M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
M. Thani Mohamed Soilihi. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteur, mes chers collègues, à la suite de la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants adopté par l’assemblée générale des Nations unies le 18 décembre 2002, le législateur français a institué, par la loi du 30 octobre 2007, un Contrôleur général des lieux de privation de liberté et lui a conféré le statut d’autorité administrative indépendante.
Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté a pour rôle de veiller à ce que les personnes privées de liberté soient traitées avec humanité et dans le respect de la dignité inhérente à la personne humaine.
Il s’assure également qu’un juste équilibre soit observé entre le respect des droits fondamentaux des personnes privées de liberté et les considérations d’ordre public et de sécurité.
Enfin, il a pour mission de prévenir toute violation des droits fondamentaux de ces personnes.
Ainsi, il peut visiter à tout moment, y compris de manière inopinée, tous les lieux où des personnes sont privées de liberté.
Usant de cette prérogative, quatre délégués du Contrôleur général des lieux de privation de liberté se sont rendus à Mayotte du 26 mai au 4 juin 2009, dans le but de contrôler le centre de rétention administrative de Pamandzi, jugé par de nombreuses institutions et associations comme « indigne de la République » et tristement célèbre pour sa surpopulation chronique et les conditions inhumaines de privation de liberté, ainsi que la maison d’arrêt de Majicavo, dont le taux d’occupation s’élevait à l’époque à 270 %.
Le constat qu’ils ont établi était plus qu’alarmant. Sur la base de ce bilan accablant, un projet de construction d’un nouveau centre de rétention administrative tenant compte des observations faites et répondant aux exigences d’hygiène et de sécurité fixées aux niveaux national et européen a été annoncé. En mars 2012, Jean-Marie Delarue, auditionné au Sénat pour exposer les grandes lignes de son rapport annuel, s’était irrité de l’immobilisme prévalant sur ce dossier. Des travaux de rénovation ont été entrepris, mais la date exacte de livraison du nouveau centre – on parle de 2017 – reste incertaine.
S’agissant de la maison d’arrêt, les recommandations du Contrôleur général ont permis l’exécution d’un important programme d’extension, actuellement en cours d’achèvement et qui devrait permettre la livraison d’un quartier centre de détention de 152 places au cours du premier semestre de 2014. Les travaux se poursuivront alors sur le site aujourd’hui occupé par les détenus.
En définitive, ce sera un établissement entièrement neuf d’une capacité de 278 places qui sera livré en septembre 2015.
Je profite de cette occasion pour vous remercier, madame la ministre, de votre engagement pour la mise aux normes de cet établissement et de l’institution d’un groupe de travail traitant spécifiquement des conditions d’emprisonnement particulièrement difficiles en outre-mer.
Tout le monde est d’accord sur ce point : l’importance de la mission du Contrôleur général des lieux de privation de liberté est incontestable. En cinq ans, il a fait procéder à plus de 800 visites sur le terrain et relever de nombreux dysfonctionnements.
Tirant les enseignements de ces quatre années d’expérience, la présente proposition de loi nous invite à améliorer le dispositif entourant son action.
Elle prévoit notamment la publicité systématique de ses recommandations et propositions. Elle donne au Contrôleur général la possibilité de mettre en demeure ses interlocuteurs de lui remettre des documents ou des informations dans un délai qu’il aura fixé. Elle crée également, à l’instar de ce qui existe pour la Commission nationale de déontologie de la sécurité, la CNDS, ou encore la CNIL, notamment, une nouvelle infraction pénale punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende pour entrave à sa mission.
Voilà quelques-unes des raisons qui me poussent à voter en faveur de l’adoption de ce texte, qui améliorera nettement le fonctionnement d’une institution indispensable, grâce au formidable travail de Mme la rapporteur, à qui je rends ici hommage. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
Article 1er A (nouveau)
Le premier alinéa de l’article 1er de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il exerce, aux mêmes fins, le contrôle de l’exécution par l’administration des mesures d’éloignement prononcées à l’encontre d’étrangers jusqu’à leur remise aux autorités de l’État de destination. »
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er A.
(L'article 1er A est adopté.)
Article 1er
I. – (Supprimé)
II. – (Supprimé)
III. – Après l’article 6 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 précitée, il est inséré un article 6-1 ainsi rédigé :
« Art. 6-1. – Lorsqu’une personne physique ou morale porte à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté des faits ou des situations, elle lui indique, après avoir mentionné ses identité et adresse, les motifs pour lesquels, à ses yeux, une atteinte ou un risque d’atteinte aux droits fondamentaux des personnes privées de liberté est constitué.
