M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Monsieur Mézard, je me souviens fort bien que c’est sur votre initiative que, en première lecture, nous avons adopté un amendement sur les maisons de services au public. Bien entendu, nous l’avons repris en deuxième lecture.
Cela étant dit, il semble qu’un certain nombre de maires craignent de voir la région leur imposer des actions qui relèvent plutôt du niveau départemental. Or, je le rappelle, c’est le département qui a la responsabilité des solidarités territoriales.
Vous me connaissez assez, mes chers collègues, pour savoir que je considère la question des territoires ruraux comme importante !
Le schéma régional d’aménagement ne doit pas descendre à un niveau trop restreint. On a dit : « Pas au niveau de la parcelle ». Mais ça, c’est évident ! Ce dont il doit être question dans ce schéma, ce sont les grands itinéraires, les grandes zones destinées à accueillir des industries, des centres de recherche...
Nous avons l’expérience d’un schéma régional qui est à la fois un schéma d’aménagement du territoire, ce qui est très positif, et un schéma d’urbanisme, donc très prescriptif ; ce dernier aspect est, lui, très dangereux. On nous impose en effet des règles très strictes : « Vous êtes à 50 mètres de ceci ou de cela, donc vous n’avez pas le droit de construire ! ». Cela, bien entendu, nous n’en voulons pas ! Et, justement, ce n’est pas ce qui est prévu avec le schéma régional d’aménagement de l’article 6.
J’ai émis un avis favorable sur l’amendement du Gouvernement – après avoir dans un premier temps donné un avis défavorable, puisqu’il s’agit de supprimer une notion figurant dans le texte de la commission –, en posant la question suivante : est-ce vraiment le schéma régional qui doit régler le problème des services au public dans les zones rurales ? Pour ma part, je pense que cela relève plutôt du département.
Mais on peut dire aussi, et cela ne me gêne pas, qu’un schéma régional peut édicter des principes.
Nous étions défavorables au début, puis nous sommes devenus favorables. Le mieux est donc, me semble-t-il, de s’en remettre à la sagesse du Sénat…
M. André Reichardt. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. Je suis très perplexe, mais finalement conforté dans mon désir de m’exprimer par les interventions de mes amis André Reichardt et Jacques Mézard.
J’ai trouvé dans le texte de la commission des mots que je souhaitais lire dans un tel projet de loi. Toutefois, je crois que s’installe une grande confusion entre les objectifs et les moyens. Que les moyens soient déployés dans le cadre départemental, c’est positif parce que c’est le bon cadre. Il me paraît tout à fait nécessaire, en revanche, que les objectifs soient fixés au niveau régional.
Avant de développer ce point plus avant, je voudrais insister sur le fait que, pour moi – cela pourra en étonner certains –, la notion d’égalité des territoires ne correspond à rien : c’est une billevesée. Je préfère la notion d’équité.
Il est faux, en effet, de dire que l’on pourra assurer l’égalité entre les territoires, parce que les moyens disponibles au départ et ceux qui peuvent être finalement mis en œuvre ne sont pas les mêmes. Nous qui représentons des territoires ruraux le savons très bien : nous sommes moins bien pourvus que des territoires plus développés et plus peuplés. Disant cela, je ne cherche nullement à opposer les différents territoires. Je constate simplement que nous n’avons pas les mêmes besoins, que ceux-ci ne sont pas de même nature.
Je préfère donc, je le répète, la notion d’équité, qui, d’un point de vue étymologique, renvoie à la notion de juste traitement.
Pour ce qui concerne le point précis dont nous débattons, j’insiste beaucoup pour que, quoi qu’en ait dit le rapporteur, le texte de la commission soit adopté : après tout, la commission a adopté un texte. Pourquoi revenir dessus ?
L’un des arguments que vous avez avancés, madame la ministre, m’a tout de même un peu étonné. Vous nous avez dit que c’était à la demande de l’Association des maires de France ou d’associations d’élus que vous aviez déposé cet amendement. J’aimerais donc que des représentants des collectivités locales me confirment qu’il vaut mieux biffer cette partie de l’article !
Nous avons besoin d’affirmer cette notion d’équité. Encore une fois, il s’agit non pas des moyens que l’on met en œuvre, mais des objectifs que l’on définit.
