M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour explication de vote.
Mme Hélène Lipietz. Certes, les écologistes sont opposés presque par principe aux ordonnances, mais il faut parfois savoir céder sur certains principes…
Toutefois, en l’espèce, nous ne pouvons pas les accepter. Madame la garde des sceaux, le texte relatif au droit des contrats est quasiment prêt. Pourquoi, dès lors, ne pas l’avoir déposé en même temps que le présent projet de loi ? Nous aurions déjà gagné un peu de temps.
Ensuite, où se trouve l’urgence ? Il y va peut-être de la compétitivité économique de la France de moderniser notre droit des contrats, mais sommes-nous vraiment à douze mois près ? Je n’en suis pas sûre.
De même que nous avons supprimé l’article 3, que vous souhaitez rétablir, nous avons supprimé, dans l’article 16, le délai dans lequel le Gouvernement aurait été autorisé à prendre une ordonnance dans le domaine du droit des contrats. Les délais que vous nous demandez de vous accorder concernant les autres ordonnances courent jusqu'à douze mois. Pour une réforme aussi considérable que celle dont nous parlons en cet instant, nous aurions sans doute dû vous accorder au moins cette durée.
Profitons donc de ce même laps de temps pour travailler sur les contrats, qui animent la vie civile de nos concitoyens, sujet qui ressort du Parlement.
Telle est la raison pour laquelle les membres du groupe écologiste ne pourront pas voter l’amendement n° 39.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. En ayant supprimé l’article 3, la commission des lois ne s’inscrit pas dans un rapport de confiance ou de défiance à l’égard du Gouvernement. Ne nous méprenons pas ! Le législateur ne se limite pas à exprimer simplement sa confiance ou sa défiance. Certains points importants, et celui qui est en cause ici en est un, nécessitent un débat. En raison de l’urgence et du besoin impérieux auquel ils répondent, ils doivent être soumis au Parlement, lequel pourra, en tant que de besoin, présenter des amendements. Il est important de le rappeler : le législateur doit pouvoir faire ce pour quoi il a été élu : légiférer !
M. Jean-Jacques Hyest. C’est cela ! Écrire la loi !
Mme Cécile Cukierman. Je ne sais, madame la garde des sceaux, si vous êtes appelée à faire les frais de l’annonce, par le Président de la République lors de ses vœux, d’un plus grand recours aux ordonnances. Mais l’excès d’ordonnances nuit à la démocratie, ce que nous ne pouvons pas accepter.
Le droit des contrats, qu’aborde l’article 3, comprend le devoir d’information, la relation entre les banques et leurs clients, etc. Permettez-moi de penser que le législateur, en ce domaine, non seulement a son mot à dire, mais aussi doit étudier les implications et les conséquences des mesures prises.
L’ensemble des membres du groupe CRC, à l’instar du vote émis par ceux d’entre eux qui appartiennent à la commission des lois, voteront contre le présent amendement, indépendamment de toute marque de confiance ou de défiance à l’égard du Gouvernement. Nous ne nous trouvons pas dans ce registre. La seule question en cause est : faisons-nous, oui ou non, la loi ?
M. Jean-Jacques Hyest. Voilà ! C’est cela !
Mme Cécile Cukierman. Nous pensons que la démocratie impose que le pouvoir de faire la loi revienne au Parlement. Nous y sommes attachés et nous restons vigilants. Raison supplémentaire pour voter contre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René Garrec, pour explication de vote.
M. René Garrec. J’ai souhaité prendre la parole après les deux éminents collègues qui m’ont succédé à la présidence de la commission des lois, parce que j’ai été confronté au même problème lorsque j’occupais encore ces fonctions.
Parfois, le Gouvernement a besoin d’agir rapidement, et les ordonnances sont faites pour cela. Si l’on oublie Portalis, madame la garde des sceaux, et que l’on se contente d’observer les travaux préalables à la Constitution, on constate l’invention suivante : le droit se fait avec les assemblées, et en période de crise ou de difficultés, le Gouvernement, qui doit pouvoir agir vite, peut le faire par ordonnances. Celles-ci ne prennent valeur législative qu’après avoir été soumises au Parlement. À défaut, elles sont réglementaires.
Là se trouvent les véritables bases de notre réflexion.