« Lorsque le Contrôleur général des lieux de privation de liberté estime que les faits ou situations portées à sa connaissance relèvent de ses attributions, il peut procéder à des vérifications, éventuellement sur place. Il peut déléguer à toute personne relevant de son autorité le soin de mener ces vérifications.
« Les autorités responsables du lieu de privation de liberté ne peuvent s’opposer à ces vérifications sur place que pour les motifs prévus au deuxième alinéa de l’article 8.
« Toute personne sollicitée est tenue d’apporter, dans le délai fixé par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, toute information en sa possession, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l’article 8.
« À l’issue de ces vérifications, et après avoir recueilli les observations de toute personne intéressée, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté peut formuler des recommandations relatives aux faits ou situations en cause à la personne responsable du lieu de privation de liberté. Ces observations et ces recommandations peuvent être rendues publiques, sans préjudice des dispositions de l’article 5. »
IV. – L’article 8 de la même loi est ainsi modifié :
1° Le troisième alinéa est ainsi modifié :
a) Après les mots : « responsables du lieu de privation de liberté », sont insérés les mots : « ou de toute personne susceptible de l’éclairer. » ;
b) La dernière phrase est complétée par les mots : « et recueillir toute information qui lui paraît utile. » ;
2° Au quatrième alinéa, les mots : « au secret médical » sont supprimés ;
3° Après le quatrième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les informations couvertes par le secret médical peuvent être communiquées, avec l’accord de la personne concernée, aux contrôleurs titulaires d’un diplôme, certificat ou autre titre permettant l’exercice en France de la profession de médecin. Toutefois, les informations couvertes par le secret médical peuvent leur être communiquées sans le consentement de la personne concernée lorsqu’elles sont relatives à des privations, sévices et violences physiques, sexuelles ou psychiques commis sur un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou son incapacité physique ou psychique.
« En outre, les procès-verbaux de garde à vue, lorsqu’ils ne sont pas relatifs aux auditions des personnes, lui sont communicables. »
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, sur l'article.
Mme Nathalie Goulet. J’interviens sur cet article, à défaut d’avoir pu le faire dans la discussion générale…
En l’espèce, je veux évoquer la situation de la prison d’Alençon-Condé-sur-Sarthe. Dans cet établissement, les incidents se multiplient, de prise d’otages en mutinerie. Tout récemment, le directeur-adjoint a reçu « plusieurs coups de pic ». Selon les syndicats, il s'agit de la deuxième agression physique en moins de vingt-quatre heures dans ce centre pénitentiaire inauguré par vos soins, madame la garde des sceaux, le 30 avril dernier seulement.
Les équipes régionales d’intervention et de sécurité –les ERIS, le « GIGN de la pénitentiaire » – ont été rappelées le vendredi 10 janvier au matin. Arrivés sur place dès le 1er janvier, leurs membres étaient repartis mercredi, par mesure d’économie, alors qu’ils devaient rester jusqu’à la fin de la semaine…
« C’est la panique totale dans cet établissement. À ce rythme-là, si aucune décision radicale et réfléchie n’est prise, l’administration aura au moins un mort sur la conscience à très court terme », a tonné le syndicat UFAP-UNSA dans un communiqué.
Madame la garde des sceaux, on concentre au sein d’un même établissement les détenus les plus durs, qui ont agressé des surveillants ou ont tenté de s’évader, sans mobiliser les moyens nécessaires pour les encadrer. Le personnel est en nombre insuffisant et n’est pas formé : sur 180 surveillants travaillant actuellement dans cet établissement, 90 sont des stagiaires, qui n’ont absolument pas reçu la formation nécessaire pour s’occuper de détenus de l’acabit du tristement célèbre Fofana…
Les syndicats demandent « l’arrêt de la montée en charge de cet établissement », qui n’est pas en état de recevoir ce type de détenus.
Tout à l'heure a été évoqué l’équilibre à trouver entre l’attention à apporter au respect des droits des détenus et la prise en compte des difficultés du personnel pénitentiaire : je tiens à attirer une nouvelle fois votre attention, madame la garde des sceaux, sur la situation de la prison d’Alençon-Condé-sur-Sarthe. Il s’agit d’un problème vraiment très important, non seulement pour les gardiens qui y travaillent, mais aussi pour les habitants de la région d’Alençon. En outre, je souligne que cet établissement n’est occupé qu’aux deux tiers de sa capacité, pour des raisons de personnel, alors que nombre de nos prisons sont surchargées.