À cet instant, madame la ministre, je veux attirer tout particulièrement votre attention sur un problème qui va tous nous affecter : l’organisation des services de soins.
À la demande du ministère de la santé, les agences régionales de santé, les ARS, sont en train de préparer des plans. Du reste, ces plans, je le dis au passage, ne sont pas communiqués aux élus. En revanche, ils le sont à la presse ! C’est donc entre les lignes des articles de journaux que les élus découvrent ce qu’ils peuvent considérer comme des menaces… Il y a là de quoi les déstabiliser !
Quoi qu'il en soit, c’est bien, par définition, au niveau régional et non départemental que les ARS élaborent des plans. Par conséquent, renvoyer au cadre régional la nécessité d’avoir des objectifs en matière d’offre des services au public me paraît essentiel.
Croyez-moi, mes chers collègues, ce serait une erreur de revenir sur le texte de la commission, texte que je défends, monsieur le rapporteur, avec ardeur !
M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Alors, votons-le !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. J’ai envie de dire que je reste neutre dans cette affaire.
On ne peut pas, à la fois, affirmer que le schéma ne doit pas descendre au niveau de la commune, des communautés de communes rurales, des communautés d’agglomération, qu’il ne doit pas leur imposer ceci ou cela, et demander au Gouvernement des schémas départementaux de services ainsi que le maintien de l’article 25.
Nous avons entendu les départements, qui expliquaient que la solidarité territoriale leur était donnée d’une main, mais ôtée de l’autre à travers le schéma régional. Il y a en effet une contradiction entre la volonté d’établir une solidarité territoriale et d’aider les communes qui en ont le plus besoin, d'une part, et celle d’inclure tout cela dans le schéma régional, d'autre part.
Si vous tenez à ce que l’on en revienne à une plus grande précision dans ce que fixera le schéma régional, cela ne me dérange pas du tout ! Le texte de la commission me convient tout autant que la proposition que nous avons faite et qui nous semblait raisonnable, compte tenu des oppositions qui s’étaient manifestées.
Vous avez cité les ARS, monsieur Lenoir. Pour ma part, je défends le schéma « CHU, CHR, CHL, pôle de proximité ». Nous devons y parvenir ! On ne peut pas continuer à avoir des personnes qui font des dizaines de kilomètres pour aller à l’hôpital, qui ne bénéficient pas de soins de suite, qui ne trouvent pas d’internes dans les pôles de santé de proximité. Ce n’est pas admissible ! Il y a un gros travail d’aménagement du territoire à faire en la matière et nous pourrons fixer, à cet égard, quelques orientations.
Fermer un hôpital local, c’est une erreur,…
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. … parce que cela coûte beaucoup plus cher de laisser une personne quinze jours dans un CHU.
M. Jean-Claude Lenoir. Vous avez raison !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Les CHU, que Mme Génisson connaît bien, ne souhaitent pas que les patients passent autant de temps dans leurs murs, et à des coûts prohibitifs.
J’en reviens au schéma. Il s’agissait de dire que les grands aménagements, tels que les routes, les gares, les aéroports – et M. Jacques Mézard a raison de défendre le sien ! – ainsi que d’autres équipements de ce type devaient être inclus dans le schéma.
Parmi les grandes orientations, je citerai à nouveau la question de la densification des bourgs ruraux, qui souffrent de la hausse des coûts. Il faut donc que l’établissement public foncier régional leur donne un coup de main. Sinon, ils n’y arriveront pas ! Conjuguer la densification des bourgs avec un bel outil régional peut permettre de trouver une solution, comme cela a été fait avec la densification des bourgs ruraux littoraux ou de montagne.
Il faut donc des grandes orientations. J’entends bien qu’il ne faut pas descendre à un niveau trop étroit, afin de ne pas mettre en danger la relation entre le département et la communauté de communes rurales. Par conséquent, je veux bien émettre un avis de sagesse sur mon propre amendement, lequel répond pourtant à des demandes.
Si cet amendement se heurte, ce soir, à une opposition, cela ne me dérange pas. Mais nous devrons faire preuve de cohérence et revoir, éventuellement, l’article 25. En effet, inclure ces dispositions à la fois dans le schéma régional et dans un schéma départemental des services, c’est peut-être une erreur. Par exemple, un pôle de recherche en biologie végétale a toute sa place en milieu rural...
