transmettre la liste des consommateurs à ce dernier.
D’autre part, l’alinéa 19 évoque la possibilité pour le juge de recevoir des contestations portant sur certaines demandes individuelles d’adhésion au groupe. Il est donc évident que la liste des membres du groupe sera transmise au professionnel.
Autrement dit, les demandes formulées par Mme Lamure seront satisfaites. C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Lamure, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Lamure. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 546, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéas 20 et 21
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Les actions de groupe seront introduites devant des tribunaux de grande instance – TGI – spécialisés.
Devant le TGI, seul le juge de la mise en état, chargé de veiller au bon déroulement du procès civil, peut ordonner le versement d’une provision. Or, en l’espèce, ce juge, qui statuera au fond en se prononçant sur la responsabilité du professionnel, ne peut octroyer de provision puisque, au civil, le juge au fond n’est pas habilité à ordonner le versement d’une telle somme.
M. le président. L'amendement n° 12, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Au début, insérer la référence :
« Art. L. 423-3-… . –
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois. Il s’agit d’un amendement purement rédactionnel.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 669 est présenté par Mme Aïchi, M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 672 est présenté par Mme Jouanno, M. Deneux et Mme N. Goulet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 20
Après les mots :
par l'association
insérer les mots :
ou le groupement de consommateurs
La parole est à Mme Leila Aïchi, pour présenter l'amendement n° 669.
Mme Leila Aïchi. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 669 est retiré.
L’amendement n° 672 n’est pas défendu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 546 et 12 ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. L'amendement n° 546 tend à supprimer la possibilité pour le juge de condamner le professionnel au paiement d’une provision et d’ordonner la consignation d’une partie des sommes dues par le professionnel à la Caisse des dépôts et consignations.
Ces deux dispositions introduites par les députés sont utiles et la commission n’est pas favorable à leur suppression.
L'amendement n° 12 a reçu un avis favorable de la commission des affaires économiques.
Je remercie en outre Mme Aïchi d’avoir retiré l’amendement n° 669.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Madame Lamure, la consignation auprès de la Caisse des dépôts et consignations introduite par l’Assemblée nationale vise à rendre effective l’indemnisation, en particulier au regard du risque d’insolvabilité que certaines entreprises condamnées pourraient être tentées d’organiser. Il convient de s’assurer, lorsqu’un jugement a été prononcé, dans un délai suffisamment long, qu’une entreprise n’organise pas son insolvabilité de façon à se soustraire à ses obligations d’indemnisation. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 546.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 12 de la commission des lois, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 198 est présenté par MM. Bizet et Houel.
L'amendement n° 231 rectifié est présenté par M. Tandonnet, Mmes Létard, Dini et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 22
Supprimer les mots :
dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État
La parole est à M. Jean Bizet, pour présenter l'amendement n° 198.
M. Jean Bizet. Cet amendement a pour objet de supprimer la liste des professions judiciaires réglementées fixée par décret en Conseil d’État. L’huissier de justice présente en effet toutes les qualités requises pour assurer la mission dont il est question dans l’ensemble du présent texte.
M. le président. La parole est à M. Tandonnet, pour présenter l’amendement n° 231 rectifié.
M. Henri Tandonnet. Comme l’a souligné mon collègue Jean Bizet, la mention en cause est inutile.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Comme je l’ai indiqué précédemment, un décret en Conseil d’État définira les professions concernées. Mentionner une profession particulière reviendrait à se fâcher avec toutes les autres et à adopter une approche très restrictive. L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur Bizet, conformément à l’avis qu’il a émis sur votre précédent amendement concernant les huissiers de justice, le Gouvernement est également défavorable à celui que vous venez de nous présenter et à celui, identique, qu’a défendu M. Tandonnet. Il partage l’avis de la commission : on ne réserve pas à cette profession le soin d’assurer le rôle de tiers et d’aider à la liquidation des actions de groupe auprès des associations requérantes.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 198 et 231 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 199, présenté par MM. Bizet et Houel, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Après les mots :
en vue
insérer les mots :
du recouvrement
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. L’opération, appelée dans le texte mission d’assistance « aux fins de représentation des consommateurs lésés, auprès du professionnel, en vue de leur indemnisation » correspond pleinement au recouvrement amiable de la décision de responsabilité.
Une nouvelle fois, l’huissier de justice est le professionnel du droit le plus à même de s’acquitter de cette tâche, dans la mesure où elle suppose de présenter une demande en paiement de la réparation octroyée par le jugement. D’où l’importance d’insérer les mots : « du recouvrement ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. La commission émet le même avis défavorable que précédemment. Les requérants peuvent s’adjoindre un avocat, un conseiller juridique et bien d’autres professionnels. Pourquoi préciserions-nous une profession plutôt qu’une autre ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous ne voulons pas que la mission du professionnel du droit qui sera chargé d’assister l’association requérante se limite au seul recouvrement des sommes dues au professionnel ; il y aura bien une mission d’assistance plus large puisque le texte vise à l’indemnisation effective des consommateurs et supposera donc une participation active de ce tiers à la gestion des demandes de réparation formulées par les consommateurs lésés.
Je précise que, dans certains cas, cette réparation pourra se faire en nature, sous la forme soit de la prestation d’un service, soit de la fourniture d’un bien, ce qui justifie que le Gouvernement émette un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 547, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 22
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ne peuvent être désignées que les personnes attestant d’une garantie financière émanant d’un établissement de crédit ou d’une entreprise d’assurance permettant de couvrir les risques afférant à la restitution des indemnités reçues pour le compte des consommateurs lésés membres du groupe et d’une assurance de responsabilité civile permettant de couvrir les risques afférant à la gestion de la procédure d’indemnisation vis-à-vis de ceux-ci et du professionnel concerné. Toute personne désignée par le juge dans les conditions prévues au premier alinéa de cet article est tenue au secret professionnel au sens de l’article 226-13 du code pénal pour les informations et données qui pourront lui être communiquées dans le cadre de cette procédure. Elle doit être libre de tout conflit d’intérêts avec l’une ou l’autre partie.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à encadrer l’intervention d’un tiers et à attirer l’attention du juge sur les devoirs et incompatibilités qui incombent à cette personne. Les impératifs d’être tenu au secret professionnel et d’être libre de tout conflit d’intérêts méritent, selon nous, d’être inscrits formellement dans la loi, afin que le juge les vérifie systématiquement.
Nous pensons que cette précaution n’est pas superflue. Ce tiers pourrait faire l’objet de pressions extérieures, mais également avoir des liens étroits avec l’une des parties. Un avocat peut ainsi avoir eu pour client un concurrent. En d’autres termes, de nombreuses situations de conflits d’intérêts sont envisageables.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Cet amendement vise à encadrer l’intervention du tiers et à lui fixer plusieurs conditions : celui-ci doit disposer d’une garantie financière, d’une assurance de responsabilité civile ; il est tenu au secret professionnel et doit être libre de tout conflit d’intérêts.
Il est restrictif et pourrait gêner les requérants désirant engager une action de groupe ; le tiers n’assistera pas obligatoirement l’association pour le versement des indemnités, notamment.
La précision relative au secret professionnel est en outre satisfaite car les professions judiciaires réglementées sont bien sûr tenues au secret professionnel.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je n’aurais pas dit mieux que M. le rapporteur au service de la défense des professions réglementées : avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour explication de vote.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement va au-delà de la question du secret professionnel et tend également à vérifier si les tiers en cause sont libres de tout conflit d’intérêts. Nous souhaitions insister sur ce point afin de permettre au juge de vérifier ce critère.
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. Les explications fournies par M. le rapporteur et par M. le ministre ne sont pas tout à fait satisfaisantes.
Comme l’a très justement indiqué Mme Lamure, il ne s’agit pas que du secret professionnel. D’ailleurs, si ce point pose problème, ma collègue pourrait peut-être rectifier son amendement et supprimer cette référence. Dès lors, les professions juridiques que vous citez ne seraient plus en conflit.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 547.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 195 rectifié est présenté par MM. Retailleau, Hérisson, Chatillon, G. Bailly, Bécot, Houel, P. Leroy et Calvet, Mme Cayeux, MM. D. Laurent, Delattre, del Picchia, Cardoux, Milon et Grignon, Mme Debré, MM. Saugey, Billard, de Montgolfier et Revet, Mmes Mélot et Bruguière, M. Huré, Mmes Boog et Deroche, MM. B. Fournier et Lefèvre, Mme Masson-Maret et MM. Cléach et de Legge.
L'amendement n° 232 rectifié est présenté par M. Tandonnet, Mmes Létard, Dini et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 23 à 28
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Bruno Retailleau, pour présenter l’amendement n° 195 rectifié.
M. Bruno Retailleau. Je vais demander l’indulgence du président de commission des affaires économiques, à laquelle j’appartiens, sur cet amendement important et dont pourrait dépendre la position des membres du groupe UMP lors du vote sur l’article 1er.
Nous proposons de supprimer la procédure d’action de groupe simplifiée, somme toute d’exception, pour des raisons de forme et de fond.
Certains orateurs l’ont déjà indiqué hier soir, M. le rapporteur, notamment, l’a répété, cela fait trente ans que l’on parle de l’action de groupe. L’accouchement est difficile, car cette notion heurte notre tradition juridique.
La majorité précédente avait pris énormément de précautions que l’on retrouve dans votre texte : le filtre des associations, la mise à l’écart de la procédure de l’opt out, par exemple, ou encore un meilleur respect des droits de la défense. Ces précautions avaient su nous convaincre qu’il était sans doute utile de transposer l’action de groupe dans notre droit.
Et voilà qu’est voté, à l’Assemblée nationale, un amendement qui vise à instituer une procédure d’exception sur laquelle le Conseil d’État n’a pu donner son avis puisqu’elle ne figurait pas dans le projet du Gouvernement et dont il n’a pas été suffisamment débattu.
Ces raisons de forme sont importantes, car on ne peut bouleverser notre droit en y introduisant une disposition de cette ampleur sans prendre les mesures et précautions nécessaires. Il aurait sans doute été plus utile de procéder à l’expérimentation de la procédure de droit commun, quitte, éventuellement, à la compléter par la suite, plutôt que de se précipiter et d’instituer subrepticement, par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, une procédure d’exception à côté de la procédure de droit commun.
Après les raisons de forme, j’aborderai les raisons de fond.
En économie, on dit que la « mauvaise monnaie chasse la bonne ». Nous craignons qu’il en aille également ainsi en matière juridique et que, en l’espèce, la mesure d’exception ne devienne progressivement la règle. Or cette mesure ne présente pas les mêmes garanties que celles dont je parlais en évoquant la procédure de droit commun, qui devrait être la seule en vigueur.
Certes, la commission des lois avait émis énormément de réserves et la commission des affaires économiques a tenté de corriger les dérives mais sans y parvenir complètement. Il ne suffit pas que, dans une deuxième phase, les membres d’un fichier, les consommateurs, puissent dire qu’ils souhaitent être indemnisés.
En réalité, la procédure de l’opt out revient par la fenêtre ! Or, je vous le rappelle, elle est contradictoire avec les principes de droit français. Je citerai à mon tour la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui, dans une décision de 1989, rappelle que nul ne peut ester en justice sans en avoir manifesté clairement l’intention. En l’espèce, ce n’est pas le cas et je pense qu’il faut que les professionnels connaissent ceux des plaignants qui les mettent en cause pour que les droits de la défense soient respectés.
Je terminerai en disant que cette procédure d’exception sera aussi une mesure discriminatoire, car elle concernera certains secteurs économiques beaucoup plus que d’autres.
C’est la raison pour laquelle il nous semble bien plus raisonnable, notamment du point de vue de la légistique, de s’en tenir, dans un premier temps, à la procédure de droit commun, de l’évaluer, quitte ensuite à la rectifier ou à introduire une procédure exceptionnelle.
M. le président. La parole est à M. Henri Tandonnet, pour présenter l’amendement n° 232 rectifié.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement, identique à celui que notre collègue Retailleau, dont je partage les propos, vient de défendre brillamment, vise à supprimer la procédure d'action de groupe simplifiée, introduite à l'Assemblée nationale, qui dénature la procédure classique figurant dans le projet de loi. Il s’agit pour nous d’un amendement phare dont dépendra le positionnement de notre groupe, comme je l’ai annoncé lors de la discussion générale.
Cette procédure simplifiée, même si elle a été mieux encadrée par la commission des affaires économiques, met finalement en place un système mixte, combinant opt out et opt in, alors que le Gouvernement a toujours manifesté sa volonté d’éviter la procédure de l’opt out pour ne pas tomber dans les travers du système américain. Or, au début de la procédure simplifiée, le système de l’opt out prévaut dans la mesure où il appartient au professionnel de constituer le groupe via ses fichiers clients. En revanche, en fin de procédure, c’est celui de l’opt in qui domine : le consommateur doit manifester son accord pour être indemnisé.
La procédure simplifiée instaure également une discrimination entre professionnels, selon qu’ils pourront facilement identifier les consommateurs ou qu’ils devront réaliser un travail d’identification des membres du groupe. Les premiers seront soumis à l’action de groupe simplifiée et les seconds à la procédure de droit commun et ce quel que soit le dommage subi par le consommateur.
Enfin, cette procédure est moins sécurisante pour les droits de la défense du professionnel dans la mesure où elle ne prévoit pas qu’il puisse saisir le juge s’il considère que certaines demandes des consommateurs déclarés dans le groupe sont illégitimes.
Là encore, nous estimons qu’il faut laisser le juge décider de la manière dont il conduira l’action du groupe. Grâce à l’arsenal du code de procédure civile et à la mise en état, il pourra s’adapter à chacune des situations : la procédure classique, par exemple, lui laisse suffisamment de latitude pour simplifier, s’il le faut, la constitution du groupe de consommateurs lésés. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cette procédure simplifiée, source de contentieux et de complications.
M. le président. L'amendement n° 548, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 25
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le professionnel peut saisir le juge de toute contestation portant sur l’indemnisation des consommateurs.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à encadrer davantage la procédure d’action de groupe simplifiée, si elle est adoptée.
Comme la rédaction actuelle de l’alinéa 25 de l’article 1er ne prévoit aucune possibilité de recours de la part du professionnel, l’amendement n° 548 tend à préciser qu’une décision de justice doit pouvoir être contestée. Il s’agit de permettre au professionnel de saisir le juge pour toute question qui portera sur l’indemnisation des consommateurs. Il semble primordial que le professionnel puisse, par la suite, contester la composition du groupe de consommateurs ayant subi un préjudice, puisque cette composition va déterminer le montant du préjudice.
M. le président. L'amendement n° 202, présenté par MM. Bizet et Houel, est ainsi libellé :
Alinéa 26
Après le mot :
concernés
insérer les mots :
par l’intermédiaire d’un huissier de justice
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Les dispositions de cet amendement recentrent le débat sur la présence des huissiers de justice. Il s’agit non pas de privilégier une profession par rapport à une autre, mais d’être en cohérence avec, d’une part, l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, dont l’article 1er dispose que « les huissiers de justice sont les officiers ministériels qui ont seuls qualité pour signifier les actes et les exploits, faire les notifications prescrites par les lois et règlements lorsque le mode de notification n'a pas été précisé et ramener à exécution les décisions de justice, ainsi que les actes ou titres en forme exécutoire » et, d’autre part, l’article L.121-38 du code de la consommation qui, dans le cadre, par exemple, des loteries publicitaires, précise que la loi impose le dépôt du règlement en l’étude d’un huissier de justice.
J’ai bien compris que la commission et le Gouvernement ne veulent pas entendre parler de tous ces amendements qui mettent l’huissier de justice au cœur du dispositif. Il ne s’agit pourtant pas de se fâcher avec toutes les autres professions ; il s’agit seulement d’assurer une certaine cohérence.
M. le président. L'amendement n° 233 rectifié, présenté par M. Tandonnet, Mmes Dini, Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 26
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces mesures d'information peuvent être assorties d'une exécution provisoire.
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement vise à donner plus de latitude au juge et, notamment, à lui permettre d’ordonner l’exécution provisoire des mesures de publicité. De telles mesures permettent d’alerter des consommateurs, de réunir le groupe plus tôt et d’éviter les pertes de preuve ou même de biens, la loi envisageant en effet des réparations en nature.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 670 est présenté par Mme Aïchi, M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 673 est présenté par Mme Jouanno, M. Deneux et Mme N. Goulet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 27
Après les mots :
l'association
insérer les mots :
ou du groupement de consommateurs
II. - Alinéa 34
Remplacer le mot :
requérante
par les mots :
ou le groupement requérant
III. - Alinéa 37
Remplacer les mots :
Seule l'association requérante peut
par les mots :
L'association ou le groupement requérant peut
La parole est à Mme Leila Aïchi, pour présenter l’amendement n° 670.
Mme Leila Aïchi. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 670 est retiré.
L’amendement n° 673 n’est pas soutenu.
L'amendement n° 200, présenté par MM. Bizet et Houel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 27
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L’huissier de justice en charge de l’exécution forcée de cette décision propose une répartition entre les consommateurs visés.
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Cet amendement tend à ce que les huissiers de justice assurent la répartition des sommes recouvrées entre les consommateurs visés. C’est une question de cohérence autant que de rationalisation de l’action. Si tel n’était pas le cas, j’aimerais savoir précisément comment cela se passera.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Mes chers collègues, avec l’action de groupe simplifiée, nous sommes dans un débat de fond.
Bien sûr, la commission des affaires économiques n’est pas favorable aux amendements de suppression nos 195 rectifié et 232 rectifié. La création de l’action de groupe simplifiée repose sur la volonté d’accélérer la procédure dans le cas où les consommateurs sont identifiés.
Lors de la réunion de la commission, nous avons clarifié les conditions dans lesquelles cette procédure simplifiée peut être engagée. Il s’agit de viser le cas où l’identité et le nombre des consommateurs lésés sont connus et de limiter cette procédure aux cas où les consommateurs lésés ont subi un préjudice d’un même montant ou d’un montant identique par période de référence, par exemple dans le cadre d’abonnements d’une durée variable.
Lors des nombreuses auditions, beaucoup de questions ont été posées sur cette action de groupe simplifiée et les interrogations étaient légitimes. De même, lorsque nous avons, en quelque sorte, défriché le terrain concernant son caractère juridique, nous avons rappelé plusieurs éléments déterminants.
Premièrement – point fondamental –, la condamnation prononcée par le juge dans le cadre de l’action de groupe simplifiée est susceptible de recours.
Deuxièmement, la décision de choisir l’action de groupe simplifiée plutôt que l’action de groupe standard relève du juge. En conséquence, si le préjudice n’est pas identique ou si les consommateurs lésés ne sont pas réellement identifiés, le juge pourra faire droit à des arguments du professionnel et opter pour la procédure standard.
Cela a été évoqué au cours des auditions et des tables rondes, dans certains cas, le professionnel pourra avoir intérêt à recourir à une action de groupe simplifiée. En effet, il peut souhaiter que la procédure se termine rapidement. Par ailleurs, dans le cadre d’une telle action, la publicité est individuelle, ce qui est favorable au professionnel.
Le dispositif me semble donc utile. Il sera parfois préféré à l’action de groupe standard par le professionnel. Surtout, il est suffisamment encadré juridiquement. La commission des affaires économiques ne peut donc pas être favorable aux amendements nos 195 rectifié et 232 rectifié, qui tendent à le supprimer.
L’amendement n° 548 vise à préciser que le professionnel peut saisir le juge de toute contestation portant sur l’indemnisation des consommateurs.
Je l’ai dit tout à l’heure, la décision du juge peut faire l’objet de recours. L’alinéa 26 de l’article 1er indique d’ailleurs que les mesures de publicité ne peuvent être mises en œuvre qu’une fois que la décision du juge « n’est plus susceptible de recours ».
Ces précisions me semblent en mesure de dissiper en partie les préoccupations exprimées par Mme Lamure. La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement qu’elle a présenté.
La commission n’est pas plus favorable à l’amendement n° 202, pour les mêmes raisons.
J’en viens à l’amendement n° 233 rectifié, qui tend à permettre que les mesures de publicité de la décision du juge puissent faire l’objet d’une exécution provisoire. Après les discussions que nous avons eues sur l’amendement n° 239 rectifié, je vois dans le présent amendement une forme de contradiction. Ses auteurs, en effet, reprochent à l’action de groupe simplifiée de ne pas respecter les droits de la défense. Or, à mon sens, l’exécution provisoire qu’ils veulent permettre peut se retourner contre le professionnel, qui serait condamné avant même d’être jugé, du fait des mesures de publicité prises par le juge. Il ne faut donc surtout pas aller dans ce sens ! Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
J’ai donné la position de la commission sur la question des huissiers de justice ; je ne m’appesantirai donc pas sur l’amendement n° 200. Je précise simplement que nous laissons aux seize associations agréées, auxquelles est confiée l’action de groupe, le loisir de choisir les professions conventionnées – huissiers ou avocats – dont elles s’entourent pour ce faire. La commission émet également un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je voudrais préciser à MM. Retailleau et Tandonnet ce que nous entendons par « procédure simplifiée ». Cette appellation, j’en conviens, est assez maladroite. Si parmi deux procédures l’une est simplifiée, cela signifie que l’autre est compliquée…
Mme Muguette Dini. C’est vrai !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Cette maladresse, d’ailleurs, a donné aux opposants à l’action de groupe un autre argument pour se moquer de la procédure.
Nous cherchons à distinguer les cas dans lesquels le nombre et l’identité des consommateurs qui peuvent être indemnisés sont connus à l’avance. Par vos amendements, messieurs les sénateurs, vous posez la question qui est au cœur de nos débats depuis le départ : faut-il préférer la procédure de l’opt in – ouvert ou fermé – ou celle de l’opt out ?
La procédure de l’opt out revient à indemniser de manière automatique le client d’une entreprise victime d’un préjudice sans qu’il en ait manifesté la volonté. Cette procédure remet en cause un principe fondamental du droit. Nous n’avons donc pas voulu suivre cette piste.
Nous avons plutôt privilégié la procédure de l’opt in, qui suppose que l’on manifeste la volonté de s’agréger à l’action engagée.
Le dispositif de l’opt in fermé consiste à réserver l’indemnisation à la constitution d’un groupe préalable au jugement.
La procédure de l’opt in ouvert revient à constituer le groupe une fois que le juge aura décidé de la recevabilité et du montant de l’indemnisation.
Je vais essayer d’illustrer le déroulement de la procédure d’une action de groupe simplifiée. Prenons un exemple concret. Une banque est jugée coupable d’un défaut de conseil à l’égard de ses clients. Les détenteurs d’un même placement subissent un préjudice de nature identique. La banque connaît donc exactement le nombre de clients touchés, qui seront informés par le juge, par un tiers, ou par elle-même qu’ils peuvent être indemnisés du préjudice subi.
La rédaction de l’alinéa 26 de l’article 1er nous couvre du risque que fait courir la procédure de l’opt out, puisqu’il est précisé que les mesures d’information des consommateurs concernés leur permettent « d’accepter d’être indemnisés dans les termes de la décision ». S’ils peuvent l’« accepter », c’est qu’ils peuvent manifester leur volonté d’être indemnisés.
Selon moi, donc, les amendements nos 195 rectifié et 232 rectifié tendent à nous prémunir d’un risque qui n’a pas de base réelle, dans l’état actuel de la rédaction des alinéas relatifs à l’action de groupe simplifiée, telle qu’issue des travaux de l’Assemblée nationale.
Ce débat, extrêmement intéressant, a animé le monde du droit autant que les économistes. Le Conseil d’analyse économique, d’ailleurs, s’est penché sur le sujet. Il a étudié la manière dont l’action de groupe se déroulait aux États-Unis, et a recommandé au Gouvernement de choisir la procédure de l’opt in ouvert. Cette procédure a l’avantage d’agréger un nombre significatif de consommateurs à l’action. La procédure de l’opt in fermé, elle, suppose pour les associations de consommateurs de s’assurer au préalable que des consommateurs puissent déclencher la procédure. Son adoption par le Parlement aurait réduit la portée de l’action de groupe.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements. Je remercie néanmoins leurs auteurs d’avoir permis au Sénat de débattre sur ce sujet, même si je ne suis pas sûr de les avoir convaincus.
L’amendement n° 548 ne semble pas très utile au Gouvernement, dans la mesure où l’alinéa 32 de l’article 1er précise que le juge « tranche les difficultés qui s’élèvent à l’occasion de la phase de liquidation des préjudices ». Cela englobe, à mes yeux, la contestation par le professionnel du bien-fondé d’une demande d’indemnisation ou de son montant. Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur cet amendement.
Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement n° 202. Il considère qu’il vaut mieux laisser au juge le choix des mesures de publicité les plus adaptées pour permettre aux consommateurs concernés d’accepter l’indemnisation décidée. S’agissant tout particulièrement des mesures individuelles d’information, je rappelle que, dans le cadre d’une procédure simplifiée, les consommateurs seront identifiés.
Par ailleurs, je le signale, le recours à un huissier renchérirait le coût des mesures d’information. Celles-ci pourraient donc être mises en œuvre, éventuellement, par courrier écrit ou électronique.
Le Gouvernement est aussi défavorable à l’amendement n° 200.
Enfin, l’amendement n° 233 rectifié tend à permettre l’exécution provisoire des mesures de publicité destinées à informer les consommateurs concernés de la décision d’indemnisation. Par cohérence avec le refus opposé à l’amendement portant sur l’exécution provisoire, dont nous avons discuté tout à l’heure, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 195 rectifié et 232 rectifié.
M. Bruno Retailleau. Pour conclure ce débat important, j’indique que ni M. le rapporteur ni M. le ministre ne nous ont convaincus.
S’il y a eu autant de réticences, exprimées pendant si longtemps, à « acclimater » l’action de groupe au droit français, c’est parce que nous craignions les dérives américaines.
Les garanties contre ces dernières sont de deux ordres.
Premièrement, en France, aucun justiciable ne doit pouvoir être engagé dans une action en justice sans l’avoir vraiment voulu, sans en avoir manifesté l’intention à titre individuel, et sans le savoir.
Deuxièmement, il ressort du droit de la défense que pour construire sa défense, le professionnel attaqué doit pouvoir connaître l’ensemble des plaignants.
Monsieur le ministre, vous avez raison de dire que la deuxième phase de la procédure opère une sorte de rattrapage afin d’assurer ces deux garanties. Pour autant, la première phase les méconnaît gravement. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé l’amendement n° 195 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 195 rectifié et 232 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour explication de vote sur l’amendement n° 548.
Mme Élisabeth Lamure. Je ne suis pas du tout convaincue par les arguments fournis par M. le rapporteur et M. le ministre, notamment quand ils affirment qu’il revient au juge de trancher en cas de difficultés.
Ce n’est pas vraiment l’objet de notre question. Le texte, dans sa rédaction actuelle, ne fait pas du tout mention d’une possibilité de recours de la part du professionnel. Or il nous paraît impératif que ce dernier puisse contester la composition du groupe de consommateurs.
Comme vient de le dire Bruno Retailleau, cela relève d’un principe essentiel : les droits de la défense.
M. le président. L’amendement n° 549, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 31
Après le mot :
préjudices
insérer le mot :
matériels
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à rappeler que le champ de l’action de groupe est limité à la réparation des préjudices matériels.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. À mon sens, cet amendement est satisfait. L’alinéa 9 mentionne très clairement les préjudices matériels.
Madame Lamure, je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Mme Élisabeth Lamure. Il ne s’agit que d’ajouter un mot !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 14, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 32
1° Après les mots :
s’élèvent
insérer les mots :
entre l’association, le professionnel ou les consommateurs,
2° Remplacer les mots :
de la phase
par les mots :
des phases d’adhésion au groupe et
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois. Cet amendement vise à garantir aux consommateurs un recours contre l’association pour toutes les difficultés d’adhésion au groupe qu’ils rencontreraient.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Cet amendement concerne la faculté pour les consommateurs de pouvoir faire un recours contre l’association pour les difficultés d’adhésion au groupe. Il tend à apporter une précision utile. C’est pourquoi la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 234 rectifié, présenté par M. Tandonnet, Mmes Létard, Dini et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 33
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L’huissier de justice en charge de l’exécution forcée de ce jugement propose un inventaire des consommateurs lésés et une répartition des sommes entre eux.
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Par cet amendement, nous proposons de préciser que la mission de recouvrement forcée de la décision implique l’intervention de l’huissier de justice pour la liquidation de la créance et que ce dernier procède également à la répartition des sommes perçues au profit des consommateurs lésés.
En effet, il est souhaitable que l’huissier ne limite pas l’exécution forcée du jugement de condamnation à l’encontre du professionnel à la mise en œuvre des voies d’exécution ; il faut l’étendre à l'inventaire et à la vérification des sommes recouvrées entre les membres du groupe. Une telle mission est d’ores et déjà assurée par les huissiers de justice dans le cadre de plusieurs procédures, notamment en matière de saisie-vente, lorsqu’il est nécessaire de repartir le prix des meubles vendus entre différents créanciers.
Outre que les études d’huissiers de justice sont équipées pour procéder à une telle répartition, qu’elles effectuent dans le cadre d’autres procédures, elles assurent des garanties comptables et financières très supérieures à celles qui sont afférentes aux associations. Elles pourront aussi liquider des exécutions partielles posant des difficultés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Je ne vois pas du tout l’intérêt de préciser que l’huissier de justice chargé de l’exécution forcée du jugement « propose un inventaire des consommateurs lésés et une répartition des sommes entre eux ». Il me semble que la décision du juge suffit et qu’aucun inventaire n’est nécessaire : en effet, le juge aura statué au préalable sur toutes les demandes d’indemnisation auxquelles le professionnel n’aura pas fait droit.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 235 rectifié est présenté par M. Tandonnet, Mmes Dini, Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 550 est présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 34
Après le mot :
consommateurs
insérer le mot :
lésés
La parole est à M. Henri Tandonnet, pour présenter l’amendement n° 235 rectifié.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement vise à s’assurer que l’opt in est respecté tout au long de la procédure d’action de groupe et à préciser que ce sont bien les consommateurs « lésés » qui constituent le groupe représenté par l’association.
Seuls les consommateurs ayant manifesté expressément leur volonté de rejoindre le groupe doivent être indemnisés par le professionnel.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l'amendement n° 550.
Mme Élisabeth Lamure. Là encore, nous proposons d’ajouter un mot, en l’occurrence le terme « lésés », pour consolider la procédure de l’opt in.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Les consommateurs sont obligatoirement lésés, faute de quoi ils ne peuvent pas faire partie du groupe.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Oui ! C’est superfétatoire !
M. Martial Bourquin, rapporteur. Cela dit, je voudrais connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 235 rectifié et 550.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 201, présenté par MM. Bizet et Houel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 34
Insérer une section ainsi rédigée :
« Section 3 bis
« Frais de recouvrement et d’exécution
« Art. L. 423-7- ... - L’intégralité des frais et des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévus à l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution, pour l’application des sections 1, 2 et 3 du présent chapitre, est à la charge du professionnel visé.
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. La question de la charge et du montant des frais et honoraires liés au recouvrement dit « amiable » ou « forcé » est essentielle pour les consommateurs lésés.
Il importe en effet de protéger les consommateurs en évitant qu’ils ne puissent être débiteurs de sommes dues au titre du recouvrement amiable ou judiciaire.
Par cet amendement, nous proposons d’insérer dans le projet de loi une disposition prévoyant que l’intégralité des frais et des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévus à l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution, pour l’application de la procédure d’action de groupe, sont à la charge du professionnel visé.
M. le président. L'amendement n° 236 rectifié, présenté par M. Tandonnet, Mmes Létard, Dini et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 34
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 423-7-... - L’intégralité des frais et des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévus à l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution, pour l’application des sections 1, 2 et 3 du présent chapitre, est à la charge du professionnel visé.
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement est similaire à celui qui vient d’être présenté.
La question de la charge et du montant des frais et honoraires liés au recouvrement dit « amiable » ou « forcé » est essentielle pour les consommateurs lésés. Il importe en effet de protéger les consommateurs en évitant qu’ils ne puissent être débiteurs de sommes dues au titre du recouvrement.
En l’état actuel des textes, le consommateur demeure redevable des honoraires dus en matière de recouvrement, et ce alors qu’il importe que le débiteur, qui pourra être créancier de sommes de faible montant, ne supporte aucun frais ou honoraire.
L’esprit de cette disposition législative doit être étendu en matière d’action de groupe. Il convient toutefois de mettre systématiquement les frais de recouvrement et d’exécution à la charge du professionnel.
C’est pourquoi nous suggérons d’insérer dans le projet de loi une disposition prévoyant que l’intégralité des frais et des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévus à l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution, pour l’application de la procédure d’action de groupe, est à la charge du professionnel visé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Ces amendements, dont les auteurs demandent à juste titre que les frais de recouvrement et d’encaissement soient à la charge du professionnel condamné, sont satisfaits par le droit actuel.
En effet, l’article L. 141-6 du code de la consommation permet au juge de mettre à la charge du professionnel condamné l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement.
Je sollicite donc le retrait de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Bizet, l'amendement n° 201 est-il maintenu ?
M. Jean Bizet. Non, monsieur le président, je le retire compte tenu des explications de M. le rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 201 est retiré.
Qu’en est-il de l’amendement n° 236 rectifié, monsieur Tandonnet ?
M. Henri Tandonnet. Je le maintiens, monsieur le président.
Avec le dispositif envisagé, c’est le juge qui aura la possibilité d’en décider, alors que je propose une automaticité. Je rappelle que le créancier est tenu de payer, sous conditions, un droit de recouvrement à l’huissier de justice qui procède au recouvrement ou à l’encaissement des sommes dues par le débiteur.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 237 rectifié est présenté par M. Tandonnet, Mmes Dini, Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 551 est présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 37
Après les mots :
participer à une médiation,
insérer les mots :
indépendamment ou avant toute procédure mais aussi à tout stade de la procédure,
La parole est à M. Henri Tandonnet, pour présenter l’amendement n° 237 rectifié.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement vise à permettre le recours à la médiation, en précisant qu’un processus de médiation, facultatif, pourra être ouvert entre les consommateurs et/ou l’association, d’une part, et le professionnel, d’autre part, indépendamment de toute action de groupe, mais aussi à tout moment de la procédure d’action de groupe, afin de trouver un accord amiable.
Je propose donc d’élargir la médiation à tout stade de la procédure.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l'amendement n° 551.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement est identique à celui qui vient d’être présenté.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Ces deux amendements visent à préciser que la médiation peut avoir lieu indépendamment et avant toute procédure, mais aussi à tout stade de la procédure.
Ils sont, pour une partie, inapplicables et, pour l’autre partie, satisfaits.
Il est en effet impossible que la médiation puisse être lancée indépendamment ou avant toute procédure : pour qu’il y ait une association requérante, il faut que l’action de groupe soit engagée.
Par ailleurs, la loi du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative définit la médiation comme « tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends ». Autrement dit, il est tout à fait imaginable qu’une médiation soit engagée par des consommateurs avec un professionnel.
Enfin, aux termes de l’article 1er, tel qu’il est rédigé, la médiation peut être lancée à tout moment de la procédure d’action de groupe. Je demande donc le retrait de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Tandonnet, l'amendement n° 237 rectifié est-il maintenu ?
M. Henri Tandonnet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 237 rectifié est retiré.
Qu’en est-il de l’amendement n° 551, madame Lamure ?
Mme Élisabeth Lamure. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 551 est retiré.
L'amendement n° 552, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Après le mot :
préjudices
insérer le mot :
matériels
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à préciser que l’action de groupe est limitée à la réparation des préjudices matériels individuels.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. L’alinéa 9 de l’article 1er est suffisamment clair sur les préjudices matériels. Cet amendement me paraît donc satisfait.
Mme Élisabeth Lamure. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° 552 est retiré.
L'amendement n° 203, présenté par MM. Bizet et Houel, est ainsi libellé :
Alinéa 38, seconde phrase
Après le mot :
informer
insérer les mots :
, par l’intermédiaire d’un huissier de justice,
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Pour ne pas fatiguer l’ensemble de nos collègues, je ne reprendrai pas la totalité des arguments que j’ai déjà développés sur la présence des huissiers de justice dans la procédure. J’insiste simplement, là encore, sur la cohérence avec l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers et avec l’article L. 121-38 du code de la consommation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Ce sera la même argumentation que précédemment sur les huissiers de justice : la saisine du juge est suffisante.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 553, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 38, seconde phrase
Après le mot :
concernés
supprimer la fin de cette phrase.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à supprimer l’opt out introduit dans la procédure de médiation.
En effet, si l’association et l’entreprise mise en cause parviennent par la médiation à un accord négocié susceptible de mettre un terme à la procédure d’action de groupe, cet accord homologué par le juge doit engager l’ensemble des consommateurs membres du groupe et mettre ainsi un terme à l’action judiciaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Le dispositif envisagé dans cet amendement pourrait avoir des effets contraires à l’objectif visé.
Le groupe n’est pas encore constitué quand la médiation est lancée. Le membre de phrase que nos collègues souhaitent supprimer permet de prévoir l’adhésion des consommateurs potentiellement concernés à l’accord qui vaut l’adhésion au groupe. Si ce bout de phrase était retiré, l’ensemble des consommateurs lésés seraient liés par l’accord négocié, ce qui constituerait justement un système d’opt out.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 158 rectifié, présenté par MM. Plancade, Mézard, Baylet, Bertrand, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Requier, Tropeano et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 38
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Les termes de l'accord ne sont pas opposables aux membres du groupe qui n'y ont pas expressément consenti.
« L'accord homologué constitue pour les membres du groupe auxquels il s'applique un titre exécutoire au sens du 1° de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution.
La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Cet amendement vise à sécuriser le recours à la médiation dans le cadre d’une action de groupe en apportant une précision : les termes de l’accord qui résulte d’une médiation ne sont pas opposables aux membres du groupe n’y ayant pas participé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. L’amendement proposé par notre collègue Robert Tropeano me semble en partie satisfait par le texte issu des travaux de la commission, notamment les alinéas 38 et 49 de l’article 1er.
L’alinéa 49 indique en effet que les décisions résultant d’une médiation ont autorité de la chose jugée pour les membres du groupe dont le préjudice a été réparé au terme de la procédure. Et l’alinéa 38 prévoit que l’accord homologué par le juge précise les modalités d’information des consommateurs destinées à leur permettre d’y adhérer.
La combinaison de ces deux alinéas aboutit donc à un dispositif clair, conforme à ce qui est recherché par les auteurs de cet amendement. J’en sollicite donc le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Tropeano, l'amendement n° 158 rectifié est-il maintenu ?
M. Robert Tropeano. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 158 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 15, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 41
1° Après les mots :
fonctionnement de l'Union européenne,
insérer les mots :
la responsabilité du professionnel ne peut être prononcée dans le cadre de
2° Supprimer les mots :
ne peut être engagée devant le juge
3° Remplacer les mots :
de recours
par les mots :
des voies de recours ordinaires ni de pourvoi en cassation
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois. Cet amendement vise à autoriser l’engagement, et seulement lui, de l’action de groupe relative à un manquement à des règles de concurrence avant que la décision de l’autorité compétente en la matière soit devenue définitive.
Ainsi, les droits du consommateur sont garantis, puisque les mesures d’instruction qui autoriseront le recueil des preuves et faciliteront leur conservation pourront être engagées sans délai. En outre, le cours de la prescription sera interrompu, ce qui préservera les droits des consommateurs victimes.
Dans le même temps, les droits du professionnel seront préservés, puisque sa responsabilité ne pourra être déclarée tant que l’affaire n’aura pas été définitivement jugée. Par ailleurs, l’action de groupe ne pourra faire l’objet d’aucune publicité.
M. le président. L'amendement n° 159 rectifié, présenté par MM. Plancade, Mézard, Baylet, Bertrand, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Requier, Tropeano et Vendasi, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 41
1° Après la référence :
L. 423-1
supprimer le mot :
ne
2° Après le mot :
juge
supprimer le mot :
que
II. - Après l'alinéa 42
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« En l'absence d'une telle décision, le juge consulte l'Autorité de la concurrence dans les conditions définies à l'article L. 462-3 du même code.
« Art L. 423-10-1. - Lorsque le fait dommageable imputé au professionnel fait l’objet d’un examen par l’Autorité de la concurrence au titre des articles L. 462-5 ou L. 462-6 du code de commerce, le juge saisi d’une action de groupe sursoit à statuer soit jusqu’à la remise de l’avis de l’Autorité de la concurrence, soit jusqu’au moment où une décision qu’elle a prise est devenue définitive.
La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Cet amendement concerne les actions de groupe dans le domaine de la concurrence.
Le projet de loi prévoit qu’une telle action n’est possible que sur le fondement d’une décision reconnaissant les manquements du professionnel déjà rendue par les juridictions européennes ou nationales compétentes, et qui n’est plus susceptible de recours.
Cela limite considérablement la possibilité pour les consommateurs de faire reconnaître et réparer des manquements au droit de la concurrence, via une action de groupe.
C’est pourquoi le présent amendement vise à prévoir, quand aucune décision n’a encore été rendue, que le juge puisse également saisir l’Autorité de la concurrence pour que celle-ci rende un avis. Lorsque la décision de l’Autorité de la concurrence devient définitive, le juge peut alors poursuivre la procédure d’action de groupe.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. L’amendement n° 15 de la commission des lois, vise un objectif louable puisqu’il tend à raccourcir les délais.
Nous savons, en effet, que, en matière de concurrence, la procédure est très longue. Dans ces conditions, il est possible que les premières actions de groupe ne puissent être engagées avant longtemps, c'est-à-dire d’ici à sept ans, voire plus.
La solution proposée par la commission des lois me paraît intelligente et de nature à satisfaire les droits tant des consommateurs que des professionnels.
L’action de groupe pourra être engagée sans une décision préalable de l’Autorité de la concurrence devenue définitive : ainsi, les mesures d’instruction pourront être lancées et la conservation des preuves pourra être engagée sans délai.
Du point de vue des droits des professionnels, ces derniers ne pourront voir leur responsabilité déclarée tant que l’affaire n’aura pas été définitivement jugée.
La commission est favorable à l’amendement n° 15 et demande à M. Tropeano de bien vouloir se ranger à cette proposition.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable aux deux amendements.
Qu’il me soit permis de corriger M. le rapporteur sur un point : les actions de groupe pourront être déclenchées dès le lendemain de la promulgation de la loi, notamment en ce qui concerne des dossiers relatifs à la concurrence qui n’ont pas encore fait l’objet d’une décision définitive. Cela signifie que dans ce domaine, des décisions très rapides pourront être rendues sur l’indemnisation des consommateurs français.
L’argument selon lequel il faudra attendre trois, quatre, cinq, six, voire sept ans pour que soit prise une décision forte d’indemnisation des consommateurs dans le champ de la concurrence n’est donc pas recevable.
Je comprends le souci, tout à fait louable, d’accélérer la procédure. C'était d'ailleurs la volonté du Gouvernement lorsqu’il a voulu mettre en place une procédure d'exécution provisoire : tel est son choix en cas de décision définitive de l'Autorité de la concurrence.
Néanmoins, je veux vous mettre en garde : pour un gain modeste, voire très modeste, de temps, vous allez instaurer de l'insécurité juridique. Or avec ce texte, la volonté du Gouvernement est tout autre : il souhaite créer les conditions dans lesquelles une stratégie macro-économique qui soutient la compétitivité des entreprises ne soit pas altérée, affaiblie ou neutralisée par des procédures qui, dans le champ de l'action de groupe, pourraient nuire à la recherche de la sécurité juridique pour ces mêmes entreprises.
La commission des lois ne s’en est peut-être pas aperçue, mais l’adoption de l’amendement n° 15 aurait pour conséquence de remettre en cause le principe de l'exécution provisoire. Pourquoi ? Ce principe, tel que nous l'avons retenu, notamment en matière de concurrence, permet de réduire les délais et n’est applicable qu’à une condition : le juge civil doit être lié au fond par la décision de l'Autorité de la concurrence.
Or si l'on rend possible l'introduction de l'action avant que la décision de l'Autorité de la concurrence soit définitive, le juge civil, qui est le juge de l'action de groupe, ne pourra pas statuer sur des manquements au droit de la concurrence définitivement établis, ce qui crée une insécurité d'autant plus grande.
J'ajoute que les dispositions que nous proposons sont conformes aux recommandations de la Commission européenne dans ce domaine en matière de recours collectif.
Il est donc important de peser les avantages et les inconvénients de tels amendements. Incontestablement, le souci est louable, et nous le partageons, mais le gain de temps est à mes yeux relativement modeste, pour ne pas dire marginal, par rapport à l'insécurité juridique potentielle ainsi créée.
C'est la raison pour laquelle, et j’y insiste, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 15, eu égard à l'équilibre de la procédure d'action de groupe que nous avons voulu arrêter.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, rapporteur.
M. Martial Bourquin, rapporteur. J'ai écouté avec attention les arguments de M. le ministre.
Cependant, l'action de groupe pourra être engagée sans une décision préalable de l'Autorité de la concurrence devenue définitive.