Nous devons assurer la sécurité du personnel pénitentiaire : il y va aussi de la garantie du respect des droits des détenus.
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, sur l'article.
Mme Aline Archimbaud. L’article 1er définit le champ de compétence du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Notre groupe avait déposé un amendement visant à inclure dans le champ d’action de ce dernier les établissements accueillant des personnes âgées dépendantes. Je regrette qu’il ait été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, car cela nous empêche de débattre d’un sujet éminemment politique et important.
La mission de protection des droits fondamentaux du Contrôleur général concerne les personnes privées de liberté, davantage susceptibles que les personnes autonomes d’être exposées à de mauvais traitements, en raison de leur vie contrainte. À cet égard, la situation des personnes âgées dépendantes est parfois, de fait, très proche de celles dont le Contrôleur général peut avoir à connaître aujourd’hui.
En outre, une telle extension du champ de compétence du Contrôleur général s’inscrirait dans la logique à l’œuvre depuis 2008. En effet, il y a parfois bien peu de différence entre les conditions de vie dans les hôpitaux spécialisés en psychiatrie, dont certaines unités accueillent, d'ailleurs, des personnes âgées atteintes de démence sénile, et celles qui prévalent dans les établissements d’hébergement médicalisé.
Les personnes âgées résidant dans ces établissements sont souvent en situation de grande fragilité. Leurs difficultés à échanger, la répétition d’actes non admis, les carences de la formation des personnels, l’insuffisance des effectifs sont de nature, malgré toutes les bonnes volontés, à favoriser les atteintes aux droits fondamentaux. Dès lors, sans mettre en cause les personnels, capables de prodiges de dévouement, il ne nous paraît pas exagéré d’affirmer que nous devons porter une attention toute particulière aux établissements pour personnes âgées.
Si ces établissements font bien évidemment déjà l’objet de contrôles, ces derniers n’ont pas le caractère approfondi des visites du Contrôleur général, lesquelles sont d’une autre nature.
De surcroît, il nous semble que l’existence d’un contrôle indépendant apporterait en elle-même une garantie supplémentaire aux personnes concernées. À cet égard, l’expérience acquise depuis cinq ans par le Contrôleur général, la qualité des visites qu’il opère, son habitude du dialogue devraient primer sur la prise en compte de la spécificité, incontestable, de ces établissements. Son apport serait résolument positif : il permettrait à la fois de rassurer les personnes âgées et leurs proches, d’encourager les personnels et de définir des recommandations indépendantes à destination des pouvoirs publics.
Il nous semble vraiment important qu’un débat s’engage rapidement sur ce point.
M. le président. L'amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Lecerf, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
« Lorsque les faits ou situations portés à sa connaissance relèvent de ses attributions, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté peut procéder…
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. Cet amendement, de portée tout à fait modeste, vise, d’une part, à récrire l’alinéa 5 d’une manière un peu plus lapidaire, et, d’autre part et surtout, en retirant le verbe « estimer », à supprimer la part de subjectivité que la rédaction initiale semblait laisser au Contrôleur général dans la mise en œuvre de ses missions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. La commission a donné un avis favorable à cet amendement, qui opère une amélioration rédactionnelle totalement fondée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par Mme Tasca, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 14 à 16
Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :
3° Le dernier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Les procès-verbaux de garde à vue, lorsqu’ils ne sont pas relatifs aux auditions des personnes, lui sont communicables.
« Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté peut déléguer aux contrôleurs les pouvoirs mentionnés aux premier à cinquième alinéas du présent article.
« Les informations couvertes par le secret médical peuvent être communiquées, avec l’accord de la personne concernée, aux contrôleurs titulaires d’un diplôme, certificat ou autre titre permettant l’exercice en France de la profession de médecin. Toutefois, les informations couvertes par le secret médical peuvent leur être communiquées sans le consentement de la personne concernée lorsqu’elles sont relatives à des privations, sévices et violences physiques, sexuelles ou psychiques commis sur un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique. »
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Il s’agit là aussi d’un amendement rédactionnel, destiné à améliorer, d’une part, l'insertion des modifications apportées par la proposition de loi, telle que l'a modifiée la commission des lois, à l'article 8 de la loi du 30 octobre 2007, et, d’autre part, la lisibilité dudit article.
La rédaction actuelle laisse subsister une interrogation sur la possibilité, pour le Contrôleur général, de déléguer l’accès au dossier médical aux contrôleurs non titulaires d’un titre permettant l’exercice en France de la profession de médecin.