Vous avez raison, monsieur Mézard, à propos des cadres. Si je souhaite mettre des cadres à la disposition des petites communautés d’agglomération et des communautés de communes rurales, c’est parce qu’il arrive souvent que ces collectivités, alors qu’elles ont de magnifiques projets, ne réussissent pas à répondre assez rapidement aux appels à projet ou aux appels à manifestation d’intérêt. Et si elles n’y parviennent pas, c’est précisément parce qu’elles n’ont pas à leur service les cadres qui seraient susceptibles de mener à bien les dossiers dans les temps requis. L’État doit prendre ses responsabilités à cet égard. C’est pourquoi j’ai proposé ce dispositif d’aide qui, je l’espère, sera expérimenté dans votre territoire.
M. René Vandierendonck, corapporteur. Très bien !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je me trouve donc dans une situation que je n’ai jamais connue : je m’en remets à la sagesse du Sénat sur un amendement du Gouvernement, lequel l’avait présenté justement pour tenir compte de vos convictions en la matière. Mais, en répondant à cette demande, je ne souhaite pas me heurter à l’opposition de ceux d’entre vous qui auraient formulé la même requête.
M. le président. L’amendement n° 554, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 7
Après les mots :
de pollution de l’air,
insérer les mots :
de protection et de restauration de la biodiversité,
II. – Après l’alinéa 11
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Art L. 4251-1-1. – Pour les régions dont le schéma régional de cohérence écologique, prévu à l’article L. 371-3 du code de l’environnement, a été adopté avant la publication de la loi n° … du … portant nouvelle organisation territoriale de la République, ce schéma est intégré au schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire défini par le présent chapitre.
« À titre transitoire, lorsque le schéma régional de cohérence écologique n’aura pas été adopté avant la publication de la loi précitée, ce schéma reste le document sectoriel de planification en vigueur, jusqu’à son intégration dans le schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire à l’occasion de la première révision de celui-ci.
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Obtiendrai-je, ce soir, l’explication que j’attends ?...
Dans « schéma régional d’aménagement du territoire », il y a le mot « territoire ». Ce document a vocation à synthétiser d’autres documents existants, qui concernent les transports, la maîtrise de l’énergie, les déchets, soit de nombreuses questions en lien avec l’environnement. Pourtant, ce document régional de planification territoriale n’intègre pas le schéma régional de cohérence écologique, le SRCE. J’espère que la présentation de cet amendement sera l’occasion d’éclaircir cette question.
Cet amendement vise à intégrer la protection de la biodiversité dans le SRADDET, qui se substituera ainsi au SRCE.
En outre, depuis la loi MAPTAM, la région est chef de file pour la protection de la biodiversité. Il y a donc là une cohérence.
J’aimerais donc comprendre pourquoi le schéma régional de cohérence écologique n’est pas intégré dans le SRADDET.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René Vandierendonck, corapporteur. Le présent amendement vise à élargir les objectifs du SRADDET à la protection et à la restauration de la biodiversité, et à intégrer le SRCE au sein de ce schéma. La question s’est déjà posée en première lecture.
Compte tenu de la difficulté que va représenter l’élaboration de ce nouveau schéma dans le cadre de nouvelles régions au périmètre élargi, il convient, dans un premier temps tout au moins, de prévoir des objectifs raisonnables.
En outre, rien n’empêchera les régions qui le souhaiteraient d’intégrer ces objectifs aussi le SRCE, comme le prévoit l’alinéa 9.
L’avis est donc défavorable, non sur le fond, mais dans la perspective d’une montée en charge progressive.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Ce que je vois dans cet amendement, c’est la cohérence par rapport à la volonté de limiter le nombre des schémas.
Pour autant, la difficulté évoquée par le corapporteur est bien réelle. Il reste que, cet après-midi, nous avons dit que nous prévoirions un délai après les élections. Nous avons donc plusieurs mois pour réfléchir au devenir du SRCE.
Dans ces conditions, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. Raffarin avait raison lorsqu’il a affirmé, un peu plus tôt dans la journée, qu’on ne peut pas à la fois vouloir lutter contre la « schématologie » et réinstaurer progressivement des schémas.