Ainsi, les mesures d'instruction pourront être lancées et la conservation des preuves pourra être engagée sans délai. Par conséquent, le juge reçoit, mais ne juge pas.
Du point de vue des droits des professionnels, ces derniers ne verront pas leur responsabilité déclarée avant que l'affaire soit jugée. Le système est donc sécurisé pour eux. C’est pourquoi la commission des affaires économiques a voté l'amendement présenté par la commission des lois.
J’espère que ces quelques précisions dissiperont la crainte d'une insécurité juridique.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. J’ai déjà eu connaissance de ces précisions, car nous avons tous beaucoup travaillé sur ces questions.
Qu’il me soit permis d’insister : les entreprises peuvent faire l'objet, dans le domaine de la concurrence, d'une réformation du jugement de l'Autorité de la concurrence. Je comprends et je partage le souci d'accélérer la procédure, notamment pour augmenter les chances de conservation des preuves par la victime.
Je le répète, le choix politique du Gouvernement, qui se traduit dans de multiples textes, est d'éviter l'insécurité juridique. Je vois bien l’intérêt de la proposition que nous examinons en termes de temps, mais elle me paraît également entraîner un risque en termes de sécurité.
J’ai entendu les arguments avancés, mais ils ne m’ont pas convaincu. C’est la raison pour laquelle je maintiens l’avis défavorable du Gouvernement. Mais votre assemblée reste souveraine.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote sur l'amendement n° 15.
M. Jean-Jacques Hyest. En commission, j'ai voté cet amendement, car j’ai pensé que la mesure nous ferait gagner du temps.
À la réflexion, monsieur le ministre, je dois avouer que vos arguments me paraissent pertinents. Je ne vois pas l’intérêt d’engager une action pour ensuite arrêter et attendre une décision. Certes, se pose la question de la préservation des preuves, notamment. Mais chacun sait que l’objet des débats en séance est d’éclairer la discussion.
J'ai soutenu toutes les propositions émanant de la commission des lois, d’autant que cette dernière s’était montrée très sensible aux travaux de nos collègues Béteille et Yung sur l'action de groupe. Vous avez d’ailleurs reconnu, monsieur le ministre, que leurs travaux avaient également largement inspiré le Gouvernement.
Quoi qu’il en soit, sur ce point précis, je ne suis plus tout à fait convaincu par l'argumentaire des deux commissions. Je ne voterai donc pas l’amendement n° 15.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 159 rectifié n'a plus d'objet.
L'amendement n° 122 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 41
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le juge peut ordonner toutes mesures nécessaires à la conservation des preuves, y compris celles détenues par le professionnel.
La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Le présent amendement vise à instaurer dans les actions de groupe portant sur des manquements dans le domaine de la concurrence la possibilité pour le juge d’ordonner des mesures de conservation des preuves.
Une telle faculté est prévue à l’alinéa 16 de l’article 1er pour les actions de groupe dans le domaine de la consommation. Il est surprenant que ce ne soit pas le cas en matière de concurrence.
Nous vous proposons donc de corriger cet oubli ou cette incohérence en adoptant le présent amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que, dans le cadre d’une action de groupe dans le domaine de la concurrence, le juge peut ordonner toute mesure nécessaire à la conservation des preuves. Comme je l’ai rappelé tout à l’heure, il est en grande partie satisfait par le droit actuel et par les règles de la procédure civile.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 43
Remplacer le mot :
ou
par le mot :
ni
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois. Il s’agit d’un amendement purement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 17 rectifié, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 44
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
« Art. L. 423-11-1. - Par dérogation au deuxième alinéa de l’article L. 423-3-1, le juge...
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis.
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois. Il s’agit d’un amendement de coordination rédactionnelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 204, présenté par MM. Bizet et Houel, est ainsi libellé :
Alinéa 44
Remplacer les mots :
peut ordonner
par le mot :
ordonne
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Le présent amendement vise à rendre obligatoire la publicité dès le prononcé de la première décision de responsabilité, et ce sans attendre l’issue d’éventuels recours.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Je pense préférable de laisser la liberté au juge de choisir. Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 555, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 49
Remplacer les mots :
dont le préjudice a été réparé au terme de la procédure
par les mots :
qui en ont demandé le bénéfice
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Une nouvelle fois, avec cet amendement, il s’agit de s’assurer que la procédure de l’opt in est respectée tout au long de la procédure d’action de groupe.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que les décisions en cause ont autorité de la chose jugée à l’égard des membres du groupe qui en ont demandé le bénéfice.
Ne pourront voir leur préjudice réparé que les consommateurs ayant fait une démarche en ce sens. L’adhésion au groupe vaut consentement à un accord homologué. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 506 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour explication de vote sur l'article.
Mme Élisabeth Lamure. À l’issue de l’examen de cet article 1er, je veux faire part de mon point de vue, que partagent, je pense, nombre de mes collègues de l’opposition.
Les membres du groupe UMP avaient commencé l’examen du présent projet de loi avec la volonté de participer aux débats et dans un esprit constructif, comme lors des travaux de la commission des affaires économiques au mois de juillet dernier.
Malheureusement, nous le constatons, cet examen a plutôt mal débuté, puisqu’aucun des vingt-neuf amendements déposés par mon groupe sur l’article 1er n’a été adopté, pas même les amendements purement rédactionnels !
Je veux bien admettre que certaines précautions rédactionnelles rendent la loi bavarde. Mais je prendrai un exemple. En donnant l’avis de la commission des affaires économiques sur l’amendement n° 538, M. Bourquin a indiqué que l’introduction de la condition d’un nombre significatif de consommateurs pour lancer une action de groupe lui paraissait être une précision floue et que le filtre des associations lui semblait suffisant. Or tel qu’il est actuellement rédigé, le projet de loi ne souffre pas d’en dire trop mais plutôt pas assez.
De même, vous n’avez pas jugé utile d’adopter l’amendement n° 543, qui avait pour objet d’éviter que des entreprises françaises ou étrangères présentes sur le territoire français ne connaissent des atteintes irréversibles à leur image. La commission des affaires sociales a adopté la même position à l’égard des amendements nos 556 et 557, qui visent à empêcher la mise en œuvre d’actions de groupe déclenchées antérieurement à des décisions définitives des autorités de concurrence. Nous voulions ainsi garantir le respect du principe de la rétroactivité des lois.
J’en viens au point le plus critique peut-être de l’article 1er : l’action de groupe simplifiée, qui constitue un véritable obstacle à l’adhésion de mon groupe à la procédure d’action de groupe. (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.)
Les arguments avancés par les membres du groupe UMP étaient pertinents. Sans beaucoup d’illusion, nous avons proposé soit de supprimer la section portant sur l’action de groupe simplifiée, soit d’adopter un amendement de repli, qui avait pour objet de garantir les droits de la défense. D’ailleurs, cette dernière proposition n’était pas hors-sujet, puisque la commission des lois a déposé un amendement en ce sens.
En résumé, nous sommes déçus que le Gouvernement n’ait ostensiblement pas tenu compte des propositions de l’opposition, alors que nous étions tout à fait ouverts à la discussion. Nous pensions que le Gouvernement travaillerait avec tous les groupes de cette assemblée.
Étant donné la faculté d’écoute limitée dont vous avez fait preuve à notre égard malgré nos bonnes dispositions, la fin de l’examen du présent projet de loi risque d’être bien longue, voire pour nous superflue. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, rapporteur.
M. Martial Bourquin, rapporteur. Ma chère collègue, nous avons mené ensemble les auditions. La commission des affaires économiques a travaillé de façon ouverte. Nous avons entendu l’ensemble des groupes professionnels, y compris ceux d’entre eux qui se posaient de nombreuses questions sur la mise en place de l’action de groupe, simplifiée ou non.
Au fil de ces auditions, nous avons constaté que les préoccupations se dissipaient. Surtout, les personnes entendues ont compris que, avec le filtre des seize associations et toutes les précautions juridiques qui ont été prises, l’action de groupe proposée par le Gouvernement et enrichie par le Parlement était équilibrée. En effet, elle protège les consommateurs et leur donne la possibilité de faire valoir des droits et de requérir des moyens matériels auprès de professionnels lorsqu’ils sont lésés. Et, point le plus important, nous avons fait en sorte d’assurer un certain équilibre à ces professionnels. Même de grandes organisations professionnelles représentant le patronat comme la CGPME ont été convaincues que l’action de groupe à la française était équilibrée.
Lorsque l’on élabore la loi, il faut veiller à ce qu’elle soit fluide, compréhensible, accessible, cohérente, ce qui nous conduit naturellement à rédiger les textes les plus simples mais aussi les plus précis possibles. À cet égard, des efforts ont été réalisés ; le travail de la commission des lois a été pris en compte. Il en résulte un texte extrêmement équilibré et d’une importance majeure. C’est pourquoi j’appelle mes collègues à le voter pour que, après trente ans de promesses émanant de tous les gouvernements, de gauche comme de droite, soit enfin créée dans notre pays une action de groupe assortie d’une action de groupe simplifiée, qui est plus rapide que la procédure normale tout en offrant les mêmes garanties de sécurité aux consommateurs comme aux professionnels.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote sur l'article.
M. Jean-Jacques Mirassou. Je serai bref, M. Bourquin ayant déjà apporté de nombreux éléments.
Incontestablement, on peut qualifier le présent texte d’« historique » sans galvauder cet adjectif, parce que c’est la première fois dans l’histoire de notre pays que les consommateurs vont pouvoir faire valoir leurs droits de manière claire, efficace et positive.
Martial Bourquin a raison de le répéter : l’introduction dans notre droit de l’action de groupe a été entreprise voilà plusieurs années, pour ne pas dire plusieurs décennies, mais de multiples raisons ont empêché la démarche d’aboutir.
La volonté du groupe socialiste, partagée bien sûr par le Gouvernement, était d’arriver à une solution équilibrée : il s’agissait de permettre aux consommateurs de faire valoir leurs droits, ceux-ci, nous le savons bien, étant généralement perdants en cas de conflit avec un professionnel. Désormais, ils recouvreront leurs droits. Je pense que la solution équilibrée à laquelle nous sommes parvenus est la bonne, car elle n’est pas outrancièrement contraignante pour les fabricants ou les vendeurs.
Madame Lamure, vos propos ont laissé penser que votre décision était prise avant même que la discussion n’ait lieu dans cette assemblée. (Protestations sur les travées de l'UMP.) Vous avez participé à ce débat avec des idées préconçues. Le déroulement des travaux de la commission des affaires économiques a largement démontré que la volonté de dialogue du rapporteur et des membres du groupe socialiste était réelle.
Par conséquent, et eu égard aux pesanteurs historiques que je rappelais, votre volonté délibérée de ne pas voter ce texte peut être considérée comme un acte manqué. Bien entendu, pour sa part, le groupe socialiste le votera avec enthousiasme. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le vote de l’article 1er est un moment important de l’examen du présent projet de loi, car le Sénat, après l’Assemblée nationale, a la possibilité d’introduire dans le droit français une procédure entièrement inédite. Les associations de consommateurs et, plus largement, l’ensemble des Français la réclament depuis longtemps et, depuis plus d’une décennie, tous les partis y sont favorables. La dernière campagne présidentielle a mis en évidence ce consensus.
J’ai trouvé nos débats d’un grand intérêt, qu’ils portent sur le contenu de l’action de groupe ou sur les différents aspects de la procédure. Fallait-il, notamment, retenir la procédure de l’opt in ou celle de l’opt out ? J’espère vous avoir démontré que nous n’avons pas fait le choix de l’opt out, autrement nous aurions pris un risque considérable.
Madame Lamure, je suis quelque peu étonné. En effet, lors de la dernière campagne présidentielle, le candidat du groupe UMP s’est prononcé en faveur de l’action de groupe. Pourtant à l’Assemblée nationale vos collègues se sont abstenus sur la question et, si je vous comprends bien, vous pourriez ne pas la voter dans cette enceinte, sauf si seule demeure l’action en représentation conjointe, qui suffit, selon vous, comme voie de recours collectif.
Je pense que le travail considérable de coproduction qui a été réalisé par l’Assemblée nationale, le Sénat, qui a d’ailleurs historiquement précédé sur ce point l’Assemblée nationale, et le Gouvernement va renforcer le bouclier dont disposent les consommateurs contre les préjudices qu’ils subissent dans le domaine économique. Effectivement, le présent texte rééquilibre les relations entre les entreprises et les consommateurs lésés qui ne parviennent pas à obtenir gain de cause.
Par conséquent, à l’instar de M. le rapporteur, dont je salue le travail et la patience, comme l’action de l’ensemble des personnes ayant travaillé sur ce texte, je me réjouis du compromis atteint. Je vous appelle, mesdames, messieurs les sénateurs, à voter l’article 1er, qui représente un progrès palpable, tangible pour les Français.
De surcroît, l’action de groupe redonne aux Français du pouvoir sur leur vie. C’est la raison pour laquelle les représentants des Français devraient tomber d’accord sur cette mesure.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 334 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 306 |
Pour l’adoption | 177 |
Contre | 129 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Articles additionnels après l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 278, présenté par Mme Aïchi, M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les modalités techniques et juridiques d’un élargissement de l’action de groupe à tout type de préjudices, subis par toute personne physique.
La parole est à Mme Leila Aïchi.
Mme Leila Aïchi. Cet amendement vise à demander l’établissement d’un rapport sur les modalités d’extension de l’action de groupe.
En effet, si l’introduction de l’action de groupe en droit français constitue une avancée attendue depuis longtemps et ouvre la voie à un droit nouveau et à une protection indispensable pour le citoyen consommateur, elle reste imparfaite en l’état.
L’action de groupe circonscrite à un seul type de préjudice matériel subi et au seul champ de la consommation crée une rupture d’égalité des citoyens devant la loi. Se trouvent ainsi écartés les citoyens victimes des trop nombreux scandales sanitaires et environnementaux, tels que celui de l’amiante, du Médiator, ou des prothèses PIP.
En l’état actuel de la loi, les victimes en seront réduites à se faire rembourser des boîtes de médicaments ou des prothèses en silicone sans percevoir la moindre compensation pour le préjudice en matière de santé. Se trouvent également exclus les PME ou les petits porteurs ayant subi un préjudice qui ne relève pas du droit de la consommation mais du droit des sociétés ou du droit boursier.
Il est donc souhaitable de se donner les moyens d’apporter une réponse claire et adaptée à ces situations de préjudice de masse. La remise par le Gouvernement d’un rapport sur les modalités de l’élargissement de l’action de groupe traduirait sa volonté de s’engager dans cette voie. À terme, il pourrait en résulter la présentation par la garde des sceaux d’un projet de loi sur l’action de groupe globale concernant tout type de préjudice.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. L’amendement qui vient d’être présenté est satisfait par l’alinéa 8 de l’article 2 du projet de loi qui précise que le Gouvernement remettra au Parlement, dans un délai de trente mois après la promulgation de la loi, un rapport évaluant les conditions de mises en œuvre de l’action de groupe sur cette période mais étudiera aussi les évolutions possibles de l’action de groupe dans les domaines de la santé et de l’environnement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Aïchi, l’amendement n° 278 est-il maintenu ?
Mme Leila Aïchi. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 509, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre V du livre IV du code monétaire et financier est complété par un article L. 452–... ainsi rédigé :
« Art. L. 452–... - Les associations de défense des investisseurs agréées en application de l'article L. 452–1 peuvent agir devant toute juridiction, dans les conditions fixées aux articles L. 423–1 à L. 423–10 et L. 423–13 à L. 423–18 du code de la consommation, afin d'obtenir la réparation des préjudices individuels subis par un groupe d’investisseurs, placés dans une situation identique ou similaire, et causés par un même professionnel ou émetteur, du fait de manquements à ses obligations légales, règlementaires ou contractuelles, à l'occasion de l’émission et de la vente d'instruments financiers, ou de la fourniture de services d'investissement. »
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n’ai pas voté l’article 1er, estimant que la construction juridique de l’action de groupe étant encore imparfaite. (M. François Fortassin s’exclame.)
M. Roland Courteau. Ah !
M. Daniel Raoul. C’est : « Peut mieux faire » !
M. Philippe Marini. Pour une série de raisons que je pourrais développer…
M. Roland Courteau. Non !
M. Philippe Marini. … – mais le président Raoul nous a tout à l'heure appelés à la concision –, je n’ai donc pas voté cet article 1er. Je pourrais bien sûr développer ces aspects par ailleurs si vous le souhaitez.
Dès lors que l’action de groupe fait son entrée dans notre arsenal juridique, encore faut-il qu’elle s’applique à toutes les situations qui le justifieraient. C’est pourquoi j’ai déposé cet amendement qui vise à permettre aux associations de défense des épargnants agréées par l’Autorité des marchés financiers d’engager, au même titre que les associations de défense des consommateurs, une action de groupe dans le domaine de la vente de produits financiers. Ces associations agréées sont, me semble-t-il, au moins aussi aptes que les associations généralistes à intervenir dans un domaine qui est très technique.
L’amendement ouvre également la possibilité d’engager à travers une action de groupe la responsabilité des émetteurs d’instruments financiers, non pas seulement celle des professionnels qui commercialisent ces instruments. Je m’empresse de dire à la commission et au Gouvernement que, pour le cas où ils feraient une ouverture en faveur de mon amendement, si l’extension aux émetteurs leur posait problème, je pourrais tout à fait rectifier l’amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Un débat s’est engagé au sein de la commission des affaires économiques sur cette proposition, qui, me semble-t-il, était l’objet de trois amendements semblables.
Bien sûr, cet amendement va au-delà du présent projet de loi. Lors de l’examen tout à l’heure d’un amendement de nos collègues du groupe CRC, il a bien été précisé que l’action de groupe s’appliquait au domaine bancaire.
Je voudrais que M. Marini précise sa pensée. En effet, il n’est pas souhaitable d’étendre l’action de groupe aux préjudices causés non pas par des professionnels mais par les émetteurs d’instruments financiers. Cependant, s’agissant de la défense des petits porteurs, qui sont parfois spoliés – quelques exemples assez flagrants en témoignent –, la commission des affaires économiques s’est demandé, et elle souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement sur cette question, s’il serait possible d’étendre l’action de groupe, en matière de défense des petits porteurs notamment.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à élargir à des associations de défense des investisseurs agréées la possibilité d’engager une action de groupe.
Le projet de loi, nous l’avons déjà dit, entend réserver la possibilité d’introduire une action de groupe aux seules associations de consommateurs agréées et représentatives sur le plan national. Ce choix est en cohérence avec la détermination du champ pour la mise en œuvre de ce type de procédure et la nature des intérêts pris en considération, notamment l’objet social de ces associations.
Il s’agit en effet d’introduire en droit français une procédure permettant le traitement des contentieux de consommation de masse – par exemple, la téléphonie mobile, la vente à distance, mais aussi les services financiers, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, notamment hier en réponse à une question du sénateur Le Cam – pour lesquels seules les associations de consommateurs sont susceptibles d’avoir un intérêt à agir, à savoir la défense de l’intérêt collectif et des intérêts individuels des consommateurs.
Pour autant, la réparation des préjudices économiques subis par des consommateurs à l’occasion de la commercialisation de services financiers dont la cause commune réside dans un ou des manquements d’un même professionnel, quel qu’il soit, à ses obligations légales ou contractuelles peut faire l’objet d’une action de groupe.
Les manquements aux obligations légales peuvent prendre la forme de pratiques commerciales trompeuses par omission en raison de l’absence de mentions inhérentes aux risques de perte en capital investi pour un tel placement financier. À cet égard, on peut, sans citer le nom de la banque, évoquer un exemple très parlant, le placement dit « Helvet Immo ». Il se pourrait qu’il y ait eu un défaut de conseil sur les risques liés à ce placement dans une devise étrangère, qui s’est traduit par des pertes en capital très importantes pour les consommateurs.
Il peut également s’agir de manquements aux obligations contractuelles, lors de l’exécution du contrat mais aussi lors de sa formation, si le professionnel ne respecte pas le devoir d’information, de conseil ou de mise en garde auquel il est tenu.
Tous ces manquements peuvent d’ores et déjà faire l’objet d’une action de groupe. C’est la raison pour laquelle, monsieur le rapporteur, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement de M. Marini.
M. le président. Monsieur Marini, l’amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Marini. Je vais le maintenir.
J’accepte, pour tenir compte de l’analyse de la commission et ne pas entrer dans un débat peut-être prématuré sur la responsabilité des émetteurs dans le cadre de telles actions de groupe, de rectifier cet amendement en enlevant les mots « ou émetteur » puis les mots « de l’émission et ».
J’avoue ne pas avoir bien saisi les arguments du ministre. Dès lors que cette innovation juridique est entrée dans notre droit, n’est-il pas logique que des associations agréées par l’Autorité des marchés financiers, qui ont donc fait l’objet d’un certain contrôle quant à leurs qualifications, leurs compétences, l’honorabilité de leurs dirigeants, puissent être les vecteurs d’une action de groupe dans le domaine de l’épargne ?
La réponse fermée du ministre m’a surpris parce qu’il me semblait avoir fait, avec cet amendement, un pas significatif dans le sens du projet de loi.
Donc, en vous demandant, monsieur le président, de bien vouloir tenir compte de la rectification que j’y ai apportée, je maintiens cet amendement, que je voterai avec conviction.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 509 rectifié, présenté par M. Marini et ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre V du livre IV du code monétaire et financier est complété par un article L. 452-... ainsi rédigé :
« Art. L. 452-... - Les associations de défense des investisseurs agréées en application de l'article L. 452-1 peuvent agir devant toute juridiction, dans les conditions fixées aux articles L. 423-1 à L. 423-10 et L. 423-13 à L. 423-18 du code de la consommation, afin d'obtenir la réparation des préjudices individuels subis par un groupe d’investisseurs, placés dans une situation identique ou similaire, et causés par un même professionnel, du fait de manquements à ses obligations légales, réglementaires ou contractuelles, à l'occasion de la vente d'instruments financiers, ou de la fourniture de services d'investissement. »
La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Monsieur le ministre, pas vous quand même ! Vous nous avez servi un argumentaire prédigéré, très technique mais je ne puis croire qu’il corresponde à vos convictions.
On n’est pas seulement sur des considérations techniques. En plus, notre collègue Marini a fait une ouverture, puisqu’il écarte pour l’instant la possibilité d’engager à travers une action de groupe la responsabilité des émetteurs d’instruments financiers.
On revient d’une crise extrêmement grave, les exemples d’abus de financiers vis-à-vis de petits porteurs, de petits épargnants ont été légion. On sait bien en outre que, dans ces cas-là, la technicité du domaine, l’isolement des épargnants rendent légitime, tout autant que dans le droit de la concurrence ou de la consommation, l’action collective. Dès lors que cette action collective, cette procédure existe, vous ne pouvez pas, monsieur le ministre, exclure ces abus de son champ, car ce serait véritablement aller à l’encontre de l’intérêt général.
On a tous encore en tête ces récents abus, que caractérisent un phénomène de massification, puisqu’un nombre croissant de petits épargnants en sont victimes, mais aussi une très grande complexité, une technicité, qui justifie de pouvoir engager l’action judiciaire.
Il faut que le Gouvernement, notamment, vous, monsieur le ministre, fasse preuve d’esprit d’ouverture en émettant un avis favorable sur cet amendement n° 509 rectifié qui tend à un élargissement de l’action de groupe. Sinon, j’en appelle à tous mes collègues pour que le Sénat, dans sa sagesse, puisse lui faire droit. (M. Jean-François Husson s’exclame.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. Monsieur le ministre, je ne comprends pas votre argumentation. Il y a un véritable problème. Il arrive que des petits porteurs soient lésés. On vient de voter la création de l’action de groupe. Je ne comprends pas pourquoi vous voulez en réserver l’exclusivité aux associations de consommateurs, d’autant que je n’ai pas l’impression qu’elles disposent de compétences reconnues dans le domaine de la finance.
Ce que propose M. Marini, c’est de permettre aux associations de défense des épargnants agréées par l’Autorité des marchés financiers d’engager une action de groupe. Je pense que cela rassurerait les consommateurs. Par conséquent, je ne comprends pas que vous souhaitiez réserver le privilège, ou l’exclusivité de l’action de groupe aux associations de consommateurs, surtout dans un domaine très technique. Je vous comprends d’autant moins que vous avez précédemment certifié à d’autres auteurs d’amendement que le secteur bancaire était concerné.
M. Philippe Marini. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, rapporteur.
M. Martial Bourquin, rapporteur. Le débat clarifie un peu les positions. D’abord, il est assez contradictoire de voter contre l’action de groupe puis de la revendiquer pour les instruments financiers.
M. Gérard Cornu. À partir du moment où c’est voté, c’est voté !
M. Martial Bourquin, rapporteur. On assume tous nos contradictions, on en a tous, mais celle-là est tellement apparente que je permets de la souligner.
Ensuite, je voudrais qu’une chose soit claire, parce que la question a déjà été posée en commission des affaires économiques. Les petits épargnants spoliés pourront engager une action de groupe contre leur banquier, tout simplement parce que le banquier est un professionnel et que les petits épargnants spoliés sont des consommateurs lésés. Il est donc faux de dire qu’une partie de la population n’aura pas accès à l’action de groupe. Je le répète, les petits épargnants pourront défendre leurs droits grâce aux dispositifs de l’article 1er, qu’il s’agisse de l’action de groupe standard ou de l’action de groupe simplifiée.
Par ailleurs, Philippe Marini a retiré un élément de son amendement.
M. Philippe Marini. J’ai retiré la référence aux émetteurs d’instruments financiers, à votre demande !
M. Martial Bourquin, rapporteur. Vous avez en effet retiré cette référence à notre demande.
On vit une crise terrible,…
M. Philippe Marini. Oui.
M. Martial Bourquin, rapporteur. … qui a été déclenchée en bonne partie par le monde de la finance.
M. Philippe Marini. Oui, oui…
M. Martial Bourquin, rapporteur. Il ne faudrait pas qu’on fasse aujourd’hui passer les émetteurs d’instruments financiers pour des victimes.
M. Philippe Marini. Il ne s’agit pas de cela ! C’est un contresens parfait !
M. Martial Bourquin, rapporteur. Ce sont eux qui nous ont mis dans cette situation ! Si nous sommes dans une situation difficile depuis de longues années, c’est parce que le monde de la finance s’est permis des choses et a plongé l’Europe et le monde dans la crise.
M. Philippe Marini. La finance, voilà l’ennemi !
M. Martial Bourquin, rapporteur. Nous avons la volonté de défendre les petits épargnants. Je le répète, l’action de groupe telle que nous l’avons votée permet de défendre les petits épargnants spoliés. (M. Jean-François Husson s’exclame.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je ne sais pas si je vais rassurer Bruno Retailleau. Vous avez voté contre l’action de groupe, et vous voulez déjà l’étendre ! J’en suis ravi !
M. Philippe Marini. C’est un argument politique, qui ne répond pas à mon amendement !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur Marini, si vous le permettez, je vais vous répondre sérieusement, mais j’aimerais comprendre – je ne suis pas aussi expérimenté que vous – la logique politique de votre démarche.
M. Philippe Marini. Si j’avais le temps de l’expliquer, je le ferais, mais je ne dispose pas de ce temps !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur Marini, je vais vous répondre sur le fond. Prenez le temps de m’écouter, à moins que vous ne sachiez parler et écouter en même temps. Vous entendrez ainsi mes réponses, qui pourraient vous être utiles.
M. Philippe Marini. C’est facile de faire les questions et les réponses !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Il y a deux hypothèses. Si vous avez signé un contrat de consommation, vous êtes couvert ; j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire. Par conséquent, rien ne justifie que l’on sollicite l’agrément d’une association d’investisseurs. Nous avons choisi de ne qualifier que les associations de consommateurs agréées, qui sont parfaitement capables de mener des actions de groupe. Si on acceptait votre proposition, il n’y aurait aucune raison de ne pas étendre davantage le champ ; cela reviendrait donc à ouvrir la boîte de Pandore et à remettre en cause l’équilibre du texte.
La seconde hypothèse concerne les détenteurs d’actions sèches. Ils sont exposés à l’aléa boursier, et nous ne pouvons pas couvrir par l’action de groupe les risques liés à l’aléa boursier.
M. Philippe Marini. Cela n’a rien à voir !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Quand il y a un contrat de consommation, ou un produit de placement, comme dans le cas d’Helvet Immo, que j’ai évoqué tout à l’heure, l’action de groupe peut être déclenchée. En revanche, il n’est pas possible de recourir à l’action de groupe pour protester contre le cours défavorable d’une action.
M. Philippe Marini. Ce n’est pas du tout ce que je propose ! Vous faites une caricature !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur Marini, ce n’est pas une caricature ! Si vous aviez assisté aux débats, vous auriez déjà entendu dix fois la raison pour laquelle nous avons choisi ce verrou.
M. Philippe Marini. Pas du tout ! Vous répondez à côté !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Vous arrivez après l’examen de l’article 1er pour poser une question à laquelle le Gouvernement et le rapporteur ont déjà répondu dix fois en commission et dix fois en séance plénière. Je me permets de faire la même réponse pour la onzième fois : oui, l’équilibre de ce projet de loi, ce sont les associations de consommateurs agréées, et voilà pourquoi le Gouvernement est défavorable à votre amendement. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 509 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2
I. – (Non modifié) La sous-section 2 de la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre II du code de l’organisation judiciaire est complétée par un article L. 211-15 ainsi rédigé :
« Art. L. 211-15. – Des tribunaux de grande instance spécialement désignés connaissent des actions de groupe définies au chapitre III du titre II du livre IV du code de la consommation. »
II. – À l’article L. 532–2 du même code, la référence : « et L. 211–12 » est remplacée par les références : « , L. 211–12 et L. 211–15 ».
III. – (Non modifié) L’action exercée sur le fondement du chapitre III du titre II du livre IV du code de la consommation ne peut être introduite pour la réparation des préjudices causés par des manquements au titre II du livre IV du code de commerce ou aux articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ayant fait l’objet d’une décision constatant ces manquements, et qui n’est plus susceptible de recours, intervenue avant la date de publication de la présente loi.
III bis. – Après le troisième alinéa de l’article L. 462-7 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’ouverture d’une procédure devant l’Autorité de la concurrence, une autorité nationale de concurrence d’un autre État membre de l’Union européenne ou la Commission européenne interrompt la prescription de l’action civile. L’interruption résultant de l’ouverture de cette procédure produit ses effets jusqu’à la date à laquelle la décision de ces autorités ou, en cas de recours, de la juridiction compétente est définitive. »
IV. – (Non modifié) Le III du présent article est applicable dans les îles Wallis et Futuna.
V. – Trente mois au plus tard après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les conditions de mise en œuvre de la procédure d’action de groupe et propose les adaptations qu’il juge nécessaires. Il envisage également les évolutions possibles du champ d’application de l’action de groupe, en examinant son extension aux domaines de la santé et de l’environnement.
M. le président. L'amendement n° 238 rectifié, présenté par M. Tandonnet, Mmes Dini, Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéas 1 à 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement a pour objet de supprimer la désignation de tribunaux spécialisés pour traiter des actions de groupe. En effet, pourquoi créer des tribunaux d’exception ? Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, la spécialisation de quelques tribunaux de grande instance, TGI, me semble totalement inadaptée.
Cela aurait des conséquences manifestement négatives. La spécialisation est inutile, dans la mesure où tous les TGI sont capables de traiter des affaires relevant du droit de la consommation ; c’est même leur quotidien. Les TGI de province ont d’ailleurs souvent été à la tête de la défense des consommateurs.
La désignation de tribunaux spécialisés poserait un problème d’éloignement de la justice par rapport aux citoyens, alors que cette matière touche tous les Français, tous les consommateurs ordinaires. Il faudra délocaliser des contentieux locaux vers des métropoles régionales, car tous les litiges ne seront pas de portée nationale. Il y aura donc des actions de groupe menées localement par cent ou deux cents consommateurs contre des entreprises défaillantes.
Or j’ai lu dans le rapport de nos collègues qu’il n’y aurait que huit tribunaux spécialisés : sept pour la France métropolitaine et un pour l’outre-mer. C’est une manière d’éloigner encore la justice des citoyens. À mon avis, c’est intenable. Aussi, je vous propose de renoncer à désigner des TGI spécialisés pour l’action de groupe et de nous en tenir au droit commun, afin que le dispositif soit adapté à tous les litiges, tant locaux que nationaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Il est souhaitable, en matière de droit de la consommation en général et donc en matière d’actions de groupe, de disposer de TGI spécialisés, comme c’est le cas en matière de propriété littéraire ou artistique, de marque communautaire, ou encore de reconnaissance des jugements d’adoption rendus à l’étranger. Il est vraiment préférable de disposer de tribunaux spécialisés.
Je reprends les arguments du rapport Béteille-Yung : « il convient de tenir compte des capacités des tribunaux à prendre en charge les actions de groupe. Celles-ci peuvent présenter un caractère massif et réunir plusieurs milliers de requérants. Or les greffes des juridictions les plus petites ne sont pas dimensionnés pour traiter un nombre trop élevé de demandes. »
La question de la proximité, que vous soulevez, se pose effectivement, mais nous avons besoin de tribunaux spécialisés capables de juger dans les délais les plus rapprochés et de la façon la plus appropriée. « La concentration des contentieux dans quelques juridictions – je cite à nouveau le rapport Béteille-Yung – est neutre pour le consommateur. En revanche, elle évite à l’entreprise de devoir faire face à plusieurs instances dispersées sur tout le territoire, alors qu’elles concernent la même affaire. »
Prenons un exemple. Un professionnel rencontre des consommateurs dans une série de territoires. Il est bon qu’il y ait un TGI spécialisé pour faire en sorte que le jugement soit rendu dans les meilleures conditions. Du reste, la proposition consistant à réserver la compétence en matière d’action de groupe à quelques TGI spécialisés a fait l’objet d’un très large accord parmi les personnes entendues par Laurent Béteille et Richard Yung.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je voudrais d’abord confirmer les éléments apportés par M. le rapporteur s’agissant des avis rendus sur l’opportunité de confier les actions de groupe à des TGI spécialisés. À nos yeux, il s’agit de faciliter le regroupement des actions de groupe et de favoriser l’harmonisation des décisions, afin d’éviter l’éparpillement des doubles saisines. Le dispositif contribuera à l’efficacité et à la réactivité de la justice.
En effet, les TGI sont composés de magistrats professionnels qui apprécieront sereinement les actions de groupe dont ils seront saisis. Nous estimons que la spécialisation des tribunaux et le niveau du tribunal compétent – TGI – constituent des gages de fiabilité. Il est prévu – je vous le rappelle, ou je vous en informe – que les TGI spécialisés seront ceux qui sont déjà compétents en matière de pratiques restrictives de concurrence ; leur liste est d’ores et déjà établie par le décret n° 2009–1384 du 11 novembre 2009 : Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nancy, Paris, Rennes et Fort-de-France.
M. le président. La parole est à M. Alain Bertrand, pour explication de vote.
M. Alain Bertrand. L’intervention de notre collègue Henri Tandonnet me paraît frappée au coin du bon sens. J’ai bien entendu ce qu’a dit M. le ministre, mais, s’il faut des tribunaux spécialisés, pour toutes les raisons avancées par M. le rapporteur, ce qui peut aussi s’entendre, je ne vois pas pourquoi cela tomberait, comme à chaque fois qu’il s’agit, dans ce pays, de spécialiser quelque chose ou de créer des écoles ou des universités, sur Lille, Toulouse, Marseille, Lyon, Bordeaux et compagnie.
On pourrait très bien envisager que certains tribunaux spécialisés soient installés ailleurs sur le territoire de la République française, qui s’étend aussi aux Pyrénées, aux Alpes, aux Vosges, au Jura et au Massif central. On pourrait très bien spécialiser le TGI de Rodez ou…
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. De Mende ! (Sourires.)
M. Alain Bertrand. … de Mende, en effet, ou d’ailleurs !
Je tenais à le dire. J’espère que Mme Cécile Duflot présentera bientôt son projet de loi sur l’égalité des territoires, parce que, à force de tout concentrer, depuis les premières décentralisations, dans les capitales régionales, nous, les humbles, les sans-grade, les petits, qui sommes républicains, laïques et attachés à la devise de notre chère France, nous n’y retrouvons plus nos petits.
C’est pour cette raison que, tout en ayant entendu le rapporteur et le ministre, je m’associerai à la démarche de notre collègue de l’UDI-UC.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Mazars, pour explication de vote.
M. Stéphane Mazars. Je m’associerai moi aussi à l’amendement de notre collègue Henri Tandonnet. Le maillage judiciaire de notre territoire a déjà été bien mis à mal au cours des dernières années, notamment par la réforme de la carte judiciaire. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Cela suffit maintenant ! Beaucoup de TGI ont déjà été supprimés ; c’était dans d’autres temps. Il faut arrêter de vider de leur contentieux ceux qui existent encore. Bientôt, comme le disait notre collègue Alain Bertrand, on ne pourra être jugé que dans les grandes métropoles.
Pour revenir au sujet qui nous intéresse, le droit de la consommation n’est pas, du point de vue technique, une matière relevant de juridictions hyperspécialisées. Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué le droit des marques : c’est un contentieux très technique, ce qui justifie qu’il soit confié à des TGI spécialisés.
Aujourd’hui, le droit de la consommation est déjà traité, en ce qui concerne les contentieux individuels, par les TGI, voire par les tribunaux d’instance, puisqu’il y a beaucoup de matières de consommation qui relèvent de la compétence de ces derniers. On peut donc très bien convenir que, demain, tous les TGI de France pourront connaître du contentieux de l’action de groupe.
S’il y a plusieurs TGI saisis, on regroupera les dossiers auprès de celui qui a été saisi le premier, comme cela se fait de façon très classique dans d’autres domaines.
Pour en revenir au contentieux de la concurrence, il est prévu que, lorsqu’ils connaîtront d’une question technique en matière de concurrence dans le cadre d’une action de groupe, les TGI seront liés de façon irréfragable par ce qui aura déjà été apprécié par la commission compétente en amont.
Aussi, à mon sens, il n’y a pas matière aujourd’hui à vider nos TGI de leurs compétences en matière de droit de la concurrence et de droit de la consommation dans le cadre des actions de groupe.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Nous soutiendrons cet amendement, parce que nous sommes très attachés à la proximité. Il pourra arriver que des personnes vivant en zone rurale soient à l’origine d’une action de groupe et il ne faudra pas qu’elles soient obligées de se déplacer loin, ce qui entraînerait beaucoup de dépenses supplémentaires. (M. Yann Gaillard s’exclame.)
Par ailleurs, nous faisons confiance au professionnalisme de l’ensemble des TGI de France, qui sauront très bien faire. Pour nous, il n’est pas nécessaire qu’il y ait des TGI spéciaux pour la consommation.
M. le président. La parole est à M. Henri Tandonnet, pour explication de vote.
M. Henri Tandonnet. Je souhaite répondre au rapporteur sur le terrain de la procédure. Lorsqu’il dit que les tribunaux de grande instance ordinaires ne pourront pas faire face à l’afflux des victimes, il commet une erreur car, justement, l’action de groupe permettra de faire représenter l’ensemble des victimes par une seule partie, qui sera l’association agréée. Il y aura donc une mise au rôle avec une seule partie.
Sur le fond, je me demande pourquoi il faudrait spécialiser des tribunaux, puisqu’il a été dit lors des débats d’hier que le fond du droit, c’est-à-dire le droit de la réparation, le droit des contrats, le respect des obligations légales, ne changeait pas. C’est le droit ordinaire qui s’appliquera et il s’agit seulement de regrouper les victimes, qui pourront agir par procureur.
Monsieur le président, le groupe UDI-UC demande un scrutin public sur cet amendement.
M. Alain Fouché. Très bien !
M. Jean-François Husson. Nous sommes majoritaires !
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. Je soutiens tout à fait ce qui vient d’être dit. Nous avons des tribunaux qui fonctionnent très bien et qui peuvent parfaitement statuer sur ce genre d’affaires.
J’entendais dire tout à l’heure que le précédent gouvernement avait fermé un certain nombre de tribunaux. C’est vrai, mais l’actuel Président de la République avait bien indiqué au cours d’une réunion qu’il était contre ces fermetures et, sauf erreur de ma part, son programme prévoyait la réouverture d’un certain nombre de tribunaux. À ma connaissance, rien n’a été fait et nous attendons toujours. (Protestations sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
M. Christian Cambon. Mme Taubira va régler cela !
M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.
M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voterai cet amendement.
M. Jean-François Husson. Très bien !
M. François Fortassin. Prenons un exemple très simple : une entreprise locale, quelle que soit sa production, peut commettre une erreur qui cause un dommage à plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de consommateurs.
Quelle va être la réaction, localement, si cette affaire doit être jugée à Lille ou à Bordeaux, alors que l’entreprise se trouve à Perpignan ? Les gens penseront que le tribunal local est incompétent et que, dès lors, il peut très bien être fermé !
M. Jean-Jacques Mirassou. C’est une extrapolation !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. J’ai entendu les arguments qui ont été développés par les différents orateurs.
À mes yeux, l’argument de la proximité tombe, puisque le consommateur se dirigera vers son association de consommateurs et le relais qu’elle a sur le terrain. Ce dernier prendra ensuite en charge la procédure. Tel est l’objectif de l’action de groupe : passer par une association pour ne pas avoir à réaliser toutes les démarches soi-même. La proximité sera donc assurée.
Ensuite, s’il n’y a pas d’instances spécialisées pour traiter des actions de groupe, je tiens à vous prévenir par anticipation des risques de conflits de jurisprudence pouvant naître.
Pour nous, il ne s’agit pas de remettre en cause le lien entre le justiciable et son territoire en dessaisissant les TGI existants. Le consommateur, qu’il soit de Perpignan, de Castelnaudary, de Saint-Renan ou de Senlis, victime dans sa commune d’un préjudice causé par une entreprise locale ou éloignée, souhaite obtenir réparation, peu importe que la décision soit prise très loin ou pas.
En réalité, dans ce genre de contentieux, il suivra l’évolution du dossier soit par le biais de l’association de consommateurs, qui lui écrira ou lui enverra un mail, soit par la presse. À mon sens, l’intérêt du consommateur, pour éviter notamment les conflits de jurisprudence, c’est que ce soit des tribunaux de grande instance spécialisés qui traitent de ces dossiers. (M. Jean-Jacques Mirassou opine.)
C’est la raison pour laquelle nous avons fait ce choix. J’ai entendu des arguments contraires,…
Un sénateur de l’UMP. Qui se tiennent !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. … qui se tiennent, en effet, mais, du point de vue de l’intérêt du consommateur, je réaffirme, au nom du Gouvernement, qu’il doit y avoir des tribunaux spécialisés.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 238 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe de l'UDI-UC.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 335 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l’adoption | 207 |
Contre | 139 |
Le Sénat a adopté.
M. Alain Fouché. Juridiquement, c’est une bonne chose !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 556, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
III. - L'action exercée sur le fondement du chapitre III du titre II du livre IV du code de la consommation ne peut être introduite pour la réparation des préjudices causés par des manquements au titre II du livre IV du code de commerce ou aux articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ayant fait l'objet d'une décision de constatation des manquements intervenue avant la date de publication de la présente loi, quelle que soit la date à laquelle elle est devenue définitive.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. L’alinéa 4 contient une disposition transitoire prévoyant que seules les décisions des autorités de concurrence intervenues postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi peuvent servir de fondement à l’action de groupe. Cette rédaction n’est pas claire, car on ne comprend pas la situation des décisions intervenues avant l’entrée en vigueur de la loi, mais devenues définitives après.
Cet amendement vise donc à éviter tout risque de mauvaise interprétation.
M. le président. L'amendement n° 667, présenté par M. M. Bourquin, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
, et qui n'est plus susceptible de recours, intervenue avant
par les mots :
qui n'est plus susceptible de recours à
La parole est à M. Martial Bourquin, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 556.
M. Martial Bourquin, rapporteur. L’amendement n° 667 vise à clarifier la formulation de l’alinéa 4 de cet article, dont l’ambiguïté a été soulevée par Élisabeth Lamure et le groupe UMP.
L’alinéa 4 de l’article 2 prévoit en effet que, en matière de concurrence, une action de groupe ne pourra pas être engagée sur le fondement d’une décision d’une autorité de la concurrence constatant des manquements, et qui n’est plus susceptible de recours, intervenue avant la publication de la loi.
L’ambiguïté de cette formulation pose question dans le cas des décisions intervenues avant la promulgation de la loi mais devenues définitives après.
Par cet amendement, nous tenons à indiquer clairement qu’une action de groupe ne pourra être engagée sur le fondement d’une décision devenue définitive avant la promulgation de loi, ce qui correspond à l’intention du Gouvernement et de nos collègues députés.
En conséquence, je vous propose d’émettre un avis défavorable sur l’amendement n° 556 du groupe UMP…
Mme Élisabeth Lamure. Dommage !
M. Antoine Lefèvre. C’était bien tenté !
M. Martial Bourquin, rapporteur. … et de donner une issue positive à l’amendement que je viens de vous présenter, même si nous poursuivons le même objectif.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 556 et favorable à l’amendement n° 667.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour explication de vote sur l’amendement n° 556.
