Mme la présidente. L'amendement n° 600, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° La première phrase du troisième alinéa de l’article L. 521-1 est complétée par les mots : « sous réserve de respecter le principe d’ancrage territorial des activités agricoles » ;
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Une grande partie des coopératives agricoles conservent une dimension locale ou régionale, mais, de plus en plus, elles se tournent vers un développement international.
Ainsi, des études sur cette question ont montré que l’inscription géographique a tendance à s’atténuer pour l’activité de transformation, la recherche et développement, ainsi que la commercialisation, dont le coût des outils demande des regroupements à grande échelle.
Pour maintenir une bonne position sur les marchés agroalimentaires sur lesquels elles sont en concurrence avec les grandes multinationales, les coopératives ont choisi de faire évoluer leurs structures. Elles ont ainsi permis l’émergence de grands groupes industriels.
Dans le même temps, cette mutation a accru la mise en concurrence des agriculteurs adhérents des coopératives, entre eux mais aussi à l’égard d’autres sources d’approvisionnement.
Dans de nombreux cas, cette évolution stratégique a abouti à un déplacement du pouvoir au sein des coopératives au profit des équipes dirigeantes – conseil d’administration et direction – et au détriment des adhérents, et donc à une réappropriation des marges dans la coopérative et non au niveau des exploitations agricoles adhérentes.
Les coopératives de France rappellent l’importance de l’ancrage territorial. D’une part, historiquement, par son projet et par son statut, une coopérative est durablement liée à un territoire géographique donné, à la fois en raison de la nature de son activité, de la provenance des matières premières ainsi que des capitaux apportés par les agriculteurs adhérents sur ce territoire. D’autre part, les coopératives contribuent à maintenir sur les territoires des bassins d’emplois importants, principalement en zone rurale. Elles permettent ainsi aux salariés de conserver une proximité géographique avec leur lieu de travail.
Ancrées sur leur territoire, les coopératives ne sont pas délocalisables, du moins en théorie. La tendance à la fusion et à la multiplication de filiales éloignent les coopératives de leurs valeurs sociales.
Par cet amendement, dans la logique du nouveau modèle agricole que nous voulons mettre en place, nous proposons de rappeler la nécessité de respecter l’ancrage territorial des activités agricoles de la coopérative.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Mon cher collègue, la coopération est une belle et grande idée, qui reste aujourd’hui pleinement d’actualité.
Les hommes et les femmes qui l’ont conçue cherchaient non pas à réaliser toujours plus de profit, mais simplement à permettre à des agriculteurs travaillant sur des exploitations de tailles différentes de se regrouper au sein d’une structure, notamment afin d’instaurer entre eux un mécanisme de péréquation. C’est un bel exemple de réussite dans le domaine de l’économie sociale et solidaire.
À ce propos, je rappelle que Benoît Hamon a récemment présenté devant le Sénat un projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, sur lequel, du reste, notre collègue Marc Daunis, qui en a été le rapporteur, a fourni un travail remarquable. Eh bien ! Pour la plupart de nos territoires ruraux – j’ai eu l’occasion de participer à un colloque sur le sujet –, l’économie sociale et solidaire est une chance exceptionnelle.
C’est grâce à l’économie sociale et solidaire, en particulier grâce aux coopératives, qu’il reste encore des petits exploitants en France. Et l’on sait très bien que, à l’origine, la création de ces coopératives s’est faite sur un ancrage territorial.
Je souscris donc à l’esprit de votre amendement, mon cher collègue ; pour autant, je ne puis donner un avis favorable, et je vous demande de bien vouloir le retirer, principalement pour deux raisons.
Premièrement, le principe d’ancrage territorial que vous mentionnez n’est pas défini. M. le ministre nous mettait en garde contre les lois bavardes, ce qui sera le cas si nous ne savons pas comment définir l’ancrage territorial de la coopérative. Faut-il retenir le critère du siège ? Mais n’est-ce pas trop réducteur ? Quid des filiales ?
Deuxièmement, on sait très bien, même si on peut le déplorer, que de grandes coopératives se développent pour être présentes sur le marché mondial et, heureusement, réussissent à l’export et maintiennent ainsi positive la balance du commerce extérieur agricole. On ne peut pas brider ces coopératives et les réduire à leur ancrage territorial d’origine.
