M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Cet amendement vise à faciliter la diffusion de solutions de paiement innovantes et dématérialisées par les collectivités territoriales. Autrement dit, il tend à réduire la part des chèques – par exemple pour le règlement des cantines scolaires – au profit de moyens de paiement beaucoup plus modernes et rapides.
Sur le fond, la commission spéciale adhère entièrement à l’intention des auteurs de l’amendement. Toutefois, il ne nous a pas été possible d’expertiser véritablement cette mesure et de savoir si sa rédaction permettait d’atteindre l’objectif visé.
C’est la raison pour laquelle la commission spéciale souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Cet amendement prévoit d’étendre aux collectivités territoriales la dérogation au monopole des prestataires de services de paiement existant, dans le cadre de la collecte des recettes issues de la gestion des cantines scolaires, des associations sportives et des services culturels.
Je rappelle que, outre l’obligation de dépôt au Trésor public des fonds libres des collectivités territoriales, il existe un principe de séparation de l’ordonnateur et du comptable. C’est pourquoi je ne peux donner un avis favorable sur cet amendement.
Cela étant, la direction générale des finances publiques a mis en place des outils qui permettent aux collectivités territoriales de disposer de moyens de paiement modernes ; le portail TIPI – titres payables sur internet –, en particulier, prévoit le paiement par carte bancaire. Et l’ancien maire que je suis peut vous dire que cela fonctionne !
M. le président. Cela dépend de l’endroit où l’on se trouve, madame la secrétaire d’État !
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour explication de vote.
Mme Élisabeth Lamure. Lors des débats en commission spéciale, on nous a laissé entendre que notre dispositif constituait une solution intéressante. Il s’agit d’un outil à la fois moderne et susceptible d’engendrer des économies très intéressantes pour les collectivités territoriales.
Par conséquent, je souhaite que cet amendement soit soumis au vote du Sénat.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 53 quater.
Chapitre III
Industrie
Article 54
(Non modifié)
Après l’article L. 592-28 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 592-28-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 592-28-1. – L’Autorité de sûreté nucléaire coopère dans ses domaines de compétence avec les autorités compétentes des autres États. À la demande de ces dernières, elle peut fournir des prestations de conseil et peut mener des missions d’appui technique dans le cadre de conventions, qui peuvent prévoir le remboursement des frais exposés.
« L’Autorité de sûreté nucléaire peut examiner la conformité des options de sûreté des modèles d’installations nucléaires destinées à l’exportation aux obligations applicables en France au même type d’installation. Elle est saisie selon les modalités prévues au premier alinéa de l’article L. 592-29 et elle rend publiques les conclusions de cet examen. »
M. le président. L'amendement n° 466, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. L’article 54 vise à permettre à l’Autorité de sûreté nucléaire, l’ASN, de percevoir une rémunération lorsqu’elle coopère avec ses homologues étrangers et de procéder à l’examen de conformité du matériel destiné à l’export.
Or l’ASN est une autorité indépendante et doit, à ce titre, être au-dessus de tout soupçon puisqu’elle est chargée de donner aux opérateurs des consignes dont elle est chargée de garantir le respect. Dès lors, intégrer une dimension financière dans les échanges qu’elle noue avec les autorités de sûreté nucléaire étrangères ne nous semble pas être un moyen de garantir le respect de cet impératif.
Considérant qu’il s’agit là d’un problème éthique majeur, les écologistes souhaitent que les relations entre autorités de sûreté nucléaire restent désintéressées.
De plus, l’alinéa 3 de l’article 54 pose également problème. Il prévoit en effet que l’ASN examine « la conformité des options de sûreté des modèles d'installations nucléaires destinées à l'exportation ». Or l’ASN n’est pas un bureau d’études. L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’IRSN, pourrait parfaitement tenir ce rôle.
Par ailleurs, l’ASN est une autorité dont la vocation est de prendre des décisions. Or la rédaction de l’article 54 ne précise pas le sort que l’on réserve aux avis de l’Autorité et ne lui donne pas les moyens de s’opposer à l’exportation d’une centrale nucléaire.