L’amendement n’a d’autre objet que d’inverser deux alinéas, afin de rendre les choses parfaitement claires.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous n’avons pas eu le texte de cet amendement entre les mains. Toutefois, ayant écouté attentivement les explications de Mme la rapporteur, j’ai bien noté qu’il s’agissait d’une simple inversion de deux paragraphes, tendant à améliorer la rédaction de l’article. Dans ces conditions, l’avis du Gouvernement est favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
(Non modifié)
Après l’article 8 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 précitée, il est inséré un article 8 bis ainsi rédigé :
« Art. 8 bis. – Aucune sanction ne peut être prononcée et aucun préjudice ne peut résulter du seul fait des liens établis avec le Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou des informations qui lui auront été données se rapportant à l’exercice de sa fonction. Cette disposition ne fait pas obstacle à l’application éventuelle de l’article 226-10 du code pénal. » – (Adopté.)
Article 3
(Non modifié)
L’article 9 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 précitée est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « , en tenant compte de l’évolution de la situation depuis sa visite. » ;
2° La deuxième phase du premier alinéa est ainsi rédigée :
« À l’exception des cas où le Contrôleur général des lieux de privation de liberté les en dispense, les ministres formulent des observations en réponse dans le délai qu’il leur impartit et qui ne peut être inférieur à un mois. » ;
3° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le procureur de la République et l’autorité disciplinaire informent le Contrôleur général des lieux de privation de liberté des suites données à ses démarches. » – (Adopté.)
Article 4
(Non modifié)
Au deuxième alinéa de l’article 10 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 précitée, les mots : « peut rendre » sont remplacés par le mot : « rend ». – (Adopté.)
Article 5
(Non modifié)
Après l’article 9 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 précitée, il est inséré un article 9 bis ainsi rédigé :
« Art. 9 bis. – Lorsque ses demandes de documents, d’informations ou d’observations, présentées sur le fondement des articles 6-1, 8 et 9 ne sont pas suivies d’effet, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté peut mettre en demeure les personnes intéressées de lui répondre dans un délai qu’il fixe. » – (Adopté.)
Article 6
(Non modifié)
Après l’article 13 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 précitée, il est inséré un article 13 bis ainsi rédigé :
« Art. 13 bis. – Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende le fait de faire obstacle à la mission du Contrôleur général des lieux de privation de liberté :
« 1° Soit en s’opposant au déroulement des visites prévues à l’article 8 ;
« 2° Soit en refusant de lui communiquer les renseignements et documents nécessaires aux enquêtes définies à l’article 6-1, aux visites de l’article 8, en dissimulant ou faisant disparaître lesdits documents et renseignements, en altérant leur contenu ;
« 3° Soit en prenant des mesures destinées à faire obstacle, par menace ou voie de fait, aux relations que toute personne peut avoir avec le Contrôleur général des lieux de privation de liberté en vertu des articles 6 et 8 de la présente loi. » – (Adopté.)
Article 7
(Non modifié)
Le deuxième alinéa de l’article 4 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi rédigé :
« La possibilité de contrôler les communications téléphoniques, les correspondances et tout autre moyen de communication ne s’applique pas aux échanges entre le Contrôleur général des lieux de privation de liberté et les personnes détenues. La méconnaissance de cette disposition est passible des peines prévues à l’article 432-9 du code pénal. » – (Adopté.)
Article 8 (nouveau)
La présente loi est applicable à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
Les articles 6 et 7 de la présente loi sont applicables en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie. – (Adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. Bien entendu, le groupe socialiste votera ce texte. Il remercie Mme Tasca de son initiative, ainsi que Mme la garde des sceaux, qui a bien voulu accepter quelques modifications adoptées par la commission des lois.
Lors de la réunion de la commission des lois de ce matin, à laquelle participait Mme Lipietz, nous avons longuement débattu de l’amendement qui a été évoqué par Mme Archimbaud. Pour ma part, je regrette qu’il ait été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 : je pense qu’il aurait été préférable d’en discuter en séance publique.
Quoi qu’il en soit, ce matin, nous sommes convenus que des problèmes pouvaient se poser au sein de certains EHPAD, de certaines maisons d’accueil spécialisées ou de certains établissements pour handicapés mineurs ou majeurs, gérés soit par les collectivités territoriales, soit – le plus souvent – par des associations privées relevant du régime de la loi de 1901. Ici ou là, des scandales ont pu éclater ; ce fut le cas dans mon département.
