M. Jean Desessard. C’est vrai !
Mme Hélène Masson-Maret. Je suis ravie de vous l’entendre dire, cher collègue !
Du côté des employeurs, on reproche à la loi de ne pas traiter différemment les grèves qui émanent de problèmes propres à l’entreprise de celles qui répondent à un mot d’ordre national et ne peuvent donc être satisfaites par cette dernière – ce distinguo est très important. La grève qui s’ouvre ce soir relève de la seconde catégorie.
L’un des principaux mérites de ce rapport est de souligner que l’application de la loi présente une réelle faiblesse quant aux processus de dialogue en amont. Ses auteurs soulignent, au titre des recommandations, qu’il faut privilégier une meilleure application de la loi à l’ajout de nouvelles contraintes à l’exercice du droit de grève. Ils préconisent un « approfondissement du dialogue social », actuellement insuffisamment développé en dehors des situations de conflit. La grève qui doit s’ouvrir ce soir nous en offre – je le répète – une très bonne illustration.
À ce titre, répétons que le dialogue social doit être une démarche permanente et non l’ultime recours lorsque le conflit devient inévitable.
Enfin, monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous poser deux questions.
Premièrement, de quels moyens le Gouvernement va-t-il se doter pour assurer l’application uniforme de la prochaine réforme sur tout le territoire ?
Deuxièmement, quand et comment le ministère des transports compte-t-il recenser les PTA et les PIU pour obtenir, ce qui me paraît tout à fait indispensable, un bilan exhaustif ?
En conclusion, on peut considérer que ce rapport suit pleinement l’esprit de la loi originelle. On peut également relever la volonté des sénateurs d’insister sur le fait que, aujourd’hui, dans une société en mutation, imposer par la force ou la contrainte l’interdiction de cesser le travail est moins fructueux que de renforcer le dialogue social, afin que les conflits soient traités en amont.
Toutefois, à mon sens, le plus important, c’est que ce rapport met un terme aux postures purement politiciennes des débats de 2007. Certains esprits mal avisés avaient alors tenté de réduire ce débat à une opposition entre défenseurs et pourfendeurs du droit de grève.
Ce rapport est donc le symbole d’une discussion qui arrive aujourd’hui à maturité, et dans le cadre de laquelle chacun s’efforce d’apporter une contribution.
En un mot, ce rapport peut être accueilli favorablement en ce qu’il valorise la gestion des conflits, un concept qui est tout à fait actuel et qui s’inscrit pleinement dans le management de toute entreprise au XXIe siècle. Les dirigeants devraient plus souvent s’en inspirer pour désamorcer les conflits sociaux débouchant sur des grèves !
Cet éclairage est-il suffisant ? Il est difficile de trancher. Comme l’a dit Vincent Capo-Canellas, il faut relever que la SNCF assure un dialogue social. Quoi qu’il en soit, il s’agit là d’une avancée, même si elle ne peut occulter les autres problèmes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Nicolas Sarkozy a entamé son mandat présidentiel en 2007 en faisant adopter une loi hautement symbolique, abusivement intitulée « continuité du service public dans les transports de voyageurs ». Il a clos ce même mandat en faisant voter par le Parlement, en mars 2012, une proposition de loi renforçant ce texte et élargissant son périmètre d’application aux transports aériens.
À l’époque, tous ceux qui siègent sur les travées de la gauche de cet hémicycle s’étaient opposés à ces lois attentatoires au droit de grève. (M. Michel Teston acquiesce.)
En effet, nous considérions, à juste titre, qu’elles symbolisaient parfaitement l’esprit de cette mandature : un mépris des corps intermédiaires et une volonté d’étouffer par la force la colère sociale face aux politiques ultralibérales menées alors.
L’élection présidentielle et les élections législatives de 2012 ont mis un terme à cette orientation politique et à cette méthode, en plaçant à la tête de l’État une nouvelle majorité, censée renouer un dialogue respectueux et constructif avec les organisations syndicales.
Pour cette raison, nous avons déposé une proposition de loi dès le 9 avril 2013 visant à abroger, au sein de ces textes, les dispositions que nous jugeons attentatoires au droit de grève, tout en suivant attentivement les travaux menés par la mission sur l’état d’application de la loi de 2007, qui élabore un bilan nécessaire et porteur d’évolutions législatives.
Premièrement, et c’est fondamental, nous partageons avec les rapporteurs l’idée que le niveau de qualité du service public n’est pas lié à l’exercice plus ou moins important du droit de grève.
Ainsi, les grèves constituent, cela a déjà été dit, une part infime des dysfonctionnements dans le secteur des transports : environ 3 %, selon le rapport. Ce qui détériore quotidiennement la qualité du service public de transport, c’est bien l’application du dogme de la concurrence, le manque de moyens humains et la faiblesse des investissements publics. Au fond, c’est le renoncement même à toute idée de service public.
Au lieu de traiter des maux du service public, les promoteurs de ces lois démagogiques se sont contentés de détourner la colère des usagers en les opposants aux salariés, sans répondre à leurs attentes légitimes en matière de service public.