Enfin, l’alinéa 2 de l’article prévoit que l’ASN est rémunérée par l’entreprise exportatrice, ce qui signifie qu’elle deviendra la cliente de groupes comme EDF ou AREVA. Cela pose là encore un problème de déontologie et d’éthique.
Pour toutes ces raisons, et afin de préserver l’indépendance de l’ASN, nous proposons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Cet amendement, qui a déjà été repoussé en commission spéciale, s’inscrit dans l’opposition de principe qu’exprime le groupe écologiste vis-à-vis de tout ce qui concerne la filière nucléaire. Or cette position est en l’occurrence contradictoire, car, comme je l’ai dit lors en commission, l’article 54 garantira le haut niveau de sécurité des réacteurs français labellisés à l’export. Il favorise donc la sécurisation de ces installations, ce à quoi, me semble-t-il, les écologistes devraient être favorables.
Par conséquent, nous sommes opposés à la suppression de l’article 54 et émettons un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, comme il l’avait été, à l’Assemblée nationale, à un amendement de même nature.
Le dispositif de l’article 54 offre à l’ASN, qui est l’une des autorités de sûreté nucléaire les plus réputées du monde, la possibilité d’analyser la sûreté d’un réacteur nucléaire destiné à l’export, alors que le cadre actuel ne prévoit pas cette faculté. Cette analyse de sûreté pourra donc être valorisée dans le cadre d’une offre à un pays tiers.
L’ASN a d’ailleurs déjà rendu une telle analyse de sûreté concernant le réacteur ATMEA 1, en Turquie. Pour cette étude, elle avait été rémunérée par AREVA.
De telles pratiques ayant vocation à se renouveler, il est préférable de les encadrer juridiquement plutôt que de laisser l’ASN et AREVA mettre en œuvre ces partenariats de manière discrétionnaire.
Il ne s’agit donc en aucun cas d’une remise en cause de l’indépendance de l’ASN. Cette dernière pourra émettre des analyses en toute autonomie, de sorte qu’elles pourront se révéler aussi bien positives que négatives.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je pense que l’ASN est reconnue dans le monde entier pour la qualité de son expertise. Lorsqu’elle est appelée à établir des diagnostics, elle représente aussi l’excellence française ! Il ne faut pas priver d’un fondement législatif cette activité de l’ASN qui lui permet de valoriser encore plus son expertise.
M. Charles Revet. Ce serait en effet dommage !
Mme Nicole Bricq. Les auteurs de l’amendement formulent une critique de fond sur le mode de financement de l’ASN : son indépendance ne serait plus assurée dès lors qu’elle serait rétribuée. Mais pourquoi se focaliser ainsi sur l’ASN ? Il existe de nombreuses autres autorités indépendantes qui bénéficient de tels financements – je pense en particulier à celles qui interviennent dans le domaine de la santé – et qui pourraient alors faire l’objet d’une telle critique.
M. Roland Courteau. En effet !
Mme Nicole Bricq. Dès lors que cette activité de l’ASN a un fondement législatif, qu’elle est encadrée juridiquement, qu’il existe un code de déontologie et que cette autorité ne se prive pas d’exprimer ses avis, y compris sur les centrales nucléaires françaises, nous avons une garantie de son indépendance. Elle n’est ainsi nullement inféodée et agit vraiment en tant qu’autorité indépendante.
Je pense donc qu’il n’est pas raisonnable de vouloir priver ses interventions en tant qu’expert de fondement législatif, d’autant que cette expertise est largement reconnue, et qu’il n’est pas opportun de contester son mode de financement.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je reconnais la qualité du travail de contrôle de l’ASN. C’est précisément la raison pour laquelle je souhaite qu’elle demeure une haute autorité indépendante, qu’elle se cantonne à ce rôle-là et que, précisément, elle ne participe pas à des études portant sur des marchés. L’ASN n’est pas un bureau d’études ! Un bureau d’études est toujours un peu lié par les avis ou les conseils qu’il a formulés précédemment. Je pense donc que l’ASN doit rester une autorité indépendante et qu’il appartient à une autre structure d’assurer la fonction qu’occupe traditionnellement un bureau d’études.
