M. le président. L'amendement n° 245, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Nous proposons de supprimer l’article 14, qui représente un recul par rapport au droit actuel.
En effet, alors que le dialogue social devrait être enrichi, et le temps qui y est consacré sanctuarisé, cet article regroupe les thèmes de négociation en trois ensembles et revient sur la périodicité des négociations. Il est également prévu que le comité d’entreprise ne sera plus informé sur les négociations, ce qui réduira d’autant les discussions.
L’article supprime les négociations dédiées à l’égalité professionnelle menées sur la base du rapport de situation comparée femmes-hommes, qui est lui aussi remis en cause ; nous en avons parlé. Au-delà de cette mesure, décriée à juste titre par celles et ceux qui promeuvent l’idée d’une égalité entre les sexes, d’autres dispositions posent problème et justifient que nous rejetions l’article en bloc.
Le premier thème de négociation est « la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée ». Au sein de ce thème sont notamment regroupées les négociations sur les salaires et la durée de travail et les négociations sur les accords d’intéressement, de participation et d’épargne salariale. Or chacune de ces deux négociations est un moment fort dans la vie de l’entreprise, qui nécessite du temps et de l’énergie ; c'est pourquoi elle doit faire l’objet d’une réunion spécifique.
De plus, la négociation sur le salaire et le temps partiel comprenait une négociation sur la formation et la structure des emplois : recours à l’intérim, CDD, précarité dans l’entreprise, etc. Ces négociations sont ici sorties du thème n° 1 pour être intégrées au thème n° 3. Or ce dernier est réalisé sur une base non pas annuelle, mais triennale, ce qui pose problème.
Concernant le thème n° 2, relatif à la qualité de vie au travail et l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, il se substitue aux anciens thèmes de négociation suivants : la négociation annuelle sur les travailleurs handicapés et la négociation sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Mes chers collègues, comme pour l’égalité professionnelle, dont nous avons beaucoup parlé, j’attire votre attention sur le fait que la négociation sur l’insertion des travailleurs handicapés pourra désormais s’effectuer sur une base triennale, après conclusion d’un accord. Ce point est un grave recul, surtout quand on sait que le taux d’emploi des travailleurs handicapés stagne autour de 4 % de l’effectif du secteur privé, pour une obligation légale de 6 %.
Le thème n° 3 concerne la négociation sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, qui aura lieu sur une base triennale, comme c’est le cas aujourd’hui. Or les champs de négociation sont élargis : contrat de génération, mixité des métiers, déroulement de carrières des salariés ayant des responsabilités syndicales, etc. Avec cette variété de thèmes, comment garantir que ces négociations, pourtant si nécessaires, pourront être menées dans de bonnes conditions ?
Aussi, nous pensons que, avec cet article, il s’agit non pas de rationaliser le dialogue social, mais de réduire sa portée ; d’où notre amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Cher collègue, vous voulez supprimer cet article qui regroupe les négociations obligatoires en entreprise autour de trois thématiques.
Comme il s’agit justement de l’un des apports du projet de loi, nous sommes opposés à cette suppression. En effet, il nous a semblé que cette réorganisation se faisait à droit constant, mais en introduisant un peu de souplesse. N’étant pas pour la rigidité en matière de consultation, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Rebsamen, ministre. Monsieur Watrin, je suis défavorable à votre proposition de suppression de l’article et je vais vous expliquer pourquoi en détail, car nous allons retrouver les mêmes arguments s’agissant des négociations.
À mon sens, cet article représente une avancée ou, en tout cas, il est perçu de cette façon. Je le répète, le dialogue social souffre aujourd’hui d’une trop grande fragmentation. Tous les diagnostics se rejoignent sur ce constat. Or ce texte vise à donner plus de sens au dialogue social, tout en faisant confiance aux acteurs, c’est-à-dire aux partenaires sociaux.
Comme vous l’avez rappelé, les négociations sont regroupées en trois grands blocs cohérents : les rémunérations, le temps de travail et la valeur ajoutée ; l’égalité professionnelle femme-homme et la qualité de vie au travail ; la gestion des emplois et les parcours professionnels.
Les partenaires sociaux pourront donc conclure des accords de méthode, s’ils le souhaitent, pour regrouper autrement ces négociations et en adapter la périodicité. Le texte du Gouvernement offre toutes les garanties pour qu’il n’y ait pas de moins-disant dans la proposition, puisqu’il doit s’agir d’un accord majoritaire, conclu à plus de 50 %.
