Mme Marie-France Beaufils. Il y a deux manières d’appréhender la question de la hausse de la TVA au 1er janvier prochain. Certains y sont favorables parce qu’ils y voient le moyen de financer une nouvelle série d’allégements sur ce qui est bien improprement appelé le « coût du travail », alors qu’il s’agit du salaire direct et du salaire différé. D’autres, comme nous, estiment que le renforcement de la fiscalité indirecte est le plus mauvais choix fiscal qui puisse se faire.
Personne n’ignore que, par nature, la TVA est un impôt injuste : en raison de sa non-progressivité, elle pèse plus lourdement sur les ménages modestes que sur les plus fortunés de nos concitoyens. Selon certains calculs, la TVA absorbe 8 % en moyenne du revenu d’un smicard, contre seulement 4 % du revenu des 10 % des Français les plus riches.
Vous pensez améliorer la situation financière des entreprises, améliorer leur marge en appauvrissant, de fait, les ménages. Nous nous soucions, nous aussi, de la bonne santé des entreprises – nous préférons, s’agissant des entreprises, cette notion de « bonne santé » à celle « compétitivité » – et de celle des salariés.
Cependant, la recherche de cette amélioration doit passer non par la réduction des salaires ou par toute mesure équivalente portant sur les salaires – un autre pays dans le monde aura toujours un coût du travail inférieur au nôtre –, mais par le desserrement de l’emprise de la finance sur les entreprises.
Au niveau du SMIC, aujourd’hui, le coût du travail – salaire net et cotisations sociales de toutes sortes – est l’équivalent de ce qu’il était au début des années soixante-dix. En effet, de multiples mesures d’allégement des cotisations ont rendu cet ensemble de moins en moins pesant sur les comptes des entreprises.
Dans les années soixante-dix, le taux de marge des entreprises était le plus souvent plus faible qu’il ne peut l’être aujourd’hui. Pourtant, les entreprises investissaient plus qu’elles ne le font actuellement. Entre 1975 et 1985, malgré les chocs pétroliers, nos entreprises dégageaient des marges de 23 % à 27 % et consacraient l’équivalent de plus de 20 % de leurs moyens à l’investissement. Aujourd’hui, le taux de marge est de 28 % et le taux d’investissement se situe nettement au-dessous de 20 %.
Ce n’est pas avec le CICE, qui apportera près de 10 milliards d’euros supplémentaires d’aides aveugles, que nous redonnerons de la capacité productive à nos entreprises : celle-ci dépend avant tout de la recherche, de l’innovation, du développement des moyens de production, du respect et de la valorisation du capital humain, de ses compétences et qualités. C’est cela qui doit être essentiel dans la vie de l’entreprise.
Les 9,76 milliards d’euros du CICE sont un gaspillage de l’argent public. C’est pourquoi nous proposons de supprimer les nouveaux taux de TVA.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’adoption de cet amendement déséquilibrerait le projet de budget en provoquant une perte de plusieurs milliards d’euros de recettes. En outre, elle remettrait en question le dispositif du CICE, que nous avons voté.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.
M. Philippe Marini. Je m’interroge sur cet amendement. En effet, le système qui a été créé l’an dernier repose sur un équilibre complexe : d’un côté, le crédit d’impôt en faveur des entreprises ; de l’autre, des mesures de financement obtenues par des engagements de réduction de la dépense publique, les augmentations de taux de TVA dont nous débattons et le développement de la fiscalité écologique.
On pourrait considérer que, en vertu d’un raisonnement politique concluant que ce dispositif n’est pas adéquat et qu’il est sujet à caution quant à ses résultats, on doit supprimer – au moins pour un moment – les différents éléments qui le constituent : d’une part, le CICE, d’autre part, les mesures de financement, ici les augmentations de taux de TVA.
En revanche, supprimer la mesure de financement en laissant subsister la dépense entraînerait un déséquilibre majeur !