Une seule disposition aurait permis d’améliorer le service public : l’article 12 de la loi de 2007, issu d’un amendement de notre groupe, qui impose l’incorporation de clauses sociales et environnementales dans les appels d’offres. Malheureusement, elle n’a été appliquée qu’à la marge, alors même que les rapporteurs ont souligné son importance dans la lutte contre le recours à la sous-traitance.
Je rappelle, à ce titre, que, durant l’examen de cette loi, nous avions également proposé que « les groupes de transport public ne [puissent] sous-traiter l’exercice des missions de service public qu’ils se voient confier sans avoir procédé auparavant à une négociation de nature à faire appliquer les conditions sociales les plus favorables ».
Malheureusement, cet amendement n’avait pu être adopté. Nous estimons pourtant que cette proposition constitue toujours une piste de travail intéressante en vue d’améliorer la qualité du service et, par conséquent, de diminuer la conflictualité au sein des entreprises de transport.
Par ailleurs, la réforme ferroviaire sera soumise au Parlement d’ici peu. Nous estimons qu’elle devrait être l’occasion de poser la question essentielle de la modernisation du service public et de son financement.
Le deuxième aspect de ce rapport concerne les conditions réelles d’exercice du droit de grève aujourd’hui dans les entreprises de transport. Je rappelle à cet égard que nous avons toujours désigné comme objectif réel de ces lois la volonté de rendre plus difficile l’exercice de ce droit, reconnu par la Constitution.
Nous souscrivons, là encore, aux préconisations du rapport, dont les auteurs proposent la suppression des dispositions, introduites par la loi Diard, relatives à la déclaration individuelle de reprise du travail, qui complexifient et rigidifient les rapports entre salariés et employeurs. Nous prenons donc acte, positivement, des déclarations du secrétaire d’État aux transports, qui constituent un premier pas dans ce sens.
Nous souhaitons aller plus loin, en supprimant purement et simplement toute obligation de déclaration faite aux salariés grévistes. En effet, celle-ci n’a qu’un objet : individualiser le rapport des salariés à un mouvement collectif, c'est-à-dire les rendre plus vulnérables aux pressions patronales.
Il en va de même pour la consultation, laissée à l’appréciation de l’employeur au bout de huit jours de mouvement social. Cette mesure reste d’ailleurs difficile à appliquer, et les organisations patronales elles-mêmes ont fait part aux rapporteurs de la difficulté d’obtenir les déclarations, au point que ce sont parfois les syndicats eux-mêmes qui ont dû faire ces décomptes.
Par ailleurs, comme le souligne le rapport, ces procédés ont contribué à judiciariser les rapports sociaux au sein de l’entreprise. Cela, à l’évidence, ne va pas dans le sens d’une amélioration du dialogue social, ce qui était pourtant l’objectif affiché.
Troisièmement, concernant la création des plans de transport adapté et des plans d’information des usagers, force est de constater que l’application de la loi est très inégale et que les indicateurs manquent pour juger de l’intérêt de ces dispositions. Je regrette que l’obligation de consultation des institutions représentatives du personnel sur ces plans, avant leur approbation par l’autorité organisatrice, n’ait pas été respectée.
Enfin, alors que les promoteurs de cette loi ont argué de l’instauration d’une information précise et fiable sur la continuité du service, cette obligation n’est assortie d’aucune sanction légale. Dans ces conditions, aucun progrès n’a donc pu être réalisé en la matière.
Le Gouvernement avait également prétendu que cette loi permettrait d’améliorer le dialogue social. Le rapport confirme pourtant qu’il est impossible d’affirmer que l’instauration d’une sorte de préavis du préavis par le dispositif d’alarme sociale a permis d’enrayer la conflictualité. En effet, si les demandes de consultation immédiate ont significativement augmenté, les dirigeants des entreprises continuent d’attendre de constater l’état réel des rapports de force avant d’engager toute négociation.
Or, si le code du travail précise d’ores et déjà que « pendant la durée du préavis, les parties intéressées sont tenues de négocier », cette obligation est souvent méconnue par les dirigeants d’entreprise. Allonger la durée du temps de négociation apparaît donc inutile si rien ne les contraint à se présenter à la table de négociation avec des propositions.
À ce titre, les auteurs du rapport notent très utilement que la procédure de prévention des conflits se résume souvent à la tenue d’une unique réunion entre direction et organisations syndicales, ce qui, à nos yeux, n’est absolument pas suffisant.
Le rapport a également démontré que ces dispositions sont totalement inopérantes lorsque la grève répond à un appel national ou européen interprofessionnel, ce qui représente pourtant la plus grande source de conflictualité. On l’a vu au sujet des grands projets touchant aux retraites et à la protection sociale.
Je me permets alors de formuler une idée simple : la clef de la paix sociale réside dans l’affirmation du choix de politiques progressistes. Cesser de porter atteinte aux acquis sociaux et aux statuts et d’inquiéter les salariés quant à leur avenir est le moyen le plus sûr de réduire la conflictualité au sein des entreprises, notamment dans le secteur des transports.