Tous les thèmes seront donc abordés, et la négociation sur les salaires aura, bien sûr, une place à part.
M. le président. L'amendement n° 246, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
les femmes et les hommes
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
dans l’entreprise, ainsi que sur les mesures permettant de les atteindre. Cette négociation s’appuie sur les éléments figurant dans les rapports prévus aux articles L. 2323-47 et L. 2323-57, complétés par les indicateurs contenus dans la base de données économique et sociale mentionnées à l’article L. 2323-7-2 et par toute information qui paraît utile aux négociateurs. Cette négociation porte notamment sur les conditions d’accès à l’emploi, à la formation professionnelle et à la promotion professionnelle, sur le déroulement des carrières, les conditions de travail et d’emploi et, en particulier, celles des salariés à temps partiel, sur l’articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et sur la mixité des emplois. Cette négociation porte également sur l’application de l’article L. 241-3-1 du code de la sécurité sociale et sur les conditions dans lesquelles l’employeur peut prendre en charge tout ou partie du supplément de cotisations. Elle porte enfin sur la définition et la programmation de mesures permettant de supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes. Lorsqu’un accord triennal comportant de tels objectifs et mesures est signé dans l’entreprise, l’obligation de négocier devient triennale. La mise en œuvre des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération et les différences de déroulement de carrière entre les femmes et les hommes est suivie dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire sur les salaires effectifs prévue à l’article L. 2242-8 du présent code ;
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Mes chers collègues, vous le constatez, et M. le ministre vient d’y faire allusion, cet article 14 fait l’objet d’un grand nombre d’amendements de la part de mon groupe, notamment en ce qui concerne l’égalité professionnelle, un sujet qui nous mobilise beaucoup.
En effet, nous sommes nombreux à avoir été alertés par les associations féministes, qui, découvrant ce projet de loi, ont eu la mauvaise surprise de se rendre compte que vous reveniez sur l’un des acquis fondamentaux de ces dernières années, à avoir le rapport de situation comparée. Le nombre d’amendements pour améliorer le texte à cet égard est bien la preuve que, malgré votre rétropédalage pour calmer les inquiétudes légitimes, le compte n’y est pas.
Avec cet amendement, nous essayons de revenir sur la suppression des négociations annuelles dédiées à l’égalité professionnelle. Ajouter une autre thématique, à savoir la qualité de vie au travail, au contenu de ces négociations entraîne un fort risque de dilution des problématiques spécifiques à l’égalité professionnelle. Or, pour nous, cette question est primordiale, et se retrouve malheureusement dans l’ensemble des entreprises, aucune n’étant réellement exemplaire en la matière. Prendre en compte de manière spécifique cette question, lors des négociations obligatoires, n’est donc pas vain.
Nous proposons par conséquent d’ajouter les domaines précis sur lesquels la négociation doit porter : les conditions d’accès à l’emploi, à la formation professionnelle et à la promotion professionnelle, le déroulement des carrières, les conditions de travail et d’emploi, en particulier, celles des salariés à temps partiel, l’articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle, ainsi que la mixité des emplois.
C’est sur l’ensemble de ces champs que l’égalité professionnelle doit se décliner. Surtout, nous souhaitons ajouter un autre élément à cet alinéa, à savoir l’obligation de préciser les mesures à prendre pour atteindre cette égalité au regard de tous ces critères.
Pour nous, il s’agit de l’un des points durs de ce texte, et nous serons donc très attentifs aux réponses qui nous seront apportées, monsieur le ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Mme David connaît déjà la position de la commission ! Je précise par ailleurs que les dispositions de cet amendement font référence à des rapports prévus dans deux articles du code du travail qui ont été supprimés à l’article 13.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Rebsamen, ministre. Je vais préciser de nouveau ma position, puisque, visiblement, nous avons du mal à nous comprendre ou, plus exactement, à nous entendre.
Mme Nicole Bricq. En effet !
M. François Rebsamen, ministre. Je le répète, madame David, votre proposition va à l’encontre de l’esprit de ce texte, qui obéit à une démarche logique en créant des blocs cohérents de négociation. Comme je l’ai déjà souligné, le dialogue social souffre aujourd’hui d’une trop grande fragmentation. Tous les diagnostics se rejoignent sur cette analyse, sans aucun avis divergent.