Il est normal, pour tout garde des sceaux actif et dynamique – et l’on ne vous reprochera pas de ne pas l’être ! –, de considérer que le processus est trop lent, qu’il faut l’accélérer et de prendre l’initiative. C’est ce que vous avez fait, madame la garde des sceaux. Vous disposez donc de tous les éléments pour rédiger un projet de loi et le soumettre au Parlement. Si le travail a été bien fait, comme vous l’avez dit – il ne me viendrait pas une seconde à l’idée d’en douter –, alors nous revenons à la norme !
Sur un problème de fond comme celui qui est en cause, légiférer par ordonnances n’est conforme ni à l’esprit des travaux de la Constituante ni à celui de la Constitution elle-même.
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Abordons d’abord les sujets pratiques touchant à l’agenda parlementaire. Le président de la commission des lois engage le Sénat tout entier à réserver au Gouvernement une fenêtre dans l’ordre du jour. Il se trouve que le Parlement est bicaméral et qu’un projet de loi ne devient loi qu’à l’issue de la navette parlementaire.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Cela vaut pour tous les textes !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Absolument !
Un autre élément est valable pour tous les textes : l’engorgement objectif de l’agenda parlementaire.
Je vous rappelle, madame Lipietz, que j’ai présenté des textes, et non des moindres, en conseil de ministres aux mois d’avril et de mai 2013 ; ils sont prêts et n’attendent plus que d’être débattus au Parlement. Or je ne dispose toujours pas de date de débat ! Je citerai à titre d’exemple la collégialité de l’instruction, prévue dans la loi de 2007, laquelle devait entrer en vigueur le 1er janvier dernier. J’ai donc été contrainte de déposer un amendement au projet de loi de finances pour 2014 tendant au report d’un an de l’application de la loi précitée. C’est absurde ! Je veux bien qu’il s’agisse d’une contingence, mais je pourrais vous citer d’autres exemples de textes prêts qui connaissent le même sort ! Alors concernant celui dont nous parlons et qui n’est même pas encore prêt…
Vous vous demandez, madame Cukierman, si je fais les frais des déclarations du Président de la République. Ce n’est pas le cas ! Le Président de la République n’a pas fait de déclarations fantaisistes ; il a pris des engagements devant les Français et il en décline la traduction.
Le présent projet de loi a été présenté au début du mois de décembre en conseil des ministres. Il n’est donc pas la conséquence des orientations annoncées à l’occasion des vœux présidentiels. Il faut laisser le temps pour que les dispositions mûrissent, qu’elles soient traduites par écrit, puis qu’elles soient soumises au Conseil d’État…
Il ne s’agit ni d’un choix de fantaisie ni d’un choix de défiance vis-à-vis du Parlement. Le Président de la République est un ancien parlementaire !
Mmes Éliane Assassi et Cécile Cukierman. C’est un choix politique, que nous ne partageons pas !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous faisons le choix politique d’apporter des solutions rapides et efficaces, chaque fois que cela est possible, aux problèmes quotidiens des Français.
Telle est la réalité, qu’on l’assume, qu’on en tienne compte ou non !
Les points pratiques ne doivent pas être déterminants, mais ils peuvent avoir des conséquences qui sont, elles, déterminantes. Je serai ravie d’avoir tort au final si l’on constate que le Parlement n’autorise pas le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance sur le droit des contrats et le régime des obligations et que le processus parlementaire arrive à terme.
M. Jean-Jacques Hyest. On fera tout pour qu’il en soit ainsi !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Tout le monde aura oublié que j’avais eu tort – ma vanité n’en souffrira pas ! –, et les choses auront été faites pour le bien des Français, même s’ils auront été contraints de se débrouiller, pendant ce laps de temps, avec le droit des contrats et le régime des obligations tel qu’il est,…
M. Jean-Jacques Hyest. Pas complètement !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. … comprenant une part d’insécurité juridique en raison de son imprévisibilité. Et ce, même si la France continuera à pâtir aux niveaux européen et international du caractère relativement obsolète – j’exagère peut-être un peu ! – de ce droit dû à une part d’imprévision et d’insécurité juridique.
