Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission des lois. Par cohérence avec le vote intervenu sur l’article 53, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 36 est retiré.
Je mets aux voix l'article 59, modifié.
(L'article 59 est adopté.)
Article 60
I. – L’article L. 441-2-2 du code de commerce est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Un acheteur, un distributeur ou un prestataire de services peut toutefois bénéficier de réfactions tarifaires résultant d’une non-conformité, qualitative ou quantitative, du produit livré à la commande, si un accord, conclu par une organisation interprofessionnelle reconnue dans les conditions prévues à l’article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime, en a précisé les conditions.
« Cet accord peut être étendu conformément aux articles L. 632-3 et L. 632-4 du même code.
« Tout manquement à l’interdiction prévue au présent article par l’acheteur, le distributeur ou le prestataire de services est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale. L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 465-2 du présent code. Le montant de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »
II. – (Non modifié) L’article L. 441-3-1 du même code est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Dans le cas où les documents mentionnés au premier alinéa n’ont pu être présentés aux services de contrôle lors du transport, il appartient à l’acheteur de transmettre à ces mêmes services, dans un délai de quarante-huit heures, ces documents ou, à défaut, un message, écrit ou par voie électronique, certifiant qu’il a bien commandé les produits concernés et précisant le ou les prix convenus avec son fournisseur pour l’achat de ces produits.
« Lorsque l’acheteur réalise lui-même le transport des produits qu’il a achetés directement dans les locaux de ses fournisseurs, il atteste, lors du contrôle, qu’il est propriétaire des produits.
« Tout manquement aux obligations résultant du présent article par l’acheteur, le commissionnaire, le mandataire ou le fournisseur est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale. L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 465-2. Le montant de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »
III. – Les 12° et 13° du I de l’article L. 442-6 du même code sont abrogés.
Mme la présidente. L'amendement n° 493, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Il s’agit de s’opposer à l’assouplissement de l’interdiction des rabais, remises et ristournes, ainsi qu’à la fixation du prix après-vente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, parce que la solution retenue en 2010 était certainement trop radicale. Les fruits et légumes frais sont des produits fragiles, pour lesquels les défauts à la réception sont assez peu évitables. L’article 60 prévoit donc d’autoriser des réfactions de prix en cas de non-conformité.
Gérard Le Cam est sans doute animé de bons sentiments, mais la mesure qu’il propose pourrait avoir des effets très fâcheux. L’assouplissement de l’interdiction des remises, rabais et ristournes doit être strictement encadré.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 246 rectifié, présenté par MM. Adnot, Bernard-Reymond et Türk, est ainsi libellé :
Alinéas 5 à 8
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
II. – L’article L. 441-3-1 du même code est abrogé.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 60.
(L'article 60 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 60
Mme la présidente. L'amendement n° 497, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 60
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 21 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie est abrogé.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Lors de l’examen de la loi de modernisation de l’économie, la LME, les sénateurs de gauche avaient dénoncé avec force la libéralisation des relations commerciales, et plus particulièrement l’institution de la libre négociabilité des conditions générales de vente, les CGV, prévue par l’article 21.
Le rapport d’information du 16 décembre 2009 rédigé par Mme Élisabeth Lamure au nom de la commission de l’économie, intitulé « Mise en œuvre de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 : un premier bilan contrasté », dressait d’ailleurs un bilan peu satisfaisant de la réforme des relations commerciales, décrivant « un déséquilibre persistant des relations entre fournisseurs et distributeurs : ces derniers divergent sur l’interprétation des règles en matière de négociabilité des tarifs ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Si nous abolissions purement et simplement l’article 21 de la LME, nous en reviendrons au système de la loi Dutreil de 2005, ce qui serait beaucoup plus pénalisant pour de nombreuses PME, notamment artisanales. L’idée est de faire appliquer la LME afin d’atteindre les objectifs qu’elle a fixés et de bâtir de nouvelles relations inter-entreprises.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 499, présenté par MM. Vergès et Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 60
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente au Parlement avant le 1er mars 2014 un rapport examinant dans les départements d’outre-mer les modalités de création et de fonctionnement de centrales d’approvisionnement et de stockage régionales, qui, par mutualisation des moyens, réduiraient les coûts et permettraient aux distributeurs de mieux faire jouer la concurrence entre fabricants et intermédiaires.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Il s’agit d’un amendement de mon collègue Paul Vergès, sénateur de la Réunion. Ce dernier propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport afin de favoriser la création de centrales d’approvisionnement et de stockage régionales dans les outre-mer.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Un certain nombre de départements d’outre-mer disposent déjà de centrales. Par exemple, la Guadeloupe possède une centrale d’achat. En Martinique, la chambre de commerce et d’industrie, la CCI, a pris une initiative en ce sens, et un projet du même type est en cours sous l’égide de la CCI de la Réunion. Dans ces conditions, je ne pense pas qu’un rapport du Gouvernement serait utile.