Mme Élisabeth Lamure. Au vu de la réponse de M. le rapporteur, il me semble que nous ne parlons pas de la même chose. À la lecture de l’alinéa 4, on ne comprend pas si c’est la décision initiale ou la décision définitive qui n’est plus susceptible de recours. Or je crains que l’amendement n° 667 ne réponde pas à cette question. Aussi, j’aurais besoin d’explications complémentaires.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 533 rectifié bis, présenté par MM. Husson, Cointat, D. Laurent, Milon et Türk, Mme Bruguière et M. Longuet, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
De même, l’action sur le fondement du chapitre III du titre II du livre IV du code de la consommation ne pourra être exercée qu’envers les contrats conclus et les manquements à des obligations légales intervenus, postérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi.
La parole est à M. Jean-François Husson.
M. Jean-François Husson. Il s’agit d’encadrer l’application de cette loi dans le temps. En effet, en l’état actuel, le projet de loi ne comporte aucune précision sur sa date d’entrée en vigueur, ce qui a des conséquences sur les possibilités de recours. On pourrait ainsi, à l’occasion d’un litige de la consommation, revenir sur des faits antérieurs à l’adoption de la loi, ce qui serait une première cause de préjudice.
De plus, cette incertitude pourrait être source d’un deuxième préjudice pour les entreprises d’assurances, puisque la responsabilité civile assurantielle suppose la constitution de provisions. De surcroît, les actions de groupe peuvent mettre en jeu des montants financiers importants, ce qui risque de déséquilibrer les comptes de ces entreprises.
Enfin, du point de vue du simple bon sens, cette absence de délimitation dans le temps est tout sauf logique !
M. le président. L’amendement n° 557, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
En ce qui concerne les actions visées au a de l’article L. 423–1, le chapitre III du titre II du livre IV du code de la consommation ne s’applique qu’aux contrats conclus et aux manquements à des obligations légales survenus postérieurement au 1er janvier 2012.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement est pratiquement identique à l’amendement que vient de présenter notre collègue.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Ces amendements sont extrêmement restrictifs, parce que les manquements intervenus après la publication de la loi, mais liés à des obligations contractées avant cette publication, ne pourraient pas faire l’objet d’une action de groupe ! Par ailleurs, les manquements aux obligations légales existant antérieurement à la loi ne pourraient pas faire non plus l’objet d’une action de groupe.
En fait, ces deux amendements annihileraient le dispositif d’action de groupe prévu par le projet de loi. Je vous propose donc, mes chers collègues, de les rejeter.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. L’avis du Gouvernement est identique à celui du rapporteur.
Je saisis cette occasion pour préciser que nous souhaitons ne pas limiter la portée de la décision et du vote que le Sénat vient d’émettre, après l’Assemblée nationale. En l’occurrence, je le répète, les pratiques anticoncurrentielles sont déjà sanctionnées par l’Autorité de la concurrence et les sociétés concernées peuvent se voir infliger une amende : dès lors que la décision n’est pas définitive, nous considérons que des actions de groupe peuvent être enclenchées dès la publication de la loi, même si les pratiques anticoncurrentielles ont été constatées avant cette publication.
Je ne peux donc pas émettre un avis favorable sur ces deux amendements qui restreignent considérablement la portée de l’action de groupe.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote sur l’amendement n° 533 rectifié bis.
M. Jean-François Husson. J’ai bien entendu les arguments de M. le rapporteur et de M. le ministre qui me semblent poser clairement un problème du point de vue de la rétroactivité des textes.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Mais non !
M. Jean-François Husson. Monsieur le rapporteur, je n’ai pas le sentiment d’être restrictif. Puisque nous parlons de droit de la consommation et de droit ouvert à des actions de groupe, notre amendement est juste, équilibré et, je le répète, logique !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 533 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 558 rectifié, présenté par Mme Lamure, M. Retailleau et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 6
1° Première phrase
Remplacer le mot :
interrompt
par le mot :
suspend
2° Seconde phrase
Remplacer les mots :
L’interruption
par les mots :
La suspension
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. L’interruption de la prescription, qui annule le délai déjà couru, ne semble pas appropriée au cas envisagé. Nous proposons de lui substituer la notion de suspension qui permet de mettre le cours du délai de prescription « entre parenthèses » pendant la durée de la procédure de sanction.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. L’alinéa 6 de l’article 2 dispose que l’ouverture d’une procédure devant une autorité de la concurrence interrompt la prescription de l’action civile, c’est-à-dire conduit à « remettre le compteur à zéro ».
Nos collègues du groupe UMP proposent que l’ouverture d’une telle procédure conduise uniquement à suspendre la prescription, c’est-à-dire à mettre le cours du délai de prescription « entre parenthèses ».
À mes yeux, la suspension présente des inconvénients majeurs en termes de computation des délais pour les consommateurs victimes de pratiques anticoncurrentielles. Pour autant, après en avoir débattu, la commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. La suspension de la prescription ne doit pas être préférée à l’interruption de la prescription, dans la mesure où, à nos yeux, elle présente des inconvénients majeurs de computation des délais pour chacun des consommateurs victimes de pratiques anticoncurrentielles.
En effet, la caractéristique principale de la suspension est qu’elle fait repartir le délai de prescription au moment où il s’est arrêté : ce moment pourra être différent pour chaque consommateur et le risque d’une prescription de l’action civile ne peut totalement être exclu pour certains d’entre eux. Cette computation des délais qui peuvent être différents d’un consommateur à l’autre, en fonction du moment où chacun a connaissance de son préjudice, risque de créer un large contentieux, incompatible avec une action de groupe efficace.
L’interruption de la prescription évite cet écueil en faisant repartir le délai « à zéro », à compter de la décision définitive. Ainsi, à compter de cette date, tous les consommateurs disposent d’un délai de cinq ans pour s’inscrire dans une action de groupe ou mener une action individuelle. Dans ces conditions, leur droit à agir sera véritablement préservé.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 153 rectifié, présenté par MM. Plancade, Bertrand, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Tropeano et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 8, seconde phrase
Après le mot :
extension
rédiger ainsi la fin de cette phrase :
au domaine de l’environnement.
La parole est à M. Alain Bertrand.
M. Alain Bertrand. Cet amendement est retiré, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 153 rectifié est retiré.
L’amendement n° 446, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 8, seconde phrase
Après les mots :
de la santé
insérer les mots :
, financier et bancaire
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous avons déjà souhaité élargir l’action de groupe aux domaines de la santé et de l’environnement, sans succès. En revanche, le présent amendement vise à l’élargir au domaine bancaire et financier. J’ai cru comprendre que cette extension était possible et acquise, et je m’en réjouis. Je souhaiterais cependant l’entendre dire une nouvelle fois, ce qui nous permettra de considérer que nous avons obtenu satisfaction.
M. Jean-Jacques Mirassou. Un petit effort !
M. Gérard Le Cam. C’est mieux quand c’est écrit !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. M. le sénateur Gérard Le Cam demande que soit précisé au compte rendu qu’un petit porteur pourra effectivement, s’il se sent spolié par un professionnel, entamer une action de groupe, avec d’autres personnes qui seraient dans une situation similaire, pour remédier à sa spoliation.
Nous ne sommes plus dans le même débat que tout à l’heure, où il s’agissait de défendre de grands instruments financiers. En l’occurrence, des consommateurs sont victimes des agissements d’un professionnel et, dans ce cadre, ils pourraient bénéficier de l’action de groupe.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Parfait !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je vais repréciser la position du Gouvernement à l’intention du sénateur Le Cam.
Dès lors qu’un contrat de consommation lie une banque ou un établissement de crédit à un épargnant ou à n’importe quel consommateur – d’ailleurs, au regard des textes européens, l’investisseur, quand il n’agit pas à titre professionnel, est considéré comme un consommateur –, le consommateur aura la possibilité de se retourner contre la banque ou l’établissement financier qui aurait fait preuve d’un manquement à ses obligations légales ou contractuelles. L’action de groupe peut donc parfaitement être déclenchée.
Le champ qui vous préoccupe, monsieur le sénateur, est par conséquent couvert par la rédaction actuelle du texte.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Nous avons dit que le domaine de la santé était exclu de l’action de groupe. J’ai bien entendu les explications de M. le ministre : en suivant son raisonnement, les victimes du Mediator pourraient engager une action de groupe sur la base de ce projet de loi, puisqu’elles ont consommé ce médicament.
Ne peut-on pas préciser dans le texte même de la loi que les domaines financier et bancaire entrent dans le champ de l’action de groupe, puisque nous avons renvoyé à plus tard son extension aux domaines de l’environnement et de la santé ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous renvoyons à plus tard l’extension de l’action de groupe aux domaines de l’environnement et de la santé, dès lors qu’il s’agira d’indemniser le préjudice corporel.
Adoptons un raisonnement par l’absurde – et pardonnez-moi s’il s’agit d’un sujet grave – : dans l’absolu, il est possible de déclencher une action de groupe contre un laboratoire pharmaceutique qui aurait commercialisé un médicament dont les effets se seraient avérés néfastes pour la santé. Il ne faut cependant pas oublier que, dans le cadre de l’action de groupe ouverte aux consommateurs, ceux-ci ne peuvent attendre que la réparation de leur préjudice économique. Objectivement, une victime du Mediator n’attend pas le remboursement de la tablette de médicament, mais la réparation du préjudice de santé qu’elle a subi !
C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité exclure les litiges relevant du domaine de la santé, qui seront traités dans le cadre d’une action de groupe spécifique, dédiée à la réparation du préjudice corporel. C’est donc un sujet distinct.
Pour ce qui relève des services financiers et bancaires, ils sont inclus dans le champ de l’action de groupe « consommation » telle que nous la votons aujourd’hui, dès lors qu’un contrat de consommation a été conclu. J’ai évoqué tout à l’heure les placements financiers : les banques et les établissements de crédit sont soumis à des obligations légales et à des obligations contractuelles, ils doivent les respecter ; si tel n’est pas le cas, les consommateurs peuvent se réunir et déclencher une action de groupe.
Je le répète, les domaines financier et bancaire entrent dans le champ de la loi, pour la santé et l’environnement, il faut encore attendre.
M. le président. Monsieur Le Cam, l’amendement n° 446 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Compte tenu de ces explications rassurantes, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 446 est retiré.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Article additionnel après l’article 2
M. le président. L’amendement n° 123 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le III de l’article 1635 bis Q du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Pour les litiges opposant un particulier à un professionnel. »
II.- La perte de recettes résultant pour le Conseil national des barreaux du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Les membres du groupe RDSE ont toujours été opposés à l’instauration de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros mise en place sous la précédente majorité, car cette mesure injuste et inadéquate constitue un frein inacceptable à l’accès à la justice. Mme le garde des sceaux, Christiane Taubira, a annoncé la suppression de cette contribution dans le projet de loi de finances pour 2014. Nous serons très attentifs à ce que cette disposition soit bien présente dans ce texte.
En attendant la suppression de cette contribution, nous proposons, à titre provisoire, dans le cadre de ce projet de loi relatif à la consommation, que les litiges entre consommateurs et professionnels en soient exonérés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. L’amendement du groupe RDSE, présenté par M. Tropeano, est juste. Cette contribution de 35 euros peut être un obstacle à l’exercice de leurs droits par nos concitoyens et Mme la ministre Christiane Taubira a annoncé qu’elle supprimerait cette disposition dans la loi de finances pour 2014. Je souhaiterais que M. le ministre nous confirme cette suppression. Dans tous les cas, l’adoption de cet amendement serait un symbole fort, c’est pourquoi j’émets un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous visons tous le même objectif, mais l’avis du Gouvernement est défavorable.
En effet, la loi de finances pour 2014 va supprimer cette contribution : la Chancellerie donnera ainsi satisfaction au groupe RDSE. Le projet de loi dont nous discutons aujourd’hui entrera en vigueur après l’adoption de la loi de finances pour 2014 : cette disposition me semble d’ores et déjà caduque et il ne me semble pas justifié d’adopter un tel amendement. C’est la raison pour laquelle je vous propose de le retirer, monsieur Tropeano.
M. le président. Monsieur Tropeano, l’amendement n° 123 rectifié est-il maintenu ?
M. Robert Tropeano. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 123 rectifié est retiré.
Chapitre II
Améliorer l’information et renforcer les droits contractuels des consommateurs et soutenir la durabilité et la réparabilité des produits
Section 1
Définition du consommateur et informations précontractuelles
Article 3
(Non modifié)
Avant le livre Ier du code de la consommation, il est ajouté un article préliminaire ainsi rédigé :
« Art. préliminaire. – Au sens du présent code, est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale. »
M. le président. L’amendement n° 340 rectifié, présenté par M. Tandonnet, Mmes Létard et Dini, M. Lasserre et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
artisanale
insérer le mot :
, agricole
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. L’article 3 du projet de loi introduit dans le code de la consommation une définition du consommateur qui n’existait pas encore en droit français. Cet article procède donc à une transposition nécessaire du droit européen.
La définition proposée exclut tout acte réalisé dans le cadre professionnel. Une série d’activités est ainsi énumérée : il s’agit de toute activité « commerciale, industrielle, artisanale ou libérale » ; l’activité agricole a été oubliée.
Lors de l’examen du texte par la commission des affaires économiques, la rapporteur pour avis de la commission des lois avait souhaité substituer à cette liste le terme générique d’« activités professionnelles », qui semblait plus large, plus protecteur et plus sûr juridiquement, même s’il différait de la définition communautaire.
Cette proposition n’a pas été suivie par la commission au fond.
L’amendement que nous vous proposons vise non seulement à conserver la liste des qualificatifs existants, mais aussi à l’élargir à une autre catégorie professionnelle manifestement oubliée.
Il s’agit donc d’y ajouter les activités agricoles. Elles ne figurent dans aucune des catégories précitées et, pourtant, il s’agit bien d’activités professionnelles qui permettront d’exclure les agriculteurs de la définition du consommateur. Il y a déjà eu des difficultés sur ce point qui ont donné lieu à jurisprudence dans le droit de la consommation.
Sans doute allez-vous me répliquer que le droit européen a déjà précisé cette définition. Je pense, pour ma part, que celui qui a proposé ce texte devrait être bien honteux quand on sait que la part agricole est la part la plus importante dans le budget européen. Oublier les agriculteurs dans cette définition, cela me paraît être un comble !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur de la commission des affaires économiques. Cet amendement a pour objet de préciser la définition de la notion de consommateur. Selon la définition proposée par le projet de loi, est considéré comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale.
L’amendement vise à ajouter la mention des activités agricoles. La définition que je viens de rappeler est directement issue de l’article 2 de la directive n° 2001–83 et il n’est pas possible de s’en écarter à l’échelon national.
De plus, omettre l’adjectif « agricole », ce n’est pas exclure les agriculteurs de la définition du consommateur, au contraire, c’est les y inclure. J’ai donc quelques difficultés à comprendre le sens de l’amendement.
Aussi l’avis est-il défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement partage l’avis du rapporteur. Je peux comprendre le débat sur ce sujet, mais nous sommes là dans la transposition d’une définition arrêtée par un texte, une directive européenne relative aux droits des consommateurs. En l’état, nous prenons le risque de transposer dans des termes différents la définition, ce qui nous placerait dans une situation de non-conformité au droit européen. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement défendu par M. Tandonnet.
M. le président. Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 78 rectifié, présenté par Mmes Procaccia et Farreyrol, MM. Doublet et D. Laurent, Mme Giudicelli, M. Gilles, Mmes Cayeux et Deroche, MM. Milon, Cornu, Pointereau et Cointat, Mme Des Esgaulx, MM. Lefèvre, Houel, Billard, Chauveau, Dallier, Grosdidier et Karoutchi, Mmes Bruguière, Garriaud-Maylam et Sittler, MM. Pinton et Leleux, Mlle Joissains, MM. Laménie et César, Mme Boog, MM. Couderc, Cardoux et Saugey, Mmes Debré et Mélot, M. Revet, Mme Masson-Maret et MM. Béchu, J. Gautier, Pillet et Bas, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le livre Ier du code de la consommation, il est inséré un article préliminaire ainsi rédigé :
« Art. préliminaire. - I. - Au sens du présent code, est considérée comme motif légitime l'impossible exécution par le consommateur de l'une des obligations lui incombant si cette inexécution résulte :
« 1° d'une perte d'emploi en contrat à durée indéterminée non prévue ;
« 2° du décès du souscripteur ou d'un des membres de la famille installé dans le lieu d'exécution du contrat ;
« 3° d'un changement de domiciliation ou d'une mutation professionnelle, scolaire ou universitaire d'une durée minimale de six mois ;
« 4° d'un préjudice matériel grave atteignant le bien immobilier du lieu d'exécution du contrat ;
« 5° d'une maladie ou d'un handicap rendant impossible l'exécution du contrat ;
« 6° d'une incarcération.
« II. - Le consommateur dispose d'un droit de résiliation du contrat à tout moment sans frais ni pénalités résultant d’un motif légitime mentionné au I du présent article et d'un droit au remboursement dans un délai de quinze jours des sommes versées au prorata de la durée du contrat restant à courir.
« III. - Toute stipulation du contrat général de vente contraire aux I et II du présent article est réputée non écrite. »
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Cet amendement vise à définir la notion de « motif légitime » au sens du code de la consommation afin de pouvoir unifier son application en cas de résiliation de contrats de services, par exemple, pour la téléphonie mobile, les fournisseurs d’accès internet, les abonnements à des clubs de sports.
Le « motif légitime » peut paraître une notion simple, mais, dans la réalité, il n’est pas défini, de sorte que chaque opérateur détermine lui-même ce que sont les motifs légitimes. Or l'arrêt du 4 février 2004 de la cour d’appel de Versailles dispose que le professionnel ne peut se faire juge du caractère légitime du motif invoqué par l'assuré. Finalement, malgré cet arrêt, rien n’a changé.
Je vais donc vous donner quelques exemples, que je compléterai éventuellement en explication de vote. Il y a un certain nombre de motifs qui peuvent être reconnus pour tous, le chômage, par exemple. Cependant, certains opérateurs ne reconnaissent le chômage que s’il intervient au terme du licenciement d’un salarié en CDI et non d’un salarié en CDD. Certains opérateurs ne reconnaissent pas le chômage, par exemple, si vous percevez encore des indemnités, lesquelles doivent vous permettre de payer l’abonnement en cours.
Je citerai aussi le cas du déménagement qui, en France, n’est que très difficilement reconnu puisque la personne qui change de domicile est incitée à conserver son abonnement. Il faut prouver qu’on ne peut pas recevoir, et même si on reçoit mal, cela ne suffit pas pour constituer un motif légitime aux yeux des fournisseurs, qui repoussent la demande !
Quant au déménagement à l’étranger, c’est encore pire ! Il faut prouver que l’on y reste pour plus d’un an, fournir des quittances de loyer, ce qui pose un vrai problème pour tous les étudiants. Lorsqu’ils partent à l’étranger pour trois ou six mois, ils sont obligés de continuer à payer, faute de pouvoir fournir un justificatif de domicile pour un an, sans compter qu’ils n’ont, le plus souvent, pas de quittance de loyer à fournir avant leur départ.
C’est la raison pour laquelle, dans cet amendement, nous déterminons quelques motifs légitimes qui devraient s’imposer absolument à tous les prestataires. Ne pas le faire, c’est ne pas soutenir les consommateurs !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L’amendement ouvre cependant, pour tous les contrats liant un consommateur à un professionnel, un droit extrêmement large de résiliation sans frais et immédiat.
Or la règle fondamentale, c’est que le contrat tient lieu de loi entre les parties. Une rédaction aussi large fragilise fortement tous les contrats.
C’est pourquoi j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. J’ai un peu de mal à comprendre que vous puissiez dire qu’il s’agit d’une définition assez large. Je peux comprendre que vous nous demandiez de retravailler un peu plus dans le cadre de ce texte sur la consommation. Mais comment admettre que la notion de décès ne soit pas retenue dans le contrat ?
Je pense que tout le monde se souvient du cas du père de famille poursuivi, et même saisi parce qu’il voulait résilier l’abonnement pour son fils mineur et décédé. Le décès d’une personne, d’un enfant, n’est-ce pas un motif légitime de résiliation ?
J’ai reçu récemment la lettre d’une personne qui change de domicile, car elle va s’installer pour sa retraite dans sa résidence secondaire, dotée du même équipement que sa résidence principale. Le fournisseur lui refuse la résiliation sous prétexte qu’elle doit pouvoir emmener l’autre équipement alors qu’elle a déjà le même équipement avec le même opérateur. C’est ce que vous appelez « un contrat qui lie » ? N’est-ce pas laisser les opérateurs déterminer les contrats ?
Monsieur le rapporteur, et vous aussi, monsieur le ministre qui ne vous exprimez pas sur ce point, votre notion de la défense du consommateur me paraît très étrange, surtout sur des dossiers aussi pratiques !
Qu’on me réponde : « Madame Procaccia, il faut retravailler un peu sur cette définition », je veux bien l’entendre. Ce que je n’admets pas, c’est que vous ne faites aucune ouverture et laissez pieds et poings liés les consommateurs à chacun des opérateurs. Vous laissez ces derniers libres de déterminer si un départ à l’étranger pour six mois est un motif de résiliation alors que l’on n’est pas capable de fournir à la personne concernée un contrat de travail puisque c’est un étudiant qui va partir à l’étranger ; celui-ci devra continuer à payer son abonnement – internet, téléphonie, Canal Plus, ou ailleurs… C’est illogique, et moi, je m’insurge contre votre position ! (Mme Hélène Masson-Maret ainsi que MM. Alain Fouché et François Trucy applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Madame la sénatrice, je vais vous apporter une réponse plus détaillée. Il ne faut pas se jeter l’anathème à chaque amendement en prêtant des intentions au rapporteur et au Gouvernement. Nous sommes dans le cadre du débat parlementaire. Nous aurons l’occasion d’échanger à plusieurs reprises.
Je vais vous redire pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable, même si je reconnais qu’il y a une intention louable de votre part. Cependant, l’énoncé qui est le vôtre ne justifie pas, à nos yeux, que le Gouvernement puisse y agréer.
Le présent amendement entend exonérer le consommateur, dans des cas strictement énumérés par le texte, des conséquences de son inexécution sans frais ni pénalités du fait d’un motif légitime et donc lui conférer un droit au remboursement des sommes versées au prorata de la durée du contrat restant à courir.
Je le redis, l’objectif est louable, et, sur le principe, nous ne le contestons pas.
Toutefois, cette disposition, dont la dimension est générique, bien que le 3 vise le seul contrat de vente, est de nature à interférer tant avec les règles du droit général des obligations qu’avec les règles spécifiques entourant certains contrats spéciaux que je veux énumérer, notamment ceux intéressant les réservations de voyages, les contrats d’assurance – les motifs liés à la maladie, par exemple –, les baux immobiliers ou les contrats de crédit, sans que son impact soit véritablement mesuré.
Je le redis à nouveau, l’objectif est louable, mais ces motifs me conduisent à émettre un avis défavorable sur votre amendement, madame Procaccia.
M. Jean Bizet. Ils n’ont pas de cœur !
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 281 rectifié, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
A. - Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après la section 2 du chapitre III du titre Ier du livre II du code de la consommation, il est inséré une section II bis ainsi rédigée :
« Section II bis
« Obsolescence programmée
« Art. L. 213-4-1. – I. – L’obsolescence programmée est l’ensemble des techniques par lesquelles un fabricant ou un importateur de biens vise, notamment par la conception du produit, à raccourcir délibérément la durée de vie ou d’utilisation potentielle de ce produit afin d’en augmenter le taux de remplacement.
« II. Les faits mentionnés au I sont punis d’une amende de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 300 000 euros ou de l’une de ces deux peines. »
II. – Au deuxième alinéa de l’article L. 213-5 du code de la consommation, après la référence : « L. 213-4, », est insérée la référence : « L. 213-4-1, ».
B. - En conséquence, chapitre II, intitulé
Après les mots :
consommateurs et
rédiger ainsi la fin de l'intitulé de ce chapitre :
lutter contre l'obsolescence programmée en soutenant la durabilité et la réparabilité des produits
C. - En conséquence, section 1 du chapitre II, intitulé
Après les mots :
du consommateur
insérer les mots :
et de l'obsolescence programmée
L'amendement n° 282 rectifié, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
A. - Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'obsolescence programmée est définie comme l'ensemble des techniques par lesquelles un fabricant ou un importateur de biens vise, notamment par la conception du produit, à raccourcir délibérément la durée de vie ou d'utilisation potentielle de ce produit afin d'en augmenter le taux de remplacement.
B. - En conséquence, chapitre II, intitulé
Après les mots :
consommateurs et
rédiger ainsi la fin de l'intitulé de ce chapitre :
lutter contre l'obsolescence programmée en soutenant la durabilité et la réparabilité des produits
C. - En conséquence, section 1 du chapitre II, intitulé
Après les mots :
du consommateur
insérer les mots :
et de l'obsolescence programmée
L'amendement n° 283 rectifié, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
A. - Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après la section 2 du chapitre III du titre Ier du livre II du code de la consommation, il est inséré une section II bis ainsi rédigée :
« Section II bis
« Obsolescence programmée
« Art. L. 213-4-1 – I. L’obsolescence programmée est définie par l’ensemble des techniques par lesquelles un fabricant ou un importateur de biens vise, notamment par la conception du produit, à raccourcir délibérément la durée de vie ou d’utilisation potentielle de ce produit afin d’en augmenter le taux de remplacement.
« Peut notamment constituer une technique d’obsolescence programmée :
« 1° le fait de sous-dimensionner un composant afin de créer un point de rupture technique ;
« 2° le fait d’entraver techniquement et délibérément la réparation des pièces essentielles à l’utilisation du bien, la rendant impossible ;
« 3° le fait d’imposer un prix abusif sans justification économique pour des pièces essentielles à la réparation du bien ;
« 4° le fait de concevoir une obsolescence logicielle, c’est-à-dire rendre incompatibles deux versions d’un même logiciel ou contraindre à une mise à jour du logiciel qui nécessite plus de ressources informatiques que la configuration minimale requise initialement.
« II. – Les faits mentionnés au I sont punis d’une amende de 300 000 euros. »
II. – Au deuxième alinéa de l’article L. 213-5 du code de la consommation, après la référence : « L. 213-4, », est insérée la référence : « L. 213-4-1, ».
B. - En conséquence, chapitre II, intitulé
Après les mots :
consommateurs et
rédiger ainsi la fin de l'intitulé de ce chapitre :
lutter contre l'obsolescence programmée en soutenant la durabilité et la réparabilité des produits
C. - En conséquence, section 1 du chapitre II, intitulé
Après les mots :
du consommateur
insérer les mots :
et de l'obsolescence programmée
La parole est à M. Jean-Vincent Placé, pour présenter ces trois amendements.
M. Jean-Vincent Placé. Il y a cinq mois, était organisé, à l’initiative du groupe écologique, un débat parlementaire sur l’obsolescence programmée, en votre présence, monsieur le ministre. En avril, vous vous étiez engagé pour lutter contre ce phénomène grâce à des mesures dans votre projet de loi « consommation » que vous nous présentez aujourd’hui.
Je tiens à rappeler à l’ensemble des collègues ce qu’est l’obsolescence programmée : on désigne par là l’ensemble des techniques visant à réduire délibérément la durée de vie ou d’utilisation d’un produit afin d’en augmenter le taux de remplacement.
Il existe plusieurs types d’obsolescence programmée à ne pas confondre pour éviter les amalgames dans le débat.
M. Alain Fouché. On le savait !
M. Jean-Vincent Placé. Tant mieux !
Tout d’abord, il y a l’obsolescence technologique : l’innovation rend les objets rapidement obsolètes, car apparaît un objet plus performant, plus sophistiqué, incompatible avec l’ancien matériel.
Il existe également une obsolescence psychologique, ou esthétique, résultant des phénomènes de mode.
Il y a, enfin, une obsolescence technique, liée au fait de concevoir un produit en anticipant sa fin de vie. Les fabricants rendent ainsi les produits irréparables : soit parce qu’on ne peut pas les désassembler, soit parce qu’il n’existe plus de pièces détachées ou qu’elles s’avèrent trop coûteuses. C’est contre ce dernier point précis que je souhaite que l’on avance, car, plus que jamais, le consommateur est impuissant face à ces stratagèmes industriels qui impactent son pouvoir d’achat.
J’ai, comme vous le savez, déposé une proposition de loi sur le sujet, car en plus d’« arnaquer » les consommateurs, l’obsolescence programmée est une catastrophe pour l’environnement. Notre planète dispose de ressources finies, or la fabrication de « produits faits pour être jetés » gaspille beaucoup trop de terres rares, c’est-à-dire des minerais et métaux difficiles à extraire, qui sont présents dans la plupart des produits électriques ou électroniques, et engendre une quantité astronomique de déchets non recyclés, contenant des matières toxiques.
Je vous propose, par cet amendement, de qualifier juridiquement l’obsolescence programmée pour plusieurs raisons.
Première raison : il faut que le terme apparaisse dans la loi, sans quoi nous ferions officiellement l’impasse sur ce sujet, qui préoccupe l’ensemble des consommateurs. Si le sujet est aussi médiatique et soulève autant de pétitions citoyennes, c’est bien qu’il s’agit d’un enjeu majeur très partagé dans la population.
Deuxième raison : il est essentiel de définir ce qu’est l’obsolescence programmée dans la loi afin de pallier un vide juridique inacceptable. Ce phénomène ne peut plus être tourné en dérision et être qualifié de mythe par certains industriels qui préféreraient que l’on arrête d’en parler. S’il s’agit d’un mythe et que cela n’existe pas, il n’y a pas de problème pour le qualifier puisque cela n’impacterait personne ! D’autres industriels, comme l’entreprise Malongo, ont décidé de proposer des produits éco-conçus de qualité. Mais lorsqu’ils souhaitent en faire un argument de vente, le CSA, pour leur publicité, pose des difficultés quant à l’utilisation du terme « obsolescence programmée ». Mon amendement vise aussi à protéger et à soutenir les industriels vertueux.
Enfin, troisième raison : il faut donner aux consommateurs les moyens de se défendre face à ce phénomène contre lequel ils sont aujourd’hui complètement impuissants. Si l’obsolescence programmée pouvait être punie par la « tromperie », nous pourrions constater une jurisprudence, or ce n’est pas le cas ! L’obsolescence programmée est une forme particulière qui se distingue de la tromperie, tel que le juge la conçoit. Actuellement le consommateur n’est pas protégé contre le fait de sous-dimensionner un composant afin de créer un point de rupture technique, ou encore le fait d’entraver techniquement et délibérément la réparation des pièces essentielles à l’utilisation du bien...
Il convient donc de définir ce terme dans la loi et de l’accompagner de sanctions, tout comme pour la tromperie.
M. le président. L'amendement n° 521 rectifié, présenté par Mme Bataille, MM. Vaugrenard et Mirassou, Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la section II du chapitre III du titre I du livre deuxième du code de la consommation, il est introduit une section II bis ainsi rédigée :
« Section II bis : obsolescence programmée
« Art. L. 213-4-1. - I. - L’obsolescence programmée est l’ensemble des techniques qui visent à mettre sur le marché un produit dont la durée de vie ou l’utilisation potentielle est délibérément raccourcie, notamment par sa conception, afin d’en augmenter le taux de remplacement.
« II. - Ces techniques peuvent notamment inclure l’introduction volontaire d’une défectuosité, d’une fragilité, d’un arrêt programmé, d’une limitation technique, d’une impossibilité de réparer ou d’une non compatibilité.
« III. - Les faits mentionnés au I et au II sont punis d’une amende de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 37 500 euros ou de l’une de ces deux peines. »
La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.
M. Jean-Jacques Mirassou. J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer sur ce sujet hier, lors de la discussion générale. Je disais que notre société était actuellement sur une pente quasiment irréversible, qui la conduisait à pratiquer une forme de consumérisme aveugle, dépourvu de discernement. Or, dans le même temps, elle se voit contrainte d’envisager une consommation plus raisonnée et plus durable.
J’avais également formulé une réflexion de simple bon sens. Il se trouve en effet que les consommateurs qui vont acheter un produit électroménager acceptent comme une fatalité le fait que celui-ci sera obsolète trois ans plus tard, sans même penser une seule seconde qu’ils disposent d’un recours leur permettant de faire réparer cet appareil.
Sur le plan pratique, cela signifie, et notre collègue vient de l’évoquer, qu’il existe une course effrénée à la consommation, qui a pour conséquence une altération des ressources naturelles et qui pose le problème, de plus en plus important, de l’élimination des produits obsolètes.
Vous êtes sensible à ce problème, monsieur le ministre. En effet, évoquant les problèmes de garanties, vous avez indiqué que votre préférence allait, plutôt qu’au remplacement d’équipements qui ne fonctionnent plus, au recours à la réparation, pratique présentant le double avantage de garantir, voire de multiplier, les emplois dans un domaine bien précis, tout en préservant, au passage, un savoir-faire qui devient lui aussi, pour le coup, de plus en plus obsolète.
Mon intervention n’est pas de nature dogmatique, mais se veut un signal d’alarme. Je pense en effet, et je ne suis pas le seul à le penser, qu’il est grand temps d’une manière ou d’une autre, indépendamment de la teneur de l’amendement que nous présentons, d’inscrire cette question dans la loi. Il s’agit à mon sens, et cet avis est partagé par bon nombre de mes collèges, d’une problématique véritablement sociétale.
Afin de pouvoir « inverser la vapeur » dans les dix ou quinze prochaines années, nous estimons à tout le moins légitime de mettre en avant cette question aujourd’hui, quitte à ce que le présent amendement ne soit qu’un amendement d’appel. Nous tenons absolument, en effet, à ce que cette vision des choses puisse figurer dans le texte que nous examinons, afin que cette forme de fatalisme ou de fatalité que j’évoquais au début de mon propos puisse un jour laisser place à une alternative qui soit beaucoup plus vertueuse et positive. (Mme Laurence Rossignol et M. Jean-Louis Carrère applaudissent.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. La question du rythme d’obsolescence des biens est un débat important. Fabriquer des biens durables est, à la fois, un enjeu écologique et économique, dans la mesure où nous savons tous que la montée en gamme de l’industrie nationale est la seule voie possible. Le législateur doit donc inciter le monde économique à s’orienter dans cette voie, tout en étant conscient que les réponses à apporter sont très complexes.
Dans un monde où le rythme du progrès technique est parfois très rapide et où les phénomènes de mode sont un puissant facteur d’accélération du temps économique, le cycle de vie des produits a tendance à se raccourcir sans que l’on puisse forcément imputer la responsabilité de ce raccourcissement à une volonté délibérée de programmer l’obsolescence.
Lors des débats en commission, j’ai proposé une mesure forte pour inciter à augmenter la durée de vie des produits : l’extension à dix-huit mois de la durée de la présomption d’antériorité des défauts de conformité.
Dans le même temps, dans un monde ouvert à la concurrence où les normes sont un facteur d’avantage ou de désavantage compétitif, modifier brutalement les normes et les durcir unilatéralement peut avoir un impact très négatif sur le modèle économique des entreprises. Notre but doit être de faire évoluer leur modèle économique, et non de faire disparaître nos entreprises. Tout est donc affaire de dosage et d’équilibre.
S’agissant de l’amendement n° 281 rectifié, l’existence d’une intention de réduire la durée de vie des produits fabriqués est indémontrable en pratique dans la grande majorité des cas. Prévoir une sanction contre des faits qu’on ne peut établir avec certitude me paraît donc illusoire. Au demeurant la sanction prévue est lourde – deux ans de prison ! – et me paraît disproportionnée par rapport à la faute. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 282 rectifié est un amendement de repli par rapport au précédent. Il définit la notion d’obsolescence programmée, mais sans en faire un fait passible de sanction. Ce qui nous est proposé ici, c’est la définition d’une notion économique intéressante intellectuellement, mais sans portée normative. Or la loi est faite pour définir des normes juridiques, et non pour se substituer à l’analyse économique. Là encore, l’avis est défavorable.
L’amendement n° 283 rectifié tend à proposer une autre définition de la notion d’obsolescence programmée. Les remarques faites sur l’amendement n° 281 rectifié s’appliquent aussi à cet amendement. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 521 rectifié est très semblable aux trois précédents et les arguments que je viens de développer s’y appliquent également. Sur cet amendement, que je considère comme un amendement d’appel, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur le président, vous me permettrez de consacrer quelques minutes à ce sujet de l’obsolescence programmée, afin de répondre aux interventions de MM. Placé et Mirassou.
Tout d’abord, je tiens à dire qu’il ne s’agit pas là d’un concept paranoïde ou d’un fantasme visant à établir l’existence d’une conspiration des grands industriels.
L’obsolescence programmée existe. Nous en avons connu un exemple avant la Seconde Guerre mondiale aux États-Unis, entre les années 1924 et 1939, avec le Cartel Phœbus dont les membres s’étaient entendus pour diminuer la durée de vie des lampes à incandescence, autrement dit les ampoules, et pour augmenter ainsi la fréquence de leur renouvellement. Le droit de la concurrence en vigueur à l’époque avait d’ailleurs permis de lutter contre cette pratique délibérée et de démanteler cette stratégie visant à créer une obsolescence programmée.
Outre ce cas, régulièrement évoqué par ceux qui se battent et luttent contre l’obsolescence programmée, on peut évoquer l’exemple des puces électroniques qui pourraient être introduites dans certains équipements pour programmer là encore, sans que le consommateur le sache, leur fin de vie et provoquer leur remplacement. En droit français, cette pratique tomberait sous le coup des dispositions relatives à la tromperie sur la qualité substantielle du bien.
Cela nous exonère-t-il d’une réflexion sur cette question de la durée de vie et de la fréquence de renouvellement, qui paraissent aujourd’hui incompatibles avec les exigences actuelles en matière de protection de l’environnement ? La réponse est évidemment non.
Cette réflexion sera d’ailleurs menée lors de la conférence environnementale des 20 et 21 septembre prochains, au cours de laquelle j’interviendrai, et qui réunira bon nombre d’acteurs qui se préoccupent de cette question.
Toutefois, il faut bien distinguer ce qui relève du stratagème industriel, fondé sur une volonté délibérée de tromperie, de ce qu’on pourrait appeler les cycles d’innovation. Cette distinction explique les désaccords qui persistent sur la définition de la notion d’obsolescence programmée.
Prenons la définition retenue par le groupe écologiste. Dès lors que l’on évoque la conception d’un produit qui vise à augmenter le taux de remplacement, tout ce qui relève de la mode et du design n’entre-t-il pas dans cette définition ? La question est posée et l’on voit combien il est difficile de s’entendre sur une définition de l’obsolescence programmée qui ne remette pas en cause des cycles d’innovation indispensables au soutien de la croissance et de l’emploi.
Sur ce sujet, je vous renvoie, mesdames, messieurs les sénateurs, à ce film britannique de 1951 que j’ai découvert à l’occasion de la préparation du présent débat, interprété par le célèbre Alec Guinness : L’homme au complet blanc. C’est l’histoire d’un chimiste qui invente une formule lui permettant de fabriquer un costume inusable et insalissable. Au début, cette formidable invention réjouit les salariés, et notamment les ouvriers qui n’ont plus à laver leur bleu de chauffe. Puis ils découvrent que, par la faute de ce costume « qui ne meurt jamais », l’industrie du textile et celle des machines à laver s’effondrent. « L’homme au complet blanc » fait alors l’objet de la vindicte des industriels, des salariés et des syndicats, car son invention remet en cause les cycles d’innovation.
Il s’agit là d’une question importante, qui doit être traitée avec sérieux. Je demande donc au groupe écologiste, en la personne de M. Placé, ainsi qu’à M. Mirassou de bien vouloir retirer leurs amendements, car il n’y a pas aujourd’hui, selon moi, de consensus sur l’obsolescence programmée, et de mettre à profit le calendrier de la conférence environnementale.
Je leur fais part, également, de l’engagement du Gouvernement en la matière, qui se concrétisera sous des formes qui ne sont pas encore arrêtées. Nous travaillerons, en lien avec les parlementaires, afin d’approfondir cette notion d’obsolescence programmée et d’aboutir à un consensus plus large sur sa définition et sur les instruments permettant de lutter contre cette pratique, qui s’ajouteront au dispositif juridique d’ores et déjà existant.
Nous veillerons à élargir ce consensus aux industriels et aux secteurs pour lesquels les cycles d’innovation revêtent une importance particulière, de façon à provoquer le début d’une prise de conscience quant à la nécessité d’augmenter la durée de vie des équipements. Ce point deviendra un élément d’arbitrage pour le consommateur, qui pourra choisir les produits ayant la plus longue espérance de vie.
Pour cette raison, le Gouvernement a voulu au travers de ce texte, je le rappelle, privilégier la réparation des biens électroménagers.
Nous nous inscrivons dans la suite du travail portant sur la présomption d’antériorité de défaut, qui était auparavant de six mois et qui a été portée dans le texte à un an, puis à dix-huit mois par les parlementaires et qui pourrait, le cas échéant, être alignée sur la garantie légale de conformité, d’une durée de deux ans. Telle est la démarche que nous suivons.
Pour ce qui concerne la définition de l’obsolescence programmée, je vous donne mon accord de principe, mais réaffirme mon désaccord quant aux rédactions que vous proposez. Cela étant dit, je crois que nous pourrons tous nous entendre sur une rédaction commune, une fois passé le temps de la réflexion nécessaire pour ciseler cette définition. (M. Jean-Louis Carrère applaudit.)
M. Jean-Jacques Mirassou. Bonne réponse !
M. le président. Monsieur Placé, les amendements nos 281 rectifié, 282 rectifié et 283 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le ministre, je suis très content que vous soyez passionné par ce sujet, ainsi que vous me l’aviez déjà confié en privé. Je vous invite d’ailleurs à compléter votre réflexion grâce au documentaire intitulé Prêt à jeter, diffusé sur Arte. Vos convictions naissantes sur les méfaits de l’obsolescence programmée seront ainsi renforcées.
Je vous remercie de cette réponse très argumentée et réfléchie, mais je ne vous cache pas que j’entends régulièrement, depuis deux ans que je suis parlementaire, le même discours ministériel selon lequel devrait intervenir incessamment sous peu, probablement dans un avenir radieux, un texte dont les contours restent encore imprécis. J’ai en particulier acquis une certaine expérience à cet égard en matière budgétaire, puisque je siège à la commission des finances. Ainsi, en entendant l’actuel ministre de l’écologie prononcer, à l’occasion du débat sur la fiscalité écologique, les mêmes mots que Jérôme Cahuzac auparavant et que Bernard Cazeneuve, je me dis qu’il vaudrait mieux que j’essaie de tenir plutôt que de courir ! (Sourires.)
Nous sommes désormais des « amis de vingt et un ans », monsieur le ministre. (Nouveaux sourires.)
Je vais donc faire un effort dont je ne suis pas coutumier à l’égard d’un membre du Gouvernement : je vais vous faire confiance. À l’occasion de la conférence environnementale qui, comme vous l’avez rappelé, va bientôt se tenir, nous pourrons rapidement vérifier le niveau d’authenticité de la parole gouvernementale, que vous portez ce soir.
Eu égard à votre parole, j’accepte de retirer mes amendements.
M. le président. Pour l’amitié, cher collègue Placé, faites attention dans neuf ans ! (Sourires.)
Les amendements nos 281 rectifié, 282 rectifié et 283 rectifié sont retirés.
Monsieur Mirassou, l'amendement n° 521 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Mirassou. Je me réjouis que ce sujet ait pu faire irruption dans le débat. Monsieur le ministre, je partage vos remarques : il ne faut pas faire d’amalgame entre ce qui a trait aux technologies avant-gardistes, donc sans doute un peu moins fiable, et tout le reste. Mais je m’empresse de préciser que, actuellement, nous sommes loin du célèbre costume blanc inusable et insalissable s’agissant d’un comparatif que l’on pourrait faire avec un téléviseur.
En effet, quand un consommateur achète un téléviseur, on lui explique qu’il a fait le bon choix, même s’il paye un peu plus cher. Dans le même temps, on lui propose une garantie de deux ans et à peine a-t-il donné son accord qu’on lui suggère une extension de garantie de trois ans. C’est bien que la fiabilité de l’appareil sera moindre ensuite. De ce point de vue, il y a donc encore du chemin à parcourir.
Mais je conçois tout à fait que ce sujet puisse aussi trouver sa place lors de la conférence environnementale.
Forts du crédit que nous accordons à votre parole, monsieur le ministre, nous retirons cet amendement. Comme je l’ai signalé, il s’agit d’une démarche à long terme qui engagera aussi le consommateur. En effet, ce dernier, par le biais des dispositions présentes dans ce texte, réalisera sans doute ses achats de façon plus éclairée et un peu plus critique.