Si donc je partage la philosophie de votre amendement, mon cher collègue, je ne peux pas être favorable à votre proposition, parce qu’il faut laisser ces coopératives gagner des parts de marché, car chaque fois qu’une coopérative gagne une part de marché, c’est un agriculteur qui gagne.
D’ailleurs, parmi les décisions d’équilibre que nous avons prises en commission, nous avons souhaité supprimer la clause miroir. Pourquoi ? Tout simplement pour ne pas brider les coopératives, pour leur permettre de se développer.
Je ne me lasse pas de le répéter : les adhérents des coopératives sont les agriculteurs qui en assurent l’approvisionnement, eux et personne d’autre, et donc, quand la coopérative gagne de l’argent, c’est bon pour les agriculteurs, et quand la coopérative en perd, un système de péréquation permet de limiter les dommages pour les sociétaires.
Monsieur Le Cam, nous sommes tous d’accord avec vous, et sur toutes les travées, pour reconnaître l’importance des coopératives, mais cette notion d’ancrage territorial est trop imprécise et risque de brider leur essor à l’international.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Monsieur Le Cam, vous avez avancé l’idée que la filialisation d’une partie des activités des coopératives pouvait quelquefois les éloigner de leur vocation originelle. Mais inscrire dans la loi le principe d’un ancrage avec le territoire, ce serait répéter dans la loi ce qui figure déjà de toute façon dans les statuts des coopératives !
Cela étant, la filialisation est un réel sujet, soulevé d’ailleurs en 1990-1991 par le monde coopératif et par le gouvernement de l’époque avec la volonté de faire redescendre les dividendes des filiales vers les coopérateurs. La stratégie du monde coopératif consistait alors à dire : « Donnez-nous les moyens d’aller le plus loin possible dans la transformation et la recherche de la valeur ajoutée pour que le monde paysan puisse peser économiquement. »
Je ne peux évidemment pas régler tous les grands problèmes économiques et politiques à l’arrière-plan de ces problématiques. D’un côté, le monde agricole nourrissait une véritable stratégie de conquête de la valeur ajoutée de la transformation, mais, en même temps, les stratégies économiques des filiales pouvaient se révéler contraires à ces projets. C’est là un sujet extrêmement délicat : car où s’arrête la conquête de la valeur ajoutée ? Est-ce que, pour la production agricole, elle doit être plafonnée à la première ou à la deuxième transformation ? Ce sont des sujets qui mériteraient plus qu’un simple amendement.
Je partage donc l’avis de M. le rapporteur et je vous invite à retirer votre amendement, monsieur Le Cam.
Mme la présidente. Monsieur Le Cam, l'amendement n° 600 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Non, je le retire, madame la présidente, tout en étant satisfait qu’il suscite le débat, car les enjeux et les risques sont bien réels pour les producteurs de certaines régions.
Mme la présidente. L'amendement n° 600 est retiré.
Mes chers collègues, je vous signale que l’amendement n° 310 rectifié a été retiré avant la séance.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 311 rectifié bis est présenté par M. César, Mme Lamure, MM. Pointereau, Sido, Hérisson et Houel, Mme Masson-Maret, MM. Billard, Hyest, Couderc et Milon, Mme Mélot, M. Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 777 est présenté par M. Guillaume, au nom de la commission des affaires économiques.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 12
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
2° bis L'article L. 522-3 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par les mots : « , notamment les salariés en activité » ;
b) Au troisième alinéa, les mots : « d'une voix » sont remplacés par les mots : « d'au moins une voix, comptabilisées en tant que voix de salariés en activité, » ;
La parole est à M. Gérard César, pour défendre l’amendement n° 311 rectifié bis.
M. Gérard César. Permettez-moi d’un mot de revenir sur l’amendement n° 310 rectifié : si je l’ai retiré, c’est parce qu’il est satisfait par l’amendement déposé par M. le rapporteur à la suite du débat que nous avons eu en commission des affaires économiques. La clause miroir disparaissant, mon amendement n’avait plus d’objet.