Au regard des éléments de ce rapport, nous restons persuadés que, afin de restaurer la confiance avec les partenaires sociaux, il convient d’abroger les dispositions de ces lois dont les finalités tendent plutôt à la limitation d’un droit constitutionnel. Nous demandons donc officiellement au Gouvernement d’inscrire à l’ordre du jour la proposition de loi que nous avons déposée en ce sens.
Je terminerai, mes chers collègues, en vous rappelant que le droit de grève est le droit ultime pour les salariés dans la défense de leurs droits et de leur outil de travail. Je souhaite aussi rappeler que les grèves menées par les ouvriers ont été, historiquement, la voie la plus sûre pour obtenir les plus belles avancées sociales pour l’ensemble de nos concitoyens.
Plus que jamais, le droit de grève est un droit non seulement constitutionnel mais fondamental pour notre démocratie. Il nous appartient de le protéger ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. Jean Desessard. Voilà un vrai discours communiste !
M. le président. La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi du 21 août 2007 constitue l’une des premières lois emblématiques du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Elle témoigne d’une vision clivante, voire populiste, de la société,…
Mme Isabelle Pasquet, corapporteur. Eh oui !
M. Michel Teston. … selon laquelle, en faisant valoir leurs droits, certains citoyens en prendraient d’autres en otage.
Après des effets d’annonce souvent un peu démagogiques, le texte, présenté en procédure accélérée, a été largement édulcoré par rapport aux intentions affichées initialement par Nicolas Sarkozy.
M. Vincent Capo-Canellas. Tant mieux !
M. Jean Desessard. Exact !
M. Michel Teston. Ainsi, le texte adopté comporte une disposition phare qui vise à permettre la mise en œuvre d’un service garanti en cas de grève ou de perturbation prévisible, et défini par les autorités organisatrices de transport en fonction des spécificités locales.
Pour cela, deux mesures ont été mises en place : premièrement, l’obligation, pour les salariés, de déclarer quarante-huit heures avant le début d’une grève, leur éventuelle intention d’y participer, et, deuxièmement, la possibilité, après huit jours de grève, d’organiser, sur l’initiative de l’employeur ou d’une organisation syndicale, un vote indicatif à bulletin secret sur la poursuite du mouvement. Les autres dispositions du texte ont prévu l’encadrement de l’organisation de la négociation collective préalable à la grève et l’information des usagers.
Lors du débat parlementaire sur ce texte, je me suis opposé à son adoption, comme d'ailleurs les autres membres du groupe socialiste, considérant que, sous couvert de la volonté affichée d’améliorer le dialogue social, cette loi n’avait pour objectif que de limiter l’exercice du droit de grève.
J’ai d’ailleurs souligné, à l’époque, que la mise en place d’un service minimum revenait à privilégier un droit par rapport à un autre, en l’occurrence la continuité du service public par rapport au droit de grève, ainsi que l’avait très bien démontré, en son temps, le rapport Mandelkern de 2004.
En outre, sur le plan organisationnel, la mise en place d’un service minimum nécessiterait, selon moi, de procéder à des réquisitions de personnel. En effet, pour assurer ce service, il serait probablement nécessaire de disposer du concours de 80 % du personnel. Cela étant, mon opposition à ce texte aurait été encore plus forte s’il avait autorisé le recours à cette procédure !
Or, si cette loi n’a pas imposé la réquisition, cette idée est restée très présente chez certains parlementaires de la majorité présidentielle de cette époque.
M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. C’est vrai !
M. Michel Teston. J’en veux pour preuve le dépôt, en février 2009, par M. Éric Ciotti, d’une proposition de loi visant à mettre en place un droit de réquisition, qui, heureusement, n’a pas été adoptée.
En somme, avec cette loi, il s’est agi de trouver le coupable idéal des nombreux retards que subissent au quotidien les usagers des transports. Les agents du service public qui ont ainsi été montrés du doigt. Pourtant, ce sont les choix d’investissement effectués par les gouvernements précédents, conduisant à trop privilégier le développement du réseau à grande vitesse au détriment de la rénovation des lignes existantes, qui expliquent en grande partie les dysfonctionnements.
C’est pourquoi, à la suite de la remise des conclusions de la commission Mobilité 21, présidée par Philippe Duron, le gouvernement Ayrault a décidé de privilégier les trains du quotidien, marquant ainsi un tournant en matière de priorités pour les investissements publics dans le domaine des transports.
Ce choix me paraît responsable : il s’agit non pas de renoncer à compléter le réseau ferroviaire à grande vitesse, mais de le développer en fonction des capacités contributives. C’est bien désormais l’amélioration des transports du quotidien qui est mise en premier.
S’appuyant sur une logique qui pourrait être qualifiée de répressive et d’accusatrice, la loi du 21 août 2007 ne pouvait que produire de médiocres effets. C’est d’ailleurs ce que montre le bilan de cette loi, effectué par Isabelle Pasquet et Marc Laménie.
