M. Jean-Noël Cardoux. J’ai eu à plusieurs reprises l’occasion de souligner que la grande spécialité française était dorénavant de créer des structures s’empilant pour établir des rapports. Ce texte ne fait pas exception à la règle puisqu’il instaure une énième entité chargée de réfléchir sur l’évolution du régime de retraite : le comité de suivi des retraites.
La méthode n’est pas non plus sans défaut puisque ce comité serait composé de cinq personnes désignées en fonction de leurs compétences. J’avoue que j’éprouve habituellement des doutes lorsque les compétences ne sont pas clairement spécifiées. Je me demande toujours ce que cela cache quand l’expertise ne renvoie à aucune spécialité…
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Vous êtes mal placé pour donner des leçons, monsieur Cardoux !
M. Jean-Noël Cardoux. Le président de ce comité serait nommé en conseil des ministres. Voilà encore une tentative de mainmise des services de l’État et du Gouvernement sur ce type d’instance. Qui plus est, le président du comité serait placé sous tutelle du Premier ministre.
Plutôt que de créer un énième comité de suivi, il serait certainement beaucoup plus profitable d’élargir les missions du comité d’alerte sur l’évolution des dépenses de l’assurance maladie, actuellement placé auprès de la commission des comptes de la sécurité sociale, et d’en faire un comité d’alerte sur les dépenses des risques maladie et vieillesse, responsable de prévenir le Gouvernement et le Parlement en cas de trajectoire défavorable des comptes de l’assurance vieillesse.
La création d’une nouvelle instance de consultation, une fois de plus, ne se justifie pas. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Après les précédentes réformes, on s’est plaint de l’absence de pilotage de notre système de retraites. Or l’article 3 vise à créer un dispositif de pilotage. Il est donc important. C’est pourquoi la commission est défavorable à sa suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par M. Desessard et Mme Archimbaud, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Après le 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° De coordonner les recherches menées sur les fins de carrières. Il remet un rapport tous les trois ans présentant le résultat de ces recherches au Parlement. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Le Conseil d’orientation des retraites doit pouvoir définir davantage la situation des seniors en fin de carrière. En conséquence, cet amendement prévoit que le COR coordonne les recherches sur les fins de carrière et compile les données dans un rapport. Ainsi, nous pourrons prendre une décision en toute connaissance de cause.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Il me paraît nécessaire de bien établir une différence entre ce qui relève du Conseil d’orientation des retraites, en amont de toute politique gouvernementale, et ce qui dépend du comité de suivi, y compris pour l’emploi des seniors.
M. le président. L'amendement n° 58, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
Alinéa 14, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 43, présenté par M. Desessard et Mme Archimbaud, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 30
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Augmenter la durée d’assurance requise pour le bénéfice d’une pension sans décote sans avoir prouvé sa neutralité sur le nombre de personnes en situation de chômage au sens du Bureau international du travail et sur l’espérance de vie sans incapacité.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cet amendement vise à limiter les conclusions du rapport du comité de suivi des retraites concernant l’augmentation de la durée d’assurance vieillesse.
L’article 2 du présent projet de loi prévoyant déjà un accroissement de la durée de cotisation, il convient d’encadrer dès à présent toute velléité d’un nouvel allongement. Certes, nous ne l’avons pas voté, ici, au Sénat, mais l’Assemblée nationale le rétablira sans doute. Cet amendement a donc encore tout son sens afin d’éviter qu’on aille plus loin.
Mme la ministre a évoqué l’accord des sociaux-démocrates et de la droite allemande en ce qui concerne l’âge de départ et les durées de cotisation. Ils vont beaucoup plus loin ! Il se peut que nous suivions le même mouvement qu’eux. Cet amendement, en quelque sorte, fait office de garde-fou.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès. Avis défavorable.
M. Jean Desessard. Normal…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 3.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l’article 3.)
Article 4
(Non modifié)
I. – L’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Aux deux premiers alinéas, le mot : « avril » est remplacé par le mot : « octobre » ;
2° À la fin du premier alinéa, les mots : « par une commission dont la composition et les modalités d’organisation sont fixées par décret » sont remplacés par les mots : « dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances » ;
3° Le dernier alinéa est supprimé.