Nous comprenons la motivation de nos collègues du groupe CRC. Comme eux, mais pour d’autres raisons, nous estimons que le dispositif est d’une grande complexité, qu’il peine à se mettre en place, qu’il n’est pas spécifiquement destiné aux entreprises connaissant le plus de problèmes de compétitivité, se diffusant beaucoup plus largement dans le tissu économique. C’est d’ailleurs pour cette raison que des amendements ont été déposés dont l’objet porte sur toutes sortes d’activités qui, manifestement, n’ont pas de problèmes de compétitivité extérieure.
Certes, l’adoption de cet amendement entraînerait un gain de temps substantiel puisqu’il n’y aurait plus lieu d’examiner la très longue liste d’amendements visant à contester tous ces taux, service par service, produit par produit. Cependant, ne pas supprimer dans le même temps la dépense, c’est-à-dire le CICE lui-même, serait difficilement présentable, puisque, je le répète, cela provoquerait un déséquilibre extrêmement grave.
Par conséquent, je m’interroge sur le vote qu’il y a lieu d’émettre sur cet amendement. Sans doute des éclaircissements seraient-ils bienvenus pour nous aider à prendre position.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Pour le groupe CRC, c’est une évidence : il faut supprimer l’augmentation de la TVA et le CICE ! À partir du moment où nous étions défavorables à ce dispositif, nous le sommes à tout ce qui y a trait.
Sur ce dispositif, nos analyses diffèrent, monsieur Marini. Pour vous, il n’apporte pas tout à fait la réponse ciblée attendue. Pour notre part, nous pensons qu’une telle démarche n’a pas lieu d’être. À nos yeux, il faut aujourd’hui engager une autre réflexion sur l’utilisation de la richesse produite à l’intérieur de l’entreprise.
M. Francis Delattre. Le groupe UMP demande un scrutin public !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. C’est le renvoi d’ascenseur ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-79.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Je rappelle que la commission et le Gouvernement ont tous deux émis un avis défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 72 :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 347 |
Pour l’adoption | 171 |
Contre | 176 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 6 bis.
(L'article 6 bis est adopté.)
Article 7
I. – L’article L. 334-1 du code du cinéma et de l’image animée est abrogé.
II. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. – L’article 278-0 bis est complété par un G ainsi rédigé :
« G. – Les droits d’entrée dans les salles de spectacles cinématographiques, quels que soient le procédé de fixation ou de transmission et la nature du support des œuvres ou documents audiovisuels qui sont présentés ; »
B. – Le b quinquies de l’article 279 est abrogé ;
C. – Au dernier alinéa du 2° du 1 du I de l’article 297, les références : « E et F » sont remplacées par les références : « E, F et G ».
II bis (nouveau). – Le II de l’article 68 de la loi n° 2012-1510 précitée est abrogé.
III. – Le II du présent article s’applique aux opérations pour lesquelles la taxe sur la valeur ajoutée est exigible à compter du 1er janvier 2014. – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 7
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-142, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par une section XXIII ainsi rédigée :
« Section XXIII
« Taxe sur la cession de titres d'un éditeur de service de communication audiovisuelle
« Art. 235 ter ZG. – Tout apport, cession ou échange de titres ayant fait l'objet d'un agrément dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l'article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est soumis à une taxe au taux de 5 %, assise sur la valeur des titres apportés, cédés ou échangés. Cette taxe est due par la personne ayant, au terme des apports, cessions ou échanges réalisés sur ses titres, transféré le contrôle de la société titulaire de l'autorisation d'usage de la ressource radioélectrique.
« La taxe s'applique à l'ensemble des apports, cessions ou échanges dont le cumul au cours de six mois a abouti au transfert de contrôle de la société titulaire de l'autorisation.
« Le montant dû au titre de cette taxe fait l'objet d'un abattement de 1 000 000 € par société titulaire d'une autorisation d'usage de la ressource radioélectrique.