M. le président. L'amendement n° 521 rectifié est retiré.
L'amendement n° 303, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À titre expérimental, du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, les vendeurs de produits doivent pratiquer l’affichage d’un double prix pour un même bien : un prix de vente et un prix d’usage. Ce double prix porte sur un nombre de produits déterminés par décret. À l’issue de la phase d’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport qui en établit le bilan et qui dresse les perspectives de développement de l’économie de fonctionnalité.
Le prix d’usage désigne la valeur marchande associé à l’usage du service rendu par un bien meuble, et non à la propriété de ce bien.
La parole est à M. Jean-Vincent Placé.
M. Jean-Vincent Placé. Cet amendement vise à mettre en place une expérimentation. Pendant deux ans, du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, les vendeurs de produits doivent pratiquer l’affichage d’un double prix pour un même bien : un prix de vente et un prix d’usage. Le prix d’usage désigne la valeur marchande associée à l’usage du service rendu par un bien meuble, et non à la propriété de ce bien. Cette définition est inscrite dans l’amendement, ce qui donne à celle-ci une valeur juridique. Tous les objets inclus dans l’expérimentation seront déterminés par décret, ce qui nous laisse le temps de travailler à la mise en œuvre de cette expérimentation avec les acteurs concernés.
À l’issue de la phase d’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport qui en établit le bilan et qui dresse les perspectives de développement de l’économie de fonctionnalité.
L’objet de cet amendement, adopté par la commission du développement durable à l’Assemblée nationale – monsieur le rapporteur, je vous vois opiner car, je le sais, vous suivez les choses de près –, est de mettre en œuvre à titre expérimental et volontaire ce double affichage.
L’économie de fonctionnalité, encore peu connue, constitue un levier majeur pour un modèle économique alternatif. La raréfaction des matières premières, la montée inéluctable des dépenses énergétiques et des enjeux socioécologiques nous exhortent à innover pour nous engager réellement dans la voie du développement soutenable.
De nombreuses entreprises ont déjà choisi l’économie de fonctionnalité : Michelin, Elis, Xerox. Au lieu d’être propriétaire de ses pneus, de son vélo, de ses uniformes de travail, de son imprimante, on peut très bien louer le service offert par ces biens. Ce modèle économique a notamment été encouragé par le Grenelle de l’environnement. Pour l’entreprise, c’est un gage de visibilité et de constance, mais aussi un gain estimé entre 30 % à 50 % sur les énergies et les matières premières. Elle a donc intérêt à proposer un produit qui dure, de qualité, innovant, pour fidéliser sa clientèle. L’entreprise économise aussi des coûts en recyclant le même produit dont elle reste propriétaire. Le consommateur est également gagnant, puisque les prix diminuent et s’adaptent vraiment aux besoins.
L’économie de l’usage, c’est un levier pour lutter contre l’obsolescence programmée dont nous venons de parler. En effet, aujourd’hui, être propriétaire d’un bien ne signifie plus pouvoir en profiter longtemps.
Monsieur le ministre, vous êtes attaché à l’innovation. Ce modèle démontre justement que développement est synonyme, non pas de surconsommation, de surproduction ou de pollution, mais de progrès.
Tel est le sens de cet amendement particulièrement important.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Cet amendement vise à mettre en œuvre à titre expérimental et volontaire un double affichage : un prix de vente et un prix d’usage.
La notion de prix d’usage n’est pas clairement définie. Or afficher un prix dont on ne sait pas vraiment ce qu’il signifie, ni comment ou par qui il est établi me paraît de nature à égarer le consommateur au regard de ses habitudes de consommation.
Dans l’esprit des propos du ministre sur les autres amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 3, il me semble nécessaire de réfléchir à cette question et de veiller à trouver une définition précise et acceptable. C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le dernier alinéa de l’objet de cet amendement est le suivant : « L’objet de cet amendement, adopté par la commission du développement durable, est de mettre en œuvre à titre expérimental et volontaire ce double affichage. » Aux termes de cet alinéa, la mesure qui est proposée repose donc sur le volontariat. Pourtant, la rédaction présentée par l’amendement ne prévoit rien de tel : il est précisé que les vendeurs de produits « doivent » – et non « peuvent » – pratiquer l’affichage d’un double prix pour un même bien.
Je note donc une contradiction entre le caractère expérimental de cette mesure et son application sur la base du volontariat. Si vous acceptiez de rectifier cet amendement en remplaçant le mot « doivent » par le mot « peuvent », monsieur le sénateur, le Gouvernement émettrait un avis favorable.
M. le président. Monsieur Placé, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par M. le ministre ?
M. Jean-Vincent Placé. Je remercie le ministre de son écoute attentive et de cette proposition, même si elle ne remplit pas l’intégralité de l’objet de cet amendement. Entre pouvoir et devoir, il y a plus qu’une nuance ! Cependant, dans un souci d’ouverture, je me rallie à la position du Gouvernement, et je rectifie par conséquent ainsi mon amendement, monsieur le président.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Même avis que M. le ministre : favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
Article 3 bis (nouveau)
Le titre III du livre Ier du code de la consommation, est complété par un chapitre IX ainsi rédigé :
« Chapitre IX
« Droit applicable
« Art. L. 139–1. – Pour l’application des articles L. 121–24, L. 121-32, L. 135–1 et L. 211–18, un lien étroit avec le territoire d’un État membre est réputé établi notamment :
« 1° Si le contrat a été conclu dans l’État membre du lieu de résidence habituelle du consommateur ;
« 2° Ou si le professionnel dirige son activité vers le territoire de l’État membre où réside le consommateur, sous réserve que le contrat entre dans le cadre de cette activité ;
« 3° Ou si le contrat a été précédé dans cet État d’une offre spécialement faite ou d’une publicité et des actes accomplis par le consommateur nécessaires à la conclusion de ce contrat ;
« 4° Ou si le contrat a été conclu dans un État membre où le consommateur s’est rendu à la suite d’une proposition de voyage ou de séjour faite, directement ou indirectement, par le vendeur pour l’inciter à conclure ce contrat. » – (Adopté.)
Article 3 ter (nouveau)
Le chapitre II du titre Ier du livre III de la deuxième partie du code de l’éducation est complété par une section 12 ainsi rédigée :
« Section 12
« L’information sur le droit du consommateur
« Art. L. 312–20. – L’information sur le droit du consommateur est dispensée dans les collèges et les lycées à raison d’au moins une séance annuelle par groupe d’âge homogène, au besoin avec l’assistance d’intervenants extérieurs. Elle comporte une formation à la gestion du budget d’un ménage. »
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. L’article 3 ter permet de dispenser au cours d’une séance annuelle au moins dans les collèges et les lycées une formation sur le droit des consommateurs et sur la gestion du budget d’un ménage à des groupes d’âge homogènes.
Vous le savez, et je n’en fais pas mystère, pour moi, la meilleure manière de prévenir les problèmes, c’est d’éduquer dès le plus jeune âge. C’est la raison pour laquelle j’ai soutenu l’initiative de mes collègues Yannick Vaugrenard et Delphine Bataille en commission.
Certes, les parents ont un rôle important à jouer, mais n’oublions pas que l’école est à même de dispenser la même information de qualité à tous.
Dans notre société, c’est un fait, la consommation et sa promotion sont partout : l’internet, la télévision, les publicités, les magazines… Désormais, tout support est devenu une invitation à la consommation. Or à qui s’adressent cette multitude et cette diversité d’informations ? Tout particulièrement aux jeunes !
Dans cette guerre pour conquérir des parts de marché, les jeunes sont devenus la cible privilégiée des marques et des publicitaires. Notre société a évolué : désormais, les jeunes sont des consommateurs à part entière, accordant une place prépondérante à leurs besoins matériels.
Cependant, contrairement à leurs aînés, qui, reconnaissons-le, ont déjà des difficultés à faire la part des choses, ils ne sont pas armés pour évaluer les implications autres qu’immédiates de leur acte d’achat et les risques qui peuvent y être liés.
Certes, ces séances dans les collèges et les lycées ne feront pas d’eux des spécialistes du droit de la consommation, mais nous aurons au moins la satisfaction de nous dire que, grâce à ces séances, ils seront sensibilisés à ces problématiques et informés sur certaines pratiques.
Vous le savez, les jeunes sont un public fragile, influençable et sensible aux sirènes de la mode, aux avis et aux critiques. Ils demeurent le plus souvent des consommateurs passifs, inféodés au marketing et aux campagnes de publicité.
Avec cet article, nous souhaitons aider les jeunes à devenir des citoyens responsables et vigilants, bref à comprendre que consommer ne se résume pas à acheter un produit. Nous devons leur apprendre qu’il existe différentes manières de consommer, que la consommation peut et doit être un acte responsable et citoyen.
Je pense notamment à les mettre en garde contre les achats irréfléchis et inutiles, les effets de mode, les produits fabriqués dans certains pays par des enfants ou dans des conditions intolérables. Je pense à valoriser l’importance du Made in France, celle de l’économie sociale et solidaire, et à insister sur la nécessité de privilégier des produits peu consommateurs d’énergie.
Par ailleurs, ces séances d’information seront aussi l’occasion de sensibiliser les jeunes à la gestion d’un budget. Gérer un budget, c’est être prudent, attentif, soucieux ; c’est prévoir et s’interroger sur le sens de ses actions et leurs répercussions ; c’est accepter les contraintes, se dire que l’envie compulsive n’est pas raisonnable ; c’est anticiper.
L’argent se dépense, mais un budget se gère. Gérer n’est pas inné, cela s’apprend. Nous voulons faire baisser le surendettement dans les foyers ? Une fois encore, je suis persuadé que cela passe par l’éducation.
Il faut que les jeunes comprennent qu’avec la gestion d’un budget il peut exister une marge entre ce que l’on veut et ce qu’il est possible d’avoir et que l’argent facile n’existe pas. Tout a un coût, un crédit n’a rien d’anodin.
Et si nous voulons des citoyens responsables et éclairés, informons-les ! Quoi de mieux que l’école pour cela ?
Monsieur le ministre, je sais que vous n’étiez pas favorable à cet article, mais j’espère que vous aurez vu l’importance que peuvent revêtir ces séances pour informer ceux qui, aujourd’hui adolescents, seront les hommes et les femmes de demain.
M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini, sur l'article.
Mme Muguette Dini. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 3 ter, introduit par voie d’amendement en commission, ajoute dans les programmes de l’éducation nationale des éléments d’éducation sur le droit des consommateurs et une sensibilisation à la gestion du budget familial.
Je me réjouis de cette disposition. En effet, il s’agit d’une proposition que je n’ai cessé de proposer et qui a jusqu’alors toujours été rejetée pour la raison suivante : une surcharge des programmes scolaires !
Que de temps perdu !
Mon objectif est de compléter cette proposition en étendant cette initiation à la dernière année de l’école primaire et d’orienter les enseignements déjà existants vers la question de la gestion d’un budget familial.
C’est le premier volet de la prévention du surendettement.
Les acteurs des commissions de surendettement qu’Anne-Marie Escoffier et moi-même avons auditionnés lors de notre travail de contrôle ont tous souligné que la majorité des personnes surendettées présentent un manque de culture financière et une méconnaissance des notions et des pratiques fondamentales de la gestion budgétaire.
Cette méconnaissance ne se limite pas aux personnes surendettées. Elle concerne l’ensemble de la population française, notamment la population jeune.
Or le calcul d’un budget familial a disparu des programmes scolaires. L’entrée dans la vie adulte, qui se traduit par la nécessité de gérer seul un budget personnel, devrait pourtant être préparée en amont par des modules d’éducation budgétaire familiale qui pourraient être prévus à la fin de chaque cycle scolaire : primaire, collège et lycée.
À côté des modules d’éducation budgétaire spécifiques, il pourrait être envisagé que les disciplines enseignées intègrent des exercices de gestion budgétaire : ainsi, en mathématiques ou en sciences économiques et sociales, les exercices de calcul ou les cas pratiques devraient davantage s’inspirer de situations de gestion concrète et quotidienne d’un budget familial.
Cette sensibilisation contribuera à changer les mentalités françaises, qui considèrent bien souvent que l’argent est un sujet tabou, relevant de la sphère privée, si privée d’ailleurs que le sujet est rarement abordé en famille : combien gagnent mes parents ? À quoi cet argent est-il dépensé ? Pourquoi ne peut-on acheter tout ce que l’on désire ? Comment, avec leurs salaires, mes parents ont-ils pu acheter tant de choses ?
Je vois beaucoup de jeunes, et pas toujours de milieux défavorisés, qui ne font pas systématiquement le lien entre leurs rentrées d’argent et leurs dépenses.
Cette proposition est d’ailleurs partagée par les jeunes eux-mêmes.
La dernière étude réalisée sur ce sujet par l’Institut pour l’éducation financière du public date de novembre 2006. Elle est certes ancienne, mais ses éléments restent intéressants et d’actualité : 75 % des jeunes de 15 à 20 ans souhaiteraient apprendre à bien gérer leur budget au quotidien, et 66 % d’entre eux savoir bien utiliser le crédit.
À l’occasion de la session parlementaire de juillet 2012, j’ai accueilli, dans le cadre d’un stage de quinze jours, un lycéen d’Ecully, Hippolyte Prost.
Je lui ai demandé de travailler très concrètement sur les contours de ce module d’éducation budgétaire.
Il a accompli cette mission avec sérieux et compétence. J’ai jugé ses propositions pertinentes et les ai validées.
En résumé, il s’agirait d’intégrer l’éducation à la gestion du budget familial à trois niveaux.
Dès la classe de CM2, dans le cycle des approfondissements, on pourrait envisager une simple sensibilisation au sein du programme de mathématiques.
Au collège, en classe de cinquième et de troisième, elle trouverait sa place au sein du programme d’éducation civique.
Enfin, au lycée, en classe de seconde, elle s’intégrerait aux enseignements dits « d’exploitation économique ».
Une sensibilisation à la gestion du budget familial pourrait donc être accomplie à la fin de chacun des trois cycles, sans alourdir les programmes scolaires. (Mme Maryvonne Blondin et M. Jean-Claude Frécon applaudissent.)
M. le président. L'amendement n° 622, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Avant de présenter cet amendement, qui vise à supprimer l'article relatif à l'éducation budgétaire, je voudrais vous faire part d'une anecdote.
À l'occasion de la conférence nationale de lutte contre la pauvreté, j’ai participé à une table ronde où les acteurs de la lutte contre la pauvreté et les acteurs bancaires se penchaient sur la meilleure manière de lutter contre le surendettement.
La question de l'éducation budgétaire est venue en discussion. Cette question me paraît importante, et j'ai entendu les arguments importants qui viennent d’être avancés. Cette éducation est d'ores et déjà mise en œuvre par un certain nombre d'établissements bancaires, de manière volontaire – le Crédit agricole avait montré l'exemple dans ce domaine il y a quelque temps. Au-delà, plusieurs établissements bancaires ont souhaité que ce texte soit l’occasion de réfléchir à la façon d’améliorer l'éducation budgétaire des familles.
Je comprends parfaitement votre préoccupation, qui consiste à faire précéder l’éducation budgétaire des familles par l'éducation budgétaire de nos enfants, à l’école, au collège et au lycée, de façon qu'ils apprennent ce qu'est un budget.
Mais lorsque la question de la lutte contre le surendettement fut posée, le représentant d'une banque a jugé que le problème aujourd'hui était l’attitude irrationnelle des Français face au crédit, expliquant que les crédits à la consommation de trop étaient le résultat de l’attitude compulsive et irrationnelle de familles qui, raisonnablement, n'auraient pas dû contracter de crédit.
Je me suis alors permis de lui faire remarquer que si nous avions pu éviter l'attitude irrationnelle face au profit d'un certain nombre de traders, encouragés par leur hiérarchie, qui ont pour leur part menacé l'équilibre de tout le système, nous n’en serions peut-être pas aujourd'hui à mesurer ses conséquences en termes de surendettement et de pauvreté.
On s'entendra tous pour dire que, en la matière, ce n'est pas seulement une question d'éducation. On peut être polytechnicien ou grand mathématicien et avoir une attitude totalement irrationnelle face au profit, au point de menacer l'ensemble du système.
J'en viens désormais à l'argumentaire de l'amendement n° 622, rédigé en lien avec mon collègue de l'éducation nationale.
La préoccupation légitime de vouloir développer une meilleure connaissance de l'économie est déjà largement prise en compte dans les parcours scolaires. L’ensemble de nos lycéens ont désormais un enseignement d’économie, au moins en classe de seconde, et cela dans chacune des trois voies de formation. En classe de seconde générale et technologique, un enseignement d'exploration d'économie d'une heure trente par semaine aborde ces questions. En classe de seconde de la voie professionnelle, c'est un module d'enseignement consacré à l'environnement économique et à la protection du consommateur qui est prévu.
De surcroît, des actions éducatives sont organisées dans les écoles et les établissements scolaires sur l'initiative des équipes pédagogiques. Dans ce cadre, les enseignants peuvent faire appel à des associations agréées qui apportent leur expertise et proposent ressources et activités. Par exemple, l’Institut pour l’éducation financière du public développe en partenariat avec l’éducation nationale des outils pédagogiques de sensibilisation depuis le primaire – kit pédagogique pour les élèves de CM2 : « un budget, c’est quoi ? » – jusqu’aux formations d’enseignement supérieur, notamment celles des travailleurs sociaux.
Enfin, il convient surtout de ne pas se substituer au Conseil supérieur des programmes créé par la loi du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République.
Depuis que je suis membre du Gouvernement, j'observe que dans bon nombre de lois, nous avons la volonté de créer un parcours éducatif ou de modifier le contenu des programmes scolaires. Le Gouvernement le souhaite également, mais pas à travers cet article 3 ter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Étant donné que cet article a été introduit par un amendement de commission, je ne vois pas comment je pourrais approuver sa suppression, même si je comprends les arguments de M. le ministre.
Même s’il s'agissait plutôt d'un amendement d'appel, je n'ai pas le pouvoir de demander sa suppression.
Avis défavorable à l’amendement du Gouvernement ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour explication de vote.
M. Yannick Vaugrenard. J'ai bien entendu vos arguments, monsieur le ministre, même si – pardonnez-moi – je n’ai pas ressenti une très grande conviction dans vos propos. (Sourires sur quelques travées.)
En revanche, je partage votre conclusion sur l'article 1er du projet de loi relatif à la consommation, lorsque vous avez affirmé que l'action de groupe conférerait à tous les citoyens un pouvoir supplémentaire sur leur vie. Je trouve cette expression assez jolie.
Je voudrais aussi que ce projet de loi permette de donner aux citoyens de demain davantage de pouvoir sur leur vie.
Par l'intermédiaire de l'action de groupe, ce projet de loi va aussi donner la possibilité aux jeunes citoyens et aux moins jeunes de pouvoir mieux se défendre collectivement, étant entendu que notre société n'est pas seulement composée d’agents économiques. Le consommateur est aussi un consommateur citoyen, au-delà du fait qu'il est un agent économique. C'est déjà une évidence dans beaucoup de pays de l'Union européenne, et notre pays n’est guère en avance sur cette question de l'information et de l'éducation aux droits du consommateur.
Avec ce projet de loi relatif à la consommation, nous avons marqué un bel essai, qui était très attendu. Je suggère que nous le transformions au moyen d’une formation et d’une information accrues de nos jeunes concitoyens, aujourd'hui et demain, qui leur permettent d'exercer pleinement la faculté qu'ils ont d’être des citoyens et des consommateurs responsables.
C'est la raison pour laquelle je demande le maintien de cet article. (Mme Michelle Meunier et M. Jean-Claude Frécon applaudissent.)
M. Jean-Luc Fichet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. J'ai pour ma part trouvé M. le ministre extrêmement convaincant.
Je vois bien quel est l’objectif de nos collègues Roland Courteau et Muguette Dini, pour lesquels j'ai beaucoup de respect.
Nous avons le réflexe de vouloir sensibiliser nos jeunes aux enjeux de notre temps. Mais il y aurait tant à faire ! Il y a tant d'enjeux, qui parfois mettent la sécurité de nos jeunes en cause – je pense notamment aux jeux vidéo ou aux réseaux sociaux.
J’attire toutefois votre attention sur un paradoxe, mes chers collègues : voilà quelques jours, nous apprenions que la part des programmes d'histoire consacrée à la construction de l’Union européenne ou au général de Gaulle devrait sans doute être réduite, simplement parce que, de l'avis de tous, les programmes sont surchargés.
Faut-il dès lors multiplier nos demandes sociales pour que les professeurs intègrent de plus en plus de cours sur l'ensemble des enjeux de la vie en société ? C'est une question complexe.
Le problème de l'école aujourd'hui, c'est aussi qu'elle étouffe de ces multiples demandes sociales.
M. Yannick Vaugrenard. Il ne s’agit pas d’une demande sociale en l’occurrence !
M. Bruno Retailleau. Il me semble que l'objectif de l'école, c'est d'abord de former des esprits libres. Si nous avons des citoyens debout, ils pourront par leur esprit critique formuler leurs propres opinions et prendre de la distance par rapport aux sujétions de la mode, aux sujétions médiatiques, ce que Hegel appelait « l'esprit du temps ».
Plus on demande à l'école de se charger de sujets qui sont malgré tout périphériques, plus on disperse l'enseignement et l'attention des élèves. Au final, on risque d’aboutir à l'effet inverse de celui que l'on recherche. Concentrons-nous plutôt sur le rôle fondamental de l'école. Plus on la chargera de demandes de toutes sortes, moins cet esprit critique pourra prospérer.
C'est la raison pour laquelle je voterai des deux mains, si je puis dire, en faveur de l'amendement du Gouvernement !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Les membres du groupe écologiste ne soutiendront pas l'amendement présenté par M. le ministre.
L'éducation à la consommation responsable et éthique n'est pas périphérique, mais essentielle. Nous demandons qu'elle soit intégrée aux programmes, au moyen de tous les modes d'étude existant.
M. Jean-Vincent Placé. Cela ressemble à un front renversé !
M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini, pour explication de vote.
Mme Muguette Dini. Monsieur le ministre, je souscris volontiers à l’avant-dernier paragraphe de votre intervention : il convient de ne pas se substituer au Conseil supérieur des programmes. Mais il ne nous est pas interdit de lui faire des suggestions !
Contrairement à mon ami Bruno Retailleau, il me semble extrêmement important d'introduire un peu de réalisme dans les programmes. Le fait d'intégrer dans le cursus de petits modules de gestion n'aura pas d'incidence sur le temps scolaire ; c'est juste une question d'organisation.
Quant aux deux paragraphes précédents de votre argumentaire, monsieur le ministre, si j’osais, je dirais que c'est du pipeau ! Vous nous parlez d'un enseignement d'exploration en économie hebdomadaire d'une heure trente en classe de seconde. Mais cet enseignement aborde les problèmes macro-économiques : il vise à expliquer ce qu'est l'économie, et non les recettes et les dépenses d’un ménage ou d’un jeune.
Sur cinq jeunes de trente ans rencontrés ces derniers mois, dont deux bacheliers, aucun n'avait constaté que la présence d'un chiffre en bas de la colonne « débit » sur leur relevé de banque signifiait qu'ils étaient à découvert. (Exclamations dubitatives sur plusieurs travées du groupe socialiste.) Je vous assure que c'est vrai ! D'ailleurs, ils ne consultent pas leur relevé de compte et n’établissent pas de lien entre leur découvert et le crédit que leur banquier leur propose.
Demandez autour de vous à des gens relativement simples comment ils gèrent leur budget ; vous serez surpris !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Notre groupe est quelque peu perplexe. Certes, nous n’allons pas passer sur ce sujet une heure, c'est-à-dire l’exacte durée que nous souhaitons voir consacrée à l'enseignement au droit du consommateur et à la gestion d’un ménage, mais tout de même !
Monsieur le ministre, je ne comprends pas votre réticence. Votre collègue de l'éducation nationale n'est, me semble-t-il, pas opposé à cette mesure ; ou alors il tiendrait un double langage, ce qui n'est pas imaginable, surtout de la part d’un pédagogue et d’un enseignant ! (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
Nous parlons ici non pas d’une éducation à consommer, mais d’une éducation à la critique de la consommation et à la prévention des pièges multiples qu’elle recèle, afin que les jeunes deviennent des consommateurs responsables.
Ne soyons pas intégristes ! La manière dont les enseignants géreront cette heure sera laissée à leur appréciation. Les uns pourront l'intégrer dans un cours d'économie, les autres dans un cours d'histoire. Il y a mille façons d'apprendre aux jeunes à être critiques à l'égard du monde dans lequel ils vivent. Pourquoi nous priver de celle-là ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Sur ce sujet, ma réflexion a été stimulée par Yannick Vaugrenard !
Avec la loi sur la refondation de l'école, nous avons mis en place un conseil supérieur des programmes qui est chargé de la refonte des programmes scolaires. Or, loi après loi, nous voyons des articles modifier les programmes pour y intégrer tel ou tel aspect qui paraît indispensable au regard des évolutions de la société.
À tous ceux qui ont avancé des arguments en faveur de cet article, notamment Mmes Rossignol et Dini ainsi que M. Labbé, je tiens à dire que leur préoccupation est parfaitement légitime.
Cependant, je le répète, à force d'additionner, ici un article 3 ter, là un article 4 bis, les invitations, voire les injonctions, à intégrer dans les programmes scolaires tel ou tel aspect, nous finirons par entrer en contradiction avec la mission dévolue au Conseil supérieur des programmes, qui est chargé de définir l'architecture des enseignements à l'école primaire, au collège et au lycée.
Je terminerai par un exemple. Pour ce qui relève de mon autre portefeuille, l'économie sociale et solidaire, j'ai souhaité que la biodiversité économique puisse faire partie des cours d'économie, notamment pour les élèves de seconde. Pour autant, cela ne fera pas l’objet d’un article de loi. Nous avons donc travaillé avec le ministère de l'éducation nationale afin d’examiner comment le Conseil supérieur des programmes pourra intégrer ce thème. Mais, à mes yeux, ce n’est pas à la loi d’indiquer ce que devra faire demain le Conseil supérieur des programmes.
J’ai bien entendu ce qui a été dit. Mesdames, messieurs les sénateurs, il existe déjà des instruments – je pense notamment aux kits pédagogiques pour apprendre, dès le CM2, ce qu'est un budget. Au-delà, le Conseil supérieur des programmes peut parfaitement se saisir demain de la préoccupation qui est la vôtre, et envisager de prendre en compte l'économie circulaire et collaborative dans les cours d'économie, ou l'éducation à la consommation pour que les élèves puissent mieux appréhender les modes de consommation. Cette démarche me paraît tout à fait honnête. Néanmoins, je ne suis pas du tout sûr que cela relève bien de la loi, et le ministre de l'éducation nationale non plus.
C'est la raison pour laquelle nous préférerions que l’article 3 ter soit supprimé.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le ministre, je comprends votre propos. L’article 3 ter est peut-être trop précis, notamment en termes d'horaires. Nous voulons simplement inciter le Conseil supérieur des programmes à intégrer la sensibilisation au droit du consommateur dans les programmes, voilà tout ! Ce qui vous choque – peut-être outrepassons-nous effectivement notre rôle ? –, c'est qu'un programme précis ait été prévu, à raison d'une séance annuelle comportant une formation à la gestion.
Tout cela est sans doute trop précis. Il serait préférable d’indiquer simplement dans ce projet de loi que nous souhaiterions qu’une action de sensibilisation au droit des consommateurs soit menée auprès de la jeunesse, sans même faire mention des collèges et des lycées.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. J'aimerais apporter une explication au regard de ce qui s'est passé en commission la semaine dernière.
Cette disposition avait été envisagée comme un amendement d'appel. Je suis très surpris qu'elle ait fini par figurer dans le texte de la commission, car il avait été convenu que l’amendement serait retiré, qu’il était un appel à prendre en considération l'information sur le droit à la consommation et sur le droit environnemental. Voilà ce qui avait été convenu avec le rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. C'était bien dans cet esprit-là !
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Pour ma part, je suis tout à fait l'argumentation de M. le ministre. Puisqu’il y a un conseil supérieur des programmes chargé d'élaborer les programmes, cette disposition devait bien être comprise comme un appel à ce que ces deux domaines soient pris en considération, mais cela s'arrête là.
Au risque d’être complètement en porte-à-faux par rapport au travail du Conseil supérieur, nous ne pouvons être à ce point normatifs, notamment en imposant dans la loi une séance annuelle. (Applaudissements sur quelques travées de l'UMP.–M. Claude Dilain applaudit également.)
Mme Catherine Procaccia. Vous pouvez remercier l’opposition !
M. le président. En conséquence, l'article 3 ter est supprimé et les amendements nos 374 rectifié et 284 n'ont plus d'objet.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de ces amendements.
L'amendement n° 374 rectifié, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, était ainsi libellé :
Alinéa 4
1° Première phrase
Après le mot :
dispensée
insérer les mots :
, lors de la dernière année d'école élémentaire,
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les enseignements existants sont également orientés vers cette formation.
L'amendement n° 284, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, était ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
et aux pratiques de l’économie collaborative ainsi qu’une sensibilisation au recyclage et à toutes autres formes de valorisation des déchets
Article 4
I. – Le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est ainsi rédigé :
« Chapitre Ier
« Obligation générale d’information précontractuelle
« Art. L. 111-1. – (Non modifié) Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique, de manière lisible et compréhensible, au consommateur les informations suivantes :
« 1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
« 2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;
« 3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
« 4° Les informations relatives à son identité et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’État.
« Le présent article s’applique également aux contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité, lorsqu’ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d’une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l’environnement.
« Art. L. 111-2. – (Non modifié) I. – Outre les mentions prévues à l’article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d’un contrat de fourniture de services et, lorsqu’il n’y a pas de contrat écrit, avant l’exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’État. Ce décret précise celles des informations complémentaires qui ne sont communiquées qu’à la demande du consommateur.
« II. – Le présent article ne s’applique ni aux services mentionnés aux livres Ier à III et au titre V du livre V du code monétaire et financier, ni aux opérations pratiquées par les entreprises régies par le code des assurances, par les mutuelles et unions régies par le livre II du code de la mutualité et par les institutions de prévoyance et unions régies par le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale.
« Art. L. 111-3. – Le fabricant ou l’importateur de biens meubles informe le vendeur professionnel de la date jusqu’à laquelle les pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens sont disponibles sur le marché. Cette information est délivrée au consommateur par le vendeur de manière lisible avant la conclusion du contrat et confirmée par écrit, lors de l’achat du bien.
« Dès lors qu’il a indiqué la date mentionnée au premier alinéa, le fabricant ou l’importateur fournit aux vendeurs professionnels qui le demandent les pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens vendus.
« Art. L. 111-4. – (Non modifié) I. – En cas de litige relatif à l’application des articles L. 111-1 à L. 111-3, il appartient au professionnel de prouver qu’il a exécuté ses obligations.
« II. – Les articles L. 111-1 et L. 111-2 s’appliquent sans préjudice des dispositions particulières en matière d’information des consommateurs propres à certaines activités.
« Art. L. 111-5. – (Non modifié) Tout manquement aux articles L. 111-1 à L. 111-3 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale. L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 141-1-2.
« Art. L. 111-6. – (Non modifié) Les dispositions du présent chapitre sont d’ordre public. »
II. – L’article L. 113-3 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « , les limitations éventuelles de la responsabilité contractuelle » sont supprimés et, après le mot : « vente », sont insérés les mots : « et de l’exécution des services » ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les transporteurs aériens remboursent, sans frais, les taxes et redevances individualisées et affichées comme telles dans le prix du titre de transport, dont l’exigibilité procède de l’embarquement effectif du passager, lorsque le titre de transport n’est plus valide et n’a pas donné lieu à transport. Ce remboursement intervient au plus tard trente jours à compter de la date de réception par le transporteur aérien de la demande du passager. Les conditions générales de transport informent les passagers des modalités des demandes de remboursement. »
III. – (Non modifié) Après le même article L. 113-3, sont insérés des articles L. 113-3-1 et L. 113-3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 113-3-1. – I. – Lorsque le prix ne peut être raisonnablement calculé à l’avance du fait de la nature du bien ou du service, le professionnel fournit le mode de calcul du prix et, s’il y a lieu, tous les frais supplémentaires de transport, de livraison ou d’affranchissement et tous les autres frais éventuels. Lorsque les frais supplémentaires ne peuvent raisonnablement être calculés à l’avance, le professionnel mentionne qu’ils peuvent être exigibles.
« II. – Dans le cas d’un contrat à durée indéterminée ou d’un contrat assorti d’un abonnement, le prix total inclut le total des frais exposés pour chaque période de facturation. Lorsque de tels contrats sont facturés à un tarif fixe, le prix total inclut également le total des coûts mensuels. Lorsque le coût total ne peut être raisonnablement calculé à l’avance, le mode de calcul du prix est communiqué.
« Art. L. 113-3-2. – Tout manquement aux articles L. 113-3 et L. 113-3-1 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale. L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 141-1-2. »
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, sur l'article.
M. Gérard Le Cam. J’évoquerai d’emblée l'amendement de M. Fauconnier concernant l'étiquetage. Nous y sommes tellement favorables que, par le sous-amendement que nous avons déposé, nous souhaitons donner une pleine portée aux exigences qu’il pose en termes de traçabilité pour les produits agricoles et alimentaires.
Il se dessine d’ailleurs un consensus très large sur la nécessité d’inscrire dans la loi l’obligation d’étiquetage de l’origine de l’ensemble des produits agricoles et alimentaires, pour toutes les viandes et les produits à base de viande, et nous sommes nombreux à regretter le retard pris dans la réglementation.
Nous avons entendu vos arguments en commission, monsieur le rapporteur, pour justifier que les obligations soient conditionnées à l’approbation de la Commission européenne. Cependant, nous ne sommes pas favorables à de telles réserves, pour des motifs tant politiques que juridiques.
En effet, le Parlement, souverain, ne saurait, selon nous, subordonner l’autorité de la loi à une autorité extérieure. En tout cas, telle n’est pas là notre conception du rôle du législateur.
Ensuite, il appartient à tout juge chargé de l’application de la loi de faire respecter la règle établie par l’article 55 de la Constitution, qui conduit à écarter la loi nationale lorsqu’elle vient en conflit avec un engagement international ou européen.
De plus, si la Commission est gardienne des traités, la compétence exclusive pour l’interprétation de la compatibilité de la règle nationale avec le droit européen appartient à la seule Cour de justice.
Il existe des procédures particulières dans lesquelles l’exécutif national soumet le projet d’un État à la validation de la Commission. Néanmoins, tel n’est pas le cas ici. De toute manière, dans ce cadre, le projet est soumis avant que le texte ne soit adopté.
Pour toutes ces raisons de fond, mais aussi en raison du risque d’inconstitutionnalité de cet amendement, nous vous demandons d’en supprimer les alinéas 5 et 8.
En effet, selon nous, soit l’amendement est adopté ainsi modifié, soit il n’est pas nécessaire de l’adopter, car il s’agirait alors d’une simple mesure d’affichage.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 559, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après les mots :
fourniture de services
rédiger ainsi la fin de l’alinéa :
le professionnel fournit au consommateur, de manière claire et compréhensible et pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, les informations suivantes :
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Avec cet amendement, nous souhaitons que l’obligation d’information précontractuelle pesant sur le professionnel ne soit pas disproportionnée pour les transactions du quotidien qui ne requièrent pas que le professionnel communique systématiquement son identité et ses activités.
M. le président. L'amendement n° 341 rectifié, présenté par Mmes Dini et Létard, M. Tandonnet et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte
II. - Alinéa 8
Supprimer les mots :
, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte,
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement a pour objet de rectifier une apparente erreur dans la transposition de la directive.
L'expression « pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte » a été ajoutée par l'Assemblée nationale à l'alinéa 8. En l'état du texte qui nous a été transmis, elle ne s'applique qu'aux informations relatives à l'identité et aux activités des professionnels, lesquelles doivent être communiquées au consommateur lors de la signature d'un contrat.
Or l'article 5 de la directive européenne 2011/83/UE relative au droit des consommateurs prévoit que cette expression s'applique à toutes les informations que le professionnel doit fournir au consommateur, c'est-à-dire également aux caractéristiques essentielles du bien ou du service, au prix du bien ou du service, à la date à laquelle le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service, et, bien sûr, aux informations relatives à son identité et à ses activités.
Cet amendement tend à corriger cette erreur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Ces deux amendements atténueraient considérablement l'obligation d'information qui pèse sur le professionnel.
Tel que l’article 4 est actuellement rédigé, c’est seulement la communication des informations relatives à l’identité et aux activités du vendeur qui doit se faire, pour autant que ces informations ne ressortent pas du contexte. Si l’on adoptait ces amendements, c’est l’ensemble des informations sur les caractéristiques essentielles du bien, sur son prix, sur les garanties légales et sur les délais de livraison qui cesseraient d’être strictement obligatoires, ce qui est inacceptable.
Je demande à leurs auteurs de retirer leurs amendements ; sinon, la commission y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je voudrais d’ores et déjà apporter un commentaire général, raison pour laquelle je serai très bref ultérieurement.
La directive européenne relative aux droits des consommateurs est d'harmonisation maximale, à l'exception des dispositions précontractuelles ; et encore, pour ce qui est de la vente à distance, tout ce qui est précontractuel est aussi d'harmonisation maximale.
Pour cette raison, lorsque nous examinerons des amendements portant sur ce point, je me contenterai de donner un avis défavorable sans entrer dans le cœur du sujet, ce qui permettra peut-être d'accélérer les débats…
Sans doute une réflexion devra-t-elle être menée, car il n’est pas satisfaisant de débattre de textes sur lequel le Gouvernement peut seulement répondre que, s’agissant d'harmonisation maximale, il n’est pas question d’y toucher. Nous avons nous-mêmes souvent interrogé la Commission pour savoir s’il était possible de faire bouger les textes, et c'est la réponse qui nous a toujours été apportée.
On peut d'ailleurs ne pas aimer non plus devoir légiférer par ordonnances. C'est sans doute un point sur lequel on devrait réfléchir, car nous sommes là dans des exercices qui, à bien des égards, sont sinon factices, du moins particulièrement frustrants, pour les parlementaires comme pour le Gouvernement.
En l’espèce, s’agissant de la directive relative aux droits des consommateurs, l'essentiel du texte est d’harmonisation maximale, raison pour laquelle, sur les deux amendements, le Gouvernement est du même avis que la commission.
M. le président. L'amendement n° 449, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Le cas échéant, le prix des biens accessoires non fournis indispensables à l’utilisation du bien ;
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Lorsque vous achetez une imprimante, les cartouches d'encre coûtent très cher, parfois davantage que l'imprimante elle-même.
Pour un four, une hotte, une chaîne hi-fi, des enceintes, c'est la même chose : on se rend compte que les cordons de raccordement sont très chers. Pour un jouet, il en est de même : le jouet n’est pas cher, mais les piles, elles, sont coûteuses.
Il s'agit donc simplement d'attirer l'attention du consommateur sur le prix des biens accessoires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Je comprends le sens de la proposition, mais elle me paraît tout de même assez irréaliste, car elle ferait peser d'énormes obligations sur le vendeur qui, compte tenu de la diversité de ses marchandises, n’aurait pas la capacité d'y satisfaire, faute parfois de disposer lui-même des informations nécessaires.
Je demanderai donc le retrait de cet amendement ; à défaut, je rendrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 146 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° La durée de la garantie de conformité visée à l'article L. 211-12 et le fait que cette dernière lui ouvre, au titre de l'article L. 211-9, le choix entre le remplacement ou la réparation en cas de défaut de conformité.
La parole est à M. Alain Bertrand.
M. Alain Bertrand. Cet amendement est signé par Jacques Mézard et une bonne partie du groupe du RDSE.
L’article 4 porte sur les obligations précontractuelles du vendeur vis-à-vis de l’acheteur d’un bien ou d’un service.
Il précise notamment les informations qui doivent obligatoirement être communiquées au consommateur avant l’achat.
Il transpose l’article 5 de la directive 2011/83/UE relative au droit des consommateurs mais, celle-ci n’étant pas soumise à une obligation de transposition maximale, il est tout à fait possible d’adopter – je cite la directive – « des exigences supplémentaires ».
C’est ce que nous proposons avec cet amendement très simple qui prévoit d’ajouter à la liste des informations devant être communiquées au consommateur, la durée de la garantie légale de conformité.
Permettant, en cas de défaut de conformité, l’échange ou la réparation d’un bien pendant deux ans, cette garantie est bien souvent ignorée des consommateurs. Or, pour les protéger contre les risques de multi- assurance qui, eux, se multiplient, et lutter contre le gaspillage résultant de la non-utilisation de cette garantie, nous proposons simplement de renforcer l’information des consommateurs en ce sens. Cela semble parfaitement possible.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Cet amendement est satisfait.
En effet, l'alinéa 8 de l’article 4 renforce l'obligation d'information en vigueur en matière de garantie ; il prévoit en particulier que les informations relatives aux garanties – notamment la garantie de conformité – sont obligatoirement délivrées au consommateur.
Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Bertrand, l'amendement n° 146 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Bertrand. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 146 rectifié est retiré.
L'amendement n° 270 rectifié, présenté par M. Dubois, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
Supprimer les mots :
, de gaz ou d’électricité,
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 451, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Compléter cet alinéa par les mots :
, et mentionnent obligatoirement un numéro de téléphone, non surtaxé, afin de renseigner les consommateurs sur leur droit à bénéficier des tarifs sociaux de première nécessité pour l’eau, l’électricité et le gaz
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Il s'agit de rendre obligatoire la mention d’un numéro de téléphone non surtaxé destiné à renseigner les consommateurs sur leurs droits aux tarifs sociaux de première nécessité pour l'eau, l'électricité et le gaz.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Je rappelle que, d'une part, les conditions générales de vente d'EDF et de GDF mentionnent déjà un numéro vert d'information sur les tarifs sociaux et que, d'autre part, dans bien des cas, l'attribution des tarifs sociaux est désormais automatisée. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Ainsi, la loi n° 2013-312 du 15 avril dernier a permis de mieux identifier les personnes ayant droit à ces tarifs sociaux afin de leur permettre d'en bénéficier automatiquement.
Je demanderais donc le retrait de l'amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Je pense que cet amendement est extrêmement important pour la protection des consommateurs, notamment pour les plus fragiles de nos concitoyens. Environ la moitié de ceux qui pourraient accéder aux tarifs sociaux n’en bénéficient pas. Cela signifie qu’ils n’ont pas la première information, que ce soit pour l'eau, l'électricité ou le gaz.
C'est pourquoi, mes chers collègues, vous devriez voter un amendement aussi utile qui permettra que tous ceux qui y ont droit puissent accéder aux tarifs sociaux, et ce n'est pas du tout le cas aujourd’hui.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. Comme le rapporteur vient de le rappeler, nous avons voté une loi – totalement validée en avril 2013 – dont un certain nombre de dispositions permettent de faire bénéficier des tarifs sociaux les quelque quatre millions de ménages qui y ont droit.
Jusqu’à présent, cependant, faute d'information, une grande partie de ces ménages n’en bénéficiaient pas, mais, avec cette loi, ce sont normalement huit millions de personnes qui pourront accéder à ces tarifs sociaux sur l'électricité et le gaz.
M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, pour explication de vote.
Mme Maryvonne Blondin. Je voudrais simplement rappeler ici que l'accès à ces tarifs sociaux est également facilité par les attributions des conseils généraux. Ces derniers comprennent des commissions locales de lutte contre les exclusions qui doivent traiter ces problèmes et délivrent également une information aux familles et aux personnes rencontrant des difficultés.
Je comprends la nécessité de cette action, car un nombre croissant des demandes qui nous sont adressées concernent l'accès à ces tarifs sociaux.
Vous avez parlé de l'eau et, pour ma part, je souhaitais rappeler qu’une aide du Fonds de solidarité pour le logement permet aussi de régler des impayés de téléphone.
M. le président. L'amendement n° 389 rectifié, présenté par Mmes Dini et Létard, M. Tandonnet et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Remplacer les mots :
coordonnées postales, téléphoniques et électroniques
par les mots :
coordonnées postales, téléphoniques ou électroniques
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. La directive 2011/83/UE relative aux droits des consommateurs, que l'article du projet de loi entend transposer, a préservé une certaine liberté pour les entreprises en prévoyant au c) de son article 6 que l’information précontractuelle en matière de vente à distance intègre l’adresse géographique où le professionnel est établi ainsi que son numéro de téléphone, son numéro de télécopieur et son adresse électronique, lorsqu’ils sont disponibles, afin que le consommateur puisse le contacter rapidement et communiquer efficacement avec lui.
L'expression « lorsqu’ils sont disponibles » préserve en effet une certaine souplesse pour les entreprises. Il me semble important de tenir compte de la diversité des entreprises dont la taille du service clients ne permet pas toujours d’intégrer simultanément quatre canaux d’échanges avec les consommateurs.
C'est pourquoi cet amendement prévoit de remplacer le cumul des différentes coordonnées existantes par la possibilité de n’utiliser qu’une partie d'entre elles, sans que cela nuise au consommateur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Dans l'intérêt du consommateur, une information complète sur les coordonnées du professionnel est préférable. S'agissant, en particulier, de l'argument selon lequel les professionnels ne disposeraient pas d'adresse électronique, il me laisse perplexe : créer et utiliser une adresse électronique est simple et gratuit et n’impose pas une contrainte forte aux professionnels.