En effet, même si elle repose sur un équilibre complexe, qui a permis de développer progressivement des habitudes de négociation collective, cette loi n’a convaincu personne, ni les syndicats ni les employeurs, et a même parfois suscité des dysfonctionnements dans la continuité du service public. Par exemple, le mécanisme d’encadrement de la grève prévu par cette loi a contribué à crisper les positions avec, d’un côté, des salariés dissuadés de faire grève, et, de l’autre, des employeurs prétendant subir des recours abusifs à la négociation collective préalable.
Au final, quel est le résultat pour l’usager ? Si cette loi a incontestablement amélioré l’information du public sur les circulations prévisibles en cas de perturbation du trafic, les éléments d’analyse manquent pour établir précisément une corrélation entre l’application du texte et l’évolution de la conflictualité dans les entreprises de transport. En effet, les motifs des grèves ne sont pas toujours liés à des problèmes internes aux entreprises : des mots d’ordre nationaux sont parfois à l’origine des mobilisations.
Par ailleurs, le manque d’éléments d’analyse n’a pas permis de récolter des informations suffisantes pour faire ressortir la part respective des incidents techniques quotidiens et des mouvements de grève dans la gestion des transports publics ; on sait toutefois que le mauvais état de certaines lignes conduit régulièrement à des retards. Du reste, si l’on demandait aujourd’hui aux utilisateurs des transports publics si cette loi a eu un effet favorable sur leurs déplacements journaliers, il n’est pas impossible qu’ils répondraient négativement.
C’est pourquoi la préconisation du rapport concernant le développement d’outils statistiques harmonisés du suivi de la loi me semble pertinente. Il en est de même de la recommandation de renforcer le dialogue social dans les entreprises de transport, y compris en dehors des périodes conflictuelles : c’est bien le meilleur service à rendre aux usagers !
Si la loi doit fixer les conditions d’exercice du droit de grève, elle ne saurait tout fixer. Une large place doit être laissée à la concertation et à la négociation dans chaque entreprise.
Comme le proposent aussi les deux rapporteurs, il est logique de sensibiliser les autorités organisatrices des transports, à la définition de dessertes prioritaires ainsi qu’à l’approbation de périmètres de transport adapté et de plans d’information aux usagers.
Enfin, il convient de ne pas oublier qu’une politique d’investissement à un haut niveau sur le réseau dit « classique » est probablement le meilleur moyen de réduire sensiblement les retards subis au quotidien, et donc d’assurer une meilleure continuité du service public dans les transports terrestres.
Dans cette optique, le fait de doter l’AFITF de moyens suffisants est aussi au cœur de ce débat.
C’est, à mon sens, par la conjugaison de ces différentes préconisations que l’on atteindra le fragile mais nécessaire équilibre entre la garantie de la continuité du service public et la protection du droit de grève, principe de valeur constitutionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC, du groupe écologiste et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens, à mon tour, à féliciter Isabelle Pasquet et Marc Laménie pour la qualité de leur rapport d’information concernant l’application des dispositions de la loi du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.
J’ai, bien entendu, pris note des contributions apportées par les groupes parlementaires sur ce sujet important.
Le rapport d’information permet d’engager l’indispensable débat sur les attentes de nos concitoyens quant à la qualité du service public, à la continuité du service public – c’est là le principe même des services publics –, et, dans le même temps, sur les conditions d’exercice du droit de grève. Il est également important de veiller à ce que, en amont de l’exercice de ce droit, un dialogue social de qualité puisse être instauré.
C’est précisément de cette qualité que dépend la relation entre employeur et employés, celle-ci devant permettre d’éviter toute situation de blocage. Il faut faire en sorte que les antagonismes de situations ne deviennent pas des antagonismes entre les personnes, afin que les usagers n’aient pas à regretter que les salariés des entreprises de transport défendent leurs revendications, lesquelles sont souvent légitimes. J’ai rarement rencontré des personnes exerçant leur droit de grève sans raison sérieuse…
Après sept années d’application, quel est le bilan de la loi de 2007 ?
J’ai entendu des positions diverses : Mme Masson-Maret appelle à une réhabilitation de la loi, tandis que Mme Schurch en réclame l’abrogation. On voit là tout l’éventail des appréciations auxquelles cette loi peut donner lieu ! Il est sans doute nécessaire d’en actualiser les dispositions. De fait, le contexte n’est plus le même que celui dans lequel cette loi a été annoncée, puis discutée : force est de reconnaître que les conditions n’étaient pas, alors, réunies pour que se déroule un débat des plus sereins ! M. Hue a rappelé les effets de manche des défenseurs de ce texte, qui ont eu pour effet d’empêcher durablement le débat sur le cœur même du dispositif, au profit de postures politiques.