« Cette taxe est due et acquittée auprès du comptable public au plus tard le 1er mai de l'année qui suit celle de l'apport, de la cession ou de l'échange. Le paiement est accompagné d'un état conforme au modèle fourni par l'administration faisant apparaître les renseignements nécessaires à l'identification de la personne assujettie et à la détermination du montant dû.
« Cette taxe est recouvrée selon les règles et sous les sanctions et garanties applicables aux droits d'enregistrement. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement tend à instituer une taxe sur la revente spéculative de fréquences hertziennes obtenues gratuitement.
En effet, le CSA, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, attribue gratuitement l’usage de fréquences à des éditeurs de radio et de télévision sous réserve du respect de certaines obligations en matière d’investissements dans la création ou de quotas de diffusion.
Depuis le lancement de la télévision numérique terrestre, la TNT, les reventes de sociétés détentrices de fréquences se sont multipliées, avec des gains parfois très importants pour le vendeur. On se souvient de la cession de la chaîne Direct 8 à Canal +.
Évidemment, ayant fait l’objet d’investissements, une chaîne acquiert progressivement de la valeur. Toutefois, compte tenu des plus-values parfois réalisées, on peut s’interroger sur la nature spéculative de ces opérations, dont l’État, lui, ne retire rigoureusement rien alors qu’il a accordé gratuitement les fréquences.
Cet amendement vise à empêcher ce type de pratiques. Toutefois, lorsque les cessions de fréquences sont nécessaires, à l’occasion de regroupements par exemple, il faut que l’État y trouve aussi son compte.
Le hertzien terrestre est une ressource gratuite, mais c’est surtout une ressource rare, qui a permis à de nombreux groupes de se développer économiquement ; il me semble inadmissible que ces fréquences rares et délivrées gratuitement par l’État puissent servir d’instruments de valorisation financière.
Afin d’éviter que des candidatures ne soient inspirées que par une perspective spéculative, en prévoyant une revente au plus offrant, il est proposé de taxer ces reventes à hauteur de 5 % du prix de la cession, un pourcentage d’ailleurs plutôt modeste.
Même le CSA a souhaité, pour les dernières fréquences attribuées en TNT, introduire des clauses d’interdiction temporaire de revente, qui sont d’ailleurs contestées par les chaînes.
Au Sénat, par deux fois, au cours de deux années consécutives, un large consensus s’était dégagé pour adopter la mesure que je propose à nouveau aujourd’hui. Il se trouve en effet que, chaque fois, elle a été annulée par le Conseil constitutionnel.
La première fois, le motif invoqué pour justifier l’annulation tenait aux ajouts techniques apportés par deux gouvernements successifs pour préciser et sécuriser l’amendement que je proposais, ajouts qui se sont avérés être moins bien conçus que ce qu’avait prévu le Parlement.
La seconde fois, le Conseil constitutionnel a en outre qualifié cet amendement de cavalier législatif, considérant qu’il devait se rattacher à la loi de 1986 relative à la liberté de communication.
Pour éviter un nouvel accroc de cette sorte, nous avons créé, dans la loi relative à l’indépendance de l’audiovisuel public que nous venons d’adopter, le cadre nous permettant de proposer cette taxe en loi de finances, sans que la disposition en question puisse être considérée comme un cavalier.
Le paysage audiovisuel qui se profile pour les années à venir sera sans doute marqué par une tendance à la concentration, car les chaînes de la TNT sont loin de bénéficier toutes d’une audience équivalente : selon toute vraisemblance, certaines d’entre elles seront proposées au rachat. Ainsi, dès 2014, l’État pourrait tirer parti des cessions qui ont des chances de se produire.
Par les temps qui courent, il n’est guère d’occasions de trouver de nouvelles rentrées fiscales. Or c’est ce à quoi tend aussi cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-494 rectifié, présenté par M. Gattolin, Mmes Blandin et Bouchoux, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par une section ainsi rédigée :
« Section XXIII
« Taxe sur la cession de titres d’un éditeur de service de communication audiovisuelle »
« Art. 235 ter ZG. – Tout éditeur de service de communication audiovisuelle détenteur d’une autorisation délivrée en vertu des articles 29 et 29-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 qui procède avec un tiers extérieur à un apport, une cession ou à un échange de ses titres ayant fait l’objet d’un agrément dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l’article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est redevable d’une taxe au taux de 5 %, assise sur la valeur des titres apportés, cédés ou échangés.