Je serai donc plutôt défavorable à l'amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 94, présenté par Mme Lamure, M. Hérisson et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Après le mot :
électroniques,
insérer les mots :
lorsqu’elles sont disponibles,
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Je retire mon amendement, qui est proche du précédent.
M. le président. L'amendement n° 94 est retiré.
L'amendement n° 674, présenté par MM. Fauconnier et M. Bourquin, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 12, première phrase
Après le mot :
professionnel
insérer les mots :
de la période pendant laquelle ou
La parole est à M. Alain Fauconnier, rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision qui donne plus de souplesse au professionnel en lui laissant le choix de fournir des pièces pendant une période donnée, ou jusqu'à une date donnée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 560, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéas 12 et 13
Remplacer les mots :
indispensables à l’utilisation
par les mots :
permettant la réparation
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Pour éviter toute ambiguïté et permettre au consommateur d'avoir toujours accès à un meilleur produit tout en offrant plus de souplesse au fabricant, cet amendement prévoit une obligation portant sur la réparation du produit.
M. le président. L'amendement n° 292, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 12, première phrase
Après les mots :
à l’utilisation des biens
insérer les mots :
et les outils non-standards permettant la réparation des biens
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à renforcer l'information du consommateur afin qu’il puisse, s'il le souhaite, privilégier l'achat d'un produit réparable.
L'article 4 dispose que le fabricant ou l'importateur des biens meubles informe le vendeur professionnel de la date jusqu'à laquelle les pièces détachées indispensables à l'utilisation des biens sont disponibles sur le marché.
Cette information est délivrée au consommateur par le vendeur de manière lisible, avant la conclusion du contrat, et elle est confirmée par écrit lors de l'achat du bien.
Cependant, il serait utile de préciser également la disponibilité des outils non standards permettant la réparation des biens. En effet, dans certains cas, la réparation nécessite des outils particuliers. Or, s'ils ne sont pas accessibles sur le marché, la réparation est impossible.
On pense notamment aux visseries propriétaires, nécessitant des outils non standards tels que ceux qui sont utilisés, par exemple, par Apple pour les iPhones.
Cet amendement tend donc à compléter l'alinéa 12 dans le but de véritablement favoriser la réparation, vecteur d'emplois non délocalisables, notamment dans l'économie sociale et solidaire.
Ici encore, il s'agit aussi de déjouer les stratagèmes de certains fabricants…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L'amendement n° 560 est motivé par le souci que les pièces que doit fournir le fabricant ne soient pas exclusivement celles qui sont utilisées dans la fabrication initiale du produit – pièces identifiées par un numéro, référence spécifique.
Mais, selon la lecture que je fais du texte, je ne vois pas ce qui obligerait le fabricant à livrer des pièces d'origine qui seraient moins performantes que les pièces actuellement disponibles. Le fabricant a l'obligation de livrer des pièces nécessaires à la restauration de la fonctionnalité du produit, pas à le remettre dans son état d'origine.
Juridiquement, il s'agit d'assurer la conformité du produit, c'est-à-dire, selon l'article L. 211-5 du code de la consommation, de faire en sorte que le bien soit propre à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable.
J’émettrai donc un avis défavorable si l’amendement n’est pas retiré.
S’agissant de l’amendement n° 292, monsieur Labbé, l'information sur la disponibilité des pièces détachées au consommateur fait l'objet d’une mention écrite du vendeur, avant la conclusion de la vente et lors de l'achat du bien. Cette information risque déjà de poser des problèmes pratiques au vendeur. Si l'on y ajoute une information sur les outils servant à réparer les biens, on rend la situation du vendeur absolument inextricable…
Je demanderai donc le retrait de l’amendement et, à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Labbé, l'amendement n° 292 est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. Je ne le retire pas, car nous tenons absolument à insister sur la réparabilité des biens.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 290, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 12, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, dans la limite de dix ans minimum
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. L’accès aux pièces détachées pendant une période de dix ans est essentiel pour faciliter la réparation. Cette filière est d’ailleurs un vecteur d’emplois non délocalisables très important qui permettrait une forme de réindustrialisation locale.
Actuellement, la loi prévoit que le fabricant ou l’importateur de biens meubles doit informer le vendeur professionnel de la période « pendant laquelle » les pièces indispensables à l’utilisation des biens seront disponibles sur le marché.
La nouvelle écriture de cet article dans le projet de loi sur la consommation reformule cette obligation, le fabricant ou l’importateur de biens meubles informant le vendeur professionnel de la période « jusqu’à laquelle » les pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens sont disponibles sur le marché ». Je ne vois pas une grande différence ; je dirais même que c’est pratiquement pareil…
Ce que l’on en conclut, c’est que le secteur de la réparation ne sera pas davantage dynamisé qu’aujourd’hui et que les consommateurs n’auront toujours pas les moyens de réparer leurs produits s’ils le souhaitent, car, si le fabricant ne propose pas de pièces détachées, il n’y en aura tout simplement pas sur le marché !
Cet amendement vise à garantir une durée de disponibilité sur le marché des pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens pendant une durée de dix ans minimum.
Il faut savoir que, selon le Groupement interprofessionnel des fabricants d’appareils d’équipement ménager, le GIFAM, « les appareils sont utilisés en moyenne plus de dix ans ». Le réfrigérateur, le congélateur, la machine à laver et le lave-vaisselle auraient une durée de vie moyenne évaluée entre dix et quinze ans selon les appareils.
Or, actuellement, après deux ans, les garanties légales de conformité ne jouent plus ; les consommateurs sont donc confrontés à la difficulté de trouver les pièces détachées pour réparer leurs produits.
Par exemple, si une touche d’un clavier d’ordinateur ne fonctionne plus, aucun des plus grands fabricants d’ordinateurs ne peut actuellement fournir sur le marché la touche en question, qui coûte environ trois euros l’unité. Il faut faire réparer ou renouveler l’ensemble du clavier, pour un coût moyen compris entre 100 et 250 euros…
Grâce à cet amendement, nous pallierions donc réellement ce problème.
M. le président. L'amendement n° 291, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 12, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, dans la limite de cinq ans minimum
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement a les mêmes motivations, mais il est plus modeste. Cinq ans, c’est un minimum, et j’espère vivement que nous serons suivis au moins sur ce point.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Monsieur Labbé, je partage la philosophie qui inspire ces amendements.
La non-disponibilité des pièces détachées conduit, pour certains produits, à un gaspillage de ressources considérable. Toutefois, le dispositif proposé ne me paraît pas constituer la bonne réponse.
D’une part, une durée uniforme de disponibilité des pièces détachées, de surcroît assez longue, ne permet pas de prendre en compte la grande diversité des durées de vie et des rythmes d’obsolescence des biens mis sur le marché : dix ans, cela a un sens pour certains produits, mais pas pour d’autres.
D’autre part, garantir la disponibilité de pièces détachées sur une longue période, cela a aussi un coût important. Le vrai défi, c’est d’arriver à avoir des pièces détachées disponibles à un coût abordable ! On peut imposer aux constructeurs des durées de cinq à dix ans, mais si c’est pour avoir des pièces détachées à un prix exorbitant qui rend économiquement sans intérêt la réparation des biens, nous n’aurons guère avancé et passerons à côté de notre objectif.
Je comprends le sens de ces deux amendements, mais j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Ces amendements sont-ils maintenus, mon cher collègue ?
M. Joël Labbé. Nous restons donc dans la logique du semi-jetable et de l’irréparable…
Je retire l'amendement n° 290 prévoyant une durée de disponibilité de dix ans, mais je maintiens l'amendement n° 291 imposant une durée de cinq ans.
M. le président. L'amendement n° 290 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 291.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 289, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 12
1° Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le fabricant ou l’importateur de biens d’équipements électriques et électroniques, tels que défini à l’article R. 543-172 du code de l’environnement, informe le vendeur professionnel du temps moyen entre pannes (MTBF).
2° En conséquence, deuxième phrase
Remplacer les mots :
Cette information est délivrée
par les mots :
Ces informations sont délivrées
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Face aux problèmes de la réduction de la durée de vie des produits et de l’obsolescence programmée, pourquoi ne pas imposer tout simplement une durée de vie minimum par produit ?
Il s’avère que c’est très compliqué, puisqu’il faudrait avoir une estimation réelle de la durée de vie, ou plutôt de la durée d’utilisation. Quels critères retenir, et qui en assurera le contrôle ? Calculer et imposer une durée de vie des produits se révèle être une usine à gaz, un projet qui a toutes les chances de ne jamais aboutir. C’est pourquoi cette disposition n’a pas été retenue dans le cadre de la proposition de loi de Jean-Vincent Placé sur l’obsolescence.
Pour autant, si le consommateur pouvait avoir des indications sur la fiabilité des produits afin d’orienter son choix, ce serait un progrès indéniable. Pour ce faire, nous proposons, par cet amendement, que le fabricant ou l’importateur de biens d’équipements électriques et électroniques informe le vendeur professionnel du temps moyen entre pannes, dit MTBF.
Le temps moyen entre pannes représente le total « temps de fonctionnement moins temps de pannes » divisé par le nombre de pannes. Il intègre dans son calcul les temps de réparation et de maintenance ; il fait partie des ratios d’analyse pour mesurer la qualité d’un système.
Il est à noter que, selon le dernier baromètre sur la consommation de l’Union européenne, 92 % des Français sont favorables à un étiquetage relatif à la durée de vie ou au nombre d’utilisation des produits qu’ils achètent.
Cet indicateur est couramment utilisé par les industriels et consacré par l’Union européenne. Nous pouvons donc nous reposer sur cet outil pour donner une estimation de la fiabilité de ces produits aux vendeurs et aux consommateurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Le temps moyen entre pannes est une information technique utile consacrée par le règlement européen 801/2013 du 22 août 2013.
Je souligne cependant que ce texte fait partie des actes non législatifs de l’Union. Concrètement, la référence à ce genre de notion relève du niveau réglementaire. Si on commence à élever ce type de norme au niveau législatif, le code de la consommation va bientôt compter des dizaines de volumes !
Sur le fond, il ne faut pas oublier que nous discutons d’une partie du code de la consommation relative à l’information obligatoire du consommateur. Nous devons donc nous concentrer sur les informations les plus essentielles à lui communiquer, comme le prix, les caractéristiques fondamentales du produit ou du service, les régimes de garantie applicables. Le présent texte renforce fortement ces obligations d’information, ce qui est une bonne chose. Cependant, si on accumule les informations délivrées au consommateur, on finira par le noyer.
L’avis de la commission est donc plutôt défavorable, si l’amendement n’est pas retiré.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 293, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 12, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le fabricant ou l’importateur de biens meubles informe également le vendeur professionnel du caractère réparable et amovible des composants indispensables à l’utilisation des biens.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Dans le même esprit que les précédents amendements écologistes sur la réparation, je propose ici d’améliorer la formation du consommateur et de favoriser le secteur de la réparation.
Pour sa bonne information, le consommateur doit être en mesure de savoir, avant l'achat, s'il pourra réparer tout ou partie de son bien. Aussi convient-il d'inscrire à l'article 4 que le fabricant ou l'importateur de biens meubles informe également le vendeur professionnel du caractère réparable et amovible des composants indispensables à l'utilisation des biens.
Je tiens à rappeler que, d’après une étude réalisée en 2011 par TNS-SOFRES et le GIFAM, dans 40 % à 50 % des cas les appareils sont remplacés alors qu'ils sont encore en état de fonctionner ou qu'ils seraient techniquement réparables.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Là encore, je suis d’accord avec l’objectif, mais la solution proposée ne me paraît pas être la bonne.
Imposer une obligation d’information comme celle qui est proposée, de surcroît dans une partie du code de la consommation où elle n’a pas vraiment sa place, restera malheureusement sans effet concret sur les logiques économiques lourdes qui conduisent les fabricants à concevoir des biens sans vraiment se préoccuper de leur réparabilité.
Il y a un vrai problème, mais il convient, me semble-t-il, d’imaginer une autre solution. C'est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 286, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 12, seconde phrase
Après le mot :
délivrée
insérer le mot :
obligatoirement
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement peut sembler simplement rédactionnel, il est pourtant d’une grande importance. Il s’agit d’insérer le mot « obligatoirement », afin de s’assurer que le vendeur soit bien obligé de délivrer l’information concernant la disponibilité des pièces détachées au consommateur.
Je tiens à signaler que cette expression est déjà insérée dans la version actuelle de la loi ; elle a été supprimée dans la nouvelle rédaction proposée dans le projet de loi relatif à la consommation. Je vous cite l’article du code de la consommation tel qu’il est actuellement rédigé : « Le fabricant ou l’importateur de biens meubles doit informer le vendeur professionnel de la période pendant laquelle les pièces indispensables à l’utilisation des biens seront disponibles sur le marché. Cette information est obligatoirement délivrée au consommateur par le vendeur, avant la conclusion du contrat. »
Rien ne s’oppose donc à l’insertion de l’adverbe « obligatoirement » dans le projet de loi, afin d’éviter toute confusion.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L’amendement est selon moi satisfait. Dans un texte juridique, l’indicatif a valeur d’obligation, il n’est donc pas utile d’ajouter l’adverbe « obligatoirement ».
La disposition m’est plutôt sympathique, mais l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement n’est pas du même avis que le rapporteur : il est favorable à cet amendement déposé par M. Placé et défendu à l’instant par M. Labbé.
L’objectif du Gouvernement, qui est, je crois, partagé par le groupe écologiste, par la majorité sénatoriale, mais aussi par une partie de l’opposition, est de faire en sorte que la réparabilité des produits devienne, au moment de l’achat par les consommateurs, un critère d’arbitrage en faveur des produits réparables, au détriment des produits non réparables.
Le fait que l’information soit obligatoirement délivrée par le vendeur au consommateur contribue à éclairer ce dernier au moment de l’arbitrage en faveur d’un produit réparable ou pas.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement vous suggère de voter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 93, présenté par Mme Lamure, M. Hérisson et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 12, seconde phrase
I. - Remplacer le mot :
lisible
par les mots :
claire et loyale
II. - Après le mot :
contrat
supprimer la fin de cette phrase.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Généralement, lors d’une vente, le seul document écrit qui est remis au consommateur est un simple ticket de caisse. Aussi ne nous semble-il pas raisonnable d’imposer au commerçant de rédiger un véritable document ad hoc pour toute vente de biens meubles. Ce serait une charge administrative excessive pour les petits commerçants, alors même que la directive européenne laisse aux professionnels toute latitude dans le choix des moyens les plus adaptés à la délivrance de cette information dès lors que celle-ci est « claire et compréhensible ».
Nous proposons donc de supprimer l’obligation faite au vendeur de confirmer par écrit la période de disponibilité des pièces détachées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Le texte du projet de loi prévoit qu’une information écrite est délivrée avant la vente et confirmée lors de la conclusion du contrat.
Les professionnels soulignent le coût administratif et les difficultés techniques qu’occasionnerait cette obligation d’information renforcée. L’impact économique de cette obligation d’information ne doit cependant pas être surestimé. En outre, une information écrite est nécessaire pour être vraiment opposable au vendeur.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour explication de vote.
Mme Élisabeth Lamure. Je regrette simplement que vous imposiez une charge supplémentaire aux petits commerçants, qui en ont déjà suffisamment, en prévoyant l’obligation d’un document écrit : encore des papiers de plus…
Je trouve que cette mesure est d’un autre temps !
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas d’une charge administrative supplémentaire. Cette disposition, qui avait été supprimée par les députés, a été réintroduite par la commission du développement durable du Sénat.
Il nous paraît très important que cette indication figure par écrit. Comme cela a été dit tout à l’heure, il ne s’agit pas d’un contrat d’une grande complexité administrative : une simple indication sur le ticket de caisse ne devrait pas être très compliquée à mettre en œuvre ; elle donne l’assurance au consommateur de disposer des pièces détachées jusqu’à une certaine date et constitue un justificatif en cas de recours.
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. Nous devons avoir le souci de simplifier les démarches des petites entreprises et des petits commerçants et de ne pas multiplier la paperasse. J’ai entendu M. Fichet, mais je ne suis pas sûr qu’un simple coup de tampon sur un ticket de caisse permette de satisfaire à l’obligation inscrite dans le texte.
Je ne suis pas opposé à ce que nous fassions quelque chose, mais nous devons nous mettre d’accord sur la méthode, car il ne faudrait pas aboutir à une multiplication de papelards pour chaque achat.
Si M. Fichet a raison et qu’il s’agit d’un simple coup de tampon, je suis d’accord, mais je crains que ce ne soit pas suffisant. Je souhaite donc que le rapporteur et le ministre nous apportent des éclaircissements sur ce point.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 93.
M. Gérard Cornu. Monsieur le président, j’ai interpellé le rapporteur et le Gouvernement pour savoir si, comme le dit M. Fichet, il ne s’agit que d’un tampon sur un ticket de caisse, et j’aimerais, avant que nous votions, obtenir une réponse à mes interrogations ! (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.)
Mme Catherine Procaccia. C’est important que cela figure au Journal officiel !
M. le président. La parole est à M. Alain Fauconnier, rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L’argument que j’avançais est également juridique : ce qu’il faut, in fine, c’est une pièce qui fasse foi, peu importe qu’il s’agisse d’un tampon ou non ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je vous prie de m’excuser, monsieur le sénateur, dans un moment de distraction, je n’avais pas réalisé que vous m’aviez interpellé.
M. Gérard Cornu. Cela arrive ! (Sourires.)
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Il nous semblait important de définir dans la loi un formalisme précis. Je comprends que l’on puisse se poser des questions, notamment eu égard à certaines obligations et aux tâches voire aux lourdeurs imposées parfois aux professionnels du fait des textes législatifs.
L’objectif de ce formalisme précis est d’éviter que l’obligation d’information ne soit appliquée sous des formes si variables par les professionnels que le consommateur, au final, ne s’y retrouve pas. Cette précision dans la définition du formalisme est, à nos yeux, synonyme de sécurité juridique tant pour les consommateurs que pour les professionnels. C’est la raison pour laquelle nous l’avons inscrite dans le texte.
Le Gouvernement n’est donc pas favorable à la suppression de l’obligation de délivrance d’un document écrit contenant cette information et, par voie de conséquence, n’est pas non plus favorable à la modification terminologique proposée. En effet, le terme « lisible » nous semble le plus approprié, car il renvoie à l’obligation de remise d’un document écrit.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Nous avons bien compris, vous demandez la remise d’un document et non pas une simple information sur le ticket de caisse, comme on a pu l’entendre.
Nous avions 420 000 normes en vigueur en France, nous en aurons 420 001 ce soir ! (Simplification ! sur les travées de l'UMP.)
Mme Catherine Procaccia. Pensez au petit commerce !
M. le président. L'amendement n° 561, présenté par Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après le mot :
professionnels
insérer les mots :
ou aux réparateurs agréés
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à ouvrir aux réparateurs agréés la fourniture de pièces détachées pendant la période d’obligation de fourniture du fabricant ou de l’importateur. Je suis persuadée que vous y serez favorable. (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Il s’agit d’une bonne idée : avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Avis favorable également.
J’ai entendu quelques commentaires auxquels je souhaiterais répondre. Mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes engagés dans un vrai choc de simplification dont nous ferons le bilan en temps et en heure. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Vous voir vous poser en défenseur des commerçants et artisans, alors que vous avez fait le statut de l’auto-entrepreneur que ces mêmes artisans et commerçants nous demandent régulièrement de remettre en cause, cela m’amuse ! (Mêmes mouvements.)
Cela étant dit, le Gouvernement est favorable à l’amendement de Mme Lamure. (Marques de satisfaction sur les travées de l'UMP.)
M. le président. L'amendement n° 294, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
dans un délai d’un mois
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Toujours dans le registre de la réparation, les écologistes souhaitent préciser dans la loi, dès lors qu’est indiquée la date mentionnée au premier alinéa, que le fabricant, ou l’importateur, fournit au vendeur professionnel qui le demande les pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens vendus, dans un délai d’un mois.
Cette précision est cruciale : sans indication de délai, nous ne pourrons aucunement favoriser la réparation, les pièces détachées pouvant être fournies trop tardivement.
Cet amendement vise donc à rendre effective la valorisation de la réparation d’un bien grâce à l’accès aux pièces détachées. Au-delà d’un délai raisonnable, le consommateur préférera se résigner à renouveler l’achat plutôt que d’attendre les pièces nécessaires à la réparation du bien.
Je vous invite donc à voter cet amendement de bon sens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Cet amendement vise à rendre obligatoire la fourniture de pièces détachées aux vendeurs professionnels dans le délai d’un mois.
Si ce délai permet de prendre date, il peut s’avérer très court dans certaines situations, en particulier dans le cas de pièces importées.
La commission émet un avis plutôt défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement ne partage pas l’avis du rapporteur. Il semble que l’on arrive très facilement à se procurer un nouveau produit dans des délais largement inférieurs à un mois, soit parce que ce produit est en stock, soit en raison de délais d’acheminement rapides. C’est la raison pour laquelle je considère cette précision utile dans la mise en œuvre la réparabilité. Le Gouvernement invite donc la Haute Assemblée à voter l’amendement présenté par M. Labbé.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Je suis tout à fait favorable à l’esprit de cet amendement mais, par exemple, dans le domaine automobile, vous pouvez très bien trouver des délais supérieurs à un mois pour une pièce en provenance d’Asie.
Ce délai me pose donc problème. Je suis d’accord sur le fond, mais il faudrait trouver une formulation moins stricte.
M. Alain Bertrand. Deux mois ? (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Alain Fauconnier, rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Ne pourrait-on écrire : « dans un délai raisonnable » ?
M. Roland Courteau. Ou : « dans les meilleurs délais ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Que le délai soit de un ou de deux mois, cela n’a pas de sens : il peut y avoir une rupture de stock et il faut alors relancer la production de la pièce ; cela arrive. Trouvons une formule qui tienne compte des ruptures de stock.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. De toute façon, il faut prévoir un délai ! Que la pièce en question vienne du Japon ou d’Asie du Sud-Est, les fabricants doivent disposer d’un stock de pièces détachées.
Afin de parvenir à un consensus, je dirai qu’un délai de deux mois me semble confortable et raisonnable.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Informer le consommateur que l’on dispose de pièces détachées est une allégation qui mérite d’être encadrée dans la mesure où elle conduit le consommateur à effectuer un arbitrage. À titre personnel, par exemple, entre deux réfrigérateurs, je choisirais plutôt celui dont on peut trouver les pièces détachées. (Sourires.)
Il me paraît donc judicieux d’encadrer une telle allégation. S’il faut rendre le délai plus raisonnable et le porter à deux mois, le Gouvernement soutiendra cette solution de compromis.
M. le président. Monsieur Labbé, acceptez-vous cette rectification ?
M. Joël Labbé. J’y consens, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 294 rectifié, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, et ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
dans un délai de deux mois
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 296, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Ces pièces sont délivrées par le vendeur au consommateur qui les réclame, hors période de garanties et sans surcoût. Le vendeur professionnel décline toute responsabilité quant à l’usage qui peut être fait par le consommateur des pièces détachées fournies.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Puisque je suis sur une bonne veine, je vais continuer ; j’espère que cela va durer. (Sourires.)
J’appelle toute votre attention sur cet amendement, très important à nos yeux.
L’alinéa 13 intègre une nouvelle mesure très positive : dès lors qu’il a indiqué la date mentionnée au premier alinéa, le fabricant ou l’importateur fournit aux vendeurs professionnels qui le demandent les pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens vendus.
Cet amendement vise à compléter cet alinéa par deux phrases : « Ces pièces sont délivrées par le vendeur au consommateur qui les réclame, hors période de garanties et sans surcoût. Le vendeur professionnel décline toute responsabilité quant à l’usage qui peut être fait par le consommateur des pièces détachées fournies. »
Telle que la loi est formulée aujourd’hui, les pièces détachées sont retenues par le vendeur ; le consommateur n’y a pas accès. Cela peut conduire à des dérives, notamment en termes de prix : combien sera facturée la réparation ou l’achat d’une pièce détachée ? Le vendeur acceptera-t-il de fournir une pièce à un consommateur qui la réclame ? À l’heure actuelle, rien n’est moins sûr.
Cet amendement vise donc à donner accès aux consommateurs, par le biais du vendeur, aux pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens vendus. Le vendeur reste l’intermédiaire privilégié du consommateur et peut ainsi continuer de le conseiller.
Dès lors, le consommateur a la possibilité soit de réparer lui-même le bien à moindre coût, soit de se tourner vers un réparateur indépendant et de faire jouer la concurrence au meilleur prix.
Afin d’éviter tout problème de sécurité lié à l’utilisation des pièces détachées, la loi précise que le vendeur décline toute responsabilité. Cette disposition s’applique également en dehors de la période de garanties légale de conformité ou commerciales, afin de laisser au vendeur la prérogative de prendre en charge les défauts de conformité pendant la période de garantie.
La mention « sans surcoût » est importante, car, si le vendeur reste l’interlocuteur privilégié pour conseiller le consommateur, cet intermédiaire entre le fabricant et le consommateur ne doit pas constituer un frein à l’accès aux pièces détachées du fait d’un prix exorbitant.
La mesure constitue ainsi un moyen de diminuer le coût de la réparation et de dynamiser l’économie sociale et solidaire et sur l’économie locale. Le vendeur professionnel ne peut disposer d’un monopole sur l’accès aux pièces détachées indispensables à l’utilisation d’un bien pendant toute la durée d’utilisation de ce dernier.
Cet amendement de fond tout à fait important et équilibré constitue une avancée réelle dans l’intérêt du consommateur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Il est important que les consommateurs aient accès aux pièces détachées. Cependant, deux questions se posent à la lecture de cet amendement.
Tout d’abord, la question de la sécurité. Si l’utilisation de certaines pièces, ou une utilisation non conforme de celles-ci, est susceptible de poser des problèmes de sécurité, le vendeur n’a pas à s’en laver les mains. Nous sommes tout de même en train de voter un texte visant à protéger les consommateurs !
Ensuite, la question du coût. Le texte de l’amendement précise que l’accès du consommateur aux pièces détachées se fait « sans surcoût ». Que cela signifie-t-il ? En dehors de la période de garantie, un vendeur professionnel, qui est un acteur privé, ne va pas développer un service de fourniture de pièces détachées à prix coûtant sans faire de bénéfice sur cette activité. Il y a forcément un surcoût pour le consommateur, qui correspond au bénéfice de l’entreprise. Ou alors, il faut dire que les vendeurs professionnels remplissent une mission de service public, mais cela nous entraînerait un peu loin.
Je demande donc à M. Labbé de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, la commission émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je comprends l’idée : un consommateur doit pouvoir procéder lui-même à la réparation et acheter la pièce détachée nécessaire.
Pour autant, l’objectif du Gouvernement n’était pas tant de stimuler le bricolage (Sourires.) que de faire en sorte que se développe, à côté des grandes enseignes, une industrie de la réparation. Le ministre chargé de l’économie sociale et solidaire que je suis peut vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que c’est souvent dans ce domaine que l’on trouve les acteurs de l’insertion par l’activité économique. Je pense en particulier aux ateliers et chantiers d’insertion, ou encore aux entreprises d’insertion. Pour ma part, je préfère confier à ces acteurs le soin de réparer les biens défectueux, et voir le secteur de la réparation se développer, plutôt que de permettre aux fournisseurs de vendre directement au consommateur les pièces détachées.
Je suggère donc à M. Labbé de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Labbé, l’amendement n° 296 est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. Il est maintenu, monsieur le président.
On gagne toujours à donner des exemples.
Comme vous tous, mes chers collègues, je me suis équipé d’un petit photocopieur pour ma permanence locale, à Saint-Nolff, dans le Morbihan. Garanti quatorze mois, il m’a coûté 700 euros.
Il s’agit d’un bon matériel, d’une bonne marque, HP, acheté chez un bon distributeur vannetais, le meilleur de la place, selon moi. Tout allait bien jusqu’à ce que, quatre mois après l’expiration du délai de garantie, un roulement du panier de recharge s’avère défectueux.
Le fournisseur ne disposant pas de la pièce nécessaire, il interroge le fabricant. Il apparaît que la réparation de cette pièce coûte 450 euros hors taxe. L’autre solution serait d’acheter un photocopieur neuf, à 700 euros, qui aurait l’avantage d’être garanti. Le fournisseur, enfin, n’est pas à même de me proposer de reprendre l’ancien !
C’est un cas typique de commerce forcé et d’irréparabilité. On ne peut pas cautionner cela !
Cet amendement tend à contraindre les fabricants et les vendeurs à fournir au consommateur des pièces détachées. Cela permettrait de redynamiser l’économie locale.
Remplacer ce roulement du panier de recharge n’est pas grand-chose ! Un réparateur peut le faire. Pourtant, c’est impossible, car cette industrie s’inscrit dans la logique du jetable. À mes yeux, c’est inacceptable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Je rappelle aux membres de la commission des affaires économiques que celle-ci va se réunir immédiatement : il nous reste 200 amendements à examiner !
3
Engagement de la procédure accélérée pour l’examen de projets de loi
M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen :
- du projet de loi autorisant la ratification du traité sur le commerce des armes, déposé sur le bureau du Sénat ce jour ;
- et du projet de loi transposant la directive 2013/1/UE du Conseil du 20 décembre 2012 modifiant la directive 93/109/CE en ce qui concerne certaines modalités de l’exercice du droit d’éligibilité aux élections au Parlement européen pour les citoyens de l’Union résidant dans un État membre dont ils ne sont pas ressortissants, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale ce jour.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
4
Consommation
Suite de la discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la consommation.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. J’attire une nouvelle fois l’attention de nos collègues sur l’objectif qui est le nôtre : nous espérons achever l’examen du présent projet de loi dans la nuit de jeudi à vendredi, au besoin en siégeant jusqu’à vendredi matin.
J’appelle donc l’ensemble de nos collègues à un effort de concision ; cela vaut tant pour les orateurs des groupes que pour les rapporteurs et le Gouvernement. (Sourires.) Je fais confiance à M. le président, dont je connais les compétences, pour diriger nos débats en ce sens.
Article 4 (suite)
M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l’article 4, à deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 218, présenté par M. Labbé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux, MM. Dantec, Desessard et Gattolin, Mme Lipietz et M. Placé, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 13
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 111-3-... – L’importateur ou le distributeur doit être en mesure de renseigner le consommateur sur :
« 1° Le ou les pays d’origine des produits composant le produit final.
« 2° L’adresse du siège social des sociétés, filiales et sous-traitants intervenus dans la chaîne de production ;
« 3° Le contenu des engagements volontaires pris par le fabricant ou l’importateur du produit vendu en matière de responsabilité sociale et environnementale. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à assurer l’information des consommateurs qui en font la demande sur le ou les pays d’origine du produit vendu et sur les engagements pris en matière sociale et environnementale par le fabricant ou l’importateur.
Il s’agit également de garantir le respect des règles sociales élémentaires, à commencer par les conventions de l’Organisation internationale du travail, lors de la conception du produit.
M. le président. L'amendement n° 450, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 13
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 111-3-... – Le professionnel doit être en mesure de renseigner le consommateur qui en fait la demande sur :
« 1° Le ou les pays dans lequel ou lesquels a été confectionné le produit ;
« 2° L’adresse du siège social des sociétés, filiales et sous-traitants intervenus dans la chaîne de production.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur de la commission des affaires économiques. Ces deux amendements impliquent la communication au consommateur d’une gigantesque masse d’informations.
En effet, compte tenu de la complexité des processus productifs modernes, ce sont des annuaires complets de références et d’adresses qu’il faudrait mettre à la disposition des consommateurs finals. On se demande bien ce que ces derniers pourraient faire d’une telle masse de données...
Assurer la traçabilité des produits et pouvoir contrôler le respect de certaines normes lors des processus de production sont des objectifs sanitaires, environnementaux et sociaux majeurs. Mais ce n’est pas au consommateur final de faire lui-même ce travail ; c’est le rôle des pouvoirs publics et des organismes publics ou privés gérant des labels ou des certifications diverses.
Les deux amendements en discussion commune ne sont pas du tout adaptés à l’objectif visé. La commission en sollicite donc le retrait ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. Même avis !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote sur l'amendement n° 218.
M. Joël Labbé. Avec tout le respect et la sympathie que j’ai pour Alain Fauconnier, je trouve que la commission défend trop les fabricants et les distributeurs.
Certes, il s’agit d’acteurs économiques, mais nous savons que des produits commercialisés chez nous sont fabriqués au Bangladesh par des enfants exploités dans des conditions abominables.
Se montrer exigeant en la matière et informer les consommateurs qui en font la demande, c’est également rendre service aux pays tiers et permettre une certaine relocalisation de notre économie, voire une réindustrialisation de notre pays.
L’amendement n° 218 va donc dans le sens de l’éthique, et je le défends avec force.
M. le président. L'amendement n° 287, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le fabricant ou l’importateur de biens meubles d'équipements électriques et électroniques fournit aux utilisateurs les informations relatives au recyclage des produits ou toutes autres formes de valorisation de ces déchets.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Le fabricant ou l’importateur n’ont souvent aucune relation directe avec les consommateurs et ne connaissent même pas leur identité. On ne peut donc pas les obliger à leur fournir une information.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Là encore, l’intervention de M. le rapporteur va dans le sens de la défense du fabricant, quel qu’il soit. Je maintiens donc mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 295, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les fabricants rendent disponibles les documentations techniques de services.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Beaucoup de réparateurs et de consommateurs se plaignent actuellement de ne pas avoir accès aux notices de réparation ou aux documentations techniques de service.
Cet amendement vise à accompagner le consommateur dans sa démarche de réparation du bien, en améliorant l’information dont il dispose et, potentiellement, en dynamisant le secteur des réparateurs indépendants et des circuits alternatifs, dans une volonté de promotion de l’économie sociale, solidaire et locale.
Ces documentations, assimilables aux notices de réparation, sont déjà accessibles, certes difficilement, via les réparateurs ou sur le marché. Cet amendement vise simplement à les rendre totalement accessibles et gratuites.
Je l’ai déjà indiqué, selon une étude réalisée en 2011 par TNS SOFRES et le Groupement interprofessionnel des fabricants d’appareils d’équipement ménager, le GIFAM, dans 40 % à 50 % des cas, des appareils sont remplacés alors qu’ils sont encore en état de fonctionner ou qu’ils seraient techniquement réparables.
Je le souligne également, le rapport de Thierry Libaert du Comité économique et social européen sur l’obsolescence programmée propose l’amélioration de l’information relative aux possibilités de réparation sur les notices d’utilisation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Il s’agit d’une bonne idée sur le principe, mais les fabricants de biens de consommation sont le plus souvent étrangers, échappant ainsi aux règles que la loi française pourrait imposer.
De telles questions se traitent au niveau européen et dans les négociations commerciales internationales.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 219, présenté par M. Labbé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux, MM. Dantec, Desessard et Gattolin, Mme Lipietz et M. Placé, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
– L’article L. 112-11 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 112-11. – Sans préjudice des dispositions spécifiques relatives au mode d’indication de l’origine des denrées alimentaires, l’indication du pays d’origine est rendue obligatoire pour les produits agricoles et alimentaires, toutes les viandes et tous les produits agricoles et alimentaires à base de viandes et les produits de la mer à l’état brut ou transformé.
« L’étiquetage obligatoire mentionne :
« 1° Le type d’animal, le pays de naissance, le pays d’élevage, de découpe et de transformation de l’animal ou des animaux concernés lorsqu’il s’agit d’animaux utilisés comme ingrédient pour des produits transformés destinés à la consommation humaine.
« 2° Le mode d’élevage utilisé, ainsi que de découpe et de transformation de l’animal ou des animaux concernés lorsqu’il s’agit d’animaux utilisés comme ingrédient pour des produits transformés destinés à la consommation humaine.
« La liste des produits concernés et les modalités d’application des indications mentionnées aux précédents alinéas sont fixées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 675, présenté par M. Fauconnier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
– Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 112-11, les mots : « peut être rendue » sont remplacés par le mot : « est » ;
2° Le second alinéa de l’article L. 112-11 est complété par les mots : « après que la Commission européenne a déclaré compatible avec le droit de l’Union européenne l’obligation prévue par le présent article » ;
3° Il est complété par un article L. 112-… ainsi rédigé :
« Art. L. 112-... – Sans préjudice des dispositions spécifiques à l’indication de l’origine des denrées alimentaires, l’indication du pays d’origine est obligatoire pour toutes les viandes, et tous les produits agricoles et alimentaires à base de viande ou contenant en tant qu’ingrédient de la viande, à l’état brut ou transformé.
« Les modalités d’application de l’indication de l’origine mentionnée au premier alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État après que la Commission européenne a déclaré compatible avec le droit de l’Union européenne l’obligation prévue par le présent article. »
La parole est à M. Alain Fauconnier, rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. La présentation de cet amendement va me permettre de répondre aux différentes interpellations sur l’étiquetage des viandes.
En effet, de nombreux amendements tendant à instaurer un étiquetage obligatoire de l’origine des produits agricoles alimentaires, en particulier des viandes brutes et transformées, ont été déposés.
Nous partageons tous, et ces amendements l’attestent, la volonté d’aboutir à un tel étiquetage, dont la nécessité vient encore d’être rappelée dans le récent rapport de la mission commune d’information sur la filière viande en France et en Europe.
Mais comment faire ? En matière d’information des consommateurs, c’est le droit européen qui s’applique ; je pense en particulier au règlement INCO. La France ne saurait prendre une initiative qui ne soit pas juridiquement assurée, faute de quoi les règles qu’elle adopterait resteraient lettre morte. Les entreprises savent très bien que, si le droit européen est de leur côté, elles ne peuvent pas être sanctionnées ; elles ne mettraient donc pas en œuvre les dispositions législatives et réglementaires contraignantes qui leur seraient imposées dans notre pays.
Les amendements qui ont été déposés ont des rédactions différentes, mais ils vont tous dans le même sens. Je vous propose, au nom de la commission, un dispositif de synthèse qui s’articule autour de trois grands axes.
Premièrement, nous posons le principe général de l’étiquetage de l’origine pour tous les produits agricoles, ce qui va plus loin que les dispositions de la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche.
Deuxièmement, nous introduisons, dans le code de la consommation, un nouvel article étendant une telle obligation à toutes les viandes brutes et transformées.
Troisièmement, nous proposons une procédure de validation à Bruxelles des dispositions rendant l’étiquetage obligatoire. La France ne sera pas obligée d’attendre le règlement européen imposant l’étiquetage au sein de l’ensemble de l’Union européenne et n’aura pas à attendre ses voisins. Elle devra simplement notifier à Bruxelles toute mesure nationale spécifique d’étiquetage et la mettre en œuvre dès réception du « feu vert » de la Commission européenne.
Je propose donc aux auteurs des différents amendements de se rallier au mien.
Enfin, je remercie M. le ministre du travail accompli ; les avancées qui ont été obtenues étaient loin d’être acquises d’avance.
M. le président. Le sous-amendement n° 687 rectifié, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Amendement n° 675, alinéas 5 et 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Comme je l’ai expliqué en m’exprimant sur l’article, ce sous-amendement vise à supprimer les alinéas 5 et 8 de l’amendement n° 675, qui soumettent l’obligation d’indication du pays d’origine à l’aval de la Commission européenne.
Ces dispositions, qui ne sont pas nécessaires, risqueraient, si elles étaient maintenues, de réduire le dispositif proposé par M. le rapporteur à une simple mesure d’affichage.
M. le président. L'amendement n° 245 rectifié, présenté par MM. Adnot, Bernard-Reymond et Türk, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
– Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 112-11, les mots : « peut être » sont remplacés par le mot : « est » ;
2° Il est ajouté un article L. 112-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 112-12. – Sans préjudice des dispositions spécifiques relatives au mode d’indication de l’origine des denrées alimentaires, et après concertation avec l’ensemble des acteurs des filières concernées, l’indication du pays d’origine est rendue obligatoire pour toutes les viandes, et tous les produits agricoles et alimentaires à base de viande ou contenant de la viande, à l’état brut ou transformé.
« Les modalités d’application de l’indication de l’origine mentionnée au premier alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. M. le rapporteur a déjà donné l’avis de la commission sur des amendements que nous n’avions pas encore présentés… (Sourires.) Mais il est vrai que sa proposition nous donne satisfaction. Je peux donc retirer mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 245 rectifié est retiré.
Les amendements nos 330 rectifié et 342 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 330 rectifié est présenté par MM. Fouché, Belot, Milon et Houpert, Mme Farreyrol et MM. Pierre, Cointat, Grignon, Couderc, Houel, Grosdidier, Gaillard, Reichardt, P. Leroy, Cornu, Pointereau et du Luart.
L'amendement n° 342 rectifié est présenté par MM. Lasserre, Tandonnet, Dubois et Merceron.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'alinéa 17
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 112-11 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette indication est obligatoire pour toute viande, ainsi que pour tout produit alimentaire qui en contient. »
La parole est à M. Rémy Pointereau, pour présenter l’amendement no 330 rectifié.
M. Rémy Pointereau. Je ferai la même observation que mon collègue Philippe Adnot, puisque l’amendement de la commission des affaires économiques permet d’étendre l’obligation d’indication d’origine à toutes les viandes, conformément à ce qu’avait souhaité la mission commune d’information sur la filière viande en France et en Europe menée par Mmes Bourzai et Goy-Chavent.
Cette mission, à laquelle j’ai participé, a voté quarante propositions, dont une tendant à introduire davantage de traçabilité dans la filière viande.
L’amendement de la commission va plutôt dans le bon sens, même s’il aurait été préférable que nous puissions présenter nos amendements avant que vous émettiez l’avis de la commission, monsieur le rapporteur. En tout état de cause, je me rallie à la proposition de la commission et je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 330 rectifié est retiré.
La parole est à M. Henri Tandonnet, pour présenter l'amendement n° 342 rectifié.
M. Henri Tandonnet. Je vais également retirer cet amendement, puisque nous obtenons satisfaction sur un sujet quelque peu brûlant, avec des conditions juridiques plus fermes et une suite européenne.
L’amendement de la commission des affaires économiques permettra d’apaiser les consommateurs et nous nous y rallions.
M. le président. L'amendement n° 342 rectifié est retiré.
L'amendement n° 448, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du même code est complété par un article L. 112-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 112-12. – Sans préjudice des dispositions spécifiques relatives au mode d’indication de l’origine des denrées alimentaires, et après concertation avec l’ensemble des acteurs des filières concernées, l’indication du pays d’origine est rendue obligatoire pour toutes les viandes à l’état brut et pour la charcuterie.
« Les modalités d’application de l’indication de l’origine mentionnée au premier alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 272, présenté par Mmes Bourzai et Bataille, MM. Vaugrenard, Fauconnier et Mirassou et Mme Nicoux, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... – Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du même code est complété par un article L. 112-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 112-12. – L’étiquetage de l’origine de la viande est obligatoire qu’elle soit destinée à la vente pour la consommation humaine en tant que viande fraîche, ou qu’elle soit utilisée en tant qu’ingrédient d’un produit alimentaire transformé. L’étiquetage obligatoire mentionne :
« 1° Le type d’animal, le pays de naissance, d’élevage, d’abattage, et de découpe de l’animal ou des animaux concernés lorsqu’il s’agit de viandes fraîches destinées à la consommation humaine ;
« 2° Le type d’animal, le pays de naissance, d’élevage, d’abattage, de découpe et de transformation de l’animal ou des animaux concernés lorsqu’il s’agit de viande utilisée comme ingrédient pour des produits transformés destinés à la consommation humaine.
« Un décret détermine les modalités d’application du présent article par type d’animal.
« Ces dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2015. »
La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai. Je me rallie avec conviction à l’amendement qui a été présenté par M. Fauconnier au nom de la commission des affaires économiques et je retire mon amendement, mais j’interviendrai en explication de vote avant la mise aux voix de l’amendement n° 675 de la commission.
M. le président. L'amendement n° 272 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 219 et sur le sous-amendement n° 687 rectifié ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Si j’ai bien compris, tout le monde s’est rallié à mon amendement !
La commission demande le retrait de l’amendement n° 219. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 687 rectifié vise à supprimer la précaution consistant à faire valider par la Commission européenne les mesures d’étiquetage d’origine mises en place en France. C’est totalement contraire aux articles 38 et suivants du règlement européen 1169/2011 dit « règlement INCO ».
En cas de contentieux devant un juge français, en vertu d’une jurisprudence constante, la loi française sera écartée au profit du droit européen ; nous ne pourrons imposer dans les faits l’étiquetage d’origine, sans parler des condamnations que la France pourrait encourir. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 219 et 675, ainsi que sur le sous-amendement n° 687 rectifié ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le vote de ce soir au Sénat est extrêmement important.