L’amendement est donc déjà partiellement satisfait, et il est en voie de l’être complètement dans l’ensemble des territoires d’outre-mer.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. J’apporterai quelques éléments complémentaires. Le Premier ministre a donné son accord pour engager une réflexion sur les mesures nécessaires à l’amélioration de la compétitivité dans les outre-mer. Cette réflexion portera notamment sur le financement des projets tels que celui que vous défendez. Un projet de loi devrait vous être soumis dans les prochains mois.
Je serais donc tenté de demander le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Je voudrais simplement rappeler à nos collègues du groupe CRC que ce sujet avait déjà été abordé dans le cadre du projet de la loi de lutte contre la vie chère en outre-mer. De ce fait, certaines centrales sont déjà en place ou en train de se mettre en place.
M. Gérard Le Cam. Pas toujours !
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. En tout cas, cela relève de l’initiative des acteurs locaux.
Mme la présidente. Monsieur Le Cam, l'amendement n° 499 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 499 est retiré.
Article 61
I. – Le I de l’article L. 441-6 du code de commerce est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase du premier alinéa est supprimée ;
2° Le début du septième alinéa est ainsi rédigé : « Les conditions générales de vente constituent le socle de la négociation commerciale. Dans le cadre de cette négociation, tout producteur… (le reste sans changement). » ;
2° bis (Supprimé)
3° Le neuvième alinéa est ainsi rédigé :
« Les parties peuvent convenir d’un délai pour régler les sommes dues, qui ne peut dépasser le dernier jour du mois au cours duquel un délai de quarante-cinq jours à compter de la date d’émission de la facture a expiré. En cas de facture périodique, au sens du 3 du I de l’article 289 du code général des impôts, ce délai ne peut dépasser quarante-cinq jours à compter de la date d’émission de la facture. » ;
3° bis (nouveau) À la troisième phrase du dixième alinéa, les mots : « sont conclus » sont remplacés par les mots : « peuvent être conclus » ;
4° Le dernier alinéa est supprimé.
I bis (nouveau). – Le IV du même article est complété par une phrase ainsi rédigée : « La durée de la procédure d’acceptation ou de vérification réduit à due concurrence le délai maximal de paiement prévu au neuvième alinéa du I. »
II. – Le même article est complété par un VI ainsi rédigé :
« VI. – Est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés aux huitième, neuvième et onzième alinéas du I du présent article, le fait de ne pas indiquer dans les conditions de règlement les mentions figurant à la première phrase du douzième alinéa du même I ainsi que le fait de fixer un taux ou des conditions d’exigibilité des pénalités de retard selon des modalités non conformes à ce même alinéa. L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 465-2. Le montant de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.
« Sous les mêmes sanctions, sont interdites toutes clauses ou pratiques ayant pour effet de retarder abusivement le point de départ des délais de paiement mentionnés au présent article. »
II bis (nouveau). – L’article L. 441-6-1 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « ou » est remplacé par le mot : « et » ;
2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« Ces informations font l’objet d’une attestation du commissaire aux comptes dans des conditions fixées par ce même décret. Lorsque la société concernée est une grande entreprise ou une entreprise de taille intermédiaire au sens de l’article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, le commissaire aux comptes adresse son attestation au ministre chargé de l’économie si elle démontre, de façon répétée, des manquements significatifs de la société aux prescriptions des neuvième et dixième alinéas de l’article L. 441-6. »