M. Didier Guillaume, rapporteur. Merci, monsieur César.
M. Gérard César. Concernant l’amendement n° 311 rectifié bis, le FCPE, le Fonds commun de placement d’entreprise, bien qu’il comporte un certain nombre d’avantages, souffre toutefois d’une dernière source de blocage du fait d’une représentativité restreinte des salariés de la coopérative - adhérents du FCPE - en assemblée générale de la coopérative.
Il me paraît important de souligner le rôle des salariés dans l’entreprise, qui doivent donc y être mieux représentés qu’ils ne le sont, ce qui est normal, en particulier dans les coopératives.
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, rapporteur, pour défendre l’amendement n° 777.
M. Didier Guillaume, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux salariés d’une coopérative bénéficiant d’un FCPE d’être représentés au sein du conseil d'administration de la coopérative par plus d’une voix.
Il est en effet important que les salariés aient aussi voix au chapitre dans la gouvernance des coopératives. C’est d’ailleurs une demande émanant des coopératives elles-mêmes.
Cet amendement est identique à celui de M. César, auquel je ne peux donc qu’être favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 311 rectifié bis et 777.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. L'amendement n° 602, présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les représentants des salariés sont représentés dans l’organe chargé de l’administration de la coopérative avec voix délibérative. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous regrettons que le projet de loi ne propose pas de mesures concrètes en faveur des salariés du secteur agricole et agroalimentaire. Nous avions formulé des propositions, mais elles sont tombées sous le coup de l’article 40 de la Constitution.
Ces salariés participent à la production agricole à hauteur de 35 % environ et les industries agroalimentaires constituent le premier secteur industriel en matière d’emploi.
Dans les coopératives agricoles, des progrès pourraient être réalisés qui permettent à la fois une meilleure représentativité des salariés et une meilleure protection sociale.
Dans le mode de gestion actuel des coopératives agricoles, les « décisions touchant à l’organisation collective de la coopérative sont débattues démocratiquement au sein du conseil d’administration, lequel est composé d’agriculteurs entretenant des contacts directs avec les salariés ».
Comme vous le savez, parmi les associés non coopérateurs d’une coopérative peuvent figurer les salariés en activité de ladite société, mais seulement un cinquième des voix est accordé aux associés non coopérateurs, dont les salariés, en assemblée générale.
Par notre amendement, nous vous demandons de reconnaître ces salariés, leur rôle essentiel dans les filières agricoles et de permettre aux représentants des salariés de participer à l’organe chargé de l’administration de la coopérative avec voix délibérative.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Mon cher collègue, il me semble que votre amendement est satisfait et M. le ministre va vous expliquer de suite pourquoi. (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Le Sénat vient d’adopter un amendement permettant aux salariés actifs d’être représentés au conseil d’administration de leur coopérative avec voix délibérative. Or, je suppose que « l’organe chargé de l’administration de la coopérative » mentionné dans votre amendement désigne le conseil d’administration. L’amendement précédent est donc plus précis que le vôtre et le satisfait.
Je partage pleinement l’esprit de votre amendement, monsieur Le Cam. D’ailleurs, je connais une coopérative viticole extrêmement dynamique dans le Gers dont le président, le directeur et le conseil d’administration souhaitaient même ouvrir aux salariés la possibilité de devenir coopérateurs. (M. Gérard Le Cam sourit.)
M. Gérard César. Associés-coopérateurs ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Tout à fait ! La question a été évoquée lors de la discussion du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, mais, pour des raisons liées au statut du coopérateur, avec les parts sociales, je ne suis pas sûr – cela mérite vérification - que la possibilité ait été finalement introduite. Pour autant, ces idées méritent que nous les fassions cheminer. (M. Gérard Le Cam acquiesce.)
Mme la présidente. Monsieur Le Cam, l'amendement n° 602 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 602 est retiré.
L'amendement n° 811, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… - L'article L. 551-7 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 551-7. - Dans les conditions prévues par l'article 165 du règlement (UE) n°1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés agricoles, le ministre chargé de l'agriculture peut décider que les opérateurs économiques individuels ou les groupements d'opérateurs non membres d'une organisation de producteurs ou association d'organisations de producteurs sont redevables à l'organisation des contributions financières mentionnées par cet article. »
… - L'article L. 551-8 du même code est abrogé.