II. – À la fin de l’article L. 341-6 du même code, les mots : « dans les conditions fixées à l’article L. 351-11 » sont remplacés par les mots : « au 1er avril de chaque année par application d’un coefficient de revalorisation égal à l’évolution prévisionnelle en moyenne annuelle des prix à la consommation hors tabac, prévue pour l’année en cours, le cas échéant corrigée de la différence entre le taux d’évolution retenu pour fixer le coefficient de l’année précédente et le taux d’évolution de cette même année ».
III. – À la fin de l’article L. 816-2 du même code, les mots : « prévues pour les pensions de vieillesse de base par l’article L. 161-23-1 » sont remplacés par les mots : « applicables aux pensions d’invalidité prévues à l’article L. 341-6 ».
IV. – Les montants de l’allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l’article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et des prestations prévues à l’article 2 de l’ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse, ainsi que les plafonds de ressources prévus pour le service de ces allocations et prestations, sont revalorisés dans les conditions prévues à l’article L. 816-2 du code de la sécurité sociale.
V. – Le code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :
1° A L’article L. 27 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’intéressé a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° du I de l’article L. 24 du présent code. Par dérogation à l’article L. 16 du même code, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l’article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. » ;
1° L’article L. 28 est ainsi modifié :
a) À la deuxième phrase du troisième alinéa, la référence : « L. 16 » est remplacée par la référence : « L. 341-6 du code de la sécurité sociale » ;
b) Après le mot : « concédée », la fin de l’avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « , payée et revalorisée dans les mêmes conditions que la pension prévue à l’article L. 27. » ;
c) À la première phrase du dernier alinéa, la référence : « L. 16 » est remplacée par la référence : « L. 341-6 du code de la sécurité sociale » ;
2° L’article L. 29 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase, après le mot : « services », sont insérés les mots : « prévue au 2° du I de l’article L. 24 du présent code » ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« Par dérogation à l’article L. 16 du même code, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l’article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. » ;
3° À la fin de l’article L. 30 et de la première phrase des articles L. 30 bis et L. 30 ter, la référence : « L. 16 » est remplacée par la référence : « L. 341-6 du code de la sécurité sociale » ;
4° et 5° (Supprimés)
6° L’article L. 34 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Par dérogation à l’article L. 16, la pension versée en application du 2° de l’article L. 6 du présent code est revalorisée dans les conditions fixées à l’article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. » ;
7° À la fin de la seconde phrase du I de l’article L. 50, la référence : « de l’article L. 16 » est remplacée par les mots : « prévues à l’article L. 341-6 du code de la sécurité sociale ».
VI. – (Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 7 est présenté par MM. Cardoux et Longuet, Mmes Boog, Bruguière et Cayeux, M. de Raincourt, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, M. Gilles, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Husson, Mme Kammermann, MM. Laménie et Milon, Mme Procaccia, MM. Pinton, Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 25 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 44 est présenté par M. Desessard et Mme Archimbaud.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l’amendement n° 7.
M. Jean-Noël Cardoux. Une fois de plus, il s’agit d’un amendement de suppression.
L’objectif de l’ancienne majorité était de sauvegarder le pouvoir d’achat des retraités. C’est pourquoi la réforme de 2010 ne prévoyait pas d’augmenter la CSG ni de désindexer les pensions.
Le Gouvernement justifie cette mesure en faisant référence au rapport de la Commission pour l’avenir des retraites, qui souligne que « le niveau de vie des retraités est aujourd’hui comparable à celui des actifs, sans que pèsent sur les premiers les risques en matière d’emploi et de pouvoir d’achat auxquels sont confrontés les seconds, et notamment les plus jeunes d’entre eux en cette période de crise et de croissance du chômage ». C’est oublier que ces retraités sont souvent, en l’état actuel, des soutiens financiers pour leurs enfants ou petits-enfants !
