M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Le Gouvernement émet les mêmes avis sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 208 rectifié et 498 rectifié ter.
M. Jacques Mézard. L’amendement n° 208 rectifié est incomplet et, comme l’a justement rappelé M. le corapporteur, il ne règle pas la question de la représentation obligatoire. Je le retire donc.
M. le président. L'amendement n° 208 rectifié est retiré.
Madame Mélot, faites-vous de même avec l'amendement n° 498 rectifié ter ?
Mme Colette Mélot. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 498 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 1255.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Madame Mélot, l'amendement n° 497 rectifié quater est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. Jean Desessard. Je retire également l'amendement n° 1479, monsieur le président !
M. le président. Les amendements nos 497 rectifié quater et 1479 sont retirés.
Madame David, l'amendement n° 1256 est-il maintenu ?
Mme Annie David. Non, je le retire, monsieur le président, ayant été sensible aux arguments de M. le corapporteur sur le fait qu’il s’agit d’un engagement de l’État permettant au défenseur syndical de mener à bien son mandat.
M. le président. L'amendement n° 1256 est retiré.
Madame Mélot, l'amendement n° 496 rectifié septies est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 496 rectifié septies est retiré.
Monsieur Desessard, l'amendement n° 1480 est-il maintenu ?
M. Jean Desessard. Oui, monsieur le président ! (Sourires.) Certes, M. le corapporteur a été convaincant, mais il a bien spécifié que ses arguments ne valaient que si la défense était effectuée à titre gratuit. Si le défenseur syndical est rémunéré, la question reste posée, même s’il reverse sa rémunération au syndicat.
Il peut, dans sa manière de conduire la défense, commettre une omission ou une faute qui entraînera des frais. Dans ce cas, à défaut d’assurance, le défenseur syndical peut se trouver attaqué. Selon moi, la question de l’assurance prise en charge par la structure syndicale reste donc posée.
Le dossier n’est sans doute pas mûr, mais je maintiens cet amendement, ne serait-ce qu’à titre d’amendement d’appel.
M. le président. L'amendement n° 625, présenté par Mme Bricq, M. Guillaume, Mmes Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéas 60 à 62
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Anne Emery-Dumas.
Mme Anne Emery-Dumas. Cet amendement vise à supprimer la disposition qui étend l’interdiction faite aux conseillers prud’hommes d’exercer une mission d’assistance ou de représentation au-delà de la section à laquelle ils appartiennent.
Nous proposons de revenir au texte transmis par l’Assemblée nationale, qui nous semble comporter toutes les garanties d’impartialité des conseillers prud’hommes.
Le texte actuel de l’article L. 1453-2 du code du travail dispose, dans son premier alinéa : « Les personnes habilitées à assister ou à représenter les parties en matière prud’homale, si elles sont par ailleurs conseillers prud’hommes, ne peuvent pas exercer une mission d’assistance ou un mandat de représentation devant la section ou, lorsque celle-ci est divisée en chambres, devant la chambre à laquelle elles appartiennent. »
Cette rédaction a, semble-t-il, suffi à garantir jusqu’à présent l’impartialité des conseillers prud’hommes. Élargir cette interdiction d’assistance ou de représentation à l’ensemble d’un conseil de prud’hommes nous paraît excessif, particulièrement pour les conseils importants. Cela reviendrait à empêcher le défenseur syndical d’assister ou représenter les salariés dont il est susceptible d’appréhender les difficultés, dans les entreprises et le territoire qu’il connaît.
De plus, les salariés devraient avoir recours à un défenseur certes compétent, mais éloigné de leur domicile et de leur lieu de travail. Cela représenterait un handicap pour des personnes déjà en difficulté et fragilisées par le conflit avec leur employeur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, corapporteur. Si vous voulez déstabiliser la juridiction prud’homale, ou en tout cas la décrédibiliser, il faut effectivement voter un tel amendement !
La commission spéciale entend interdire aux conseillers prud’hommes d’accomplir des missions d’assistance et de représentation devant le conseil auquel ils appartiennent. Cette interdiction se justifie à nos yeux par la fonction de juge que remplit le conseiller prud’homme.
Comment un justiciable pourrait-il accepter qu’un des membres de la juridiction devant laquelle il est attrait soit le défenseur de son adversaire ? Imaginez la même situation devant le tribunal de grande instance : un juge viendrait plaider devant ses collègues pour un client…
Renoncer à l’interdiction que nous avons prévue, ce serait le meilleur moyen de retirer toute crédibilité à la défense prud’homale !