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. Cet amendement vise à mettre l'article L. 551-7 du code rural et de la pêche maritime en conformité avec le règlement de l’UE n° 1308/2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles.
Cet amendement supprime également les dispositions permettant aux agents des organisations de producteurs et associations d'organisations de producteurs assermentés de rechercher et constater les manquements aux règles étendues au titre de l'article L. 551-6 du même code.
Il s’agit donc simplement d’une mise en conformité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. La commission est favorable à cette mise en conformité.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 4 bis (précédemment réservés)
Mme la présidente. Nous en revenons aux deux amendements précédemment réservés.
Leurs auteurs s’étant rapprochés pour proposer une rédaction commune, je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 405 rectifié bis est présenté par Mme Férat, M. Détraigne et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants-UC.
L’amendement n° 485 rectifié ter est présenté par MM. Pointereau, Pillet, Mayet et Pinton.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 417-11 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le huitième alinéa n’est pas applicable aux baux à métayage conclus sur des parcelles plantées en vigne. »
La parole est à Mme Françoise Férat, pour présenter cette rédaction identique.
Mme Françoise Férat. Il s’agit, vous vous en souvenez, de la suppression du droit de conversion automatique.
Prenant en compte les précieuses informations fournies par M. le rapporteur et par M. le ministre, M. Pointereau et moi-même avons rectifié nos amendements. Cette nouvelle rédaction permet d’éviter que la disposition soit applicable à l’ensemble des terres agricoles sans exception.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Même avis favorable, surtout compte tenu de la rapidité avec laquelle la rectification a été effectuée !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 405 rectifié bis et 485 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4 bis.
Articles additionnels après l’article 6
Mme la présidente. L’amendement n° 812, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 611-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est insérée la référence : « I. – » ;
2° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« II. – Le fait de ne pas respecter les obligations prévues au I constitue une pratique commerciale trompeuse au sens de la sous-section 1 de la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de la consommation. »
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. La loi relative à la consommation ayant créé les magasins de producteurs, il convient donc de mettre en conformité le code rural avec ces nouvelles dispositions législatives. Il s’agit de faire en sorte que les agriculteurs puissent s’organiser pour ouvrir des magasins où ils vendront leurs produits, mais il faut également prévoir des contrôles et des sanctions éventuelles.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Avis favorable.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6.
L’amendement n° 79 rectifié bis, présenté par M. Revet, Mmes Morin-Desailly, Sittler et Des Esgaulx, MM. G. Bailly, Bécot et Beaumont et Mme Boog, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Tout personnel salarié d’une coopérative d’utilisation de matériel agricole ou d’un agriculteur adhérent à cette coopérative d’utilisation de matériel agricole peut indifféremment conduire des matériels appartenant à la coopérative d’utilisation de matériel agricole ou à l’agriculteur adhérent. La coopérative d’utilisation de matériel agricole est alors considérée comme un groupement d’employeurs coopératifs.
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Cet amendement est court, mais très important.
Mme Nathalie Goulet. Oui !
M. Charles Revet. Je reviens ainsi sur nos réflexions d’hier relatives aux coopératives d’utilisation de matériel agricole, les CUMA, et aux locaux construits pour elles.
Les matériels stockés par les CUMA sont achetés soit à titre individuel par les agriculteurs, soit en commun. Il s’agit en quelque sorte de la continuité de l’exploitation. Les bâtiments construits par les CUMA devraient donc avoir le même statut que s’ils étaient construits par un agriculteur sur son exploitation.
Pour avoir été confronté à cette situation, j’ajoute que, lorsqu’une coopérative construit un silo de stockage, de blé ou autre, il s’agit bien de la continuité de l’exploitation. Or, aujourd’hui, l’obtention du permis de construire est de plus en plus difficile. J’ai connu des cas où l’on avait même songé à installer des silos dans des zones industrielles, tout à fait inadaptées, y compris au regard de la sécurité.