Dans sa logique habituelle, le Gouvernement préfère ponctionner les retraités plutôt que de faire face à la réalité : la nécessité de travailler plus longtemps pour répondre au problème démographique, que personne ne peut contester.
Plutôt que de prendre des mesures courageuses sur l’allongement du temps de travail, la relance de l’emploi et la compétitivité des entreprises, le Gouvernement fait le choix de diminuer le pouvoir d’achat des retraités, ce qui s’accompagne nécessairement d’une baisse de la consommation et, par conséquent, du chiffre d’affaires des entreprises.
L’effort demandé aux retraités est substantiel. D’ici à 2020, par le biais de cet article, ils financeront la réforme à hauteur de 2,7 milliards d’euros, ce qui n’est pas rien ! Cette somme ne sera donc plus injectée dans le circuit économique du pays.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour présenter l'amendement n° 25.
Mme Isabelle Pasquet. L’article 4 est sans doute l’un des plus emblématiques du présent texte puisqu’il vise à opérer sur les retraités une ponction de plusieurs millions d’euros, prenant la forme d’un gel temporaire des pensions. Ainsi, pendant six mois, les retraités supporteront une diminution de leur pouvoir d’achat et devront faire face, coûte que coûte, à l’augmentation des dépenses courantes contraintes : fourniture de gaz et d’électricité, dépenses de transport et d’alimentation, tarifs des mutuelles, des assurances logement et des loyers.
Cette mesure est particulièrement injuste. Pourtant, Mme la ministre avait annoncé qu’il serait procédé à une double revalorisation de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, l’ASPA. Les retraités qui touchent à peine plus de 800 euros par mois peuvent-ils être considérés comme des nantis ? Comment imaginer que le gel de leur pension serait pour eux sans conséquence ?
La disposition est d’autant plus injuste que, vous le savez, les retraités ont subi l’année dernière, pour la première fois, une taxe sur les retraites afin de financer la sécurité sociale. Certains d’entre eux devront également faire face, là encore pour la première fois, à l’imposition sur le revenu, ainsi qu’à la suppression des droits connexes liés à leur statut fiscal passé.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 44.
M. Jean Desessard. Nous demandons la suppression de cet article, qui prévoit de reporter la revalorisation des pensions en fonction de l’inflation de six mois en la fixant désormais au 1er octobre de chaque année. Il s’agit de l’une des mesures importantes du financement du projet de loi puisque sont attendues des économies de 800 millions d’euros dès 2014 et de 1,9 milliard d’euros en 2020.
Bien sûr, nous saluons l’initiative du Premier ministre de revaloriser deux fois le minimum vieillesse en 2014 et d’augmenter de 50 euros l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé pour les plus de soixante ans disposant d’une retraite inférieure à 967 euros. Néanmoins, nous contestons le principe même du décalage de revalorisation et l’injustice d’un tel procédé envers des populations aux faibles revenus. Certes, la mesure exclut les bénéficiaires de l’ASPA, mais sur 1,6 million de retraités qui se situent sous le seuil de pauvreté, seuls 600 000 d’entre eux bénéficient de l’ASPA. Il nous semble donc particulièrement injuste de mettre en place une mesure qui touche 1 million de pensionnés déjà défavorisés.
Le report décidé en 2010 a déjà impacté les retraites. Reporter encore la revalorisation, c’est continuer de mener une politique inéquitable. C’est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Je rappelle que l’article 4 insiste sur la nécessaire contribution de tous – employeurs, salariés et retraités – à l’objectif d’équilibre financier garantissant la pérennité de notre système de retraites.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Je rappelle à mon tour que cet article fixe le principe d’une contribution de l’ensemble de nos concitoyens à cet effort nécessaire. Reste que, pour tenir compte de la situation des retraités aux revenus modestes, le Gouvernement a pris une série de mesures.
D’abord, les bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées ne verront pas l’indexation de leurs retraites reportée.
Ensuite, les mêmes bénéficiaires pourront compter, l’année prochaine, sur une double revalorisation de leurs retraites, ce qui équivaut à un coup de pouce tout à fait significatif en termes de pouvoir d’achat.