III. – (Non modifié) Le 7° du I de l'article L. 442-6 du même code est abrogé.
IV. – (Non modifié) L’article L. 443-1 du même code est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, les mots : « À peine d’une amende de 75 000 euros, » sont supprimés ;
2° Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° À quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d’émission de la facture pour les achats de raisins et de moûts destinés à l’élaboration de vins ainsi que de boissons alcooliques passibles des droits de circulation prévus à l’article 438 du code général des impôts, sauf dispositions dérogatoires figurant :
« a) Dans des décisions interprofessionnelles prises en application de la loi du 12 avril 1941 portant création d’un comité interprofessionnel du vin de Champagne ;
« b) Ou dans des accords interprofessionnels pris en application du livre VI du code rural et de la pêche maritime et rendus obligatoires par voie réglementaire à tous les opérateurs sur l’ensemble du territoire métropolitain. » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les manquements aux dispositions du présent article ainsi qu’aux dispositions relatives aux délais de paiement des accords mentionnés au b du 4° sont passibles d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 465-2 du présent code. Le montant de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »
Mme la présidente. L'amendement n° 590, présenté par Mme Lamure, M. Chatillon et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après les mots :
Les conditions générales de vente
insérer les mots :
opposables dès leur date d’entrée en vigueur définie par le fournisseur,
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. La LME est donc une bonne loi, monsieur le ministre, puisque vous êtes favorable à son application… Il faut insister pour qu’elle soit respectée ; je crois que nous sommes tous d’accord à ce sujet.
La LME prévoit que le socle de la négociation – les CGV – doit être identique pour tous les clients. Dans le cas contraire, le fournisseur engage sa responsabilité et est passible de sanctions civiles, voire pénales.
C’est en ce sens que les CGV sont « opposables » en tant que point de départ de la négociation. Il est donc primordial de rappeler clairement ce principe dans la loi, afin que le point de départ de la négociation soit enfin respecté et que toute ambiguïté soit définitivement levée.
Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. Je partage tout à fait l’objectif de faire des CGV le socle effectif de la négociation commerciale. C’est à partir de ces conditions que des contreparties commerciales sont négociées et que l’on aboutit à des conditions particulières de vente. C’est la loi, et elle doit être respectée. La commission d’examen des pratiques commerciales est là pour s’en assurer.
Le précédent cycle de négociations commerciales a été, de l’avis de nombreux professionnels, particulièrement difficile, certains distributeurs refusant de discuter sur la base des CGV proposées et demandant de nouvelles conditions afin que les rabais soient proportionnés aux contreparties. Naturellement, on ne peut se satisfaire de cette situation.
Cependant, les auteurs de cet amendement vont trop loin, en réclamant que les CGV soient non plus le socle de la négociation, comme cela est déjà prévu par la loi, mais des conditions opposables aux clients. On ne peut imaginer que les conditions contractuelles ne puissent être négociées entre clients et fournisseurs. Ce serait renverser le déséquilibre des relations commerciales, non rétablir l’équilibre.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Vous m’avez un peu taquiné au sujet de la LME, madame Lamure ! (Sourires.) Le Gouvernement n’en est pas moins opposé à votre amendement, qui vise à faire en sorte que les CGV soient opposables dès leur entrée en vigueur définie par le fournisseur.
L’objectif que vous visez est de lutter contre les abus dont sont victimes les fournisseurs, qui sont confrontés à des demandes de CGV dérogatoires. Ces pratiques sont clairement abusives, et nous partageons votre souhait d’y mettre un terme. À cette fin, l’article 62 du projet de loi prévoit que la convention rappelle le barème de prix préalablement communiqué par le fournisseur, avec ses CGV.