Le cœur du dispositif, c’est la prévention et la résolution de situations conflictuelles par la négociation préalable. Est-ce suffisant ? Des améliorations doivent-elles être envisagées ? Vous avez, les uns et les autres, dans vos interventions, avancé quelques propositions qui pourront être utilement reprises par la suite.
Par ailleurs, la loi prévoit une information des voyageurs, dans le respect des droits de l’usager. La vertu du service public est d’assurer la mise en place de plans de transport adapté et d’information des usagers en cas de perturbation prévisible des transports publics.
On le voit, il s’agit d’un équilibre précaire.
S’agissant de la prévention et de la résolution des conflits, la RATP, dès 1996, et la SNCF, dès 2003, avaient chacune conclu un protocole d’accord prévoyant un dispositif d’alerte sociale, similaire à celui qui a été introduit par la loi.
M. Jean Desessard. Eh oui !
M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État. Cela veut dire que, parfois, il n’est pas nécessaire d’avoir recours à la loi.
M. Jean Desessard. Exactement !
M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État. Il est, au contraire, de la responsabilité de chacun des acteurs concernés de promouvoir des dispositifs propres à encourager le dialogue et la mise en place de mesures précontentieuses.
Comme le souligne le rapport d’information, la conclusion de tels accords relevait, avant l’entrée en vigueur de cette loi, d’un simple engagement moral des signataires, qui n’avait qu’un caractère facultatif. Toutes les entreprises n’en étaient donc pas dotées. Or, je le répète, ce dispositif de négociation préalable est, à mon sens, essentiel, et j’ai cru comprendre que M. Desessard partageait cette analyse.
Oui, le dialogue doit être la clef de voûte des rapports sociaux entre les dirigeants et les salariés.
Par la voix de Jacques-Bernard Magner, M. Assouline a indiqué qu’il était difficile de mesurer l’impact de la loi sur la conflictualité. On peut malgré tout tenter de le faire.
La loi impose désormais le dialogue dans toutes les entreprises, et c’est une bonne chose. Il convient de développer tous les cadres susceptibles de favoriser ce dialogue, qui doit être conforté.
Des chiffres existent. Mme Pasquet ne les juge pas pertinents. M. Hue considère, pour sa part, qu’ils ne permettent pas de créditer la loi d’une amélioration sensible de la situation.
Il reste que certains chiffres peuvent donner lieu à une interprétation plus nuancée. Ainsi, s’agissant de la RATP, entre 2004 et 2007, il y a eu entre 173 et 367 préavis de grève, tandis que la fourchette s’est située entre 36 et 59 après 2007. C’est aussi une réalité. C’est pourquoi je rejoins certains orateurs quant à la nécessité d’y voir plus clair sur les effets de cette loi.
Je l’ai dit, la loi impose par ailleurs qu’une information sur les circulations prévisibles soit mise en place en amont des perturbations annoncées du trafic. Cette information, tout le monde en convient et M. Teston le rappelait à l’instant, représente un net progrès pour les usagers du service public de transport en commun. C’est même une forme de respect qui leur est due.
Ainsi que l’ont relevé M. le rapporteur, M. Desessard et d’autres intervenants, les conflits sociaux sont à l’origine d’une minorité de perturbations ; il est important de le rappeler, car les conflits sont souvent mis en exergue pour nuire à l’image du service public, le stigmatiser, voire mettre en cause son existence même. Or les faits générateurs des perturbations la plupart du temps tout autres.
Vous avez plaidé pour la nécessité d’accorder aux transports les moyens nécessaires à la modernisation et à la rénovation de leurs réseaux, notamment dans le domaine ferroviaire. Eu égard à la sensibilité qui est la mienne, je ne puis ici que vous assurer de ma détermination à obtenir les modalités d’un financement pérenne, afin de tenir les objectifs et de respecter les priorités du transport du quotidien.
Dans quelques jours, nous aurons ici un débat important, même s’il est déjà engagé en d’autres lieux, sur la nécessité, pour l’État, de redonner des priorités à la politique des transports – c’est indispensable –, de procéder à la structuration de celle-ci et de définir une stratégie.
L’information des usagers est, je le répète, essentielle. Ainsi, dans la perspective du mouvement de grève qui doit commencer ce soir, la SNCF a publié dès hier soir un état précis du trafic prévu pour la journée du 11 juin. M. Capo-Canellas a souligné que notre débat avait lieu dans ce contexte. Eh bien, cela nous permet aussi d’apprécier la prévisibilité que le dispositif rend possible.
M. Vincent Capo-Canellas. Très bien !
M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État. Le bilan semble donc positif de ce point de vue. La loi a permis de trouver un équilibre – les rapporteurs en conviennent, même s’ils le qualifient de complexe et fragile – entre les valeurs constitutionnelles que sont la continuité du service public de transport et l’exercice du droit de grève.