Enfin, les retraités disposant de revenus supérieurs à l’APSA et inférieurs au seuil de pauvreté, soit entre 780 euros et 980 euros environ, verront le montant de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé revalorisé de 50 euros, ce qui permettra d’atténuer, voire d’annuler complètement l’effort demandé aux retraités dans le cadre de cet article.
Le Gouvernement a donc entendu les préoccupations exprimées par de nombreux parlementaires au sujet du pouvoir d’achat des retraités modestes. Pour autant, afin de garantir l’avenir de notre système de retraites, il faut que le principe d’une contribution de l’ensemble des retraités puisse être reconnu, notamment vis-à-vis des plus jeunes de nos concitoyens.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. Je voterai bien évidemment ces amendements de suppression.
Vous me permettrez, madame la ministre, de m’adresser directement à vous. En effet, je n’ai pas pu redéposer l’amendement qui visait à permettre aux bénéficiaires de l’ASPA de cumuler leur allocation avec des revenus d’activité. Or ce cumul est possible pour tous les retraités, sauf pour ceux qui perçoivent le minimum vieillesse ! Si une personne qui touche moins de 800 euros travaille et gagne 100 euros, non seulement l’État prélève des cotisations sur ces 100 euros, mais, en plus, il les déduit de son allocation. C’est absolument injuste, voire inadmissible dans un pays comme le nôtre !
Une proposition de loi cosignée par plus de quatre-vingt-dix parlementaires a été adoptée à la quasi-unanimité au Sénat en janvier dernier. Cela fait près d’un an ! Après avoir été rejetée en commission à l’Assemblée nationale, elle est revenue sous forme d’amendement dans le cadre de ce projet de loi.
En janvier, la ministre en séance, Mme Delaunay, avait émis, au nom du Gouvernement, un avis de sagesse sur la proposition de loi. Quelle ne fut pas notre surprise de vous entendre, madame la ministre, à l’occasion de la discussion de ce projet de loi, émettre un avis défavorable sur cet amendement. Malgré votre avis défavorable, les socialistes ont opté pour une abstention positive, ce dont je les remercie, les Verts ont voté pour et les communistes ont voté contre, mais en expliquant qu’ils préféraient la revalorisation de l’allocation, ce que les parlementaires ne peuvent proposer, sinon ils se verraient opposer l’article 40.
Madame la ministre, vous nous dites que vous allez permettre aux titulaires de l’ASPA de travailler et que cette décision, vous allez la prendre par voie réglementaire. Or les parlementaires que nous sommes sont là pour faire la loi ! Pourquoi attendre encore, alors qu’il était tellement simple d’accepter notre proposition ? Voilà un an que ces personnes attendent ! Voilà un an que vous auriez pu prendre cette décision !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Et vous, vous auriez pu le faire il y a dix ans !
Mme Isabelle Debré. M. Desessard avait dit la même chose de façon extrêmement forte en soutenant cet amendement, que je n’ai pas pu redéposer en vertu de l’application de ce que nous appelons dans le jargon parlementaire « la règle de l’entonnoir ».
Le précédent gouvernement avait augmenté l’allocation de 25 % en cinq ans. Malgré tout, ce n’est suffisant. Croyez-vous qu’il soit possible de vivre avec moins de 800 euros par mois ? Trouvez-vous normal qu’on leur interdise de travailler ? Le droit au travail est fondamental dans notre pays ! Empêcher ces personnes de travailler favorise, vous l’imaginez bien, le travail que j’appellerai « dissimulé », pour rester correcte. Cette attitude est indigne vis-à-vis d’elles et indigne à l’égard des parlementaires que nous sommes !
Voilà un an que ces personnes attendent. Je pourrais vous montrer leurs courriers. Je ne vois pas pourquoi vous avez émis un avis défavorable sur cette proposition, qui avait reçu un avis de sagesse de la part de Mme Delaunay. Force est de le constater que, avec ce gouvernement, c’est une fois oui, une fois peut-être et une fois non !