En revanche, la rédaction que vous proposez ne peut être retenue. En effet, indiquer dans la loi que les CGV sont opposables dès leur date d’entrée en vigueur pourrait entraîner une confusion et apparaître comme une remise en cause de la négociabilité des prix, à laquelle nous restons attachés.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 104 rectifié, présenté par Mme Cayeux, MM. Bécot, Cointat, Leleux, Houel, Lefèvre, Cambon, Doublet, D. Laurent, Cornu et Pointereau, Mmes Sittler et Bruguière, M. Pinton, Mme Deroche, MM. Milon, Gaillard, Beaumont, Mayet et Buffet, Mme Duchêne et MM. Revet, J.P. Fournier, G. Bailly, de Legge et B. Fournier, est ainsi libellé :
Alinéas 5 et 6
Supprimer ces alinéas.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 698, présenté par MM. M. Bourquin et Fauconnier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 6, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d'émission de la facture.
II. – Alinéa 11, première phrase
Remplacer les mots :
ainsi que le fait de fixer un taux ou des conditions d'exigibilité des pénalités de retard selon des modalités non conformes à ce même alinéa
par les mots :
le fait de fixer un taux ou des conditions d'exigibilité des pénalités de retard selon des modalités non conformes à ce même alinéa ainsi que le fait de ne pas respecter les modalités de computation des délais de paiement convenues entre les parties conformément au neuvième alinéa du même I
La parole est à M. Martial Bourquin, rapporteur.
M. Martial Bourquin, rapporteur. Cet amendement, qui vise les délais de paiement, est un compromis entre la version initiale du projet de loi et celle qui a été adoptée en commission.
Pour éviter tout abus, nous avons unifié en commission le délai maximum de paiement à quarante-cinq jours fin de mois. J’ai remis en mai dernier un rapport au Gouvernement sur les relations entre sous-traitants et donneurs d’ordre dans l’industrie, et l’une de mes constatations était précisément que les délais de paiement étaient insuffisamment clairs et insuffisamment respectés.
Pour plus de clarté, je proposais donc de n’avoir plus qu’un seul délai maximum de paiement et non plus, comme aujourd’hui, trois délais différents : les soixante jours calendaires, les quarante-cinq jours fin de mois et les fins de mois quarante-cinq jours.
Or nous constatons que cette uniformisation pourrait désorganiser certaines filières, comme la filière automobile, ou d’autres qui nous ont fait part de leurs difficultés. Ce n’est évidemment pas souhaitable.
Au premier jour des débats sur le présent projet de loi, le ministre de l’économie et des finances a déclaré à cette assemblée qu’il lui faisait confiance pour prendre toute la mesure des difficultés rencontrées aussi bien par les consommateurs que par les entreprises, et c’est en effet notre devoir. Du reste, ce n’est pas seulement l’automobile qui connaît des difficultés en ce moment, mais aussi de nombreuses autres filières industrielles.
Mon amendement vise donc à ne rien changer au droit existant en matière de délai de paiement : nous revenons à la rédaction actuelle de l’article L. 441-6 du code du commerce. Néanmoins, dans un souci de clarification de la relation entre client et fournisseur – c’était l’objectif visé par un amendement adopté en commission en juillet dernier –, nous ajoutons l’obligation pour les entreprises d’annoncer à l’avance leur mode de calcul et de s’y tenir.
En effet, certaines entreprises se livrent à une véritable gymnastique entre les trois délais de paiement afin d’obtenir des délais supplémentaires. C’est ainsi qu’on arrivait à des délais de paiement de quatre-vingt-dix ou cent vingt jours. Une sanction est prévue si les entreprises changent leur mode de calcul des délais maximum pour gonfler leur trésorerie au détriment de leur fournisseur.
Au-delà de l’adoption du présent amendement, je souhaite que nous puissions poursuivre la réflexion menée sur cette question fondamentale des délais de paiement. Ceux-ci doivent être plus clairs et mieux respectés. Une deuxième lecture interviendra, et nous pourrons donc encore travailler pour perfectionner la loi sur cette question.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. L’amendement proposé par la commission est un amendement de compromis, et le Gouvernement aime les compromis. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
Monsieur le rapporteur, je salue votre proposition de revenir au texte actuel du code de commerce sur le plafond des délais de paiement convenus contractuellement entre les parties. Cette souplesse de la loi correspond aux habitudes des entreprises, qui sont très variables selon le secteur économique auquel elles appartiennent.