Toutefois, je partage l’opinion des rapporteurs selon laquelle il convient de mieux tirer parti des possibilités offertes par la loi en matière d’association des partenaires sociaux et de dialogue social approfondi. C’est la première préconisation du rapport d’information. Il importe en effet que la négociation préalable instaurée par la loi soit appliquée de façon adaptée. On ne saurait la considérer comme la dernière procédure, comme une formalité purement administrative, pour reprendre vos propos, madame la rapporteur. Elle doit au contraire constituer une étape dans un processus visant à éviter le conflit, afin de parvenir à un véritable accord entre les différents partenaires.
D’une façon plus générale, il convient d’inscrire le dialogue social au cœur du management des entreprises – c’est le sens de la deuxième préconisation du rapport d’information –, de manière à accompagner les évolutions du transport terrestre de voyageurs. Pour ce faire, il faut mettre en place l’ensemble des procédures adaptées pour favoriser ce dialogue.
Vous l’avez souligné, madame la rapporteur, les organisations syndicales ne peuvent pas être reçues uniquement lors du dépôt d’un préavis ; elles doivent être, au contraire, les partenaires d’un dialogue continu.
S’agissant des deux principales entreprises relevant du champ de la loi de 2007, la SNCF et la RATP, il existe des observatoires sociaux paritaires qui se réunissent annuellement pour établir le bilan des relations sociales dans l’entreprise. Ce bilan est rendu public, et les membres de ces observatoires émettent des propositions d’amélioration du dialogue social et tirent les conséquences des conflits. Le Gouvernement ne peut qu’inviter les entreprises à développer de telles démarches vertueuses.
S’agissant de la loi du 19 mars 2012, dite « loi Diard », je veux d’abord remercier M. Capo-Canellas d’avoir précisément rappelé que le rapport d’information ne visait que les dispositions de cette loi qui modifient la loi de 2007, pour ce qui concerne les transports terrestres.
Je ne reviendrai pas sur les conditions dans lesquelles la loi Diard a été présentée au Parlement, conditions qu’a très bien décrites Mme Schurch et M. Robert Hue : de façon soudaine et sans concertation, à la toute fin de la mandature de la précédente majorité. Ce que je souhaite ajouter, c’est que, si cette loi a été jugée constitutionnelle au mois de mars 2012, son entrée en vigueur a imposé un certain nombre de contraintes administratives lourdes, tant pour les salariés que pour les employeurs. Ces derniers ont parfois dû déployer d’importants moyens pour la mise en place d’outils adaptés.
Il reste que, aujourd’hui, l’application de cette loi est stabilisée et qu’elle ne saurait en aucune façon justifier d’une atteinte à l’exercice fondamental du droit de grève. C’est la raison pour laquelle, voilà quelques semaines, je me suis engagé à rencontrer les différentes compagnies du secteur aérien afin de leur demander fermement des engagements clairs de bonne conduite et d’éviter d’éventuels détournements des dispositions législatives.
C’est dans cet esprit que je souhaite faire évoluer l’application de la loi du 19 mars 2012. Je crois qu’un rapport sur l’application de cette loi sera demandé à votre commission. Le Gouvernement suit bien évidemment cette procédure parlementaire avec beaucoup d’intérêt.
Vous préconisez ensuite, madame, monsieur les rapporteurs, de responsabiliser les autorités organisatrices de transport, notamment en les sensibilisant à la définition des dessertes prioritaires et à l’approbation des périmètres de transport adapté et des plans d’information aux usagers. Je partage ces préoccupations, que bon nombre d’entre vous ont relayées, mesdames, messieurs les sénateurs. Il est vrai que des actions de sensibilisation des AOT quant à leurs obligations en matière de définition de dessertes prioritaires, de plan de transport adapté et de plan d’information des usagers devront être engagées dès lors qu’un bilan plus approfondi de l’application de la loi aura pu être réalisé par les services de l’État.
Madame Masson-Maret, vous m’avez solennellement demandé d’apporter des précisions aux parlementaires. Je le ferai dès que mes services disposeront d’informations suffisamment solides pour être exploitables. Je réponds également ainsi à la préconisation C3 du rapport, relative à un recensement de ces plans afin d’obtenir un bilan exhaustif de l’application de la loi de 2007. Je partage ce point de vue, mais, à ce stade, nous manquons de données. Des enquêtes annuelles sont aujourd’hui réalisées sur l’activité des transports publics – urbains, départementaux et régionaux – par le ministère des transports, en partenariat avec un certain nombre d’acteurs, le GART, l’ARE, l’ADF, l’UTP, la FNTV, l’ANATEEP… Je proposerai de les compléter par des questions sur le plan de transport adapté et le plan d’information des usagers.
La préconisation B2, relayée par Mme Schurch, consiste à intégrer des critères sociaux et environnementaux de qualité de service dans les conventions d’exploitation, ainsi que le prévoit l’article 12 de la loi de 2007. Certes, le contenu des conventions d’exploitation relève de la responsabilité de chaque AOT, mais il importe de rappeler la nécessaire intégration de critères sociaux et environnementaux de qualité de service, laquelle est aujourd’hui trop variable et insuffisamment stabilisée. Les recommandations du rapport à cet égard me semblent être un point d’appui utile pour le renforcement des bonnes pratiques en la matière.