Vous avez pris un engagement. Pouvez-vous me dire quand accorderez-vous aux titulaires de l’APSA ce droit fondamental de pouvoir travailler de façon digne ? Quand allez-vous considérer ces retraités comme les autres ? Quand leur donnerez-vous un statut à part entière ?
MM. Jean-Noël Cardoux et Jean-Marie Vanlerenberghe. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je crois pouvoir dire que, sur toutes les travées, nous trouvons la situation aberrante. D’un côté, il y a ceux qui touchent les pensions les plus importantes et qui peuvent travailler pour compléter leurs revenus. De l’autre, il y a ceux qui perçoivent les pensions les moins importantes et qui ne peuvent pas travailler. Franchement, il faut nous expliquer, car c’est incompréhensible !
La meilleure mesure consisterait à faire en sorte que, grâce à un revenu suffisant, personne ne travaille. C’est la position de nos collègues du groupe CRC, qui estiment que la pension doit être suffisamment correcte pour permettre de vivre sans avoir besoin de travailler.
Autoriser ceux qui ont la pension la plus élevée à compléter leurs revenus et interdire cette possibilité à ceux que leur faible niveau de pension met en difficulté au point d’avoir besoin de trouver quelques heures de travail pour les dépanner, c’est inexplicable ! On peut avoir des divergences politiques sur d’autres aspects, mais là, je le répète, c’est incompréhensible ! On ne peut donc que s’associer à la demande de Mme Debré et demander que les choses se mettent en place rapidement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Debré, j’ai déjà eu l’occasion de vous répondre. Vos indignations sont sélectives…
Mme Isabelle Debré. Je n’ai pas parlé d’indignation !
Mme Marisol Touraine, ministre. … ou bien vous avez la mémoire courte.
Si la situation est aussi injuste que vous le dites, il vous appartenait de la transformer au cours des dix longues années que vous avez passées aux responsabilités. Vous étiez en mesure de le faire !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Oh là là !
Mme Isabelle Debré. Parlez de l’avenir !
Mme Marisol Touraine, ministre. En outre, ce n’est quand même pas à la parlementaire chevronnée que vous êtes que je vais expliquer la différence entre la loi et le règlement. Cette différence tient non pas au bon vouloir du Gouvernement, mais à la rédaction de la Constitution.
Lorsque je vous indique qu’une disposition est d’ordre réglementaire, cela ne veut pas dire que nous allons la soustraire au droit de regard des parlementaires. Cela signifie simplement que, aux termes de la Constitution, il appartient au Gouvernement de faire évoluer ou non la situation. Je me suis engagée à ce que le Gouvernement prenne un décret. Il prendra un décret !
Monsieur Desessard, il n’y a pas d’interdiction de travailler pour les bénéficiaires de l’ASPA. Il y a une non-incitation à travailler, ce qui n’est pas exactement la même chose. Le résultat est plutôt celui qu’indiquait Mme Debré : certains bénéficiaires de l’allocation peuvent chercher à améliorer leur situation d’une façon que le Gouvernement ne peut évidemment pas approuver, c’est-à-dire en recourant au travail dissimulé, au travail au noir, comme on dit couramment. Je vous vois froncer les sourcils, monsieur le sénateur, mais c’est la réalité.
Nous menons actuellement des concertations pour déterminer le niveau de revenu supplémentaire que le bénéficiaire de l’APSA pourra percevoir.
Mme Isabelle Debré. On vous a fait une proposition !
Mme Marisol Touraine, ministre. Et moi, je vous dis que nous sommes en train de mener des concertations afin de déterminer le niveau à partir duquel une dégressivité pourrait être mise en œuvre, l’ASPA étant un revenu minimum.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7, 25 et 44.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe UMP et, l'autre, du groupe écologiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 106 :
Nombre de votants | 348 |
Nombre de suffrages exprimés | 332 |
Pour l’adoption | 204 |
Contre | 128 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 4 est supprimé et les amendements identiques n° 26 et 45 n’ont plus d’objet.
Toutefois, pour la clarté des débats, je rappelle les termes de ces deux amendements identiques.