Je partage également votre souhait que cette souplesse permise par la loi n’ait pas pour conséquence une opacité des conventions, voire la volonté délibérée de la part de certains débiteurs de ne pas respecter les termes du contrat. Ainsi, le fait de choisir le mode de calcul conduisant aux délais les plus avantageux en fonction de la date de la facture, et cela en violation de ce qui aura été convenu au moment de la conclusion du contrat, sera désormais passible d’une amende administrative.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 391 rectifié est présenté par Mme Létard, M. Tandonnet, Mme Dini, M. Maurey et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 575 est présenté par Mme Lamure, MM. Bécot, Dulait et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Pour les achats de produits et matériaux destinés à la construction, à l'amélioration ou à l'entretien d'ouvrages immobiliers, ce délai ne peut dépasser soixante jours à compter de la date d'émission de la facture.
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour présenter l'amendement n° 391 rectifié.
M. Vincent Capo-Canellas. L’article 61 est relatif à la question des délais de paiement et à celle des sanctions liées à leur non-respect. L’amendement que je défends vise simplement à revenir à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale.
Cet amendement a pour objet de rétablir à soixante jours à compter de la date d’émission de la facture le délai de paiement spécifiquement applicable à l’achat de produits et de matériaux destinés à la construction. En effet, les rapports successifs de l’Observatoire des délais de paiement remis au ministère de l’économie et des finances ont montré l’existence d’un problème spécifique à ce secteur d’activité : le phénomène lancinant des délais cachés.
Une enquête récente menée par la banque professionnelle BTP Banque confirme que les délais des fournisseurs se sont réduits, alors que les délais des clients se sont au contraire allongés. Dès lors, la création d’un nouveau délai de paiement de quarante-cinq jours net spécifique aux factures périodique au sens de l’article L. 289 du code général des impôts contribuerait à accroître cet écart entre les délais fournisseurs et clients. La réduction de quinze jours du délai fournisseurs en comparaison avec celui de soixante jours net entraînerait une hausse importante de la défaillance financière des entreprises du bâtiment. D’où notre amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l'amendement n° 575.
Mme Élisabeth Lamure. Notre amendement est sensiblement identique, puisqu’il vise à prendre en compte la spécificité du secteur du bâtiment. Je propose, afin de répondre aux demandes des entreprises du secteur confrontées aux déséquilibres qui affectent la chaîne des paiements, que le délai dont il est question ici ne dépasse pas soixante jours à compter de la date d’émission de la facture.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Martial Bourquin, rapporteur. L’adoption de l’amendement n° 628, qui sera proposé tout à l’heure par le Gouvernement, répondrait en partie à cette demande. Nous proposons de voter cet amendement du Gouvernement, mais en même temps de tenir l’équilibre entre les demandes des entreprises du bâtiment et celles de leurs fournisseurs, qui craignent de leur côté un allongement très sensible de leurs délais de paiement.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. J’avais émis un avis favorable sur une disposition similaire lors du vote à l’Assemblée nationale, afin de tenir compte des difficultés spécifiques que connaissent les entreprises du secteur du bâtiment, et cela bien que cette mesure ne soit pas conforme à l’objectif général de réduction des délais de paiement visé par le Gouvernement dans le cadre du pacte pour la compétitivité, la croissance et l’emploi et qu’il y ait, en outre, des profits considérables à tirer de la réduction des délais de paiement.
Toutefois, il apparaît que l’allongement des délais de paiement prévu par cet amendement risquerait de peser avant tout sur la trésorerie des petits fournisseurs du secteur du bâtiment, moins résistants en cas de difficultés de trésorerie. Dans un secteur particulièrement pourvoyeur d’emploi, mais également très sensible à la conjoncture économique, cette mesure risquerait de mettre en difficulté un grand nombre de petites entreprises.
Par ailleurs, pour contribuer à résoudre les difficultés propres aux entreprises du bâtiment, un certain nombre d’autres mesures d’adaptation du cadre normatif sont en cours de préparation et seront débattues tout à l’heure à l’occasion de la discussion de l’amendement n° 628 déposé par le Gouvernement.
C’est pourquoi, je m’en remets à la sagesse du Sénat sur ces deux amendements.