Autrement dit, nous assistons à une véritable perte de sens du dialogue social quand il est répétitif, inintéressant et ne porte pas sur des enjeux stratégiques.
M. Alain Gournac. Voilà !
M. François Rebsamen, ministre. Soyez néanmoins rassurée, madame David : l’égalité professionnelle femmes-hommes a toute sa place dans le nouveau dispositif.
Cette égalité sera d’ailleurs abordée – c’est écrit en toutes lettres dans le texte ! – dans la nouvelle négociation sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail, ou QVT, mais également dans la négociation sur les rémunérations et dans celle sur la gestion des emplois et des parcours professionnels.
Je considère même qu’il s’agit d’une avancée, puisque cette question pourra être abordée à la fois de manière spécifique et de manière transversale ! De plus, les délégués syndicaux que j’ai rencontrés ont bien compris qu’ils pourraient s’appuyer sur la rubrique dédiée de la base de données à laquelle ils auront accès en permanence.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Cet article est très important, car il rationalise le déroulement des discussions entre les organisations représentatives de salariés et l’employeur au sein de l’entreprise. Il simplifie donc la vie de l’entreprise en tant que collectif humain et, en même temps, il redonne du lustre aux négociations.
Par ailleurs, il est bien précisé dans le texte que l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes fait l’objet d’une négociation. Ce point a même été renforcé par un amendement de la commission, sur l’initiative de Mme la rapporteur, qui est attentive à ce sujet.
Madame David, vous ne pouvez pas dire que les organisations représentatives ne sont pas assez documentées pour mener ces discussions sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Je m’inscris en faux contre cette affirmation.
Certes, au départ, il y a eu un peu de retard à l’allumage sur cette question, si vous me permettez l’expression. Néanmoins, la mobilisation des collectifs féministes a tout de suite fait réagir M. le ministre, qui a rectifié l’erreur quasiment dans la journée.
À ce sujet, je voudrais tout de même vous faire remarquer que les organisations syndicales de salariés comme les organisations patronales ne mettent pas cette question en haut de l’affiche. Quand vous observez les délégations patronales et les délégations syndicales, cherchez les femmes… Il est donc quelque peu injuste d’accuser le Gouvernement et le projet de loi dans cette affaire. Cessez de dire que ce projet de loi est incomplet et qu’il organise un recul, car ce n’est pas vrai. Tout a été rectifié, et même renforcé par la commission.
Le groupe socialiste présentera tout de même des amendements, mais ils auront pour objet d’ajouter des garanties au dispositif. Personne ne perdra de droits en la matière, et vous le savez bien, ma chère collègue.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Madame Bricq, je suis désolée si vous n’avez pas envie de nous entendre dire ce que nous avons à dire, mais nous allons continuer. (M. Roger Karoutchi s’esclaffe.)
M. Jean-Pierre Bosino. Oui, monsieur Karoutchi, nous allons continuer ! (Sourires.)
Mme Annie David. Madame Bricq, je suis d’accord avec vous sur un point : pour avoir été syndicaliste dans une vie antérieure et avoir participé à des négociations, je sais que les problèmes de l’égalité professionnelle hommes femmes, du déroulement de carrière des femmes et de la place des femmes dans l’entreprise et dans le syndicalisme ne sont pas forcément les premiers dans l’ordre des priorités de l’ensemble des organisations syndicales, quelles qu’elles soient.
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas spontané chez elles !
Mme Annie David. Sur ce point, je veux bien vous entendre, mais, au sein des organisations syndicales, il y a quand même des femmes syndicalistes qui essaient de se faire entendre, comme dans cet hémicycle.
Je ne vous rappellerai pas le nombre de femmes qui siègent ici, mais nous ne sommes tout de même pas en force. Pour autant, nous sommes souvent très présentes en séance publique pour représenter la gent féminine, ce qui est plutôt positif. Je ne voudrais pas qu’il en soit autrement.
M. Michel Le Scouarnec. On ne vous laissera pas seules ! (Sourires.)
Mme Annie David. Justement, par notre présence par exemple et par nos interventions, nous faisons en sorte de nous assurer que, dans l’ensemble des textes, et plus précisément dans celui qui nous occupe aujourd’hui, l’égalité en termes de promotion, de formation professionnelle, de temps de travail, bref, l’égalité dans toutes les problématiques qui intéressent les femmes salariées dans les entreprises soit suffisamment prise en compte.