Si les personnes hébergées y ont parfois été placées par leur famille, ces établissements sont tout de même d’une tout autre nature que ceux qui relèvent actuellement de la compétence du Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Ils font déjà l’objet de contrôles, exercés par le conseil général quand ils dépendent du département.
Cela étant, madame la garde des sceaux, il conviendrait que le Gouvernement, en particulier la ministre des affaires sociales et de la santé, se penche sur la façon dont ces contrôles sont menés et réfléchisse à l’opportunité de mettre en place des visites systématiques par une autorité qui pourrait être extérieure aux collectivités territoriales et au conseil d’administration des associations gérant ces établissements.
Madame Archimbaud, vous avez soulevé un véritable problème, mais, outre qu’il s’est vu opposer l’article 40, votre amendement n’entre pas dans le champ du texte qui nous est soumis.
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Madame Archimbaud, sachez que la ministre des affaires sociales et de la santé et la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie sont très sensibles aux questions que vous soulevez : nous nous sommes déjà réunies à trois reprises à la Chancellerie pour travailler sur le contrôle des établissements accueillant des personnes âgées dépendantes.
Cependant, ces établissements n’accueillant pas des personnes privées de liberté par une décision de l’autorité publique, ils n’entrent pas dans le champ de compétence du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Je ne me permettrai pas d’exprimer un avis sur l’application de l’article 40, mais j’en ai moi-même beaucoup souffert lorsque j’étais parlementaire… (Sourires.) Cela étant, je suis favorable au débat, quitte à ce que la décision soit reportée : cela permet de prendre acte des positions des uns et des autres et de les consigner au Journal officiel, le Gouvernement étant amené à prendre sa part de responsabilités.
En l’occurrence, je souligne que la ministre des affaires sociales et de la santé et la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie sont à ce point préoccupées par ce sujet qu’elles tiennent à ce que l’on affirme nettement les droits des personnes âgées accueillies dans ces établissements, et que celles-ci ne soient pas traitées comme des personnes sur lesquelles s’exercerait une tutelle implicite.
Madame Goulet, vous m’avez interpellée sur un établissement particulier. Je vous adresserai une réponse circonstanciée ultérieurement, puisque ce n’est pas l’objet du débat d’aujourd'hui. Néanmoins, il est vrai que cet établissement pose problème. Centre pénitentiaire le plus sécurisé de France, il concentre des détenus ayant un profil particulier. Dès lors, je suis étonnée que vous proposiez de le remplir davantage… Pour notre part, nous évitons une occupation à 100 % des maisons centrales accueillant des détenus difficiles.
Dans les nouveaux établissements, on sait qu’il se produit toujours des incidents dans les premières semaines ou les premiers mois. J’ai anticipé ces difficultés puisque, dès le mois de décembre, j’ai demandé à l'inspection de se rendre dans l'établissement. Elle m'a rendu un rapport – avant les incidents – qui servira à élaborer le projet d'établissement qui nous sera présenté à la fin du mois de janvier.
J’ai également demandé que les ERIS restent sur place plusieurs jours. Il a été estimé, sur place, que ces équipes pouvaient s'en aller… Je ne saurais porter ici une appréciation subjective.
Par ailleurs, un programme de formation complémentaire a été mis en place pour les personnels.
Sachez que nous exerçons une vigilance particulière sur cet établissement qui, effectivement, nous préoccupe.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Je voudrais remercier les services de la commission des lois pour le travail qu’ils ont accompli et tous les groupes du Sénat. Je remercie en particulier notre collègue Jean-René Lecerf d'avoir insisté sur la dimension consensuelle du texte, qui traduit un réel attachement de notre assemblée, sur toutes les travées, à la préservation des droits fondamentaux et des libertés publiques. Cet attachement du Sénat, qui s'est exprimé à l'occasion de la proposition de loi comme des travaux de nos collègues Patrice Gélard ou Jean-Jacques Hyest, mérite d'être souligné.
Je veux également remercier vos services et les membres de votre cabinet pour la qualité de leur collaboration, madame la garde des sceaux ; je remercie aussi le ministère de l'intérieur, qui a évidemment été consulté sur l'élargissement de la compétence du Contrôleur général à l'égard des étrangers reconduits dans leurs pays d'origine.
Pour finir, je renouvelle, comme tous l'ont fait ici, mon hommage au travail de Jean-Marie Delarue. Je pense qu’il y sera sensible et, surtout, qu’il souhaite ardemment que toutes les qualités que nous lui avons reconnues soient recherchées lorsqu'il faudra désigner son successeur. (Applaudissements.)