Pour en revenir au présent amendement, mais toujours sur cette question de continuité d’exploitation, monsieur le ministre, vous savez qu’un agriculteur ou un salarié travaillant sur une exploitation n’ont pas besoin du permis poids lourd pour conduire un tracteur. Mais, dès lors que l’on considère qu’il n’y a pas continuité d’exploitation, les personnels doivent être titulaires de ce permis poids lourd, pour conduire le même tracteur ! C’est une aberration et je propose d’y remédier avec cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Monsieur Revet, en toute amitié, je vais vous opposer un argument que je vous promets d’utiliser pour la dernière fois. (Sourires.) En novembre 2005, vous aviez déposé le même amendement, sur lequel M. César, alors rapporteur, avait émis un avis défavorable, en invoquant les mêmes raisons que celles que je vais vous opposer aujourd’hui.
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. André Reichardt. Ce n’est pas plus sympathique pour autant !
M. Didier Guillaume, rapporteur. C’est qu’il ne s’agit pas d’une position politique. En effet, cet amendement est superfétatoire, car l’état du droit donne satisfaction à ses auteurs.
D’après les informations dont je dispose, l’article L.127-1 du code du travail permettait déjà à une CUMA d’exercer l’activité de groupement d’employeurs. Gérard César ne vous avait pas répondu autre chose. Je vous invite à vérifier par vous-même dans le code du travail : vous avez satisfaction !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Non seulement ce que vous demandez est déjà possible, monsieur le sénateur, mais j’ajoute que, en décembre 2013, nous avons renforcé la possibilité pour les CUMA d’être groupements d’employeurs - il me semble que c’est bien l’objectif que vous visez -, puisque nous avons porté de 30 % à 49 % le pourcentage de leur masse salariale pouvant être mis à disposition de leurs membres. Un salarié peut donc sans aucun problème conduire le tracteur d’une CUMA. Nous vous ferons parvenir les références législatives pertinentes.
Mais, pour ce qui est de la différence entre le prolongement de l’exploitation agricole et l’exploitation agricole, je précise que la CUMA est une coopérative de services qui prolonge l’exploitation agricole en regroupant le matériel agricole. Pour l’instant, il n’est pas possible qu’un prolongement d’exploitation agricole investisse dans des bâtiments. Nous avons étendu cette possibilité aux aires de lavage pour les épandeurs, mais ce n’est pas encore possible juridiquement pour la construction de bâtiments.
Vous avez pris l’exemple des coopératives de stockage céréalières : il ne s’agit pas d’un prolongement de l’exploitation ; ce sont des coopératives créées avec des parts revenant à chaque exploitant.
La CUMA a pour objet l’utilisation de matériel agricole pour réaliser des travaux agricoles, voire maintenant pour la production d’énergies renouvelables, le déchiquetage du bois, etc. D’ailleurs, 50 % à 60 % des GIEE s’appuient sur des CUMA existantes.
La CUMA n’est pas assimilable à une exploitation agricole, c’est un prolongement de l’exploitation destiné à fournir un service spécifique, ce qui ne lui permet pas de construire des bâtiments. Pour le rendre possible, il faudrait changer le statut juridique des CUMA.
Dans les entretiens que j’ai eus avec les responsables des CUMA, nous avons évoqué la possibilité de franchir une étape nouvelle, et de passer des CUMA aux coopératives agricoles de production, pour étendre les possibilités d’organisation collective – ils travaillent d’ailleurs sur cette question. J’ajoute que les GIEE vont ouvrir des perspectives de mutualisation encore plus importantes, concernant non seulement le matériel agricole, mais aussi les objectifs environnementaux, les conditions de commercialisation, et j’en passe.
Je le répète, la CUMA est un prolongement de l’exploitation agricole, pas une exploitation agricole.
Mme la présidente. Monsieur Revet, l’amendement n° 79 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Charles Revet. Si M. le rapporteur et M. le ministre me disent que j’ai obtenu satisfaction, c’est parfait !
Je souhaite cependant obtenir une précision, monsieur le ministre, parce que vous savez que les débats parlementaires sont utilisés par le juge pour interpréter la loi. Pouvez-vous me confirmer que les personnels qui travaillent au sein de la CUMA pour le compte de l’ensemble des agriculteurs peuvent conduire les tracteurs sans être titulaires du permis poids lourd pour les travaux agricoles ?
M. Charles Revet. Je retire donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 79 rectifié bis est retiré.
Article 7
I. – (Non modifié) L’intitulé du titre III du livre VI du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé : « Contrats et accords interprofessionnels portant sur des produits agricoles ou alimentaires ».