J’ajoute que l’adoption de cet amendement permettrait d’envoyer un signal important au moment où la France s’apprête à accueillir, à l’automne prochain, la COP 21 sur les changements climatiques et doit donc se montrer exemplaire.
M. le président. L'amendement n° 555, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le schéma précise dans quelles conditions d’intérêt général il peut être dérogé à l’interdiction de consommer des espaces naturels et agricoles.
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Cet amendement fait en quelque sorte écho aux propos enflammés qu’a tenus tout à l’heure René Vandierendonck puisqu’il tend à faire en sorte que le SRADDET expose les raisons pour lesquelles, dans tel ou tel cas, il est encore possible de consommer des espaces naturels et agricoles, alors que l’artificialisation du territoire est aujourd’hui – il me semble que cela fait ici consensus – l’une des grandes menaces environnementales dans notre pays.
En d’autres termes, si cette artificialisation des sols est inévitable, il faudra que le SRADDET explique quand et pourquoi elle l’est. Il s’agit d’encadrer très strictement l’artificialisation, afin de sécuriser tout le monde.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René Vandierendonck, corapporteur. Le présent amendement vise à préciser les conditions dans lesquelles le SRADDET peut déroger « à l’interdiction de consommer des espaces naturels et agricoles ».
Outre le manque de précision de cet amendement, je signale le SRADDET peut d’ores et déjà fixer des objectifs en termes de « gestion économe de l’espace ».
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement puisque l’objectif de ses auteurs est satisfait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il est également défavorable.
L’objectif que vise cet amendement figure déjà dans la loi ALUR et a été repris dans les orientations stratégiques du SRADDET sous l’item : « gestion économe de l’espace ». Il me semble qu’aller au-delà, ce serait descendre au niveau de la parcelle.
M. le président. Monsieur Dantec, l'amendement n° 555 est-il maintenu ?
M. Ronan Dantec. Non, je le retire, monsieur le président.
Mon amendement reposait sur l’idée qu’il est nécessaire d’arrêter de consommer de l’espace, bien sûr, mais tendait, dans cette perspective, à inverser en quelque sorte la charge de la preuve.
M. le président. L'amendement n° 555 est retiré.
L'amendement n° 556, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le schéma veille à limiter les concurrences foncières entre les territoires au sein de la région.
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Nous avons déjà évoqué ce sujet. Lorsque j’ai présenté cet amendement hier, on m’a en effet indiqué qu’il serait préférable de le déposer à l’article 6.
Mon amendement tend à attribuer au SRADDET la mission de veiller « à limiter les concurrences foncières entre les territoires ». Il s’agit d’une mesure extrêmement importante en termes d’aménagement du territoire, car on a gaspillé beaucoup d’espace dans notre pays en multipliant à tort et à travers les zones artisanales et les zones industrielles.
La planification régionale obéit à une logique de réduction de la concurrence entre les territoires et du gaspillage de l’argent public, et elle favorise la solidarité entre collectivités. Or la limitation de la consommation de l’espace est également une composante de cette solidarité.
Cet amendement, simple dans sa rédaction, contribue à la démarche d’aménagement du territoire régional.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René Vandierendonck, corapporteur. Cet amendement n’est pas suffisamment normatif. Pour ma part, je préfère ne laisser figurer dans le texte que les seules orientations structurantes du SRADDET. La collaboration entre collectivités territoriales permettra ensuite de combler les « trous ».
Nous savons qu’un certain nombre d’outils qui contribuent à la réduction de la consommation foncière devront être mis en place. Cela pourra passer, ici, par un « portefeuille » foncier, là, par un contrôle de l’ouverture de certaines zones d’urbanisme à la constructibilité, etc.
Nous avons souhaité que la décentralisation favorise un aménagement du territoire concerté et non plus imposé. Nous sommes nombreux ici à avoir rencontré des préfets qui, apprenant que nous débattions de la loi NOTRe, nous ont dit : « Ah, monsieur le sénateur, profitez-en pour nous redonner un peu d’autorité sur les DREAL, parce que, aujourd’hui, elles doivent directement rendre des comptes à leur ministre et à personne d’autre ! » (Sourires. – Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste, du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je constate que M. René Vandierendonck, sénateur, corapporteur et observateur, a lu la nouvelle charte de la déconcentration de l’État. Celle-ci décrit effectivement la nécessité d’une discussion entre les services de l’État à l’échelon régional. Il s’agit, du reste, du point qui a probablement fait l’objet des discussions plus longues avec les syndicats de fonctionnaires ; il représente un élément majeur de la déconcentration et de son organisation.