S’agissant des conventions TER entre les régions et la SNCF, celles qui ont été signées avant la loi de 2007 intègrent des clauses relatives à la qualité de service ainsi qu’à la communication et à l’information des voyageurs. Néanmoins, elles ne mentionnent pas de critères sociaux et environnementaux en tant que tels.
Je distribuerai quelques bons points. (Sourires.) La convention du TER Limousin, signée en 2012, est certainement l’une des plus abouties puisqu’on y trouve un titre spécifique consacré au « développement durable et solidaire », traitant des relations avec les usagers, de l’accessibilité et de la prévention des impacts sur l’environnement. La dernière convention avec la région Franche-Comté prévoit, pour sa part, des dispositions en faveur de l’insertion sociale. On le voit, des initiatives sont en passe d’être prises et l’application de la loi se fait plus rigoureuse.
J’en viens aux trains d’équilibre du territoire, les TET. Mme le rapporteur, à moins que ce ne soit Mme Schurch – mais l’une et l’autre parlent souvent d’une même voix ! (Sourires) – a rappelé que l’État, qui en est l’autorité organisatrice depuis le 1er janvier 2011, était en retard. La convention d’exploitation, d’une durée initiale de trois ans, a été prolongée au mois de décembre dernier. Son élaboration s’inscrit dans le respect des dispositions de la loi du 21 août 2007, en incitant par exemple la SNCF à améliorer le report modal – c’est indispensable – ou en prévoyant un dispositif de bonus/malus sur la qualité de service. J’ai souhaité que l’État négocie avec la SNCF, sur la base des préconisations des rapporteurs, le contenu de la prochaine convention d’exploitation qui prendra effet à partir de 2015.
Dans le cadre de ces discussions, nous veillerons à ce que les exigences de l’exploitant soient plus fortes. Je pense ici à l’implication plus importante demandée à la SNCF sur les enjeux liés à la continuité du service public et à l’information des voyageurs. Je pense aussi à l’attention portée à la définition et au respect des plans de transport adapté pour d’autres situations de perturbation que les seules grèves auxquelles il est fait trop souvent référence.
En matière environnementale, les premiers bénéfices du renouvellement du matériel roulant, en termes de report modal et de réduction de la consommation d’énergie, pourront être tirés. Vous savez combien le Gouvernement s’est investi dans ce dossier et attend des effets de cette mobilisation. Je songe aux premières lignes qui bénéficieront des nouveaux matériels « bimodes » à partir de 2016, à l’ensemble des conventions et à l’enveloppe de 510 millions d’euros de renouvellement des TET arrêtée par le précédent Premier ministre.
Madame la rapporteur, monsieur le rapporteur, vous demandez par ailleurs la systématisation des contrôles des bilans d’exécution des plans de transport adapté et des plans d’information des usagers, car les retours d’expérience auprès des AOT sont aujourd’hui quasi inexistants.
Il est pourtant prévu que, après chaque perturbation, l’entreprise de transport communique à l’AOT un bilan détaillé de l’exécution du plan de transport adapté et du plan d’information des usagers. L’entreprise doit aussi évaluer, chaque année, les incidences financières de l’exécution de ces plans et dresser la liste des investissements nécessaires à l’amélioration de leur mise en œuvre. Le contrôle de ces bilans d’exécution relève de chaque AOT.
La prochaine convention d’exploitation des TET devrait permettre de renforcer l’encadrement des retours, aujourd’hui très informels, de l’exploitant à l’autorité organisatrice sur la bonne exécution des adaptations annoncées. Quand je dis que l’État doit être de retour, c’est parce que cela figure dans la réforme ferroviaire. C’est une exigence puisque l’État est l’autorité organisatrice de transport qui doit obtenir les informations relatives à la bonne exécution des adaptations annoncées.
Enfin, le rapport préconise le développement d’outils statistiques harmonisés de suivi de l’application de la loi. Nous sommes tous d’accord. M. Teston a souligné l’absence de fiabilité statistique concernant l’application de la loi. Il nous faut donc mettre en place des indicateurs publics consolidés de mesure et de suivi des causes de perturbation de trafic de la SNCF.
C’est selon moi le meilleur moyen, notamment en cas de conflit, d’en finir avec les images d’Épinal sur la conflictualité et les perturbations sociales. Bon nombre d’usagers attendent de nous de la régularité. Encore faut-il qu’ils sachent qu’un certain nombre de retards sont provoqués par les plans de modernisation de ligne, ou par ce que l’on appelle des « accidents de personnes », – Robert Hue en a fait mention –, qui recouvrent des situations beaucoup plus dramatiques que ce que cette périphrase laisse entendre. Il est important que nous puissions éclairer les usagers, livrer des informations, afin d’empêcher que ne se développe une sorte d’opprobre populaire sur les difficultés de fonctionnement du service public, opprobre entretenu par certains médias : des chaînes d’information en continu, notamment, se livrent souvent à ce genre de raccourcis.