Il prolonge le travail accompli par la France auprès du Conseil européen et de la Commission depuis maintenant plusieurs mois. Ce travail a permis de faire évoluer le rapport de force en faveur des positions françaises en ce qui concerne l’étiquetage de l’origine de la viande dans les plats préparés, ainsi que plusieurs sénateurs de tout bord ont pu le constater lorsque nous avons rencontré le commissaire Borg vendredi dernier, à Bruxelles. Il s’agit effectivement d’une compétence communautaire et nous devons en prendre acte.
L’amendement de la commission des affaires économiques, qui pourrait rassembler tous vos suffrages, vise à inscrire dans la loi française le principe de l’étiquetage de l’origine de la viande dans les plats préparés – nous serions le premier pays à franchir ce pas –, tout en respectant la réglementation européenne. Il est important que la France ne soit pas l’objet d’un recours en manquement engagé par la Commission européenne et ne se trouve pas exposée à une pénalité, ce qui serait un comble !
Le Sénat a l’occasion de répondre à une préoccupation ultra majoritaire des Français. À la suite de l’affaire de la viande de cheval, une demande forte s’est exprimée en faveur de davantage de transparence et de plus traçabilité, ainsi qu’une attente d’engagements de la part de la filière agroalimentaire.
Je me réjouis des efforts qui ont été réalisés dans les jours et les semaines qui ont suivi le scandale de la viande de cheval. Je pense aux engagements très importants d’un certain nombre d’industriels de l’agroalimentaire, mais aussi d’enseignes de la grande distribution pour s’approvisionner en viande bovine française.
Ce soir, le Sénat pose un acte supplémentaire allant dans le sens d’une législation européenne qui évoluera dès l’année prochaine puisque, je vous le rappelle, au terme de l’année 2014, l’étiquetage de la viande fraîche, qu’il s’agisse des petits ruminants, de la volaille ou du porc, sera le même que pour le bœuf.
Néanmoins, il est important que le Sénat, suivi je l’espère par l’Assemblée nationale, modifie encore le rapport de force en faveur d’une proposition législative de la Commission européenne, après le rapport attendu au mois d’octobre.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est favorable à l’amendement présenté par le rapporteur Alain Fauconnier. Mesdames, messieurs les sénateurs, pour lui donner toute la force et l’impact nécessaires, à la fois auprès des Français, mais aussi auprès de la Commission européenne, je souhaite que vous soyez le plus nombreux possible à le voter.
Faire bloc a du sens. D’ailleurs, l’un des éléments qui a marqué le commissaire Borg vendredi dernier a été la position unanime exprimée par les représentants des groupes parlementaires ce jour-là.
Le fait que la France se présente rassemblée, exécutif et législatif, au moment de demander davantage de transparence et de traçabilité, a une incidence. Et, nous le savons, une plus grande transparence et une meilleure traçabilité empêcheront aussi bon nombre d’opportunistes de tromper et de tricher.
Le Sénat, ce soir, fait œuvre très utile dans l’intérêt des Français.
Quant à l’amendement no 219 et au sous-amendement no 687 rectifié ainsi qu’à l’amendement n° 448, le Gouvernement en demande le retrait. À défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote sur l'amendement n° 219.
M. Joël Labbé. J’ai été satisfait par les propos de M. le ministre et l’amendement présenté par la commission des affaires économiques répond à nos préoccupations.
M. le ministre s’était engagé en juillet à organiser ce déplacement devant la Commission européenne, entouré de parlementaires de toutes sensibilités. Nous avons apprécié cette initiative, ainsi que son résultat.
Pour ces raisons, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 219 est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 687 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, pour explication de vote sur l'amendement n° 675.
Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cet amendement traite d’un sujet essentiel, celui de la traçabilité de l’origine de la viande utilisée dans les produits transformés.
C’est un sujet important qui concerne l’ensemble des consommateurs, dont la demande d’information est très forte, en particulier depuis l’affaire dite de « la viande de cheval » de février 2013.
D’ailleurs, la mission commune d’information sur la filière viande en France et en Europe, que je présidais et dont le rapporteur était Mme Sylvie Goy-Chavent, a très largement constaté, au cours des quatre mois de travaux qu’elle a menés, combien il était nécessaire d’améliorer l’information et la transparence sur la nature et l’origine des ingrédients entrant dans la composition des produits transformés.
C’est pourquoi notre mission a préconisé dans son rapport, adopté à l’unanimité des suffrages exprimés le 17 juillet dernier, de renforcer l’information du consommateur en imposant un étiquetage obligatoire de l’origine de toutes les viandes fraîches ou contenues dans les produits transformés, y compris lorsqu’elles sont consommées en restauration commerciale, individuelle ou collective.
En juillet dernier, j’avais donc déposé, avec plusieurs de mes collègues, un amendement d’appel en ce sens sur le texte que nous examinons aujourd’hui. Je me félicite que cette demande soit aujourd’hui portée par M. le rapporteur Alain Fauconnier et qu’elle figure bientôt dans cette loi relative à la consommation.
En effet, cet étiquetage aura le double avantage de rétablir la confiance des consommateurs par une plus grande transparence, mais aussi de contribuer au redressement de l’élevage français, qui en a bien besoin.
Cet amendement donne un signal fort au consommateur et témoigne de la mobilisation de la France sur cette exigence de transparence.
Je sais que le Gouvernement s’est saisi de cette question et défend ces préoccupations au niveau européen ; je tiens à saluer, monsieur le ministre, votre engagement pour faire avancer le dossier. Votre récent déplacement à Bruxelles avec une délégation pluraliste de parlementaires pour rencontrer le commissaire Borg en est une nouvelle confirmation.
Vous avez déjà obtenu de la Commission européenne la publication anticipée des rapports sur la mise en œuvre de l’étiquetage. Cela permettra de construire une position communautaire.
Je ne doute pas de votre détermination pour qu’un projet de texte législatif communautaire améliorant l’étiquetage de l’origine voie le jour très prochainement, et je vous en remercie.
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. Nous avons écouté attentivement M. le ministre. Effectivement, le Sénat s’honore avec cet amendement défendu par le rapporteur Alain Fauconnier.
Cet amendement vient de loin. Mme Bourzai vient d’évoquer la mission commune d’information sur la filière viande en France et en Europe, et a rappelé à juste titre que son rapport a fait l’objet d’un vote unanime.
Vous le savez, quand les enjeux sont forts, la Haute Assemblée peut surpasser les difficultés liées aux appartenances politiques. Je souhaite que cet amendement soit voté à l’unanimité par le Sénat : c’est important pour les consommateurs français. Je n’oublie pas qu’il y aura une navette. Or un amendement adopté à l’unanimité par le Sénat aura d’autant plus de poids pour convaincre nos collègues députés.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Mazars, pour explication de vote.
M. Stéphane Mazars. Le groupe du RDSE sera solidaire et votera à l’unanimité cet amendement.
Je me réjouis que la France joue un rôle d’impulsion à l’échelon européen sur ce dossier. Je me félicite également que cet amendement soit défendu par mon collègue aveyronnais, Alain Fauconnier, car l’Aveyron est un département très attaché à l’agroalimentaire !
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 448 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 220, présenté par M. Labbé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux, MM. Dantec, Desessard et Gattolin, Mme Lipietz et M. Placé, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du même code est complété par un article L. 112-... est ainsi rédigé :
« Art. L. 112-... – Sans préjudice des dispositions spécifiques relatives au mode d’indication de l’origine des denrées alimentaires, l’étiquetage des huîtres mentionne :
« 1° Si l’animal est né en mer ou en écloserie ;
« 2° Dans le cas d’animaux nés en écloserie, il est spécifié si l’animal est diploïde ou triploïde. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à informer le consommateur sur l’origine et sur la variété des huîtres qu’il achète à l’étal ou qu’il consomme en restauration.
Il existe aujourd’hui deux types d’huîtres creuses sur le marché : les huîtres diploïdes, dites « traditionnelles », et les huîtres triploïdes, appelées également « huîtres des quatre saisons ». Ces deux produits sont vendus sans distinction dans le commerce.
L’huître traditionnelle est un produit naturel dont le matériel génétique est composé de dix paires de chromosomes. Pour l’huître triploïde, issue d’une manipulation biologique, ces dix paires sont remplacées par dix triplets de chromosomes. Cette opération est réalisée en écloserie par croisement entre des huîtres tétraploïdes possédant quatre lots de chromosomes et des huîtres naturelles diploïdes.
Stérile, l’huître triploïde ne dépense pas d’énergie pour assurer sa reproduction. De ce fait, elle grandit plus vite que l’huître traditionnelle, ce qui permet de gagner environ un an. De plus, n’étant jamais « laiteuse » elle peut être commercialisée tout au long de l’année.
Aujourd’hui, l’huître triploïde prend de plus en plus d’importance sur le marché. Présentée avec beaucoup d’avantages, cette huître contribue cependant à l’affaiblissement du patrimoine génétique. Sa production rend en outre la profession davantage dépendante des écloseries, à l’image des agriculteurs par rapport aux semenciers.
Les conséquences de cette manipulation, parce que c’en est une, sont très difficiles à estimer. La surmortalité constatée cet été a, semble-t-il, touché 60 % des huîtres triploïdes et seulement 20 % des huîtres naturelles sur certains bassins. Cette situation est extrêmement préoccupante et elle a des effets graves tant du point de vue économique que social et environnemental, dans un secteur déjà affaibli.
Il ne s’agit surtout par pour nous de dresser les uns contre les autres mais, véritablement, dans l’intérêt du consommateur comme dans l’intérêt des ostréiculteurs qui continuent de travailler l’huître naturelle traditionnelle, celle qui grossit moins vite et qu’ils ne peuvent pas vendre l’été, de faire en sorte que le consommateur puisse choisir de consommer de l’huître diploïde ou de l’huître triploïde.
Ma simple demande, sans juger de quoi que ce soit, est qu’un étiquetage soit pratiqué pour ces huîtres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. La liste des informations fournies aux consommateurs que l’on peut exiger du commerçant est définie au niveau européen. Ce genre de demande requiert donc une approbation de Bruxelles.
Je souhaite le retrait de cet amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable, même si je comprends le souci de transparence exprimé par notre collègue.
Cela étant, j’ai cru comprendre que les huîtres triploïdes n’étaient tout de même pas des organismes génétiquement modifiés, puisqu’il n’y a pas de modification du patrimoine génétique de l’espèce.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le sujet est sérieux, d’autant plus qu’il fait déjà l’objet d’une concertation dans le cadre du Comité national de la conchyliculture, à l’initiative du ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Des discussions sont donc d’ores et déjà engagées.
Vous connaissez la réglementation européenne en vigueur. Elle permet aujourd’hui un étiquetage uniquement sur la base du volontariat et sous la forme d’une allégation qui distingue les huîtres diploïdes, c’est-à-dire celles qui sont nées en mer avec un captage naturel, des huîtres triploïdes.
Un certain nombre de professionnels ont décidé de distinguer la qualité de leurs huîtres, en tout cas à travers leur origine, grâce à cet étiquetage volontaire. C’est le seul qui soit permis par la Commission européenne, à l’exception d’un étiquetage comportant des mentions obligatoires complémentaires pour des catégories spécifiques de denrées alimentaires, qui doit être notifié à la Commission européenne.
Cette exception peut être justifiée devant la Commission par au moins l’une des raisons suivantes : la protection de la santé publique, la protection des consommateurs, la répression des tromperies ou la protection de la propriété intellectuelle et commerciale. Nous considérons, à cette étape des travaux et de la discussion, que de telles mentions ne correspondent pas à l’huître triploïde.
C’est la raison pour laquelle il ne nous semble pas possible aujourd’hui de vous donner satisfaction sur votre amendement, même si, je vous le redis, en lien avec le cabinet du ministre de la mer et pour en avoir parlé avec lui, ces questions sont à l’ordre du jour du Comité national de la conchyliculture.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je rappelle tout de même que l’on a commencé à parler de l’étiquetage des huîtres avant les années deux mille. Cela avait même fait l’objet d’un projet de décret.
Quant au Comité national conchylicole, les ostréiculteurs traditionnels y sont extrêmement minoritaires.
L’élevage des huîtres triploïdes coûte moins cher et il est possible de les vendre en toute saison. Si l’on ne fait rien, tout le monde n’a plus qu’à se mettre aux huîtres triploïdes et l’on verra le risque pour l’environnement et les consommateurs !
Monsieur le ministre, j’ai apprécié votre démarche auprès de Bruxelles sur le dossier de l’étiquetage des viandes. Pour les huîtres, c’est votre collègue chargé de la mer qui est concerné. Je crois que, là encore, sur ce sujet qui fait débat dans tous les pays producteurs, il serait bon que la France, mais je ne sais pas de quelle manière, fasse entendre sa voix.
Je serais prêt à retirer mon amendement puisque, je le sens, il ne sera pas adopté (Sourires.), s’il y avait un engagement du Gouvernement à se saisir du dossier.
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. J’ai bien écouté les explications de M. Labbé et je comprends sa préoccupation. Mais, d’un autre côté, je pense qu’il faut aussi être simple pour le consommateur.
Bien sûr, après les explications qui nous ont été fournies, nous savons maintenant dans cet hémicycle ce qu’est une huître diploïde ou une huître triploïde. Mais, au-delà de ces murs, quid du consommateur ? On comprend bien la différence qu’il y a entre une huître élevée en pleine mer et une huître élevée en écloserie. Mais, si l’on précise sur l’étiquette la qualité de « triploïde » ou de « diploïde », j’ai peur que le consommateur ne soit un peu perdu…
Mme Catherine Procaccia. Va-t-il encore manger des huîtres ?...
M. Gérard Cornu. Vous avez très bien expliqué votre finalité, mon cher collègue, mais je me dois de vous mettre en garde : plus on complique, plus le consommateur risque de se méfier, ce qui aurait l’effet inverse de celui que vous recherchez.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Les données du problème sont connues et les professionnels travaillent sur cette base : l’huître triploïde, qui a dix triplets de chromosomes, grandit plus vite que l’autre - l’huître traditionnelle, diploïde, qui a dix paires de chromosomes -parce qu’elle est stérile. C’est bien la raison pour laquelle il est tout à fait justifié qu’une information de ce type soit portée à la connaissance du consommateur, les deux huîtres étant par ailleurs tout à fait propres à la consommation.
Cela étant dit, il ne me paraît pas illégitime que cette question soit posée - elle peut l’être dans le cadre du débat national ou dans le cadre du débat européen – mais, je préfère le dire, ce que nous avons fait pour la traçabilité de la viande dans les plats préparés, nous ne le ferons pas sur tous les sujets. La France est en pointe dans le débat pour la transparence, et elle continuera à l’être, mais nous avons encore des rapports de force à construire aujourd’hui au niveau européen.
Je le redis, la préoccupation qui est la vôtre est légitime, Monsieur Labbé. Le Gouvernement est parfaitement conscient des demandes des consommateurs. Et vous verrez que le consommateur français, qui tient à savoir ce qu’il mange - quelle que soit d’ailleurs l’origine des produits et quelle que soit leur nature, qu’il s’agisse de produits de l’ostréiculture, de viandes ou de végétaux -, saura faire prospérer cette demande. Nous entendons, en tout cas, faire en sorte de lui apporter une réponse.
À ce stade, Monsieur Labbé, il me paraît plus judicieux que vous retiriez cet amendement et que vous vous inscriviez dans un travail de moyen à long terme pour faire valoir une meilleure information du consommateur français en ce domaine.
M. le président. L'amendement n° 453, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 17
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
... – Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du même code est complété par un article L. 112-... ainsi rédigé :
« Art. L. 112-... – L’étiquetage de la nature et de la quantité totale de sucre ajouté aux ingrédients naturels entrant dans la composition des produits agricoles et alimentaires à l’état brut ou transformé est rendu obligatoire.
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Chacun d’entre nous connaît les méfaits pour la santé d’une consommation excessive de sucre. C’est un grand sujet de santé publique. Or, aujourd’hui, les fabricants ne sont pas tenus d’afficher la quantité de sucre, qui figure parfois, mais pas toujours. Nous voyons les conséquences d’un excès de sucre : l’obésité, ce sont les caries dentaires, notamment pour la jeunesse, le diabète, les maladies cardiaques.
Par cet amendement, nous souhaitons rendre obligatoire l’étiquetage de la nature et de la quantité globale de sucre ajouté dans les produits agricoles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Je partage tout à fait le souci qui est le vôtre et que vous exprimez à travers cet amendement. Cependant, comme nous l’avons dit en commission, l’étiquetage et la composition des aliments sont soumis à une réglementation européenne particulièrement stricte. Il n’est pas possible de modifier ces règles d’étiquetage sans que cela soit mis en œuvre au niveau de Bruxelles.
La commission invite donc au retrait de l’amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 454, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 17
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« ... – Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du même code est complété par un article L. 112-... ainsi rédigé :
« Art. L. 112-... – L’étiquetage ou l’affichage à l'étalage « nourri avec des protéines animales transformées » est obligatoire pour les poissons d'élevage.
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, je pense qu’à l’avenir, en ce qui concerne nos amendements, vous n’aurez plus besoin de demander l’avis de la commission : pas un seul de nos amendements n’a recueilli un avis favorable ! Donc, le problème est réglé ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Cet amendement concerne les poissons d’élevage qui peuvent être à nouveau nourris avec des farines de porc et de volaille, mode d’alimentation qui était prohibé dans l’Union européenne depuis la crise de la vache folle.
Nous savons que la volonté de la Commission européenne est bien, comme l’a souligné un récent rapport d’information, de réintroduire la possibilité de l’utilisation de farines de porc et de volaille dans l’alimentation de l’ensemble des animaux non ruminants. Cette décision suscite une très vive inquiétude en France. D’ailleurs, le Président de la République a affirmé, le 23 février dernier, que la France n’introduirait pas ces protéines animales dans l’alimentation des animaux.
Nous demandons donc un affichage de la présence de PAT, les protéines animales transformées, dans l’alimentation des poissons quand ils sont nourris ainsi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Comme j’ai pu le rappeler précédemment, la réglementation européenne sur l’étiquetage est très stricte et est régie par le règlement INCO. Imposer une telle obligation au niveau français serait inopérant car contraire au droit communautaire. Les commerçants qui ne respecteraient pas cette obligation purement nationale ne pourraient être sanctionnés.
Au demeurant, notre consommation de poissons d’élevage est, pour l’essentiel, importée, en particulier en ce qui concerne le saumon. Or les opérateurs non nationaux pourraient aisément refuser de jouer le jeu…
Notons enfin que les poissons vendus à l’étal doivent être identifiés spécifiquement s’ils sont issus d’élevage. Et rien n’interdit au vendeur d’indiquer volontairement, pourvu que cela soit vrai, que ces poissons d’élevage sont nourris sans PAT.
Donc, retrait ou avis défavorable !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur Le Cam, les débats ne sont pas terminés et vous ne pouvez pas préjuger les avis du Gouvernement…
Pour ce qui est du présent amendement, je redis que, à l’exception de l’étiquetage de l’origine de la viande dans les plats préparés, parce que, dans ce cas, la législation européenne peut évoluer rapidement, le législateur ne saurait se contenter d’émettre des votes parfaitement factices et vides de sens - sur ces sujets, nous le savons, la législation européenne n’évoluera pas -, avec le risque d’exposer la France à une amende. Cela constituerait véritablement une double peine : pour le coup, nous aurions une disposition qui, relevant non du droit français mais du droit européen, n’aurait aucun effet et, de surcroît, au premier recours, nous serions exposés au risque d’une amende.
Nous avons choisi, en matière d’étiquetage de l’origine de la viande, d’apporter une réponse exceptionnelle à une situation exceptionnelle grâce aux forces conjuguées de l’Assemblée nationale, du Sénat et de l’exécutif, sachant, en outre, que le rapport de force évoluait grâce à une pression des citoyens européens sur la Commission européenne.
Au passage, et c’est aussi dans ce sens que je remercie les sénateurs pour la fermeté du message qu’ils ont adressé, quand la Commission européenne a l’occasion de vaincre le scepticisme des citoyens européens sur l’utilité du projet européen, notamment, pour ce qui concerne sa compétence, en matière de traçabilité de l’origine de la viande, elle serait bien inspirée de s’en saisir et de montrer, avant les élections européennes, qu’elle est capable d’être, de manière très concrète et très tangible, utile aux consommateurs européens.
C’est ce que tous ont dit à la Commission européenne, et de tous les bords. Je pense que cela a un impact fort. Mais, encore une fois, c’est parce que nous avons une perspective très concrète que nous avions décidé de soutenir cette disposition.
En revanche, je ne peux pas être favorable, en règle ordinaire, à une proposition qui viserait à insérer dans la loi française des règles d’étiquetage obligatoires qui relèvent des règlements européens : premièrement, le consensus n’existe pas entre nous, et, deuxièmement, il n’y a pas de perspective d’évolution de la législation européenne sur ce point.
Émettre un avis favorable sur votre amendement pourrait donc avoir des conséquences négatives pour la France, voire pour le législateur national que vous êtes, dès lors que la démonstration serait faite que voter la loi ne servirait à rien !
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le ministre, nous pensions que le Parlement était souverain et qu’il pouvait décider d’obliger la Commission européenne justement à aller de l’avant.
Mais la Commission européenne, pour l’instant, ne le permet pas, et vous pliez devant cette situation. Nous vous proposons, nous, de faire acte de volonté et de courage de temps en temps, et, en l’occurrence, de dire à la Commission européenne qu’il serait bon que l’étiquetage concernant des poissons nourris avec des protéines animales transformées soit obligatoire. Tel est l’objet de l’amendement.
Je regrette ce manque de courage et de volonté face à la Commission européenne. Ici, nous sommes souverains, raison pour laquelle nous maintenons cet amendement et continuerons de le présenter.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Comment le contester ? le Parlement est souverain, mais dans le respect des traités internationaux dûment ratifiés par lui. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.) Eh oui, mesdames, messieurs les sénateurs, le Parlement ratifie des traités internationaux et c’est donc vous, madame, qui avez ratifié ceux qui nous lient ! Sa souveraineté s’exerce aussi au regard du droit de l’Union européenne.
À certains moments de la vie politique, nous aurions sans doute, les uns et les autres, bien fait sans ces traités ou peut-être aurions-nous apprécié de pouvoir passer outre, mais, en l’occurrence, il est de ma responsabilité de rappeler que ces traités ont été dûment ratifiés par un parlement souverain et que ce sont ceux que nous appliquons aujourd'hui.
M. le président. L'amendement n° 91 rectifié bis, présenté par MM. Dallier, P. André, Bécot, Belot et Billard, Mme Bouchart, MM. J. Boyer, Cambon, Capo-Canellas et Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chauveau, Cléach, Cointat, Couderc et de Montgolfier, Mmes Debré et Deroche, MM. Détraigne, P. Dominati et Gilles, Mme Goy-Chavent, MM. Grignon et Grosdidier, Mme Giudicelli, MM. Houel, Lefèvre, Leleux, Mayet, Milon, Pierre, Pinton, Reichardt et Retailleau, Mmes Sittler et Mélot et MM. Revet, Bas, de Legge, Gaillard, B. Fournier et Merceron, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 19
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Le même alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le prix payé par le consommateur lors de l’achat doit correspondre à celui affiché, en dehors de toute opération promotionnelle mentionnée dans les conditions générales de vente. »
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Il est de plus en plus fréquent, notamment dans le secteur des nouvelles technologies, que le consommateur, initialement attiré par un prix d’appel affiché très bas, se trouve en réalité contraint de payer un prix plus élevé lors de l’achat, à charge pour lui d’engager des démarches ultérieures pour se faire ensuite rembourser dans le cadre d’une offre promotionnelle.
Si le prix payé à l’issue de la procédure est certes, au final et parfois bien des semaines plus tard, conforme à celui qui est initialement affiché, le consommateur ne saurait servir de « caution » aux négociations et pratiques commerciales entre fabricants et distributeurs, en supportant en définitive pendant une certaine durée le « coût » différé de l’offre promotionnelle.
Le présent amendement prévoit donc que le prix effectivement payé lors de l’achat est bien celui qui est affiché, et non un prix supérieur incluant un remboursement ultérieur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Le droit existant permet de répondre à cette préoccupation. L’affichage du prix est très réglementé en France, très contrôlé, et les manquements sont sanctionnés.
En outre, si le mauvais affichage du prix relève de pratiques commerciales trompeuses, les sanctions sont encore plus sévères. Vous avez en particulier évoqué, monsieur Lefèvre, les promotions qui nécessitent en réalité des démarches ultérieures pour se faire rembourser. Les promotions de ce type, quand elles peuvent être assimilées à des pratiques commerciales trompeuses, sont sanctionnées.
La commission est donc défavorable à votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 447, présenté par MM. Vergès et Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les départements et les collectivités d’outre-mer, tout vendeur de produits ou tout prestataire de services a pour obligation d’informer le consommateur du prix pratiqué dans l’Hexagone pour le même produit ou le même service. Un décret en Conseil d’État fixe la liste des produits et des services concernés. » ;
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement, dont notre collègue Paul Vergès est à l’initiative, concerne les départements et collectivités d’outre-mer. Il prévoit que tout vendeur de produits ou tout prestataire de services a pour obligation d’informer le consommateur du prix pratiqué dans l’Hexagone pour le même produit ou le même service.
Il ne s’agit pas d’une idée nouvelle. (Mme Catherine Procaccia s’exclame.) Jean Glavany, en son temps, avait pris un arrêté préconisant un double affichage des prix de certains produits. Ce n’est donc pas nous qui l’avons inventé !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Je comprends tout à fait la portée de cet amendement. Comme nous le savons tous, la problématique de la vie chère est particulièrement sensible dans les outre-mer. L’amendement de notre collègue Paul Vergès est quasi identique à celui qui avait été déposé par notre collègue Michel Vergoz dans le cadre de la discussion de la loi relative à la régulation économique en outre-mer, adoptée l’année dernière par le Parlement. Cet amendement avait été rejeté par la commission des affaires économiques du Sénat, suivant l’avis de son rapporteur, Serge Larcher.
Une telle disposition poserait de grosses difficultés d’application. Les prix des produits alimentaires, par exemple, ne sont pas identiques dans toutes les grandes surfaces, que ce soit dans l’Hexagone ou dans les outre-mer : dans ces conditions, quel prix serait affiché ?
Une autre difficulté se pose, qui peut être confirmée par l’ensemble de nos collègues ultramarins : tous les produits en vente dans les outre-mer ne sont pas en vente dans l’Hexagone, et vice versa. Dans ces conditions, comment appliquer cette disposition ?
Enfin, le double étiquetage constituera une charge supplémentaire pesant sur les vendeurs et les prestataires de services. Cela n’aura-t-il pas un effet inflationniste ?
Je demande donc à notre collègue de retirer son amendement, sinon la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je veux simplement rappeler qu’il y a au Sénat une délégation à l’outre-mer,…
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Exactement !
Mme Catherine Procaccia. … qui est composée à égalité de sénateurs de l’outre-mer et de sénateurs de métropole, dont je fais partie.
Il me semble que cet amendement aurait dû y être discuté et, s’il avait été approuvé, la délégation l’aurait présenté.
En outre, vous connaissez la sensibilité de l’outre-mer aux prix. Aller dire à ceux qui ont déjà le sentiment qu’ils paient trop cher un produit qu’il est 40 % moins cher en métropole ne me paraît pas de nature à apaiser le climat social et le sentiment que la vie est chère en outre-mer, ce qui est indubitable.
Des observatoires ont été mis en place par les gouvernements successifs ainsi qu’un certain nombre de mesures pour l’outre-mer. J’ai l’impression que cet amendement ne ferait que mettre de l’huile sur le feu !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Je voulais simplement rappeler à Mme Procaccia que cet amendement avait déjà été évoqué devant nous dans le cadre de la discussion de la loi relative à la régulation économique outre-mer et que le rapporteur lui-même, Serge Larcher, l’avait combattu au titre de la délégation à l’outre-mer.
Mme Catherine Procaccia. Nous sommes dans le même état d’esprit !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 52, présenté par Mme Lamure, M. César et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 21, après la première phrase
Insérer deux phrases ainsi rédigées :
Le passager ayant droit au remboursement de la totalité des sommes qu’il a versées au titre desdites taxes et redevances, le transporteur aérien doit mettre à sa disposition, et l’en informer préalablement par écrit, au moins une procédure de remboursement sans que le passager n’ait à supporter de frais. En dehors de celle-ci, le remboursement peut soustraire, le cas échéant, le montant des frais supplémentaires éventuellement occasionnés par celui-ci pour le transporteur aérien, dans la limite de 20 % du montant des taxes et redevances prévues dans le prix du titre de transport.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement concerne le remboursement des taxes et redevances. Lorsqu’un client annule son vol, ses frais lui sont toujours remboursés, mais il demeure un coût pour la compagnie, et je parle plus particulièrement de notre compagnie nationale, alors qu’en réalité l’annulation n’est nullement le fait de la compagnie.
Ce qui est proposé par cet amendement, c’est que le transporteur aérien mette à la disposition de ses clients un canal gratuit de remboursement via internet , ce qui fait que le coût de l’annulation sera nul, pour le client comme pour la compagnie.
M. le président. L'amendement n° 271, présenté par M. Capo-Canellas, est ainsi libellé :
Alinéa 21, après la première phrase
Insérer deux phrases ainsi rédigées :
Le transporteur aérien doit mettre à la disposition du passager ayant droit au remboursement de la totalité des sommes qu’il a versées au titre des dites taxes et redevances, au moins une procédure de remboursement sans que le passager n’ait à supporter de frais. Il l’informe préalablement par écrit de cette procédure. En dehors de celle-ci, le remboursement peut être diminué du montant des frais supplémentaires occasionnés par la procédure de remboursement, dans la limite de 20 % du montant des taxes et redevances prévues dans le prix du titre de transport.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 52 ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. D’abord, 20 % de la somme à rembourser, c’est beaucoup ! Ensuite, s’il existe des canaux de remboursement payants, cela ne va pas inciter les compagnies à orienter les consommateurs vers le canal de remboursement gratuit mis à leur disposition. Enfin, il faudrait que tous les consommateurs aient également accès au canal de remboursement gratuit, ce qui n’est pas garanti.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je ne suis pas totalement à l’aise par rapport à cet amendement. J’ai moi-même rencontré les responsables d’Air France, qui m’ont dit que tout cela avait un coût, en restant cependant assez imprécis sur leur montant réel.
Je souhaite, Madame Lamure, vous faire une proposition, que je soumets aussi au rapporteur : je trouve excessif d’appliquer des frais à hauteur de 20 % du montant des taxes et redevances ; je vous propose donc de supprimer cette mention et d’en rester à la mise à disposition d’une procédure de remboursement sans frais ni pourcentage des taxes et redevances prévues dans le prix des billets, et sous réserve ensuite d’un contrôle de l’effectivité du dispositif. Il importe en effet que ce dispositif soit véritablement accessible au consommateur pour que ce dernier ne se retrouve pas dans la situation de ne pas pouvoir être remboursé, par exemple, parce qu’il n’y aurait qu’une agence dans la ville ou dans le département où l’on pourrait obtenir ce remboursement.
Sous réserve de cette rectification, je serais favorable à votre amendement, madame Lamure.
M. le président. Madame Lamure, acceptez-vous la rectification proposée par M. le ministre délégué ?
Mme Élisabeth Lamure. Je remercie M. le ministre d’avoir pris en compte cette demande et j’accepte la rectification qu’il suggère. J’indique simplement que, dans tous les cas, le remboursement des frais et des taxes d’aéroport est gratuit pour le consommateur : les 20 % ne s’appliquent que pour la compagnie.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 52 rectifié, présenté par Mme Lamure, M. César et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, et ainsi libellé :
Alinéa 21, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le passager ayant droit au remboursement de la totalité des sommes qu’il a versées au titre desdites taxes et redevances, le transporteur aérien doit mettre à sa disposition, et l’en informer préalablement par écrit, au moins une procédure de remboursement sans que le passager ait à supporter de frais.
La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote.
Mme Michèle André. Je remercie Mme Lamure d’avoir déposé cet amendement. Peut-être aurions-nous dû examiner avec un peu plus d’attention cette question des remboursements de billets, sur laquelle la société nationale Air France nous a d'ailleurs alertés. Je pense qu’il faut être attentif à ce qui se passe actuellement dans cette compagnie, où diverses problématiques apparaissent. Je remercie également le ministre d’avoir prêté attention à cette disposition. Sans doute devrons-nous affiner les choses, mais il est utile que nous adoptions ce soir cet amendement.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 452, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 21
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
...° Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Les moyennes et grandes surfaces doivent tenir à la disposition de leurs clients, pour les produits de première nécessité dont la liste a été fixée par décret après avis du Conseil national de la consommation, un tableau comparatif comprenant :
« – le prix d’achat aux producteurs par les distributeurs ;
« – le prix de vente des distributeurs aux moyennes et grandes surfaces ;
« – le prix de vente au consommateur. »
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Lors de l’examen du projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs, le Sénat avait adopté un amendement identique. Il s’agissait de contraindre les moyennes et grandes surfaces à afficher, pour les produits de première nécessité, le prix d’achat aux producteurs par les distributeurs, le prix de vente des distributeurs aux moyennes et grandes surfaces et le prix de vente aux consommateurs.
Nous déposons à nouveau cet amendement, qui vise à limiter les marges dans la grande distribution, à renforcer le pouvoir d’achat et à améliorer l’information du consommateur.
Comme vous l’aviez très bien expliqué en tant que rapporteur, monsieur Fauconnier, il s’agit là d’une demande ancienne de transparence à l’égard des consommateurs.
Cet amendement comporte donc des avancées non négligeables dans l’information des consommateurs. La mise en œuvre de ce dispositif de triple affichage représenterait également un progrès pour les producteurs.
Nous en sommes conscients, la mise en œuvre de ce dispositif peut poser des difficultés techniques pour certains produits. Cela constituerait un argument facile pour ne pas l’adopter. C’est pourquoi nous renvoyons à un décret le soin de fixer une liste pertinente des produits concernés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Comme je l’ai déjà fait observer devant la commission des affaires économiques, il s’agit d’informations privées, relevant de contrats privés. Il ne restera plus grand-chose du secret des affaires si l’on adopte cet amendement !
Par ailleurs, je vous rappelle qu’a été créé un observatoire des prix et des marges dont la vocation répond à cet objectif de transparence. Il appartient dès lors aux opérateurs de communiquer ces informations.
Je ne vois pas du tout comment cet amendement pourrait être mis en application. Même par décret, ce serait extrêmement compliqué.
L’avis de la commission est donc plutôt défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 665, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 25
Remplacer les mots :
aux articles L. 113-3 et
par les mots :
à l’article L. 113-3 et aux arrêtés pris pour son application et à l’article
La parole est à M. le ministre délégué.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Avis favorable !
M. le président. L'amendement n° 87 rectifié bis, présenté par MM. Dallier, P. André, Bécot et Belot, Mme Bouchart, MM. J. Boyer, Cambon, Capo-Canellas et Cardoux, Mme Cayeux, MM. Cléach, Chauveau, Cointat et de Montgolfier, Mmes Debré et Deroche, MM. Détraigne et Gilles, Mme Goy-Chavent, MM. Grignon et Grosdidier, Mme Giudicelli, MM. Houel, Lefèvre, Leleux, Mayet, Milon, Pierre, Pinton et Reichardt, Mme Sittler, M. Billard, Mme Mélot et MM. Revet, Bas, de Legge, Gaillard, B. Fournier et Merceron, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après l'article L. 113–3 du code de la consommation, il est inséré un article L. 113-3–... ainsi rédigé :
« Art. L. 113-3–... – Le consommateur ayant souscrit, simultanément à l’acquisition d’un bien meuble corporel, un contrat ayant pour effet d’assurer ledit bien ou d’en prolonger la garantie, dispose d’un délai de sept jours pour dénoncer ce contrat, quelle que soit la forme ou la nature juridique de celui-ci, sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités. »
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. En matière de nouvelles technologies ou d’électroménager, le consommateur se voit fréquemment proposer, lors de l’achat d’un appareil en magasin, de souscrire par la même occasion un contrat destiné à assurer ledit bien ou à prolonger sa garantie constructeur.
Si ces contrats s’avèrent très rentables pour les vendeurs, leur pertinence et leur utilité réelle pour le consommateur sont en revanche beaucoup plus discutables. Les exclusions étant dans la plupart des contrats très nombreuses, et les garanties largement surestimées, la couverture du client est souvent bien plus faible que ne le laisse présager la teneur du discours commercial. En outre, en l’absence de toute baisse de cotisation alors que les biens en question perdent rapidement de leur valeur – moins 50 % en un an pour un téléphone portable, par exemple –, le coût de ces contrats apparaît largement disproportionné.
Accessoires et signés concomitamment à la vente, souvent avec une information très lacunaire et parfois avec un consentement « forcé » – dans certaines enseignes, les vendeurs ont des objectifs à atteindre en la matière –, ces contrats n’en engagent pas moins le consommateur dans la durée, sans lui laisser l’opportunité de comparer des offres concurrentes ou de vérifier auprès de son propre assureur s’il n’est pas déjà couvert pour des risques similaires.
Or aucune possibilité légale de rétractation n’existe pour la souscription de ces contrats en magasin. De plus, certains d’entre eux, comme les contrats d’assurance des téléphones portables, sont des contrats de groupe, auxquels la loi Chatel, qui facilite la résiliation, ne s’applique pas.
Dans la mesure où le consommateur peut rencontrer de réelles difficultés pour sortir de ces contrats, le présent amendement vise donc à prévoir un délai de rétractation minimum en sa faveur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Le projet de loi prévoit que, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de prestation de services, le professionnel s’assure du consentement exprès du consommateur pour tout paiement supplémentaire venant s’ajouter au prix de l’objet principal du contrat, par exemple l’achat d’une assurance.
Cela étant, les pratiques des vendeurs dans le domaine des couvertures assurantielles optionnelles, sans être clairement illégales, sont parfois à la limite de la démarche commerciale agressive. Le consommateur doit alors prendre une décision imprévue sans avoir vraiment eu le temps de réfléchir. Je voudrais donc connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. L’objectif des auteurs du présent amendement est louable, étant donné les pratiques parfois critiquables des professionnels pour faire souscrire aux consommateurs des contrats d’extension de garantie. Cet amendement, qui vise à instaurer un droit de rétractation s’agissant du contrat de garantie, est cependant de nature à engendrer, au regard de l’unité que ce dernier forme avec le contrat principal d’achat du bien, une confusion sur les droits à rétractation du consommateur.
En effet, le contrat principal d’achat du bien ne contient de droit à rétractation que s’il est souscrit à crédit. Avec le projet de loi relatif à la consommation, le Gouvernement a entrepris de renforcer les droits contractuels des consommateurs en prévoyant que, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de prestation de services, le professionnel s’assure du consentement exprès du consommateur pour tout paiement supplémentaire venant s’ajouter au prix de l’objet principal du contrat.
Si ce consentement est donné par défaut, c’est-à-dire en l’absence d’opposition expresse du consommateur – je pense à la pratique connue sous le nom de précochage –, ce dernier peut prétendre au remboursement des sommes versées au titre de ce paiement supplémentaire. Dans ce cas, le consommateur n’est évidemment plus lié par la prestation en cause. Cette disposition paraît appropriée s’agissant des pratiques de précochage de prestations d’extension de garantie payantes non expressément sollicitées par le consommateur.
Pour ces raisons, le Gouvernement n’est pas favorable au présent amendement ; il en demande le retrait.
M. le président. L'amendement n° 88 rectifié ter, présenté par MM. Dallier, P. André, Bécot et Belot, Mme Bouchart, MM. J. Boyer, Cambon, Capo-Canellas et Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chauveau, Cléach, Cointat, Couderc et de Montgolfier, Mmes Debré et Deroche, MM. Détraigne, P. Dominati et Gilles, Mmes Goy-Chavent et Giudicelli, MM. Grignon et Houel, Mme Jouanno, MM. Lefèvre, Leleux, Mayet, Milon, Pierre, Pinton et Reichardt, Mme Sittler, M. Billard, Mme Mélot et MM. Revet, Bas, de Legge, Gaillard, B. Fournier et Merceron, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – Le chapitre III du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un article L. 113-... ainsi rédigé :
« Art. L. 113-... – À partir du 1er janvier 2015, tout exploitant de parc de stationnement payant affecté à un usage public est tenu d’appliquer au consommateur, en dehors de toute formule d’abonnement ou de tarification journalière, une tarification à la minute lorsque le coût du service est déterminé a posteriori. »
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Le présent amendement, qui avait été adopté à l’unanimité de la Haute Assemblée lors de l’examen, en décembre 2011, de la loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs – la loi Lefebvre –, vise à imposer la facturation à la minute dans les parkings publics payants. À l’époque, Nicole Bricq l’avait qualifié de très bon amendement.
Le paiement de ces prestations est en effet, le plus souvent, exigible à la sortie. Dans la majorité des cas, l’usager est contraint, à défaut d’avoir souscrit une formule d’abonnement ou de profiter d’une offre spécifique globale – par exemple « tarif week-end » ou « forfait cinéma » –, de s’acquitter du prix total de chaque heure de stationnement commencée. Un automobiliste insérant son ticket de sortie dans une borne automatique de paiement après une heure et une minute de stationnement se voit ainsi facturer deux heures pleines.
Pourtant, dans de nombreux autres secteurs économiques, la loi a prévu, au bénéfice des consommateurs, des dispositifs permettant, lorsque le prix de la prestation est déterminé a posteriori, d’ajuster le montant à payer à la prestation réellement consommée. C’est par exemple le cas en matière de téléphonie mobile, avec la facturation à la seconde, ou pour les trajets autoroutiers, dont le prix est calculé à la sortie en fonction de la distance parcourue.
Cette situation défavorable à l’utilisateur nuit en outre à l’objectif de gestion des flux de stationnement par la rotation optimale des emplacements de stationnement disponibles, puisque les utilisateurs sont incités à « rentabiliser » leur dépense en utilisant pleinement les heures commencées.
Or les bornes automatiques à l’entrée et la sortie des parkings, conjuguées au paiement a posteriori par l’usager, permettraient aisément de quantifier précisément la durée effective de stationnement et d’adapter le prix à payer en fonction de la durée exacte d’utilisation du service.
Les arguments tirés des éventuelles contraintes techniques, avancés à l’Assemblée nationale par le rapporteur ou le Gouvernement pour repousser un amendement similaire, ne sauraient quant à eux être valablement retenus : le délai d’un an et demi prévu par l’amendement doit permettre aux opérateurs de procéder aux adaptations nécessaires, sans renouveler l’intégralité du matériel.
M. Christian Cambon. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Vous l’avez dit, un amendement semblable avait été adopté par le Sénat en décembre 2011. La version présentée aujourd’hui est encore plus satisfaisante, puisqu’elle prévoit que le dispositif n’entrera en vigueur qu’en 2015, ce qui donnera du temps aux gestionnaires des parkings pour s’adapter à la nouvelle norme. La commission émet donc un avis favorable. (Ah ! sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Procaccia. Pensez aux consommateurs, monsieur le ministre !
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Nous avons déjà voté cet amendement à l’unanimité !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. À mes yeux, le débat porte sur le délai de mise en œuvre d’une telle mesure ; je l’ai encore dit tout à l’heure à la radio. Sur le principe, je suis favorable à ce que le prix corresponde à la réalité du temps passé dans le parking, ou en tout cas à ce qu’on se dirige vers cette solution.
Aujourd’hui, la plupart des parkings sont gérés sous la forme d’une délégation de service public, qui fait l’objet d’une délibération de la collectivité locale concernée. Il en existe plus de mille deux cents. Pour appliquer la mesure que vous proposez, il faudra donc renégocier des contrats et réaliser des expertises. Ma position était d’attendre que ce travail soit fait, afin qu’il débouche sur une loi allant dans le sens de votre proposition. Je propose donc que le délai de mise en œuvre coure jusqu’en 2016, pour que nous ayons le temps de tirer toutes les leçons de l’enquête de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, que nous avons commandée sur ce sujet. Mon avis est donc défavorable si la date de 2015 est maintenue.
Je pense également qu’il faut essayer de mobiliser les collectivités locales et de travailler avec elles. Mais, sur le principe, le Gouvernement partage la préoccupation de Philippe Dallier et du rapporteur, Alain Fauconnier.
M. le président. La parole est à M. Alain Fauconnier, rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Je suis d’accord avec la proposition de M. le ministre.
M. le président. Monsieur Lefèvre, acceptez-vous de rectifier votre amendement conformément à la proposition de M. le ministre ?