Nous avons l’habitude de parler de la REATE, c'est-à-dire la réforme de l'administration territoriale de l'État. Issue d’une excellente idée, elle a conduit à la remontée de silos jusqu’à l’administration centrale, autrement dit à Paris.
Pour en revenir à la charte de la déconcentration, monsieur le corapporteur, j’imagine qu’elle vous a été communiquée ou que vous avez pu la consulter en ligne. Avec cette charte, vous avez en quelque sorte obtenu satisfaction, bien qu’elle n’ait, c’est évident, aucune valeur législative.
Monsieur Dantec, même si je n’oublie qu’on vous a déjà demandé de présenter votre amendement plutôt à l’article 6, je dois vous dire qu’inclure dans les objectifs du SRADDET le soin de veiller « à limiter les concurrences foncières entre les territoires » n’est pas forcément opportun, car c’est, encore une fois, faire descendre ce schéma au niveau de la parcelle. C’est pourquoi je sollicite le retrait de cet amendement.
En l’occurrence, je serais plutôt favorable à une déclaration de principe. Je l’ai dit lors de la discussion générale : oui, nous devons limiter toutes les formes de concurrence entre les collectivités territoriales. La coopération doit nous y conduire. En revanche, votre amendement, en plus de poser des difficultés, n’est pas suffisamment normatif, le corapporteur l’a dit.
Nous devons collectivement réaffirmer que le but du SRADDET comme celui de l’organisation proposée est de contribuer à faire de la loi NOTRe une véritable loi d’organisation du territoire et non une loi de décentralisation. Nous devons donc limiter et même empêcher la concurrence entre territoires.
En déménageant des équipements industriels ou de logement, on a commis des erreurs monumentales ! Certaines collectivités ont ainsi pu proposer un foncier à des prix très inférieurs aux prix du marché parce que la ressource était disponible, quand d’autres collectivités se sont révélées impuissantes, faute de moyens comparables.
Monsieur Dantec, si vous avez tout à fait raison sur le fond, je pense qu’il est préférable d’en appeler à davantage de coopération. L’esprit de la loi est affiché : nous ne voulons plus de cette concurrence entre territoires !
J’ajoute enfin que, si le passage de l’hyper-richesse à l’hyper-pauvreté en Île-de-France est pris en compte par un schéma régional très prescriptif, nous n’en sommes pas à ce niveau de prescription dans la loi.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je ne vois pas bien ce que les DREAL viennent faire dans la discussion sur mon amendement. Il est question ici de la responsabilité qu’ont les acteurs locaux de trouver un accord pour limiter la concurrence entre territoires.
J’ai entendu ce qu’a dit Mme la ministre et je sais que nous avons la même approche de ce problème, mais un signal clair doit figurer dans la loi ! Je ne vois pas en quoi mon amendement nous ramène à la parcelle. Le SRADDET arrête les grands axes en matière d'aménagement du territoire. Mon amendement, quant à lui, vise à faire figurer qu’il est de la responsabilité du niveau régional d’éviter les concurrences entre collectivités.
L’adoption de mon amendement permettrait, lorsque la grande ville ou la grande agglomération prévoit de consacrer de nouvelles surfaces au développement économique, de se demander si cela ne se fait pas au détriment des surfaces économiques des villes moyennes ou des territoires ruraux. C’est pourquoi il me paraît justifié de faire figurer la phrase que je propose dans la loi.
M. le président. L'amendement n° 158, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Alinéa 8, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Il s’agit notamment des axes reliant les principales agglomérations de la région non reliées par une autoroute ou un réseau ferré et les accès aux principaux bassins d’emplois et aux grandes zones touristiques.
La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 158 et 159.
M. le président. J’appelle donc également en discussion l'amendement n° 159, présenté par M. Bouvard, et ainsi libellé :
Alinéa 8, seconde phrase
Compléter cette phrase les mots :
tant au niveau des conditions de circulation que des risques naturels
Veuillez poursuivre, monsieur Bouvard.