Peut-être que nos interventions vous semblent redondantes, madame Bricq, mais il y a plusieurs articles dans cette loi qui abordent le thème de la négociation. En l’occurrence, il s’agit des NAO, les négociations annuelles obligatoires, qui, d’ailleurs, pour certaines, vont devenir triennales, alors que d’autres resteront annuelles. À mon sens, ces modifications ne constituent pas un progrès, mais, apparemment, elles répondent à des impératifs de rationalisation et de simplification…
Dans un instant, nous défendrons un amendement, par la voix de mon collègue Michel Le Scouarnec, pour dire ce que nous pensons de cette nouvelle périodicité.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous souhaitons faire entendre l’inquiétude que provoque chez nous ce texte, qui, de notre point de vue, ne va dans le sens d’une amélioration ni du dialogue social ni de la représentation des salariés.
Nous continuerons à défendre nos amendements, qui sont en nombre, notamment sur cet article 14, d’autant que nous sommes suffisamment nombreux en séance pour pouvoir le faire.
M. le président. L'amendement n° 17 rectifié, présenté par M. Cadic, Mme Billon, MM. Canevet, Guerriau et Gabouty et Mme Loisier, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Si un accord de branche étendu applicable à l’entreprise couvre déjà l’un ou plusieurs de ces sujets à l’exception des rémunérations, l’employeur peut, après en avoir informé le comité d’entreprise, décider de ne pas engager les négociations concernées au sein de l’entreprise et appliquer directement l’accord de branche. » ;
La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.
Mme Anne-Catherine Loisier. Il s’agit ici de permettre à l’employeur qui le souhaite de ne pas engager un ou plusieurs sujets de négociation obligatoire – hors négociation annuelle obligatoire sur les salaires –, dès lors qu’un accord de branche étendu couvre déjà l’un des sujets de négociation obligatoire de façon satisfaisante. Ce faisant, nous cherchons à éviter toute redondance.
Le champ de la négociation obligatoire est vaste, ce qui implique d’y consacrer un temps important. Dans ce cas de figure, c’est l’accord de branche qui sera appliqué directement dans l’entreprise.
Mes chers collègues, cette disposition représente un immense enjeu de simplification juridique pour les PME.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Il s’agit d’une piste intéressante, qui s’inscrit dans le mouvement de rationalisation des négociations entamé à l'article 14. Néanmoins, elle soulève un certain nombre de difficultés. L’adoption de cet amendement aboutirait en effet à dispenser l’employeur d’ouvrir par exemple des négociations sur la durée du travail, l’épargne salariale, l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés ou la prévoyance, dès lors que l’entreprise serait couverte par un accord de branche étendu, même si celui-ci a été conclu des années auparavant.
Je doute que ce soit là le but visé. En outre, il semble pertinent d’attendre les conclusions de la mission confiée à Jean-Denis Combrexelle.
C'est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Loisier, l'amendement n° 17 rectifié est-il maintenu ?
Mme Anne-Catherine Loisier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 17 rectifié est retiré.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures quarante.)
M. le président. La séance est reprise.
L'amendement n° 247, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
II. – Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la deuxième phrase, les mots : « aux articles L. 2323-47 et L. 2323-57 » sont remplacés par les mots : « au 1° bis de l’article 2323-8 ».
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. Nous revenons sur la question de l’égalité professionnelle, qui nous tient à cœur. Monsieur le ministre, le problème n’est pas que nous ne puissions pas nous entendre. Vous ne vous entendrez pas non plus avec un certain nombre d’associations et d’organisations féministes.
Cette question est un sujet de préoccupation important. C’est d’ailleurs pourquoi nous avons tant insisté sur la nécessité d’un rapport annuel de situation comparée des conditions générales d’emploi et de formation des femmes et des hommes.
En effet, l’alinéa 12 de l'article 14 propose ni plus ni moins de supprimer des obligations de l’employeur lors des négociations annuelles obligatoires, à savoir la remise aux délégués syndicaux et aux salariés des documents et informations permettant une analyse de la situation comparée entre les femmes et les hommes. Nous insistons, car la disparition de ces obligations à nos yeux essentielles nous inquiète vivement.
On prétend que le dialogue social est inintéressant et qu’il faut le simplifier et lui redonner du lustre.
Mme Nicole Bricq. Le vivifier !