Enfin, je suis d’accord avec Mme Bricq lorsqu’elle dit que l’ASN n’est pas la seule autorité qui se trouve liée à des entreprises. Mais c’est ce qui m’amène, moi, à considérer qu’il faut également maintenir l’indépendance des autorités de contrôle des médicaments et séparer, d’une manière générale, la fonction d’autorité de contrôle et celle de bureau d’études.
M. le président. La parole est à M. Ladislas Poniatowski, pour explication de vote.
M. Ladislas Poniatowski. L’amour de M. Desessard et du groupe écologiste pour l’ASN est à géométrie variable… Lorsque l’ASN rend ce qui constitue à vos yeux de bonnes conclusions, mon cher collègue, c'est-à-dire des conclusions mettant en cause la fiabilité de certaines centrales, vous portez l’ASN aux nues. En revanche, lorsque l’ASN rend des conclusions qui ne vous conviennent pas, elle devient un instrument horrible ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
L’ASN est pourtant l’une des autorités les plus indépendantes par rapport à ses équivalents étrangers.
M. Jean Desessard. Oui, parfois…
M. Ladislas Poniatowski. Elle a fait la preuve d’une véritable indépendance, notamment sur un sujet « chaud » bien connu, celui de la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires. En comparaison avec ce qui se passe aux États-Unis, où l’Autorité de sûreté nucléaire américaine a soudain autorisé la prolongation de la durée de vie des 78 réacteurs nucléaires américains jusqu’à soixante ans, nous avons en France une vraie autorité indépendante, et respectée.
Mme Bricq a tout à fait raison de considérer que, au travers du vote de cet article, il y va de la bonne image de cette autorité et notamment de son rôle dans nos exportations. L’expertise que réalise parfois l’ASN sur des réacteurs français qui sont exportés dans des pays étrangers relève, j’en conviens, d’une mission différente de celles qui lui sont habituellement confiées, mais elle n’en est pas moins importante, et vous devriez, cher collègue Desessard, reconnaître que cette autorité s’en acquitte de manière remarquable. C’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement : permettez donc à l’ASN de continuer à assumer cette mission !
M. le président. Monsieur Desessard, l'amendement n° 466 est-il maintenu ?
M. Jean Desessard. Je maintiens mon amendement, monsieur le président, car je ne suis pas à géométrie variable ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 467, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
Après le mot :
exportation
insérer les mots :
ainsi que l’organisation de la sûreté nucléaire et de la sécurité dans le pays d’accueil
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Il s’agit là d’un amendement de repli.
Si l’ASN doit vérifier la conformité des équipements nucléaires destinés à l’export aux normes de sûreté françaises, nous estimons qu’elle doit a minima examiner aussi les conditions de sécurité dans lesquelles ces installations sont implantées dans le pays d’accueil. Des équipements français, même s’ils sont élaborés avec les meilleures normes, ne sont pas sûrs dès lors que les installations d’accueil ne le sont pas.
De surcroît, la notion de sécurité qui figure dans cet amendement ne correspond pas à la seule sûreté technique : elle prend également en considération le contexte du pays d’accueil. Cette garantie est primordiale dès lors que nous exportons nos équipements dans des pays dont la stabilité politique n’est pas toujours assurée.
Notre amendement permettra ainsi à 1’ASN de s’opposer à l’export de technologies lorsque celles-ci pourraient être utilisées dans une zone de conflit ou être menacées par une situation géopolitique dangereuse.
Le nucléaire n’est pas une technologie d’exportation comme les autres. Avec cet amendement, nous souhaitons par conséquent inscrire dans la loi la nécessité de la précaution.
Je reviens un instant à l’amendement précédent : une haute autorité doit absolument être dégagée de toute relation financière avec les structures sur lesquelles elle est amenée à exercer son expertise. L’indépendance implique l’absence de lien financier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. L’avis de la commission est défavorable.
Cet amendement tend à élargir considérablement le champ de compétences de l’ASN puisque celle-ci devrait examiner aussi l’organisation de la sûreté nucléaire et de la sécurité dans le pays d’accueil des équipements nucléaires destinés à l’export.