Nous avons limité le champ de cette interdiction au conseil de prud’hommes dans lequel exerce le juge. Alors, de grâce, si vous ne voulez pas donner une très vilaine image du conseil de prud’hommes et affaiblir la confiance de nos concitoyens envers cette juridiction, ne changez rien !
La commission est très vivement défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. J’émets pour ma part un avis favorable.
S’il convient de ne pas modifier la règle interdisant à un conseiller prud’homme de représenter une partie devant la section, la chambre ou la formation de référé à laquelle il appartient, il n’apparaît en revanche pas nécessaire d’étendre le périmètre de cette interdiction à la totalité des formations des conseils de prud’hommes. L’argument du manque d’impartialité n’est pas fondé.
À mon sens, l’interdiction prévue par le texte de la commission spéciale est trop large. C'est pourquoi les alinéas 60 à 62 me semblent devoir être supprimés. Nous reviendrions ainsi à la rédaction initiale. Il s’agit de permettre aux conseillers prud’hommes d’assister une partie devant le conseil de prud’hommes auquel ils appartiennent sous réserve que ce ne soit pas devant leur section ou leur chambre. Je pense qu’on peut tout à fait leur accorder cette latitude.
M. le président. La parole est à M. François Pillet, corapporteur.
M. François Pillet, corapporteur. J’ai dit que j’étais vivement défavorable à cet amendement et je tiens à m’expliquer de cette vigueur.
Pour quelques cas d’espèce, vous risquez de nuire gravement à l’image des conseils de prud’hommes. Que pensera celui qui verra arriver dans la cour du palais de justice un juge dont il sait qu’il a siégé dans le conseil de prud’hommes et qui se trouvera être le défenseur de son adversaire ? C’est ahurissant !
On peut également se demander si les exigences relatives au droit à un procès équitable, qui s’appliquent aux conseils de prud’hommes, seront bien respectées.
De grâce, ne prenez pas ce risque pour quelques affaires par an ! Je suis certain que plusieurs de mes collègues qui connaissent bien les prud’hommes partageront mon point de vue. Nous avons passé l’après-midi à conforter la juridiction prud’homale dans l’esprit du public, en conférant au conseiller prud’homme un statut, en lui donnant une « allure » de juge. N’allez pas l’affaiblir !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Il s’agit là d’une situation qui s’est déjà rencontrée.
Mme Nicole Bricq. Bien sûr !
M. Jacques Mézard. Oui, mais c’est catastrophique !
Je partage totalement l’opinion de M. le corapporteur : c’est un système ahurissant.
Mme Nicole Bricq. Passons au vote !
M. Jacques Mézard. J’ai tout de même le droit de m’exprimer ! Vous voulez toujours imposer aux autres votre point de vue !
Je l’ai vu, je l’ai vécu : permettre à un conseiller prud’homme d’assister un salarié devant le conseil de prud’hommes, c’est dénaturer cette institution, c’est lui rendre le plus mauvais service. C’est dégrader dramatiquement son image. Comment accepter qu’un conseiller prud’homme soit un jour en train de juger dans une section et, un autre jour, en train de faire l’avocat devant une autre section ? (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Peut-être cette pratique ne choque-t-elle pas à Paris, si elle se déroule entre la section de l’industrie et la section du commerce, mais, ailleurs, cela donne une image catastrophique des conseils de prud’hommes. Voilà la réalité !
Il ne faut pas mélanger les genres. Ou l’on juge ou l’on défend. On ne fait pas les deux à la fois ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour explication de vote.
M. François-Noël Buffet. Je soutiens, moi aussi, la position du corapporteur. Dans les autres juridictions, les avocats ont la possibilité de récuser un magistrat siégeant dans la formation de jugement s’il a eu à connaître du dossier dans d’autres circonstances, par exemple en tant que magistrat instructeur. Il s’agit de garantir une impartialité et une indépendance absolues de la formation de jugement et d’éviter les conflits d’intérêts.
Si cet amendement est adopté, avec des conseillers prud’hommes qui seront juge et partie, les conflits d’intérêts seront permanents. Or cela serait fatal à l’indépendance de la justice.
Je vous invite vraiment, mes chers collègues, à suivre l’avis du corapporteur et ne pas vous tromper de combat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures vingt, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.)
PRÉSIDENCE DE M. Claude Bérit-Débat
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen des amendements déposés à l’article 83.
Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1257, présenté par Mmes Assassi, David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 76 à 93
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Les alinéas dont nous demandons ici la suppression sont, à nos yeux, générateurs d’une rupture d’égalité entre les justiciables.