L’amendement n° 26 était présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L’amendement n° 45 était présenté par M. Desessard et Mme Archimbaud.
Tous deux étaient ainsi libellés :
Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Par dérogation, les pensions de vieillesse des personnes physiques ne payant pas l’impôt sur le revenu tel que défini au 2° de l’article 5 du code général des impôts et ne bénéficiant pas de l’allocation de solidarité aux personnes âgées définie à l’article L. 815-1 du présent code sont revalorisées dans les conditions applicables aux pensions d’invalidité prévues à l’article L. 341-6. »
Article 4 bis
(Non modifié)
I. – L’article L. 5552-20 du code des transports est ainsi rédigé :
« Art. L. 5552-20. – Les pensions sont revalorisées dans les conditions fixées à l’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale. »
II. – Après le mot : « âgées », la fin du premier alinéa de l’article 29 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte est ainsi rédigée : « ainsi que le plafond prévu à l’article 28 sont revalorisés dans les conditions applicables aux pensions d’invalidité, prévues à l’article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. » – (Adopté.)
Titre II
RENDRE LE SYSTÈME PLUS JUSTE
Chapitre Ier
Mieux prendre en compte la pénibilité au travail
Article 5
(Non modifié)
I. – Le livre Ier de la quatrième partie du code du travail est complété par un titre VI intitulé : « Dispositions particulières à certains facteurs de risques professionnels et à la pénibilité ».
II. – Au même titre VI, il est inséré un chapitre Ier intitulé : « Fiche de prévention des expositions » et comprenant l’article L. 4121-3-1, qui devient l’article L. 4161-1 et est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après les mots : « travailleur exposé », sont insérés les mots : « , au-delà de certains seuils, après application des mesures de protection collective et individuelle, » et les mots : « déterminés par décret et » et les mots : « , selon des modalités déterminées par décret, » sont supprimés ;
a bis) À la même phrase, après le mot : « pénibilité », sont insérés les mots : « résultant de ces facteurs » et, après le mot : « réduire », sont insérés les mots : « l’exposition à » ;
b) (Supprimé)
c) Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Les facteurs de risques professionnels et les seuils d’exposition, ainsi que les modalités et la périodicité selon lesquelles la fiche individuelle est renseignée par l’employeur, sont déterminés par décret. » ;
2° Après la première phrase du second alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Elle est tenue à sa disposition à tout moment. » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les entreprises utilisatrices mentionnées à l’article L. 1251-1 transmettent à l’entreprise de travail temporaire les informations nécessaires à l’établissement par cette dernière de la fiche individuelle. Les conditions dans lesquelles les entreprises utilisatrices transmettent ces informations et les modalités selon lesquelles l’entreprise de travail temporaire établit la fiche de prévention des expositions sont définies par décret en Conseil d’État. »
II bis. – Le chapitre Ier du même titre VI, dans sa rédaction résultant du II du présent article, est complété par un article L. 4161-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 4161-2. – L’accord collectif de branche étendu mentionné à l’article L. 4163-4 peut caractériser l’exposition des travailleurs à un ou plusieurs des facteurs de risques professionnels au-delà des seuils mentionnés à l’article L. 4161-1 par des situations types d’exposition, faisant notamment référence aux postes occupés et aux mesures de protection collective et individuelle appliquées. Un décret précise les conditions dans lesquelles, sans préjudice des dispositions mentionnées au même article L. 4161-1, ces situations types peuvent être prises en compte par l’employeur pour établir la fiche mentionnée audit article. »
III. – Au 2° du III des articles L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale et L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime, la référence : « L. 4121-3-1 » est remplacée par la référence : « L. 4161-1 ».
IV. – (Supprimé)
V. – L’article L. 4612-16 du code du travail est ainsi modifié :
1° La seconde phrase du 1° est ainsi rédigée :
« Les questions du travail de nuit et de prévention de la pénibilité sont traitées spécifiquement. » ;
2° À la seconde phrase du 2°, après le mot : « venir », sont insérés les mots : « qui comprennent les mesures de prévention en matière de pénibilité, ».