Vous en conviendrez, monsieur Desessard, l’ASN outrepasserait alors largement le périmètre de ses prérogatives : elle est en effet une autorité nationale qui ne dispose pas des moyens de se prononcer sur une organisation interne à un pays tiers ; elle n’a d’ailleurs pour cela ni mandat ni légitimité.
Adopter une telle mesure serait extrêmement préjudiciable et peut-être même source de tensions juridiques, diplomatiques et politiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Il est également défavorable, pour les raisons que Mme la corapporteur vient d’exposer.
M. le président. La parole est à M. Ladislas Poniatowski, pour explication de vote.
M. Ladislas Poniatowski. Monsieur Desessard, franchement, votre proposition est loufoque ! Accepteriez-vous que l’autorité de sûreté nucléaire américaine ou japonaise prétende contrôler un équipement en France ? Bien sûr que non ! Or vous proposez que la nôtre mette son nez dans les affaires nationales d’autres pays…
Soyez sérieux, mon cher collègue, et retirez cet amendement !
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. M. Desessard vient de nous expliquer que l’Autorité de sûreté nucléaire devait travailler sans être financée. Je vous rappelle que, lorsque l’accident de Fukushima s’est produit, c’est le diagnostic de l’ASN qui a été jugé le plus pertinent. Pensez-vous que les employés de cet organisme sont partis bénévolement au Japon parce qu’ils ne savaient pas quoi faire de leur week-end ? Qu’ils s’y sont rendus après avoir eu l’idée de consulter des dépêches de presse ? (Sourires.)
À la vérité, c’est dans le cadre de procédures précises que les ingénieurs et les scientifiques de cette agence ont dressé un diagnostic non seulement plus rapide que celui des autorités japonaises, mais aussi beaucoup plus pointu, ainsi que cela a d’ailleurs été reconnu. Serait-il normal que de tels travaux soient financés par les contribuables français, via les fonds alloués par l’État à l’Autorité de sûreté nucléaire ?
M. Desessard nous dit : que l’ASN réponde donc à des appels d’offres ! Mon cher collègue, savez-vous combien de temps durent de telles procédures ? Pensez-vous que, lorsque survient un accident, ou même un incident, il soit possible de respecter les délais imposés par les différentes législations nationales en matière d’appels d’offres avant de décider quel organisme sera chargé d’établir un diagnostic ?
Je reprends à mon compte l’adjectif qu’a employé Ladislas Poniatowski : le mot « loufoque » est bel et bien celui que mérite l’argumentation de M. Desessard, et j’espère, mon cher collègue, que vous ne m’en voudrez pas de le dire.
Au demeurant, je suis surpris que le groupe CRC ait voté, il y a quelques instants, l’amendement n° 466…
M. le président. Je mets aux voix l'article 54.
(L'article 54 est adopté.)
Article additionnel après l’article 54 (précédemment examiné)
M. le président. Je rappelle que l’amendement n° 115, tendant à insérer un article additionnel après l’article 54, a été précédemment examiné.
Article 54 bis A
(Non modifié)
Après le 7° du II de l’article L. 541-10 du code de l’environnement, il est inséré un 8° ainsi rédigé :
« 8° Les conditions dans lesquelles est favorisée l’ouverture au public des données relatives à la composition des déchets dont les éco-organismes ont en charge la prévention et la gestion. »
M. le président. L'amendement n° 195 rectifié, présenté par MM. Darnaud, Genest, B. Fournier, Pierre, Grosdidier, Milon et Grand, Mmes Lamure et Micouleau et MM. Longuet et Bouchet, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 8° Les conditions et limites dans lesquelles sont encouragées les démarches d’open data des données relatives au domaine des déchets. »
La parole est à M. Mathieu Darnaud.
M. Mathieu Darnaud. L’article 54 bis A impose une nouvelle obligation aux éco-organismes : leurs cahiers des charges devront désormais préciser « les conditions dans lesquelles est favorisée l’ouverture au public des données relatives à la composition des déchets dont » ils « ont en charge la prévention et la gestion ».