Nous sommes bien entendu favorables à la disposition prévoyant l’obligation, pour les parties, de comparaître devant le bureau de conciliation et d’orientation. Notre désaccord porte sur la possibilité, pour ledit bureau, de renvoyer l’affaire devant la formation restreinte du bureau de jugement, laquelle aura l’obligation de rendre sa décision dans un délai de trois mois.
Il y aurait donc des affaires traitées en trois mois et d’autres en treize mois. Le risque, à notre sens, est de se retrouver devant le choix entre une justice de qualité, qui prend le temps, et une justice beaucoup plus rapide et potentiellement de moindre qualité.
Surtout, ce qui nous gêne, c’est que le choix de la formation, qui se fait en accord avec les parties ou à leur demande, revient en fait à choisir son juge, ce qui nous semble constituer une rupture du principe d’égalité que j’évoquais.
M. le président. L'amendement n° 901 rectifié, présenté par MM. Cadic, Canevet et Guerriau, Mme Billon et MM. Cigolotti, Delahaye et Longeot, est ainsi libellé :
Alinéas 82 à 87
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 1454-1-1. – En cas d’échec de la conciliation, l’affaire est renvoyée devant le bureau de jugement mentionné à l’article L. 1423-12.
La parole est à M. Olivier Cadic.
M. Olivier Cadic. L’article 83, après plusieurs retouches successives, prévoit la possibilité, pour le bureau de conciliation et d’orientation, de renvoyer les parties, avec leur accord, devant une formation de jugement restreinte à deux juges, qui doit statuer dans un délai de trois mois, lorsque le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire. Ce texte fait donc coexister deux procédures qui obéissent à des règles distinctes pour les mêmes litiges, ce qui nous paraît contraire à l’égalité des justiciables devant la justice.
Le présent amendement tend donc à revenir sur ce point.
M. le président. L'amendement n° 902 rectifié bis, présenté par MM. Cadic, Canevet et Guerriau, Mme Billon et MM. Cigolotti, Delahaye, Longeot et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Alinéas 82 à 87
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 1454-1-1. – À défaut de conciliation, le bureau de jugement ne peut être saisi que par le dépôt d’une demande comportant l’énoncé de son objet ainsi qu’un exposé des moyens de fait et de droit et l’indication des pièces sur lesquels elle est fondée.
La parole est à M. Olivier Cadic
M. Olivier Cadic. Cet amendement a pour objet de modifier les modalités de saisine du bureau de jugement.
En effet, la phase de conciliation doit être clairement séparée de l’instance judiciaire et être une phase non contentieuse, ce qui nécessite certaines modifications réglementaires.
Cependant, la loi peut déjà en prévoir le principe et en tirer la conséquence en cas d’échec de la conciliation, situation dans laquelle le demandeur ne pourrait saisir la formation de jugement qu’en déposant un dossier complet comportant l’énoncé de sa demande, un exposé des moyens de fait et de droit ainsi que l’indication des pièces sur lesquelles elle est fondée, à l’instar de ce qui est prévu pour les assignations dans le code de procédure civile.
Cette disposition, qui exige du demandeur qu’il dépose son dossier pour saisir la formation de jugement, supprimerait l’un des motifs les plus fréquents de retard pris par la procédure dès son départ et constituerait un facteur puissant pour atteindre l’objectif du projet de loi d’accélérer le traitement des contentieux du travail.
M. le président. L'amendement n° 482 rectifié, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 83, première phrase
Supprimer les mots :
si le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail,
et les mots :
, avec leur accord,
II. – Alinéa 84
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. L’article 83 vise, conformément à l’objectif qui sous-tend l’ensemble du projet de loi, à simplifier, alléger, accélérer les procédures concernant une institution jugée poussiéreuse. En l’occurrence, c’est la justice prud’homale qui est visée, et le bureau de conciliation et d’orientation est l’un des outils de cette accélération des procédures.
Ce bureau de conciliation existe déjà aujourd’hui. Composé d’un conseiller prud’homal salarié et d’un conseiller prud’homal employeur, il permet de régler à l’amiable, en amont du bureau de jugement, un conflit entre un employeur et un salarié. Le projet de loi a pour objet de confier de nouveaux pouvoirs à ce bureau en lui permettant de proposer un circuit accéléré aux justiciables.
Il est en effet prévu que le bureau de conciliation et d’orientation peut, à défaut de conciliation, renvoyer les parties soit devant le bureau de jugement, dans sa formation plénière ou restreinte, soit directement devant le bureau de départage.