« Cette taxe est due par la personne ayant, au terme des apports, cessions ou échanges réalisés sur ses titres, transféré le contrôle de la société titulaire de l'autorisation d'usage de la ressource radioélectrique.
« La taxe s'applique à l'ensemble des apports, cessions ou échanges dont le cumul au cours de six mois a abouti au transfert de contrôle de la société titulaire de l'autorisation.
« Le montant dû au titre de cette taxe fait l'objet d'un abattement de 1 000 000 € par société titulaire d'une autorisation d'usage de la ressource radioélectrique.
« Cette taxe est due et acquittée auprès du comptable public au plus tard le 1er mai de l’année qui suit celle de l’apport, de la cession ou de l’échange. Le paiement est accompagné d’un état conforme au modèle fourni par l’administration faisant apparaître les renseignements nécessaires à l’identification de la personne assujettie et à la détermination du montant dû.
« Cette taxe est recouvrée selon les règles et sous les sanctions et garanties applicables aux droits d’enregistrement. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement est très proche de celui qui vient d’être défendu. Il s’agit de taxer les reventes de fréquences utilisées par les stations de radio, à hauteur de 5 % du prix de la cession.
Comme l’expliquait David Assouline, les fréquences font partie du domaine public. Ce sont véritablement des parts de bien commun, dont le CSA répartit l’usage. Il en attribue des parts au service public, d’autres aux éditeurs privés. Tous ont des obligations, notamment en matière de création ou d’éthique.
Au demeurant, les obligations éthiques ne sont pas toujours respectées : je pense notamment à TF1, qui a fait « glisser » la bande-son d’un reportage telle qu’elle avait été captée in situ de manière à faire coïncider des sifflets avec l’arrivée du Président de la République... J’espère que le CSA prendra ses responsabilités !
La loi de 1986 relative à la liberté de communication prévoyait des concessions avec renouvellement périodique. Depuis lors, les fréquences sont devenues un objet de spéculation et assurent de confortables plus-values aux éditeurs de services de communication audiovisuelle en cas de cession.
Cette disposition, qui vise à encadrer plus strictement la revente de fréquences, a déjà été adoptée par le Sénat en 2012, dans le cadre de la loi de finances, avant d’être censurée par le Conseil constitutionnel, qui y avait vu un cavalier législatif.
Le vote et la promulgation de la loi relative à l’indépendance de l’audiovisuel public offrent maintenant un nouveau cadre législatif pour cette taxe sur la revente de fréquences.
Le CSA, selon l’article 42-3 de la loi de 1986, modifié en 2013, doit désormais agréer toute modification du contrôle direct et indirect, au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, de la société titulaire de l’autorisation. Sur cette base, il est désormais possible d’établir une redevance sur les droits de mutation.
Le champ d’application de notre amendement se limite au secteur de la radio. Le secteur de la télévision exige, quant à lui, un travail approfondi pour ajuster au mieux le dispositif à la nature et à la spécificité du marché. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Ces amendements tendent à réguler la revente spéculative des sociétés détentrices de fréquences obtenues gratuitement. La commission y est favorable.
Depuis le lancement de la télévision numérique terrestre, la revente de sociétés détentrices de ce type de fréquences s’est multipliée. Dans le cadre d’opérations purement spéculatives, des entreprises ont en effet réalisé des gains importants.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Il s’agit ici d’instituer une taxe sur les cessions ou échanges de titres ayant pour objet d’entraîner le transfert du contrôle des sociétés titulaires d’une autorisation d’usage de la ressource radioélectrique, dans la mesure où ces fréquences hertziennes ont été initialement attribuées gratuitement.