Cette nouvelle disposition n’est pas optimale, faute de prendre en compte le problème du secret industriel. En effet, un éco-organisme ne peut pas obliger un industriel à révéler la composition d’emballages ou de produits qui sont le fruit d’investissements de recherche et développement.
En outre, si les sociétés qui mettent un produit sur le marché disposent d’informations sur la nature de celui-ci, force est de constater que la composition du déchet n’est pas forcément identique à celle du produit ; la première dépend du contexte et des choix de consommation, sur lesquels les éco-organismes non plus que les industriels n’ont de prise.
Ces dernières années, enfin, certains éco-organismes ont déjà mis en place différents outils, en particulier des sites internet, pour assurer la publication de ces données de manière transparente et gratuite.
C’est pourquoi les auteurs de cet amendement proposent de modifier la rédaction de l’alinéa nouveau que l’article 54 bis A du projet de loi introduit à l’article L. 541-10 du code de l’environnement, en vue d’assurer un juste équilibre entre la nécessité de rendre les données accessibles et celle de respecter le secret des affaires industrielles. L’adoption de cet amendement de compromis offrirait aux entreprises de recyclage de nouvelles opportunités de développement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Je constate que la rédaction proposée par M. Darnaud pour l’alinéa 2 de l’article 54 bis A n’est guère différente de celle qu’a adoptée la commission spéciale. Notre collègue souhaite simplement élargir le champ d’ouverture au public des données relatives aux déchets dont les éco-organismes ont la charge, filière par filière.
Dans sa rédaction actuelle, l’article 54 bis A prévoit la possibilité de mettre à la disposition du public les données touchant à la composition des déchets collectés et traités par les éco-organismes. Cette ouverture déjà importante est de nature à favoriser, selon les filières, le réemploi et la réutilisation. La commission spéciale l’a jugée suffisante et s’est prononcée contre l’amendement n° 195 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui tend à clarifier la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale pour l’article 54 bis A, aux termes duquel les cahiers des charges établis lors du renouvellement des agréments des éco-organismes devront préciser la manière dont ces organismes rendront publiques certaines données relatives aux déchets.
Je suggère seulement à M. Darnaud une rectification de son amendement consistant à substituer à l’anglicisme « open data » l’expression française « ouverture des données ». Je crois que cette modification était l’objet d’un sous-amendement présenté par M. Placé, qui l’a ensuite retiré. Quoi qu’il en soit, il me semble que la Haute Assemblée ferait œuvre utile en adoptant une rédaction parfaitement française.
M. le président. Monsieur Darnaud, acceptez-vous de rectifier votre amendement ainsi que le suggère Mme la secrétaire d’État ?
M. Mathieu Darnaud. J’y consens volontiers, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 195 rectifié bis, présenté par MM. Darnaud, Genest, B. Fournier, Pierre, Grosdidier, Milon et Grand, Mmes Lamure et Micouleau et MM. Longuet et Bouchet, et ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 8° Les conditions et limites dans lesquelles sont encouragées les démarches d’ouverture des données relatives au domaine des déchets. »
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 54 bis A, modifié.
(L'article 54 bis A est adopté.)
Article 54 bis
I. – Le III de l’article 266 quindecies du code des douanes est ainsi modifié :
1° Au 1°, les mots : « , et des biocarburants produits à partir de matières premières d’origine animale ou végétale, énumérées à l’article 21 de la directive 2009/28/ CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/ CE et 2003/30/ CE, » sont supprimés.
2° La seconde phrase du 2° est supprimée.
II (nouveau). – La perte de recettes résultant pour l’État du I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III (nouveau). – La perte de recettes résultant pour l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie du I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. Je tiens à souligner l’intérêt qui s’attache à cet article, destiné à soutenir le développement des biocarburants produits à partir de matières d’origine animale et d’huiles alimentaires usagées.