Le renvoi direct vers le bureau de départage pose problème. En effet, d’une part, les jugements issus de ce bureau font l’objet de 6 % d’appels de plus que les bureaux de jugement classiques. D’autre part, cette procédure emporte une remise en cause de notre modèle paritaire employeur-salarié : ce bureau est en effet composé de deux conseillers, un salarié et un employeur, ainsi que d’un juge professionnel, qui, bien souvent, impose ses conclusions aux deux autres conseillers.
De plus, il est prévu que le renvoi vers la formation de départage peut être décidé « si [les parties] le demandent ou si la nature du litige le justifie ». Concernant la première partie de la phrase, on ne comprend pas bien pourquoi le bureau de conciliation et d’orientation devrait se voir imposer la volonté des parties. Concernant la seconde partie de la phrase, on ne voit pas ce qu’est un litige qui justifierait un circuit court.
Ce qui nous est proposé ici, c’est de généraliser l’échevinage,…
M. François Pillet, corapporteur. Mais non !
M. Joël Labbé. … c’est-à-dire de donner davantage de place au juge professionnel et de réduire la portée des décisions paritaires.
Ce n’est pas en court-circuitant les conseillers prud’homaux que l’on redonnera confiance en cette institution.
Voilà pourquoi nous proposons une rédaction telle que le bureau de conciliation suive une procédure normale, selon son appréciation.
Il ne suffit pas de réclamer d’aller plus vite et de réduire drastiquement les procédures. La réforme passe avant tout par le respect de l’esprit paritaire et par davantage de moyens alloués à la justice prud’homale.
M. le président. L'amendement n° 1258, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 88 à 91
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Les alinéas 88 à 91 ont été introduits par M le corapporteur pour instaurer dans la justice prud’homale une clôture de la mise en état.
Actuellement, cette procédure n’existe ni devant le tribunal d’instance ni devant les juridictions spécialisées, telles que le conseil de prud’hommes et le tribunal des affaires de sécurité sociale, devant lesquelles la procédure est orale.
Cette procédure de mise en état remet en cause l’oralité des débats au profit de l’écrit, donc du formalisme, et ce au détriment des défenseurs syndicaux.
L’article R. 1454 du code du travail prévoit déjà que les conseillers rapporteurs peuvent mettre les affaires en état d’être jugées. Cependant, il n’existe pas de clôture de la mise en état, et donc pas de délais fermés pour les échanges, puisque, en raison de la nature des affaires et des difficultés à apporter des preuves pour les salariés, les documents sont souvent déposés au dernier moment.
Avec la clôture de la mise en état, il faut bien comprendre que les droits des demandeurs ont davantage à perdre que l’efficacité et la rapidité de la justice n’ont à gagner.
De surcroît, cette procédure se mettant en place sans moyens supplémentaires pour le recrutement de greffiers, la tenue de telles audiences et la réception des pièces des parties vont forcément augmenter le temps de travail des conseillers, alors que les audiences de mise en état ne sont pas indemnisables aujourd’hui.
Monsieur le ministre, comment comptez-vous indemniser cette charge supplémentaire des conseillers ?
M. le président. L'amendement n° 1259, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 92 et 93
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. L’une des principales causes des retards imputables à la justice prud’homale réside dans l’absence des parties lors de la première phase d’audition. Une manœuvre dilatoire assez fréquemment utilisée par la partie mise en cause consiste à ne pas se présenter à la réunion du bureau de conciliation.
Les deux alinéas de l’article 83, que nous proposons de supprimer, ne constituent en rien une avancée au regard de ce qui existe. Ils présentent en effet le défaut essentiel de matérialiser la réduction de l’effectif des conseillers prud’homaux retenu pour composer le bureau de conciliation, ajustant ainsi l’activité de ce bureau aux insuffisances de moyens de la justice du travail.
De plus, ils ne permettent aucune avancée réelle en matière de règlement des litiges, puisque la réunion du bureau de conciliation demeure facultative et que l’absence des parties n’est compensée que par la réunion d’une sorte de conseil prud’homal amoindri.
Le risque est donc de voir s’établir une justice prud’homale à géométrie variable et à petite vitesse, dans laquelle les intérêts de la partie lésée ne pourront être correctement et valablement défendus. L’examen des situations pourrait alors devenir plus sommaire encore qu’il ne l’est aujourd’hui, tandis que les autres possibilités de résolution proposées par le texte de l’article 83 resteront ouvertes et seront éventuellement sollicitées.