Il a déjà été débattu de ce sujet à plusieurs reprises dans votre assemblée.
Nous comprenons parfaitement l’objectif poursuivi : soumettre à une taxation des cessions particulières d’ordre spéculatif qui entraînent le transfert du contrôle des chaînes de télévision ou de radio.
Néanmoins, ces amendements ne résolvent pas toutes les difficultés, alors même que des amendements similaires ont déjà été censurés à deux reprises par le Conseil constitutionnel.
Il serait préférable que nous puissions continuer à discuter de cette question d’ici à l’examen du projet de loi de finances rectificative, qui aura lieu très prochainement.
À défaut d’un retrait, le Gouvernement s’en remettrait à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote sur l'amendement n° I-142.
M. Francis Delattre. Nous sommes favorables à cet amendement. Je souhaiterais néanmoins formuler quelques remarques et poser une question complémentaire à M. le ministre.
En réalité, l’amendement vient un peu tard, car c’est il y a quelques mois que s’est produite l’opération susceptible de faire réaliser à l’État le « gros coup » fiscal que fait miroiter M. Assouline. Tout le monde sait de quoi il retourne : une chaîne généraliste a été cédée, naturellement très cher, à un grand groupe comprenant uniquement des chaînes à péage.
Or l’entreprise qui a vendu se trouve être l’actionnaire de référence de l’entité contrôlant Canal +. Ma question complémentaire est donc la suivante, monsieur le ministre : cette opération, que l’on peut qualifier de juteuse, a-t-elle obéi à toutes les règles fiscales ? Il serait intéressant que vous puissiez nous renseigner sur ce point aujourd'hui ou demain.
Par ailleurs, vous avez décidément beaucoup de talent, monsieur Assouline : vous aviez déposé voilà quelques mois, avec votre groupe, une proposition de loi fort intéressante, visant à éviter que les grands groupes qui vivent de la commande publique – le seuil étant d’environ 25 % du chiffre d’affaires – ne puissent être détenteurs du capital de grandes sociétés de radio et de télévision – je ne parle pas des journaux. Or vous avez renoncé à cette proposition de loi.
Je le déplore, car elle allait dans le bon sens. Lorsque, dans une démocratie, les plus gros médias dépendent d’industries qui vivent de la commande publique, cela pose un vrai problème d’éthique. Nous l’avons bien vu au cours des dernières campagnes électorales…
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je ne retirerai pas le présent amendement, monsieur le ministre, parce que, je l’ai dit, un amendement similaire a été, par deux fois, adopté par le Sénat. On avait parlé, à l’époque, d’« amendement Bolloré », en référence à la revente de Direct 8 à Canal +, mais cette opération avait servi d’exemple et non de cible. Cela étant, c’est vrai, compte tenu de la plus-value réalisée à l’occasion de cette cession, une taxe de 5 % aurait, rapporté 40 millions d’euros à l’État, ce qui n’est pas rien.
Mais cela est derrière nous puisque le Conseil constitutionnel a censuré la disposition !
Je vous invite à réexaminer les raisons de cette décision, car elles montrent que nous n’avons pas besoin d’un délai de réflexion supplémentaire : l’argument principal était qu’il s'agissait d’un cavalier.
Comme Mme Blandin l’a également expliqué, nous avons fait en sorte, en rédigeant la loi relative à l’indépendance de l’audiovisuel public récemment promulguée, que cet amendement en loi de finances ne puisse plus être considéré comme un cavalier.
Monsieur Delattre, non, il n’est pas trop tard pour adopter cette disposition, qui est maintenant sécurisée juridiquement. La télévision numérique terrestre payante ne se porte pas très bien et certains songent à des regroupements pour tenir le choc face à la concurrence internationale. Je ne me prononce pas sur ces mouvements ; je dis seulement qu’ils auront probablement lieu. Par conséquent, on peut assister à des reventes, y compris des reventes spéculatives, dès cette année. Si nous attendons encore, nous manquerons l’occasion soit de dissuader des opérateurs de procéder à des reventes spéculatives, soit de faire entrer de l’argent dans les caisses de l’État.