Si l’on connaît assez bien les biocarburants incorporés dans l’essence, comme le bioéthanol, et les esters méthyliques d’huile végétale incorporés dans le gazole, les esters méthyliques d’huile animale, les EMHA, et les esters méthyliques d’huile usagée, les EMHU, sont nettement moins connus. Or ces derniers présentent le double avantage de ne pas être en concurrence avec l’alimentation humaine ou animale, à la différence de ceux qui entrent dans la composition du bioéthanol et du biodiésel, et de présenter un bilan plus favorable sur le plan de la réduction des gaz à effet de serre.
Je salue les initiatives qui ont été prises pour encourager les filières françaises des EMHA et des EMHU, qui offrent des débouchés intéressants aux graisses animales issues des abattoirs et aux huiles usagées, en accord avec le principe de l’économie circulaire. Il convient d’aller plus loin encore pour soutenir leur développement.
Pour l’heure, la commission spéciale promeut « une approche raisonnable qui ne remet pas en cause l’équilibre général entre les filières de biocarburants d’origine végétale et celles des EMHA-EMHU ». Reste que ces dernières représentent un atout important dans la bataille engagée en faveur des énergies renouvelables et de la réduction des énergies fossiles émettrices de gaz à effet de serre. Je répète qu’elle présente également un grand intérêt du point de vue du développement de l’économie circulaire. Mes chers collègues, la production de biocarburants à partir de déchets et de résidus est une filière d’avenir !
Madame la secrétaire d’État, je n’ignore pas que la mesure contenue dans l’article 54 bis du projet de loi suppose de modifier le code des douanes au cours du présent exercice fiscal, ce qui pourrait être source de certaines difficultés. Je ne sais quel sort sera réservé à l’amendement de suppression que vous défendrez dans quelques instants. Quoi qu’il advienne, je ne saurais trop insister sur la nécessité d’encourager davantage encore les filières des EMHA et des EMHU, par exemple dans le cadre du prochain projet de loi de finances.
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, sur l'article.
Mme Agnès Canayer. La part des esters méthyliques d’huile animale dans les biocarburants incorporés au diesel est depuis quelques années une question récurrente, à propos de laquelle aucun accord stable n’a pu être trouvé. Je rappelle qu’il s’agit de valoriser les carcasses animales en les transformant en huiles destinées à être incorporées dans le diesel, ce qui constitue une démarche d’économie circulaire et de mise en valeur des déchets.
Depuis le vote d’un amendement de Philippe Marini au projet de loi de finances rectificative pour 2010, le taux d’EMHA dans les biocarburants est régulièrement relevé ou abaissé au gré des textes de loi, sans qu’un consensus soit trouvé. Il ne s’agit pas de réduire la part des biocarburants d’origine végétale, mais d’assurer une complémentarité entre cette filière et celle des biocarburants d’origine animale.
Après que l’Assemblée nationale a figé la situation en adoptant un amendement dit « Caresche 2 », notre commission spéciale, sur l’initiative du corapporteur, a heureusement modifié le texte afin de la faire évoluer. Un amendement du Gouvernement et un autre de M. Bizet seront présentés dans quelques instants, qui visent à revenir aux situations antérieures, notamment à celle issue de la loi de finances pour 2014. Cette forte instabilité, critiquée par les professionnels, devient ubuesque.
Pour soutenir le développement des EMHA, il convient, d’une part, d’assurer une stabilité fiscale et juridique favorable aux investissements et à la pérennisation de la filière et, d’autre part, de faire jouer un mécanisme souple et réactif pour adapter les taux à la capacité de production nationale, ce que permet le recours à un arrêté.
Au Havre, où est établie l’entreprise qui produit les huiles d’origine animale, la question est prégnante ; au-delà des professionnels, elle préoccupe tous les habitants. Je souhaite donc que les parlementaires dont les territoires sont concernés soient associés à la préparation des évolutions futures, ou du moins informées de celles-ci, s’il doit y en avoir.
Je suis favorable à la rédaction adoptée par la commission spéciale pour l’article 54 bis : elle fixe dans la loi la valeur du taux cible de la taxe générale sur les activités polluantes ainsi que le taux maximal d’incorporation et renvoie au pouvoir réglementaire les autres mesures devant être prises.