II. – Le chapitre Ier du même titre est ainsi modifié :
A. – L’article L. 631-24 est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« I. – La cession des produits agricoles destinés à la revente ou à la transformation peut être subordonnée :
« 1° À la conclusion de contrats de vente écrits entre producteurs et acheteurs, ou entre opérateurs économiques mentionnés au premier alinéa de l’article L. 551-1, propriétaires de la marchandise, et acheteurs ;
« 2° À la proposition de contrats écrits par les acheteurs aux producteurs ou opérateurs économiques mentionnés au premier alinéa du même article L. 551-1, propriétaires de la marchandise. » ;
b) La première phrase du deuxième alinéa est ainsi modifiée :
– le mot : « critères » est remplacé par les mots : « prix ou aux critères » ;
– après le mot : « paiement », sont insérés les mots : « , aux règles applicables en cas de force majeure » ;
c) À la fin du a, les références : « , L. 632-4 et L. 632-12 » sont remplacées par la référence : « et L. 632-4 » ;
d) L’avant-dernier alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« L’accord interprofessionnel mentionné au a ou le décret en Conseil d’État mentionné au b fixe, par produit ou catégorie de produits, par catégorie d’acheteurs et, le cas échéant, par mode de commercialisation, la durée minimale du contrat.
« Sauf lorsque le producteur y renonce par écrit, la durée minimale du contrat ainsi prévue ne peut excéder cinq ans. Lorsque le contrat porte sur un produit dont le producteur a engagé la production depuis moins de cinq ans, l’acheteur ne peut rompre le contrat avant le terme de la période minimale, sauf inexécution de celui-ci par le producteur ou cas de force majeure, et un préavis doit être prévu en cas de non-renouvellement du contrat. L’accord interprofessionnel ou le décret peut prévoir que la durée minimale qu’il fixe est allongée, dans la limite de deux années supplémentaires, pour les contrats portant sur un produit dont le producteur a engagé la production depuis moins de cinq ans.
« Est considérée comme un producteur qui a engagé une production depuis moins de cinq ans, la personne physique ou morale qui s’est installée ou a démarré une nouvelle production au cours de cette période. Il en est de même d’une société agricole qui intègre un nouvel associé répondant aux conditions fixées par le présent alinéa et qui détient au moins 10 % de son capital social.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application de l’alinéa précédent dans le cas de la cession d’un contrat déjà conclu, à un producteur ayant engagé la production depuis moins de cinq ans. Il précise également les produits considérés comme relevant de la même production pour l’application du présent article. » ;
e) À la première phrase du dernier alinéa, la référence : « à l’avant-dernier alinéa » est remplacée par les références : « aux huitième à dixième alinéas » ;
f) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’accord interprofessionnel mentionné au a ou le décret en Conseil d’État mentionné au b peut également rendre obligatoire la transmission par l’acheteur à l’organisation de producteurs des informations relatives au volume et aux caractéristiques des produits livrés par les membres de l’organisation de producteurs. » ;
2° Le II est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, après le mot : « intérieur », sont insérés les mots : « ou les règles ou décisions prévues par ces statuts ou en découlant » et le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;
b) Au dernier alinéa, les mots : « peut saisir un médiateur dont les compétences sont fixées » sont remplacés par les mots : « peut saisir un médiateur nommé » ;
3° Le deuxième alinéa du III est ainsi rédigé :
« Il n’est pas applicable aux ventes directes au consommateur, aux cessions réalisées au bénéfice des organisations caritatives pour la préparation de repas destinés aux personnes défavorisées, ni aux cessions à prix ferme de produits agricoles sur les carreaux affectés aux producteurs situés au sein des marchés d’intérêts nationaux définis à l’article L. 761-1 du code de commerce ou sur d’autres marchés physiques de gros de produits agricoles. » ;
A bis (nouveau). – Après l’article L. 631-24, il est inséré un article L. 631-24-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 631-24-1. - Le ministre chargé de l’agriculture peut établir des contrats types par produit pour la vente à terme de produits agricoles destinés à la transformation industrielle.