Ne laissons pas de telles pratiques perdurer : il faut dès aujourd'hui mettre un terme à cette situation.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 7, et l'amendement n° I-494 rectifié n’a plus d’objet.
Je constate en outre que l’amendement n° I-142 a été adopté à l’unanimité des présents.
Article 7 bis (nouveau)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les 1° et 4° de l’article 278 septies sont abrogés ;
2° L’article 278-0 bis est complété par un H ainsi rédigé :
« H. – 1° Les importations d’œuvres d’art, d’objets de collection ou d’antiquité, ainsi que sur les acquisitions intracommunautaires, effectuées par un assujetti ou une personne morale non assujettie, d’œuvres d’art, d’objets de collection ou d’antiquité qu’ils ont importés sur le territoire d’un autre État membre de l’Union européenne ;
« 2° Les acquisitions intracommunautaires d’œuvres d’art qui ont fait l’objet d’une livraison dans un autre État membre par d’autres assujettis que des assujettis revendeurs. » ;
3° Le premier alinéa de l’article 297 B est complété par la référence : « ou du H de l’article 278-0 bis » ;
4° Au 2° bis de l’article 1460, après la référence : « 278 septies », est insérée la référence : « et du H de l’article 278-0 bis ».
II. – Le I s’applique aux opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2014. – (Adopté.)
Article 7 ter (nouveau) (réserve)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après l’article 278-0 bis, il est inséré un article 278-0 ter ainsi rédigé :
« Art. 278-0 ter. – 1. La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit mentionné au premier alinéa de l’article 278-0 bis sur les travaux d’amélioration de la qualité énergétique des locaux à usage d’habitation achevés depuis plus de deux ans. Ces travaux portent sur la pose, l’installation et l’entretien des matériaux et équipements mentionnés au 1 de l’article 200 quater, sous réserve que ces matériaux et équipements respectent des caractéristiques techniques et des critères de performances minimales fixés par arrêté du ministre chargé du budget.
« 2. Par dérogation au 1 du présent article, le taux prévu à l’article 278 s’applique aux travaux, réalisés sur une période de deux ans au plus :
« a) Qui concourent à la production d’un immeuble neuf au sens du 2° du 2 du I de l’article 257 ;
« b) À l’issue desquels la surface de plancher des locaux existants est augmentée de plus de 10 %.
« 3. Le taux réduit prévu au 1 du présent article est applicable aux travaux facturés au propriétaire ou, le cas échéant, au syndicat de copropriétaires, au locataire, à l’occupant des locaux ou à leur représentant, à condition que le preneur atteste que ces travaux se rapportent à des locaux d’habitation achevés depuis plus de deux ans et ne répondent pas aux conditions mentionnées au 2. Il est également applicable, dans les mêmes conditions, aux travaux réalisés par l’intermédiaire d’une société d’économie mixte intervenant comme tiers financeur. Le prestataire est tenu de conserver cette attestation à l’appui de sa comptabilité.
« Le preneur doit conserver copie de cette attestation, ainsi que les factures ou notes émises par les entreprises ayant réalisé des travaux, jusqu’au 31 décembre de la cinquième année suivant la réalisation de ces travaux.
« Le preneur est solidairement tenu au paiement du complément de taxe si les mentions portées sur l’attestation s’avèrent inexactes de son fait. » ;
2° Au 1 de l’article 279-0 bis, après le mot : « entretien », sont insérés les mots : « autres que ceux mentionnés à l’article 278-0 ter ».
II. – À l’article L. 16 BA du livre des procédures fiscales, après le mot : « prévu », est insérée la référence : « à l’article 278-0 ter ou ».
III. – Le 1° du I s’applique aux opérations pour lesquelles la taxe sur la valeur ajoutée est exigible à compter du 1er janvier 2014.