M. Michel Bouvard. Madame la ministre, le texte tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale prévoit que le schéma régional « identifie les voies et les axes routiers qui, par leurs caractéristiques, constituent des itinéraires d’intérêt régional ». Cependant, il n’est nulle part précisé de quelles caractéristiques il s’agit. Or ce sujet n’est pas totalement neutre. On a bien compris, lors du débat sur les routes, qu’un réseau d’intérêt régional serait géré par les départements mais pourrait bénéficier de contributions des régions.
Au travers de l’amendement n° 158, je souhaite préciser que ces axes sont notamment ceux qui relient « les principales agglomérations de la région » en l’absence d’autoroutes ou de réseaux ferrés, ainsi que ceux qui relient les « principaux bassins d’emplois » et les « grandes zones touristiques », de sorte que toutes ces caractéristiques soient bien prises en compte dans le schéma comme des priorités en matière de réseau routier. En effet, on le sait bien, si les départements gardent la compétence sur les routes, ce n’est pas tant du fait d’un choix délibéré du Gouvernement que parce que les régions n’en voulaient pas !
Quant à l’amendement n° 159, il vise à préciser que la sécurité concerne non seulement la sécurité routière au sens courant, mais aussi la sécurité au regard des risques naturels. En effet, sur certaines parties du territoire, la protection du réseau routier contre ces risques suppose des investissements assez importants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. M. Bouvard connaît certainement le peu d’appétence de la commission des lois pour le mot « notamment ». (Sourires.) Eh oui, cet adverbe permet d’introduire dans un texte une ou des dimensions que l’on tient à y voir figurer, mais c’est évidemment au risque d’en oublier beaucoup d’autres !
Bien sûr, nous n’ignorons rien des problèmes de circulation dans la vallée de la Maurienne, y compris en termes de pollution…
Quoi qu'il en soit, le schéma tel qu’il est proposé dans le texte de la commission identifie déjà, en collaboration avec les départements, « les voies et les axes routiers qui, par leurs caractéristiques, constituent des itinéraires d'intérêt régional ». Il me semble qu’il ne faut pas être plus précis ! L’amendement n° 158 vise, par exemple, les axes relient « les principales agglomérations de la région ». Mais ce ne sont pas forcément des itinéraires d’intérêt régional : c’est une question d’appréciation !
Par ailleurs, le texte prévoit que ces « itinéraires sont pris en compte par le département, dans le cadre de ses interventions, pour garantir la cohérence et l'efficacité du réseau routier ainsi que la sécurité des usagers ». Tout cela est lié à l’article 9 et, selon moi, il existe une cohérence entre les dispositions de cet article 6 et celles de l’article 9.
Je comprends votre préoccupation, mon cher collègue, mais il me semble préférable de conserver la définition qu’a retenue la commission. Apporter davantage de précisions conduirait nécessairement à oublier des éléments. C’est pourquoi la commission des lois a, de toute éternité, rejeté les dispositifs législatifs contenant le mot « notamment ».
M. Jean-Claude Lenoir. Elle est a parfaitement raison !
M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. La commission émettra donc un avis défavorable sur cet amendement, comme elle le fera d’ailleurs sur tous les amendements concernant la voirie, compte tenu de ce que je viens d’indiquer. Cela nous permettra de gagner du temps, car je note qu’il est déjà minuit.
Il y a une concertation entre la région et les départements. Nous n’allons pas rouvrir le débat sur la répartition des compétences entre départements et régions !
M. René Vandierendonck, corapporteur. Très bien !
M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Il est entendu, une bonne fois pour toutes, que les routes relèvent de la compétence des départements, les régions pouvant apporter leur concours au bénéfice des itinéraires d’intérêt régional, qui sont souvent d’anciens itinéraires nationaux dont l’État s’est naguère délesté sur les départements, sans d’ailleurs leur accorder de compensations suffisantes.
M. Bruno Sido. C’est bien vrai !
M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Rendez-vous compte, mes chers collègues, que, en Seine-et-Marne, nous avons perdu la Nationale 7. Quand on repense à Charles Trénet, quelle tristesse ! (Sourires.)
M. François Bonhomme. La nostalgie nous étreint !
M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, il est presque minuit, ainsi que vient de la signaler M. Hyest. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit trente.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 158 et 159 ?