« Le contrat de vente à terme de produits agricoles est un engagement ferme de livraison d’une quantité spécifiée d’un produit à une date et selon un mode de fixation du prix, qui sont convenus entre le producteur et l’acheteur dès la conclusion du contrat.
« Le contrat type comporte les clauses relatives à la quantité objet de la transaction, à la durée du contrat et à la détermination du prix de vente du produit à l’échéance. Le contenu effectif de ces clauses relève de la négociation entre les parties concernées. » ;
B. – (Non modifié) L’article L. 631-25 est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, après le mot : « Lorsque », sont insérés les mots : « la proposition ou » ;
2° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – ou de ne pas transmettre les informations prévues au quatrième alinéa du I de l’article L. 631-24. » ;
C. – Sont ajoutées des sections 3 et 4 ainsi rédigées :
« Section 3
« Le médiateur des relations commerciales agricoles
« Art. L. 631-27. – Un médiateur des relations commerciales agricoles est nommé par décret.
« Il peut être saisi de tout litige relatif à la conclusion ou à l’exécution d’un contrat ayant pour objet la vente ou la livraison de produits agricoles, ou la vente ou la livraison de produits alimentaires destinés à la revente ou à la transformation, y compris les litiges liés à la renégociation du prix prévue à l’article L. 441-8 du code de commerce. Il prend toute initiative de nature à favoriser la résolution amiable du litige entre parties.
« Il peut faire toutes recommandations sur l’évolution de la réglementation relative aux relations contractuelles mentionnées au deuxième alinéa du présent article, qu’il transmet aux ministres chargés de l’économie et de l’agriculture.
« Il peut également émettre un avis sur toute question transversale relative aux relations contractuelles, à la demande d’une organisation interprofessionnelle ou d’une organisation professionnelle ou syndicale. Lorsque la demande d’avis entre dans les attributions de la commission mentionnée à l’article L. 440-1 du code de commerce, il saisit cette commission.
« Sur demande conjointe des ministres chargés de l’économie et de l’agriculture, il peut émettre des recommandations sur les modalités de partage équitable de la valeur ajoutée entre les étapes de production, de transformation, de commercialisation et de distribution des produits agricoles et alimentaires.
« Tous ces avis et recommandations sont circonstanciés et précisent la prise en compte, le cas échéant, des modes de production, de transformation et de commercialisation de produits sous signes officiels de qualité et notamment issus de l’Agriculture Biologique.
« Il peut saisir la commission d’examen des pratiques commerciales prévue au même article L. 440-1. »
« Section 4
« Le règlement des litiges
« Art. L. 631-28. – (Non modifié) Tout litige entre professionnels relatif à l’exécution d’un contrat ayant pour objet la vente de produits agricoles ou alimentaires doit faire l’objet d’une procédure de médiation préalablement à toute saisine du juge, sauf si le contrat en dispose autrement ou en cas de recours à l’arbitrage.
« Toutefois, sauf recours à l’arbitrage, le recours à la médiation s’impose en cas de litige relatif à la renégociation du prix en application de l’article L. 441-8 du code de commerce.
« Le médiateur est choisi par les parties au contrat. La durée de la mission de médiation est fixée par le médiateur. Il peut renouveler la mission de médiation ou y mettre fin avant l’expiration du délai qu’il a fixé, d’office ou à la demande d’une des parties. Le chapitre Ier du titre II de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative est applicable à cette médiation.
« Art. L. 631-29. – (Non modifié) Les accords interprofessionnels étendus mentionnés au a du I de l’article L. 631-24 et au deuxième alinéa de l’article L. 632-2-1 ou les décrets mentionnés au b du I de l’article L. 631-24 peuvent préciser les clauses du contrat pour lesquelles un recours à l’arbitrage est recommandé en cas de litiges. »
III. – L’article L. 551-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces organismes peuvent également, s’ils bénéficient d’un mandat délivré à cette fin, assurer en justice la défense des droits qu’un ou plusieurs de leurs membres tirent d’un contrat de vente de produits agricoles. Une organisation de producteurs peut agir en justice dans l’intérêt de plusieurs de ses membres pour les litiges mettant en cause un même acheteur et portant sur l’application d’une même clause. Elle peut également, dans les mêmes conditions, les représenter dans le cadre d’une procédure de médiation. »