Mes chers collègues, c’est sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 1767, présenté par M. Pillet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 92
Remplacer les mots:
En cas de non-comparution d'une partie ou de son représentant
par les mots:
Si une partie ne comparaît pas et qu'elle n'est pas représentée
La parole est à M. François Pillet, corapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les autres amendements en discussion.
M. François Pillet, corapporteur. L'amendement n° 1767 est un amendement rédactionnel.
J’en viens à l’amendement n° 1257. La possibilité d’orienter certaines affaires vers une autre formation, en l’espèce, ne nuit ni au justiciable ni à la procédure. Les justiciables sont associés à la division, qui ne peut se faire sans eux. Celle-ci est laissée à la libre appréciation du bureau de conciliation et d’orientation, qui va juger et apprécier. Enfin, les formations vers lesquelles sont orientées les affaires présentent toutes les garanties d’impartialité et de compétence requises. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable.
Les amendements nos 901 rectifié et 902 rectifié bis visent à supprimer tout le dispositif d’orientation précoce des affaires vers la formation restreinte de jugement, c'est-à-dire la formation de départage. Les raisons avancées pour cette suppression ne paraissent pas fondées, comme je l’ai déjà indiqué. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable sur les deux amendements.
L’amendement n° 482 rectifié vise, comme les précédents, à supprimer, en l’espèce presque totalement, le rôle d’orientation du bureau de conciliation. Chers collègues, il faudrait savoir ce que vous voulez : pas d’échevinage, pas de ceci, pas de cela…
Pour améliorer la procédure prud’homale, à l’image d’autres procédures, il faut la rendre plus rapide. Nous devons donc choisir des techniques qui n’affectent ni la qualité du débat contradictoire, ni la possibilité pour les parties d’être parfaitement représentées, ni, enfin, l’impartialité de la juridiction. L’innovation proposée dans ce texte nous apparaît pertinente et elle est assortie de garanties suffisantes. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable sur ces deux amendements.
L’amendement n° 1258 vise à supprimer les avancées permises par le texte en matière de mise en état des affaires. Au contraire, nous avons voulu développer cette technique, qui a été exposée devant la commission spéciale et qui recueille les faveurs de tous les magistrats que nous avons consultés. Elle est très attendue, et je regrette même que nous n’ayons pu aller encore plus loin dans son développement. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable sur cet amendement.
Enfin, contrairement à ce qu’affirment les auteurs de l’amendement n° 1259, celui-ci tend non pas à renforcer l’obligation de comparution personnelle en supprimant les alinéas 92 et 93, mais, bien au contraire, à la supprimer. L’équilibre auquel est parvenue la commission spéciale paraît raisonnable. La comparution est obligatoire, mais les parties peuvent se faire représenter. L’amendement rédactionnel n° 1767 que je vous ai soumis clarifie d’ailleurs encore cet équilibre. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Comme la commission spéciale, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 1257, 901 rectifié, 902 rectifié bis, 482 rectifié, 1258 et 1259.
En revanche, il est favorable à l’amendement n° 1767.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 902 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 626 est présenté par Mme Bricq, M. Guillaume, Mmes Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 1260 est présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 99 et 100
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Anne Emery-Dumas, pour présenter l’amendement n° 626.
Mme Anne Emery-Dumas. Dans son rapport, notre collègue Catherine Deroche affirme qu’un certain nombre d’éléments contribuent aux dysfonctionnements des conseils de prud’hommes, parmi lesquels la procédure orale et l’unicité de l’instance s’agissant d’un même contrat de travail.
Nous sommes pourtant attachés à ces particularités, en particulier à la procédure orale, qui permet aux parties, aux salariés notamment, de faire valoir personnellement leurs arguments.
La procédure prud’homale ne rend pas obligatoire la présence d’un avocat, que les salariés n’ont pas toujours les moyens de rémunérer. Il faut le rappeler, quelque 10 % des salariés ne peuvent aujourd’hui être accompagnés en appel. La création du défenseur syndical répond d’ailleurs à cette situation, puisque les salariés n’auront pas à le rémunérer. Le projet de loi reconnaît, sur ce point, la différence considérable de moyens qui existe, le plus souvent, entre l’employeur et le salarié en conflit.
Supprimer la procédure orale en appel implique de revenir sur cette capacité des parties à intervenir directement. À nos yeux, cela risque de créer une distorsion dans les capacités des parties, le plus souvent au détriment des salariés.