Vous le savez, une bataille d’influence se livre en Europe notamment entre notre droit continental – la force de notre droit tel qu’il est écrit et tel qu’il est conçu – et ce que l’on appelle la common law, ayant sa propre influence, sa conception des services et de certaines professions. Cette bataille est quotidienne et permanente. Notre droit des contrats n’inspire plus personne dans le monde – ceux qui s’en sont inspirés ont déjà franchi les étapes suivantes ! –, ne nous étonnons donc pas de perdre de l’influence. Pourtant, la France a longtemps et largement rayonné par son droit, aussi bien en Europe que dans le monde.
Voilà pour les conséquences.
Permettez-moi maintenant de répondre aux observations qui ont été formulées.
Monsieur Hyest, concernant le droit de la filiation,…
M. Jean-Jacques Hyest. Nous avons tiré les conséquences des principes déterminés par la loi !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je veux vous rappeler la substance des ordonnances relatives à la filiation. Je vous livre là non pas mon appréciation personnelle, mais le texte exact : « Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à modifier par ordonnance les dispositions du code civil relatives à la filiation afin de tirer les conséquences de l’égalité de statut entre les enfants quelles que soient les conditions de leur naissance ; …
M. Jean-Jacques Hyest. C’est ce que j’ai dit !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. … unifier les conditions d’établissement de la filiation maternelle ; »…
M. Jean-Jacques Hyest. Oui !
M. Jean-Jacques Hyest. C’étaient les conséquences !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je poursuis ma citation : « préciser les conditions de constatation de la possession d’état ; harmoniser le régime procédural de l’établissement judiciaire de la filiation ; sécuriser le lien de filiation ; préserver l’enfant des conflits de filiation ; simplifier et harmoniser le régime des actions en contestation, notamment en en modifiant les titulaires et les délais. » Ces points sont substantiels !
M. Jean-Jacques Hyest. J’étais contre !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Certes, vous étiez peut-être contre, mais le fait est que les ordonnances ont procédé à ces modifications substantielles entre la filiation que l’on disait « naturelle » et la filiation légitime. Voilà ce qui a été fait. Vous avez dit que les modifications concernant la filiation étaient mineures, marginales, résiduelles. Je ne fais là que répondre aux arguments qui m’ont été opposés.
M. Jean-Jacques Hyest. Je n’ai pas dit cela ! C’étaient les conséquences !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Mais ces modifications étaient substantielles.
Par ailleurs, M. le rapporteur nous a expliqué que le code civil organise la vie. Certes, mais la vie des contrats est très désorganisée. C’est précisément pour cette raison que nous vous proposons de l’organiser.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. Elle est désorganisée depuis deux siècles !
M. Jean-Jacques Hyest. Nous aussi, nous proposons de le faire !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Elle est même désorganisée depuis 210 ans. Or nous persistons à vivre dans la désorganisation !
M. Jean-Jacques Hyest. Il ne faut pas exagérer !
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. Cette désorganisation dure depuis deux siècles !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Oui, mais les règles datent de 210 ans ! Et elles n’ont pas été débattues démocratiquement.
Par ailleurs, rien dans mon propos ne vous permet de prétendre que j’ai laissé entendre que M. Anziani serait aujourd'hui favorable au recours aux ordonnances. J’ai simplement indiqué que des parlementaires ont participé à des groupes de travail. C’est leur rendre hommage que de citer leurs noms ! J’aurais pu ne pas les désigner nommément. J’ai simplement dit que ces parlementaires éminents avaient participé à un travail de qualité, en profondeur, en substance et en temps, mais je n’ai jamais affirmé que cela justifiait de légiférer par ordonnance. Ne me faites donc pas de procès d’intention. Du reste, je crois avoir démontré en plusieurs circonstances, y compris par inadvertance, le respect que j’éprouve pour les parlementaires !
M. Philippe Kaltenbach. C’est vrai !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vous avez comparé le présent projet de loi avec les lois d’habilitation Warsmann.
M. Jean-Jacques Hyest. Pas moi !
M. Jean-Jacques Hyest. Je n’en ai pas pensé le meilleur !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Moi non plus ! Et c’est bien pour cette raison que je fais la comparaison !
M. Jean-Jacques Hyest. D’ailleurs, nous les avons pas mal critiquées au Sénat !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. En effet, et ces lois nous sont extrêmement défavorables, car elles sont largement illisibles. Je ne formule pas cette remarque à l’égard du député Jean-Luc Warsmann, mais force est de constater l’illisibilité de ces textes.
En l’espèce, vous ne pouvez pas nous faire le même procès. Nous vous soumettons un projet de loi d’habilitation très écrit, très précis. Vous devriez en convenir, monsieur le président de la commission des lois, ce qui ne mettrait pas en cause vos désaccords de fond. Pour ce qui concerne le droit des contrats et le régime des obligations en particulier, les questions à caractère politique que vous avez évoquées y sont traitées.
M. Jean-Jacques Hyest. On n’en sait rien !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Mais si ! Sur quoi portent-elles ? Sur la bonne foi, l’imprévision, la violence économique, la résiliation unilatérale, la clause abusive, c'est-à-dire les grands principes directeurs. Tout cela est écrit !
Par ailleurs, je rappelle que nous avons soumis les projets d’ordonnance à la commission des lois. Il nous reste l’étape de la concertation. Toute personne qui s’est penchée sur le contenu de ces travaux doit reconnaître la pertinence de légiférer par ordonnances.
Vous avez évoqué le rapport Catala-Terré, un rapport de très grande qualité, rendu public.
M. Jean-Jacques Hyest. Je l’ai lu !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je ne me permettrai pas de parler au nom de M. Catala, mais je puis vous dire que le professeur Terré est tout à fait favorable à notre projet.
M. Jean-Jacques Hyest. C’est à nous qu’il revient de légiférer !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Certes, il n’a pas à se prononcer – c’est au Parlement de le faire ! –, mais il a compris notre démarche.
Enfin, l’un d’entre vous a cité le professeur Carbonnier. Pour ma part, j’aime beaucoup aussi cette autre citation : « l’État est submergé par son droit. » Cela laisse entendre que les ordonnances ne sont pas les ennemies de la loi !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Ce sont les ennemies du Parlement !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. C’est bien au Parlement que le Gouvernement demande l’autorisation de légiférer par ordonnances ! On ne passe pas outre son autorisation. Si le Parlement n’adopte pas le projet de loi visant à autoriser le Gouvernement à légiférer par ordonnances, le Gouvernement ne pourra y recourir.
M. Jean-Jacques Hyest. Eh bien voilà !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Mais oui ! C’est donc un procès sans fondement, sans base que vous intentez au Gouvernement. Nous sommes bien là devant le Parlement…
M. Jean-Jacques Hyest. C’est simple ! C’est la question !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. On m’indique que nous discutons de cette question depuis fort longtemps, mais j’estime que le sujet mérite que l’on s’y attarde et d’être débattu.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Il l’a été !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Mais pardonnez-moi de vous dire que le Gouvernement a quelques arguments à faire valoir.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Bien sûr !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je vous en remercie, monsieur le président de la commission, ainsi que de votre hospitalité !
Pour conclure, je citerai le doyen Beignier, qui, après avoir examiné un certain nombre de textes pris par ordonnances, ayant apporté des modifications substantielles au droit alors en vigueur, écrivait : « rénover le code civil en usant du même procédé que ceux qui en furent les pères lointains, Colbert, Daguesseau, ou les rédacteurs, Portalis, Tronchet, à savoir les ordonnances royales ou les lois consulaires votées par un Corps législatif muet, est-ce bien une hérésie ? »
M. Jean-Jacques Hyest. Qui est-ce ? Je ne le connais pas !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 123 :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 347 |
Pour l’adoption | 1 |
Contre | 346 |
Le Sénat n'a pas adopté.
En conséquence, l’article 3 demeure supprimé.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Madame la garde des sceaux, vous avez évoqué l’organisation pratique de nos travaux ; vous avez tout à fait raison de prendre en compte cette donnée.
Pour que chacun soit bien informé, je rappelle que ce projet de loi, approuvé par le conseil des ministres et soumis par le Gouvernement au Sénat, a été inscrit à notre ordre du jour, avant-hier et aujourd’hui pour six heures, prélevées sur deux espaces de temps réservé au groupe socialiste.
En d’autres termes, le groupe socialiste a choisi de mettre en débat ce projet de loi plutôt que l’une des nombreuses propositions de loi préparées en son sein – nous sommes quelques-uns à avoir des propositions de loi importantes en attente. Si le groupe socialiste n’avait pas ainsi donné la priorité à un texte du Gouvernement, il est probable, madame la garde des sceaux, que le projet de loi n’aurait pas été voté.
Chaque espace de temps réservé aux groupes politiques est de quatre heures : telle est la règle dans notre assemblée – elle a été appliquée ce matin, comme hier et comme à chaque fois qu’il y a lieu. C’est pourquoi nous avons jusqu’à vingt heures quinze pour examiner le projet de loi.
Si, à ce moment-là, nous ne l’avons pas adopté, il faudra soit que le Gouvernement l’inscrive à l’ordre du jour qui lui est réservé, ce qu’il est libre de faire – il ne l’a pas fait d’ici au 28 février prochain –, soit que nous attendions le prochain espace réservé au groupe socialiste, à condition que celui-ci décide la réinscription du texte.
Madame la garde des sceaux, vous le voyez : il arrive aussi que le Parlement et ses groupes s’efforcent d’aider le Gouvernement à faire adopter ses projets de loi !
M. le président. Je confirme que, en application du règlement du Sénat, la séance sera levée à vingt heures quinze précises.
Article 4
I. – (Non modifié) L’article 2279 du code civil est abrogé.
II. – (Non modifié) Le I est applicable dans les îles Wallis et Futuna.
III. – (Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 7 rectifié, présenté par MM. Mézard, Mazars, Baylet, Bertrand, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Titre II
DISPOSITIONS RELATIVES AUX PROCÉDURES CIVILES D’EXÉCUTION
Article 5
(Non modifié)
I. – L’ordonnance n° 2011–1895 du 19 décembre 2011 relative à la partie législative du code des procédures civiles d’exécution est ratifiée.
II. – Aux articles L. 152–1 et L. 152–2 du code des procédures civiles d’exécution et au II de l’article L. 151 A du livre des procédures fiscales, les mots : « , porteur d’un titre exécutoire, » sont supprimés.
III. – Au dernier alinéa de l’article L. 221–3 du code des procédures civiles et de l’exécution, le mot : « versement » est remplacé par le mot : « paiement ».
IV. – Les articles L. 622–1 à L. 622–3 du même code deviennent les articles L. 621–5 à L. 621–7 et après les mots : « à Saint-Barthélemy » sont ajoutés les mots : « et à Saint-Martin ».
V. – Les dispositions des II et III sont applicables dans les îles Wallis et Futuna. Elles ne le sont pas dans les Terres australes et antarctiques françaises.
M. le président. L'amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Mézard, Mazars, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 27, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
IV. – Le titre II du livre VI du même code est ainsi modifié :
1° Les articles L. 622–1 à L. 622–3 deviennent les articles L. 621–5 à L. 621–7 ;
2° Les chapitres II et III sont supprimés et le chapitre Ier devient un chapitre unique qui comprend les articles L. 621–1 à L. 621–7 ;
3° Aux articles L. 621–5, L. 621–6 et L. 621–7, après les mots : « à Saint-Barthélemy », sont insérés les mots : « et à Saint-Martin ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. Cet amendement est purement rédactionnel, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
I. – Le code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 143–9 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « à la folle enchère » sont remplacés par les mots : « sur réitération des enchères » ;
b) Au second alinéa, les mots : « Le fol enchérisseur » et « sur folle enchère » sont respectivement remplacés par les mots : « L’adjudicataire défaillant » et « sur réitération des enchères » ;
2° Au troisième alinéa de l’article L. 321–14, les mots : « sur folle enchère de l’adjudicataire défaillant » sont remplacés par les mots : « sur réitération des enchères ».
II. – Aux premier et second alinéas de l’article 685 et au dernier alinéa de l’article 733 du code général des impôts, les mots : « à la folle enchère » sont remplacés par les mots : « sur réitération des enchères ».
III. – (Non modifié) À l’article L. 3211–12 du code général de la propriété des personnes publiques, les mots : « il n’est pas tenu à la folle enchère » sont remplacés par les mots : « il n’y a pas lieu à réitération des enchères ».
IV. – (Non modifié) Les dispositions du 1° du I sont applicables dans les îles Wallis et Futuna. – (Adopté.)
TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES AU TRIBUNAL DES CONFLITS
Article 7
(Non modifié)
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance les mesures, relevant du domaine de la loi, nécessaires pour :
1° Modifier la composition et mettre fin à la présidence du Tribunal des conflits par le garde des sceaux, ministre de la justice et déterminer, en conséquence, les règles applicables en cas de partage des voix en son sein ;
2° Étendre les attributions du Tribunal des conflits afin de mieux résoudre, dans le souci d’une bonne administration de la justice, les difficultés pouvant résulter de la dualité des ordres de juridiction et, en particulier, étendre la compétence du Tribunal aux demandes d’indemnisation pour durée excessive de jugement des procédures s’étant déroulées devant les deux ordres de juridiction ;
3° Régler selon une procédure simplifiée des affaires dont la solution s’impose ;
4° Regrouper et organiser les dispositions applicables au Tribunal des conflits et à la procédure de conflit en apportant au droit en vigueur les modifications nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes rassemblés et en abrogeant les dispositions devenues inadéquates ou sans objet.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 35, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – L’intitulé de la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d’État est ainsi rédigé :
« Loi du 24 mai 1872 relative au Tribunal des conflits »
II. – Les articles 1er à 18 de la loi du 24 mai 1872 précitée sont rétablis dans la rédaction suivante :
« Art. 1er. – Les difficultés de compétence entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire sont réglées par un Tribunal des conflits composé en nombre égal de membres du Conseil d’État et de la Cour de cassation.
« Art. 2. – Dans sa formation ordinaire, le Tribunal des conflits comprend :
« 1° quatre conseillers d’État en service ordinaire élus par l’assemblée générale du Conseil d’État ;
« 2° quatre magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation élus par les magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation ;
« 3° deux suppléants élus, respectivement, l’un, par l’assemblée générale du Conseil d’État parmi les conseillers d’État en service ordinaire et les maîtres des requêtes, l’autre, par l’assemblée générale des magistrats du siège de la Cour de cassation parmi les conseillers hors hiérarchie et référendaires.
« Les membres du Tribunal des conflits sont soumis à réélection tous les trois ans et rééligibles deux fois. Lorsqu’un membre titulaire ou suppléant cesse définitivement d’exercer ses fonctions, il est procédé à son remplacement jusqu’à la fin du mandat en cours dans les conditions prévues aux 1°, 2° ou 3° ci-dessus, selon le cas.
« Art. 3. – Les membres mentionnés aux 1° et 2°, de l’article 2 choisissent parmi eux, pour trois ans, un président issu alternativement du Conseil d’État et de la Cour de cassation, au scrutin secret à la majorité des voix.
« En cas d’empêchement provisoire du président, le Tribunal est présidé par le membre le plus ancien appartenant au même ordre de juridiction.
« En cas de cessation définitive des fonctions du président, le Tribunal, alors complété comme il est dit au dernier alinéa de l’article 2, est présidé par un membre du même ordre, choisi dans les conditions du dernier alinéa de l’article 2, pour la durée du mandat restant à courir.
« Art. 4. – Deux membres du Conseil d’État, élus par l’assemblée générale du Conseil d’État parmi les rapporteurs publics, et deux membres du parquet général de la Cour de cassation, élus par l’assemblée générale des magistrats hors hiérarchie du parquet général parmi eux, sont chargés des fonctions de commissaire du gouvernement.
« Ils sont élus pour trois ans et rééligibles deux fois.
« Le commissaire du gouvernement expose publiquement et en toute indépendance son opinion sur les questions que présentent à juger les affaires dont le Tribunal des conflits est saisi.
« Art. 5. – Sous réserve des dispositions de l’article 6, le Tribunal des conflits ne peut délibérer que si cinq membres au moins sont présents.
« Art. 6. – Dans le cas où, après une seconde délibération, les membres du Tribunal n’ont pu se départager, l’affaire est examinée en formation élargie dans les conditions précisées par décret en Conseil d’État. Cette formation est composée, outre les membres mentionnés aux 1° et 2° de l’article 2, de deux conseillers d’État en service ordinaire et deux magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation élus comme il est dit aux 1° et 2° de l’article 2, lors de l’élection des membres de la formation ordinaire.
« Les règles de suppléance sont applicables.
« Le Tribunal ne peut siéger que si tous les membres sont présents ou suppléés.
« Art. 7. – Les débats ont lieu en audience publique après une instruction contradictoire.
« Art. 8. – Le délibéré des juges est secret.
« Art. 9. – Les décisions sont rendues au nom du Peuple français. Elles sont motivées et comportent le nom des membres qui en ont délibéré.
« Elles sont rendues publiquement.
« Art. 10. – Lorsque la solution de la question soumise au Tribunal des conflits s’impose avec évidence, le président, conjointement avec le membre le plus ancien appartenant à l’autre ordre de juridiction, peut statuer par voie d’ordonnance dans les cas prévus par décret en Conseil d’État.
« Art. 11. – Les décisions du Tribunal des conflits s’imposent à toutes les juridictions de l’ordre judiciaire et de l’ordre administratif.
« Art. 12. – Le Tribunal des conflits règle la difficulté de compétence entre les deux ordres de juridiction, dans les conditions prévues par décret en Conseil d’État :
« 1°) lorsque le préfet a élevé le conflit dans le cas prévu à l’article 13 ;
« 2°) lorsque les juridictions de l’un et l’autre ordre se sont respectivement déclarées incompétentes pour connaître d’un litige ayant le même objet ;
« 3°) lorsqu’une juridiction de l’un ou l’autre ordre lui a renvoyé la question de compétence soulevée dans un litige.
« Art. 13. – Lorsque le préfet estime que la connaissance d’un litige ou d’une question préjudicielle portée devant une juridiction de l’ordre judiciaire relève de la compétence de la juridiction administrative, il peut, alors même que l’administration ne serait pas en cause, demander à la juridiction saisie de décliner sa compétence.
« Art. 14. – Le conflit d'attribution entre les juridictions judiciaires et administratives ne peut être élevé en matière pénale.
« Il peut être élevé en toute autre matière, sauf sur l’action civile dans les cas mentionnés à l’article 136 du code de procédure pénale.
« Art. 15. – Le Tribunal des conflits peut être saisi des décisions définitives rendues par les juridictions administratives et les juridictions judiciaires dans les instances introduites devant les deux ordres de juridiction, pour des litiges portant sur le même objet, lorsqu’elles présentent une contrariété conduisant à un déni de justice.
« Sur les litiges qui lui sont ainsi déférés, le Tribunal des conflits juge au fond, à l’égard de toutes les parties en cause. Ses décisions ne sont susceptibles d’aucun recours.
« Art. 16. – Le Tribunal des conflits est seul compétent pour connaître d’une action en indemnisation du préjudice découlant d’une durée totale excessive des procédures afférentes à un même litige et conduites entre les mêmes parties devant les juridictions des deux ordres en raison des règles de compétence applicables et, le cas échéant, devant lui.
« Art. 17. – Les modalités de désignation prévues à l’article 2 entrent en vigueur lors du premier renouvellement des membres du Tribunal des conflits suivant l’entrée en vigueur de la présente loi. Jusqu’à ce renouvellement, les fonctions de président sont exercées par le vice-président précédemment élu en application de l’article 25 de la loi du 24 mai 1872.
« Dans les deux mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, il est procédé aux élections prévues au premier alinéa de l’article 6 pour la durée restant à courir du mandat des membres du Tribunal.
« Dans le même délai et pour la même durée, il est procédé à la désignation des commissaires du gouvernement selon les modalités prévues à l’article 4.
« Art. 18. – La présente loi, qui s’applique à tout le territoire de la République, entrera en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État et au plus tard le 1er janvier 2015. »
III. – Sont abrogés :
- l’ordonnance du 1er juin 1828 relative aux conflits d'attribution entre les tribunaux et l'autorité administrative ;
- l’ordonnance du 12 mars 1831 modifiant celle du 2 février 1831 sur la publicité des séances du Conseil d'État et le mode de décision des affaires contentieuses et des conflits ;
- la loi du 4 février 1850 portant sur l'organisation du Tribunal des conflits ;
- le titre IV de la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d'État, à l’exception de son article 25 qui est abrogé à compter du premier renouvellement des membres du Tribunal des conflits suivant l’entrée en vigueur de la présente loi ;
- la loi du 20 avril 1932 ouvrant un recours devant le Tribunal des conflits contre les décisions définitives rendues par les tribunaux judiciaires et les tribunaux administratifs lorsqu'elles présentent contrariété aboutissant à un déni de justice.
IV. – À compter de l’entrée en vigueur de la loi sur le Tribunal des conflits résultant du I du présent article, les mots : « vice-président du Tribunal des conflits » figurant à l’article 23 de la loi n° 91–647 du 10 juillet 1991 sont remplacés par les mots : « président du Tribunal des conflits ».
La parole est à Mme la garde des sceaux.