Nous devons assurer la diffusion auprès du grand public de données statistiques sur la régularité et la ponctualité des services de transport public régulier de voyageurs. On se rendra ainsi compte que la régularité et la ponctualité sont beaucoup plus élevées et que la tendance est à l’amélioration, malgré une situation extrêmement dégradée. Un certain nombre de témoignages ont montré que la priorité donnée ces dernières années aux lignes à grande vitesse – M. Teston est intarissable sur la question – a permis de lancer quatre LGV en même temps, alors que le rythme de réalisation est plutôt d’une LGV tous les six ans. La soutenabilité financière de certains projets conduit à définir des priorités qui ne sont pas toujours celles qu’attendent nos concitoyens. Telle est la réalité à laquelle nous sommes aujourd’hui confrontés.
Il nous faut donner tout son rayonnement à l’Autorité de la qualité de service dans les transports, l’AQST, créée le 15 février 2012. Cette entité administrative, qui s’intéresse à tous les modes de transport public de voyageurs – aérien, ferroviaire, routier, maritime – s’appuie sur un Haut Comité de la qualité de service dans les transports, qui rassemble depuis le mois de mai 2013, sous la présidence du député Olivier Faure, 37 représentants des acteurs de tous les modes de transport public de voyageurs – collectivités publiques, opérateurs, associations de consommateurs et d’usagers. L’AQST publie les taux d’annulation et de retard des principales liaisons aériennes, de toutes les liaisons TGV et TET, par mois, par liaison et, pour l’aérien, par compagnie. Des améliorations restent à venir, mais c’est une voie intéressante.
Cette structure publie aussi les taux mensuels d’annulation et de retard des TER, globalisés pour toutes les liaisons ferroviaires d’une même région, et les taux de ponctualité voyageurs de chacune des huit lignes Transilien et des cinq lignes RER. Telles sont les garanties supplémentaires que nous pouvons apporter.
Cependant, cela a été souligné, ces chiffres ne permettent pas de faire l’analyse des causes. À cet égard, nous manquons d’informations : si la SNCF détient des données quantitatives par axe de TGV et par ligne Intercités, les AOT régionales n’en disposent pas sur les perturbations de leurs TER. Les informations relatives au transport ferroviaire sont donc parcellaires. La Direction générale de l’aviation civile dispose, quant à elle, de données codifiées selon une nomenclature internationale extrêmement détaillée. Il faut un recueil de données exhaustives et homogènes pour obtenir un tableau de bord national cohérent qui permette d’identifier les mesures prioritaires à mettre en œuvre en vue d’améliorer la qualité de service aux voyageurs. Ce pourrait d’ailleurs être un guide extrêmement pertinent pour les débats au Parlement.
C’est la raison pour laquelle, le 15 mai 2014, l’AQST a proposé d’étudier, en concertation avec l’ensemble des acteurs, opérateurs et autorités, cinq catégories simples de causes de perturbation valables pour tous les modes de transport. Il s’agit d’objectiver les causes, car vous avez raison d’affirmer, madame, monsieur les rapporteurs, que la plupart des idées reçues en la matière sont erronées. Une approche plus scientifique, plus objective, nous permettrait certainement d’être informés de l’évolution de la qualité des transports. Je serai attentif à ces avancées, car il y va de la crédibilité même du service public des transports.
Enfin, je partage la position selon laquelle il conviendrait que les partenaires sociaux de la branche des entreprises de transport interurbain concluent un accord sur le modèle de celui qui est en vigueur dans le transport urbain. L’exercice n’est toutefois pas si simple, car la branche est composée d’une multiplicité de petites entreprises dans lesquelles les dispositions mises en œuvre par les grandes entreprises de transport urbain ne sont pas nécessairement transposables ni faciles à appliquer. Il faudra que nous étudiions dans quelle mesure on peut adapter ce dispositif. Voilà également un domaine dans lequel l’État devra jouer un rôle de facilitateur.
Je tiens une nouvelle fois à saluer le rapport de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, qui nous permet de poursuivre le nécessaire débat sur les conditions d’exercice du droit de grève ainsi que sur les exigences de continuité et de qualité du service public. L’actualité vient en quelque sorte illustrer notre préoccupation, qui est aussi de valoriser les bonnes pratiques, d’objectiver les données et les informations, afin de renforcer la crédibilité de l’ensemble de l’activité et de redorer l’image de ce service public à la française, garant de l’égalité des territoires et de l’égalité des chances sur ces territoires.
Cette réalité nationale est au cœur de nos discussions avec les instances européennes. Comme j’ai eu l’occasion de le rappeler à mon homologue M. Lupi, qui présidera dans quelques jours le conseil des ministres européens, nous devons aborder ainsi l’organisation des transports : elle est territoriale mais aussi humaine, à la fois pour les salariés et les usagers. Tel est l’enjeu de ces grandes lois qui fondent la réalité du service public auquel nous sommes attachés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC, du groupe écologiste, du RDSE et de l'UDI-UC.)