M. Antoine Lefèvre. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 88 rectifié quater, présenté par MM. Dallier, P. André, Bécot et Belot, Mme Bouchart, MM. J. Boyer, Cambon, Capo-Canellas et Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chauveau, Cléach, Cointat, Couderc et de Montgolfier, Mmes Debré et Deroche, MM. Détraigne, P. Dominati et Gilles, Mmes Goy-Chavent et Giudicelli, MM. Grignon et Houel, Mme Jouanno, MM. Lefèvre, Leleux, Mayet, Milon, Pierre, Pinton et Reichardt, Mme Sittler, M. Billard, Mme Mélot et MM. Revet, Bas, de Legge, Gaillard, B. Fournier et Merceron, et ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – Le chapitre III du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un article L. 113-... ainsi rédigé :
« Art. L. 113-... – À partir du 1er janvier 2016, tout exploitant de parc de stationnement payant affecté à un usage public est tenu d’appliquer au consommateur, en dehors de toute formule d’abonnement ou de tarification journalière, une tarification à la minute lorsque le coût du service est déterminé a posteriori. »
La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Il se trouve que j’ai présidé une association foncière urbaine libre, une AFUL, qui gérait le plus gros parking d’Île-de-France, dont une partie était payante. Je peux vous dire que la technique du paiement à la minute ne pose aucun problème et qu’on n’aurait pas eu besoin de dix-huit mois pour la mettre de place. Simplement, on ne voulait pas le faire, parce que l’autre système nous rapportait de l’argent, ce qui nous permettait d’entretenir le parking.
Par conséquent, n’allons pas dire qu’on n’a pas suffisamment de temps pour s’adapter. C’est tout à fait possible. Il ne s’agit que d’un paramétrage. En outre, je constate que, à Paris – ce n’est peut-être pas le cas en province –, on a supprimé les bornes qui existaient à l’entrée et à la sortie piétons. Auparavant, on pouvait se dire que ce n’était pas la peine de courir pour aller chercher sa voiture. Mais, aujourd’hui, tout est fait pour que la minute devienne deux ou trois minutes.
Pour avoir été gestionnaire de parking dans une ville non pas de droite mais de gauche – Noisy-le-Grand – (Exclamations sur les travées de l'UMP.), dont le député de l’époque, socialiste, siège toujours à l’Assemblé nationale, je peux vous dire que l’argument selon lequel il faut laisser du temps au temps n’est pas recevable.
M. Jean-François Husson. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. Je suis favorable au report à 2016. En effet, les gestionnaires de parking ne sont pas les seuls concernés. Il faut aussi prendre en compte les engagements contractualisés entre la collectivité locale et ces gestionnaires. À mon avis, il faut voter cet amendement, mais il faut faire très attention et prendre en compte les réticences que suscite cette mesure. Il faut s’assurer que celle-ci ne se retournera pas contre les collectivités locales qui ont des engagements avec les gestionnaires de parking. Cette mesure relève du bon sens, bien entendu – on voudrait tous que le prix soit calculé à la minute –, mais, je le répète, il faut faire attention aux conséquences pour les collectivités locales.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Gérard Cornu a dit l’essentiel de ce que je voulais dire. Il faut en effet tenir compte des gestionnaires non seulement des parkings, mais également des collectivités locales. Les parkings représentent une recette pour les collectivités locales et il ne me paraît pas choquant de soulever la question d’une concertation avec celles-ci au moment où nous envisageons de prendre une décision qui peut affecter leurs recettes.
J’entends l’expérience d’une gestionnaire de parking en Île-de-France et à Paris, mais la réalité n’est pas forcément la même dans tous les parkings de France. En tout cas, je le répète, il me semble utile de prévoir un délai qui nous permette d’organiser la concertation et de disposer de l’expertise nécessaire. Grâce au Sénat, nous allons vers un progrès pour le consommateur, mais ce progrès doit aussi tenir compte des contraintes des collectivités locales en matière de recettes.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Monsieur le ministre, j’ai entendu votre explication, mais elle me paraît discutable et n’est pas nécessairement recevable.
Les collectivités gestionnaires connaissent globalement le temps d’occupation de leurs parkings. Elles ont fait des calculs, par exemple par tranches d’une demi-heure. Il existe d’ailleurs des périodes de gratuité partielle.
Tant les opérateurs que les collectivités elles-mêmes, si elles gèrent le parking en régie, ont aujourd’hui les moyens de reconfigurer le système en préservant leur recette, puisqu’elles connaissent le nombre d’entrées et le temps de stationnement des véhicules.
Par conséquent, on ne peut pas se cacher derrière les éventuelles contraintes des collectivités locales ou des opérateurs. À l’instar de Catherine Procaccia, je ne peux recevoir vos arguments, monsieur le ministre. Le calcul ne repose que sur deux ou trois grandes données. On peut réaliser des ajustements. La mesure pourrait donc entrer en vigueur dès 2014 ou 2015. Cela serait plus conforme à nos attentes.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je voterai l’amendement rectifié.
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, pour explication de vote.
M. Christian Cambon. Une mesure de sagesse ne consisterait-elle pas à prévoir que la mesure s’appliquera lors du renouvellement des contrats de délégation de service public ? C’est en effet à ce moment que les modifications de tarifs peuvent intervenir. Ce serait plus logique et, pour le coup, vous aideriez les collectivités locales.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Et si les contrats sont renouvelés en 2020 ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement était défavorable à l’amendement initial. Je vous ai proposé un compromis : le report de l’application de la mesure au 1er janvier 2016. La loi sera promulguée au printemps 2014. Ce ne sont donc pas des délais qui nous renvoient aux calendes grecques ! Je pense que le compromis et les délais sont raisonnables. En tout cas, telle est la proposition du Gouvernement.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Alain Fauconnier, rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Je pense moi aussi que la date du 1er janvier 2016 constitue un bon compromis.
M. le président. L'amendement n° 49 rectifié, présenté par Mmes Procaccia et Farreyrol, MM. Doublet et D. Laurent, Mmes Cayeux et Deroche, MM. Milon, Cornu, Pointereau et Cointat, Mmes Des Esgaulx et Giudicelli, MM. Houel, Billard, Chauveau et Grosdidier, Mmes Bruguière et Garriaud-Maylam, M. Gilles, Mme Sittler, MM. Pinton et Leleux, Mlle Joissains, MM. Laménie et César, Mme Boog, MM. Cambon et Saugey, Mmes Mélot et Masson-Maret, M. Béchu, Mme Primas et MM. J. Gautier et Pillet, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Le professionnel doit informer l'acheteur du prix moyen des consommables et accessoires indispensables à l'utilisation du bien et si un seul type de consommable permet son fonctionnement.
Cette information doit être précisée à côté du prix d'achat.
Les dispositions du présent paragraphe entrent en vigueur au plus tard le 1er janvier 2015.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Cet amendement concerne le vécu quotidien. Il est arrivé à chacun d’entre nous d’acheter une imprimante à soixante ou soixante-dix euros et de payer presque autant lors du premier renouvellement des cartouches d’encre, sans avoir été informé de leur prix avant l’achat de l’imprimante. On connaît éventuellement le nombre de pages que l’on peut imprimer, mais on ne connaît pas le prix des cartouches !
Pour prendre un autre exemple, il existe des machines à café qui ne fonctionnent qu’avec les recharges de la marque d’origine.
Je propose donc, avec un certain nombre de mes collègues, que l’on informe les acheteurs potentiels du prix moyen des consommables absolument indispensables au fonctionnement de l’appareil.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Derrière cet amendement, il y a un souci que je partage : le coût d’utilisation d’un bien est souvent un critère de choix aussi important que son prix d’acquisition. Mais, en pratique, cet amendement impose une charge administrative considérable au vendeur. En effet, il est difficile de connaître et d’anticiper l’évolution du prix des consommables et de calculer un prix moyen fiable.
Il faut que les obligations d’information mises à la charge des professionnels restent d’une ampleur et d’un coût proportionnés à l’objectif de protection du consommateur que l’on cherche à promouvoir. Or il y a, de manière manifeste, une disproportion entre le coût et l’avantage de la mesure proposée. L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je rectifie l’amendement pour tenir compte de ce que vient de dire M. le rapporteur. Je propose de supprimer la référence au prix moyen et de la remplacer par le prix des consommables au jour de la vente. Dans ce cas, il n’y a plus de problème d’évaluation.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 49 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia et Farreyrol, MM. Doublet et D. Laurent, Mmes Cayeux et Deroche, MM. Milon, Cornu, Pointereau et Cointat, Mmes Des Esgaulx et Giudicelli, MM. Houel, Billard, Chauveau et Grosdidier, Mmes Bruguière et Garriaud-Maylam, M. Gilles, Mme Sittler, MM. Pinton et Leleux, Mlle Joissains, MM. Laménie et César, Mme Boog, MM. Cambon et Saugey, Mmes Mélot et Masson-Maret, M. Béchu, Mme Primas et MM. J. Gautier et Pillet, et ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Le professionnel doit informer l'acheteur du prix des consommables au jour de la vente.
Cette information doit être précisée à côté du prix d'achat.
Les dispositions du présent paragraphe entrent en vigueur au plus tard le 1er janvier 2015.
Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ainsi rectifié ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Je vois mal comment le vendeur pourra gérer une telle situation et informer sur le prix de tous les consommables. Je maintiens mon avis défavorable.
Mme Catherine Procaccia. La plupart du temps, ils vendent le produit et les consommables !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. Il est bien dommage que vous donniez un avis défavorable, car c’est quand même du vécu, notamment avec les imprimantes. On fait miroiter au consommateur des prix très bas, défiant toute concurrence, sans qu’il s’aperçoive que les consommables représentent parfois le double du prix de l’imprimante. Parfois, l’acheteur est même obligé de changer d’imprimante pour limiter les coûts. Or nous sommes ici pour protéger les consommateurs.
Ce problème étant soulevé, le Sénat s’honorerait à voter cet amendement, qui vient d’être rectifié, même s’il n’est pas parfait. Nous devrions profiter de la navette pour essayer d’améliorer les choses.
M. le président. La parole est à M. Alain Fauconnier, rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. J’entends ce que vous dites, mais nous venons de discuter d’amendements sur l’éducation des consommateurs. Or vous nous faites une description de ceux-ci absolument apocalyptique.
M. Claude Dilain. Eh oui !
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Il me semble que lorsque l’on achète une imprimante, la moindre des choses est de se renseigner sur ce qu’elle va coûter au final. Je comprends ce que vous me dites, mais je suis quand même surpris qu’une telle mésaventure ait pu vous arriver, mon cher collègue. (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 288, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - La sous-section 5 de la section 3 du chapitre Ier du titre IV du livre V du code de l’environnement est complétée par un article L. 541–39–… ainsi rédigé :
« Art. L. 541–39–… - Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'information des utilisateurs de produits d'équipements électriques et électroniques afin de valoriser le réemploi, le recyclage ou d'autres formes de valorisation de ces déchets. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Le présent amendement a le même objet que l’amendement n° 295, à savoir la valorisation des déchets en facilitant l’information du consommateur. Simplement, il a été placé à la fin de l’article 4 pour que ses dispositions s’insèrent, s’il est voté, non pas dans le code de la consommation, mais dans le code de l’environnement.
Il possède également l’avantage de définir les modalités de l’information des utilisateurs par décret, laissant place à la concertation avec les acteurs concernés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Il me semble que cet amendement est étranger à l’objet du texte. Il constitue donc un cavalier et j’en sollicite le retrait. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 4
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 228 rectifié est présenté par M. Labbé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux, MM. Dantec, Desessard et Gattolin, Mme Lipietz et M. Placé.
L'amendement n° 458 est présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 113–5 du code de la consommation, il est inséré un article L. 113–... ainsi rédigé :
« Art. L. 113–... – Le matériel informatique proposé à la vente avec des logiciels intégrés constitue une vente par lots.
« Tout professionnel vendeur de matériel informatique fournissant des logiciels intégrés doit, avant tout paiement du prix par le consommateur, l’informer par voie d’affichage des caractéristiques essentielles et du prix public toutes taxes comprises du lot ainsi que du prix de chacun des logiciels composant individuellement le lot. L’indication de ces prix doit figurer sur la facture remise au consommateur.
« La violation de ces dispositions entre dans le champ d’application de l’article L. 122–3. »
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 228 rectifié.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à mettre fin à la pratique commerciale déloyale que constitue la vente forcée de logiciels intégrés au matériel informatique.
La jurisprudence dit aujourd’hui clairement que la vente de matériel informatique fournissant des logiciels intégrés constitue une vente par lots, comme l’explicite notamment le jugement rendu par le tribunal de proximité de Saint-Denis le 10 janvier 2012, lequel a estimé ces pratiques commerciales de fourniture de logiciels non demandés « déloyales en toutes circonstances », selon les termes de la directive 2005/29 /CE du 11 mai 2005.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 458.
M. Gérard Le Cam. Il s’agit du même amendement et je le considère donc comme défendu.
M. le président. L'amendement n° 459, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 113-5 du code de la consommation, il est inséré un article L. 113-5–... ainsi rédigé :
« Art. L. 113-5–... – Tout professionnel, fabricant ou vendeur d’un ordinateur doté de logiciels intégrés, doit fournir toutes les informations utiles permettant d’informer le consommateur sur les caractéristiques essentielles et le prix public toutes taxes comprises de ces produits, ainsi que sur les conditions d’utilisation et le montant correspondant à chacun des logiciels préchargés.
« L’indication de ces informations doit être faite par voie d’affichage et figurer sur la facture remise au consommateur.
« La violation de ces dispositions constitue une pratique commerciale trompeuse. »
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Il s’agit d’un amendement de repli qui, s’il ne tend pas à consacrer dans la loi la jurisprudence existante qui considère la vente de matériel informatique avec des logiciels intégrés comme une vente par lots, vise néanmoins à assurer au consommateur une information claire des différents produits qui composent cet achat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Sur le principe, nous serions plutôt favorables aux amendements identiques nos 228 rectifié et 458.
En effet, on peut se demander s’il est normal qu’un consommateur soit forcé d’acheter avec son ordinateur non seulement le logiciel d’exploitation qui l’accompagne, mais également de nombreux logiciels d’application. Cela contribue à augmenter le prix total de l’équipement, alors que, pour beaucoup d’entre eux, ils ne lui sont d’aucune utilité.
Toutefois, nous avons eu un débat en commission sur l’applicabilité de la disposition qui oblige le vendeur à donner les caractéristiques et les prix respectifs au consommateur. Cette obligation peut paraître délicate tant l’imbrication du hard et du soft est étroite.
Aussi, nous avons souhaité recueillir l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements, bien que nous y soyons favorables. Si l’avis de M. le ministre est favorable, je demanderai à Mme Schurch de se rallier aux amendements identiques nos 228 rectifié et 458. Dans le cas contraire, je donnerai un avis défavorable à l’amendement n° 459.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Ces amendements visent donc à imposer une information du consommateur sur le prix de chaque élément d’un lot constitué d’un ordinateur et de logiciels préinstallés.
Dans ce débat, j’ai entendu et lu beaucoup de choses. Les réseaux sociaux, notamment, sont parfois prompts à avancer un certain nombre d’arguments. Aussi, je voudrais rétablir quelques vérités.
Tout d’abord, de manière générale, le code de la consommation prévoit déjà une information précontractuelle du consommateur sur les prix et les caractéristiques essentielles des biens qu’il achète. Cette information est d’ailleurs complétée par le présent projet de loi afin d’assurer au consommateur une information renforcée.
Ensuite, s’agissant de caractère « déloyal en toutes circonstances » de la vente liée des logiciels avec les ordinateurs, on cite régulièrement un jugement du tribunal de proximité de Seine-Saint-Denis, mais on pourrait citer également un arrêt de la cour d’appel de Versailles du 5 mai 2011, qui allait dans le même sens, et qui a été cassé par la Cour de cassation.
Les règles communautaires en matière de pratiques commerciales déloyales, traduites dans les dispositions du code de la consommation, sont claires : la vente liée ne peut pas être interdite per se, c’est-à-dire ne peut être interdite en soi.
Pour autant, les pouvoirs publics disposent de plusieurs leviers pour favoriser la liberté de choix du consommateur. S’il apparaît que les dispositions du code de la consommation ne sont pas idoines pour modifier les pratiques commerciales qui ont cours, les dispositions du droit de la concurrence permettent en revanche d’appréhender la problématique au travers de plusieurs angles.
Ainsi, la position dominante de Microsoft sur le marché des systèmes d’exploitation d’ordinateur personnel permet déjà aux autorités de la concurrence d’agir contre les ventes liées de logiciels complémentaires. S’agissant de la préinstallation des logiciels, la Commission européenne avait obtenu que Microsoft s’engage à proposer aux utilisateurs un écran multi-choix permettant de sélectionner facilement le navigateur web de son choix, et non simplement Internet explorer.
Le 6 mars dernier, la Commission a sanctionné Microsoft d’une amende de 561 millions d’euros pour cause de non-respect de cet engagement entre mai 2011 et juillet 2012. Les autorités françaises doivent continuer d’encourager ces actions.
Plus largement, l’Autorité de la concurrence, qui a effectué une perquisition à la fin de juin chez Apple, s’intéresse aux « écosystèmes fermés » qui se développent depuis les systèmes d’exploitation des smartphones et tablettes : iOS et App Store, Androïd et Google Play, Windows Phone et Windows Phone Store, BlackBerry et BlackBerry World.
Dès qu’un consommateur choisit tel ou tel constructeur, il se retrouve lié à une offre précise et il ne peut plus en sortir. Il est verrouillé, en quelque sorte, dans son choix initial. L’enquête de l’Autorité de la concurrence permettra de vérifier que le marché des applications est suffisamment concurrentiel, que les éditeurs d’applications peuvent accéder à cet écosystème et que les tarifs qu’ils payent sont non discriminatoires.
Ce dernier point est important et à mettre en regard d’une évolution majeure du marché : les consommateurs se détournent massivement du marché des PC au profit des tablettes.
L’engagement du candidat François Hollande intitulé « Vente liée - Je laisserai aux utilisateurs la possibilité de choisir leurs logiciels » était adressé aux utilisateurs dans les administrations et collectivités territoriales. Cet engagement a d’ailleurs souvent été rappelé.
ZDNet a rappelé que cette « déliaison » était un engagement du candidat François Hollande. La gazette en ligne a repris à l’appui de cette assertion un courrier en date du 10 avril 2012 à l’Association des développeurs et des utilisateurs de logiciels libres pour les administrations et les collectivités territoriales dans lequel le candidat François Hollande indiquait : « Il est nécessaire de faire en sorte que les prix du matériel et des logiciels préinstallés soient dissociés. »
Cet engagement est non pas adressé à une association de consommateurs, et donc aux consommateurs, mais à une association de professionnels des administrations et collectivités territoriales. En cela, il se distingue de ce que j’ai pu lire ici ou là sur ce qu’auraient été les engagements de François Hollande.
Je le répète, le Gouvernement est fortement mobilisé sur cette question et il l’a déjà prouvé. C’est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 228 rectifié et 458.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. M. le rapporteur, sur les amendements précédents, avait demandé l'avis du Gouvernement avant de se déterminer. Il aurait fallu lui demander de nouveau son avis.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. La commission serait restée favorable aux amendements nos 228 rectifié et 458, dont l’adoption aurait fait tomber l’amendement n° 459.
M. le président. L'amendement n° 457, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 2° du I de l'article L. 121–1 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...) Le recours à des arguments nutritionnels portant sur des caractéristiques accessoires du produit et visant à attribuer à celui-ci des avantages et propriétés qu'il ne possède pas, ou à masquer son impact sanitaire réel, ou les arguments visant à attribuer des caractéristiques nutritionnelles sans rapport avec l'incidence sanitaire réelle selon le mode de consommation généralement pratiqué. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement concerne le recours aux arguments nutritionnels pour vanter les produits miracles qui feraient baisser le taux de cholestérol, permettraient de rester jeune, etc.
Ces arguments, qui portent sur des caractéristiques accessoires du produit, visent à attribuer à celui-ci des avantages et propriétés qu’il ne possède pas réellement.
Il convient donc d’interdire de tels procédés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Les allégations nutritionnelles sont désormais très encadrées par le droit communautaire. L’industriel doit déposer devant l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’EFSA, un dossier de demande d’autorisation pour alléguer de tel ou tel apport d’un produit sur le plan nutritionnel. Après évaluation de l’EFSA, la Commission européenne prend la décision d’autorisation.
Présenter un argument nutritionnel qui ne figure pas sur la liste européenne des allégations autorisées est déjà susceptible de sanctions pénales.
En outre, modifier l’article L. 121–1 du code de la consommation comme tendent à le proposer les auteurs de cet amendement pose un problème juridique de compatibilité avec le droit communautaire.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 504, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 441–3 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La facture mentionne également un numéro de téléphone permettant au consommateur de joindre le service après-vente. »
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. En vertu de l’article L. 441–3 du code de commerce, « tout achat de produits ou toute prestation de service pour une activité professionnelle doivent faire l’objet d’une facturation ». Les alinéas 3 et 4 de cet article prévoient les mentions obligatoires devant figurer sur la facture : le nom des parties, la dénomination et la quantité des produits vendus, la date de règlement, etc.
La facture a une fonction commerciale ; elle mentionne en revanche très rarement le numéro de téléphone du service après-vente. Ce numéro est parfois disponible par voie d’affichage ou sur Internet.
Cet amendement vise à rendre obligatoire la mention, sur la facture, d’un numéro de téléphone permettant au consommateur de joindre un service après-vente, afin de faciliter les démarches en cas de dysfonctionnement du bien acheté, notamment pour les personnes âgées ayant du mal à se déplacer, qui ne peuvent pas revenir au magasin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. La notion de service après-vente renvoie à l’organisation interne de l’entreprise qui a procédé à la vente. Elle est pertinente pour de grosses sociétés qui sont organisées pour traiter les relations postcontractuelles, mais toutes les entreprises n’ont pas un service après-vente. L’essentiel est que le consommateur dispose d’un numéro de contact lui permettant de joindre le professionnel, ce qui est déjà prévu par le droit.
Il me semble donc que cet amendement est satisfait ; par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 260 rectifié, présenté par Mmes Procaccia et Deroche et MM. J. Gautier et Cambon, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Lorsque l’acheteur ne dispose pas à l’achat d’un mode d’emploi rédigé en français précisant les conditions d’emploi du produit et les précautions à prendre le privant d’en faire un usage conforme à sa destination, le vendeur est tenu de lui fournir gratuitement un manuel d’utilisation compréhensible en langue française sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable.
En l’absence d’exécution immédiate du contrat, le professionnel s’engage à le fournir dans un délai de huit jours ouvrés.
À défaut, l’acheteur peut exiger le remboursement de la totalité des sommes versées, y compris les frais de livraison. Il restitue le bien sans dépréciation au vendeur ou à une personne désignée par ce dernier, au plus tard, dans les quatorze jours suivant la communication de sa décision de faire valoir ses droits.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. La loi Toubon de 1994 rendait obligatoire l’usage de la langue française dans les modes d’emploi de tous les produits commercialisés en France. La jurisprudence impose aux professionnels de fournir un mode d’emploi rédigé de façon claire. La prise en main d’un certain nombre de produits s’avère parfois très compliquée et chacun d’entre nous a pu se rendre compte que l’existence d’un mode d’emploi sur papier ne la rendait pas nécessairement plus facile.
De plus en plus, les modes d’emploi sont fournis sur des CD-ROM, parfois très peu pratiques. Or tout le monde ne dispose pas nécessairement d’un ordinateur. Ces modes d’emploi représentant parfois des livrets de plus d’une centaine de pages, le fabricant réalise une économie en ne le faisant pas imprimer.
Cet amendement a donc pour objet, non pas d’obliger le fabricant à mettre systématiquement à disposition un mode d’emploi sur papier, mais de permettre à l’acheteur de demander un tel mode d’emploi s’il en a l’usage. À défaut, si l’acheteur ne peut pas obtenir de mode d’emploi de son appareil et se trouve donc dans l’impossibilité de l’utiliser, il peut en demander le remboursement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L’obligation de fournir un manuel en français existe déjà. Elle fait l’objet de contrôles de la part de la DGCCRF et est sanctionnée si elle n’est pas respectée. Cet amendement est donc satisfait par le droit existant. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. La préoccupation exprimée par Mme Procaccia est déjà très largement prise en compte par les missions de la DGCCRF, que celle-ci remplit de manière tout à fait satisfaisante. En effet, ce service est habilité à contrôler auprès des professionnels le respect des dispositions de la loi Toubon.
Lorsqu’un professionnel commercialise un bien en proposant un mode d’emploi qui n’est pas rédigé en français, les services de la répression des fraudes peuvent y donner une suite administrative – avertissement, injonction à se mettre en conformité –, mais ils ont aussi la possibilité de dresser un procès-verbal, car le non-respect de l’obligation d’utiliser la langue française est sanctionné par une contravention de quatrième classe. Il existe donc toute une palette – qui me paraît amplement suffisante – d’instruments coercitifs pour faire respecter la loi Toubon.
Ensuite, il me semble souhaitable d’éviter l’effet de bord lié au fait que votre amendement mentionne l’achat d’un « bien ». En l’occurrence, il n’est pas nécessaire de fournir de mode d’emploi lors de l’achat de tout type d’objet.
Il me semble donc que l’état actuel du droit répond déjà aux préoccupations que vous exprimez et je vous suggérerai donc de retirer votre amendement. Quoi qu’il en soit, le Gouvernement s’associe pleinement à ces préoccupations.
M. le président. Madame Procaccia, l’amendement n° 260 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Il m’étonnerait que la personne qui achète un bien et constate l’absence de mode d’emploi sous forme papier pense systématiquement à saisir la DGCCRF. Dans la plupart des cas, on se retourne vers le vendeur, mais on ne pense pas à saisir l’administration. J’ai découvert avec étonnement que la loi Toubon n’était pas systématiquement appliquée en France. Peut-être faudrait-il mettre en place une procédure plus simple pour joindre la DGCCRF ?
J’accepte de retirer mon amendement, monsieur le ministre, mais laissez-moi vous dire qu’aux États-Unis, il est possible de renvoyer un produit au fabricant au seul motif que son utilisation est trop compliquée et que le mode d’emploi n’est pas assez clair.
En France, il existe une profession trop peu reconnue – c’est dommage, car 90 % des personnes formées dans ce domaine trouvent immédiatement un emploi –, celle de rédacteur technique ; aux États-Unis, cette profession figure même dans le peloton de tête des cent métiers les plus prisés. Il est dommage que bon nombre des modes d’emploi fournis en France soient véritablement du chinois – sans vouloir stigmatiser cette langue ! Or il existe des rédacteurs techniques dans une grande variété de branches.
Permettez-moi de rappeler quelques faits anecdotiques, certes beaucoup plus graves que les désagréments que peut causer un mode d’emploi d’appareil électroménager mal rédigé.
Certains avions de la Royal Air Force n’ont jamais pu décoller parce que les sièges éjectables étaient montés à l’envers en raison d’une notice mal comprise. Dans le même esprit, Le Canard enchaîné signalait dans son édition du 4 septembre 2013 une lourde erreur d’installation sur le site de Flamanville, en raison d’une documentation de référence peu lisible.
Il s’agit d’affaires graves, mais je pense malgré tout que l’on ne répond pas de manière satisfaisante à ceux qui souhaitent obtenir un mode d’emploi rédigé en bon français et sur papier – car ce dernier point n’est pas une obligation dans la réglementation française.
Je retire donc mon amendement, puisque cela m’a été fortement suggéré.
M. le président. L’amendement n° 260 rectifié est retiré.
L’amendement n° 455, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est complété par un article ainsi rédigé :
« Art. L. 2133–… - Les messages publicitaires en faveur de boissons avec ajouts de sucres, de sel ou d’édulcorants de synthèse ou de produits alimentaires manufacturés faisant l’objet d’une information à caractère sanitaire dans les conditions fixées par l’article L. 2133-1 sont interdits durant la diffusion des programmes destinés à la jeunesse. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous avions déposé, en décembre 2010, une proposition de loi visant à protéger les enfants et les adolescents contre les effets de la publicité télévisuelle.
Cet amendement tend à interdire « les messages publicitaires en faveur de boissons avec ajouts de sucres, de sel ou d’édulcorants de synthèse ou de produits alimentaires manufacturés faisant l’objet d’une information à caractère sanitaire » au moment des émissions destinées aux jeunes consommateurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L’article L. 2133–1 du code de la santé publique impose d’accompagner les publicités en faveur de boissons avec ajouts de sucres, de sel, d’édulcorants de synthèse ou de produits alimentaires manufacturés d’un message sanitaire du type « Mangez cinq fruits et légumes par jour » ou encore « Pratiquez une activité physique régulière ».
Faut-il changer de logique en interdisant purement et simplement la publicité en faveur de ces produits durant la diffusion de programmes audiovisuels destinés à la jeunesse ?
L’objectif de lutte contre l’obésité est parfaitement louable et ce sujet est un enjeu majeur de santé publique. Interdire la publicité empêchera également de faire passer les messages du programme national « Nutrition santé », ou PNNS. Une telle interdiction avait déjà été envisagée voilà quelques années, mais finalement écartée au profit de la mise en place d’une charte alimentaire, signée en février 2009 pour une durée de cinq ans, entre les professionnels et les pouvoirs publics et visant à promouvoir une alimentation et une activité physique favorables à la santé dans les programmes et les publicités télévisés.
Cette charte est placée sous le contrôle du Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, qui en tire un bilan plutôt positif. Les chaînes ont diffusé des émissions favorables à l’éducation nutritionnelle, les annonceurs se sont inscrits dans la démarche du programme « manger bouger ». Cette démarche de charte devrait d’ailleurs être prolongée par ces acteurs dans les mois prochains. Il serait donc dommage de casser la dynamique de coopération mise en place sous l’égide du CSA.
Je ne suis donc pas très favorable à cet amendement, mais je souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le 18 février 2009 a été signée, sous l’égide du CSA et pour une durée de cinq ans, une charte engageant les professionnels et les ministères chargés de la santé, de la culture, de l’agriculture et de l’alimentation. Cette charte vise à promouvoir une alimentation et une activité physique favorables à la santé dans les programmes et les publicités diffusés à la télévision. Un bilan annuel de l’application de cette charte a été réalisé par le CSA.
Compte tenu de l’efficacité constatée de cette démarche d’autodiscipline, le Gouvernement va la renouveler en élargissant le nombre d’engagements visés par la charte. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur cet amendement, à moins qu’il ne soit retiré.
M. le président. Monsieur le rapporteur, quel est finalement l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 456, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est complété par un article ainsi rédigé :
« Art. L. 2133–... - Les messages publicitaires télévisés ou radiodiffusés portant sur des boissons et des produits alimentaires manufacturés ne répondant pas aux profils nutritionnels définis par décret, pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, ne peuvent être diffusés pendant les tranches horaires dites de « prime time ». Cette disposition s’applique aux messages émis et diffusés à partir du territoire français. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement est retiré, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 456 est retiré.
L’amendement n° 307, présenté par MM. Placé, Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le IX de l’article L. 541-10 du code de l’environnement est complété par les mots : « ou de critères permettant un allongement de la durée de vie du produit, notamment par l’amélioration de sa réparabilité ».
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Le candidat François Hollande a été cité à plusieurs reprises tout à l’heure ; je me permets donc de le citer à mon tour.
François Hollande, donc, candidat à la présidentielle, avait répondu à un questionnaire du Centre national d’information indépendante sur les déchets, le CNIID, à tous les candidats. Dans un courrier daté du 6 avril 2012, il prenait les engagements suivants : « Il nous faudra enfin agir sur la durée de vie des produits. Tout en soutenant des modes de consommation responsable, c’est sur cette donnée intrinsèque que nous devons travailler. Plusieurs pistes existent, qui devront être étudiées au regard de leur intérêt environnemental mais également – pour certaines – en prenant garde à leurs éventuelles répercussions sur le pouvoir d’achat : […] la lutte contre l’obsolescence programmée des produits par l’instauration progressive d’une garantie longue de 5 ans, puis de 10 ans pour les biens de consommation durables et la modulation de l’écotaxe selon la durée de vie garantie du produit. »
Les écologistes reprennent donc tout naturellement cette proposition de modulation de l’éco-contribution. Cet amendement vise à intégrer dans son calcul des critères permettant un allongement de la durée de vie du produit, notamment grâce à l’amélioration de sa « réparabilité ».
L’éco-participation, ou éco-contribution, correspond au coût de collecte et de recyclage des déchets des équipements électriques et électroniques, les fameux D3E. Cette contribution aux frais de valorisation et d’élimination des D3E responsabilise les acheteurs et permet un recyclage efficace.
Cet amendement vise donc à instaurer une sorte de bonus-malus sur les appareils électroménagers notamment, en fonction de leur fiabilité et de leur « réparabilité ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Moduler les éco-participations en fonction de critères comme la durée de vie des produits ou leur « réparabilité » est une piste de réflexion intéressante, mais il est évident que nous n’allons pas improviser ici une réforme de ces contributions sans en mesurer sérieusement les conséquences. En outre, cet amendement me semble être un cavalier législatif.
Pour ces deux raisons, je le considère avant tout comme un amendement d’appel. Je suggère donc à ses auteurs de le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 520, présenté par Mme Bataille, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le troisième alinéa de l’article L. 541-10-2 du code de l’environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Afin de favoriser le réemploi, les déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers issus de la reprise obligatoire gratuite par les distributeurs sont considérés d’office comme un don. Un décret fixe les modalités de mise en œuvre du présent alinéa ».
La parole est à Mme Delphine Bataille.
Mme Delphine Bataille. Dans le prolongement de nos débats sur l’obsolescence programmée, la « réparabilité » et la durabilité des produits, cet amendement traite de la question du réemploi des équipements électriques et électroniques, les EEE.
Il existe encore des marges de progrès : trop d’équipements font encore l’objet d’un recyclage systématique alors qu’ils pourraient être quasiment remis à neuf et réutilisés.
L’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, dans une étude de juillet 2012 sur la durée de vie des EEE, a bien identifié cette problématique. Elle fait deux constats majeurs à ce sujet. D’une part, il apparaît que les filières de réemploi manquent encore de visibilité auprès des consommateurs, d’autre part, les points de collecte permettant aux acteurs de l’économie sociale et solidaire de s’approvisionner sont encore trop peu nombreux.
Actuellement, les équipements électriques et électroniques deviennent des déchets dès lors qu’ils sont abandonnés par leurs propriétaires. En conséquence, lors de leur reprise obligatoire par les distributeurs dans le cadre du principe « un pour un », les équipements deviennent mécaniquement des déchets, rendant leur rénovation ou reconditionnement impossible en vue d’un réemploi.
Certaines associations ou entreprises de réinsertion sociale spécialisées dans le réemploi regrettent cette situation qui prive la filière d’une manne d’approvisionnement en équipements électriques et électroniques.
L’objet de cet amendement est donc d’accroître le stock d’équipements pouvant faire l’objet d’une réutilisation, notamment au moyen de l’obligation de reprise des équipements qui s’impose aux distributeurs.
Toutefois, la notion de déchet étant complexe et faisant l’objet de multiples réglementations et jurisprudences, la disposition proposée peut sembler juridiquement précaire.
Par ailleurs, le réemploi doit être conservé comme une activité liée à l’économie sociale et solidaire, pour laquelle, monsieur le ministre, vous présenterez un projet de loi prochainement.
Je vous propose donc, monsieur le ministre, si vous en êtes d’accord – M. le rapporteur avait en commission sollicité l’avis du Gouvernement – de retirer cet amendement, dont le sujet pourra être abordé lors de l’examen de ce texte.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Madame la sénatrice, je confirme que la conférence environnementale se saisira de ce sujet. S’agissant des préoccupations que vous avez exprimées, j’ai eu des retours d’un certain nombre de grandes structures comme Envie et Emmaüs, avec lesquels nous travaillons en convergence. Si vous le souhaitez, nous pourrons chercher ensemble une solution répondant à vos préoccupations.
M. le président. L’amendement n° 520 est retiré.
Article 4 bis A
Après la section 10 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de la consommation, est insérée une section 10 bis ainsi rédigée :
« Section 10 bis
« Qualité et transparence dans l’élaboration des plats proposés dans le cadre d’une activité de restauration commerciale
« Art. L. 121-82-1. – Les personnes ou entreprises qui transforment ou distribuent des produits alimentaires dans le cadre d’une activité de restauration commerciale ou de vente à emporter de plats préparés, permanente ou occasionnelle, principale ou accessoire, précisent sur leurs cartes ou sur tout autre support qu’un plat proposé est “fait maison”.
« Un plat “fait maison” est élaboré sur place à partir de produits bruts. Lorsque la prestation de service de restauration ou la vente de plats préparés a lieu en dehors de l’établissement du professionnel, “sur place” s’entend au sens de “préparé dans les locaux de l’entreprise qui commercialise le service ou le plat”.
« Les modalités de mise en œuvre de la mention “fait maison” et les conditions d’élaboration des plats “faits maison” sont précisées par un décret conjoint des ministres chargés du commerce et de la consommation.
« Art. L. 121-82-2. – Le titre de maître-restaurateur distingue les personnes physiques qui dirigent une entreprise exploitant un fonds de commerce de restauration ou y exercent leur activité, pour la qualité de leur établissement et de leur cuisine.
« Il est délivré par le préfet du département de l’établissement pour lequel le titre est demandé.
« Les conditions dans lesquelles le titre de maître-restaurateur est délivré par l’autorité administrative et le cahier des charges est établi sont définies par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Antoine Lefèvre, sur l’article.
M. Antoine Lefèvre. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, dans ce texte relatif à la consommation et portant sur l’information du consommateur, cet article 4 bis A traite d’un sujet qui m’est cher et sur lequel j’ai attiré plusieurs fois le regard des pouvoirs publics, à savoir le secteur de la restauration, secteur important dans notre économie et gros pourvoyeur d’emplois en France.
Le présent article y traite de l’utilisation ou non, obligatoire ou non, de la mention « fait maison ».
Rappelons d’abord que la table française a été classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, rendant ainsi hommage au savoir-faire et au savoir-vivre à la française et à la qualité de notre gastronomie qu’il nous faut préserver.
Les consommateurs souhaitent, d’ailleurs, disposer d’informations suffisantes en la matière, comme le montre le succès des nombreux programmes télévisés consacrés à la cuisine.
Il existe un réel engouement de nos concitoyens pour l’élaboration de la cuisine à partir de produits bruts.
Mme la ministre avait indiqué, en commission, vouloir favoriser et valoriser par un logo le « fait maison » dans les restaurants.
Le « fait maison » correspond aux produits bruts transformés dans les cuisines des restaurants. Cette mention informerait les consommateurs qu’un plat proposé bénéficie de cette qualité, cela dans une démarche vertueuse, puisque, pour mieux informer le consommateur, le restaurateur aura tout intérêt à montrer qu’il a bien transformé ces produits dans sa cuisine.
Or, si nous sommes tous attachés à une restauration de qualité, nous sommes tout autant attachés au fait de développer les circuits courts au profit de la restauration. Nous sommes tout autant attachés au fait que chacun puisse aller au restaurant, et nous sommes aussi tout autant attachés au maintien d’un maillage de restaurants sur nos territoires.
Ainsi, l’obligation faite aux professionnels de préciser le « fait maison » sur leurs cartes conduirait à dévaloriser les autres plats qui ne bénéficieraient pas de la mention, voire à opposer les entreprises de restauration entre elles.
C’est négliger le fait que chaque type de restauration correspond à un besoin particulier du consommateur en termes d’attentes – moment de détente, événement festif – et de pouvoir d’achat.
Par ailleurs, le système proposé n’est pas fiable.
D’abord, chacun sait qu’il n’existe aucun service capable de réaliser tous les contrôles nécessaires à l’échelle des 200 000 établissements de restauration présents en France. Je l’ai d’ailleurs constaté moi-même, l’an passé, au cours de visites que j’ai effectuées dans les directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations, les DDCSPP, de cinq départements dans le cadre de mon rapport budgétaire pour avis sur la mission « Économie, développement des entreprises et du tourisme ». Et j’ai noté avec intérêt, monsieur le ministre, votre volonté d’accroître les effectifs de ces directions départementales.
Ensuite, un restaurateur qui ferait une terrine maison, par exemple, mais qui choisirait de ne pas l’inscrire sur sa carte pour ne pas dévaloriser ses autres produits pourrait être sanctionné pour non-respect de l’obligation en vigueur, alors même qu’il n’y aurait aucune conséquence pour le consommateur.
Enfin, il faut rappeler que, à l’issue du comité de filière de la restauration et de nombreux mois de concertation, les six principales organisations professionnelles de l’hôtellerie-restauration, qui représentent ensemble la quasi-totalité du secteur, étaient favorables à une inscription de la mention « fait maison » tel que l’avait proposé le Gouvernement en première lecture à l’Assemblée nationale.
Par ailleurs, il est difficile de prendre une décision sans qu’aucune étude d’impact économique ait été préalablement réalisée.
Pour toutes ces raisons, j’avais donc déposé un amendement tendant à supprimer l’obligation de l’inscription du « fait maison » et à rétablir la seule faculté, ainsi que l’avait proposé le Gouvernement en première lecture à l’Assemblée nationale. Cela me semblait plus raisonnable.
Mon amendement ayant été « absorbé » par un amendement équivalent de mon groupe, je tenais néanmoins à exposer ma position par rapport à celle de la commission.
Par ailleurs, je défendrai également un amendement déposé par mon collègue André Reichardt visant à étendre le dispositif « maître restaurateur » aux artisans restaurateurs.
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, sur l’article.
M. Christian Cambon. Madame la ministre, je souhaite revenir sur cette affaire du « fait maison », qui secoue beaucoup la profession.
Votre texte a le mérite d’aborder le problème de la qualité de la restauration sous l’angle d’une meilleure information du consommateur.
Pourtant, il n’apporte qu’une réponse partielle et bien éloignée des attentes des professionnels, comme mon collègue Antoine Lefèvre vient de le souligner.
On est en effet, dans ce secteur, en plein paradoxe. La restauration française est, certes, un fleuron pour l’image de marque de la France. Le prestige de ses tables étoilées et la qualité de sa gastronomie y ont largement contribué. Cela vient d’être rappelé, le « repas gastronomique » français a été officiellement reconnu par l’UNESCO, dans le cadre du patrimoine culturel immatériel.
Et pourtant, dans le même temps, des milliers de restaurants ne pratiquent plus que le réchauffage, qui, comme son nom l’indique, consiste à décongeler des surgelés, à réchauffer des plats sous vide ou des conserves alimentaires.
Dans d’autres restaurants, on pratique simplement l’assemblage : sur une même assiette, on sert aux clients des produits qui n’ont pas été élaborés sur place ou qui l’ont été très partiellement.
Par chance, d’autres, enfin, pratiquent la cuisine « maison ». Ces véritables artisans respectent nos savoir-faire traditionnels et proposent des repas préparés entièrement sur place, à base de produits bruts. Ils utilisent souvent des produits issus de l’agriculture locale, de nos terroirs ou de nos marchés d’intérêt national, garantie de fraîcheur et de qualité.
Or les consommateurs recherchent de plus en plus la transparence sur l’origine, la composition et la qualité gustative des produits qu’ils consomment dans les restaurants.
Les récents scandales alimentaires n’ont fait qu’accroître leur méfiance. En réponse, les professionnels ont multiplié les labels de toutes sortes. Malheureusement, cela n’a pas eu pour conséquence de mieux informer le client.
Hélas ! cela vient d’être dit, votre texte ne répond vraiment pas à cette attente. Aux dires des professionnels eux-mêmes, signaler la mention « fait maison » n’est pas applicable et, surtout, ce sera incontrôlable.
Après cette mention viendra peut-être un jour celle des plats allergènes, comme certaines associations commencent à le demander. Nos cartes de restaurant finiront ainsi par ressembler à une ordonnance médicale !
Il faut donc que le législateur propose une solution qui valorise vraiment le métier de cuisinier. C’est le sens de la proposition de loi que j’ai déposée le 18 avril 2013 et qui a déjà été signée par plus de soixante de nos collègues. Elle porte création d’une appellation « artisan restaurateur », lequel s’engagera à cuisiner sur place avec des produits bruts, n’ayant jamais été travaillés en amont. Plusieurs collègues ont déposé des amendements allant dans le même sens.
Madame la ministre, il faut vraiment avoir le courage d’une mesure forte. En effet, vous le savez, les recettes de ce secteur sont en baisse, alors même que le Gouvernement va les pénaliser un peu plus en portant le taux de TVA de 7 % à 10 % dès le 1er janvier 2014. (Exclamations sur certaines travées de l'UMP.)
Alors, il faut soutenir l’action courageuse de ces restaurateurs qui cuisinent eux-mêmes, et cela sans stigmatiser les autres modes de restauration, qui ont aussi leur rôle à jouer.
En donnant à ces restaurateurs l’appellation d’artisan, ce que le dictionnaire définit celui qui « travaille de ses mains », vous leur apporterez une aide aussi décisive que celle qui sauva les artisans boulangers. Vous aurez, surtout, madame la ministre, le mérite de revaloriser ces métiers de bouche, créateurs d’emplois, et de redonner ses lettres d’or à un secteur qui contribue au rayonnement de la France.
M. le président. La parole est à M. Alain Fauconnier, rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Toute une série d’amendements porte sur ce thème et je souhaite exposer ma position générale sur cette question.
Quel est l’objectif du label « fait maison » ? Il n’est aucunement de stigmatiser un type de restauration au profit d’un autre. Nous avons en France une restauration diversifiée, et c’est tant mieux ! Chaque type de restaurant, outre qu’il représente un grand nombre d’emplois, correspond aussi à un besoin particulier des consommateurs en termes d’attente et de pouvoir d’achat.