M. Jean-Pierre Bosino. Pour qu’il en soit ainsi, encore faut-il qu’il y ait du « grain à moudre », pour reprendre une formule célèbre. En l’occurrence, c’est bien le contenu des négociations qui explique l’état du dialogue social dans notre pays.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que ne soient pas supprimées un certain nombre de références dans ce projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Je ne répéterai pas les arguments que j’ai déjà développés sur cette question. La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 319, présenté par Mme Procaccia, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 23, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
II. – Après l’alinéa 42
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les entreprises de travaux forestiers mentionnées au 3° de l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime, la négociation définie au premier alinéa du présent 5° porte sur l’accès aux garanties collectives mentionnées à l’article L. 911-2 du code de la sécurité sociale ;
La parole est à Mme la rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 70 rectifié est présenté par Mmes Jouanno et Bouchoux.
L'amendement n° 252 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Gonthier-Maurin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 36
1° Première phrase
Après les mots :
écarts de rémunération
insérer les mots :
, d’articulation entre la vie personnelle et la vie professionnelle
2° Seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Cette négociation s’appuie sur le rapport sur la situation comparée des femmes et des hommes en matière d’égalité professionnelle au sein de l’entreprise, mentionné au 2° de l’article L. 2323-17.
L'amendement n° 70 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Christine Prunaud, pour présenter l'amendement n° 252.
Mme Christine Prunaud. Mes chers collègues, cet amendement est lié à celui que nous avons précédemment défendu à l’article 13. Il a pour objet le rapport de situation comparée entre les femmes et des hommes.
Nous vous proposons de modifier la rédaction de l’alinéa 36 du présent article, afin de réintroduire le domaine de l’articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle dans la négociation sur l’égalité professionnelle.
Nous le savons, les inégalités professionnelles trouvent leur origine, non seulement dans les plafonds et les parois de verre, mais aussi dans le partage toujours très inégal des responsabilités familiales et domestiques.
Chacun connaît cette situation, mais il est bon de la rappeler dans cet hémicycle. On peut, par exemple, lire dans l’édition 2012 de la publication Regards sur la parité, qui est assurée par l’INSEE : « Si la durée totale consacrée au travail domestique et au travail professionnel est proche en moyenne entre hommes et femmes, sa répartition entre les deux composantes demeure très inégale entre les sexes.
« Depuis vingt-cinq ans, l’écart de situation entre les hommes et les femmes s’est réduit, pour l’essentiel du fait de la diminution du temps passé par les femmes aux tâches domestiques et non d’une augmentation du temps masculin. […]
« […] L’inégalité du partage des tâches domestiques continue d’être d’autant plus forte que les ménages comptent des enfants. Le temps passé par les pères à s’occuper de leurs enfants a certes augmenté sur les dix dernières années, mais les femmes s’en occupent plus également, si bien que les inégalités selon le sexe restent inchangées. »
Il est donc primordial de réintroduire ce thème dans le présent article. Il figure d’ailleurs dans l’actuelle version de l’article L. 2242-5 du code du travail, relatif à la négociation sur les objectifs d’égalité professionnelle et salariale entre les femmes et les hommes dans l’entreprise, ainsi que sur les mesures permettant de les atteindre.
De surcroît, cet amendement tend à préciser que la négociation doit s’appuyer sur le rapport sur la situation comparée des femmes et des hommes. Cette disposition est en cohérence avec notre volonté de réintroduire, en tant que tel, ce document.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Pour les raisons que j’ai déjà exposées, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Rebsamen, ministre. Comme les précédents, cet amendement est déjà satisfait. Aussi, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 71 rectifié est présenté par Mmes Jouanno et Bouchoux.
L'amendement n° 253 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Gonthier-Maurin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 38
Rédiger ainsi cet alinéa :
« En l’absence d’accord, l’employeur établit un plan d’action unilatéral destiné à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes fondé sur le rapport sur la situation comparée des femmes et des hommes en matière d’égalité professionnelle au sein de l’entreprise, mentionné au 2° de l’article L. 2323-17. L’accord et le plan d’action sont déposés auprès de l’autorité administrative. Une synthèse de l’accord ou, à défaut, du plan d’action unilatéral, comprenant au minimum des indicateurs et des objectifs de progression définis par décret, est portée à la connaissance des salariés par l’employeur par voie d’affichage sur les lieux de travail et, éventuellement, par tout autre moyen adapté aux conditions d’exercice de l’activité de l’entreprise. Elle est également tenue à la disposition de toute personne qui la demande et publiée sur le site internet de l’entreprise lorsqu’il en existe un.
L’amendement n° 71 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 253.