Les grandes chaînes de restauration, de plats préparés et semi-préparés d’origine industrielle ont donc toute leur place dans ce paysage.
Pourquoi ce label « fait maison » ? Parce qu’il existe aujourd’hui une demande forte des consommateurs pour connaître plus précisément l’origine et le mode d’élaboration des plats qu’ils consomment au restaurant.
En effet, les choses ne sont pas assez claires. D’un côté, il y a des restaurants dans lesquels le consommateur sait qu’il consomme du « fait maison ». C’est le cas, en particulier, des restaurants qui bénéficient du titre de « maître restaurateur ». De l’autre côté, il y a des restaurants dans lesquels le consommateur sait – ou présume très fortement – qu’il consomme de la cuisine de type industriel.
Entre ces deux ensembles, il existe une zone grise avec des restaurants qui proposent une carte mixte, comportant à la fois des plats artisanaux et des plats industriels ou semi-industriels sans qu’il soit possible de les distinguer aisément les uns des autres. C’est à cette confusion que le label « fait maison » entend apporter une réponse.
Les Français n’ont rien contre la cuisine industrielle, je le répète, mais ils ne veulent pas qu’on leur fasse manger de l’industriel quand ils croient manger de la cuisine artisanale. Ils ne veulent pas non plus payer de l’industriel au prix de l’artisanal. Permettre de distinguer l’un de l’autre correspond tout simplement à cet impératif d’une information claire et loyale des consommateurs, information qui, aujourd’hui, n’existe pas. Actuellement, un restaurateur peut écrire « fait maison » sur sa carte. Comme le label n’est défini par aucune norme, il ne peut être contrôlé et cela n’apporte donc aucune garantie au consommateur.
J’ai auditionné les professionnels. Ils disent que le « fait maison » peut être défini sans créer une usine à gaz réglementaire. Cela peut se faire par une discussion entre eux et l’administration.
J’ai également entendu la ministre et ses services. Ils disent que le contrôle de ce label est possible et qu’il est même relativement simple à effectuer. Il suffit de contrôler les factures d’approvisionnement pour se rendre compte assez vite si le restaurant triche avec le « fait maison ».
Je suis donc pour la création de ce label, qui est à la fois souhaitable et possible en pratique. Il reste à savoir si son utilisation doit être facultative ou obligatoire. Les députés l’ont rendue obligatoire, en première lecture. Certains d’entre vous voudraient revenir en arrière. J’estime que ce retour est contraire aux intérêts des consommateurs, qui ont droit à une information claire et loyale. J’estime aussi que ce retour en arrière serait mauvais pour la filière de la restauration traditionnelle, car les restaurateurs de type artisanal ont besoin d’une impulsion forte pour monter en gamme et pérenniser leur activité.
Voyez les chiffres : depuis trente ans, la restauration rapide et la restauration des grandes chaînes se développent fortement, alors que la restauration traditionnelle connaît de grandes difficultés. Son créneau, son avenir, c’est la qualité. Si l’on n’est pas capable de garantir cette qualité aux yeux des consommateurs, ces difficultés vont continuer de s’aggraver.
Rendre obligatoire la mention du « fait maison » est, à mes yeux, la seule façon de résorber la zone grise dont je parlais et de lever le doute sur l’origine des plats servis. Une mention facultative ne suffira pas, en effet, à enclencher une dynamique positive, car les dizaines de milliers de restaurants en France qui présentent sur leur carte à la fois des plats « faits maison » et des plats industriels ne prendront pas d’eux-mêmes le risque de dévaloriser une partie de leur carte. Ils continueront à jouer sur un flou, commode à court terme, mais qui les condamne à long terme.
Le caractère obligatoire de la mention les incitera à monter en gamme et renforcera la confiance des consommateurs à l’égard de toute la filière. Je suis donc clairement favorable à un dispositif obligatoire d’identification pour le consommateur du plat « fait maison ».
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 503, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Alinéas 4 à 6
Supprimer ces alinéas.
II. - En conséquence, alinéa 7
Remplacer la référence :
Art. L. 121–82–2
par la référence :
Art. L. 121–82–1
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Notre groupe n’est pas favorable à la mention « fait maison », qui est selon nous beaucoup trop floue et qui ne pourra pas être contrôlée au regard du nombre d’établissements de restauration en France : près de 200 000.
Il est vrai que, dans ce métier, aucun titre particulier n’est exigé. Pour être coiffeur, il faut un diplôme. En revanche, n’importe qui peut s’installer comme restaurateur. Ce n’est pas tout à fait normal.
La cuisine française, on l’a dit, est capable du meilleur, fort heureusement, grâce à nos grands chefs, hommes ou femmes, mais aussi du pire. Il semble même que cette dernière tendance se développe actuellement.
Nous proposons, en contrepartie, de développer la formation de maître restaurateur et d’apprenti, ce qui permettrait une évolution qualitative de la restauration française. L’État a certainement son rôle à jouer dans ce domaine de la formation dans la restauration.
M. le président. L'amendement n° 313 rectifié, présenté par MM. Revet, Pointereau et Pierre, est ainsi libellé :
1° Alinéa 4
Après les mots :
restauration commerciale
insérer les mots :
qu’il s’agisse de vente sur place, à emporter ou à livrer de plats préparés
2° Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Est considéré comme un produit brut tout produit qui n’a pas subi de transformation de nature à modifier ses caractéristiques organoleptiques.
3° Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce décret précise de façon limitative les produits non bruts pouvant cependant être utilisés pour l’élaboration de plats « faits maison ».
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Le a) du 1° étend l’obligation d’information sur les conditions d’élaboration des plats à toutes les formes de restauration commerciale – ventes de plats à consommer sur place, à emporter ou à livrer –, afin de l’appliquer également aux traiteurs et organisateurs de réceptions.
Le b) du 1° l’étend aux activités de restauration accessoires, ce qui permet de couvrir également les chambres d’hôte et les hôtels qui, parfois, font de la petite restauration.
Le 2° définit précisément la notion de « produit brut », qui n’est pas toujours évidente à saisir.
Le 3° permet aux professionnels d’utiliser un certain nombre de produits non bruts spécifiques, tels que les charcuteries, salaisons ou condiments, pour l’élaboration de plats « faits maison ».
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 343 rectifié est présenté par MM. Lasserre et Tandonnet, Mmes Dini, Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 502 est présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 597 rectifié bis est présenté par MM. Poniatowski et Lefèvre, Mme Lamure, MM. Cambon, Bécot, Pointereau, Houel, Cornu, Leleux, Billard et Milon, Mme Sittler, MM. Ferrand et Delattre, Mme Mélot, M. Revet et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Remplacer le mot :
précisent
par les mots :
peuvent préciser
La parole est à M. Henri Tandonnet, pour présenter l’amendement n° 343 rectifié.
M. Henri Tandonnet. Je serai bref sur cet amendement, qui est très important pour nos restaurateurs.
Nous approuvons, bien entendu, la création du label « fait maison ». Cependant, le présent amendement a pour objet de supprimer l’inscription obligatoire de cette mention sur les cartes et les menus des restaurants et de rétablir la simple possibilité proposée par le Gouvernement en première lecture à l’Assemblée nationale, disposition qui semble plus raisonnable.
Si les consommateurs méritent une information claire et transparente, il ne faut pas qu’elle se fasse au détriment de notre diversité gastronomique. Obliger les professionnels à inscrire la mention « fait maison » sur leurs cartes conduirait à dévaloriser les autres plats qui n’en bénéficieraient pas, voire à opposer les entreprises de restauration entre elles. Ce serait négliger le fait que chaque type de restauration correspond à un besoin particulier du consommateur en termes d’attente – moment de détente, événement festif,… – et de pouvoir d’achat.
Par ailleurs, il sera très difficile de faire appliquer cette disposition, compte tenu du nombre d’établissements qui existent dans notre pays. La filière a manifesté son accord pour l’adoption de la mention « fait maison », mais dans la mesure où celle-ci reste facultative. La rendre obligatoire serait source de nombreuses difficultés et infractions, et serait de nature à freiner le travail artisanal, plutôt que de le favoriser.
Nous souhaitons donc en rester à la proposition initiale et rendre cette mention facultative.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour présenter l'amendement n° 502.
Mme Mireille Schurch. Nous souhaiterions que le label « fait maison », s’il était adopté, devienne facultatif.
Je m’étonne, monsieur le rapporteur ! D’habitude, lorsque nous présentons certains amendements, c’est vous qui les trouvez compliqués à mettre en œuvre. En l’occurrence, je vous souhaite bien du courage, compte tenu des moyens alloués à la DGCCRF, pour faire vérifier dans les 200 000 restaurants français si les plats sont bien « faits maison »…
Par ailleurs, si cette mention était facultative, donc si le restaurateur avait la possibilité, ou non, d’en donner connaissance, cela valoriserait les plats « faits maison ». Le caractère obligatoire, au contraire, risque d’entraîner une dévalorisation des plats ne bénéficiant pas de ce label.
M. Christian Cambon. Évidemment !
Mme Mireille Schurch. Si vous pensez que vous êtes en capacité de mettre en place ce contrôle pour tous les restaurants, alors nous souhaitons donc que cette mention soit facultative, pour les raisons que je viens d’indiquer.
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l'amendement n° 597 rectifié bis.
M. Antoine Lefèvre. J’ai déjà indiqué, lors de mon intervention sur l’article, quel était l’objet de cet amendement.
Je n’ai pas été convaincu par vos propos, monsieur le rapporteur. Vous nous avez indiqué qu’en étudiant les factures, il serait très facile de prouver qu’un plat a été « fait maison ». J’en doute très fortement et je souhaite bien du courage aux agents qui seront appelés à exercer ce contrôle !
Cela me rappelle ce film des années quatre-vingt, Que les gros salaires le doigt !, dans lequel on voyait l’un des personnages, dont le métier était de contrôler des restaurants, qui, pour ce faire, coupait sur place des tranches de foie gras et vérifiait les factures y afférentes.
Pour connaître un peu le secteur de la restauration, il me paraît très compliqué de mettre en place une telle mesure. Je souhaiterais donc que la mention « fait maison » reste facultative.
M. le président. L'amendement n° 79 rectifié, présenté par MM. Cambon, G. Bailly, Beaumont, Bécot, Bizet et Buffet, Mmes Bruguière et Cayeux, MM. Cardoux, Carle, César, Cointat, Cléach, Charon, Chauveau, Couderc, Dallier et del Picchia, Mme Des Esgaulx, MM. Doublet, Dufaut, Duvernois, Ferrand et Fouché, Mme Garriaud-Maylam, MM. Gilles, Gournac, Grignon, Grosdidier et Houel, Mme Hummel, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, J. Gautier et Mayet, Mme Mélot, MM. Milon et Pinton, Mme Procaccia et M. Reichardt, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
L’utilisation de produits de substitution dans la préparation des plats doit être mentionnée.
La parole est à M. Christian Cambon.
M. Christian Cambon. Les crises successives qu’a connues le secteur de l’agriculture incitent de plus en plus les consommateurs à rechercher la transparence sur l’origine, les composants et la qualité gustative des produits qu’ils achètent et consomment.
La présence d’additifs ou de produits de substitution dans les denrées alimentaires ne doit pas induire le consommateur en erreur sur le produit consommé dans les restaurants ou en vente à emporter. Or de plus en plus de produits de substitution sont utilisés pour assurer des performances économiques au détriment des valeurs gustatives et nutritives.
Savez-vous, mes chers collègues, que, dans huit pizzas sur dix achetées dans le commerce, le fromage a été purement et simplement remplacé par une préparation dénommée « fromage analogue » ou, plus poétiquement, « lygomme » ? (Sourires.) Il s’agit d’une pâte composée de protéines laitières, d’huile de palme, d’exhausteurs de goût, d’amidon et d’arômes. Il est vrai que cela coûte 200 % moins cher qu’un vrai fromage de type mozzarella.
Autres exemples : le jambon peut contenir du plasma et du sirop de blé.
Quant aux steaks hachés, ils peuvent être « complétés » avec des protéines de soja ou de la fibre de bambou.
M. Antoine Lefèvre. Quelle horreur !
M. Christian Cambon. Hélas ! la Commission européenne a autorisé ces produits, sous la condition que la liste des ingrédients soit affichée sur les étiquettes des emballages. Mais lorsqu’un fast food ou un restaurateur vend un plat préparé contenant l’un de ces produits, le consommateur n’a pas la possibilité de vérifier l’étiquette !
Cet amendement vise donc à garantir plus de transparence en obligeant le restaurateur ou l’établissement de vente à emporter à informer le consommateur quant à l’utilisation de produits de substitution dans la préparation des plats qu’il achète.
M. le président. L'amendement n° 676, présenté par MM. Fauconnier et M. Bourquin, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
Les modalités de mise en œuvre de la mention « fait maison », les conditions d'élaboration des plats « faits maison » et celles permettant au consommateur d'identifier les plats« faits maison » et ceux qui ne le sont pas sont précisées par un décret conjoint des ministres chargés du commerce et de la consommation.
La parole est à M. Alain Fauconnier, rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Concernant la qualité et les conditions d’élaboration des plats servis dans les restaurants, la loi doit se contenter de fixer les objectifs et de renvoyer au décret le soin de déterminer les conditions concrètes de signalement de la qualité.
L'objectif est de permettre au consommateur d'identifier avec certitude si le plat qu’il commande est « fait maison » ou bien s’il s’agit d’un plat industriel ou semi-industriel. Pour cela, il faut que l’information sur l’élaboration des plats soit obligatoire. C’est cette obligation que les députés ont imposée en première lecture.
Le présent amendement renvoie clairement au niveau du décret le choix de la forme de l’information délivrée au consommateur et permettant de distinguer les plats « faits maison » de ceux qui ne le sont pas.
Cette information, la forme qu’elle prendra, les logos et les mentions seront choisis par l’administration, après une large concertation avec les professionnels du secteur.
M. le président. L’amendement n° 312 rectifié, présenté par MM. Revet, Pointereau et Pierre, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ne peuvent utiliser les appellations « restaurant », « traiteur », « auberge », « brasserie », « bistrot », « pizzeria », « table d’hôtes » et « crêperie » que les personnes ou entreprises mentionnées au premier alinéa du présent article qui font figurer sur leur carte ou sur tout autre support la mention « fait maison ».
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Cet amendement a pour objectif de créer une incitation pour les professionnels à inscrire sur leurs menus et documents commerciaux l’information sur les conditions d’élaboration de leurs plats.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 503 de M. Le Cam, la commission, considérant que la suppression pure et simple de la mention « fait maison » est une erreur, émet un avis défavorable.
J’ajoute que l’objet de l’amendement est contradictoire : d’un côté, il rejette le label « fait maison », et, de l’autre, il reconnaît l’utilité du titre de « Maître restaurateur ». Or, pour prétendre à ce titre de maître restaurateur, il faut proposer une cuisine faite sur place avec des produits bruts, c’est-à-dire une cuisine « faite maison » !
L’amendement n° 313 rectifié vise à préciser dans la loi la définition du « fait maison ».
Cette définition suppose des échanges approfondis entre les professionnels et l’administration. La loi doit fixer les principes, sans entrer dans les menus détails. Il est donc souhaitable de renvoyer cette définition précise au niveau règlementaire.
L’avis est donc également défavorable.
J’en viens aux trois amendements identiques nos 343 rectifié, 502 et 597 rectifié bis.
J’ai longuement expliqué pourquoi j’étais opposé au caractère facultatif de la mention « fait maison ». Nombre de restaurateurs ayant, à court terme, à jouer sur le flou de l’information, ils ne se saisiront pas spontanément d’une mention qui serait seulement facultative.
J’ajoute que le problème du contrôle se poserait dans les mêmes termes si la mention « fait maison » était seulement facultative.
M. Martial Bourquin. Très bien !
M. Alain Fauconnier, rapporteur. C’est un vrai sujet, car, que la mention soit ou non facultative, il faudra exercer des contrôles.
Il est vrai qu’il existe plusieurs milliers d’établissements de restauration. Cela n’empêche pas la DGCCRF – certes, tant bien que mal, malgré les coupes claires qu’ont subies ses effectifs ! – de parvenir à les contrôler, en utilisant des méthodes basées sur des tests. La question du contrôle est donc, me semble-t-il, un faux problème.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.
S’agissant de l’amendement n° 79 rectifié, le décret qui définira l’information donnée au consommateur fera évidemment de l’utilisation de produits de substitution un critère clé.
Quand figurera la mention « fait maison », on aura la certitude qu’il n’y aura pas dans le plat de produits de substitution, d’exhausteur de goût, d’ingrédients semi-préparés, etc. Plutôt que de multiplier les informations ponctuelles, je préfère donc la stratégie qui consiste à généraliser autant que possible un label exigeant et facile à comprendre pour le consommateur, ce qui est le cas du label « fait maison ».
L’avis est donc défavorable.
M. Antoine Lefèvre. Ce sera incontrôlable !
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L’amendement n° 312 rectifié va encore plus loin que ce que je souhaitais faire (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.), car il retire à tout établissement le titre de restaurant dès lors qu’il ne sert pas du « fait maison ». C’est peut-être aller un peu loin !
Mme Catherine Procaccia. C’est sans nuance ! (Sourires.)
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme. J’émets le même avis que le rapporteur sur l’amendement n° 503. Il est en effet contradictoire d’affirmer, d’un côté, que le secteur de la restauration doit progresser, évoluer, mieux informer le consommateur, être plus vertueux, et, de l’autre, qu’il ne faut en rien changer la situation actuelle. Ne rien faire, ce serait très grave !
Lors du comité de filière, un certain nombre de propositions émanant des organisations professionnelles ont été développées. Le label « fait maison » est rapidement apparu comme celui qui correspondait le mieux aux attentes à la fois des consommateurs et des professionnels par la simplicité de sa mise en œuvre et la clarté de sa définition : la transformation, sur place, de produits bruts, sans additifs. Des précisions seront apportées par voie réglementaire, car un certain nombre d’exceptions sont à prévoir, notamment pour les fromages ou les charcuteries.
L’effectivité du contrôle est garantie. Les agents de la DGCCRF procèdent déjà à des contrôles des entreprises de restauration. Cependant, s’il leur est aujourd’hui possible de vérifier un certain nombre de mentions, ils ne peuvent s’appuyer sur aucune base légale pour savoir comment s’opèrent la transformation, la réalisation et l’élaboration des plats. La procédure sera aisée : il leur suffira de se rendre dans le restaurant, d’examiner les factures des produits achetés et la composition de ces derniers pour déterminer s’ils ont été transformés ou pas. Ils pourront avoir accès aux différentes pièces de l’établissement et aux réfrigérateurs pour savoir si les produits sont frais, bruts et nécessitent une transformation ou s’ils sont transformés, industriels et issus d’autres entreprises.
Ce dispositif est utile et permettra de réaliser des avancées.
Depuis la première lecture à l’Assemblée nationale, comme beaucoup d’entre vous, j’ai effectué de nombreux déplacements sur le terrain. Tout comme les consommateurs, les professionnels sont satisfaits de cette logique vertueuse.
M. Christian Cambon. Ce n’est pas vrai !
Mme Michèle André. Elle a raison !
Mme Sylvia Pinel, ministre. Monsieur le sénateur, sans vouloir polémiquer, j’ai souvent l’occasion de rencontrer les professionnels. Certes, d’autres propositions ont été émises, mais les restaurateurs se sont ralliés à cette mesure, élaborée dans la concertation, qu’ils trouvent intéressante et qui permettra au consommateur de connaître ceux qui transforment et qui cuisinent, sans stigmatiser les autres.
M. Christian Cambon. Ce n’est pas ce qu’ils disent !
Mme Sylvia Pinel, ministre. L’amendement n° 313 rectifié a pour objet une extension du dispositif « fait maison » à la vente à emporter et aux activités de traiteur et d’hôtellerie. Cette extension a déjà été introduite dans le texte issu de la commission des affaires économiques. Je souhaite que la définition des produits bruts soit travaillée en lien avec les professionnels de la restauration dans le cadre du comité de filière, comme nous avons commencé à le faire, afin de prendre en compte toutes les situations et que celles-ci soient précisées par décret.
Je peux d’ores et déjà vous indiquer qu’il s’agira de produits crus ne contenant, notamment à l’occasion de leur conditionnement et du procédé utilisé pour leur conservation, aucun agent, conservateur ou additif alimentaires chimiques. Des exceptions de bon sens seront prévues, je l’ai déjà mentionné, pour des produits dont on s’attend à ce qu’ils soient fabriqués ailleurs, comme le pain ou les fromages, et pour certaines opérations comme la salaison ou la découpe.
Il me semble utile, pour des questions de cohérence et pour éviter des erreurs, faute de concertation suffisante, de renvoyer cette définition et l’ensemble des exceptions à un décret d’application. Les objectifs fixés par les auteurs de cet amendement sont donc déjà largement atteints ou le seront par la voie réglementaire.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
J’en viens aux amendements identiques nos 343 rectifié, 502 et 597 rectifié bis.
La mention « fait maison » vise à qualifier un mode de fabrication des plats sur place. Il s’agit de regagner la confiance des consommateurs sur les composants choisis et les procédés de fabrication. En effet, ceux-ci se préoccupent de plus en plus de l’origine des produits alimentaires qui leur sont proposés. Cela s’explique notamment par le fait que bien des restaurateurs proposent des plats qui ne sont pas confectionnés sur place ou servent des préparations industrielles réchauffées.
Si la qualité de ces préparations n’est pas en cause, il reste nécessaire d’en informer les consommateurs, qui sont en droit d’attendre un autre type de service de la part d’un professionnel de la restauration. Ces pratiques, largement répandues, donnent une mauvaise image du secteur de la restauration traditionnelle française qui est reconnue à l’échelon l’international, qui contribue au rayonnement de la France et qui est un secteur pourvoyeur d’emplois. Il s’agit donc de répondre au besoin d’information des consommateurs, mais aussi de valoriser le travail des professionnels et notre gastronomie, dont l’impact touristique est indéniable.
Dès lors, il faut assurer l’effectivité de cette réforme en la rendant obligatoire. Il est vrai qu’à l’issue du comité de filière le Gouvernement proposait de la rendre facultative. L’Assemblée nationale, qui s’est largement prononcée en faveur de cette mesure, a décidé, après de longs débats, de la rendre obligatoire. Je me rallie à cette idée qui permet de tirer la profession vers le haut.
Cette mention « fait maison » doit pouvoir être contrôlée, vérifiée, mise en œuvre, afin de créer une dynamique vertueuse auprès des professionnels. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
L’amendement n° 79 rectifié tend à prévoir que l’utilisation de produits de substitution dans les plats préparés soit portée à la connaissance du consommateur. L’amélioration de l’information est bien l’objectif du Gouvernement et, en rendant obligatoire la mention « fait maison », monsieur Cambon, il répond à votre préoccupation, puisque les plats préparés à partir de ces produits-là ne pourront pas bénéficier de ce label.
L’objet de l’amendement n° 676 de la commission est de renvoyer à un décret d’application le soin de préciser ce qui n’est pas fait maison. Cela me semble de bon sens, car cela permettra aux restaurateurs de ne pas avoir à indiquer partout sur leur carte ce qui est ou n’est pas fait maison. J’attache beaucoup d’importance à la visibilité et à la clarté des informations délivrées au consommateur. En effet, il ne faudrait pas que les cartes de nos restaurants ressemblent à des ordonnances, comme certains d’entre vous ont pu le craindre.
Une unique mention, figurant par exemple au bas de la carte, permettra aux consommateurs de savoir que les plats qui ne bénéficient pas du label « fait maison » ont été élaborés à partir d’ingrédients ou sont constitués d’éléments qui ont été réalisés ailleurs. La mise en œuvre de cette mention ne doit pas être complexe, car le Gouvernement tient à l’effectivité de ce nouveau dispositif. Ainsi, nous aurons la certitude que les consommateurs, notamment les moins avertis – je pense à nos visiteurs étrangers –, seront clairement informés de l’origine des plats qui leur seront servis.
L’amendement n° 312 rectifié vise à restreindre les appellations « restaurant », « auberge », « traiteur », « brasserie », etc. aux établissements qui font figurer sur leur carte la mention « fait maison ». Si je ne peux qu’approuver la volonté de rendre effectif ce label, cette proposition, qui émane du syndicat national des hôteliers, restaurateurs, cafetiers et traiteurs, le SYNHORCAT, et qui a été abordée lors du comité de filière pour la restauration que j’ai mis en œuvre, ne peut recevoir l’aval du Gouvernement, car elle ne fait pas consensus au sein de la profession.
Tout d’abord, cette proposition est discriminante pour les professionnels qui ont choisi de ne pas travailler uniquement avec des produits bruts, ce qui peut aussi correspondre à l’attente de leurs clients. Elle l’est aussi pour les consommateurs eux-mêmes, qui se verraient privés de l’accès au restaurant, car, le plus souvent, les établissements qui ne transforment pas eux-mêmes leurs produits sont moins chers.
Ensuite, en adoptant cette proposition, il est à craindre que certains types d’établissements soient oubliés, tels les cafés, les relais ou certains établissements qui veulent renforcer leur identité et insister sur leur origine par des intitulés spécifiques. Il est donc impossible d’être exhaustif.
Enfin, cette proposition posera un problème de visibilité aux consommateurs, notamment aux touristes étrangers. Un logo unique et identifiable par tous est donc préférable.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, je demande une suspension de séance de cinq minutes.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante-cinq, est reprise à minuit.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote sur l'amendement n° 503.
M. Jean-Claude Requier. Je fréquente assez souvent les restaurants – je ne peux pas le cacher ! (Sourires.) – et je ne m’inquiète pas pour la restauration haut de gamme. Les chefs étoilés ont une réputation, travaillent avec des produits frais et offrent la prestation que l’on est en droit d’attendre d’un restaurant.
Je suis en revanche soucieux de l’évolution de beaucoup d’autres restaurants, avec l’arrivée de la restauration rapide et de la « cuisine de réchauffage et d’assemblage », pour reprendre les mots de notre collègue Christian Cambon. J’ai peur que ces pratiques ne conduisent à terme à la disparition de la cuisine maison, qu’elles concurrencent directement. Voyez ce qui se passe aujourd’hui avec la mayonnaise ou la sauce vinaigrette : il est bien difficile de manger des tomates avec de la bonne vinaigrette ! En l’occurrence, c’est un problème non pas de coût, mais de savoir-faire.
Le fait d’apposer la mention « fait maison » sur la carte est un moyen de valoriser ces produits et de proposer aux clients une référence, un repère. Si l’on décide d’instaurer cette mention, il faut bien sûr la rendre obligatoire. Ce sera un moyen, comme avec les AOC et autres indications d’origine, de repérer la cuisine traditionnelle, la cuisine de pays, la cuisine bourgeoise, de la mettre en valeur.
J’ai cru comprendre que la mise en œuvre de cette mesure, si nous la votons, se fera par décret. Si vous avez besoin de conseillers, nous sommes quelques-uns au groupe RDSE à pouvoir donner un petit coup de main ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, pour explication de vote.
M. Christian Cambon. Madame la ministre, je le répète, si l’intention est bonne, l’application de cette disposition pose problème.
En effet, nombre d’organisations syndicales et professionnelles que nous avons reçues nous ont fait part de leur opposition à ce dispositif, a fortiori s’il est obligatoire.
S’agissant de l’efficacité de cette mesure, vous risquez d’ouvrir le champ à des contentieux sans fin. Ainsi, pour un plat aussi simple que les œufs à la neige, la crème anglaise provient à 95 % de bidons, alors qu’il arrive encore à certains chefs de battre le blanc des œufs. Peut-on considérer qu’il s’agit d’un dessert « fait maison » ?
De même, une tarte au citron dont la pâte feuilletée est industrielle – c’est vrai dans 95 % des cas – et la crème au citron exécutée par le restaurateur est-elle « faite maison » ?
C’est en raison de ces difficultés potentielles que nombre de professionnels considèrent que cette mesure sera inefficace. Nous pensons nous aussi qu’il existe d’autres dispositifs pour valoriser le savoir-faire et la belle manière avec laquelle certains restaurants travaillent artisanalement les produits bruts. Nous y reviendrons dans le cours de la discussion.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Que veut-on dans ce pays ? Le consommateur qui se rend dans un restaurant n’a-t-il pas le droit fondamental de connaître la provenance de la nourriture et la nature de ce qu’il mange ?
M. Christian Cambon. On est tous d’accord !
M. Martial Bourquin. Lorsqu’il s’agit d’un produit transformé par un restaurateur consciencieux, c’est bien qu’il le sache !
Lorsqu’il s’agit d’un produit industriel, c’est bien qu’il le sache également, sans pour autant que l’on jette l’anathème sur ces produits.
Ne cherchons pas midi à quatorze heures ! C’est juste une question de transparence.
Récemment, dans un reportage à la télévision, on voyait un journaliste se rendre dans un restaurant et demander si tel plat était « fait maison ». Le restaurateur répondit par l’affirmative, mais la caméra montra ensuite l’emballage du produit, qui provenait d’une entreprise industrielle. C’est là que réside le problème !
Je citerai l’exemple d’une profession qui a été un temps en grande difficulté, la boulangerie. Cette profession a su tirer le meilleur d’elle-même, a su se grandir en choisissant la voie de la qualité et de la transparence. Elle a réussi à se forger une image qui donne envie aux consommateurs de se rendre dans les boulangeries.
M. Christian Cambon. Merci Jean-Pierre Raffarin !
M. Martial Bourquin. Et nous sommes en train de dire ici qu’il faudrait rendre facultative l’information sur la qualité, au motif que nous n’aurions pas les moyens d’effectuer les contrôles !
Je peux déjà vous dire que quelques restaurateurs se sont fait prendre dans mon département par la DGCCRF ou lors de contrôles d’hygiène et qu’ils ont parfois subi des sanctions. Je peux vous communiquer les chiffres si vous le souhaitez ; vous verrez qu’ils ne sont pas négligeables.
Ensuite, les ministres ont confirmé qu’ils entendaient renforcer les moyens des organismes de contrôle.
Enfin, ce n’est pas parce que l’on ne peut pas surveiller tous les panneaux « stop » de France qu’il faut tous les supprimer ! Ce n’est pas parce qu’il est difficile de surveiller l’interdiction faite aux enfants de moins de dix-huit ans de fréquenter les débits de boissons qu’on va supprimer ces derniers !
Je pense profondément que nous avons une conception défaitiste des choses. N’oublions pas que la gastronomie française a été inscrite au patrimoine de l’humanité.
Notre pays compte quelques grandes toques, mais la restauration, ce sont surtout des millions de personnes qui mangent tous les jours au restaurant. Ils ont droit à la qualité, quel que soit leur budget, et surtout à la vérité sur le contenu de leur assiette, qui détermine aussi parfois leur santé. Nous n’avons pas le droit de leur mentir.
C’est pourquoi l’amendement n° 676, présenté par Alain Fauconnier au nom de la commission, et que vient d’expliciter Mme la ministre, s’il est adopté, permettra de distinguer, par un logo ou une mention portée au bas de la carte, d’un côté les plats « faits maison », de l’autre ceux qui ne le sont pas. Tout simplement !
De quoi a-t-on peur ? Qui veut-on protéger ? Quel lobby veut-on défendre ?
M. Christian Cambon. Il n’y a pas de lobbies dans cette affaire !
M. Martial Bourquin. Avec Alain Fauconnier, j’ai rencontré les six syndicats de la restauration, notamment l’Union des métiers et des industries de l'hôtellerie, l’UMIH, et le SYNHORCAT. Ils nous ont décrit la gravité de la situation dans la restauration, qui est devenue industrielle à 80 %. Va-t-on laisser perdurer cette situation ?
Lorsque le pays le plus touristique au monde ne pourra plus proposer une restauration de qualité, on ira dans le mur ! Et que fera-t-on alors ? On klaxonnera et on continuera à cacher cette situation que plus personne n’ignore ?
Pour commencer à faire bouger les choses, il faut voter cet amendement. Certes, ce n’est qu’un début, et il faudra par la suite instaurer une vraie filière d’artisans restaurateurs. Nous le ferons ! Mais commençons par cette mesure, qui permettra d’aider cette filière professionnelle à se redresser et à trouver une voie d’avenir, celle de la qualité. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. J’aurais volontiers laissé mon temps de parole à Martial Bourquin afin qu’il poursuive sur sa lancée ! Je suis vraiment touché par ses propos.
La restauration française, qui ne se réduit pas à la haute gastronomie, est en péril. Et nous ne la sauverons pas avec des mesures facultatives !
Notre patrimoine en matière de restauration, c’est aussi le bistrot du coin, le resto ouvrier ou routier. Et nombre d’entre eux continuent, sans le dire, sans se revendiquer d’une quelconque organisation, à faire de la cuisine « maison » et à produire un travail de qualité.
J’aurais même été d’avis de demander l’étiquetage du « non fait maison », par exemple sous la forme d’une mention « mijoté à l’usine »… (Sourires.) Parce qu’il faut assumer ! Le consommateur doit savoir ce qu’il mange, tout simplement ! Tout ce qui est mijoté à l’usine n’est pas forcément mauvais, mais le client a le droit de le savoir, et ça n’a pas la même valeur.
À propos de film culte, je voudrais en évoquer un autre, que je vous invite vivement à regarder : je veux parler de La République de la malbouffe, un film produit par un restaurateur qui milite pour une cuisine faite maison, avec des produits frais, celle qu’il propose dans ses restaurants.
La transparence dans l’assiette peut être l’une des clefs du changement de société, en tirant tout le monde vers le haut : le maraîcher qui cultive de bons légumes, l’éleveur qui nourrit ses animaux avec des aliments naturels, sans OGM, le restaurateur qui cuisine avec plaisir et savoir-faire, le client qui apprécie la qualité des plats qui lui sont servis.
Encore faut-il, pour cela, que le législateur joue son rôle ! Ce matin, quand on a parlé de mettre en œuvre cette mesure par décret, je me suis dit qu’on allait botter en touche. Puis j’ai entendu votre détermination, madame la ministre. Je voterai donc cette mesure, dont les modalités d’application, il est vrai, doivent encore être précisées. Veillons simplement à ce que ce travail ne prenne pas trop de temps, car nous avons rapidement besoin de cette information sur le « fait maison » !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. J’avais cru comprendre, depuis le début de la discussion, que la transparence devait être à l’ordre du jour. Cela m’avait conduit à affirmer, hier, que l’insécurité juridique se trouvait davantage du côté du consommateur que de celui du vendeur ou du fabricant.
C'est rigoureusement la même problématique qui se pose là. Je remercie Mme la ministre, M. le rapporteur et la commission d’avoir travaillé sur ce dossier avec une certaine constance alors qu’ils étaient confrontés à un maquis d’intérêts à l’évidence contradictoires.
Nous voilà maintenant au pied du mur. D’aucuns prétendent que nous n’atteindrons pas notre objectif, d'une part, faute de moyens humains nécessaires, d’autre part, parce qu’il s’agirait de toute façon d’une mission impossible. L’un de nos collègues a même cité l’exemple des œufs brouillés.
M. Christian Cambon. Des œufs à la neige !
M. Jean-Jacques Mirassou. Je m’inscris dans le droit fil des propos de Martial Bourquin : le client doit savoir si le cassoulet qu’il mange dans un restaurant a été fabriqué sur place ou à Castelnaudary avec de la viande douteuse… Je résume peut-être, mais la situation est tout de même un peu celle-là !
Si l’on ajoute à cela le fait, évoqué par Martial Bourquin, que la France est la première destination touristique au monde et le pays de la gastronomie, on comprend alors que cette question doive vraiment être évoquée, des restaurants bas de gamme – sans connotation péjorative – aux meilleurs établissements. Le moins que l'on puisse faire, dans l'intérêt bien compris du consommateur, mais également de celui qui assure la prestation, c'est de mentionner quand un plat est « fait maison ». Ce n'est pas porter un jugement de valeur sur les restaurateurs qui utilisent l'artifice de la congélation. Ils ne sont pas disqualifiés pour autant ! Cette pratique n'est pas honteuse, mais autant dire quand c'est « fait maison », et même l’écrire !
Je ne peux souscrire à l’amendement n° 503 parce qu'il est défaitiste : il revient à plier les gaules avant même de commencer la partie. Précédemment, nous avons filé la métaphore « rugbystique » : en l’occurrence, on pourrait dire que nous n’en sommes pas au stade de botter en touche, et encore moins au ballon mort ! Les consommateurs expriment de plus en plus manifestement leurs exigences et dans la restauration plus qu'ailleurs, ils sont en droit de savoir ce qu'ils mangent, ce qu’il y a dans leur assiette. Tout cela est très simple.
Aussi, mes chers collègues, ne cherchez pas des arguties pour essayer de disqualifier une exigence simple et évidente, intégrée à la fois par les consommateurs et l'immense majorité des restaurateurs, qui s’inscrivent dans une démarche vertueuse, qui ne date pas d’hier. (Mme Bernadette Bourzai et M. Joël Labbé applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Alain Bertrand, pour explication de vote.
M. Alain Bertrand. Bien que je ne sois pas écologiste, je suis tout à fait d’accord avec les propos de M. Labbé. Je veux juste insister parce que j'ai bien compris que le vote allait poser problème.
Ceux qui sont concernés par cet article, ce ne sont pas les Relais et Châteaux, les restaurants étoilés, ceux qui sont en bord de mer ou dans les grandes stations touristiques, qui proposent des produits frais. Encore que, là aussi, certains restaurants peuvent refourguer n'importe quoi…
C'est la consommation populaire quotidienne qui est essentiellement touchée. Ce sont les employés de bureau, qui ont le droit de savoir ce qu'ils mangent et de bien manger lors de leurs repas de travail, qui leur coûtent, selon les régions, entre 9,50 euros et 12 euros. Les établissements visés, ce sont les cafés ouvriers et les restaurants populaires. Indépendamment des clivages politiques, nous devons donner au plus grand nombre le droit de savoir si c'est du « fait maison ».
Ensuite – et je m’adresse à nos collègues du groupe CRC –, il est vrai que le décret aura une grande importance. Nos collègues s’inquiétaient du fait que de nombreuses précisions devront être apportées. Pour autant, l’avancée que constitue cet article me semble possible et souhaitable. Il faut récompenser ceux qui font des efforts, et ils sont nombreux : les petits restaurateurs, les sans-grade, qui aiment leur clientèle.
J'ai un ami admirable qui tient un restaurant ouvrier et qui sert tous les jours un bon repas frais pour 11,30 euros. Il faut que ces personnes soient reconnues. Tel est d'abord le sens de cet article. Ce n’est qu’un début, et il faudra bien sûr continuer le combat, mais c'est déjà un progrès considérable. D’autant que les syndicats professionnels sont d'accord !
Il faut faire confiance à Mme la ministre, qui a bien préparé le sujet, ainsi qu’à la commission, qui a fourni un excellent travail. Et même si l’on ne suit pas l'ordre de discussion des amendements, monsieur le président (Sourires.), je veux dire à tous mes collègues, quel que soit leur groupe politique, que nous devons cet article à nos concitoyens, aux consommateurs. Nous allons toucher des millions de personnes. Cela, ce n'est ni de gauche ni de droite ! Votons cet article ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Depuis le début de la discussion de ce texte, je vois s'amonceler les réglementations, les normes, les contraintes administratives, la « sur-administration ». On a évoqué précédemment les documents qu’il faudrait fournir à chaque achat : on imagine à quelle vitesse on sera servi…
Vous rendez-vous bien compte de la société que vous nous proposez ? Une société dans laquelle on infantilise le consommateur (M. Martial Bourquin s’exclame.), lequel serait incapable de savoir où il peut manger une nourriture de qualité.
Vous dénigrez complètement les ouvriers travaillant dans ces usines que vous critiquez. Vous avez évoqué les andouillettes : elles sont fabriquées chez nous par des salariés. Eh bien, vous pouvez me croire, elles sont largement d'aussi bonne qualité que celles des restaurateurs qui prétendent les faire chez eux. Vous devez respecter les ouvriers qui travaillent dans ces usines et qui font aussi de la nourriture de bonne qualité ! Vous êtes en train de créer les conditions d’une contestation permanente. Ce qui est en cause, ce n’est pas le nombre de personnes chargées de faire les contrôles : vous serez incapables d’apposer votre label, car tous les restaurants utilisent à la fois des produits frais et des produits transformés. Allez-vous exiger que, pour chaque plat, figure le pourcentage de « fait maison » ?
On doit vous laisser faire,…
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Oui !
M. Philippe Adnot. … car, en croyant rendre service, vous allez dresser contre vous toute une population de travailleurs qui a horreur de la paperasse et qui – c'est certain ! – va devoir en remplir en abondance !
Nous sommes pour le « fait maison ». J'adore les produits frais, bien travaillés, mais je suis un client responsable : je regarde, je compare et je choisis. Arrêtez d'infantiliser les consommateurs ! (Très bien ! sur plusieurs travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.
M. Gérard Le Cam. Le sujet du « fait maison » soulève un beau débat, qui montre bien qu'il n'y a pas d'unanimité sur la question et que les clivages traditionnels politiques ne jouent pas.
J'estime que le « fait maison » peut être un critère qualitatif pour un certain type de restauration. Je ne pense pas particulièrement à celle qui concerne le plus de personnes : la restauration ouvrière, pour laquelle le restaurateur doit proposer un repas à 11 euros ou 11,50 euros. Je suis désolé, mes chers collègues, mais celui-là n'arrivera pas à proposer du « fait maison », sauf de manière très exceptionnelle. (M. Alain Bertrand le conteste.) À ce prix-là, les haricots à la grecque sortiront toujours de la boîte ! Nous sommes sur un autre créneau.
M. Christian Cambon. Bien sûr !
M. Gérard Le Cam. Pour notre part, nous souhaitons privilégier la formation – nous avons évoqué le titre de maître restaurateur –, qui est sûrement un moyen beaucoup plus efficace que le label, très complexe, du « fait maison ».
Cela dit, je ne comprends pas non plus pourquoi la mention « fait maison » serait obligatoire. Celui qui indiquera que ses plats sont « faits maison » s'exposera à un contrôle ; il ne la mettra pas s'il ne souhaite pas être contrôlé. (Mme Catherine Procaccia applaudit.)
M. Christian Cambon. Voilà !
M. Philippe Adnot. Très bien !
M. Gérard Le Cam. Nous retirons notre amendement, mais nous maintenons celui qui vise à rendre le label « fait maison » facultatif.
M. le président. L’amendement n° 503 est retiré.
La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote sur l’amendement n° 313 rectifié.
Mme Valérie Létard. M. Le Cam vient d'insister sur un aspect qui me paraît évident : la première mesure adoptée à l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement, qui visait à introduire une disposition à caractère facultatif, était de bon sens. Elle permettait à tous les restaurateurs qui voulaient montrer aux consommateurs leur volonté de transparence et leur capacité à faire la différence de pouvoir le faire.
Lors de ce fameux comité de filière, les six organisations interprofessionnelles se sont effectivement prononcées favorablement sur la question, mais uniquement sur la proposition première du Gouvernement à l’Assemblée nationale, c'est-à-dire sur un label facultatif et non pas obligatoire.
Il faut ici rétablir la vérité : si les six grandes organisations sont favorables au caractère facultatif du dispositif, c’est parce qu’elles veulent plus de transparence. Elles veulent pouvoir s'engager, mais elles veulent aussi éviter que le caractère systématique du dispositif ne provoque des recours et que les contrôles soient impossibles à mettre en œuvre. Reste que lorsque les restaurateurs souhaiteront montrer leur capacité à faire la différence, il faut pouvoir vérifier qu’il n’y a pas mensonge ou tromperie sur la marchandise et qu’il y a une vraie qualité, un vrai plus.
Parce que c’était la position des organisations interprofessionnelles, parce que c'était la volonté initiale du Gouvernement, qui avait consulté – comme nous tous – l'ensemble des acteurs de la profession, le groupe UDI-UC pense que, tout en préservant l'intérêt du consommateur, il faut être raisonnable et ne pas faire plus de mal que de bien à la fois aux professionnels et aux consommateurs en voulant être trop vertueux.
M. Christian Cambon. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 343 rectifié, 502 et 597 rectifié bis.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe de l'UDI-UC et, l'autre, du groupe UMP.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 336 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l’adoption | 189 |
Contre | 157 |
Le Sénat a adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 79 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
5
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 12 septembre 2013, à neuf heures trente, à quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la consommation (n° 725, 2012 2013) ;
Rapport de MM. Martial Bourquin et Alain Fauconnier, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 809, tomes I et II, 2012 2013) ;
Avis de Mme Nicole Bonnefoy, fait au nom de la commission des lois (n° 792, 2012 2013) ;
Avis de M. Jean-Luc Fichet, fait au nom de la commission du développement durable (n° 793, 2012-2013) ;
Avis de Mme Michèle André, fait au nom de la commission des finances (n° 795, 2012 2013) ;
Texte de la commission (n° 810, 2012 2013).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 12 septembre 2013, à zéro heure trente.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART