Sommaire

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

Secrétaires :

M. Jean Desessard, Mme Colette Mélot.

1. Procès-verbal

2. Désignation de sénateurs en mission temporaire

3. Candidatures à des organismes extraparlementaires

4. Prise d’effet de nominations à une commission mixte paritaire

5. Dépôt de documents

6. Communication du Conseil constitutionnel

7. Questions orales

cumul du revenu de solidarité active et du contrat de service civique pour mères mineures isolées

Question n° 1135 de M. Hervé Poher. – M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports ; M. Hervé Poher.

fête des loges de saint-germain-en-laye

Question n° 1153 de M. Alain Gournac. – M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports ; M. Alain Gournac.

plan numérique pour l'éducation

Question n° 1150 de M. Éric Doligé. – M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports ; M. Éric Doligé.

schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux du bassin rhône-méditerranée pour 2016 à 2021

Question n° 1131 de M. Michel Bouvard. – M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche ; M. Michel Bouvard.

financement des transports publics

Question n° 1140 de M. Loïc Hervé. – M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche ; M. Loïc Hervé.

difficultés de financement des projets par les agences de l'eau

Question n° 1142 de Mme Agnès Canayer. – M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche ; Mme Agnès Canayer.

démantèlement de la centrale nucléaire de brennilis

Question n° 1143 de Mme Maryvonne Blondin. – M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche ; Mme Maryvonne Blondin.

mention « reconnu garant de l'environnement »

Question n° 1162 de M. Maurice Vincent. – M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche ; M. Maurice Vincent.

expérimentation des salles de consommation de drogue à moindre risque

Question n° 1134 de Mme Dominique Estrosi Sassone. – Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie ; Mme Dominique Estrosi Sassone.

inadaptation des normes appliquées aux centres hospitaliers de proximité

Question n° 1136 de M. Alain Duran. – Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Alain Duran.

efforts financiers demandés aux structures hospitalières dans le nord-pas-de-calais

Question n° 1154 de Mme Catherine Génisson. – Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie ; Mme Catherine Génisson.

pénurie de vaccins

Question n° 1155 de Mme Jacqueline Gourault. – Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie ; Mme Jacqueline Gourault.

bilan du pacte santé-territoire et évolution de la démographie médicale

Question n° 1159 de M. Hervé Maurey. – Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Hervé Maurey.

statistiques sur l’illettrisme en picardie et en particulier dans l’aisne

Question n° 1138 de M. Antoine Lefèvre. – M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche ; M. Antoine Lefèvre.

modalités d’attribution de la majoration forfaitaire du fonds de soutien aux activités périscolaires pour les écoles rurales

Question n° 1123 de Mme Marie-Pierre Monier. – M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche ; Mme Marie-Pierre Monier.

résidence alternée et attribution de la bourse de l’enseignement supérieur sur critères sociaux

Question n° 1144 de M. Dominique Bailly. – M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche ; M. Dominique Bailly.

occupation illégale de territoires

Question n° 1145 de Mme Nathalie Goulet. – M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche ; Mme Nathalie Goulet.

projet de réalisation d’un « central park » à la courneuve

Question n° 1156 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité ; Mme Aline Archimbaud.

recrudescence des cambriolages en milieu rural

Question n° 1141 de M. Jacques Genest. – Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité ; M. Jacques Genest.

8. Nomination de membres de deux organismes extraparlementaires

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

9. Modification de l’ordre du jour

10. Éloge funèbre de Jean Germain, sénateur d’Indre-et-Loire

M. le président

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

11. Conventions internationales. – Adoption en procédure accélérée et en procédure d’examen simplifié de deux projets de loi dans les textes de la commission

Convention France-Andorre dans le domaine de l’enseignement. – Adoption définitive, en procédure accélérée, de l’article unique du projet de loi dans le texte de la commission.

Accord entre la France et le Secrétariat de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et son protocole de Kyoto, relatif aux changements climatiques (COP 21). – Adoption, en procédure accélérée, de l’article unique du projet de loi dans le texte de la commission.

12. Réouverture exceptionnelle des délais d'inscription sur les listes électorales. – Adoption en nouvelle lecture d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale :

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État chargée de la réforme de l’État et de la simplification

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur de la commission des lois

M. Robert Navarro

M. Mathieu Darnaud

M. Yves Détraigne

M. Philippe Kaltenbach

Mme Esther Benbassa

M. Patrick Abate

M. François Fortassin

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État

Clôture de la discussion générale.

Article 1er

M. Jean-Pierre Grand

Amendement n° 1 de M. Philippe Kaltenbach. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 2 (supprimé)

Amendement n° 2 de M. Philippe Kaltenbach. – Retrait.

L’article demeure supprimé.

Intitulé de la proposition de loi

Amendement n° 3 de M. Philippe Kaltenbach. – Retrait.

Adoption en nouvelle lecture d’une proposition de loi dans le texte de la commission.

13. Réforme de l'asile. – Discussion en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale :

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois

M. Roger Karoutchi, rapporteur pour avis de la commission des finances

Mme Valérie Létard

M. Jean-Yves Leconte

Mme Esther Benbassa

14. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

15. Réforme de l'asile. – Suite de la discussion et adoption en nouvelle lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale (suite) :

Mme Cécile Cukierman

M. François Fortassin

M. Christophe-André Frassa

M. Philippe Kaltenbach

Clôture de la discussion générale.

Article 2

Amendement n° 18 de Mme Esther Benbassa. – Non soutenu.

Adoption de l’article.

Articles 3, 4, 4 bis, 5 et 5 bis – Adoption.

Article 6

Amendement n° 26 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 7

Amendement n° 12 de M. Jean-Yves Leconte. – Rejet.

Amendement n° 19 de Mme Esther Benbassa. – Rejet.

Amendement n° 27 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 1 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 13 de M. Jean-Yves Leconte. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Article 7 bis – Adoption.

Article 8

Amendement n° 20 de Mme Esther Benbassa. – Rejet.

Amendement n° 21 de Mme Esther Benbassa. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 9

Amendement n° 6 de M. Jean-Yves Leconte. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 10

Amendement n° 22 de Mme Esther Benbassa. – Rejet.

Amendement n° 23 de Mme Esther Benbassa. – Devenu sans objet.

Amendement n° 28 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 11 rectifié du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 12 – Adoption.

Article 13

Amendement n° 17 de M. Jean-Yves Leconte. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 14

Amendement n° 14 de M. Jean-Yves Leconte. – Rejet.

Amendement n° 24 de Mme Esther Benbassa. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 14 bis

Amendements identiques nos 8 de Mme Éliane Assassi et 25 de Mme Esther Benbassa. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Article 15

Amendement n° 4 rectifié de Mme Valérie Létard. – Adoption.

Amendement n° 9 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 3 de M. Roger Karoutchi rapporteur pour avis. – Rejet.

Amendement n° 5 de M. Jean-Yves Leconte. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Articles 16 et 17 – Adoption.

Article 18

Amendement n° 29 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 19

Amendement n° 15 de M. Jean-Yves Leconte. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 19 bis A (suppression maintenue)

Article 19 ter – Adoption.

Article 19 quater

Amendements identiques nos 10 de Mme Éliane Assassi et 16 de M. Jean-Yves Leconte. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Article 20

Amendement n° 30 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 21

Amendement n° 31 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 23

Amendement n° 2 rectifié du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Vote sur l'ensemble

M. Jean-Yves Leconte

M. Jean-Claude Requier

Mme Cécile Cukierman

Mme Valérie Létard

Adoption en nouvelle lecture du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

16. Prise d’effet de nominations à une commission mixte paritaire

17. Communication du Conseil constitutionnel

18. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

Secrétaires :

M. Jean Desessard,

Mme Colette Mélot.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 2 juillet 2015 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Désignation de sénateurs en mission temporaire

M. le président. Par courrier en date du 2 juillet 2015, M. le Premier ministre a fait part de sa décision de placer, en application de l’article L.O. 297 du code électoral, Mme Patricia Schillinger, sénateur du Haut-Rhin, et M. André Reichardt, sénateur du Bas-Rhin, en mission temporaire auprès de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et de M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

Cette mission portera sur le régime local d’assurance maladie d’Alsace-Moselle (RLAM).

Acte est donné de cette communication.

3

Candidatures à des organismes extraparlementaires

M. le président. M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d’un sénateur appelé à siéger au sein de la Commission nationale chargée de l’examen du respect des obligations de réalisation de logements sociaux.

La commission des affaires économiques a fait connaître qu’elle propose la candidature de Mme Marie-Noëlle Lienemann.

En outre, M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d’un sénateur appelé à siéger comme membre suppléant au Conseil national du travail social.

La commission des affaires sociales a fait connaître qu’elle propose la candidature de M. Gérard Roche.

Ces candidatures ont été publiées et seront ratifiées, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.

4

Prise d’effet de nominations à une commission mixte paritaire

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

En conséquence, les nominations intervenues lors de notre séance du 24 juin dernier prennent effet.

5

Dépôt de documents

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la contre-expertise de l’évaluation socio-économique du projet de modernisation de la ligne Serqueux-Gisors, accompagnée de l’avis du commissariat général à l’investissement.

Acte est donné du dépôt de ces documents.

Ils ont été transmis à la commission des finances, à la commission des affaires économiques et à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

6

Communication du Conseil constitutionnel

M. le président. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 6 juillet 2015, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 33 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 (Activités professionnelles organisées dans les établissements pénitentiaires) (2015-485 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.

Acte est donné de cette communication.

7

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

cumul du revenu de solidarité active et du contrat de service civique pour mères mineures isolées

M. le président. La parole est à M. Hervé Poher, auteur de la question n° 1135, adressée à M. le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports.

M. Hervé Poher. Monsieur le ministre, le Pas-de-Calais est le deuxième département de France pour le nombre de grossesses précoces ; ce nombre est supérieur de 50 % à la moyenne nationale dans le Calaisis, et il atteint le double de cette moyenne à Calais même.

En 2012, la ville de Calais a érigé ce problème en priorité dans le contrat local de santé qu’elle a conclu avec l’Agence régionale de santé, l’ARS. Dès 2009, le département du Pas-de-Calais, plus précisément les agents départementaux du Calaisis, ont fait œuvre de précurseurs en développant une ingénierie relative à ce phénomène. De fait, avec l’arrivée du revenu de solidarité active, le RSA, c’est pour le conseil départemental un nouveau public à accompagner ; il s’agit donc de mobiliser tous les acteurs pour répondre au mieux aux préoccupations de ces jeunes.

Or nous nous sommes heurtés, dans notre effort pour soutenir ces jeunes, à une réglementation un peu gênante. Permettez-moi de vous donner quelques explications à cet égard.

Le service civique, qui fête cette année ses cinq ans d’existence, est un moyen comme un autre d’insérer ces jeunes dans la vie active : il prend la forme d’une immersion de neuf mois, qui permet aux jeunes de gagner en confiance, en compétences et, surtout, de réfléchir à l’avenir. Le service civique est accessible aux 16-25 ans, et certains aménagements ont été prévus pour les moins de 18 ans.

Une lecture souple de l’article L. 120-11 du code du service national permet le maintien du RSA et son recalcul dans le cadre des contrats de service civique, selon certaines conditions que l’on peut résumer ainsi : lorsque l’un des deux membres d’un couple bénéficiaire du RSA accomplit un service civique, le couple conserve le RSA, si possible, en jouant sur le statut de l’autre membre, de sorte que le couple perçoit à la fois un RSA minoré et l’indemnité de service civique : il n’enregistre donc pas de gain, mais pas de perte non plus ; en revanche, si le ou la volontaire est une personne seule bénéficiaire du RSA, celui-ci est suspendu pendant la durée du service civique.

C’est sur ce dernier cas de figure que je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, car bon nombre des mamans mineures vivant dans le Calaisis sont isolées. Une maman mineure perçoit le RSA dit « socle majoré » d’un montant de 879 euros par mois ; si elle entreprend un service civique, elle ne touche plus que 573 euros mensuels, sans compter la perte des aides et avantages sociaux liés au RSA en matière de garde d’enfant et de transports.

L’accompagnement d’une maman mineure isolée en vue de son insertion est déjà très compliqué, eu égard à son âge, à sa formation et à son environnement. La différence entre le montant du RSA et celui de l’indemnité de service civique n’arrange pas les choses. Je sais que cette réglementation a été instituée afin d’éviter les déclarations d’isolement frauduleuses ; mais ne pourrait-on pas revoir les conditions d’application de l’article L. 120-11 du code du service national afin de ne pas décourager les jeunes filles vraiment isolées, qui ne demandent pas mieux que d’essayer de s’en sortir ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur Hervé Poher, vous avez eu raison de rappeler que le service civique est une formidable opportunité pour nos jeunes ; ils seront 70 000 à en bénéficier à la fin de cette année.

L’engagement de service civique ouvre droit à une indemnité financée par l’État, mais aussi à la validation de trimestres dans le cadre du régime général de retraite, disposition qui est souvent oubliée. En outre, les organismes d’accueil doivent servir aux volontaires une prestation nécessaire à leur subsistance, leur équipement, leur hébergement ou leur transport, par exemple sous la forme de titres repas ; cette prestation, dont le montant minimal est fixé à 106 euros par mois au 1er janvier 2015, est due au volontaire quel que soit son temps de présence dans le mois.

Il est exact que, en application de l’article L. 120-11 du code du service national, le versement du revenu de solidarité active est suspendu pendant toute la durée de la mission de service civique et reprend au terme de cette mission. En effet, le RSA et le RSA socle majoré, servis sans condition d’âge aux personnes isolées avec un ou plusieurs enfants en tant que minima sociaux, sont subsidiaires à toute autre prestation ou ressource.

Monsieur le sénateur, je partage votre inquiétude de voir les jeunes mères exclues des parcours d’insertion. C’est pourquoi nous travaillons pour éviter tout délai de carence et pour prévoir des majorations selon les situations particulières. Ainsi, le jeune volontaire peut percevoir une bourse de 106 euros si, au moment de la signature du contrat de service civique, il est bénéficiaire du RSA, dépend d’un foyer qui en bénéficie ou perçoit une bourse de l’enseignement supérieur au titre du cinquième ou du sixième échelon ; plus de 4 000 volontaires accueillis entre 2013 et 2014 en ont bénéficié.

Dans le cadre de la montée en charge importante du service civique, je me fixe un objectif majeur : conserver un service civique qui soit à l’image de la jeunesse dans sa diversité. Pour y parvenir, nous devons, monsieur le sénateur, garantir l’accessibilité du service civique à tous les jeunes.

J’ai pris bonne note de vos interrogations et de vos préoccupations ; je vous assure que nous examinerons toutes les évolutions techniques susceptibles de contribuer à la bonne insertion de tous les jeunes de notre pays grâce au service civique.

M. le président. La parole est à M. Hervé Poher.

M. Hervé Poher. Je vous remercie, monsieur le ministre, de prêter attention à ce problème bien délicat, qui concerne particulièrement une partie de la population du département du Pas-de-Calais. En effet, si la différence entre le RSA et l’indemnité de service civique concerne tous les bénéficiaires du RSA, il nous faut cependant bien essayer de trouver des solutions pour les jeunes mères mineures qui, contrairement à ce qui devrait se passer, sont toutes seules, leur compagnon étant parti.

Je tiens à faire observer que le département joue un rôle essentiel dans l’accompagnement de ces jeunes. Monsieur le ministre, vous savez à quoi servent les départements, puisque vous avez occupé un poste très important au sein de l’un d’entre eux. Vous savez donc aussi que, pour le département, le service du RSA ne consiste pas seulement à traiter des piles de dossiers : au-delà de la gestion administrative, il s’agit de mettre le pied à l’étrier aux personnes bénéficiaires, de leur ouvrir des perspectives d’avenir, de leur donner un peu d’espoir, de leur indiquer une voie à suivre.

Le RSA est quelquefois critiqué, de même que la solidarité elle-même ; on dénonce souvent le problème des dossiers redondants, déposés parfois par des récidivistes. Pourtant, la majorité des allocataires du RSA ne demandent pas mieux que d’en sortir !

Je voudrais enfin souligner que le département et les intercommunalités sont les échelons les plus efficaces pour traiter ce genre de dossiers. Le Premier ministre a parlé de niveau de subsidiarité : il me semble que les départements sont le bon niveau de subsidiarité en la matière, et je ne vois pas pourquoi l’on songerait à les faire disparaître !

Notre démarche consiste à aider les personnes que nous accompagnons à monter la première marche, qui est souvent la plus difficile à franchir.

fête des loges de saint-germain-en-laye

M. le président. La parole est à M. Alain Gournac, auteur de la question n° 1153, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Alain Gournac. J’ai beaucoup de chance ce matin car, si M. le ministre de l’intérieur n’est pas au banc du Gouvernement, j’ai devant moi M. le ministre de la ville. Or le ministre de la ville sait forcément ce que représentent une fête foraine créée voilà 350 ans et la convivialité d’une telle manifestation organisée par des forains extrêmement engagés pour donner du plaisir à ceux qui ne partent pas en vacances – ne les oublions pas, monsieur le ministre ! –, mais qui peuvent passer une bonne journée grâce à une fête populaire, telle la fête des Loges de Saint-Germain-en-Laye que nous avons inaugurée il y a quelques jours.

Dans la seconde quinzaine du mois de mai, nous avons reçu une lettre du préfet des Yvelines, lequel proposait à la ville de Saint-Germain-en-Laye un contrat proprement incroyable – j’ai pourtant vu des contrats dans ma vie, mais jamais comme celui-ci ! –, un contrat qui vous ferait assurément sourire, mes chers collègues, si je vous en exposais les détails.

Jusqu’à présent, le dispositif de sécurité reposait sur un poste de police temporaire, à l’intérieur du site, sur des patrouilles pédestres préventives quotidiennes, ainsi que sur la présence de personnels des compagnies républicaines de sécurité à l’ouverture de la fête, les fins de semaine et jours fériés. Tous les ans, nous disposions de forces de police qui accomplissaient un travail tout à fait respectable.

Or voilà que, tardivement – en mai, pour une fête qui débute à la fin de juin… –, le préfet des Yvelines nous a informés que la commune devrait acquitter une facture, dont je n’ose même pas détailler les conditions.

Certes, je suis bien placé pour savoir que le plan Vigipirate est en vigueur – je le précise d’emblée, monsieur le ministre, parce que je vous vois venir… Mais nous avons été prévenus en mai pour une fête devant débuter à la fin du mois de juin, et celle-ci, de ce fait, a bien évidemment failli ne pas avoir lieu !

Monsieur le ministre, je demande l’aide de l’État pour que la fête des Loges de 2015 ne soit pas la dernière. Je voudrais assurer l’avenir de cette manifestation pour trois ans – on verra pour la suite –, et, pour y parvenir, j’ai besoin de l’aide pécuniaire de la ville de Saint-Germain-en-Laye, de celle des forains, dont le représentant est actuellement dans les tribunes du public, mais aussi de celle de l’État. L’aide qu’il nous faut comporte trois parties ! J’ai donc vraiment besoin de l’aide du Gouvernement pour assurer le maintien de cette fête traditionnelle, populaire et familiale, qui accueillera cette année 3 millions de visiteurs, sans policiers ; nous avons eu un petit incident pendant le week-end, et le 17 ne répondait pas – c’est un autre problème !

C’est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, d’être mon interprète auprès de M. le ministre de l’intérieur, que je contacterai aussi directement – j’ai de bonnes relations avec lui,… –, pour que la fête des Loges soit sauvée. L’État est-il d’accord avec moi, qui représente au Sénat cette partie du département des Yvelines, pour assurer la pérennité de cette manifestation ? Bien sûr, si l’on nous écrase, nous n’aurons d’autre choix que de la supprimer ; mais je prendrai alors la plume pour expliquer les raisons de sa disparition. J’aime cette fête, je l’ai soutenue, et je ne puis envisager qu’on en arrive à cette extrémité.

Monsieur le ministre de la ville, vous connaissez la situation et vous avez des responsabilités départementales ; je vous demande donc de me donner une réponse positive ! (MM. Loïc Hervé et Philippe Bonnecarrère applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports. Quel enthousiasme, monsieur le sénateur Alain Gournac ! Rassurez-vous, le Gouvernement aime les fêtes foraines ! Et le ministre d’origine lilloise que je suis pour ma part apprécie les braderies !

Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l’intérieur.

J’évoquerai la situation telle qu’elle est et telle qu’elle se présente.

Comme vous l’avez rappelé à juste titre, la fête des Loges mobilise chaque année d’importants effectifs de la police nationale. Cette charge pèse principalement sur le commissariat de Saint-Germain-en-Laye, mais aussi sur diverses unités engagées de CRS mises à disposition dans ce but.

Si le nombre d’incidents reste relativement faible au regard du public très nombreux, plusieurs rixes violentes ont eu lieu lors des dernières éditions, même si celles-ci étaient très localisées, et des problèmes de sécurité routière pour l’accès au site se posent également. Les enjeux de sécurité sont donc réels, et personne ne peut le nier.

Monsieur le sénateur, la mobilisation des fonctionnaires de police pour assurer la sécurité d’une fête foraine, aussi importante soit-elle pour le public comme pour les acteurs locaux, a un coût. Jusqu’à ce jour, l’État a pris ce dernier en charge.

Cependant, vous connaissez la situation des finances publiques de notre pays et vous connaissez aussi – vous avez d’ailleurs devancé mon propos à ce sujet – le contexte sécuritaire qui est le nôtre.

Monsieur le sénateur, il est plus que jamais indispensable d’employer de manière optimale les ressources de la police nationale. C’est la raison pour laquelle le cadre dans lequel la police nationale intervient à la fête des Loges doit s’inscrire dans le droit commun. Nous appliquerons d’ailleurs ce même droit commun pour l’organisation de l’Euro 2016, et c’est le ministre des sports qui vous le dit.

Les frais engagés par l’État dans le cadre des interventions des forces de sécurité qui dépassent les obligations normales incombant à la puissance publique doivent faire l’objet, de la part du bénéficiaire, d’un remboursement à l’État. C’est ce que prévoient le code de la sécurité intérieure et divers textes de nature réglementaire, que je pourrais vous mentionner.

L’objectif de ce cadre juridique est de s’assurer que les forces de sécurité de l’État ne soient pas accaparées au-delà de leurs missions régaliennes pour se concentrer sur leurs missions prioritaires au bénéfice de la population ; chacun le comprendra.

En septembre dernier, le sous-préfet de Saint-Germain-en-Laye a donc informé les organisateurs de la mise en œuvre de ce cadre juridique à compter de l’édition 2015. Celui-ci implique la conclusion préalable d’une convention entre l’État et le bénéficiaire.

Le préfet des Yvelines a ainsi proposé un partage de la responsabilité de la sécurité et de l’événement entre, d’une part, l’État, pour l’extérieur du site – la sécurité extérieure relève naturellement des fonctions régaliennes de l’État –, et, d’autre part, les organisateurs, pour l’intérieur du site, considérant que les organisateurs pouvaient faire appel, par exemple, à des prestataires privés, comme cela se pratique déjà dans d’autres fêtes du même type.

C’est donc une solution équilibrée qui vous est proposée, monsieur le sénateur. Néanmoins, je ferai part très fidèlement de vos remarques à M. le ministre de l’intérieur.

M. le président. La parole est à M. Alain Gournac.

M. Alain Gournac. Monsieur le ministre, j’ai écouté avec attention vos propos, mais ne peux me réjouir de ces derniers.

Nous recrutons bien entendu des gardes privés et des maîtres-chiens ; seulement – et vous le savez très bien ! –, des policiers et des gendarmes, c’est autre chose ! Je maintiens donc mon propos !

Monsieur le ministre, ne me dites pas qu’il s’agit d’une fête privée ! Je vous invite à venir : une fête réunissant trois millions de personnes est bien une fête publique !

Nous sommes bien sûr prêts à une participation montant en puissance, mais sur trois ans, en commençant l’année prochaine, pour arriver ensuite à une situation normale. Mais j’ai besoin de l’aide de M. le ministre de l’intérieur pour le démarrage. En effet, sans policiers, il sera à mon avis très difficile de maintenir la fête des Loges.

plan numérique pour l'éducation

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, auteur de la question n° 1150, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Éric Doligé. Ma question porte sur les modalités de mise en œuvre du « grand plan numérique ».

Dans le programme de préfiguration de ce plan, transmis aux départements le 10 mars 2015, Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche annonçait que l’État s’engage à financer des ressources et des équipements pour les enseignants et les élèves selon des critères et des plafonds dûment précisés.

Quelque 228 collèges, qui relèvent toujours de la compétence des départements, devraient ainsi bénéficier d’équipements individuels mobiles dès la rentrée de 2015, 72 autres étant susceptibles, du fait qu’ils sont d’ores et déjà labellisés « collèges numériques », de bénéficier de crédits complémentaires.

L’ensemble des élèves de cinquième seraient équipés à l’identique en septembre 2017.

Pourtant, aucune enveloppe budgétaire n’est citée, et encore moins le détail de ce plan numérique, avec les impacts financiers que cela représente pour les collectivités territoriales, notamment les conseils départementaux, auxquels viennent récemment d’être transférées, de façon contestable, les dépenses de maintenance informatique dans les collèges.

Après étude et selon les clés générales de financement du ministère qui occultent des aspects importants d’un projet numérique tels que les coûts d’accès au très haut débit en investissements comme en abonnements, de maintenance, de formation des équipes enseignantes et d’assurance, le financement du plan numérique s’élèverait à près de 300 millions d’euros pour connecter l’ensemble des élèves de cinquième sur le territoire national, dont près de 120 millions d’euros laissés à la charge des départements en raison d’une participation de l’État, limitée à 50 % pour les collèges hors réseau d’éducation prioritaire, ou REP.

Au moment où le Président de la République annonce l’affectation d’un milliard d’euros d’ici à 2017 pour ce plan numérique, l’approximation des documents officiels diffusés détonne pour le moins.

Ma question est double, monsieur le ministre : je demande au Gouvernement, d’une part, de préciser les crédits effectivement inscrits au budget de l’éducation nationale pour 2015 et prévus au projet de loi de finances pour 2016 pour le financement du plan numérique, en investissement comme en fonctionnement, et, d’autre part, d’indiquer s’il envisage d’intégrer l’association des départements de France au partenariat qu’elle a sollicité des conseils départementaux, principaux investisseurs des établissements publics locaux d’enseignement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur Éric Doligé, je vous prie de bien vouloir excuser Mme Najat Vallaud-Belkacem et vous confirme que le développement du numérique dans l’éducation constitue un important levier de mobilisation contre les inégalités scolaires. Il recouvre de nouvelles compétences, qui seront essentielles pour vivre et travailler demain et que tous les enfants doivent acquérir.

C’est pourquoi le Président de la République a annoncé au début du mois de mai – vous l’avez rappelé – le lancement d’un grand plan numérique pour l’éducation, bénéficiant d’un financement de un milliard d’euros sur trois ans.

La préfiguration du plan débutera dès la rentrée 2015 ; il sera ensuite pleinement mis en œuvre à partir de la rentrée 2016.

Ce plan se décline en plusieurs mesures : les enseignements nouveaux et dédiés, l’éducation aux médias et à l’information, ou encore un programme exceptionnel de formation et de ressources pédagogiques numériques disponibles.

Bien entendu, toutes ces mesures, aussi positives soient-elles, ne prendront leur plein effet que si les élèves disposent des équipements numériques adéquats.

C’est pourquoi le Gouvernement a décidé d’aider les départements volontaires dans le déploiement des équipements auprès des élèves, en finançant la moitié de la dépense correspondante hors REP et REP+. De nombreux départements se sont d’ailleurs déjà engagés dans cette voie, et c’est un ancien président de conseil général qui vous l’affirme.

La préfiguration du plan numérique, qui démarrera à la rentrée 2015, avec 500 collèges et écoles, sera financée à hauteur d’une trentaine de millions d’euros par redéploiement au sein du budget 2015 du ministère de l’éducation nationale.

Le financement des mesures qui s’engageront à partir de la rentrée 2016 fait l’objet de discussions dans le cadre du projet de loi de finances initiale pour l’année budgétaire à venir, et les arbitrages sont en voie d’être finalisés.

Enfin, le développement du numérique ne peut se faire sans le concours des collectivités territoriales – vous avez raison de le rappeler, monsieur Doligé –, avec lesquelles nous entretenons un dialogue constant.

L’Assemblée des départements de France et son président, M. Dominique Bussereau, sont associés à l’ensemble des réflexions, à travers une instance dédiée, qui rassemble toutes les associations d’élus des collectivités territoriales aux côtés du ministère de l’éducation nationale, du ministère de l’industrie et de la Caisse des dépôts et consignations.

Monsieur le sénateur, je vous confirme que le Gouvernement met en œuvre les moyens nécessaires pour assurer la réussite du grand plan numérique pour l’école, au bénéfice de la réussite de tous les élèves, et chacun voudra bien comprendre qu’il s’agit là d’un enjeu national et international qui doit mobiliser l’ensemble des pouvoirs publics, à savoir l’État, naturellement, mais aussi les collectivités territoriales.

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé.

M. Éric Doligé. J’espère que la réponse de M. le ministre correspondra à la réalité ! L’intention est bonne, mais les moyens doivent suivre. En effet, il sera nécessaire de vérifier à la rentrée scolaire, au cours de l’année 2015, et les années suivantes, si les crédits existent et si l’estimation financière a été correcte.

Monsieur le ministre, en tant qu’ancien président de conseil général, vous connaissez le coût réel que représente pour les établissements les moyens informatiques et l’attribution de tablettes numériques aux élèves. Au sein de mon département, nous avons mis en place un collège à 100 % connecté de la sixième à la troisième. Néanmoins, les programmes doivent suivre. En effet, il ne suffit pas de financer et de distribuer des tablettes numériques ; il est également important d’apporter tous les moyens nécessaires au fonctionnement de ce plan numérique ; je suis donc curieux de voir quels seront les moyens mis en œuvre.

J’ajouterai un mot en soutien à mon collègue Alain Gournac : j’ai connu la fête des Loges alors que j’étais tout jeune. Monsieur le ministre, il serait vraiment dommage que l’État n’apporte pas son soutien à cette manifestation. Je suis certain que vous le ferez ; mais si tel n’était pas le cas, sachez que je m’associerais à Alain Gournac pour faire savoir quelle déception importante c’est pour de nombreux citoyens, et pas uniquement pour les habitants de Saint-Germain-en-Laye.

À la suite des propos de mon collègue Hervé Poher, je tiens à rappeler à mon tour l’importance des départements. Je ne vous apprends rien, monsieur le ministre, mais je vous invite à le répéter au sein du Gouvernement. Nous sommes dans la dernière ligne droite de l’examen du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dit NOTRe. Il y a eu quelques surprises lors de la deuxième lecture de ce texte à l’Assemblée nationale, et j’espère que vous nous soutiendrez lors de la commission mixte paritaire.

schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux du bassin rhône-méditerranée pour 2016 à 2021

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, auteur de la question n° 1131, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Michel Bouvard. Monsieur le ministre, je voudrais évoquer la problématique des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux, les SDAGE, puisque nous sommes à quelques mois de l’entrée en vigueur du nouveau schéma pour le bassin du Rhône et de ses affluents pour la période 2016-2021.

Ce document a une portée juridique qui s’impose aux décisions administratives en matière de police de l’eau, notamment l’instruction des déclarations et des autorisations administratives – rejets, urbanisme. Il doit aussi être en concordance avec d’autres documents de planification, qu’il s’agisse des schémas de cohérence territoriale, des plans locaux d’urbanisme, des schémas départementaux des carrières,… et bien d’autres encore.

S’agissant du SDAGE du bassin « Rhône-Méditerranée », nous avons aujourd’hui une vraie préoccupation concernant les territoires de montagne, puisque ce document a bien entendu à cœur la préservation de la ressource en eau, les politiques liées à l’eau, ce qui est tout à fait légitime. Seulement, il nous impose des contraintes dont nous pouvons craindre qu’elles ne se révèlent complètement antiéconomiques et insupportables pour les collectivités locales dans les années qui viennent. À titre d’exemple, l’obligation de fournir des études économiques sur quarante ans pour un certain nombre de prélèvements ne me paraît pas réalisable. En effet, qui peut aujourd’hui fournir une étude économique à quarante ans ? Est-ce vraiment sérieux ?

Le SDAGE du Rhône ne prend pas non plus en compte les problématiques spécifiques des territoires de montagne, s’agissant notamment des débits solides et des prélèvements de matériaux liés à l’importance de ces débits, et se limite aux interdictions traditionnelles.

Le coût financier pour les collectivités locales sera très élevé, notamment en raison de l’obligation de fournir un nombre d’études invraisemblable. À cela s’ajoute que ce document de 500 pages d’une très grande technicité comporte un certain nombre de dispositions floues et imprécises, qui pourront nourrir un contentieux juridique. Tout cela ajoute encore à la complexité réglementaire au moment même où nous souhaitons tous un « choc de simplification ».

Monsieur le ministre, ma question est très simple : que pouvons-nous faire pour que ce document soit adapté aux réalités territoriales et n’entrave ni l’action publique ni le développement économique ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, les projets de schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux, les SDAGE, ont été élaborés par les comités de bassin en 2014, puis ont été soumis à la consultation du public pendant six mois, de décembre 2014 à juin 2015.

Le SDAGE est le plan de gestion prévu par la directive-cadre sur l’eau. Sa portée réglementaire, définie par le législateur, vise l’objectif du bon état des cours d’eau.

Les orientations fondamentales, les dispositions et les objectifs du SDAGE sont rendus opposables aux documents d’urbanisme et aux schémas régionaux des carrières, dans un rapport de compatibilité.

Le SDAGE et le programme de mesures ont été construits en considérant ce qu’il était possible de réaliser dans un cycle de six ans.

Le programme de mesures du bassin Rhône-Méditerranée a fait l’objet d’une concertation approfondie avec les acteurs locaux.

Concernant la prise en compte des territoires de montagne, le projet de SDAGE du bassin Rhône-Méditerranée veille à l’intégration des spécificités montagnardes dans ses orientations fondamentales.

Il identifie notamment des territoires montagnards où une réflexion doit être menée pour constituer un établissement public d’aménagement et de gestion de l’eau, un EPAGE, ou un établissement public territorial de bassin, un EPTB.

Pour une meilleure prise en considération des problématiques de montagne, Mme Ségolène Royal a confié à M. Joël Giraud, député, une mission sur les spécificités de l’agriculture de montagne, notamment pour ce qui concerne la question de la ressource en eau.

Par ailleurs, Mme la ministre de l’écologie a adressé l’an dernier aux présidents des comités de bassin nouvellement élus un courrier leur indiquant ses priorités afin qu’ils puissent en tenir compte dans l’élaboration des SDAGE.

Mme Ségolène Royal veillera donc à ce que les objectifs qu’elle a fixés en matière de politique de l’eau soient atteints.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Monsieur secrétaire d’État, je vous remercie de ces précisions.

Effectivement, une mission a été confiée à M. Joël Giraud, avec lequel j’assistais hier à la réunion du comité de massif. Nous espérons beaucoup de cette mission. Nous formulons en particulier le souhait que le SDAGE ne s’oppose pas au développement de la petite hydraulique et prenne en compte la problématique des débits solides.

En effet, la gestion de la ressource en eau pour l’irrigation des terres agricoles du sud du massif alpin n’est pas la seule problématique à prendre en compte dans le SDAGE ; celui-ci doit également assurer la gestion des phénomènes d’érosion considérables auxquels est confronté le nord du massif. L’occasion vient d’être donnée de le vérifier dans le département des Hautes-Alpes – c’est un dossier que vous ne connaissez malheureusement que trop bien, monsieur le secrétaire d'État –, où une route a disparu, avant que ce ne soit peut-être le tour d’un tunnel dans quelques semaines.

Nous avons connu le même phénomène dans les gorges de l’Arly.

La question du prélèvement des matériaux est par conséquent essentielle, comme l’est la capacité à continuer à développer de la petite hydraulique, qui va d’ailleurs dans le sens des objectifs fixés par la France en matière de lutte contre le réchauffement climatique et de développement des énergies propres.

Au-delà, bien évidemment, la multitude des documents d’étude qui sont demandés renchérit les coûts et surtout allonge les délais de l’action publique ; ils constituent donc de véritables freins aux politiques d’équipement du territoire. Je ne parle même pas des positions maximalistes qui sont parfois adoptées en matière de risques d’inondation, lesquelles ont pour conséquence de stériliser des territoires où l’offre foncière est peu abondante et qui sont confrontés à une multitude d’autres risques.

Nous souhaitons donc cette adaptation des SDAGE et espérons que la révision prévue de la loi Montagne et les instructions données par Mme la ministre nous permettront d’obtenir satisfaction.

financement des transports publics

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, auteur de la question n° 1140, transmise à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Loïc Hervé. Monsieur le secrétaire d'État, dans un contexte de restriction budgétaire, alors que le développement des politiques de mobilité durable est inexorable au regard même des enjeux de qualité de l’air, il semble crucial de repenser le financement des transports publics, qui pèse sur les acteurs économiques et les collectivités locales.

À bien des égards, le financement des transports en commun est ressenti comme injuste, suranné ou inadéquat.

Le transport en commun est financé dans notre pays par trois types de recettes : la vente des titres de transport aux usagers, le versement transport et la contribution des collectivités, issue des impôts locaux.

Le versement transport est un impôt redevable par les personnes physiques et morales, publiques ou privées, à l’exception notable des fondations et des associations reconnues d’utilité publique à but non lucratif dont l’activité est de caractère social, lorsqu’elles emploient plus de neuf salariés et sont situées sur le territoire d’une autorité organisatrice de transport. Il représente plus de 5 milliards d’euros de ressources annuelles au profit des collectivités locales.

Monsieur le secrétaire d'État, ma question est triple.

L’assiette du versement transport est constituée par l’ensemble des rémunérations soumises à cotisation au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. Alors que la part salaires de la taxe professionnelle, assise partiellement sur les salaires versés par les entreprises, a été abrogée le 1er janvier 2003, il est fort étonnant que cette base, longtemps décriée et pesant sur l’emploi, soit encore en vigueur pour le calcul du versement transport. Au regard de ces éléments, envisagez-vous de réformer l’assiette de cette taxe, qui entre en contradiction avec l’objectif gouvernemental de baisser le coût du travail, ou prévoyez-vous des dispositifs plus incitatifs et vertueux dans les territoires soumis au plan de protection de l’air, comme c’est le cas de la vallée de l’Arve ?

Par ailleurs, lors de l’examen de la loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire, le Sénat avait rétabli le versement transport interstitiel. Destiné à financer les trains express régionaux, il devait être acquitté, dans les régions qui souhaitaient le mettre en place, par toutes les entreprises employant plus de neuf salariés, hors périmètre de transport urbain, et dans la limite de 0,55 % de la masse salariale.

Ce versement a été abrogé par voie d’amendement gouvernemental le 14 novembre 2014. Monsieur le secrétaire d'État, prévoyez-vous le rétablissement de ce versement transport interstitiel ?

Enfin, dans le cadre de l’aide à la décision des autorités organisatrices de transport et de mobilité, les URSSAF émettent des simulations sur les futurs montants perçus en matière de versement transport. Ces évaluations peuvent être très éloignées des chiffres réels – jusqu’à 30 %. Monsieur le secrétaire d'État, quelles mesures comptez-vous prendre afin d’améliorer la fiabilité des simulations et de permettre des décisions objectives ? (M. Philippe Bonnecarrère applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, le versement transport, depuis sa création dans les années soixante-dix, est au cœur du financement des transports collectifs urbains.

En effet, outre les impacts positifs sur les plans social et environnemental, le développement des transports urbains a un effet bénéfique sur l’activité économique.

Un nombre croissant d’autorités organisatrices ont instauré cet impôt sur leur territoire avec le succès que l’on connaît pour le développement et la modernisation des réseaux. Au total, avec plus de 3,5 milliards d’euros, le versement transport représente aujourd’hui près de la moitié des ressources du transport urbain en province.

Il n’est donc pas question de remettre en cause un outil aussi utile, même si tout le monde comprend la nécessité de maîtriser la charge qu’il fait peser sur le coût du travail, dans le contexte actuel.

C’est d’ailleurs pourquoi le Gouvernement n’était pas favorable à la création d’un versement transport régional, malgré les attentes exprimées en la matière par les régions désireuses de disposer d’un levier similaire à celui des autorités urbaines.

Pour être clair, le Gouvernement n’envisage ainsi ni une réforme de l’assiette du versement transport urbain ni un rétablissement d’un versement transport régional.

Mais le versement transport n’est pas le seul outil à la disposition des collectivités compétentes pour assurer le financement des transports urbains. Dans ce domaine décentralisé, chaque collectivité est libre d’arbitrer, en fonction de ses priorités, de sa situation financière et de la situation économique locale, entre l’effort demandé respectivement à l’usager, au contribuable local et aux entreprises.

S’agissant de la qualité des simulations en matière de versement transport que vous évoquez, les services des URSSAF et de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, ont récemment mis en place une méthode d’évaluation a priori de son assiette. Celle-ci est de nature à apporter une aide précieuse à la décision pour les autorités organisatrices.

Néanmoins, il faut savoir rester très prudent avec ces simulations, qui ne permettent pas une anticipation exacte de l’assiette et l’établissement de prévisions fines. En effet, l’exercice même implique une part d’incertitude, notamment sur la localisation exacte des salariés ou encore sur les entreprises franchissant le seuil de neuf salariés.

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé.

M. Loïc Hervé. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, qui, vous l’imaginez, ne me satisfait pas pleinement.

Le transport public, vous avez raison, est une demande sociétale forte qui répond à des enjeux nombreux. Mais dans le contexte économique et financier actuel à la fois des entreprises et des collectivités locales, j’insiste très fortement pour qu’une réflexion soit engagée par le Gouvernement sur le mode de financement des transports publics. Je puis vous assurer que nombre de mes collègues sénateurs, compte tenu des expériences qu’ils ont vécues, pourront vous donner des idées en la matière : par exemple, passer d’une logique de la masse salariale à une logique de flux, ou encore élargir l’assiette à l’ensemble des acteurs économiques afin de viser une meilleure justice fiscale entre tous.

difficultés de financement des projets par les agences de l'eau

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 1142, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Mme Agnès Canayer. Ma question porte sur le financement des projets des agences de l’eau, notamment ceux de l’agence de l’eau Seine-Normandie.

Créées en 1964, les agences de l’eau, établissements publics administratifs, fonctionnent selon le principe mutualiste, et les comités de bassin, instances représentant les acteurs de l’eau, sont chargés de définir la politique de l’eau sur un territoire et de percevoir les redevances y afférentes, dont le taux est encadré par la loi.

Les agences financent aussi des équipements de production et de distribution de l’eau potable, ainsi que ceux qui sont destinés à la collecte et au traitement des effluents, et ce dans le cadre de programmes pluriannuels élaborés par le comité de bassin.

Pour réduire le déficit public, la loi de finances pour 2015 a acté un prélèvement annuel de 175 millions d’euros sur le fonds de roulement des agences de l’eau pour les années 2015 à 2017.

Selon le Gouvernement, le dixième programme des agences de l’eau permettra, malgré ce prélèvement, d’assurer sur la période 2013-2018 un niveau d’investissement comparable à celui du neuvième programme, qui a permis la mise aux normes des systèmes d’assainissement exigés par la directive sur les eaux résiduaires urbaines.

Cette décision a été vivement contestée sur toutes les travées de cet hémicycle. Cette mesure, outre les questions environnementales qu’elle soulève, a une incidence économique importante du point de vue tant de l’emploi que des usagers. Les communes seront aussi directement impactées dans la réalisation de leurs projets de mise aux normes de leurs équipements.

Si, globalement, le prélèvement opéré l’année dernière n’a pas conduit les agences de l’eau à réviser leur programme de travaux, il n’en est pas de même pour l’agence de l’eau Seine-Normandie, pour laquelle ces ponctions représentent 10 % des moyens d’intervention.

Le contexte est plus complexe pour cette agence, qui n’a pas de trésorerie et fonctionne avec un fonds de roulement d’un mois seulement. En outre, elle applique le principe de la modulation de la redevance en fonction de la pollution causée.

Aujourd’hui, l’agence de l’eau Seine-Normandie a la capacité de financer les projets à hauteur de 60 % du montant global des travaux prévus. Or la baisse des capacités d’investissement des maîtres d’ouvrage, l’accroissement du nombre de projets et la baisse des moyens financiers de l’agence ne permettent plus de répondre favorablement à l’ensemble des demandes d’aides reçues dans le cadre du dixième programme.

Des territoires comme Seine-Aval, où la demande est soutenue, sont directement concernés. En effet, sur ce territoire, l’agence a pu évaluer à 130 millions d’euros les demandes d’aides, alors que l’enveloppe est aujourd’hui de 78 millions d’euros.

Compte tenu de ces données chiffrées, invariables, il est évident que des projets devront être reportés, voire abandonnés.

L’une des solutions envisagées pour geler les ponctions budgétaires de 60 millions d’euros par an est l’élargissement des compétences des agences de l’eau. Monsieur le secrétaire d'État, comment ces missions peuvent-elles être réalisées avec les mêmes personnels et les mêmes moyens ? Quelles sont les prévisions pour les années à venir ? Comment envisagez-vous l’avenir de l’agence de l’eau Seine-Normandie ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, votre question porte sur la nécessaire préservation des moyens des agences de l’eau pour la mise en œuvre de la politique de l’eau.

L’article 32 de la loi de finances pour 2015 prévoit un prélèvement de 175 millions d’euros par an sur le fonds de roulement des agences de l’eau de 2015 à 2017. Cette contribution s’inscrit dans le cadre de l’effort collectif demandé à tous les opérateurs de l’État.

Le calibrage de cette mesure a été effectué pour éviter une remise en cause des fondements des dixièmes programmes d’intervention des agences de l’eau, dont 90 % constituent des investissements.

Les conseils d’administration des agences pourront répartir cette réduction tout au long des programmes d’intervention.

Cette contribution ne devrait pas conduire à un accroissement de la pression fiscale pour les usagers de l’eau ni remettre en cause les travaux programmés et les emplois.

Les orientations votées dans les programmes seront préservées pour atteindre les engagements communautaires à l’égard de la directive-cadre sur l’eau, de la directive relative au traitement des eaux résiduaires urbaines et des directives sectorielles.

Il est nécessaire de contribuer à l’effort de réduction du déficit budgétaire et de continuer à mobiliser les moyens permettant de respecter nos engagements européens, en particulier les objectifs du bon état des eaux fixés par la directive-cadre sur l’eau.

Le Gouvernement a ainsi fixé en juillet 2014 les orientations prioritaires de la politique de l’eau dans chaque bassin, de manière à guider les choix concernant la répercussion du prélèvement par les instances de gouvernance des agences sur les aides versées par ces établissements.

Mme Ségolène Royal a également rencontré l’ensemble des présidents de comité de bassin, leur indiquant sa volonté de concilier l’objectif gouvernemental prioritaire de redressement des comptes publics et l’enjeu du maintien d’une politique de l’eau ambitieuse dotée de financements suffisants.

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer.

Mme Agnès Canayer. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de vos propos qui ne me rassureront pas plus qu’ils n’ont répondu aux interrogations du conseil d’administration de l’agence de l’eau Seine-Normandie.

Nous avons bien conscience de la nécessité de participer à l’effort commun de réduction des déficits ; mais les agences étant tenues de respecter les normes toujours plus nombreuses qui s’imposent au niveau tant européen que local, le respect de celles-ci exige des mises aux normes et des travaux importants.

Or la réduction des financements de l’agence de l’eau aura évidemment des conséquences sur les partenaires concernés, puisque les collectivités territoriales, notamment les communes, se verront privées d’une source de revenus supplémentaires pour effectuer les travaux indispensables.

Cette réduction affectera aussi l’emploi. Je vous rappelle à cet égard que l’agence de l’eau Seine-Normandie emploie jusqu’à 1 000 équivalents temps plein, ne serait-ce que pour réaliser des missions d’animation sur l’ensemble du territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

démantèlement de la centrale nucléaire de brennilis

M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, auteur de la question n° 1143, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Mme Maryvonne Blondin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le démantèlement de l’ensemble de la centrale nucléaire de Brennilis dans le Finistère, réacteur expérimental, propriété d’Électricité de France, mise en service en 1967, a été engagé dès 1985. Il s’agissait d’une opération pionnière en France, à laquelle devaient succéder d’autres fermetures de sites.

Toutefois, la réalisation de ce projet a connu de très nombreuses difficultés. À l’heure actuelle, le décret du 27 juillet 2011 autorise seulement le démantèlement partiel de la centrale. Cette première phase de travaux, qui ne concernent que les éléments périphériques, est sur le point de s’achever : les deux échangeurs de chaleur ont été découpés et les déchets sont en cours d’acheminement vers des sites de stockage. Pour autant, la question du bloc réacteur reste entière ! EDF n’a toujours pas déposé de dossier à ce sujet, alors que le bloc réacteur concentre pourtant 90 % de la radioactivité du site. C’est bien entendu la phase de l’opération la plus risquée !

En outre, l’Autorité de sûreté nucléaire a déclaré le démantèlement complet « non recevable » en octobre 2012, tant que l’installation de conditionnement et d’entreposage des déchets activés, ou ICEDA, sur le site de la centrale nucléaire du Bugey n’est pas opérationnelle. Or la construction de ce site a été suspendue depuis 2012 !

Le démantèlement de la station de traitement des effluents n’a toujours pas commencé ; il aurait pourtant dû être terminé en 2006 ! Certes, un bâtiment de confinement est en cours de construction, mais cette opération résulte surtout du débordement des cuves dû au risque de contamination du sol et du lac environnants.

Beaucoup d’interrogations persistent, et je n’évoque pas l’aspect financier de cette question ! Vous comprendrez la perplexité des membres de la commission locale d’information en la matière ! Le démantèlement de Brennilis illustre parfaitement la complexité d’une telle opération.

Aujourd’hui, huit autres centrales sont en cours de démantèlement. Comment entreprendre de tels travaux, alors que la procédure engagée à Brennilis depuis trente ans n’est toujours pas achevée ?

Je le rappelle, le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte tend à réduire la part du nucléaire dans la consommation d’électricité.

Monsieur le secrétaire d’État, comment le Gouvernement envisage-t-il la poursuite du démantèlement de la centrale de Brennilis, sur le plan tant technique que financier ? En outre, où en sommes-nous du projet de centre industriel de stockage géologique, ou Cigéo ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, la gestion des déchets radioactifs fait l’objet d’un traitement approfondi dans le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs 2013-2015 et concerne le démantèlement de nos installations nucléaires qui produit des volumes de déchets dont la radioactivité est extrêmement faible.

Ces matières radioactives ne pourront pas toutes être accueillies dans les installations existantes, dont les capacités d’accueil sont limitées et qui doivent être réservées aux déchets qui le justifient. Des réflexions sont en cours dans le cadre du groupe de travail pluraliste afin de déterminer dans quelles conditions ces déchets pourraient faire l’objet d’une valorisation ou d’un stockage sur place pour éviter des transports inutiles.

Aujourd’hui, EDF rencontre des difficultés avec les déchets liés au démantèlement du réacteur de Brennilis ; le projet de l’entreprise consiste à entreposer ces déchets dans une installation temporaire et adaptée dans l’attente d’une solution de stockage définitive. La construction de cette installation a été retardée par une décision d’annulation du permis de construire y afférent, rendue le 13 décembre 2011 par le tribunal administratif de Lyon. Dans ces conditions, il était normal de ne pas procéder au démantèlement complet de l’installation.

Les travaux ont repris à la suite d’une décision favorable de la cour d’appel, et la mise en service de cette installation, prévue en 2017 par EDF, permettra la poursuite des travaux de démantèlement à Brennilis.

Ce cas particulier, dont les difficultés les plus importantes sont de nature administrative et juridique, ne doit pas occulter le fait que d’autres démantèlements suivent leur cours tout à fait normalement. Je pense par exemple à la centrale de Superphénix, ou au réacteur de Chooz A, similaire aux centrales actuellement en exploitation, ou encore au centre CEA de Grenoble, qui a pu être totalement dénucléarisé et converti en un pôle de recherche sur les nouvelles technologies.

Aucune difficulté technique particulière ne devrait exister pour le démantèlement des réacteurs du parc en exploitation, comme le montre la réussite des chantiers de démantèlement pour les réacteurs de ce type en France et dans le monde.

M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin.

Mme Maryvonne Blondin. Monsieur le secrétaire d’État, vous annoncez aux Finistériens cette date de 2017. Patientant déjà depuis 1982, nous attendrons encore un peu.

Cette centrale est donc située dans le Massif armoricain, au milieu des Bruyères, et l’agacement de la population avoisinante, vous le comprendrez, est porté à l’extrême. Quelle est la solution ?

Si vous nous affirmez que la centrale sera complètement démantelée à partir de 2017, ce sera une bonne nouvelle ! Néanmoins, des problèmes administratifs, sans parler de l’aspect financier de la question, monsieur le secrétaire d’État, ont allongé les délais annoncés.

J’espère que le cas de la centrale de « Brennilis » restera isolé.

mention « reconnu garant de l'environnement »

M. le président. La parole est à M. Maurice Vincent, auteur de la question n° 1162, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Maurice Vincent. Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur la mention « Reconnu garant de l’environnement », ou RGE, pour les entreprises artisanales.

Le Gouvernement poursuit une politique énergétique ambitieuse, notamment avec l’objectif de rénover 500 000 logements par an d’ici à 2017, et de diminuer de 38 % la consommation d’énergie à l’horizon de 2020.

Pour ce faire, outre le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, le Gouvernement mobilise 1,2 milliard d’euros d’aides publiques, grâce à des dispositifs fiscaux, et un taux réduit de TVA à 5,5 % pour les travaux de rénovation énergétique.

La mention RGE, ou « reconnu garant de l’environnement », est la pierre angulaire du principe d’éco-conditionnalité : c’est ce label qui permet aux clients de garantir, au niveau national, la qualité des travaux effectués et aux clients de bénéficier de différents avantages, des éco-prêts à taux zéro ou des crédits d’impôt, par exemple.

Du fait de la technicité des travaux, ce label doit aussi permettre d’améliorer le niveau général de qualification des entreprises, dans les domaines de la rénovation et des énergies renouvelables.

Malheureusement, monsieur le secrétaire d’État, pour nombre d’entreprises artisanales, ce système est devenu très complexe.

Ces entreprises doivent en premier lieu attendre très longtemps pour obtenir ce label, le système étant confronté à une véritable embolie de près de 2 000 nouvelles demandes chaque mois.

C’est pourquoi il est devenu nécessaire que l’État s’engage à accompagner les organisations professionnelles et les organismes de certification afin de raccourcir le délai de traitement des dossiers. Nombre de très petites entreprises assistent malheureusement à la diminution de leurs commandes dans l’attente de ce label.

Les entreprises sont ensuite confrontées à une réelle complexité administrative ; il serait donc utile que les organisations professionnelles s’accordent sur un dossier unique et standardisé de demande de qualification, ce qui pourrait d’ailleurs contribuer à faire baisser la facture des artisans. Pour certaines TPE, qui ne réalisent qu’un ou deux chantiers par an, il est difficile de continuer à exiger autant de références que pour les grosses entreprises du bâtiment.

Enfin, la conception par silo de ce label désavantage fortement les petites entreprises, qui ne peuvent se spécialiser dans toutes les énergies et toutes les filières, ni suivre pour chaque thématique cinq jours de formation, déposer à chaque fois des dossiers et se soumettre aux contrôles a posteriori. Il serait par exemple nécessaire d’avancer vers un contrôle unique.

En conclusion, il conviendrait d’adapter l’organisation de ce label RGE à la situation des TPE et des PME du secteur du bâtiment et des travaux publics.

Monsieur le secrétaire d’État, quelles sont les orientations prévues par le Gouvernement en ce sens ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, le projet de loi sur la transition énergétique pour la croissance verte consacre un chapitre entier à la rénovation énergétique des bâtiments.

Il s’agit d’une opportunité majeure pour développer l’emploi qualifié et durable dans le secteur du bâtiment au sein de nos territoires. L’accompagnement des professionnels occupe une place essentielle dans la loi avec les nouvelles responsabilités données aux régions et aux intercommunalités.

Le plan de rénovation énergétique de l’habitat repose sur la mobilisation des entreprises et s’appuie sur l’éco-conditionnalité des aides publiques de l’État aux travaux de rénovation énergétique des bâtiments – crédit d’impôt pour la transition énergétique et éco-prêt à taux zéro.

Pour permettre à leurs clients d’en bénéficier, les professionnels du bâtiment doivent être qualifiés RGE, ou « reconnu garant de l’environnement ». On compte environ 40 000 entreprises sur le territoire, et près de 3 000 entreprises nouvelles sont reconnues RGE chaque mois.

Ce label repose sur des exigences de formation du personnel, de moyens techniques et de contrôles des prestations effectuées.

Afin d’atteindre l’objectif de rénover 500 000 logements par an à l’horizon de 2017, des mesures ont été prises en vue de fluidifier l’accès aux signes de qualité RGE pour les professionnels, sans pour autant en dégrader le niveau d’exigence.

Les organismes de qualification ont procédé à des recrutements permettant un délai de traitement de l’ordre d’un mois dès lors que le dossier de demande de qualification est complet. Des mesures de simplification administrative et de rationalisation des audits dans le cas du cumul de plusieurs signes de qualité sont aussi envisagées.

Les pistes étudiées portent notamment sur le regroupement des audits dans les métiers des équipements de production d’énergie renouvelable. Les organismes de qualification réfléchissent à la constitution d’un guichet unique pour les entreprises du bâtiment.

Toutes les conditions sont donc réunies pour encourager les entreprises à acquérir des signes de qualité et les particuliers à s’engager dans des travaux d’amélioration de la performance énergétique de l’habitat.

M. le président. La parole est à M. Maurice Vincent.

M. Maurice Vincent. Je me félicite de ces orientations qui seront, je l’espère, mises en œuvre dans les meilleurs délais compte tenu de l’enjeu que représentent les économies d’énergie attendues de ces politiques.

J’attends également l’amélioration de la situation de l’emploi dans le domaine du bâtiment et des travaux publics, secteur porteur extrêmement utile à la nation, afin que les entreprises puissent répondre à la demande le plus rapidement possible.

expérimentation des salles de consommation de drogue à moindre risque

M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 1134, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Ma question porte sur l’expérimentation des salles de consommation de drogue à moindre risque, dites « salles de shoot ».

Madame la secrétaire d’État, certaines mesures du projet de loi de modernisation de notre système de santé, qui sera débattu dans cet hémicycle en septembre prochain, auront des répercussions positives sur la santé des Français, et notamment des jeunes : je songe à la lutte contre le tabagisme, aux informations nutritionnelles sur les produits alimentaires, à l’interdiction du bisphénol A dans les jouets ou encore aux sanctions prévues contre l’incitation à l’ivresse.

Toutefois, la logique de ces propositions entre en contradiction avec l’expérimentation des « salles de shoot ». Sous couvert de réduire les risques liés aux injections – virus de l’immunodéficience humaine, VIH, ou de l’hépatite C, VHC –, les toxicomanes pourront, en réalité, s’y droguer librement. On contribuera ainsi à les maintenir dans leur dépendance plutôt que d’encourager leur guérison.

Dans de nombreuses communes, ce dispositif suscite des interrogations de la part des élus et des populations, très soucieux des conséquences pour la santé et l’ordre publics et de l’image renvoyée aux plus jeunes, alors que des campagnes d’information sont menées, en ligne comme sur le terrain, dans les établissements scolaires et notamment secondaires, pour démontrer les dangers des drogues et de la dépendance. Ces craintes sont fondées : à preuve, la « salle de shoot » parisienne a finalement déménagé, avant même d’être achevée, au sein de l’hôpital Lariboisière.

À Paris ou ailleurs, le problème de fond n’est pas résolu. Quel que soit le lieu d’implantation de la salle, les élus et les forces de l’ordre constatent qu’il s’agit simplement de déplacer des nuisances publiques.

En 2011 et en 2013, l’Académie nationale de médecine s’est prononcée contre ce dispositif. Elle a notamment exposé que les résultats issus des pays voisins sont contrastés et que les expériences n’ont pas permis d’établir que l’existence de ces salles avait un effet sur la consommation de drogues par les usagers.

Le Conseil national de l’ordre des médecins a également formulé un avis négatif en 2013. Il recommandait une évaluation afin de mesurer toutes les conséquences en jeu et, en premier lieu, la responsabilité juridique du personnel médical sur place en cas de complication – overdose, ignorance des produits injectés, etc. –, ainsi que les implications légales qui en résultent.

Madame la secrétaire d’État, le Conseil national de l’ordre des médecins et l’Académie nationale de médecine préconisent le renforcement d’une politique active de prévention pour appréhender les toxicomanes reconnus dans un état de maladie. Pourquoi le Gouvernement a-t-il écarté ces avis médicaux importants pour légiférer ?

Enfin, pourquoi, dans un contexte budgétaire contraint, le Gouvernement fait-il le choix de financer ces projets – le coût annuel de chaque salle est estimé à environ 800 000 euros – plutôt que de consacrer les moyens correspondants aux services hospitaliers d’addictologie, aux soins de sevrage, à une politique active de prévention ou encore aux structures déjà existantes ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie. Madame la sénatrice, la mise en lumière, dès le début des années 1980, chez les usagers de drogue par voie injectable d’une prévalence élevée du VIH, puis, dans les années 1990, du VHC, a été à l’origine de nombreuses actions de santé publique engagées par les associations et par les professionnels de santé.

Ces initiatives ont progressivement abouti à la mise en place de politiques publiques de réduction des risques, lesquelles ont fait la preuve de leur succès. Ainsi, l’incidence du VIH chez les usagers de drogues a été divisée par quatre, chutant de 40 % à 10 %.

Les salles de consommation à moindre risque sont des espaces encadrés par des professionnels – personnel médical et infirmier, travailleurs sociaux – pour lutter contre les risques infectieux liés à l’usage de drogues et aider à réduire progressivement la consommation de ces substances. Ces dispositifs existent aujourd’hui dans neuf pays étrangers, au premier rang desquels les Pays-Bas, l’Allemagne, la Suisse et l’Espagne. Sur la base de tous ces éléments, l’expérimentation des salles de consommation à moindre risque a été adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale lors de l’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé.

Les salles de consommation à moindre risque s’inscrivent donc dans un dispositif global de prise en charge des addictions et de réduction des risques. Elles n’ont pas vocation à remplacer les structures d’accueil ou de soins. Elles sont exclusivement ciblées sur l’usage de drogues injectables et ne concernent donc en rien, par exemple, la consommation de cannabis.

Au regard des bilans positifs tirés des expériences étrangères, le Gouvernement juge opportun d’expérimenter ce dispositif en France, dans un nombre limité de villes volontaires, en lien étroit avec les élus municipaux.

Un travail interministériel, destiné à préparer l’ouverture de ces dispositifs dans les meilleures conditions, est piloté par la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives. Y sont associés tous les ministères concernés, à savoir ceux de la justice, de la santé et de l’intérieur.

Enfin, une évaluation tenant compte aussi bien des effets sur la santé des usagers de drogues que des conséquences sur l’espace public permettra de tirer le bilan de cette expérimentation.

M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Madame la secrétaire d’État, vous vous en doutez, votre réponse ne me satisfait pas pleinement…

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. J’aurais préféré vous convaincre !

Mme Dominique Estrosi Sassone. Vous faites référence aux salles de consommation de drogue à moindre risque ouvertes à l’étranger.

Or ces expériences l’ont prouvé : ces structures ne peuvent fonctionner que si elles bénéficient d’un véritable consensus parmi la population, les élus, les professionnels de santé, les autorités judiciaires et de police. Force est de constater que de telles situations sont loin d’être fréquentes. Dans bon nombre de nos communes, ce consensus n’existe pas, et les inquiétudes vont même croissant.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Cette expérience ne concerne que les communes volontaires !

Mme Catherine Génisson. Laissons le temps à l’expérimentation !

Mme Dominique Estrosi Sassone. J’en suis persuadée, l’examen, par le Sénat, du projet de loi de modernisation de notre système de santé permettra d’observer de nouveau ces désaccords.

À mon sens, il y a mieux à faire : renforcer les actions de prévention au lieu de tenter l’expérimentation de ces salles qui, même dans les pays étrangers où elles existent, exigent d’être transformées, étant donné qu’elles ne sont pas pleinement satisfaisantes.

inadaptation des normes appliquées aux centres hospitaliers de proximité

M. le président. La parole est à M. Alain Duran, auteur de la question n° 1136, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

M. Alain Duran. Madame la secrétaire d’État, je tiens à attirer votre attention sur les effets paradoxaux, au regard des objectifs d’accès aux soins, que produisent les normes de santé et de sécurité appliquées aux centres hospitaliers de proximité, que l’on appelle encore parfois les hôpitaux locaux.

Dans mon département, le centre hospitalier de Tarascon-sur-Ariège bénéficie de la qualification d’établissement sanitaire, grâce au maintien d’un service de soins de suite et de réadaptation, ou service SSR, lequel comprend 15 lits. Ce service vient en complément de l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou EHPAD, qui compte, lui, 150 lits.

Ce centre hospitalier est aujourd’hui menacé de voir son service SSR déqualifié, faute de pouvoir assurer une veille médicale permanente. Il y parvenait jusqu’en 2013 grâce à l’appui d’un médecin coordonnateur, qui a, hélas ! démissionné, et d’un médecin qui, à cette date, est parti à la retraite.

Depuis, cet établissement a recours ponctuellement au SAMU rattaché au centre hospitalier du val d’Ariège, joignable en quinze minutes par une voie rapide. Cette solution est efficiente, mais elle est rarement utilisée : seulement dix appels vers le 15 ont été enregistrés en 2014, soit moins d’un par mois. (Mme Catherine Génisson s’exclame.) Or, le recours au SAMU étant légalement réservé aux soins ambulatoires, la Haute Autorité de santé enjoint désormais au centre hospitalier de revenir à un tableau de veille et de renoncer à ce dispositif pour son SSR.

Dès lors, le centre hospitalier de Tarascon risque de perdre son statut d’établissement public de santé, faute de pouvoir respecter des normes dont l’application rigide exige la mise en place d’un dispositif qui se révélerait plus coûteux et moins efficient.

La disparition du caractère d’établissement sanitaire qui, vous en conviendrez, contribue à l’attractivité de l’EHPAD, pourrait se traduire par une baisse préjudiciable des effectifs et, bien entendu, de la qualité de la prise en charge du public gériatrique.

Le cas du centre hospitalier de Tarascon-sur-Ariège s’inscrit dans une problématique beaucoup plus large, à l’échelle nationale : celle de la désertification médicale et des réponses à apporter pour y remédier. La loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », datant de 2009, a soumis les ex-hôpitaux locaux au droit commun des établissements publics de santé. De ce fait, elle a empêché la prise en compte des particularités et des réalités constituant l’environnement de ces centres hospitaliers de proximité : la petite taille de ces structures, l’enclavement des territoires et la désertification médicale.

Les critères de certification aujourd’hui appliqués par la Haute Autorité de santé aboutissent à une situation paradoxale. La mise en avant d’objectifs de qualité et de sécurité conduit, en réalité, à accroître l’insécurité sanitaire pour les habitants des zones rurales, en les éloignant des centres médicaux en mesure de les accueillir dans un délai restreint.

Une application de ces critères dénuée de pragmatisme et inadaptée à la diversité des territoires contrevient aux principes essentiels d’égalité et de solidarité territoriale, auxquels nous sommes attachés.

Madame la secrétaire d’État, lors du comité interministériel aux ruralités, le Gouvernement a annoncé, au nombre de ses priorités, le soutien aux hôpitaux de proximité. Pouvez-vous me préciser les mesures et aménagements pratiques qu’il entend prendre pour éviter la disparition de ces structures dans les zones rurales les plus fragiles ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie. Monsieur le sénateur, depuis 2012, le Gouvernement mène une action déterminée de réduction des inégalités territoriales d’accès aux soins.

Après une première mesure en faveur des établissements isolés et situés dans des zones de faible densité, une nouvelle disposition en faveur des hôpitaux de proximité, adoptée au titre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, viendra prochainement concrétiser l’un des engagements du pacte territoire-santé.

Le centre hospitalier de Tarascon-sur-Ariège présente une activité importante d’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes de 150 lits, ainsi qu’une activité de soins de suite et de réadaptation de 15 lits.

L’activité de soins nécessite une organisation médicale de nature à garantir la continuité des soins. Néanmoins, la mise en œuvre de cette exigence se heurte à des difficultés engendrées, notamment, par la démographie médicale dans ce bassin de santé. Cette problématique a été identifiée par l’agence régionale de santé, l’ARS. Elle a également été rappelée par la Haute Autorité de santé lors de sa dernière visite de certification.

L’ARS travaille actuellement avec la direction de l’établissement pour conforter sa place dans la filière gériatrique mise en œuvre dans le territoire de l’Ariège. Dans ce contexte, les travaux visent notamment la transformation de lits de soins de suite et de réadaptation en unité de soins de longue durée pour répondre au mieux aux besoins de santé de la population, dans le respect des exigences réglementaires.

Vous l’avez compris, cette orientation vise, d’une part, à conforter la place de cet établissement de santé dans son territoire et, d’autre part, à maintenir la qualité et la sécurité des prises en charge. Ces objectifs sont bel et bien indissociables pour assurer le maintien d’une offre de soins de proximité, accessibles pour la population.

M. le président. La parole est à M. Alain Duran.

M. Alain Duran. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Je ne doutais nullement de la volonté de ce gouvernement de nous aider à maintenir, dans nos territoires, ces structures indispensables. Aussi, je compte sur vous et sur vos services pour nous accompagner dans cette démarche : il faut entendre les attentes spécifiques de la ruralité. (Mme la secrétaire d’État acquiesce.)

efforts financiers demandés aux structures hospitalières dans le nord-pas-de-calais

M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, auteur de la question n° 1154, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Mme Catherine Génisson. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur les problématiques liées à la mise en œuvre, récemment annoncée, d’un plan triennal d’économies au titre de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, au sein des établissements publics de santé.

J’en suis consciente, une évolution structurelle des services de santé est nécessaire. À cet égard, il convient d’allier la qualité des soins et la maîtrise des dépenses de santé. En outre, ces efforts doivent être équitablement répartis entre les régions et les établissements, quel que soit leur statut.

Or les efforts financiers demandés aux hôpitaux du Nord-Pas-de-Calais paraissent excessifs au regard des réalités sociales et sanitaires de ce territoire : espérance de vie inférieure de trois ans à la moyenne nationale, taux de mortalité à la suite d’accidents vasculaires cérébraux supérieur de dix points à la moyenne nationale, mortalité résultant des pathologies des voies aérodigestives supérieures de 70 % à la moyenne nationale… Je pourrais, malheureusement, poursuivre cette liste.

Au regard de ces indicateurs, qui appellent une véritable politique de péréquation, les efforts financiers demandés sont inappropriés, qu’il s’agisse de la réduction du nombre de lits ou du blocage de la masse salariale, dont la progression doit être limitée à 1,5 %.

L’offre hospitalière de la région Nord-Pas-de-Calais reste fragile : que ce soit au niveau de ses ressources médicales – elle est parmi les dernières pour la densité de médecins spécialistes – ou au titre de l’offre de soins, elle n’est pas en surcapacité. Cependant, elle concourt activement à l’évolution des prises en charge. Le virage ambulatoire est bien engagé : en la matière, notre région est la troisième de France. L’hospitalisation de jour présente un taux de 58,2 %, pour une moyenne nationale de 57 %.

De surcroît, le Nord-Pas-de-Calais a fortement développé l’hospitalisation à domicile, avec un ratio de 17 pour 100 000 habitants, contre un objectif national de 12 à 15 pour 100 000 habitants.

Par ailleurs – ce n’est pas le moindre des sujets –, dans notre région, les gels et économies dont font l’objet, cette année, les dotations annuelles de financement des soins non soumis à la tarification à l’activité, à savoir les soins de suite et de réadaptation, représentent plus de 11,27 % du total des économies exigées en France dans ce domaine. Cette part est largement supérieure au poids global de la région.

Madame la secrétaire d’État, je ne méconnais pas les importants efforts d’investissement dont notre territoire régional a bénéficié. Toutefois, solidaire des inquiétudes exprimées par une majorité des professionnels de santé et des élus des collectivités territoriales, je souhaite connaître vos propositions pour rétablir une péréquation si attendue et nécessaire, et qui, je le rappelle, a existé entre 1997 et 2002.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur la mise en œuvre du plan d’économies et sur ses effets sur les établissements de santé, en particulier dans la région Nord-Pas-de-Calais. Comme vous le savez, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Marisol Touraine, a eu l’occasion de se rendre à plusieurs reprises dans cette région et d’y mesurer les enjeux de santé publique. J’y suis moi-même particulièrement attentive.

Le projet de loi de modernisation de notre système de santé, qui sera très prochainement examiné par votre assemblée, a pour objectif de s’attaquer à la racine des inégalités, en renforçant la prévention et en recentrant l’organisation des soins autour de la médecine de proximité. L’objectif est de transformer le quotidien de millions de nos concitoyens et de changer le rapport des Français à leur santé.

Nous devons atteindre cet objectif tout en respectant un cadre budgétaire contraint : c’est une réalité avec laquelle il nous faut composer. C’est pourquoi la ministre a engagé un certain nombre de réformes structurelles, qui doivent nous permettre de rendre soutenable un ralentissement du taux de progression de l’ONDAM. Il s’agit bien, en effet, de maîtriser l’évolution de la dépense : en 2015, des crédits supplémentaires seront consacrés à l’hôpital à hauteur de 1,5 milliard d’euros.

Ces réformes, vous les connaissez : il s’agit du virage ambulatoire, de l’amélioration de la relation ville-hôpital, de la pertinence des actes et des prescriptions et, enfin, d’une meilleure organisation territoriale.

Sur ce dernier point, les groupements hospitaliers de territoire nous amèneront à mieux structurer la réponse proposée à nos concitoyens.

Ces évolutions et ces réformes permettront de concilier l’objectif de redressement des comptes et l’amélioration de la prise en charge, pour les hôpitaux du Nord-Pas-de-Calais, comme pour l’ensemble des hôpitaux du pays. Je note, par ailleurs, que la situation financière des hôpitaux de votre région est plutôt satisfaisante, madame la sénatrice.

Ces objectifs sont ambitieux, mais ils sont à l’image des engagements de l’État pour la région. En témoignent les investissements récemment autorisés, comme le projet de reconstruction du bâtiment de cardiopneumologie du CHRU de Lille, financé à hauteur de 40 millions d’euros apportés par le niveau national, ou la reconstruction de la maternité de Roubaix. En témoigne également la mise en œuvre d’une politique de péréquation progressive favorable à la région Nord-Pas-de-Calais pour l’attribution des crédits du fonds d’intervention régional.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.

Mme Catherine Génisson. Je remercie madame la secrétaire d’État de sa réponse. Je connais l’attachement de notre ministre de la santé à la région Nord-Pas-de-Calais.

Comme vous l’avez relevé, madame la secrétaire d’État, les hôpitaux de la région se conduisent bien et jouissent d’une situation financière et budgétaire satisfaisante. Pourtant, malgré l’investissement du conseil régional du Nord-Pas-de-Calais pour soutenir la lutte contre les cancers, les indicateurs sanitaires de notre région restent dramatiques. Je le dis sans que l’on puisse me reprocher de tomber dans le misérabilisme, parce que nous sommes des battants !

La péréquation est vitale pour nous : notre région est en retard selon les indicateurs sanitaires. Nous ne pouvons supporter des mesures qui iraient à l’encontre de ce processus, et qui nous pénaliseraient plus que les autres régions. J’ai à l’esprit, en particulier, la situation en matière de soins de suite et de rééducation.

Nous suivrons ce dossier avec beaucoup d’attention, et je fonde beaucoup d’espoirs dans le débat qui se tiendra à l’occasion de l’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé.

pénurie de vaccins

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, auteur de la question n° 1155, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Mme Jacqueline Gourault. Je souhaite attirer votre attention, madame la secrétaire d’État, sur les très grandes inquiétudes exprimées par les médecins, les pédiatres, les pharmaciens et les parents quant à la situation de pénurie de plusieurs médicaments et, plus particulièrement, de plusieurs vaccins, à laquelle notre pays fait face. Le vaccin contre la tuberculose, le BCG, ainsi que certains vaccins contre la coqueluche, la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite sont aujourd’hui, au mieux, en tension d’approvisionnement, au pire, en rupture de stock.

Plus de 380 000 personnes ont signé une pétition, lancée le 13 mai 2015, dénonçant la rupture de stock du vaccin DT-Polio depuis plusieurs mois, alors même que celui-ci est obligatoire en France. Les pharmaciens s’alarment, à juste titre, de ces insuffisances, comme les parents d’enfants en âge d’être vaccinés.

Les professionnels de santé se trouvent aujourd’hui dans l’obligation de différer la vaccination de nombreux enfants ou d’utiliser des vaccins hexavalents comportant des adjuvants qui suscitent de nombreuses interrogations quant aux conséquences qu’emporte leur utilisation.

Face à la recrudescence de certaines maladies, due, en partie, à l’insuffisance du nombre de personnes vaccinées – c’est le cas, par exemple, de la rougeole –, et à la peur de la vaccination qui s’installe en France depuis plusieurs années, illustrée par le nombre de signataires de la pétition citée précédemment, il n’est pas acceptable que notre pays soit dans l’incapacité de fournir des vaccins sécurisés en quantité suffisante.

C’est pourquoi, madame la secrétaire d’État, je vous prie de nous expliquer les raisons de cette pénurie et de nous informer sur les mesures que le Gouvernement entend prendre pour remédier à cette situation, en relation avec les producteurs de ces vaccins, qui sont, il est vrai, peu nombreux.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie. Madame la sénatrice, la situation de pénurie de certains médicaments, et plus spécifiquement de plusieurs vaccins, soulève effectivement des inquiétudes et mobilise ce gouvernement depuis 2012. En septembre de cette année, la ministre a en effet imposé une série d’obligations aux laboratoires et aux grossistes afin de prévenir ces ruptures de stock.

Une mesure législative était cependant nécessaire pour renforcer ce dispositif et garantir à nos concitoyens la continuité d’accès aux produits de santé. L’article 36 du projet de loi de modernisation de notre système de santé, que vous examinerez prochainement, vise donc à renforcer les instruments d’anticipation à la disposition des pouvoirs publics, ainsi que les obligations qui pèsent sur les acteurs du circuit, afin d’éviter la pénurie de produits indispensables.

En parallèle, l’Agence nationale de sécurité du médicament, l’ANSM, échange avec ses homologues européens afin de proposer des actions à l’échelle européenne, le phénomène n’étant pas limité au seul territoire français.

Dans l’attente de ces mesures, la ministre tient à rappeler que la vaccination obligatoire des nourrissons contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite n’est pas entravée, dans la mesure où un vaccin hexavalent est disponible en officine. Celui-ci protège contre six maladies, notamment la coqueluche. Il est donc recommandé pour tous les nourrissons.

Cependant, un kit spécifique existe pour vacciner seulement contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite les nourrissons présentant une contre-indication à la vaccination contre la coqueluche.

Enfin, en ce qui concerne le vaccin BCG, qui n’est plus obligatoire depuis 2007 mais reste fortement recommandé chez les nourrissons présentant le plus de risques, il est disponible dans les centres de protection maternelle et infantile ou dans les centres de lutte antituberculeuse.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.

Mme Jacqueline Gourault. Merci de votre réponse, madame la secrétaire d’État. J’ai bien compris que vous mettiez en place toute une politique.

J’insiste toutefois sur trois points : il existe sûrement une explication au fait que seuls les vaccins hexavalents soient sur le marché, mais elle m’est inconnue ; j’attire ensuite votre attention sur les questions que suscitent les adjuvants, notamment dans les vaccins hexavalents, qui conduisent des gens à craindre leurs conséquences quand ils ne sont pas considérés comme totalement sûrs ; j’ajoute enfin qu’il ne faudrait pas augmenter la défiance de certains Français vis-à-vis de la vaccination, au risque de ne plus protéger notre population. On sait en effet que moins l’on vaccine, plus les risques de retour des épidémies augmentent.

Ce sujet est très important : dans mon département, les pédiatres se sont mobilisés et ne cessent de m’interroger !

Mme Nathalie Goulet. Vous avez de la chance : il reste des pédiatres dans votre département !

bilan du pacte santé-territoire et évolution de la démographie médicale

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 1159, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

M. Hervé Maurey. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues : « Les territoires se vident de leurs médecins. Pourtant, avec 281 087 médecins inscrits au tableau de l’ordre en 2014, la France n’a jamais compté autant de médecins ». Ce n’est pas moi qui le dis, mais le Conseil national de l’ordre des médecins, dans le dernier Atlas de la démographie médicale publié au mois de juin dernier.

Le département de l’Eure, dont je suis élu, est, hélas ! cruellement confronté à cette réalité puisque, avec seulement 167 médecins pour 100 000 habitants, il connaît, cette année encore, la plus faible densité médicale de France, suivi de près par l’Ain, la Mayenne et l’Orne. Dans le même temps, Paris compte plus de 670 médecins pour 100 000 habitants, et le Rhône plus de 400.

Cette situation n’est pas nouvelle, mais elle s’aggrave. Elle est connue de longue date et je la dénonce, depuis mon élection en 2008, auprès des gouvernements successifs de droite comme de gauche, dont l’inertie et le manque de courage conduisent à l’aggravation du phénomène.

La désertification médicale crée des inégalités inacceptables, entre les territoires comme entre les citoyens. La seule réponse apportée par le Gouvernement à ce problème est le pacte territoire-santé, engagé en 2012, qui contient douze engagements, dont certains devaient être remplis dès 2015, les autres au plus tard en 2017.

Ce pacte avait fait l’objet d’un bilan établi en février 2014 par la ministre des affaires sociales et de la santé, qui avait publié, engagement par engagement, l’état d’avancement des objectifs que le Gouvernement s’était fixés. Depuis cette date, plus aucun bilan n’a été dressé.

En janvier 2013, la ministre des affaires sociales et de la santé déclarait pourtant devant la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, qui s’était saisie de cette question : « C’est aujourd’hui qu’il faut obtenir des résultats ». Plus de deux années ont passé et, comme les habitants des territoires ruraux et périurbains privés d’accès aux soins, nous ne voyons rien venir.

Nous aimerions, madame la secrétaire d’État que vous dressiez le bilan des engagements pris par le Gouvernement dans ce pacte et que vous nous indiquiez, surtout, les mesures complémentaires que le Gouvernement entend enfin mettre en œuvre pour faire face à la pénurie de médecins dans un grand nombre de territoires. (Mme Nathalie Goulet applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie. Monsieur le président, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a lancé, à la fin de 2012, le pacte territoire-santé, auquel vous faites référence. Composé de douze engagements, ce pacte repose sur le pragmatisme et mobilise tous les leviers, de la formation des étudiants aux conditions d’exercice. Il exclut toutefois la mise en œuvre de mesures coercitives, telle est bien toute la difficulté de ce sujet.

Le bilan de ce pacte, après deux ans d’application, confirme bien qu’une nouvelle dynamique est lancée.

Le contrat d’engagement de service public, ou CESP, s’adresse aux jeunes en formation. Il leur permet de bénéficier d’une bourse en contrepartie d’une installation en zone fragile, pour une durée équivalant à celle de l’aide. Au total, 1 278 jeunes se sont engagés dans le dispositif depuis sa création et plus de 400 contrats ont été signés pour la seule campagne 2014-2015 !

Les contrats de praticiens territoriaux de médecine générale, ou PTMG, permettent de sécuriser l’installation des jeunes médecins au cours de leurs deux premières années d’exercice. Ils ont déjà permis l’installation de 411 professionnels.

Par ailleurs, les projets d’exercice coordonné sont en plein essor : il existait 174 maisons de santé pluriprofessionnelles, il devrait y en avoir plus de 800 en fonctionnement à la fin de 2015 !

Le département de l’Eure n’échappe pas à cette dynamique puisque, sous l’impulsion de l’agence régionale de santé de Haute-Normandie, de nombreuses initiatives ont été soutenues par les élus et les professionnels de santé.

À ce jour, dix contrats de praticiens territoriaux de médecine générale ont été signés dans l’Eure et quatre nouveaux le seront d’ici à la fin de l’année.

Concernant l’exercice regroupé, une dynamique forte apparaît également. En 2012, il existait dans l’Eure deux maisons de santé pluriprofessionnelles. Depuis, six nouvelles structures de ce type ont ouvert leurs portes et huit nouveaux projets sont actuellement suivis par l’ARS.

Enfin, en Haute-Normandie, trente-sept contrats d’engagements de service public, concernant très majoritairement la médecine générale, ont été signés à la fin de 2014. Un médecin généraliste issu de ce dispositif s’est, dès à présent, installé dans une zone en difficulté du département de l’Eure et a pu également bénéficier d’un statut de PTMG.

Nous devons aujourd’hui poursuivre dans cette voie et conforter ces résultats. C’est pourquoi Marisol Touraine a souhaité que le pacte territoire-santé fasse l’objet d’une disposition spécifique au sein du projet de loi de modernisation de notre système de santé.

À quelques semaines de l’examen de ce texte par votre assemblée, je sais, monsieur le sénateur, que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable que vous présidez porte un regard attentif sur la question spécifique de l’accès aux soins dans les territoires.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. J’ai entendu, comme souvent de la part de ce gouvernement, un exercice d’autosatisfaction malheureusement très éloigné de la réalité du terrain !

Quand Mme la secrétaire d’État parle « de dynamique dans l’Eure », comme j’aimerais qu’elle ait raison ! Comme j’aimerais constater la dynamique qu’elle nous annonce en matière de démographie médicale !

Les chiffres sont pourtant là pour confirmer que nous sommes les derniers en matière de démographie médicale. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’ordre des médecins, et ce dernier montre que la situation ne fait que s’aggraver. Malheureusement, on ne peut pas parler de dynamique ! Malheureusement, il ne suffit pas non plus de construire des maisons de santé pour que les médecins acceptent de venir y travailler ! Nous connaissons de très nombreux exemples de maisons de santé, parfois construites à des coûts très élevés, dépourvues de médecin.

Sans doute Mme la secrétaire d’État a-t-elle manqué de temps pour établir un bilan très précis et complet de la situation. Un tel document serait très utile à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, qui s’est saisie pour avis du projet de loi de modernisation de notre système de santé. En effet, aujourd’hui, nous avons plutôt le sentiment que les mesures mises en place ont été inefficaces

En février 2013, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a adopté à l’unanimité un rapport intitulé Déserts médicaux, agir vraiment. Il proposait de faire évoluer les études de médecine, de mettre en œuvre à l’échelle des territoires une véritable politique des soins que nous attendons encore, d’évaluer et de clarifier les mesures incitatives existantes, pour la plupart très chères et très inefficaces, et de mieux réguler l’installation des professionnels de santé.

Mme la secrétaire d’État a dit son hostilité à tout dispositif autre qu’incitatif. J’observe qu’elle a évolué : quand Mme Touraine était dans l’opposition, elle avait fait des propositions différentes !

Dans le cadre du débat que nous aurons à la rentrée à l’occasion de l’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable aura à cœur de faire des propositions pour mettre un terme à la désertification médicale qui pèse sur les territoires ruraux et périurbains.

statistiques sur l’illettrisme en picardie et en particulier dans l’aisne

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 1138, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Antoine Lefèvre. Monsieur le secrétaire d’État, ma question découle de la récente publication des statistiques des Journées défense et citoyenneté organisées par le ministère de la défense.

En 2014, environ 750 000 jeunes de 17 ans ont été soumis à des tests de lecture. Le constat est consternant : 10 % d’entre eux ont des difficultés à lire. En baisse depuis plusieurs années, le chiffre remonte aujourd’hui. On peut même considérer que 4 % du total de ces jeunes peuvent être considérés comme étant quasi illettrés. Parmi ces derniers, 80 % ont arrêté leur scolarité au collège.

La région Picardie concentre les plus grandes difficultés. En 2009 – et ce, depuis 2005 –, le taux d’illettrisme s’y élevait déjà à 8,3 %. L’écart avec la moyenne nationale s’aggrave depuis 2004. Pour le département de l’Aisne dont je suis l’élu, le taux des jeunes rencontrant des difficultés atteint 16 %. Ce constat est particulièrement amer et décourageant.

La Picardie, qui se situe en queue de peloton pour la plupart des indicateurs de formation, se caractérise, comme les autres régions où la réussite scolaire est moindre, par des parcours scolaires moins diversifiés. Les jeunes s’orientent le moins souvent vers la filière générale et technologique à l’issue de la classe de troisième. L’apprentissage y est peu développé et inégalement réparti sur le territoire. Il faut compléter le tableau – ou plutôt le confirmer, l’un entraînant l’autre – par un taux de chômage aux alentours de 12,3 %, contre 10,4 % au niveau national.

Par un effet de cascade, notre région connaît, selon l’INSEE, le taux de pauvreté le plus élevé. Il dépasse 16,4 % et atteint 31,4 % pour les moins de trente ans. Pour couronner le tout, et alors que certains freins à la croissance en France semblent se desserrer, l’économie picarde est encore et toujours en berne !

Devant les difficultés récurrentes ainsi relevées pour la future région Nord-Pas-de-Calais-Picardie – la région Nord-Pas-de-Calais n’étant qu’un tout petit peu mieux lotie que sa voisine picarde –, il est urgent d’apporter des réponses plus pragmatiques.

En effet, derrière ces chiffres, ces pourcentages ou ces statistiques, nous parlons de nos concitoyens, qui sont de moins en moins armés pour affronter les difficultés en vue de trouver une formation ou un travail et d’assumer dignement l’entretien d’une famille.

Afin d’acquérir ce qui apparaît comme la base de l’éducation – lire, compter et savoir s’exprimer pour être correctement compris –, la lutte contre cet illettrisme grandissant doit donc être une priorité. Inscrite dans la loi de 1988 relative à la lutte contre l’exclusion, la lutte contre l’illettrisme est réaffirmée dans la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances, mais également dans le programme des Nations unies pour le développement. L’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme, l’ANLCI, a été créée dans ce but en 2000.

Dès lors, comment peut-on, monsieur le secrétaire d’État, supporter un tel constat ? Quelles solutions préconisez-vous pour améliorer la situation ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, je connais votre attachement sincère et constant à la lutte contre ce fléau qu’est, depuis très longtemps et trop longtemps, l’illettrisme. Parce que ce fléau touche aujourd’hui près de 4,6 % des jeunes âgés de 17 à 20 ans, le Premier ministre a décrété cette lutte contre l’illettrisme « grande cause nationale » dès l’année 2013. Elle est une priorité du Gouvernement.

Pour prévenir ce fléau, la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République a donné la primauté à l’école primaire, afin d’agir pour favoriser très tôt l’appropriation du langage et la découverte de l’écrit. C’est en effet dans la formation initiale qu’il faut trouver une partie des réponses au caractère chronique de l’illettrisme dans notre pays.

Les missions de l’école maternelle sont ainsi redéfinies en vue de permettre aux enfants les plus fragiles de disposer du temps nécessaire pour les premiers apprentissages. Le développement de la scolarisation des enfants de moins de trois ans vise le même objectif.

C’est surtout à l’école élémentaire que le dispositif « Plus de maîtres que de classes » vient renforcer, dans les secteurs socialement défavorisés, l’aide aux élèves les plus fragiles. Par ailleurs, les nouveaux rythmes scolaires respectent mieux les temps de l’enfant et doivent ainsi améliorer les situations d’apprentissage. En outre, certaines activités complémentaires permettent une aide aux élèves en difficulté.

Les efforts ne doivent pas s’arrêter avec le passage au collège. Au contraire, l’accompagnement personnalisé doit désormais concerner l’ensemble des élèves et permettre de leur proposer des réponses adaptées à leurs besoins et de remédier à leurs difficultés dans les apprentissages fondamentaux.

Notre ministère agit également sur les situations avérées d’illettrisme en soutenant les familles, par exemple, au moyen des actions éducatives familiales développées par l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme, qui fédère les principales associations et organisations impliquées pour faire reculer ce fléau. Les différentes parties concernées doivent savoir dépasser les querelles d’école autour du sujet pour agir avec la plus grande efficacité possible.

S’agissant plus particulièrement de l’académie d’Amiens, au sein de laquelle les difficultés de lecture et d’écriture sont très sensibles, des efforts importants ont été entrepris. Ils sont désormais traduits dans le programme de travail pour la période 2014-2017, qui comprend notamment des actions de formation d’envergure à destination des enseignants et des actions spécifiques à l’intention des jeunes.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, une dynamique nationale s’est engagée pour lutter contre l’illettrisme. Elle est particulièrement forte dans l’académie d’Amiens. J’espère que les premiers résultats seront rapidement visibles.

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.

M. Antoine Lefèvre. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de cette réponse détaillée. L’académie d’Amiens doit en effet se voir attribuer le plus possible de moyens supplémentaires dans le cadre de la lutte contre l’illettrisme.

Je veux profiter de cette occasion pour vous interpeller, monsieur le secrétaire d’État, après d’autres collègues parlementaires, sur le fait qu’une ponction de plus de 100 millions d’euros a été opérée sur certains établissements d’enseignement supérieur. Je regrette moi aussi l’importance du prélèvement effectué sur les établissements de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie et veux vous rappeler l’importance du rééquilibrage des aides sur le territoire national. Monsieur le secrétaire d’État, je compte sur votre appui en ce sens.

modalités d’attribution de la majoration forfaitaire du fonds de soutien aux activités périscolaires pour les écoles rurales

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, auteur de la question n° 1123, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la première année de généralisation des nouveaux rythmes scolaires vient de s’achever. Ceux-ci sont en place dans toutes les écoles publiques et dans 800 écoles privées.

Toutefois, comme le souligne un point d’étape sur les rythmes éducatifs publié très récemment par les services de l’éducation nationale, la mobilisation des élus locaux et des adaptations importantes de la part des équipes enseignantes, des collectivités locales, mais aussi des familles ont été essentielles pour la mise en place d’activités périscolaires diversifiées et souvent gratuites pour les familles.

Concernant cette réforme qui reste à parfaire, il faut donc saluer les efforts de tous, en notant ceux de l’État en matière d’accompagnement financier des collectivités territoriales, avec la pérennisation du fonds de soutien à l’organisation des activités périscolaires.

Cependant, le point particulier des modalités d’attribution de la majoration forfaitaire par élève versée par fonds de soutien nécessite d’être précisé pour les écoles rurales dont la gestion est intercommunale.

En effet, l’article 96 de la loi de finances pour 2015, qui institue ce fonds de soutien, prévoit l’instauration d’une majoration forfaitaire par élève, attribuée aux communes éligibles à la troisième fraction, dite « cible », de la dotation de solidarité urbaine, la DSU, et de la dotation de solidarité rurale, la DSR. Or, dans de nombreuses communes rurales, les écoles sont organisées sous la forme d’un regroupement pédagogique intercommunal, ou RPI, que celui-ci soit adossé ou non à un établissement public de coopération intercommunale, ou EPCI.

Dans ce cadre, il apparaît incohérent, d’une part, que toutes les écoles d’un même RPI ne bénéficient pas forcément de la majoration forfaitaire et, d’autre part, que celle-ci ne concerne pas nécessairement tous les élèves d’une même école selon la commune dont ils sont originaires.

Dans le département de la Drôme, plusieurs syndicats intercommunaux à vocation scolaire, ou SIVOS, m’ont fait part de cette situation peu compréhensible. Imprécise au départ – certains documents du ministère indiquaient même que les communes en zone de revitalisation rurale, ZRR, étaient éligibles à la majoration –, elle a engendré de surcroît des difficultés budgétaires pour la mise en œuvre des nouvelles activités périscolaires.

Aussi, dans le cadre du suivi de la réforme des rythmes scolaires et, en particulier, du prolongement de l’accompagnement des communes dont le Gouvernement a fait l’une de ses priorités pour l’année scolaire 2015-2016, je souhaite, monsieur le secrétaire d’État, que vous m’indiquiez s’il pourrait être envisagé de modifier les modalités d’attribution de la majoration forfaitaire aux RPI, afin que toutes les communes et tous les élèves de ces intercommunalités scolaires soient traités de la même façon au regard de ce soutien financier.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Mme Najat Vallaud-Belkacem, qui n’a pas pu assister à cette séance et m’a chargé de vous répondre en son nom.

Dans un contexte budgétaire contraint, le Gouvernement a fait le choix de pérenniser son soutien aux communes afin qu’elles développent des activités périscolaires de qualité. La loi de finances initiale pour 2015 a ainsi converti le fonds d’amorçage pour la réforme des rythmes scolaires dans le premier degré en un fonds de soutien pour le développement des activités périscolaires dont les aides sont désormais pérennes et subordonnées à la mise en place d’un projet éducatif territorial.

S’agissant plus particulièrement des modalités de versement des aides, qui constituent le cœur de votre question, il est important de distinguer plusieurs situations. L’organisation territoriale en regroupement pédagogique intercommunal – ce que les initiés appellent RPI – est une modalité de coopération libre entre communes. Ainsi, ces dernières peuvent choisir de l’intégrer ou non au cadre d’un établissement public de coopération intercommunale.

Lorsque le RPI n’est pas adossé à un EPCI, il prend alors la forme d’une simple entente intercommunale. Aucune compétence n’étant juridiquement transférée au RPI, chaque commune sur le territoire de laquelle est implantée une école publique bénéficie de l’aide du fonds de soutien aux activités périscolaires en propre, calculée sur la base des effectifs d’élèves scolarisés sur son territoire et du taux d’aide qui lui est applicable – 50 euros par élève ou 90 euros par élève.

Lorsque le RPI est adossé à un établissement public de coopération intercommunale et que ledit EPCI exerce la compétence en matière périscolaire, la question du bénéfice des aides est réglée par le quatrième alinéa de l’article 67 de la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour l’ école de la République, qui prévoit que « les communes qui ont transféré la compétence en matière de dépenses relatives à l’organisation des activités périscolaires des écoles à un établissement public de coopération intercommunale reversent à cet établissement les aides qu’elles ont perçues ».

Comme vous le soulignez à l’attention de Mme la ministre, cette disposition ne modifie pas les modalités de calcul des aides, lesquelles sont appréciées au niveau de la commune de scolarisation des élèves. Ainsi, au sein d’un EPCI, le taux des aides peut être différent d’une commune à l’autre.

Au-delà du coût budgétaire qu’engendrerait un éventuel alignement des taux des aides au sein d’un EPCI sur le taux le plus élevé, cette mesure entraînerait une différence de traitement entre les communes, selon qu’elles sont membres d’un EPCI comportant une commune éligible à l’aide majorée du fonds ou non. Pour ces raisons, il n’est pas prévu, en tout cas au moment où je vous parle, de faire évoluer les modalités de calcul des aides.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Je voudrais juste revenir sur deux points.

Tout d’abord, certaines communes qui étaient en ZRR et pensaient être éligibles au fonds de soutien ont engagé, pour l’année écoulée, des dépenses pour les temps d’activité périscolaire, les TAP. Elles se retrouvent donc dans une impasse. Je pense notamment aux SIVOS de Buis-les-Baronnies et de la Haute Ouvèze. Cette situation est un cas particulier, spécifique à cette année. Il nous faudrait trouver une solution pour venir en aide à ces collectivités.

Ensuite, l’État pousse les communes à la mutualisation et au regroupement, ce qui est une bonne chose. Les SIVOS et les RPI en sont un exemple. Or, comme vous l’avez souligné, ces communes ne sont pas toujours rattachées à une intercommunalité. C’est le cas, par exemple, du RPI de la vallée de l’Ennuye.

Je comprends la complexité administrative de ces problèmes. Néanmoins, cette question mérite notre attention : ces communes rurales ont besoin d’aide. Il est à mon sens extrêmement important, pour les communes concernées et leurs enfants, de traiter avec équité les membres de ces SIVOS et de ces RPI. Je vous remercie donc par avance, monsieur le secrétaire d’État, de toute l’aide que vous pourrez apporter aux écoles en milieu rural.

résidence alternée et attribution de la bourse de l’enseignement supérieur sur critères sociaux

M. le président. La parole est à M. Dominique Bailly, auteur de la question n° 1144, transmise à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Dominique Bailly. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaiterais ce matin attirer l’attention du Gouvernement sur les spécificités de la résidence alternée dans les modalités d’attribution de la bourse d’enseignement supérieur sur critères sociaux.

La résidence alternée implique des réalités familiales et financières souvent complexes et difficilement prises en compte par l’administration. La législation encadre, peu à peu, cette nouvelle réalité sociale et tente de répondre aux particularismes qu’elle introduit dans le système administratif et fiscal de notre société.

Dans les situations de résidence alternée, le revenu brut global figurant sur l’avis d’imposition de chacun des foyers des deux parents est le principal critère d’attribution de la bourse d’enseignement supérieur sur critères sociaux. Ce revenu brut, inscrit dans le dossier administratif, cumule celui des deux foyers et inclut également les revenus des éventuels conjoints.

Or cet indicateur, me semble-t-il, ne reflète ni la capacité de chacun des deux parents à contribuer aux frais d’études supérieures de l’enfant ni la hauteur de leurs contributions respectives. Il est en effet difficile d’appréhender la pondération des revenus du père et de ceux de la mère dans la prise en charge des frais de scolarité. Par là même, il est aussi délicat de décider de l’attribution ou non d’une bourse à l’un d’entre eux.

Enfin, il est aussi complexe de saisir comment la charge d’éventuels autres enfants dans le cadre d’une famille recomposée est prise en compte dans les critères d’attribution de cette bourse.

C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je vous serai reconnaissant de m’éclairer sur les modalités de prise en compte des spécificités financières, fiscales et familiales induites par la résidence alternée pour déterminer l’éventuelle attribution de cette bourse.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, vous avez raison de souligner que, parfois, une évolution de la situation familiale entraîne des conséquences fiscales qui rendent complexe l’accès à un certain nombre de droits sociaux. Pour les familles, il n’est pas facile de s’y retrouver. Ici encore, il existe probablement un vaste potentiel de simplification : celle-ci n’en est qu’à ses débuts.

Les bourses d’enseignement supérieur sur critères sociaux constituent une aide complémentaire à celle qu’apportent à l’étudiant ses parents. En effet, ces derniers sont soumis à une obligation alimentaire prévue par les articles 203 et 371-2 du code civil, qui leur imposent d’assurer l’entretien de leurs enfants, même majeurs, tant que ces derniers ne sont pas en mesure de subvenir à leurs propres besoins.

Le dispositif d’aides sociales vise à aider en priorité les étudiants issus des familles les plus modestes. Les bourses d’enseignement supérieur sur critères sociaux sont ainsi accordées en fonction d’un barème national qui prend en considération les ressources et les charges de la famille de l’étudiant.

En cas de séparation, les revenus pris en compte sont ceux du parent ayant à charge le candidat, sous réserve qu’un jugement prévoie l’obligation du versement par l’autre parent d’une pension alimentaire.

En l’absence d’un tel jugement, ce qui est un cas fréquent, les ressources des deux parents sont prises en compte. Cette double prise en compte découle non seulement de l’obligation alimentaire, mais aussi du fait que, en cas de résidence alternée, chacun des deux parents peut bénéficier d’une majoration de ses parts dans le calcul de l’impôt sur le revenu.

Comme vous le savez, monsieur le sénateur, le Gouvernement a fait depuis 2012 un effort considérable pour lutter contre la précarité des étudiants. Pas moins de 450 millions d’euros ont ainsi été investis dans le système des bourses, dont 200 millions d’euros en faveur de nouvelles mesures d’aide à destination de 160 000 nouveaux étudiants.

En effet, afin d’améliorer les conditions de réussite des étudiants issus des familles les moins favorisées, il faut faire en sorte d’éviter que ceux-ci se trouvent dans la nécessité de travailler concurremment à leurs études. À cette fin, une réforme importante des bourses étudiantes a été engagée. Cette réforme vise un objectif politique de démocratisation de l’accès aux études supérieures. Elle concourt à l’ambition d’atteindre 50 % de diplômés du supérieur dans chaque classe d’âge.

Par ailleurs, en matière de logement étudiant, l’objectif de mon ministère est de permettre au plus grand nombre d’étudiants qui en font la demande d’accéder à un hébergement de qualité à un moindre coût. Aussi, conformément à l’engagement du Président de la République, un programme de construction de 40 000 logements étudiants pendant la durée du quinquennat est prévu, soit 8 000 constructions par an.

Par-delà la réponse que je vous ai faite quant aux modalités précises de calcul des aides en cas de séparation des parents, l’ensemble de ces mesures montre l’attachement du Gouvernement à l’amélioration des conditions de vie des étudiants. Il ne compte pas s’en tenir là : hier, avec Mme la ministre de l’éducation nationale, nous avons reçu des propositions pour un nouveau plan d’amélioration de la vie étudiante. Parmi ces propositions, on peut relever un accès facilité à la connaissance de l’ensemble des droits sociaux des étudiants. Une telle mesure offrira peut-être aux étudiants issus de couples séparés qui sont l’objet de votre question et, au-delà, à tous les étudiants la possibilité d’améliorer leur situation, qui demeure parfois très précaire.

M. le président. La parole est à M. Dominique Bailly.

M. Dominique Bailly. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse et des informations que vous nous avez données.

Il s’agit bien ici de la vraie vie. Notre objectif est de permettre au plus grand nombre de jeunes de s’insérer dans un parcours universitaire, en nous donnant les moyens de les accompagner dans ce parcours. La vraie vie, c’est aussi l’évolution sociétale : de nombreuses familles sont aujourd’hui recomposées. Or la lourdeur administrative dans l’attribution de ces fameuses bourses peut mettre en péril le parcours universitaire de certains jeunes et, partant, leur avenir.

Je veux aussi vous remercier dans ces mots de conclusion : il est clair que des pistes de travail sont sur la table pour permettre à de nombreux jeunes et de nombreuses familles de vivre cette étape de manière plus sereine.

occupation illégale de territoires

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, auteur de la question n° 1145, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vais quelque peu dépayser les questions orales. Parmi les conflits gelés du Caucase, celui qui oppose l’Arménie et l’Azerbaïdjan concerne deux pays avec lesquels – je ne vous apprends rien, monsieur le président – nous entretenons des liens d’amitié. Ce conflit porte sur le territoire contesté du Haut-Karabakh.

Or, au mois de mai dernier, le « président » de la république fantoche du Haut-Karabakh s’est rendu en visite « officielle » en France et a signé des « chartes d’amitié » avec un département, la Drôme, et plusieurs communes.

Bien évidemment, cette république n’est reconnue par aucun État, pas même par l’Arménie. La France, quant à elle, joue un rôle diplomatique important dans ce conflit gelé : elle copréside le groupe de Minsk, qui cherche depuis des années une solution. Or la signature de ces chartes est en contradiction, non seulement avec la position prise par la France, mais encore avec le droit international.

En effet, elles tendent à avaliser une occupation. Imaginez seulement que, demain, le président autoproclamé de la Crimée, de l’Abkhazie ou de l’Ossétie du Sud vienne signer une telle charte d’amitié avec une ville française ! Cette affaire constitue un très mauvais signal.

Le président du groupe d’amitié France-Caucase, notre collègue André Reichardt, a écrit à Mme Lebranchu et à M. Fabius afin que les préfets soient informés de la conduite à tenir, dans le cadre d’un recours hiérarchique ou du contrôle de légalité. En effet, s’il est absolument normal de conclure des chartes d’amitiés avec l’Arménie, tel n’est pas le cas pour un territoire occupé et non reconnu en droit international.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous poserai donc la question suivante : quelle est la position du Gouvernement face à cette situation proprement illégale ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice, M. Laurent Fabius m’a demandé de répondre à sa place à votre question de la manière la plus précise qui soit. Vous avez en effet raison d’insister sur la complexité tant juridique que politique – nous sommes à la lisière de ces domaines – de la situation que vous évoquez.

Comme vous l’avez rappelé, quatre collectivités territoriales françaises ont signé des « chartes d’amitié » avec des collectivités du Haut-Karabakh, un territoire majoritairement peuplé d’Arméniens qui a fait sécession de l’Azerbaïdjan. Elles ont été signées à l’occasion de la visite en France, du 18 au 20 mai dernier, de M. Bako Sahakian, soi-disant président de la « république du Haut-Karabakh ».

Comme vous l’indiquez, la France, coprésidente du groupe de Minsk en charge de la médiation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan sur ce conflit, n’a jamais reconnu le Haut-Karabakh comme entité indépendante, non plus que comme partie du territoire de la République d’Arménie. Nous ne reconnaissons pas l’indépendance du Haut-Karabakh et nous n’entretenons pas de contacts bilatéraux avec les autorités de fait de ce territoire.

Le Gouvernement regrette par conséquent l’initiative prise par ces collectivités territoriales. La signature de ces « chartes d’amitié » est d’ailleurs illégale au regard des dispositions de l’article L. 1115-1 du code général des collectivités territoriales. En effet, elle était clairement contraire aux engagements internationaux de la France, qui n’a pas reconnu l’indépendance du Haut-Karabakh.

Le ministre des affaires étrangères et du développement international, M. Laurent Fabius, a donc écrit au ministre de l’intérieur pour attirer son attention sur ce problème. Les deux ministres ont adressé, en fin de semaine dernière, une circulaire conjointe aux préfets pour leur rappeler les règles en vigueur.

Vous avez raison de souligner, madame la sénatrice, que cette situation pourrait malheureusement se reproduire – sait-on jamais ? – concernant des collectivités situées dans d’autres parties du globe, comme la Crimée.

Par ailleurs, le ministre des affaires étrangères et du développement international a d’ores et déjà adressé un courrier aux préfets de la région Rhône-Alpes et des départements de la Drôme, de l’Isère et du Val-d’Oise pour les saisir de cette question.

Soyez donc assurée, madame la sénatrice, que la France, en tant que coprésidente du groupe de Minsk, reste entièrement mobilisée pour la recherche d’une solution pacifique au conflit du Haut-Karabakh. Je veux insister, pour conclure, sur le fait que notre relation amicale et profonde avec l’Arménie n’altère et n’altérera en rien la position française traditionnelle d’impartialité au sein du groupe de Minsk.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Merci, monsieur le secrétaire d’État, pour cette réponse vraiment précise. Dans quelques mois, comme vous le savez, se tiendront à Paris les assises de la coopération décentralisée avec l’Azerbaïdjan. Ce pays fait beaucoup parler de lui, mais c’est un pays en mutation. Il faut absolument élargir nos coopérations avec l’Azerbaïdjan : c’est un moyen important pour faciliter l’évolution de ce pays vers plus de démocratie. Vous n’ignorez pas que le Caucase est une terre difficile.

Vous avez indiqué tout à l’heure que le Haut-Karabakh était majoritairement peuplé d’Arméniens. Cela est devenu vrai, bien évidemment, dans les années 1990, à la suite du conflit armé.

Nous avons absolument intérêt à conserver notre neutralité. Je vous remercie d’avoir insisté sur le fait que notre amitié avec l’Arménie ne nuisait pas à notre neutralité au sein du groupe de Minsk.

Quoi qu’il en soit, cette réponse devrait à mes yeux apaiser une situation qui était devenue délicate. Rappelons-nous que, passé l’Oural, il est difficile de comprendre l’organisation territoriale de la France dans toute sa complexité, pas seulement pour ce qui concerne les territoires ruraux.

projet de réalisation d’un « central park » à la courneuve

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, auteur de la question n° 1156, transmise à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.

Mme Aline Archimbaud. Ma question s’adressait à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, mais je vous la pose bien volontiers, madame la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.

Depuis plusieurs semaines, des collectifs d’associations et des riverains se mobilisent en grand nombre pour protester contre le projet immobilier de réalisation d’un « Central Park » dans le parc départemental Georges-Valbon, situé sur les communes de La Courneuve, Stains, Dugny et Saint-Denis dans le département de Seine-Saint-Denis. Une pétition contre ce projet a été massivement signée.

Le parc départemental Georges-Valbon est aujourd’hui l’un des plus grands espaces de détente de la région parisienne. Avec plus de 400 hectares, il constitue la plus grande zone naturelle du département de Seine-Saint-Denis, un haut lieu de la biodiversité. C’est aussi un lieu de rencontre, de détente, de loisir, de sociabilité et de mixité sociale auquel les habitants sont très attachés.

La création de ce parc dans les années 1960 a été une très belle initiative visant à requalifier un territoire tellement décrié et a apporté un « plus » à la qualité de vie de ses habitants.

Or, en octobre dernier, l’Agence foncière et technique de la région parisienne a dévoilé un projet de construction de pas moins de 24 000 logements à la lisière et à l’intérieur du parc. Ainsi, ce parc classé zone Natura 2000 serait amputé de 77 hectares. La destruction d’une partie importante de cet espace naturel entraînerait la mort de près de 10 000 arbres et la partie boisée abritant des arbres vieux de plus de soixante ans serait notamment touchée. Cette opération constituerait une grave menace pour la biodiversité, alors que ce département connaît déjà de fortes fractures environnementales.

Par ailleurs, il se murmure que ce projet pourrait devenir une opération d’intérêt national : les élus locaux seraient déchargés de leur autorité au profit de l’État, ce qui pose un sérieux problème en matière de respect des partenariats déjà mis en place avec les collectivités locales, mais aussi, plus généralement, en termes de gouvernance démocratique, puisqu’un projet immobilier serait imposé aux élus et aux habitants de façon autoritaire. Une telle orientation semble contraire à la politique actuelle du Gouvernement qui encourage l’organisation de débats publics en amont des projets.

Madame la ministre, quelle garantie comptez-vous donner quant aux modalités de discussion et de décision sur ce dossier ?

À quelques mois de la COP 21, n’est-il pas écologiquement incohérent de mettre en danger un tel espace naturel dans un territoire que nous nous attachons à requalifier au bénéfice d’une population par ailleurs massivement frappée par la crise économique et sociale ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité. Madame la sénatrice, vous me faites part de vos inquiétudes quant à l’avenir du parc Georges-Valbon concerné par le projet dit de « Central Park du Grand Paris ».

Avant toute chose, je veux rappeler que ce projet est une libre contribution au débat de l’architecte Roland Castro. Vous le savez, pour résorber la crise du logement qui frappe l’Île-de-France, le Gouvernement a lancé un grand plan de mobilisation pour la construction de logements, qui s’articule autour de l’extension et de la modernisation du réseau de transports en commun, notamment la construction de nouvelles gares du Grand Paris Express. Une phase de concertation avec l’ensemble des acteurs locaux a été engagée pour identifier, à l’échelle de la région, les territoires dotés d’un fort potentiel qui sont susceptibles de faire l’objet d’opérations d’aménagement. Ce projet doit permettre d’atteindre l’objectif de 70 000 nouveaux logements par an, inscrit au schéma directeur de la région Île-de-France, et de lutter contre les phénomènes de ségrégation spatiale qui existent au sein de la région capitale.

C’est dans ce cadre que s’est tenu, le 9 avril dernier, autour du préfet de département et avec l’Agence foncière et technique de la région parisienne, un atelier du Grand Paris du logement consacré aux potentialités d’aménagement des franges du parc Georges-Valbon.

Le dialogue avec les élus locaux doit se poursuivre tant sur le fond du projet que sur la méthode, afin que celui-ci soit mené à bien, comme l’a rappelé le Premier ministre dans un courrier adressé le 29 juin au président du conseil départemental.

Je veux vous rassurer, madame la sénatrice, il s’agit bel et bien – je veux être très claire sur ce point – de coconstruire, avec les élus locaux et à partir des intentions exprimées aujourd’hui par les communes, un projet qui tienne compte des enjeux et des problématiques du territoire, notamment le besoin de retisser des liens entre le parc, replié sur lui-même, et les villes alentour.

Il s’agit également de profiter de la future desserte offerte par le réseau du Grand Paris Express pour créer un nouveau pôle de développement et d’attractivité au nord de Paris.

Il s’agit, enfin, de construire un projet d’aménagement des franges du parc, en limitant ses conséquences environnementales, et non pas d’urbaniser massivement cet espace naturel remarquable. La préservation de la richesse écologique du parc doit figurer au cœur du projet.

L’éventuel recours à une opération d’intérêt national sur ce site n’est – je l’ai déjà indiqué à maintes reprises, mais je le répète – qu’un outil parmi d’autres dans les modalités d’accompagnement de ce projet par l’État. Le Gouvernement n’en fait pas un préalable et décidera, là encore avec les élus locaux, de la pertinence du recours à ce dispositif juridique à l’issue de la concertation en cours. Vous le savez, nous arrêterons ces décisions lors du prochain comité interministériel sur le Grand Paris, qui se tiendra en octobre prochain.

Vous l’aurez compris, madame la sénatrice, la volonté du Gouvernement est de construire, avec les élus locaux et non pas contre eux, un projet susceptible de renforcer l’attractivité du territoire ayant vocation à devenir, demain, un pôle majeur du Grand Paris et de contribuer à la réduction des inégalités territoriales que connaît l’Île-de-France, un projet qui soit au service des intérêts du territoire et de ses habitants.

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Parmi les points positifs que j’ai entendus et qui me rassurent, je retiendrai notamment la volonté forte du Gouvernement d’engager une concertation. Vous avez même parlé de « coconstruction » avec les élus locaux, et je mesure toute la force de ce terme.

En revanche, l’emploi du terme « franges » concernant ce parc continue de m’inquiéter. Autant il me semble intéressant d’envisager de désenclaver le parc, en construisant des gares et des logements à l’extérieur – je soutiens le plan de mobilisation pour le logement en Île-de-France –, autant je persiste à penser qu’il serait vraiment injuste et inacceptable de construire à l’intérieur de ce parc, qui a fait l’objet d’investissements importants.

Ce territoire est stigmatisé et il a besoin, au contraire – vous le savez bien, en tant que ministre chargée de l’égalité des territoires –, que l’on continue à le requalifier. Ce n’est pas en amputant un espace classé Natura 2000 que nous réglerons le problème.

Je le répète, construire « à la frange » du parc me gêne. Je suis d’accord pour aménager les alentours, mais il ne me semble pas juste, dans le contexte actuel, de toucher à ces 400 hectares.

recrudescence des cambriolages en milieu rural

M. le président. La parole est à M. Jacques Genest, auteur de la question n° 1141, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. Jacques Genest. Ma question s’adresse à M. Cazeneuve, ministre de l’intérieur, mais je ne doute pas que Mme Pinel, ministre chargée de l’égalité des territoires et de la ruralité, y soit particulièrement sensible.

Madame la ministre, les communes rurales de l’Ardèche, et plus particulièrement celles qui sont situées sur le plateau ardéchois, ont connu au cours de ces derniers mois une recrudescence des cambriolages.

Les habitants de ce territoire sont malheureusement de plus en plus nombreux à subir les agissements de bandes de malfaiteurs très bien organisées, qui peuvent enchaîner une dizaine de cambriolages en une nuit, sans être le moins du monde inquiétées.

Entre domiciles violés, garages pillés et outillages d’exploitants agricoles dérobés, le préjudice est de plus en plus important, et vient s’y ajouter un climat d’exaspération, qui fait redouter le pire aux élus.

Entre le massif du Tanargue et le mont Gerbier de Jonc, seuls huit gendarmes – c’est l’effectif théorique ! – en poste à Lanarce sont chargés de la sécurité de cette zone caractérisée par son isolement géographique et, disons-le, un certain abandon des services publics.

Or cet abandon se confirme avec l’annonce officielle, vendredi dernier, par la préfecture, de la suppression de quatre gendarmeries sur la montagne ardéchoise, à Burzet, Montpezat-sous-Bauzon, Saint-Étienne-de-Lugdarès et Saint-Martin-de-Valamas. J’ai déjà sollicité le préfet de l’Ardèche pour lui demander comment il comptait remédier à ce problème et, surtout, redéployer des effectifs de gendarmerie pour enrayer cette hausse vertigineuse de la délinquance, qui se déplace des villes vers les campagnes. Toutefois, je n’ai pas obtenu de réponse à ce jour.

Madame la ministre, nos concitoyens n’en peuvent plus de voir chaque jour l’insécurité gagner la ruralité, sans que la moindre solution soit apportée par les pouvoirs publics. Ils ont l’impression d’être des citoyens de seconde zone, habitant dans des villages oubliés et dont l’isolement fait le bonheur des cambrioleurs qui s’y déplacent comme s’ils faisaient du tourisme. Le jour où la cristallisation de cette colère montante nous conduira au drame, il sera trop tard pour imaginer ce qui aurait pu l’empêcher.

Voilà pourquoi je vous demande aujourd’hui si le Gouvernement souhaite prendre toute la mesure du problème et augmenter les forces de gendarmeries sur le plateau ardéchois.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve, qui m’a chargée de vous transmettre sa réponse à une question relative à un sujet qui m’est cher.

Le Gouvernement est particulièrement attaché au maillage territorial fort et efficace de la police et de la gendarmerie nationales, lesquelles poursuivent en permanence un nécessaire processus de rénovation de leurs dispositifs. Il s’agit, en effet, de prendre en compte les évolutions des bassins de vie et de délinquance, tout en garantissant un haut niveau d’efficacité opérationnelle et une coordination optimale entre les deux forces.

Le ministre de l’intérieur sait bien sûr que des manœuvres de redéploiement ont suscité les préoccupations légitimes que vous avez évoquées. Ces redéploiements sont réalisés au cas par cas, et toujours en étroite concertation avec les élus locaux et les autorités administratives et judiciaires.

Nous le savons, la dissolution d’une brigade de gendarmerie peut être vécue comme un renoncement ou un abandon de l’État. Toutefois, il s’agit en fait d’une adaptation indispensable visant à limiter au maximum les charges administratives pesant sur nos gendarmes. La création d’unités plus importantes permet alors de démultiplier la présence de la gendarmerie sur le terrain pour être aux côtés des élus locaux. L’objectif est donc clair : préserver la qualité de la relation qu’entretiennent les policiers et les gendarmes avec les élus et la population et proposer en permanence un véritable service de proximité. En témoigne d’ailleurs la création, chaque année depuis 2013, de 500 postes de gendarmes et de policiers supplémentaires, ainsi que les plans nationaux mis en œuvre en matière de lutte contre les cambriolages ou les vols et trafics de véhicules et de pièces détachées.

Permettez-moi de revenir tout particulièrement sur le plan national de lutte contre les cambriolages et les vols à main armée lancé en septembre 2013.

Le dispositif mis en place par la gendarmerie pour occuper le terrain dans les plages horaires particulièrement criminogènes a rapidement prouvé son efficacité. L’effort combiné des escadrons de gendarmerie mobile et des pelotons de réservistes déployés dans les départements les plus touchés, associé aux actions de prévention engagées en partenariat avec les élus et l’ensemble des acteurs de sécurité comme les polices municipales, ont permis de confirmer cette dynamique. Parallèlement, de nombreuses enquêtes diligentées par les unités territoriales, en lien régulier avec l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante, ont abouti ces derniers mois au démantèlement de plusieurs structures criminelles organisées, spécialisées dans les cambriolages en série qui pouvaient sévir sur l’ensemble du territoire national.

Ainsi, en 2014, les cambriolages dans la zone gendarmerie ont diminué de 4,8 %, une tendance qui s’est prolongée sur les cinq premiers mois de cette année, avec une baisse de 7,4 %. Cette évolution favorable concerne soixante-six départements métropolitains, dont celui de l’Ardèche, qui voit le nombre des cambriolages en zone rurale diminuer de près de 5 %.

Le Gouvernement reste mobilisé pour la sécurité de tous, en tous points du pays. Avec le ministre de l’intérieur, nous avons annoncé, lors du comité interministériel aux ruralités qui s’est tenu en mars dernier, la modernisation prochaine des conventions de coordination entre les polices municipales et la gendarmerie, pour toujours aller dans le sens d’une plus grande proximité et d’une meilleure efficacité, au service des habitants de nos territoires ruraux.

M. le président. La parole est à M. Jacques Genest.

M. Jacques Genest. Je vous remercie de votre réponse tout à fait théorique, madame la ministre, à l’image de l’effectif théorique d’une brigade de gendarmerie !

Je ne conteste pas les chiffres que vous avez avancés quant à la baisse des statistiques de la délinquance. Permettez-moi seulement de vous rappeler que, lorsque les victimes de cambriolages habitent à quarante kilomètres de la gendarmerie la plus proche, sont âgées et ne disposent pas d’un moyen de transport, elles ne font pas l’effort de se déplacer pour porter plainte. Au regard des lois actuellement adoptées, je me demande si le Gouvernement aime vraiment les ruraux.

M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

8

Nomination de membres de deux organismes extraparlementaires

M. le président. La commission des affaires économiques a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame Mme Marie-Noëlle Lienemann membre de la Commission nationale chargée de l’examen du respect des obligations de réalisation de logements sociaux.

La commission des affaires sociales a également proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Gérard Roche membre suppléant du Conseil supérieur du travail social.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

9

Modification de l’ordre du jour

M. le président. En application de l’article 50-1 de la Constitution, le Gouvernement fera demain, mercredi 8 juillet 2015, à seize heures quinze, en même temps qu’à l’Assemblée nationale, une déclaration, suivie d’un débat, sur la situation de la Grèce et les enjeux européens.

Les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposeront, dans le débat, d’un temps global d’une heure. Les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 8 juillet, à onze heures.

Le rapporteur général de la commission des finances et le président de la commission des affaires européennes interviendront ensuite, pour une durée de cinq minutes chacun.

Cette modification de l’ordre du jour du Sénat interviendra après la notification du décret du Président de la République complétant le décret du 12 juin 2015 portant convocation du Parlement en session extraordinaire à compter du 1er juillet 2015 et de la lettre d’ordre du jour du Gouvernement.

10

Éloge funèbre de Jean Germain, sénateur d’Indre-et-Loire

M. le président. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la nouvelle du décès de Jean Germain et les circonstances tragiques de sa disparition ont plongé, le 7 avril dernier, le Sénat de la République et ses amis dans la stupeur. (Mme la ministre des affaires sociales, M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, Mmes les sénatrices et MM. les sénateurs se lèvent.)

J’ai exprimé le jour même, à cette tribune, l’affliction et les sentiments provoqués par la violence de sa disparition, que rien ne laissait présager.

Jean Germain n’a tout simplement pas supporté l’idée que son honneur et sa réputation puissent être mis en cause.

Si la vie politique est violente, un homme public a droit, comme tout autre citoyen, au respect de sa dignité.

Jean Germain était un homme d’engagement. Il l’a démontré tout au long d’une vie publique très largement consacrée à sa chère ville de Tours, qui l’avait vu naître, mais aussi à son village de Bourgueil, qui lui était très cher.

Il était un élu local passionné, un parlementaire estimé, un juriste et un universitaire réputé.

Élu conseiller municipal de Tours en 1983, Jean Germain aura dirigé, pendant près de vingt ans, cette ville à laquelle il était viscéralement attaché.

En un demi-siècle – jusqu’en 2014 –, Tours n’aura connu que deux maires : Jean Royer et Jean Germain. C’est sans doute en 1995 que notre collègue connut la plus grande joie de sa vie publique en succédant, à la surprise de nombreux observateurs d’alors, à celui qui avait dirigé la ville durant trois décennies.

Prendre la suite de Jean Royer n’était pas facile à assumer. Jean Germain l’a fait à sa façon : consensuelle, réfléchie et pondérée. De 1995 à 2014, il a fait de la gestion de la ville de Tours et de son agglomération l’œuvre de sa vie.

Jean Germain fut un bâtisseur et un aménageur. Habité par l’idée de transformer sa ville, il a mené à bien, avec détermination et compétence, de nombreux projets. Je citerai, bien sûr, la réalisation du tramway, qui a contribué à faire entrer Tours dans la modernité et qui, traversant la ville du nord au sud, a profondément modifié le paysage urbain. J’évoquerai aussi la réalisation du quartier « Montconseil » ou encore la création de la zone commerciale, de loisirs et d’habitat des « 2 Lions ».

Comme beaucoup de maires attachés à leur ville, Jean Germain n’ignorait rien de la sienne : il connaissait chaque rue, chaque place, chaque jardin, chaque école, chaque crèche, sans oublier bien sûr les bords de la Loire, à l’embellissement desquels il tenait beaucoup.

Jean Germain était parvenu à ces résultats par cette culture du dialogue et ce sens du compromis qui le caractérisaient et dont les Tourangeaux et les Tourangelles lui savaient gré puisqu’ils l’élurent à trois reprises à la tête de leur ville.

Il mit ces mêmes qualités au service de son action au sein de la région Centre, dont il fut, de 1998 à 2011, le premier vice-président, chargé des finances, mais aussi de la planification, des relations internationales et de la communication. Dans ces fonctions, il fit encore la preuve de ses qualités de gestionnaire et d’administrateur.

Dès son arrivée dans notre hémicycle, Jean Germain fut un parlementaire compétent, actif et estimé de ses collègues.

Juriste de formation, Jean Germain était préparé au rôle de législateur puisque, après avoir été, de 1982 à 1985, directeur de cabinet d’André Laignel, alors président du conseil général de l’Indre, il avait exercé des fonctions similaires à l’échelon national lorsque celui-ci, membre de plusieurs gouvernements, fut successivement chargé de la formation professionnelle, puis de la ville et de l’aménagement du territoire.

Cet investissement dans la vie politique nationale, Jean Germain l’avait par ailleurs conforté au travers de son engagement politique, en étant secrétaire national du parti socialiste chargé des études, puis membre du conseil national du parti socialiste et délégué national chargé de l’éducation et des universités.

Jean Germain fut élu au palais du Luxembourg le 25 septembre 2011 pour y représenter son département, l’Indre-et-Loire.

Membre de la commission des finances, il y exerça d’abord les fonctions de rapporteur spécial du budget de la ville et du logement, avant de se consacrer, à partir de 2012, à la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Sur ce sujet délicat qu’il maîtrisait parfaitement, ses rapports faisaient autorité, tout comme ses rapports annuels sur le projet de loi de règlement du budget de l’État.

Notre collègue se révéla ainsi, en quelques années, un membre éminent et actif de la commission des finances du Sénat, dont il était devenu le vice-président au mois d’octobre dernier.

Son activité dans l’hémicycle n’était pas moindre. Nous avons encore en mémoire la qualité de ses interventions, ici même, il y a quelques mois, lors de l’examen par le Sénat du projet de loi relatif à la transition énergétique.

Il assura également la présidence du groupe interparlementaire d’amitié France-Liban, responsabilité qu’il exerça avec passion et engagement, je peux en témoigner. Il avait parfaitement senti que les liens entre le Liban et la France relevaient de bien autre chose que des « affaires étrangères ».

Le 16 janvier dernier, Jean Germain avait été chargé d’une mission sur la réforme des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales auprès de trois membres du Gouvernement : Mme Marylise Lebranchu, M. André Vallini et M. Christian Eckert. Nous aurons bientôt l’occasion de débattre de propositions qu’il avait contribué à faire émerger dans ce cadre, notamment sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement.

Ce besoin impérieux d’activité qui caractérisait notre collègue, cette soif de connaissances qui ne l’avait jamais quitté, Jean Germain les tenait de sa formation et de ses débuts en tant qu’universitaire.

Docteur en droit public, il avait été maître de conférences en droit constitutionnel et en finances publiques, avant de devenir vice-président, puis président de l’université François-Rabelais de Tours.

À ce titre, il avait ouvert un certain nombre de chantiers, qui vont de la professionnalisation nécessaire de filières universitaires à l’accompagnement de la démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur, en passant par l’ouverture européenne des cursus, notamment au travers du programme Erasmus.

Après qu’il eut été nommé inspecteur général de l’éducation nationale, en 1993, Pierre Moscovici et Jack Lang, respectivement ministres des affaires européennes et de l’éducation, lui confièrent, en 1999, une mission sur les moyens d’accroître la mobilité des étudiants et des enseignants dans l’espace européen. Un rapport sur « l’Europe des connaissances et du savoir » fit et fait encore autorité.

« Il est des êtres, j’en suis, pour lesquels injustice et déshonneur sont insupportables ». Ces mots figurent parmi les derniers de Jean Germain. Le Sénat de la République ne doit pas les oublier.

À nos collègues du groupe socialiste et républicain, à ceux de la commission des finances, qui ont perdu un de leurs membres les plus appréciés, ainsi qu’à notre collègue Stéphanie Riocreux, qui a la lourde charge de succéder à Jean Germain, je tiens à redire notre sympathie.

À ses deux enfants, à tous les membres de sa famille, à celle et ceux qui ont accompagné sa vie pendant de nombreuses années, je veux dire à nouveau que nous n’oublierons pas Jean Germain et que sa mémoire est ici vivante, au-delà même des symboles qu’incarne le Sénat, parce que ses dernières paroles sont une exigence pour nous tous.

La parole est à Mme la ministre des affaires sociales.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Monsieur le président, je vous remercie de l’hommage que vous venez de rendre à Jean Germain, auquel s’associe l’ensemble du Gouvernement. En son nom, je voudrais à mon tour saluer la mémoire de celui qui fut un grand élu local, un parlementaire passionné, mais aussi, pour moi, un ami de longue date.

Jean Germain, c’est avant tout une histoire rare entre un homme et un territoire, une histoire qui aura vu « le petit gars de Bourgueil », comme il aimait lui-même malicieusement s’appeler – car Jean Germain était un vrai malicieux, au regard qui pétille, au sourire qui réchauffe et au trait d’esprit qui, parfois, assomme –, remonter la Loire pour être élu maire de Tours, fonder et présider sa communauté d’agglomération, puis devenir sénateur d’Indre-et-Loire.

Remonter la Loire : dans cette simple tournure tient une des clés du caractère de Jean Germain. Remonter le courant, c’est ce qu’il aura eu le sentiment de faire sa vie durant, lui qui aura commencé avec un CAP de pâtissier – il lui en était resté le goût de la cuisine ! – et finira docteur en droit, lui qui deviendra président de l’université bien que n’étant que maître de conférences, lui qui enlèvera une ville détenue depuis trente-six ans par la droite et réputée inexpugnable. Jean Germain aura toujours eu à cœur de faire mentir les destinées écrites par certains pour d’autres qu’eux.

Ce qu’il était parvenu à faire pour lui, il souhaitait ardemment que tous puissent le réaliser. Rien ne devait pouvoir entraver la volonté et le mérite. C’est une des clefs de son engagement.

C’était donc un tempérament profondément ligérien que celui de Jean Germain. À l’image de celle de la Loire, qu’il aimait tant, son apparente quiétude cachait un cours que rien ne pouvait détourner, une liberté que rien ne pouvait forcer. À l’image de la Touraine, terre de tempérance et de raison, il abhorrait les outrances, les excès et les dogmes.

De ces traits procédèrent naturellement les lignes de force d’un engagement politique au sein de la gauche républicaine et sociale-démocrate, résolument sociale-démocrate.

C’est ainsi qu’il rejoint, très jeune, les rangs de la Convention des institutions républicaines, au côté de François Mitterrand. Il sent dans ce mouvement et son leader cette capacité à concilier les idéaux et le réel, cet équilibre toujours précaire que la gauche a, dans ces années-là, tant de mal à atteindre. Et si Jean Germain n’a pas eu de mentor, François Mitterrand fut néanmoins pour lui une figure tutélaire, avec laquelle il partageait l’amour des lettres, de l’histoire, une certaine forme de spiritualité et, il faut bien le dire, la conviction que l’habileté en politique n’est pas forcément un vilain défaut. Jean Germain était habile, avec ce que cela, parfois, recèle de complexité et d’ambiguïté.

Mais Jean Germain n’était pas un homme d’appareil. Il ne concevait l’engagement que comme une manière de changer les choses, ce qui exige d’être sur le terrain, d’agir concrètement.

En 1982, encore étudiant, il rejoint André Laignel, tout nouveau président du conseil général de l’Indre, en tant que directeur de cabinet. En plein élan de décentralisation, tout est à inventer et à redéfinir. Le duo s’y emploie, avec enthousiasme. L’aventure est alors joyeuse et de cette coopération naît une amitié qui durera quarante ans. Elle trouvera de nouveau à s’employer quelques années plus tard, lorsque Jean Germain redeviendra le directeur de cabinet d’André Laignel, nommé secrétaire d’État à la formation professionnelle, puis à l’aménagement du territoire.

Jean Germain agit, donc, mais il voudrait tellement le faire chez lui, à Tours !

Seulement, en cette fin des années quatre-vingt, il est encore illusoire pour un homme de gauche d’espérer créer une brèche dans la citadelle de Jean Royer. Qu’à cela ne tienne ! Si l’on ne peut encore s’occuper des affaires de la ville, on peut au moins commencer par moderniser son université.

Jeune maître de conférences en droit, il se met en tête de devenir président de l’université François-Rabelais, fonction pourtant traditionnellement dévolue au corps des professeurs, et il y parvient. Il conduira de nombreux chantiers, avec toujours pour objectif de démocratiser l’accès à l’enseignement, de mettre l’université en prise avec la société et le monde du travail ; et de l’ouvrir sur l’Europe, car il est aussi un grand Européen.

Il trouve même un terrain d’entente avec Jean Royer, à savoir un programme immobilier permettant de conserver l’université en centre-ville, montrant une fois encore que, pour lui, l’intérêt général doit primer ce qu’il appelle les « politicailleries ».

Jean Germain était un enseignant apprécié de ses étudiants, il devint un président estimé de ses collègues. Mais en ce mitan des années quatre-vingt-dix, il ne sait pas encore qu’il va bientôt devenir un maire aimé des Tourangeaux.

En 1995, l’imprévisible se produit. À la faveur de la désunion de ses opposants, Jean Germain remporte l’élection municipale et succède au « roi Jean », celui avec qui il croise le fer au conseil municipal depuis plusieurs années, mais dont il respecte la droiture et reconnaît la stature. La victoire est, il faut l’admettre, une surprise. La fête n’en est que plus belle ! Toutefois, passé la liesse, le regard se dessille vite : on savait que la ville était devenue indolente ; on s’aperçoit qu’elle est, en outre, dans un état financier critique !

Jean Germain est un homme de gauche, un gouvernant adroit, mais aussi – on le sait au Sénat plus qu’ailleurs – un spécialiste des finances publiques. Il parviendra à restaurer l’attractivité de la ville, tout en la redressant financièrement, avec toujours pour maîtres mots « réunir et rassembler ».

Réunir et rassembler les Tourangeaux, quelles que soient leurs origines, leurs appartenances, leurs classes sociales ou leurs générations.

Réunir et rassembler un territoire jusqu’alors fractionné, en aidant les élus de l’agglomération à dépasser leurs clivages et parfois leurs vieilles rancunes pour bâtir la communauté d’agglomération. Jean Germain signa l’un des succès dont il était légitimement le plus fier. Il prolongera cette réconciliation des territoires en siégeant au conseil régional, où il sera le loyal et efficace premier vice-président de Michel Sapin, d’Alain Rafesthain, puis de François Bonneau.

Réunir et rassembler, enfin, les familles politiques autour d’une base qui soit la plus large possible. Jean Germain savait que l’union est la meilleure garante des victoires électorales, et surtout à quel point elle préserve de l’hégémonie stérilisante. La diversité était pour lui un impératif.

Élu avec moins de 43 % des voix en 1995, il le sera avec plus de 62 % en 2008 : tout est dit !

Cette trajectoire trouvera sa consécration avec l’entrée de Jean Germain au Sénat en 2011. Cette chambre, moins sensible aux vibrations partisanes et aux soubresauts de l’opinion, lui correspondait parfaitement. Il était fier d’y siéger et heureux, je le crois, d’avoir pu réaliser ce qui était pour lui un accomplissement.

Je sais qu’il était ici un collègue estimé et une voix que l’on écoutait au sein de la commission des finances. Je ne doute pas qu’il était également, pour beaucoup ici, un ami apprécié.

Jean Germain aura donc été pour nombre d’entre nous une présence bienveillante. Il aimait transmettre et accompagner, mais sans jamais étouffer les personnalités et les aspirations. Il prenait chacun comme il était, sans vouloir le changer, tout en l’amenant, par petites touches, à s’accomplir. « Le soleil doit briller pour tout le monde », disait-il souvent. Il faisait ce qu’il fallait pour cela, en accordant sa confiance et en laissant une grande autonomie à ses équipes. Toute une génération – des jeunes, mais pas seulement – a émergé autour de lui. Il aimait aussi à mettre en situation des personnalités d’horizons divers issues de la société civile.

Vous me permettrez un mot personnel. Cette bienveillance, j’en ai moi-même bénéficié quand je suis « entrée » en politique, en Indre-et-Loire. Il m’a soutenue et encouragée avec une confiance vraie lors des élections législatives de 1997 et après. D’autres que lui auraient vu une potentielle concurrence : le monde politique n’aime pas toujours les nouvelles têtes… Lui a vu une chance de faire avancer nos idées dans le département. Je suis heureuse et fière d’avoir pu lui donner raison.

Cette bienveillance, certains l’ont pourtant trahie. Je ne reviendrai ici ni sur les circonstances ni sur les protagonistes – ils n’ont pas leur place en cet instant. Je veux simplement exprimer la colère et la tristesse, toujours aussi présentes : la colère contre les cyniques et les cupides, qui l’ont conduit à ce geste ; la tristesse que nous, ses proches, éprouvons de n’avoir pas vu la faille qui en lui s’élargissait.

Pour conclure cet éloge, j’emprunterai les mots de François Mitterrand, des mots que Jean aurait reconnus et appréciés :

« Je parle au nom de la France lorsque je dis [...] qu’elle a perdu l’un de ses meilleurs serviteurs et qu’elle en prend conscience sous le choc d’un drame où se mêlent grandeur et désespoir, la grandeur de celui qui choisit son destin, le désespoir de celui qui souffre d’injustice à n’en pouvoir se plaindre, à n’en pouvoir crier.

« Et je parle au nom de ses amis pour dire qu’ils pleurent un homme intègre et bon, pétri de tendresse et de fidélité, à la fois préparé à subir les épreuves que réserve le combat politique, et fragile quand ce combat dérive, change de nature et vise au cœur. »

Au nom du Gouvernement, je présente à la compagne de Jean Germain, Nora, à sa famille, à ses enfants, à ses proches, à ses collègues sénateurs et aux habitants de Tours, mes plus sincères condoléances et l’expression de mon amitié profonde.

M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, je vous invite maintenant à partager un moment de recueillement à la mémoire de Jean Germain, que je revois encore siégeant dans cet hémicycle, sur ma gauche : en cet instant, il est présent parmi nous. (Mme la ministre, M. le secrétaire d'État, Mmes les sénatrices et MM. les sénateurs observent une minute de silence.)

Mes chers collègues, conformément à notre tradition, en signe d’hommage à Jean Germain, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Conventions internationales

Adoption en procédure accélérée et en procédure d’examen simplifié de deux projets de loi dans les textes de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen :

- du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre dans le domaine de l’enseignement (projet n° 563, texte de la commission n° 589, rapport n° 588) ;

- et du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Secrétariat de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et son Protocole de Kyoto concernant la vingt et unième session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la onzième session de la Conférence des Parties agissant comme réunion des Parties au Protocole de Kyoto et les sessions des organes subsidiaires, après engagement de la procédure accélérée (projet n° 512, texte de la commission n° 587, rapport n° 586).

Pour ces deux projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

convention france-andorre dans le domaine de l’enseignement

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre dans le domaine de l'enseignement
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre dans le domaine de l’enseignement (ensemble deux annexes), signée à Paris le 11 juillet 2013, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre dans le domaine de l'enseignement
 

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

accord entre la france et le secrétariat de la convention-cadre des nations unies sur les changements climatiques et son protocole de kyoto, relatif aux changements climatiques (cop 21).

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Secrétariat de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et son Protocole de Kyoto concernant la vingt et unième session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la onzième session de la Conférence des Parties agissant comme réunion des Parties au Protocole de Kyoto et les sessions des organes subsidiaires
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Secrétariat de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et son Protocole de Kyoto concernant la vingt et unième session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la onzième session de la Conférence des Parties agissant comme réunion des Parties au Protocole de Kyoto et les sessions des organes subsidiaires (ensemble douze annexes), signé à Paris le 20 avril 2015 et à Bonn le 27 mars 2015, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Secrétariat de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et son Protocole de Kyoto concernant la vingt et unième session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la onzième session de la Conférence des Parties agissant comme réunion des Parties au Protocole de Kyoto et les sessions des organes subsidiaires
 

12

 
Dossier législatif : proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d'inscription sur les listes électorales
Discussion générale (suite)

Réouverture exceptionnelle des délais d'inscription sur les listes électorales

Adoption en nouvelle lecture d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d'inscription sur les listes électorales
Article 1er

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, visant à la réouverture exceptionnelle des délais d’inscription sur les listes électorales (proposition n° 569, texte de la commission n° 578, rapport n° 577).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État chargée de la réforme de l’État et de la simplification. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l’intérieur, retenu par d’autres obligations.

Vous êtes de nouveau appelés à examiner la proposition de loi visant à la réouverture des délais d’inscription sur les listes électorales pour l’année 2015. II s’agit de déroger de façon exceptionnelle au principe de révision annuelle des listes électorales, prévu par l’article L. 16 du code électoral.

Toutes les élections récentes, y compris les élections départementales de mars dernier, ont démontré combien il était impératif de lutter contre le fléau de l’abstention, qui mine la démocratie. Dans la perspective des élections régionales de la fin de l’année, il était donc urgent d’agir, d’autant que c’est la première fois depuis 1965 qu’un scrutin aura lieu en fin d’année.

Sans cette proposition de loi, les élections de décembre 2015 se feraient sur la base de demandes d’inscription déposées près d’un an auparavant, au 31 décembre 2014. Il y aurait donc un décalage très important entre la date limite des inscriptions sur les listes électorales et celle du scrutin ; nous avons le devoir d’y remédier.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte adopté par votre commission propose de généraliser l’application de l’article L. 30 du code électoral. Cette solution remet en cause tout le système de gestion des listes et la sincérité de celles-ci. Le Gouvernement ne peut donc y adhérer.

Comme vous le savez, la procédure de l’article L. 30 est dérogatoire, elle est conçue pour des cas limités et elle ne permet pas de mobiliser l’INSEE, car les délais sont déjà extrêmement serrés pour procéder aux échanges entre les communes et mobiliser les commissions administratives communales compétentes en la matière.

Cette procédure présente donc deux faiblesses majeures.

Premièrement, il n’y a pas de vérification de la capacité électorale du demandeur, ce qui peut conduire à inscrire des personnes n’ayant pas le droit de voter. En effet, dans le cadre normal de la procédure de révision annuelle, la commune est tenue de saisir l’INSEE de toute demande d’inscription, afin notamment de vérifier la capacité électorale du demandeur. Dans le cadre de la procédure prévue à l’article L. 30, l’INSEE n’est pas consultée, ce qui peut conduire à l’inscription de personnes qui, en réalité, n’auraient pas le droit de voter.

Deuxièmement, de nombreuses doubles inscriptions sont constatées dans les faits au moment du scrutin. Les délais très courts entre la demande d’inscription et le scrutin ne garantissent pas l’effectivité de l’information entre les communes. Ainsi, dans les faits, la commune d’inscription d’un électeur au titre de l’article L. 30 notifie cette information à la commune de départ dans les tout derniers jours avant le scrutin, ce qui peut empêcher la radiation à temps de l’électeur de cette première liste. Cette procédure peut ainsi engendrer des doubles inscriptions susceptibles de mettre en cause la sincérité du scrutin.

Vous avez tenté d’y remédier par l’allongement du délai à vingt jours, au lieu de dix. Mais ce dispositif reste imparfait, en l’absence d’informations coordonnées avec l’INSEE, alors que, je l’ai indiqué, cette coordination est importante.

Au contraire, la proposition de loi de Mme Pochon maintient le cadre de la révision périodique des listes ; elle ne fait qu’en différer le démarrage. Le texte adopté par l’Assemblée nationale ne remet donc pas en cause le fonctionnement de droit commun de la révision des listes électorales, mais y intègre, à titre exceptionnel, en 2015, un délai supplémentaire d’inscription sur les listes électorales pour tous les citoyens.

En prenant en compte les demandes d’inscription déposées jusqu’au 30 septembre, la loi laisse à l’INSEE et aux communes deux mois pour arrêter définitivement les listes électorales à la fin du mois de novembre. Le délai du 30 septembre permettra à l’ensemble des citoyens ayant changé de domicile au cours de l’été de déposer une demande d’inscription. Cette mesure est particulièrement favorable aux étudiants qui s’installent en septembre dans une nouvelle ville pour poursuivre leurs études, et globalement à l’ensemble de la population concernée par un déménagement, dû par exemple à une mutation.

Je voudrais également souligner un inconvénient de votre proposition consistant à élargir le champ de l’article L. 30 : tous les Français qui se sont inscrits sur les listes électorales depuis le 1er janvier dernier devraient retourner s’inscrire au titre de l’article L. 30, ce qui, vous en conviendrez, n’irait ni dans le sens de la simplification pour les usagers ni dans celui de l’allégement des charges administratives des communes.

À l’inverse, le fait de différer les dates de validité des inscriptions, comme nous le proposons, ouvre non seulement le droit de vote aux élections régionales pour les Français qui s’inscriront sur les listes dès la publication de cette loi et jusqu’à la fin septembre, mais également à tous les citoyens qui ont fait la démarche depuis le 31 décembre 2014.

Compte tenu de ces éléments, le Gouvernement maintient sa position en faveur du texte dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

Enfin, je voudrais vous rappeler que le Président de la République s’est clairement exprimé pour une modernisation de l’accès au scrutin, avec l’ambition que nos concitoyens puissent s’inscrire dans un délai d’un mois avant l’échéance électorale, et non plus seulement l’année précédant le scrutin. Nous avons d’ores et déjà, avec les députés Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann, commencé à travailler à une telle réforme.

Cette initiative permettra de reprendre l’esprit de vos amendements, monsieur le rapporteur. Le ministère de l’intérieur, qui suit de très près la préparation de cette future proposition de loi, veillera à ce que ceux de vos collègues qui le souhaiteraient et vous-même puissiez participer aux travaux préparatoires, dans la tradition des initiatives transpartisanes qui devraient nous rassembler.

Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-nous de continuer à travailler ainsi, en confiance, en votant les amendements de rétablissement du texte de l’Assemblée nationale proposés par le groupe socialiste et républicain du Sénat. C’est là un enjeu républicain qui doit nous rassembler au-delà de nos différences ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la commission mixte paritaire du 10 juin 2015 s’étant séparée sur un constat de désaccord, nous voici donc réunis pour l’avant-dernier épisode, le dernier revenant à l’Assemblée nationale, de l’examen de la proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d’inscription sur les listes électorales, texte déposé par certains de nos collègues députés avec les « encouragements » – c’est le moins qu’on puisse dire ! – du Gouvernement.

Je commencerai en rappelant quelques éléments de contexte.

D’abord, cette proposition intervient au terme de trois modifications en cinq ans du calendrier électoral. C’est du jamais vu !

Ensuite, lors de la dernière modification du calendrier électoral, celle du 16 janvier 2015, on s’est si peu préoccupé de ses effets sur la participation électorale qu’on a supprimé la concordance entre élections départementales et élections régionales, censée précisément favoriser cette participation, et renvoyé les élections régionales au mois de décembre, période d’incertitudes météorologiques où, j’ai eu l’occasion de le souligner, les électeurs pensent plus au père Noël de leurs enfants qu’à celui des candidats ! (Sourires.)

D’ailleurs, la loi du 16 janvier 2015 ne contient aucune disposition de réouverture des listes électorales. Cela n’empêche pas aujourd'hui le Gouvernement et ceux qui le soutiennent d’aller répétant que leur souci exclusif en matière électorale est la participation et que refuser le prêt-à-porter législatif proposé, c’est mettre gravement en péril la démocratie !

Le problème qui se pose est le suivant : comment obvier aux effets négatifs sur la participation électorale du choix gouvernemental de reporter au mois de décembre les élections régionales de 2015 ? C’est l’objet de la proposition de loi de notre collègue députée Élisabeth Pochon et des membres du groupe socialiste de l’Assemblée nationale.

Cette proposition s’inspire directement du rapport que Mme Pochon avait écrit, puis présenté avec Jean-Luc Warsmann le 17 septembre 2014. Envisageant l’ensemble de la procédure d’inscription sur les listes électorales, notamment le calendrier, les démarches et les modalités de contrôle, et invitant à une réforme globale de celle-ci, le rapport évoquait au passage le report des régionales au mois de décembre 2015, ce dont, je le répète, la loi du 16 janvier 2015 n’a tenu aucun compte.

Les auteurs du rapport formulaient la proposition suivante : « Tenir compte, dans les opérations de révision et d’établissement des listes électorales de l’année 2015, du report programmé de mars à décembre 2015 de la tenue des élections des conseillers régionaux, des conseillers de Corse et des membres de l’Assemblée de Martinique et de Guyane en procédant, à titre exceptionnel, à une seconde révision des listes électorales quelques semaines avant ou en ouvrant plus largement les possibilités de s’inscrire hors période de révision. » Vous le voyez, je n’ai rien inventé ; je n’ai fait que plagier l’une des recommandations de nos collègues députés.

Ainsi, la différence d’approche entre l’Assemblée nationale et le Sénat porte non sur la réalité du problème soulevé par le rapport Pochon-Warsmann, mais sur le choix entre les deux options proposées. L’Assemblée nationale souhaite retenir la première, c'est-à-dire l’ouverture exceptionnelle des listes, tandis que le Sénat préfère la seconde.

Comme vous le savez, nous proposons de régler le problème en ouvrant plus largement les possibilités de s’inscrire hors période de révision et en élargissant de façon pérenne, et non exceptionnelle, le nombre des bénéficiaires potentiels des dispositions de l’actuel article L. 30 du code électoral.

Madame la secrétaire d’État, cette procédure n’a rien de dérogatoire : elle est même fréquemment utilisée ! Le problème est que, actuellement, elle ne concerne que quelques catégories d’électeurs, notamment ceux qui auront changé de résidence après le 31 décembre de l’année précédente pour un motif professionnel. C’est pourquoi nous proposons d’étendre l’application de ce dispositif aux personnes ayant emménagé en cours d’année quel qu’en soit le motif. En effet, ce sont ces dernières qui sont le plus pénalisées par les dispositions actuelles du code électoral.

Plusieurs raisons motivent le choix du Sénat.

La première tient au refus de principe d’une pratique devenue fâcheusement habituelle : le fait de corriger par une nouvelle loi ou par des dispositions exceptionnelles et non pérennes les effets collatéraux de lois antérieures rédigées à la hâte. En l’occurrence, les lois qui se sont succédé ont reporté par trois fois – vous en conviendrez, cela laissait le temps de la réflexion ! – la date des élections régionales. C’est vraiment une très mauvaise habitude !

La deuxième se fonde sur le constat que l’ouverture d’une révision exceptionnelle des listes électorales dans l’ensemble des communes leur occasionnera des charges supplémentaires quelques mois seulement avant l’ouverture de la révision ordinaire. Et ne nous dites pas que notre décision créera des complications pour d’éventuels bénéficiaires de l’article L. 30 ! Leur inscription sera tout simplement effective lors de la révision normale.

Le rapport de nouvelle lecture de la commission des lois de l’Assemblée nationale n’aborde pas le problème des communes qui devront procéder à une révision exceptionnelle à l’automne, puis recommencer au mois de janvier !

La troisième raison réside dans le fait qu’une telle disposition pérenne est d’application immédiate quand la proposition proposée par l’Assemblée nationale appelle un décret en Conseil d'État.

Il est opposé un risque d’insincérité du scrutin à la solution adoptée par le Sénat, des électeurs pouvant voter deux fois faute d’avoir pu être radiés à temps des listes de leur ancienne commune de résidence.

Outre que le rapport Pochon-Warsmann, pourtant très complet, ignore ce problème, cela revient à insinuer que la procédure d’inscription prévue à l’article L. 30 du code électoral, dont je rappelle qu’elle existe depuis longtemps, aurait faussé les scrutins passés… Personnellement, j’ai du mal à saisir en quoi un afflux d’inscriptions pourrait entraîner des difficultés insurmontables. Encore une fois, je ne vois pas en quoi une telle procédure serait dérogatoire.

D’ailleurs, l’afflux est d’autant plus hypothétique que, lors des dernières élections départementales, la moitié des inscrits ne s’étaient pas déplacés. Et vous prétendez que, dans ce contexte de désengagement généralisé de l’électorat, les nouveaux inscrits, ces nouveaux convertis de la religion civique, se mobiliseraient pour voter dans deux communes le même jour ? Permettez-nous de sourire !

Pour crédibiliser le risque, en réalité négligeable, de double vote susceptible de fausser l’élection, on évoque des électeurs sollicitant leur inscription dix jours avant le scrutin sans que l’information puisse parvenir à temps au maire de leur ancienne commune de rattachement.

Honnêtement, on imagine difficilement un électeur sollicitant son changement d’inscription pour cause de déménagement voter le même jour dans sa commune d’accueil et dans celle qu’il vient de quitter. D’autant que le double vote l’exposerait aux sanctions prévues par l’article L. 86 du code électoral réprimant l’inscription d’un même électeur sur plusieurs listes électorales.

Il faudrait être animé d’une foi militante peu commune ou être totalement inconscient pour risquer un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende, le tout sans avoir la moindre chance de peser sur le résultat d’un scrutin à la dimension des nouvelles grandes régions !

Notre commission des lois est convaincue de la justesse du choix du Sénat de première lecture. Toutefois, dans un souci d’ouverture – Mme la secrétaire d’État y a fait allusion –, elle propose, sans modifier le fond de sa position, c'est-à-dire la suppression de la condition tenant au motif professionnel du déménagement pour bénéficier de la procédure d’inscription « hors procédure de révision » prévue à l’article L. 30 du code électoral, de sécuriser le dispositif par deux dispositions. La première allonge de dix à vingt jours avant le scrutin la date butoir de dépôt de la demande d’inscription. La seconde porte de cinq à dix jours avant le scrutin le délai dont dispose la commission administrative communale pour statuer en application de l’article L. 32 du code électoral, ainsi que la date de publication du tableau rectificatif.

L’article L. 33 du code électoral prévoyant que le maire de la commune de la nouvelle inscription notifie à son homologue de la commune de radiation la décision de la commission administrative sous un délai de deux jours, le maire de la commune de radiation devrait recevoir cette information environ une semaine avant le scrutin. Cela lui laisse largement le temps d’effectuer la correction.

Voilà qui devrait, me semble-t-il, rassurer entièrement ceux qui auraient encore quelques doutes sur la justesse du choix de première lecture du Sénat, choix que je vous propose de réitérer, mes chers collègues.

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie des compliments que vous avez adressés à certains volets de notre proposition, que le Gouvernement serait prêt, nous dit-on, à reprendre dans le futur texte. Mais alors, ne faisons pas une loi d’exception ! Travaillons sur ce qui sera repris et, le moment venu, changeons vraiment la procédure ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le président de la commission des lois applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Robert Navarro.

M. Robert Navarro. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la démocratie est notre bien le plus sacré ! Pour que nos décisions soient légitimes aux yeux des citoyens, nous avons besoin de leur participation massive aux élections.

La France est l’un des rares pays européens à ne pas permettre l’inscription sur les listes électorales l’année même d’un scrutin. Je trouve que le choc de simplification se fait attendre…

La présente proposition de loi vient corriger la confusion introduite dans la tête de l’électeur après les nombreuses modifications du calendrier électoral, d’autant que les élections régionales auront lieu au mois de décembre ; cette date est loin d’être idéale compte tenu du délai important entre la clôture des listes et la tenue du scrutin.

Je soutiens donc les objectifs et propositions de mes collègues membres de la commission des lois du Sénat. L’Assemblée nationale propose une réouverture exceptionnelle des listes ; c’est une rustine provisoire et illisible. Je préfère un cadre clair pour les inscriptions hors période de révision.

Par ailleurs, une telle solution est plus facile à mettre en œuvre pour les communes, dont nous connaissons les difficultés matérielles actuelles.

J’entends mes collègues socialistes, qui préfèrent une disposition exceptionnelle pour une situation exceptionnelle, celle d’une élection au mois de décembre. Je lis leurs amendements. Mais, chers amis, gouverner, c’est prévoir ! Les rustines pour colmater les errements de la réforme territoriale ne sont pas acceptables !

C’est pourquoi je soutiens pleinement la solution pérenne proposée par notre collègue Pierre-Yves Collombat, qui consiste à élargir les possibilités pour un électeur de solliciter une inscription selon la procédure applicable hors période de révision, prévue à l’article L. 30 du code électoral.

J’attends surtout la modernisation de notre pays, et je crois qu’elle passe par ce sujet. (Applaudissements sur quelques travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains. – M. le rapporteur applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud.

M. Mathieu Darnaud. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous revoici penchés sur la proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d’inscription sur les listes électorales, après un échec en commission mixte paritaire que nous sommes nombreux ici à regretter, mais qui témoigne de la volonté affirmée du Sénat d’établir un texte résolument utile et pérenne.

Le Gouvernement et la majorité dont il dispose à l’Assemblée nationale souhaitent que ce texte ne s’applique qu’à titre exceptionnel et pour les élections régionales de décembre, obligeant le Parlement à légiférer à nouveau pour régler la question de l’inscription des nouveaux résidents sur les listes électorales en vue des consultations à venir. Or cette question pourrait être définitivement réglée « ici et maintenant », selon une formule chère aux socialistes à une époque apparemment révolue.

Il y avait d’ailleurs un certain espoir en la matière puisque nous avions cru comprendre que le Président de la République trouvait le travail législatif trop long et souhaitait raccourcir la durée de la navette parlementaire. Les dernières déclarations publiques qu’il a faites dans ce sens partent d’ailleurs d’un souci tout à fait louable : nos concitoyens doivent percevoir plus rapidement les effets d’une réforme inscrite à l’ordre du jour des travaux du Parlement. Que ne saisissez-vous cette occasion pour lui donner satisfaction, madame la secrétaire d’État ?

Il eût été logique que, pour satisfaire à cette ambition, le Gouvernement acceptât les options de notre rapporteur et vît dans le texte adopté par le Sénat en première lecture une occasion de progresser rapidement et définitivement en faveur de l’ouverture permanente des listes électorales. En faisant bénéficier beaucoup plus largement des dispositions prévues à l’article L. 30 du code électoral, nous aurions pu régler définitivement ce problème, sans avoir recours à un autre véhicule législatif et à son cortège de longs délais que déplore le Président de la République.

Au lieu de cela, le Gouvernement, soutenu par les députés de sa majorité, nous enjoint d’aller par étapes et retarde l’achèvement d’une réforme de bon sens, profitable à l’exercice de la citoyenneté.

Pourquoi maintenir à l’état d’exception ce qui peut d’ores et déjà apporter un progrès définitif ? Pourquoi relancer un long processus législatif passant par la prise de décrets en conseil d’État ?

Je rappelle que, comme l’a très bien indiqué notre rapporteur, c’est uniquement parce que le Gouvernement s’est lancé dans un mécano des collectivités locales, dont il semble avoir perdu en chemin le plan et la notice, que nous nous retrouvons à devoir légiférer sur un scrutin fixé en décembre après de multiples tergiversations.

Alors que les élections régionales se tiendront en décembre, le Gouvernement entend clôturer au 30 septembre les inscriptions pour nos concitoyens qui auront changé de commune en 2015. Cette date nous apparaît comme bien trop restrictive, et il nous semble naturel que le Gouvernement assume la responsabilité qui est la sienne dans la tenue de ce scrutin de fin d’année en garantissant à l’ensemble de nos concitoyens qu’ils pourront y participer, même s’ils s’établissent dans une autre commune.

Ce point a été précisé avant moi, mais j’insiste sur le fait que la commission des lois, lorsqu’elle a examiné la proposition de loi, a montré la volonté d’aboutir du Sénat en faisant un pas en direction des positions de l’Assemblée nationale et en acceptant de porter de dix à vingt jours avant le scrutin le délai minimum permettant aux nouveaux habitants de s’inscrire sur les listes électorales de leur commune de résidence.

C’est pourquoi, avec mes collègues du groupe Les Républicains, je voterai le texte de la commission, qui est équilibré, nécessaire et immédiatement applicable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le rapporteur applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, force est de constater que deux visions différentes s’affrontent sur cette proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d’inscription sur les listes électorales, que nous examinons aujourd'hui en nouvelle lecture.

Le Sénat, par l’intermédiaire de la commission des lois et de son excellent rapporteur, notre collègue Pierre-Yves Collombat, est bien dans son rôle en défendant une autre manière de légiférer et en refusant de faire une loi de circonstance chaque fois que se pose un problème particulier et ponctuel.

C’est clairement ce que notre assemblée a fait en élargissant la possibilité d’inscription sur les listes électorales hors procédure habituelle à tous les électeurs changeant de commune à la suite d’un déménagement après clôture du délai de dépôt des demandes d’inscription, et pas seulement aux seuls électeurs déménageant pour un motif professionnel. Cela s’appelle tout simplement le bon sens !

Nous ne pouvons donc, me semble-t-il, qu’être favorables aux propositions de Pierre-Yves Collombat, d’autant que, dans un souci de pragmatisme et de sagesse, il nous a proposé une version retravaillée du texte, qui réduit le risque de double inscription en allongeant de dix à vingt jours avant le scrutin la date butoir du dépôt par l’électeur de sa demande d’inscription hors procédure de révision annuelle, et de cinq à dix jours avant la date du scrutin le délai dont dispose la commission administrative pour statuer.

Ces précautions supplémentaires me semblent être de nature à rassurer pleinement le Gouvernement et nos collègues députés.

Pour toutes ces raisons, le groupe UDI-UC votera le texte issu des nouveaux travaux de la commission des lois.

Cela étant précisé, sans reprendre ce que je disais lors de la discussion générale en première lecture, je reviendrai sur le principal, à savoir que nous ne pensons pas que l’abstention croissante que nous connaissons à chaque scrutin soit due à un problème d’inscription sur les listes électorales. C’est plutôt la complexification croissante et incessante de nos institutions qui entraîne une véritable désaffection de nos concitoyens pour les élections.

Et ce n’est pas la décision prise par l’Assemblée nationale d’élire au suffrage universel direct les conseillers communautaires, c’est-à-dire de créer un niveau de collectivités territoriales supplémentaire, qui va arranger les choses, bien au contraire ! Une telle initiative dénote une absence de sens des réalités et de connaissance du terrain de ceux qui ont voté ce texte.

À cela s’ajoute, malheureusement, un sentiment de fatalité pour l’électeur, qui ne voit pas les gouvernements successifs, quels qu’ils soient, s’attaquer aux vrais problèmes du quotidien auxquels il est confronté – chômage, hausse des prélèvements, baisse du pouvoir d’achat –, et qui sont, pourtant, des difficultés plus importantes que la refonte quasi permanente du paysage et des compétences des collectivités territoriales, voire des modes de scrutin ! (Mme Françoise Gatel applaudit.)

Ces pratiques entraînent fatalement un désintérêt complet de nos concitoyens pour les élections. C’est sur cela que nous devrions nous pencher et travailler, plutôt que de vouloir remanier sans cesse les institutions.

Après ces quelques considérations, qui n’étaient pas réellement hors sujet, je reviens au texte qui nous occupe aujourd'hui. Le rapporteur nous propose une solution pragmatique, concrète et pérenne, qui, en outre, ne nécessite pas de texte réglementaire d’application. Le groupe centriste votera donc le texte qu’il nous soumet. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – Mme Marie Mercier et M. le rapporteur applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, après l’échec des travaux de la commission mixte paritaire, nous sommes réunis pour examiner en nouvelle lecture la proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d’inscription sur les listes électorales.

La majorité sénatoriale tout comme le rapporteur n’ont pas souhaité faire évoluer leurs positions, si ce n’est à la marge en faisant passer le délai butoir de dix à vingt jours.

Cette constance se retrouve chez le groupe socialiste et républicain, qui demeure convaincu que la démarche de nos collègues députés, approuvée par le Gouvernement, demeure la plus adaptée. La commission mixte paritaire a d’ailleurs donné lieu, il faut bien le dire, à un dialogue de sourds.

Nous restons donc sur nos positions respectives. Comme en première lecture, le groupe socialiste et républicain ne pourra pas souscrire aux propositions de notre éminent collègue Pierre-Yves Collombat et demandera le rétablissement des dispositions votées à l’Assemblée nationale. C’est d’ailleurs l’objet des trois amendements que je défendrai ultérieurement.

Ainsi que cela a été rappelé, pour la première fois depuis cinquante ans, les électeurs seront appelés aux urnes en toute fin d’année, au mois de décembre prochain. Il est vrai que nous n’avons pas perçu le problème lorsque nous avons voté les textes modifiant le calendrier électoral, et je note qu’aucun parlementaire n’a proposé d’amendement qui aurait tendu à le régler.

Une fois que la faille a été mise au jour, il fallait agir. Nos collègues députés ont pris, me semble-t-il, une bonne initiative en déposant une proposition de loi afin de permettre à tous les électeurs qui, sinon, ne pourraient pas voter, de s’inscrire sur les listes électorales et d’être en mesure d’exprimer leur suffrage.

Certes, le système français est un peu archaïque puisqu’il faut s’inscrire avant le 31 décembre de l’année qui précède le scrutin pour pouvoir voter. Le Président de la République, conscient des difficultés, a lui-même avancé l’idée de modifier notre système pour permettre une inscription sur les listes électorales tout au long de l’année, comme cela se pratique dans de nombreux pays européens. M. Warsmann et Mme Pochon travaillent sur la question. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur, s’est engagé à ce que, d’ici à la fin de l’année, un texte vienne modifier en profondeur le système d’inscription sur les listes électorales.

Une loi exceptionnelle est donc légitime en prévision du scrutin de décembre. Ensuite, nous bénéficierons d’un autre système, qui permettra l’inscription tout au long de l’année. Voilà qui répond aux arguments du rapporteur, qui souhaite la mise en place d’un système pérenne.

La commission des lois et le rapporteur proposent de modifier, ce qui répond en partie aux difficultés posées par le décalage de l’élection régionale en décembre, l’article L. 30 du code électoral. Comme à l’Assemblée nationale, nous n’adhérons pas à cette proposition, non pour des motifs politiques, mais essentiellement pour des raisons d’ordre technique. En effet, l’article L. 30 du code électoral – d’ailleurs peu connu des élus comme de nos concitoyens –…

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. Ah bon ?

M. Philippe Kaltenbach. … prévoit un système dérogatoire permettant d’inscrire certaines catégories de personnes sur les listes électorales en cours d’année. Il concerne un nombre de cas très réduit, et peu de citoyens y ont recours.

Cependant, dès lors que nous votons cette proposition de loi, elle recevra une forte publicité et il est probable – c’est en tout cas souhaitable – qu’un certain nombre de nos concitoyens ayant changé de lieu de résidence procéderont à une nouvelle inscription sur les listes électorales ou formuleront tout simplement une demande d’inscription s’ils ne sont pas déjà inscrits.

Nous partageons d’ailleurs la crainte du Gouvernement à cet égard : si les demandes sont trop importantes, le risque d’engorgement est réel et la situation ne sera pas gérable, notamment pour les petites communes. Certains, à juste titre, défendent les petites communes et rappellent les difficultés qu’elles doivent affronter au quotidien. Avec un nombre important d’inscriptions à effectuer, elles risquent de se trouver techniquement dépassées, ce qui aura des conséquences sur les listes électorales, lesquelles seront soit viciées, soit contestées.

Je rappelle que, dans les faits, l’article L. 30 ne permet de vérifier qu’une seule des trois conditions cumulatives pour qu’une liste électorale soit sincère : celle de l’attache avec la commune où est déposée la demande d’inscription. Cette procédure ne permet pas de vérifier si le citoyen dispose de la capacité électorale, car aucune notification à l’INSEE de cette demande d’inscription n’est prévue avant le scrutin.

En outre, il faut radier l’électeur nouvellement inscrit de sa commune d’origine, ce qui nécessite du temps. À cet égard, même les vingt jours proposés par Pierre-Yves Collombat ne nous paraissent pas un délai suffisant. Nous sommes donc confrontés à une difficulté technique.

La proposition de Pierre-Yves Collombat et de la commission des lois est intellectuellement séduisante, car elle s’appuie sur un cadre existant, qu’elle élargit. Néanmoins, ce faisant, elle l’affaiblit puisqu’elle rend le système potentiellement difficile à mettre en œuvre, ce qui peut entraîner des contestations des listes électorales. Il est naturel que le Gouvernement ne souhaite pas prendre un tel risque pour le scrutin de décembre prochain : si celui-ci était entaché d’insincérité, le Gouvernement serait tenu pour responsable et accusé d’avoir agi de manière imprévoyante.

Après une étude approfondie de la question, il apparaît que le système le plus fiable est bien la réouverture complète des listes électorales. Celle-ci permet d’inscrire ceux qui ont déménagé, mais aussi ceux qui, jusque-là, avaient fait le choix de ne pas s’inscrire. Plus il y aura d’inscrits sur les listes électorales, mieux ce sera. Cela relève de notre responsabilité. La démocratie, c’est aussi faciliter l’inscription sur les listes électorales de tous nos concitoyens, pour donner ensuite la possibilité à ceux qui le souhaitent de voter.

On nous fait de faux procès. Bien malin qui peut dire pour qui voteront ceux qui vont s’inscrire ! Nous permettons le plus largement possible l’inscription sur les listes électorales. Au-delà, bien sûr, chaque citoyen votera en son âme et conscience pour le parti ou la liste qu’il souhaitera soutenir. Notre responsabilité est de favoriser le plus grand nombre d’inscriptions, non d’œuvrer en faveur de tel ou tel parti, dans une logique partisane.

C’est pourquoi le groupe socialiste n’adhère pas à la proposition de M. Collombat et reste attaché à la proposition telle qu’elle a été déposée par nos collègues à l’Assemblée nationale, qui lui semble techniquement à la fois plus fiable et plus large. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à la suite de l’échec de la commission mixte paritaire, nous examinons en nouvelle lecture la proposition de loi de notre collègue député Bruno Le Roux visant à la réouverture exceptionnelle des délais d’inscription sur les listes électorales.

Dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale le 30 mars, puis le 29 juin dernier, la proposition de loi socialiste visait, afin de permettre au plus grand nombre d’exercer son droit de vote lors des prochaines élections régionales, à procéder à une révision exceptionnelle des listes électorales en 2015, en permettant l’inscription jusqu’au 30 septembre 2015.

Notre Haute Assemblée a, elle aussi, fait preuve de constance et a adopté, tant en séance le 21 mai qu’en commission des lois la semaine dernière, un texte ayant pour conséquence de supprimer la mention du motif professionnel du changement de résidence et de permettre, par extension, l’inscription de toute personne et des membres de sa famille partageant son domicile dès lors qu’ils ont déménagé durant l’année au cours de laquelle est organisée l’élection.

Chacun semblant camper sur ses positions, on ne saurait s’étonner de l’échec de la commission mixte paritaire…

Quant au groupe écologiste, il n’a pas non plus changé d’opinion ! Comme je l’ai dit lors de l’examen en première lecture, nous aurions souhaité pouvoir débattre de l’ensemble des propositions du rapport d’information sur les modalités d’inscription sur les listes électorales de nos collègues députés Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann, notamment celles qui concernent l’accompagnement des démarches d’inscription, celles qui tendent à garantir une mise à jour optimale des listes électorales, ainsi que celles qui prévoient de rénover les conditions d’attache avec la commune d’inscription.

Il nous semble aujourd'hui, comme en mai dernier, que le dispositif envisagé par certains de nos collègues sénateurs est tout à fait digne d’intérêt et devra être inclus lorsque viendra la réforme ambitieuse que nous appelons de nos vœux. Toutefois, nous considérons toujours qu’il est préférable de revenir à l’esprit initial de la proposition de loi et d’accorder un délai supplémentaire pour s’inscrire sur les listes électorales en 2015 à l’ensemble des citoyens français en âge de voter.

C’est donc sans surprise, mes chers collègues, que le vote du groupe écologiste sera, aujourd’hui encore, déterminé par l’issue des débats qui suivront.

Permettez-moi toutefois de vous faire part d’un dernier regret. Si chacun des groupes a, ici et à l’Assemblée nationale, campé sur ses positions avec une grande constance, l’absence totale de questionnement sur les raisons profondes de l’abstention dans notre pays a, elle aussi, été constante.

La crise démocratique s’accentue chaque jour un peu plus et nous devons nous interroger sur ses causes. L’adoption de cette proposition de loi permettra peut-être à quelques-uns de nos concitoyens d’exercer leur droit de vote, mais c’est à tous ceux qui choisissent de ne pas s’inscrire sur les listes électorales, qui ne vont pas ou ne vont plus voter, qu’il faut s’adresser. Il est urgent de nous remettre en question, ainsi que notre manière de faire la politique, et ce quelle que soit notre sensibilité politique. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UDI-UC, ainsi que sur quelques travées du groupe Les Républicains. – M. Bernard Lalande applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Abate.

M. Patrick Abate. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, il est toujours un peu ennuyeux de travailler ainsi dans l’urgence, mais, à situation exceptionnelle, solution exceptionnelle. Or il est assez exceptionnel de modifier les dates d’élections et, en France, de voter au mois de décembre. Dans ce contexte, il serait tout de même dommageable de ne pas favoriser au maximum les inscriptions sur les listes électorales.

Le rapport d’information des députés Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann est d’un grand intérêt. Même si nous ne souscrivons pas forcément aux vingt-trois propositions qu’il contient, celles-ci constituent une base de réflexion tout à fait utile.

Il est important que nous ne nous éloignions pas de l’objectif qui a été solennellement rappelé, y compris très clairement par le Gouvernement en première lecture, à savoir que l’année 2016, exempte d’élections, doit être l’occasion d’un débat de fond permettant d’améliorer le système de gestion des listes électorales, mais aussi, tout simplement, parce que c’est un sujet central, de nos pratiques en matière démocratique.

Comment pouvons-nous tolérer que, de manière délibérée ou du fait de certaines rigidités administratives, mais aussi d’une mauvaise appréhension du problème, 3 millions de nos concitoyens ne soient pas inscrits sur les listes électorales et que 6,5 millions d’entre eux soient « mal inscrits » ? Or qui dit « mal inscrit » dit « difficilement votant »…

Certes, l’ouverture permanente de l’inscription sur les listes électorales ne permettra pas de créer un raz-de-marée de participation au scrutin, mais elle offrira au moins de nouvelles conditions d’accès au vote. De fait, le système de révision annuelle des listes électorales empêche de nombreux citoyens de voter, même si le peu d’intérêt pour notre fonctionnement démocratique dépasse largement la problématique de l’inscription sur les listes électorales, y compris, cher collègue Détraigne, celle du millefeuille administratif ou autre aspect institutionnel.

Le phénomène est particulièrement marquant chez les moins de trente-cinq ans. Si l’on met à part les élections présidentielles, les étudiants, en particulier, peut-être à cause de leur mobilité, sont près de 65 % à s’abstenir. Il y a tout de même là de quoi s’inquiéter !

Vous l’aurez compris, la situation actuelle ne peut pas nous satisfaire. Nous partageons la volonté de mener une réforme profonde de nos listes électorales pour redynamiser la participation. Nous sommes cependant pressés par le calendrier ; une mesure doit donc être prise immédiatement pour que les listes électorales soient correctement actualisées. À cet égard, nous souscrivons aux arguments de notre collègue Kaltenbach, qui met en avant la nécessaire simplicité d’une mesure permettant de résoudre le problème d’ici aux élections régionales de décembre prochain : cela peut malgré tout justifier le « minimum », c’est-à-dire la réouverture des délais d’inscription jusqu’au 30 septembre et la mise en place rapide des modalités pratiques, y compris par voie réglementaire.

Nous restons néanmoins persuadés qu’une réforme en profondeur de l’exercice démocratique doit être réalisée. Il serait utile que l’engagement du Gouvernement soit mis en œuvre rapidement et de manière ambitieuse, non seulement en termes de simplification et d’élargissement des modalités d’inscription, mais aussi en termes d’accès à l’inscription.

Nous sommes là, à plusieurs égards, au cœur de la citoyenneté. La montée des extrémismes, la perte de confiance dans notre système politique, l’éloignement d’avec le politique sont aujourd’hui des préoccupations incontournables, ouvrant de sombres perspectives, étouffantes pour la démocratie ; ce problème dépasse d'ailleurs largement nos frontières, même si la bouffée d’oxygène qui nous vient aujourd’hui de la Grèce apporte quelque espoir.

Nous travaillerons sans relâche - avec certains d’entre vous, j’en suis sûr -, par exemple, à la reconnaissance entière du vote blanc. L’étude de sociologie électorale de Cécile Braconnier et Jean-Yves Dormagen rappelle que l’abstention peut être vécue comme une expression politique. La reconnaissance du vote blanc doit entrer dans cette dynamique.

Enfin, la question de la définition de la citoyenneté est centrale. L’histoire de notre pays a été marquée par l’élargissement du corps électoral, de l’établissement du suffrage universel, en 1848, à l’abaissement de la majorité électorale à dix-huit ans, en 1974, en passant par l’institution du droit de vote des femmes, en 1944. Ainsi, comment pouvons-nous continuer à justifier que des résidents étrangers participant depuis de nombreuses années à la vie de leur collectivité par leur travail, leurs impôts et leur engagement associatif ne puissent pas prendre position sur les décisions qui les concernent au niveau communal ? À ce sujet, les articles XIV et XV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, inscrite dans le préambule de notre Constitution, rappellent certes la nécessité de la contribution publique, mais surtout le lien entre celle-ci et la qualité de citoyen. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur quelques travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, après l’échec de la commission mixte paritaire, nous sommes à nouveau appelés à nous prononcer sur cette proposition de loi visant à revenir de façon exceptionnelle sur le principe de révision annuelle des listes électorales. Comme cela a été rappelé, il s’agit de permettre la réouverture des délais d’inscription sur les listes pour les élections de décembre 2015.

Bien sûr, nous partageons l’objectif des auteurs de la proposition de loi, qui est de lutter contre l’absentéisme électoral en adaptant notre procédure d’inscription au report des élections régionales.

Près de 3 millions de Français ne sont pas inscrits sur les listes électorales, auxquels il faut ajouter 6,5 millions de « mal inscrits ». Parmi les Français qui ont déménagé en 2014, seul un électeur sur cinq s’est réinscrit dans sa nouvelle commune, contre un sur deux en 2013.

Pour autant, ce ne sera pas la première fois que nos concitoyens seront appelés à se déplacer dans les bureaux de vote en fin d’année : cela s’est déjà produit pour les élections cantonales de 1967, de 1973 et de 1988. Je n’ai pas le souvenir que nous ayons adopté de mesure exceptionnelle à l’époque !

Si nous souscrivons à l’objectif de la proposition de loi, nous n’approuvons pas la position de l’Assemblée nationale qui consiste à prévoir une réouverture exceptionnelle des délais d’inscription. Comme l’avait parfaitement expliqué notre excellent rapporteur, mon ami Pierre-Yves Collombat, on ne peut « en permanence faire des lois pour régler les dégâts collatéraux des lois antérieures ».

C’est pourquoi, en première lecture, le Sénat a fait le choix de suivre la commission des lois, en assouplissant les conditions d’inscription « hors période », pour permettre à toutes les personnes qui déménagent, pour quelque motif que ce soit, de s’inscrire sur les listes électorales et donc de voter aux prochaines élections régionales.

Ce dispositif nous semble bien plus pertinent, car il prévoit une solution pérenne et beaucoup plus simple. Il témoigne d’ailleurs de la volonté du Président de la République d’autoriser l’inscription sur les listes électorales jusqu’à un mois avant un scrutin pour qu’« aucun Français ne soit privé de son droit de vote à cause de la rigidité des règles ».

Aussi, nous regrettons que l’Assemblée nationale soit revenue au dispositif initial. Le texte que nous avions adopté en première lecture ne permettrait pas « à ceux qui auraient oublié de s’inscrire avant le 31 décembre 2014 de participer aux élections régionales de décembre prochain ». Tel est l’argument avancé par la rapporteur de l’Assemblée nationale lors des débats du 29 juin dernier et repris par le groupe socialiste dans l’objet de l’amendement n° 1.

Pensez-vous vraiment, mes chers collègues, que nos concitoyens qui s’intéressent à la vie de la cité aient pu oublier de s’inscrire, alors que des élections départementales avaient lieu en mars dernier ? Et je n’évoque même pas les nombreuses campagnes d’incitation menées avant la date fatidique du 31 décembre par les différents médias ! Je crois sincèrement que ceux qui n’ont pas fait la démarche en décembre dernier ne la feront pas davantage avant le 30 septembre prochain.

Par ailleurs, vous estimez que le dispositif adopté par la Haute Assemblée est insatisfaisant parce qu’il soulèverait de nombreuses difficultés opérationnelles liées aux modalités actuelles de révision des listes électorales.

Comme M. le rapporteur, je ne crois malheureusement ni à un afflux d’inscriptions ni au fait que ces électeurs nouvellement inscrits iront voter deux fois. Je salue toutefois l’initiative de notre rapporteur, qui a souhaité, dans un souci de conciliation, sécuriser le dispositif. Ainsi, le délai dont disposerait l’électeur pour déposer sa demande serait porté de dix à vingt jours avant le scrutin, et le délai laissé à la commission électorale pour statuer serait porté de cinq à dix jours.

Pierre-Yves Collombat l’a dit, c’est une solution de bon sens à laquelle l’Assemblée nationale pourrait tout à fait souscrire. Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE apportera de nouveau son soutien au texte de la commission des lois.

Mes chers collègues, permettez-moi de dire en conclusion que les scrutins n’attirent les électeurs que lorsque ces derniers ont le sentiment que leur vote est utile. À l’inverse, s’ils pensent que les jeux sont faits et que l’intérêt de la consultation est limité, ils sont peu tentés d’aller voter. Ainsi, lors des dernières élections départementales, on a constaté, dans les cantons disputés, un afflux relativement massif des électeurs, qui se sont précipités aux urnes. Dans d’autres endroits, malheureusement, vous ne pourrez pas forcer les gens à aller voter, et ce quelles que soient les règles qui seront adoptées !

Mes chers collègues, je vous incite donc à faire un travail pugnace de pédagogie pour convaincre nos concitoyens d’aller voter. Ce sera bien plus pertinent que tous les textes que nous pourrons adopter, même si nous devons le faire. (Applaudissements sur les travées du RDSE et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. Mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur les raisons de fond qui motivent notre proposition, car je sais que vous êtes déjà convaincus. Toutefois, j’ai tout de même entendu des choses quelque peu étonnantes.

Ainsi, pour ne pas adhérer à notre proposition, certains ont dit que le texte n’était pas assez ambitieux. Mais ce n’est pas de ma faute ! Je me suis contenté de prendre acte de ce qui nous était proposé et de voir ce que nous pouvions en faire, c'est tout.

Ce qui doit s’imposer en premier, j’en suis tout à fait d’accord, c’est une réflexion de fond sur les raisons et la signification de l’abstention électorale et du vote blanc. Personne ne peut le nier. Toutefois, encore une fois, tel n’est pas l’objet de ce texte « exceptionnel ».

Par ailleurs, notre collègue Philippe Kaltenbach estime que personne ne connaît l’article L. 30 du code électoral. C'est peut-être le cas dans sa commune, mais je peux vous dire que le dispositif fonctionne bien. Je ne sais pas si l’on peut considérer qu’une procédure exceptionnelle est plus courante qu’une procédure qui fonctionne à chaque élection... Si le Gouvernement veut communiquer sur la possibilité pour les électeurs de s’inscrire sur les listes électorales – ce serait une bonne chose ! –, il peut aussi bien le faire sur un texte que sur un autre.

Ensuite, si j’examine le texte du point de vue des objectifs énoncés, je note que notre proposition permet une ouverture des inscriptions qui dure entre un mois et un mois et demi de plus que dans la proposition du Gouvernement, qui arrêtait toute possibilité au 30 septembre. Avec notre système, les inscriptions seront possibles au moins jusqu’à la fin du mois d’octobre et peut-être, selon la date à laquelle seront fixées les élections, jusqu’au début du mois de novembre, voire jusqu’à la mi-novembre. Si l’objectif est de permettre l’inscription sur les listes électorales, il faut laisser le plus de temps possible.

Franchement, la solution que nous proposons est la mieux adaptée à la situation dans laquelle le Gouvernement nous a placés avec la loi de janvier 2015.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie les orateurs ayant participé à la discussion générale. Je tiens simplement à apporter quelques éléments factuels pour compléter l’information de la Haute Assemblée à ce stade des débats.

Le nombre de personnes s’inscrivant sur les listes électorales au mois de décembre, selon la procédure actuelle, peut être extrêmement significatif. Ainsi, nous avons relevé quelque 200 000 inscriptions en décembre 2014, dans la perspective des élections départementales de 2015.

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. Sur 36 000 communes, cela fait peu !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Pour toute l’année 2011, par conséquent avant une élection présidentielle, qui suscite une mobilisation importante, quelque 5,4 millions de personnes se sont inscrites, dont une part significative au mois de décembre.

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi tendant à faciliter l’inscription sur les listes électorales

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d'inscription sur les listes électorales
Article 2 (supprimé)

Article 1er

La section 3 du chapitre II du titre Ier du livre Ier du code électoral est ainsi modifiée :

1° Au 2° bis de l’article L. 30, les mots : « pour un motif professionnel autre que ceux visés aux 1° et 2° » sont supprimés ;

(nouveau) À l’article L. 31, le mot : « dixième » est remplacé par le mot : « vingtième » ;

(nouveau) À l’article L. 32 et au second alinéa de l’article L. 33, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « dix ».

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, sur l'article.

M. Jean-Pierre Grand. Ce texte modifiant les règles juridiques applicables à quelques mois du scrutin régional, après de multiples modifications du calendrier électoral, me choque profondément. Si la lutte contre l’abstention doit nous mobiliser, elle doit aussi nous conduire à nous interroger. Je ne crois pas que les 50 % d’abstentionnistes aient tous changé de domicile ! Si l’abstention est aussi forte en France, c'est parce que nombre de nos concitoyens refusent l’offre politique qui leur est proposée.

C'est la raison pour laquelle dans la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, avec le maire de Montpellier, nous allons proposer autre chose. Aujourd’hui, il faut offrir une autre politique, de nouveaux visages, des façons différentes de s’exprimer, de nouvelles perspectives, un véritable programme qui ne soit pas simplement électoraliste, une ambition, une vision. C'est ce que nous allons faire, et vous verrez que ce sera infiniment mieux qu’une loi d’exception !

M. Jean-Claude Luche. Vous êtes en campagne ?

M. Jean-Pierre Grand. Cher collègue, le Sénat est un lieu d’expression, et les élections régionales concernent tout le monde, y compris les sénateurs !

Les abstentionnistes ne vont pas voter, car ils souhaitent exprimer quelque chose qui soit comptabilisé : ils veulent que leur refus de participer au scrutin soit politiquement évalué. À mes yeux, il n’y a qu’une voie pour cela : la prise en compte du vote blanc, mais pas comme l’a prévu la loi du 21 février 2014. Le vote blanc doit être comptabilisé comme un suffrage exprimé. Ainsi, ce suffrage de mécontentement sera pris en compte et apparaîtra au grand jour, ce qui permettra d’éviter que ces électeurs ne votent pour les extrêmes.

En attendant, pour les élections régionales, nous leur conseillerons de voter pour nous ! (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Kaltenbach et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Par dérogation au deuxième alinéa de l’article L. 16 du code électoral, les listes électorales font l’objet d’une procédure de révision exceptionnelle en 2015. Les demandes d’inscription sont recevables jusqu’au 30 septembre 2015.

Pour la mise en œuvre du présent article, les articles L. 11 à L. 40 du même code sont applicables.

La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Cet amendement est très simple : il vise à revenir au dispositif tel qu’il a été voulu par l’Assemblée nationale, donc à la rédaction issue des travaux de nos collègues députés.

L’objectif est de prévoir un système de révision exceptionnelle en 2015, avec une ouverture des listes électorales jusqu’au 30 septembre : cela permettrait de mettre à jour les listes électorales durant les mois d’octobre et de novembre, pour pouvoir disposer à la fin du mois de novembre ou au début du mois de décembre de listes complètement fiables. Il s’agit là de garantir la sécurité juridique de l’établissement des listes électorales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. L’avis est évidemment défavorable, d’autant que, par rapport à la première mouture du texte, nous avons fait un effort pour répondre à l’objection de l’insécurité juridique, à laquelle personnellement je ne croyais pas. Le dispositif comprend maintenant un élément de sécurité supplémentaire.

Je ne puis donc que réitérer la position de la commission, qui a été en première lecture celle du Sénat, et émettre un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. À la suite de mon intervention lors de la discussion générale, vous ne serez pas surpris, mesdames, messieurs les sénateurs, que j’émette un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.

M. Patrick Abate. Vous l’aurez compris après mon intervention en discussion générale, mes chers collègues, le groupe CRC votera cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Luche, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Luche. Je ne me lancerai pas dans la campagne électorale, car c'est prématuré, mais je relève que les dernières échéances électorales nous prouvent qu’il est toujours difficile de mobiliser notre électorat.

Chaque fois que nous pouvons améliorer la participation de nos concitoyens aux élections, quels que soient le mode de scrutin et le type d’élections, faisons-le ! Nous devons sans cesse chercher à améliorer l’image des politiques, y compris au sein de cette assemblée. Si nous montrons que nous restons à la disposition de notre électorat, cela peut nous aider, demain, à améliorer cette image.

Je suis donc tout à fait favorable à la disposition qui nous est proposée. Ne faisons pas de chicayas pour une ou deux semaines ! Mettons tout en œuvre pour que le maximum de Français puisse s’exprimer librement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d'inscription sur les listes électorales
Intitulé de la proposition de loi (début)

Article 2

(Supprimé)

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Kaltenbach et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Un décret en Conseil d’État détermine les règles et les formes de l’opération prévue à l’article 1er.

La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Il s’agissait d’un amendement de coordination avec l’amendement précédent. Toutefois, comme celui-ci n’a pas été adopté, il devient sans objet.

Par conséquent, je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 2 est retiré.

En conséquence, l’article 2 demeure supprimé.

Article 2 (supprimé)
Dossier législatif : proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d'inscription sur les listes électorales
Intitulé de la proposition de loi (fin)

Intitulé de la proposition de loi

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Kaltenbach et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet intitulé :

Proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d’inscription sur les listes électorales

La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Il s’agissait, là encore, d’un amendement de coordination avec l’amendement n° 1. Toutefois, celui-ci n’ayant pas été adopté, le présent amendement devient, lui aussi, sans objet ; par conséquent, je le retire également, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 3 est retiré.

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'ensemble de la proposition de loi tendant à faciliter l’inscription sur les listes électorales.

(La proposition de loi est adoptée.)

Intitulé de la proposition de loi (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à la réouverture exceptionnelle des délais d'inscription sur les listes électorales
 

13

 
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Discussion générale (suite)

Réforme de l'asile

Discussion en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à la réforme du droit d’asile (projet n° 566, texte de la commission n° 571, rapport n° 570, avis n° 579).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification. Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à renouveler les excuses du ministre de l’intérieur, qui, de même que pour l’examen du texte précédent, ne peut être présent.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Toujours pas ? (Sourires.)

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Avant que nous n’examinions ce texte dans le cadre de la nouvelle lecture au Sénat, je veux vous rendre compte de l’action du Gouvernement face à la crise migratoire à laquelle l’Europe est confrontée.

Comme l’avait souligné le ministre de l’intérieur lors de l’examen du texte en première lecture, un afflux migratoire sans précédent a conduit déjà près de 150 000 personnes à entrer clandestinement dans l’espace Schengen depuis le début de l’année. Si ces migrants ne relèvent pas tous de l’asile, c’est à l’évidence le cas de plusieurs d’entre eux, tels de nombreux Syriens, des Érythréens et des Irakiens.

Face à ce défi, l’ensemble des États membres de l’Union européenne a un intérêt commun. La position de la France est sans ambiguïté : nous souhaitons mettre en place à nos frontières extérieures des dispositifs efficaces d’identification des migrants, de relocalisation de ceux qui ont manifestement besoin de protection et de retour de ceux qui relèvent, non de l’asile, mais de l’immigration irrégulière. Cette identification doit être faite dès le pays de première entrée dans l’espace Schengen, au sein de hotspots.

En contrepartie, une solidarité européenne renforcée est nécessaire, notamment grâce à une meilleure répartition des demandeurs d’asile en besoin manifeste de protection. En outre, pour agir sur les causes des mouvements migratoires et faire diminuer les flux irréguliers, il faut établir une coopération renforcée avec les pays d’origine et de transit des migrants.

Telle est la position, partagée avec notre partenaire allemand, que le ministre de l’intérieur a présentée devant le Parlement – au Sénat lors de la première lecture et à l’Assemblée nationale lors de la nouvelle lecture ; c’est aussi la position que la France a défendue à l’occasion du Conseil européen des 25 et 26 juin derniers.

Je le constate, si la situation n’est pas encore pleinement satisfaisante, certains États rechignant à l’effort de solidarité, ces principes ont été actés lors du dernier Conseil européen. Nous voulons que l’Europe apporte à la crise migratoire actuelle une réponse équilibrée, à la hauteur des enjeux, et nous y travaillons ; c’est une nécessité. Le ministre de l’intérieur participera ainsi au prochain Conseil européen informel Justice et affaires intérieures, qui se tiendra le 9 juillet à Luxembourg pour rechercher un accord approfondi sur ces sujets.

Néanmoins, il ne suffit pas de défendre des positions au niveau européen. Il faut aussi que la France dispose, pour être à la hauteur d’elle-même, de procédures d’asile qui soient efficaces, rationnelles, réactives et conformes aux standards européens. Tel est donc l’objet du projet de loi qui vous est soumis ; ce texte constitue ainsi l’une des réponses que nous devons apporter à la situation migratoire, dont l’actualité souligne la gravité.

Avant d’entrer dans le détail du texte, je veux rappeler l’esprit dans lequel celui-ci a été rédigé. Il est le fruit d’une large concertation et d’un diagnostic étayé. Si l’on veut traiter d’un droit aussi complexe et aussi fondamental que le droit d’asile, il faut en effet prendre le temps de l’écoute et de la concertation.

C’est ce que Manuel Valls a fait en veillant à associer à notre démarche des parlementaires tant de la majorité que de l’opposition, comme votre collègue Valérie Létard. La République, c’est aussi cela : prendre le temps de partager un diagnostic, en sortant des postures politiques, pour bâtir des réformes.

C’est sur ces fondements que les travaux du Parlement ont eu lieu. Si je regrette que la commission mixte paritaire n’ait pas abouti, je veux toutefois souligner les convergences très fortes existant entre députés et sénateurs, à la fois sur le constat et sur les objectifs de la réforme de l’asile.

Le constat, c’est l’embolie de notre système d’asile et l’existence de régions en tension accueillant la majorité des demandes d’asile.

Je développerai plus précisément les objectifs de la réforme.

Premier objectif, nous entendons réduire la durée totale de l’examen d’une demande d’asile à neuf mois en moyenne. À l’heure actuelle, celle-ci peut en effet facilement excéder deux ans, contre moins d’un an en moyenne chez nos voisins européens. Or des procédures trop longues non seulement freinent l’accès au statut de réfugié pour les demandeurs fondés à l’obtenir, mais encore rendent notre dispositif plus vulnérable aux tentatives de détournement à des fins d’immigration irrégulière. La priorité est donc de réduire les délais à toutes les étapes de la procédure !

Voilà pourquoi l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA, et la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA, juridiction spécialisée maintenue et même renforcée par ce texte, seront dotées en 2015 d’importants moyens humains supplémentaires : cinquante-cinq équivalents temps plein additionnels ont été octroyés à l’OFPRA et sont d’ores et déjà recrutés. C’est un effort exceptionnel qu’a consenti le Gouvernement et qui a été encore amplifié par le récent plan présenté par Bernard Cazeneuve et Sylvia Pinel, selon lequel de nouveaux recrutements auront lieu avant la fin de l’année 2015.

De tels renforts permettront à l’OFPRA d’accélérer dès 2016 ses procédures, pour limiter à trois mois la durée moyenne d’examen d’une demande d’asile. Quant à la CNDA, elle bénéficiera d’un renfort de magistrats et de rapporteurs, afin de pouvoir examiner en moins de cinq semaines les demandes en procédure accélérée et en moins de cinq mois les demandes en procédure normale.

Nous devons également simplifier nos procédures d’asile en amont. Les délais d’enregistrement des demandes par les préfectures sont beaucoup trop longs. Ils doivent être ramenés à trois jours grâce à la création de guichets uniques de l’accueil du demandeur d’asile, guichets qui regrouperont sur un même site les agents de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII, et des préfectures. Ces guichets s’ouvriront de manière progressive sur l’ensemble du territoire au cours de l’année 2015 et leur création s’accompagnera de la mise en place d’un nouveau système d’information unifié.

Enfin, nous devons savoir distinguer entre les demandes d’asile qui méritent un examen approfondi et celles pour lesquelles la réponse semble évidente et qui peuvent donc être traitées plus rapidement.

C’est aussi de cette façon que nous réduirons les délais de procédure, car l’OFPRA sait traiter rapidement des demandes qui sont manifestement fondées, telles que celles des Syriens ou des chrétiens d’Irak. À l’inverse, d’autres demandes ne nécessitent pas un examen approfondi, dans la mesure où elles ne reposent sur aucun motif sérieux.

Pour cette raison, le présent texte réforme les placements en procédure prioritaire, cette dernière devenant la procédure accélérée.

Sur ce point, ce projet de loi réalise deux avancées essentielles. Tout d’abord, il confie à l’OFPRA, qui seule a accès au contenu de la demande, le soin de décider en dernière instance si un dossier doit ou non faire l’objet d’une procédure accélérée. Ensuite, il garantit au demandeur d’asile en procédure accélérée les mêmes droits qu’à un demandeur en procédure normale ; sa demande est examinée plus vite, mais ses droits sont intégralement respectés.

Notre deuxième objectif consiste à améliorer l’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile. Actuellement, notre système est bien trop inégalitaire et n’honore pas la République. Certains demandeurs sont hébergés en Centre d’accueil pour demandeurs d’asile, ou CADA, et bénéficient donc d’un accompagnement administratif, social et juridique dont chacun loue la qualité ; ce n’est en revanche pas le cas des autres demandeurs – les deux tiers – qui soit sont pris en charge dans des structures d’hébergement d’urgence, soit sont tout simplement livrés à eux-mêmes et survivent tant bien que mal dans des campements de fortune. Cette différence de traitement n’est pas tolérable sur le territoire de la République.

D’ici à 2017, l’hébergement en CADA doit donc devenir la norme et l’hébergement d’urgence, l’exception. Pour ce faire, nous allons augmenter le nombre de places en CADA. Nous en avons déjà créé 4 000 de plus en deux ans et nous avons l’ambition d’en ouvrir encore 8 200 d’ici à l’année prochaine – 4 200 dans le cadre d’un appel à projets lancé par le ministère de l’intérieur il a un mois, auxquelles s’ajoutent 4 000 nouvelles places prévues par le plan, que je mentionnais précédemment, présenté par Bernard Cazeneuve et Sylvia Pinel.

L’effort de l’État n’a jamais été aussi fort pour garantir un accueil digne des demandeurs d’asile ; cela représente un accroissement du parc de 50 % par rapport à la situation qui prévalait en 2012 !

Nous devons ensuite en finir avec les allocations éclatées dont bénéficient les demandeurs d’asile. L’allocation temporaire d’attente et l’allocation mensuelle de subsistance seront fondues en une allocation unique, qui prendra en compte la situation familiale de chaque demandeur.

Enfin, nous allons mettre en place un véritable hébergement directif. Comme vous le savez, l’accueil des demandeurs d’asile dans nos territoires peut être difficile à administrer lorsqu’un trop grand nombre d’entre eux converge en même temps vers une même ville.

Aujourd’hui, deux territoires, la région parisienne et la région lyonnaise, chère au rapporteur François-Noël Buffet, concentrent plus de la moitié des demandes – sans parler des difficultés rencontrées dans d’autres régions, que je n’ignore pas. Or c’est la République qui offre l’asile à ceux qui en ont besoin, et non tel ou tel territoire.

Par conséquent, afin de mieux répartir l’effort, nous prévoyons de mettre en place une orientation directive des demandeurs. Concrètement, le versement d’une allocation dépendra de la sollicitation, puis de l’acceptation d’un hébergement. Si un demandeur ne souhaite pas bénéficier des conditions d’accueil prévues par la République, ou s’il ne souhaite pas aller là où une place est disponible pour le recevoir, il aura naturellement droit à un examen de sa demande d’asile. En revanche, il ne pourra bénéficier de l’hébergement ni des allocations prévues.

Enfin, le troisième objectif de cette réforme consiste à renforcer les droits des demandeurs d’asile, dans un souci d’égalité et de juste transposition des normes européennes.

Ainsi, le demandeur d’asile pourra bénéficier d’un conseil de son choix à l’OFPRA.

Les demandeurs d’asile en situation de vulnérabilité pourront également bénéficier d’un examen et d’une prise en charge adaptés à leur situation. Je fais bien sûr référence aux mineurs, mais aussi aux femmes victimes, en tant que femmes, des pires atrocités. Pensons notamment aux viols de guerre – aux viols comme arme de guerre –, qui, depuis le début de la guerre civile en Syrie, ont détruit la vie de nombreuses femmes, et ainsi brisé des communautés entières.

Enfin, la loi permettra à tous les demandeurs d’asile de bénéficier, pendant l’examen de leur demande, d’un droit au maintien sur le territoire leur garantissant l’accès à l’ensemble des droits qui, aujourd’hui, ne sont reconnus qu’aux demandeurs en procédure normale.

Je sais que ces objectifs sont très largement partagés sur les travées de cet hémicycle ; je crois pouvoir en effet affirmer qu’il y a eu entre les deux chambres un accord sur l’essentiel et des désaccords tactiques sur le reste, d’où l’échec de la commission mixte paritaire. Je sais donc que vous êtes, en grande majorité, attachés à cette réforme.

À cet égard, je veux rendre hommage à l’esprit tout à fait constructif qui a prévalu lors de ces débats ; je formule le vœu que celui d’aujourd’hui le soit aussi et témoigne de la même ambition pour notre pays.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’observe d’ailleurs que votre commission n’a pas rétabli l’ensemble du texte que vous aviez adopté en première lecture, même si elle a choisi de réintroduire les dispositions qui vous tiennent à cœur ; ainsi en va-t-il de la composition du conseil d’administration de l’OFPRA, qui, dans une version différente de celle de l’Assemblée nationale, répond aux préoccupations du Gouvernement.

Vous avez par ailleurs remis en cause l’amendement du Gouvernement, adopté par la commission des lois de l’Assemblée nationale, relatif aux délais de demande de l’aide juridictionnelle. Si j’en crois l’exposé de votre amendement, vous craigniez en effet que cela réduise l’accès à cette aide. Je veux vous rassurer sur ce point : cela n’est en aucun cas l’objet de cette mesure, l’accès à cette aide demeure de droit. Il s’agissait simplement d’une mesure technique permettant d’éviter les délais supplémentaires que pouvaient susciter des demandes tardives d’aide juridictionnelle.

En outre, vous avez rétabli la mention symbolique d’un délai de trois mois pour la décision de l’OFPRA. Vous connaissez l’avis du Gouvernement sur cette mesure, qui n’a pas réellement d’effet juridique, mais qui semble souligner que tous les dossiers, toutes les demandes se valent.

Or telle n’est pas la vérité. En procédure normale, certains dossiers nécessitent une analyse approfondie, parce qu’ils sont complexes, voire très complexes. Laisser symboliquement à l’OFPRA la possibilité de prolonger au-delà de trois mois ses délais d’instruction, c’est tout simplement reconnaître qu’accorder ou refuser le droit d’asile est une question sérieuse, qui peut nécessiter un examen approfondi et du temps. Le Gouvernement préfère, pour sa part, en rester à la notion de « délai moyen de trois mois ».

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement vous présentera trois amendements, dont je souhaite vous indiquer succinctement le contenu.

Deux d’entre eux sont des amendements de précision. L’un vise la date d’entrée en vigueur des différentes mesures que contient le projet de loi. Comme vous le savez, certaines de ces mesures transposent une directive qui sera d’effet direct dans les jours qui viennent, tandis que d’autres nécessitent un délai technique pour permettre leur mise en œuvre pleine et entière et l’adoption des dispositions réglementaires indispensables. Notre objectif, c’est d’aller aussi vite que possible, c’est-à-dire faire en sorte que l’ensemble de la réforme soit effectif avant la fin de l’année, intégrer nos exigences européennes et avoir un système efficace.

Le troisième amendement vise l’affectation de magistrats administratifs professionnels à la CNDA. Le Gouvernement, après échange avec le Conseil d’État, a estimé que la modernisation de l’action de la CNDA, que le texte conforte dans ses compétences, supposait de permettre aux magistrats administratifs d’occuper les fonctions de président de section et de président de chambre, sans que cette affectation soit limitée à une durée de six ans, afin d’avoir des juges plus forts, une cour plus forte et un système d’asile plus fiable encore.

Tel est l’objet de l’amendement du Gouvernement. Si celui-ci n'était pas adopté, les onze juges professionnels actuellement affectés à la CNDA devraient être remplacés au 31 décembre 2015, ce qui rendrait plus difficile le travail de la Cour pour intégrer la réforme.

J’espère que ces amendements seront votés par le Sénat, de manière à figurer dans le texte qui fera l’objet de la lecture définitive à l’Assemblée nationale.

Mesdames, messieurs les sénateurs, alors que le Sénat entame l’examen de ce texte en nouvelle lecture, je veux souligner les contributions qui nous viennent de l’ensemble des groupes.

Je pense notamment au travail qu’ont effectué le rapporteur, M. François-Noël Buffet, sous l’autorité du président de la commission des lois, M. Philippe Bas, le rapporteur pour avis, M. Roger Karoutchi, ainsi que les sénateurs Jean-Yves Leconte, Jean-Pierre Sueur et Catherine Tasca, pour le groupe socialiste. Je pense également à la précision et à l’expertise de Mmes Valérie Létard, Éliane Assassi, présidente du groupe communiste républicain et citoyen, et Esther Benbassa.

Vous avez tous un regard acéré sur la question de l’asile et je ne doute pas que nos préoccupations se rejoignent à l’occasion de cette nouvelle lecture. Je vous remercie de tout le travail que vous avez réalisé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, notre assemblée est de nouveau amenée à examiner le projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile, cette fois en nouvelle lecture, après que la commission mixte paritaire, qui s’est réunie le 10 juin 2015, a constaté qu’elle ne pouvait élaborer un texte commun, en raison de plusieurs désaccords sur les moyens à mettre en œuvre pour préserver le droit d’asile de tout dévoiement et pour assurer l’éloignement des personnes déboutées de leur demande d’asile.

Permettez-moi, à cette occasion, de formuler quelques observations.

Je tiens tout d'abord à signaler que les rapporteurs de chacune des deux chambres, Mme Sandrine Mazetier, pour la commission des lois de l’Assemblée nationale, et moi-même, pour celle du Sénat, ont essayé de rapprocher leurs points de vue. D’ailleurs, Mme Mazetier s’est souvent inspirée de certaines propositions que nous avions émises lors des discussions préalables à la réunion de la commission mixte paritaire ; à de nombreux moments de l’examen du texte en nouvelle lecture, elle a appelé ses collègues députés à adopter, parfois de manière conforme, des dispositions introduites ou modifiées par le Sénat en première lecture.

Souhaitant poursuivre cette démarche, que nous voulions constructive, notre commission des lois a pris acte, lors de l’établissement de son texte, des points d’accord sur lesquels les deux rapporteurs avaient pu s’entendre. Elle a, par ailleurs, adopté des amendements susceptibles d’être repris par l’Assemblée nationale lors de sa lecture définitive, afin d’améliorer encore certains dispositifs.

Cependant, nous n’avons pas renoncé à certaines dispositions qui nous paraissent indispensables à la réussite de la réforme du droit d’asile : en effet, pour atteindre l’objectif d’un traitement plus rapide des demandes, le législateur ne peut faire l’économie de mesures à même de décourager les tentatives de détournement de la procédure d’asile à d’autres fins.

Je veux tout d'abord rappeler que des efforts conjugués ont permis des avancées.

Ainsi, cinq articles ont été adoptés de manière conforme avant la réunion de la commission mixte paritaire et six après celle-ci – il s’agit des articles 1er bis, 6 bis, 9 B, 14 ter – il est important –, 16 ter et 19 bis.

J’insiste sur l’article 14 ter, qui concerne l’obligation de quitter le territoire national. Je rappelle que le Sénat, en première lecture, avait souhaité que, lorsqu’une décision négative définitive de l’OFPRA ou de la CNDA était rendue, celle-ci valût obligation de quitter le territoire national. L’Assemblée nationale ne nous a pas suivis sur ce point.

Toutefois, au Sénat, le Gouvernement, en première lecture, a déposé un amendement, qui tend à inscrire dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA, la faculté de prononcer une obligation de quitter le territoire français à l’encontre d’une personne déboutée d’une demande ou ne bénéficiant pas du droit de se maintenir sur le territoire durant l’examen de son recours devant la CNDA.

Cet amendement a été voté par le Sénat et il a également été adopté conforme par l’Assemblée nationale à l’occasion de la nouvelle lecture. Il convient de le noter, car c’est à la faveur des débats que nous avons menés ici sur l’obligation de quitter le territoire national que le Gouvernement s’est finalement rapproché de la position de la majorité sénatoriale, permettant une avancée qui ne figurait pas dans le texte initial.

Cette avancée n’est sans doute pas suffisante : nous aurions aimé aller plus loin, notamment sur les délais dans lesquels cette décision peut être prise. À cet égard, il me semble que nous devrons saisir l’occasion du texte relatif au droit des étrangers en France, qui sera examiné par notre assemblée au mois de septembre prochain, pour compléter ce dispositif.

En tout état de cause, je veux insister sur le rôle incontestable qu’a joué la majorité sénatoriale dans cette avancée, conjointement avec le Gouvernement – je le dis bien volontiers.

En nouvelle lecture, d’autres parties du texte ont été adoptées par notre commission, dans leur rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale. Il s’agit des articles 4, 4 bis, 5, 7 bis, 18 et 19 ter, ainsi que des articles 12, 16, 19, 20 et 21, ces derniers comportant des modifications qui nous paraissaient intéressantes et méritant d’être conservées.

Restent et persistent des points de désaccord. Sur quatorze articles votés par le Sénat en première lecture, il n'est pas apparu possible de faire converger les points de vue avec nos collègues de l’Assemblée nationale. Je pense, en particulier, à la nature de la compétence de l’OFII et de l’OFPRA. Sans entrer dans le détail, je rappelle que nous avons débattu très longuement de ce sujet, notamment de la conséquence juridique des qualifications données aux faits par ces organismes, notamment par l’OFPRA. Ce sujet nous paraît extrêmement important.

En clair, si l’OFPRA a toute latitude pour apprécier la vérité des faits dans l’instruction des demandes d’asile, ce qui implique une appréciation de caractère subjectif, le Sénat estime qu’il doit avoir compétence liée dans les décisions qui tirent les conséquences des constats qu’il établit. Or le texte prévoit que l’OFPRA peut décider d’accorder ou de rejeter les demandes d’asile, quand nous estimons qu’il ne doit pouvoir que rejeter la demande si les conditions pour bénéficier de la protection ne sont pas remplies.

La participation de parlementaires à des organismes extérieurs au Parlement pose également problème. Le Gouvernement souhaite que davantage de parlementaires siègent dans ces organismes, donc à l’OFPRA ou à la CNDA. Contrairement au Gouvernement, nous considérons que les parlementaires sont d'ores et déjà très occupés et qu’il ne serait pas satisfaisant de les nommer dans des organismes où ils pourraient ne pas siéger effectivement.

Enfin, nous sommes en désaccord sur l’encadrement des procédures, en particulier sur l’inscription dans la loi du délai de trois mois imparti à l’OFPRA pour statuer sur une demande d’asile en procédure normale et sur la faculté, pour celui-ci, de clôturer l’examen d’une demande d’asile en cas d’abandon de son hébergement par un demandeur d’asile.

En outre, nous regrettons de n’avoir pas été suivis, en première lecture, sur la création de centres de retour, introduite dans le texte de la commission sur l’initiative de notre collègue Valérie Létard. La commission des lois a décidé de proposer à nouveau la création de ce dispositif à l’article 14 bis.

Un autre désaccord porte sur l’article 19 quater, qui retranscrit dans les textes la jurisprudence du Conseil d’État en matière d’inconditionnalité de l’hébergement d’urgence pour les déboutés du droit d’asile.

Voilà dans quelles circonstances la Haute Assemblée est amenée à examiner de nouveau ce texte en nouvelle lecture.

Nous aurons à examiner trente-deux amendements. Une partie d’entre eux sont des amendements rédactionnels ou de coordination – il en va ainsi notamment des amendements du Gouvernement. D’autres visent à rétablir ce que le Sénat avait voté avant la réunion de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Roger Karoutchi, rapporteur pour avis de la commission des finances. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je ne vous le cache pas : je trouve que le texte que nous avons à examiner en nouvelle lecture est meilleur que celui qui nous avait été soumis en première lecture. Il est vrai que – contre toute attente, si je puis dire – l’Assemblée nationale n’a finalement pas remis en cause un certain nombre d’améliorations que la Haute Assemblée avait apportées au texte.

En ma qualité de rapporteur pour avis de la commission des finances, je pense notamment à un certain nombre de mesures financières, en particulier à la possibilité de solliciter une participation financière des demandeurs d’asile dans les lieux d’hébergement, à l’ajout d’un délai précis à partir de l’entrée sur le territoire français pour que le dépôt d’une demande d’asile ouvre droit à l’allocation, à la possibilité de suspendre l’allocation et l’hébergement en cas de comportement violent, à la création d’un véritable statut des centres provisoires d’hébergement, les CPH.

Il y a encore un peu de chemin à parcourir, madame la secrétaire d'État, sur la distinction entre les demandeurs et les déboutés du droit d’asile, ainsi que sur le maintien des seconds en centres d’accueil pour demandeurs d’asile, ou CADA. Il n'y a pas de raison que les déboutés puissent bloquer des places dans ces centres, quand il n’y en a pas suffisamment – c’est le moins que l’on puisse dire – pour les demandeurs d’asile dont la situation est en cours de traitement !

Par ailleurs – je le dis pour faire plaisir à M. le rapporteur –, j’aurai l’occasion de représenter tout à l'heure un amendement de la commission des finances sur l’entrée sur le marché du travail.

Toutefois, madame la secrétaire d'État, si le texte est meilleur, il n’est, globalement, toujours pas satisfaisant.

Certes, comme j’ai déjà eu l’occasion de le lui dire, je ne doute pas de la volonté du ministre de l’intérieur de faire en sorte que les choses se passent mieux, de manière plus régulière ou encore que les délais d’instruction des dossiers et, par conséquent, de versement de l’allocation soient plus courts.

Ainsi, depuis deux ou trois ans, le Gouvernement a augmenté les effectifs de l’OFPRA et, dans une moindre mesure, ceux de la CNDA. C’est un effort que je reconnais bien volontiers ! Sauf que, en réalité, la hausse du nombre d’agents de l’OFPRA et de la CNDA amenés à traiter les dossiers a été infiniment plus faible que celle du nombre de demandeurs d’asile, lequel a augmenté de 30 %, voire de 40 % en cinq ans ! Dans ces conditions, chaque agent a, par définition, plus de dossiers à traiter.

Par conséquent, prévoir qu’il devra être statué sur la demande d’asile dans un délai de neuf mois à compter de l’introduction de celle-ci est un vœu pieux, d'autant que cette obligation n’est pas assortie de sanction. Que vaut, en droit français, une mesure dont le non-respect n’entraîne pas de conséquences ?

Par conséquent, je crains que nous ne raccourcissions pas les délais, et cela d’autant plus, madame la secrétaire d’État, que la pression exercée par les événements en Méditerranée est forte. Bien que rien ne soit définitivement conclu, la France est entrée dans un système qui, elle en convient elle-même, n’est pas anormal, la Commission européenne lui demandant d’accepter des quotas supplémentaires. On parle de 7 000 à 10 000 demandeurs d’asile supplémentaires qui seraient pris en charge par la France dans les deux années qui viennent.

Cela signifie autant de demandeurs d’asile supplémentaires – en plus de ceux qui ont été traités cette année –, ainsi que, évidemment, des délais d’instruction encore plus longs. Or, quel que soit l’effort pour en construire de nouvelles, le nombre de places en CADA restera de 24 000 ou 25 000 pour 65 000 ou 70 000 demandeurs d’asile.

On est dans un système fou ! On crée des postes, mais, par définition, ils ne sont pas assez nombreux pour permettre une accélération des délais. On verse des allocations, mais on ne sait pas à quel niveau s’arrêter, faute de connaître le nombre de demandeurs d’asile qu’on aura à traiter.

Je comprends le ministre de l’intérieur, qui dit que les critères de la demande d’asile sont objectifs et qui, à partir de là, demande ce que l’on peut faire. Effectivement, c’est une bonne question ! Est-ce qu’on se laisse aller jusqu’à la situation allemande ? Dans ce pays, il y a 300 000 ou 400 000 demandes d’asile et il a fallu réquisitionner des casernes, des écoles… Allons-nous choisir de nous mettre dans cette situation ? Ou allons-nous, pour trouver des solutions, utiliser la liste des pays d’origine ou réfléchir sur les critères fixés ?

Il a été proposé – je comprends que cela fasse débat – de faire en sorte que les centres à partir desquels sont étudiées les demandes d’asile soient situés dans les pays de départ plutôt que sur le territoire du pays d’arrivée.

On le sait, madame la secrétaire d’État, l’élément essentiel, c’est que l’on va avoir, globalement, 15 000 acceptations. On le sait aussi, sur les quelque 50 000 déboutés du droit d’asile, on va, au mieux – les meilleures années ! – en raccompagner entre 5 000 et 10 000 aux frontières. On sait donc que nous fabriquons nous-mêmes systématiquement, tous les ans, quelque 40 000 sans-papiers.

Comment les traiter ? Comment faire ? Comment travailler sur le sujet ? La réalité, tous les Français en sont conscients, c’est qu’il y a aujourd’hui une rupture dans la société. Le problème n’est pas que celle-ci s’inquiète au-delà de la mesure – encore que –, c’est qu’elle ne dispose pas d’éléments concrets, cadrés, à partir desquels elle pourrait avoir des certitudes.

Ce qui manque à la société française en ce qui concerne les mouvements migratoires comme le droit d’asile, c’est une définition de ce qui est sûr. Elle a besoin de connaître les règles applicables et les conditions de traitement des dossiers.

Ce n’est pas en annonçant que vous allez évacuer un ou deux camps ici ou là, alors qu’il n’existe pas de structure supplémentaire et que l’on apprend, en parallèle, que l’Europe va accepter 9 000 à 10 000 demandeurs d’asile supplémentaires, que vous allez rassurer les Français !

Je le dis sincèrement, le ministre de l’intérieur a une bonne perception des choses. Il a une vision, laquelle consiste à vouloir réduire le délai de l’instruction, ce qui est, en réalité, la seule solution. Sauf que nous sommes démunis par rapport à l’augmentation du nombre des dossiers. On joue sur les mots : certains pays ayant été radiés de la liste, le nombre de demandes a certes baissé sur un an, mais de façon tout à fait conjoncturelle. En réalité, le nombre de demandes reprend à la hausse. De ce fait, comme les effectifs affectés au traitement des dossiers n’augmentent pas, les délais d’instruction continueront d’être très longs, d’autant que le texte a ajouté un certain nombre de capacités de recours.

Madame la secrétaire d’État, c’est simple : les Français vous jugeront sur pièces. Allez-vous consacrer les moyens suffisants pour permettre le raccompagnement des personnes aux frontières ?

Ce texte, qui devait, à l’origine, être relatif à l’immigration, est devenu – je le regrette infiniment – un texte sur « le droit des étrangers », ce qui ne veut strictement rien dire ! Faut-il comprendre que cet intitulé va permettre d’attribuer un certificat de travail à un ingénieur américain venu en France ? Ce n’est évidemment pas le sujet !

Il fallait lier le projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile et le texte sur l’immigration, afin de définir des solutions globales et acceptables pour l’ensemble de la République et la représentation nationale. On n’a pas voulu le faire, ce qui va, à mon sens, nous conduire à des désagréments assez lourds, surtout compte tenu de la situation générale.

En tout cas, je constate que le texte lui-même comporte des avancées. Tout à l’heure, je présenterai à nouveau, au nom de la commission des finances, un amendement ô combien important sur l’entrée dans le marché du travail. Sauf erreur de ma part, sauf à avoir mal lu les chiffres, les statistiques du chômage continuent d’augmenter. Si on m’explique que le marché du travail est plus souple et plus ouvert pour les demandeurs d’asile dont la situation n’a pas encore été traitée, il faudra m’expliquer où ils trouvent des emplois ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, deux ans quasiment jour pour jour après l’installation du comité de concertation par le prédécesseur de M. Bernard Cazeneuve au ministère de l’intérieur, nous allons adopter le projet de loi relatif à la réforme de l’asile.

Sur cette réforme attendue et nécessaire, nos débats approfondis auront permis d’explorer toutes les pistes d’amélioration et de poser toutes les bonnes questions. Quant au texte final, après l’échec de la commission mixte paritaire, ce sont nos collègues de l’Assemblée nationale qui auront le dernier mot.

Bien évidemment, comme beaucoup d’entre nous dans cet hémicycle, je regrette que nous n’ayons pu déboucher sur un texte commun lors de la commission mixte paritaire. L’objectif que nous visons était, je le crois, partagé : donner une plus grande efficacité à notre dispositif, permettre une meilleure prise en charge des demandeurs d’asile pendant la procédure d’examen de leur dossier et faciliter l’intégration des bénéficiaires de l’asile.

Nous avons débattu de ce projet de loi dans un contexte difficile. L’arrivée massive de migrants aux frontières sud de l’Europe, la situation en Libye, en Syrie et au Yémen, les attaques répétées des mouvements de l’islam radical pour déstabiliser nos démocraties ont pesé sur nos débats.

Dans ces conditions, il a parfois été tentant de céder à des discours simplificateurs ou de prôner « la mesure capable de régler le problème ». Toutefois, dans ce dossier, la solution simple n’existe pas. L’exemple de ce qui se passe à Calais est là pour nous le rappeler. Un migrant résolu à passer en Grande-Bretagne refusera obstinément de présenter une demande d’asile en France, quand bien même nous lui proposerions cette solution, assortie d’un accompagnement adapté.

J’ai bien noté, madame la secrétaire d’État, l’effort supplémentaire fourni par notre pays grâce au nouveau plan pour l’accueil des migrants que vous avez présenté le 16 juin dernier. Les moyens supplémentaires seront bienvenus, en particulier les moyens en personnel pour renforcer les équipes de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA, et ceux de l’Office français pour l’immigration et l’intégration, l’OFII, qui en a lui aussi vraiment besoin.

La polémique sur les quotas au niveau européen a rappelé, une fois encore, que l’Europe doit trouver les moyens de faire face de manière solidaire à cette vague de migrants. La lutte contre les passeurs, les navires mobilisés en Méditerranée, le renforcement du régime Frontex, l’instruction des dossiers d’asile dans les pays d’origine, comme vient de le rappeler M. Karoutchi, et la politique de codéveloppement avec les pays d’origine sont autant de problèmes que nous ne pouvons traiter qu’au niveau européen, comme j’avais déjà eu l’occasion de le souligner dans nos précédents débats. En clair, si ce texte est une nécessité pour traiter l’urgence, il faut aussi s’intéresser à la cause de cette dernière. Et c’est à l’échelle européenne qu’il faudra nous pencher de façon déterminée sur toutes ces questions.

S’agissant du texte du projet de loi en nouvelle lecture, tel qu’il ressort du débat en commission des lois le 30 juin dernier, je souhaiterais souligner son caractère équilibré. Les rapporteurs de chaque assemblée ont su, sur de nombreux articles, trouver une rédaction commune qui vous a été présentée. Je tiens à saluer M. le rapporteur, parce que je sais qu’elle a été le fruit d’un long et fastidieux travail pour obtenir des accords difficilement envisageables avant son intervention ! Je le remercie chaleureusement, car nous partions de très loin. C’est tout l’honneur du travail accompli par les rapporteurs.

L’article L. 743-3-1, qui avait été l’un des points d’achoppement de notre débat en première lecture, a été définitivement supprimé. La rédaction de l’article L. 743-4 est pleinement satisfaisante et répond au souci que j’avais exprimé en première lecture de dégager une position de compromis acceptable par tous.

Permettez-moi également de me féliciter que figure désormais dans le texte des deux assemblées la possibilité de missions déconcentrées de l’OFPRA à l’article 7 et d’audiences foraines de la CNDA à l’article 10. Comme je l’avais indiqué en première lecture, le principe d’un schéma d’orientation directif des demandeurs d’asile, associé à la création de futures grandes régions, conduisait logiquement à se poser la question d’une organisation déconcentrée de l’OFPRA. Et cette déconcentration à venir trouvait logiquement son corollaire au niveau de la CNDA, par la possibilité que lui ouvre le texte de tenir des audiences foraines dans les territoires.

Schéma d’hébergement régionalisé, déconcentration de l’OFPRA et de la CNDA, nous avons là un axe qui pourrait utilement se développer. M. Karoutchi le rappelait tout à l’heure, les moyens humains supplémentaires ne sont certes pas énormes, mais si nous organisons de façon déconcentrée l’ensemble du dispositif, cela permettra peut-être de réduire des délais. Et en ajoutant à l’organisation territoriale des moyens supplémentaires, on devrait, je l’espère, arriver à quelque chose de positif !

Toutefois, quelques points restent en débat. Le texte issu des travaux de la commission maintient, à juste titre, une position volontariste sur le raccourcissement des délais. Cet élément est essentiel si nous voulons atteindre l’objectif d’une procédure examinée en neuf mois.

La commission des lois a également choisi de rétablir l’article 14 bis, supprimé en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale. Cet article, adopté par la commission sur mon initiative, constitue à mes yeux une pièce maîtresse de la réforme. En effet, comment se préoccuper de l’asile en ignorant le sort des personnes qui seront déboutées au sortir de la procédure ?

Comme j’avais eu l’occasion de le dire lors de notre débat précédent, nous ne pouvons pas nous contenter de les ramener au sort d’étrangers en situation irrégulière. Leur démarche les a signalés aux autorités administratives : ce ne sont plus des clandestins anonymes. À ce titre, nous devons les amener au retour dans des conditions dignes, conformément à la proposition phare de notre rapport sur la réforme de l’asile. La création de centres dédiés pour les étrangers déboutés du droit d’asile est l’un des derniers maillons de la chaîne. Je souhaite que l’Assemblée nationale accepte, en dernière lecture, de reconsidérer les arguments qui ont convaincu le Sénat du bien-fondé d’adopter cette disposition à titre expérimental.

Un dernier point me semble encore discutable dans la rédaction retenue par les rapporteurs pour le deuxième alinéa de l’article L. 744-2, qui définit les modalités d’élaboration du schéma régional d’accueil des demandeurs d’asile.

En première lecture, sur ma proposition, le Sénat avait retenu la nécessité d’associer étroitement les communes et intercommunalités compétentes en matière d’habitat à l’élaboration du schéma régional, partant du principe qu’il reviendrait à ces collectivités de le mettre en œuvre et de l’accompagner.

Cela me paraissait également la meilleure manière de créer, par une démarche concertée, les conditions d’une acceptation positive de l’accueil des demandeurs par la population d’un territoire. Quand les élus locaux emboîtent le pas, il est forcément plus simple et plus aisé de préparer les populations et de le faire dans la meilleure harmonie territoriale possible !

La rédaction retenue par le texte actuel d’un avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement ne me paraît pas la plus pertinente. Le champ d’intervention de ce comité est vaste. Certains des sujets qu’il a en charge sont certes en lien avec cette question, mais elle risque de se retrouver traitée un peu à la marge. Elle me semble pourtant demander la plus grande attention, puisqu’elle est au cœur des préoccupations de nos élus locaux.

Pour participer moi-même à un Comité régional de l’habitat, je sais qu’on peut évoquer ces sujets. Je sais aussi qu’un CRH fait intervenir beaucoup d’acteurs associés et que ce sujet sera noyé dans la masse. Or il est vraiment nécessaire que les élus le traitent sur un mode particulier, sous la présidence du préfet, lequel veillera à obtenir des élus locaux une véritable coproduction, aboutissement d’une démarche réellement acceptée. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un amendement visant à rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture.

Telles étaient les observations que je souhaitais formuler à l’occasion de cette nouvelle lecture.

Mes chers collègues, permettez-moi, en conclusion, de saluer une fois de plus la qualité de notre débat et du travail du rapporteur de la commission des lois. À n’en pas douter, notre assemblée a largement contribué à enrichir le contenu de ce projet de loi !

Je voudrais également saluer de nouveau la grande qualité d’écoute et d’ouverture dont a fait preuve M. le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, tout au long de cette discussion à l’égard de notre assemblée.

Nous souhaitions faire œuvre utile. Je pense que nous y sommes parvenus. Je me félicite que nos débats m’aient permis d’introduire dans le texte du Sénat les propositions du rapport qui me semblaient essentielles pour assurer un traitement équilibré des demandeurs d’asile.

Cette réforme est une première étape essentielle dans la construction d’une politique d’ensemble cohérente de l’accueil des étrangers dans notre pays. Elle aura atteint son but lorsque la procédure accélérée permettra d’accorder très rapidement l’asile à tous ceux qui en relèvent et qui en ont grand besoin. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous examinons en deuxième lecture ce projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile, dont l’objectif premier est de renforcer les droits des demandeurs, d’accélérer les délais d’examen des demandes et de mettre en place un dispositif national d’accueil directif, tout en répondant aux exigences de transposition des dernières directives européennes.

Les précédents orateurs ont souligné l’échec de la CMP. En première lecture, le groupe socialiste avait déploré certaines des évolutions adoptées par le Sénat. En nouvelle lecture, nonobstant le fait que l’Assemblée nationale a tenu compte de quelques-unes des améliorations que nous avions apportées au texte, la commission des lois du Sénat et son rapporteur ont su faire preuve d’un certain esprit de compromis en ne reprenant pas plusieurs dispositions votées en première lecture.

Je pense en particulier au nouveau dispositif de déconcentration de l’OFPRA, à l’obligation de quitter le territoire français à la suite d’un refus de l’OFPRA ou de la CNDA, dont les défauts juridiques avaient été soulignés lors du débat au Sénat et au dispositif de notre collègue Roger Karoutchi, qui avait été voté par voie d’amendement et qui allait à l’encontre des directives européennes en matière de droit du travail – les demandeurs du droit d’asile doivent en effet pouvoir accéder au marché du travail après neuf mois de présence sur le territoire d’un pays membre.

Certaines propositions du Sénat sont consensuelles, notamment celle qui est relative à la composition du conseil d’administration de l’OFPRA. Il en va de même de la volonté du rapporteur de confier le contentieux des décisions de refus d’entrée sur le territoire prises sur avis de l’OFPRA à la Cour nationale du droit d’asile, plutôt qu’au juge administratif de droit commun. Cette disposition, fruit d’une réflexion intelligente sur le devenir de la CNDA, s’inscrit dans la droite ligne de l’action du Gouvernement. Ce denier a en effet décidé de conserver à la Cour nationale du droit d’asile sa compétence en matière de contentieux de l’asile. La proposition de M. le rapporteur mérite donc d’être étudiée.

Toutefois, le refus d’accorder à l’OFPRA un pouvoir d’appréciation sur un certain nombre de questions, en particulier sur le maintien de protections dans certaines situations, nous semble non seulement inadéquat, mais aussi témoigner d’un manque de confiance dans l’administration.

L’abandon du lieu d’hébergement ne doit pas non plus valoir clôture de la demande. Une telle disposition va au-delà de ce qui est souhaitable.

En outre, vouloir imposer à l’OFPRA un délai spécifique de trois mois pour étudier les demandes est en décalage avec la réalité. Certains cas peuvent être étudiés rapidement, d’autres réclament plus de temps. Imposer des délais trop courts à l’OFPRA, c’est prendre le risque d’augmenter le nombre de refus et donc le nombre de saisines de la CNDA. En voulant réduire les délais, vous ne ferez donc que les augmenter. C'est la raison pour laquelle nous proposerons un amendement visant à instaurer un délai « moyen » de trois mois.

Enfin, la commission n’a pas accepté que le dépôt d’une demande d’asile vaille autorisation de séjour.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste – à moins bien sûr que l’ensemble de ses amendements ne soit adopté –, comme en première lecture, s’abstiendra sur ce texte, et cela malgré l’esprit de compromis dont a su faire preuve M. le rapporteur lors des débats en commission.

Mes chers collègues, au regard de la situation générale de l’asile en Europe, il me semble nécessaire de vous faire part de quelques réflexions.

Nous faisons face à une véritable crise migratoire. Chaque jour, des familles entières connaissent une situation indigne. Je salue l’engagement du Gouvernement de créer 4 000 places supplémentaires. Le dispositif national d’accueil semble plus que jamais d’actualité. L’hébergement directif permet de répartir les demandes de protection sur l’ensemble du territoire. Certains gestionnaires de logements sociaux ont émis des propositions intéressantes, mais dont la portée me semble quelque peu limitée : en installant les demandeurs dans des zones où l’activité économique est très faible, on risque, dans un deuxième temps, de ne pas favoriser leur intégration.

Ces propositions sont également en rupture avec ce qui se passait jusqu’en 2012. Depuis cette date, l’OFPRA et la CNDA ont énormément travaillé pour améliorer les conditions de travail et les délais de réponse aux demandeurs. Il est important – c’est la raison d’être de ce projet de loi – de trouver aujourd’hui les outils leur permettant d’aller encore plus vite. Lutter contre les délais longs, c’est lutter contre l’installation de personnes qui auront du mal à quitter notre territoire, surtout après y avoir passé deux ou trois ans.

Par ailleurs, la théorie de l’appel d’air, chère à Nicolas Sarkozy et à ses amis…

M. Roger Karoutchi, rapporteur pour avis. Et à moi également ! (Sourires.)

M. Jean-Yves Leconte. En effet, monsieur Karoutchi !

La théorie de l’appel d’air, disais-je, a conduit à boucher le système. En compliquant la procédure, on a pensé que le nombre des demandes diminuerait, le système devenant moins attractif. Le résultat, c’est que nous ne remplissons pas nos obligations morales au regard de ce qui se passe dans le monde, alors même que ce système nous coûte très cher ! Nous devons aujourd’hui mettre fin à cette embolie. La théorie de l’appel d’air ne marche pas ! Nous devons donc mettre en place un autre système, aux délais raccourcis. Telle est l’ambition de ce projet de loi.

Mes chers collègues, observez à quelles sollicitations sont soumises nos partenaires européens : en Allemagne, le nombre de demandeurs d’asile a été multiplié par trois en trois ans ; en Italie et en Suède, ce nombre a été multiplié par deux et demi ; et encore, je n’évoque ni la Hongrie ni la Belgique. En France, depuis trois années, le nombre de demandes est d’environ 60 000 par an. Que se passerait-il si nous connaissions une augmentation similaire à celle de nos partenaires ? Le Gouvernement a répondu au mois de juin dernier en accordant davantage de moyens. Au-delà, c’est notre capacité à nous réformer qui est mise à l’épreuve.

J’aurais encore énormément à dire. Il est essentiel que l’ensemble de l’Europe se montre solidaire au regard de la situation géopolitique : les migrations Sud-Sud sont devenues très compliquées. Parmi les gens qui arrivent aujourd’hui chez nous se trouvent, par exemple, des Soudanais qui habitaient en Libye depuis de longues années.

Par ailleurs, les drames ont lieu non seulement en Méditerranée, mais aussi dans les Balkans. Cette partie de l’Europe qui a beaucoup souffert voilà vingt ans est tout autant déstabilisée par l’afflux de migrants que l’Italie.

Oui, migration économique et besoin de protection ne sont pas la même chose. Toutefois, lorsque des familles entières mettent en danger leurs enfants pour quitter un pays et s’installer ailleurs, en quête de protection, il ne s’agit pas de migrants économiques. Nous parlons là de vrais besoins de protection, auxquels l’Europe doit répondre pour rester fidèle à ses valeurs.

Il me semble que nous avons encore beaucoup de travail à accomplir pour que l’ensemble de l’Europe se sente solidaire. À cet égard, la France a une responsabilité particulière. Le droit d’asile vient de loin dans notre pays ; il remonte à la Révolution. Par ailleurs, les outre-mer nous font bénéficier d’une situation géopolitique exceptionnelle, d’un rayonnement mondial. Pour toutes ces raisons, il est essentiel que nous allions dans la bonne direction.

Ce projet de loi n’est qu’un début, mais il permet à la France d’être fidèle à ses valeurs. Le groupe socialiste s’abstiendra sur ce texte en raison du maintien de certaines dispositions. Il s’agit toutefois d’un nouvel outil au service d’une politique migratoire qui a besoin de davantage de moyens. La solidarité mondiale doit jouer en faveur de ceux qui cherchent un refuge et que nous ne saurions abandonner. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, peu de mots, mais des mots forts, suffiraient assurément pour exprimer la déception des acteurs du secteur des demandeurs d’asile.

Les événements de ces dernières semaines – l’expulsion des migrants de la Chapelle, puis de la halle Pajol, l’épisode du Bois Dormoy et tout ce qui a suivi – montrent à quel point ce texte est en deçà de la réalité vécue quotidiennement par les personnes dont nous sommes censés parler. Je les ai accompagnées à plusieurs reprises après avoir constaté que nous avions été occupés, particulièrement au Sénat, à détricoter le projet de loi original, qui contenait pourtant quelques avancées, même si elles étaient insuffisantes.

Regardons les choses en face au lieu de faire de la politique politicienne en pensant aux prochaines élections, à l’instar de celles et ceux qui ont fait du problème migratoire un programme politique, oubliant qu’il s’agit d’hommes et de femmes qui fuient leur pays pour échapper au pire.

Nous savons tous que des migrants économiques se faufilent parmi les demandeurs d’asile. Ils ne sont toutefois pas nombreux ; n’entretenons pas la confusion. Les demandeurs d’asile arrivent en masse. Nous avons réussi à loger une partie des expulsés de la Chapelle et de la halle Pajol ; à cet égard, je rends hommage aux pouvoirs publics, qu’il a toutefois fallu pousser un peu…

Le problème n’est pourtant pas résolu et ne le sera pas de sitôt. Les regroupements existent encore à Paris et l’accès aux hôpitaux est refusé à des femmes enceintes ! Des dizaines et des dizaines de demandeurs d’asile sont toujours à la rue. Beaucoup ne souhaitent pas rester chez nous, mais veulent aller ailleurs, et ils ont raison. Facilitons-leur au moins la tâche et laissons-les rejoindre le pays de leur choix. De même, à Calais, cessons de faire la police pour la Grande-Bretagne.

Dire que l’Europe n’est même pas capable d’assurer une répartition équitable de ces demandeurs d’asile entre les différents pays ! Au lieu de prendre une décision, elle tergiverse, comme elle l’a fait pour d’autres, par le passé. C’est inadmissible.

Ne comprenez-vous donc pas qu’il y a urgence ? En cette période de canicule, l’urgence, pour ces personnes en extrême détresse, c’est de disposer d’un toit, d’eau pour se laver et de quoi manger. Ne pourrions-nous prendre exemple sur ces jeunes, militants, bénévoles associatifs ou simples riverains, qui apportent aux migrants ce qu’ils peuvent et les aident comme ils peuvent, sans compter leur temps ? Ceux-là honorent la France ; grâce à eux, nous pouvons nous dire que tout n’est pas perdu !

Ce ne sont pas de vaines joutes oratoires ni de vains calculs politiciens qui sortiront la France du marasme ; ils ne garantiront pas davantage aux demandeurs d’asile un traitement simplement humain. Les grandes vacances approchent, n’est-il pas vrai ? Beaucoup continueront à rester dans la rue.

Mes chers collègues, je nous appelle à plus de compassion, à plus de hauteur aussi : élaborons un texte digne de la France ! Las, je crois que la partie est perdue. Si du moins on revenait aux grandes lignes du projet de loi original, on pourrait espérer améliorer un peu le traitement des demandes d’asile en France. Avons-nous donc oublié que ce projet de loi vise à transposer dans le droit français le régime d’asile européen, et que l’objectif n’était pas de rendre notre droit de l’asile encore plus restrictif qu’il ne l’est aujourd’hui ? (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)

J’ai bien conscience, chers collègues de la majorité sénatoriale, que je ne vous convaincrai sans doute pas, mais peut-être la présidente de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, le pourra-t-elle. Dans un communiqué de presse publié après sa visite à Calais le 4 juin dernier, Mme Christine Lazerges a fait savoir que la délégation qui l’accompagnait avait été « profondément choquée par les conditions inhumaines et indignes dans lesquelles les migrants tentent de survivre ».

Elle ajoutait : « Il est de nos jours intolérable que les 3 000 personnes vivant actuellement sur la lande n’aient accès qu’à un seul point d’eau. Ils vivent sous des cabanes et autres abris de fortune sans accès aux toilettes de dix-neuf heures à midi le lendemain. Comment peuvent-ils, dans de telles conditions, faire valoir leurs droits les plus élémentaires ? »

Alors que les pouvoirs publics se trouvent indéniablement confrontés à un problème humanitaire grave et difficile à régler, notre rôle est-il de leur rendre la tâche encore plus ardue en défigurant ce projet de loi par pure opposition politique ?

Le résultat de la commission mixte paritaire est connu ; il en résulte que le Sénat est saisi du projet de loi en nouvelle lecture. Le groupe écologiste espérait que l’on aboutirait à un texte plus proche du régime d’asile européen commun, un texte qui donne aux pouvoirs publics les moyens d’agir plus efficacement et aux demandeurs d’asile la possibilité d’entrer plus rapidement dans un processus d’intégration.

Ces objectifs ne sont pas atteints, hélas ! Aussi, sans surprise, nous ne voterons pas le projet de loi dans sa rédaction résultant des travaux de la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.)

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Discussion générale (suite)

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Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

M. le président. Mes chers collègues, j’ai le plaisir de saluer, dans la tribune du Sénat, M. Serhiy Vlassenko, président de la commission de la réforme de l’État, de la politique régionale et des collectivités territoriales de la Rada d’Ukraine, accompagné de deux de ses collègues députés, la présidente de la sous-commission chargée des relations d’organisation des collectivités, Mme Boiko, et le président de la sous-commission en charge des questions administratives et des symboles d’État, M. Dechtariouk. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la secrétaire d’État chargée de la réforme de l'État et de la simplification, se lèvent.)

La délégation a répondu à l’invitation du président Gérard Larcher et son déplacement s’inscrit dans un exercice de diplomatie parlementaire engagé par le président du Sénat. Cette visite est le point culminant d’une coopération entamée au mois d’avril dernier entre la Rada de la République d’Ukraine et le Sénat, assemblée des territoires.

L’objectif de cette coopération est d’illustrer les caractéristiques de la décentralisation à la française, en particulier notre conception d’un État unitaire dans un système décentralisé, alors que l’Ukraine est en train de réformer son organisation territoriale.

Le programme préparé à l’intention de la délégation ukrainienne porte également sur les statuts particuliers permettant une décentralisation approfondie sans remettre en cause l’intégrité de la République. Reçus ce matin pour une session de travail par M. le président du Sénat, nos homologues du Parlement d’Ukraine rencontreront tout au long de leur mission des spécialistes de l’organisation décentralisée du territoire.

Mes chers collègues, en votre nom à tous, permettez-moi de leur souhaiter, ainsi qu’à leur délégation, une très cordiale bienvenue et un fructueux séjour ! (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la secrétaire d’État, applaudissent longuement.)

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Discussion générale (interruption de la discussion)
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Discussion générale (suite)

Réforme de l'asile

Suite de la discussion et adoption en nouvelle lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 2

M. le président. Nous reprenons la discussion en nouvelle lecture du projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons en nouvelle lecture le projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile après que la commission mixte paritaire a fait apparaître, sur un nombre important de sujets, une contradiction irréductible entre les positions des deux chambres. La divergence majeure et insurmontable tient à la vision sécuritaire adoptée par la droite sénatoriale sur la question des déboutés.

Aggravé par les amendements de la commission des lois du Sénat, en nouvelle comme en première lecture, le projet de loi retire aux demandeurs d’asile une série de droits fondamentaux.

Je pense d’abord au droit à l’égalité, puisqu’on prévoit de discriminer les demandeurs d’asile, soumis à des procédures expéditives, en opérant un tri selon leur nationalité ou selon des critères fondés sur les préjugés, et non sur des différences vérifiables touchant à la qualité des demandes.

Je pense ensuite au droit pour les demandeurs d’asile de saisir un juge lorsqu’une décision de l’administration leur semble injuste. En effet, la possibilité de saisir la justice contre une décision négative reste illusoire ou purement formelle dans de nombreux cas. Les délais de recours imposés à des justiciables par définition désorientés, qui sont dans certains cas d’une semaine, voire seulement de quarante-huit heures, et le temps laissé aux juges pour étudier les dossiers sont beaucoup trop brefs pour que les demandeurs d’asile aient une chance réelle de faire valoir leurs arguments devant la justice.

En outre, ce projet de loi limite la possibilité pour les demandeurs d’asile de choisir où et avec qui ils habitent, sans compter qu’il leur impose des obligations de présence dans certains lieux d’hébergement, sous peine de voir leur demande radiée. Un tel cantonnement nous paraît disproportionné pour des personnes qui appellent avant tout à l’aide et auxquelles on ne reproche aucun délit.

Dans une tribune publiée dans La Croix le 23 juin dernier, plusieurs associations travaillant auprès des réfugiés ont dénoncé ces pratiques et ce détournement du droit d’asile à des fins de politique migratoire : « Si des hommes, des femmes et des enfants ne retournent pas vers des foyers lointains, quittés dans l’urgence et à contrecœur, c’est souvent parce qu’ils ne peuvent pas y retourner, tout simplement. Peut-être que leur instinct de survie est plus fort qu’une procédure faillible et menée à la hâte ? Les traiter comme des délinquants et les punir ne mettra pas fin à la misère ni aux crises humanitaires qu’ils cherchent à fuir. »

En première lecture, aucune de nos propositions d’amélioration en faveur d’un véritable droit d’asile n’a été adoptée ; inutile d’espérer, donc, que la majorité sénatoriale en fera grand cas en nouvelle lecture. C’est le principe de réalité !

Nous avons néanmoins déposé trois amendements, dont l’objet, simple, consiste à revenir sur les mesures indignes que la droite sénatoriale a réintroduites en commission dans le projet de loi. Il s’agit, d’une part, des dispositions imposant un hébergement sous peine de clôture de l’examen de la demande d’asile ou de suspension de l’allocation financière, et, d’autre part, de l’assignation à résidence des demandeurs d’asile déboutés, c’est-à-dire de leur enfermement administratif, et du refus d’accès aux hébergements d’urgence pour ces derniers.

Aux cyniques qui font de la question une affaire comptable, quand ce n’est pas un problème de plomberie, les réfugiés étant comparés à des fuites d’eau, j’aimerais rappeler quelques chiffres.

Tout d’abord, il faut considérer que la France accorde l’asile en première instance à 17 % des demandeurs, quand ce taux était en 2014 de 39 % au Royaume-Uni, de 40 % en Belgique, de 42 % en Allemagne, de 67 % en Finlande et de 45 % en moyenne dans l’Union européenne.

Ensuite, les Érythréens, qui, avec les Soudanais, peuplent majoritairement les campements parisiens, avaient jusqu’au mois de mai dernier bien peu de chances d’obtenir le statut de réfugié : seulement 14,8 % d’entre eux obtenaient gain de cause en première instance, alors qu’ils sont 100 % à obtenir une décision favorable en Suède et quelque 85 % dans la plupart des autres pays européens.

Les Soudanais ne sont guère mieux traités, puisque 279 d’entre eux ont obtenu le statut de réfugié en 2014, quand 990 ont vu leur demande refusée. Pour eux, les proportions sont inversées des deux côtés de la Manche : près de 75 % reçoivent une réponse positive au Royaume-Uni et ils sont autant à voir leur demande rejetée en France.

Quant aux Syriens, qui font la fierté de l’OFPRA avec leur taux d’acceptation de 96 %, quelque 40 % d’entre eux n’obtiennent pas le statut de réfugié, mais une simple protection subsidiaire.

Délogés de leurs installations successives, les migrants de Paris ont été victimes ces dernières semaines d’une véritable chasse, qui a abouti à un plan en demi-teinte. Si nous nous réjouissons que la création de 9 500 places d’hébergement supplémentaires ait été annoncée, nous regrettons que cette mesure, dont nous surveillerons la mise en œuvre, s’accompagne d’une série de dispositions expéditives : multiplication par deux du nombre de retours volontaires des migrants économiques, optimisation du remplissage des centres de rétention administrative, dernière étape avant le renvoi forcé, et « nouveaux dispositifs de préparation au retour » aux contours encore flous. Ces diverses dispositions éclipsent largement la bonne nouvelle et masquent mal la politique du chiffre qui semble encore guider le Gouvernement.

Mes chers collègues, le mot « républicain » a beau être à la mode ces temps-ci, la tendance est à l’oubli, et la devise de notre pays n’y échappe pas. « Liberté, égalité, fraternité » : hélas, le sens des mots se perd. Dans son ouvrage La Devise « Liberté, égalité, fraternité », l’enseignant-chercheur Michel Borgetto rappelle que, telle qu’on l’envisageait sous la Révolution, « la fraternité avait pleine vocation à embrasser tous ceux qui, Français mais aussi étrangers, luttaient pour l’avènement ou le maintien de la liberté et de l’égalité ».

Aujourd’hui, la fraternité républicaine devrait tendre vers une forme d’entraide entre citoyens de toutes origines, au service de la solidarité et d’un monde meilleur. Le projet de loi dans sa rédaction adoptée par la commission n’étant pas inspiré par ces principes, nous ne le voterons pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous regrettons bien évidemment que, sur une question d’intérêt général aussi essentielle que celle de l’asile, la commission mixte paritaire se soit soldée par un échec.

Il va de soi que nul ici ne remet en cause le principe de l’asile, consacré en 1793 et demeuré un principe irréfragable de notre pays. De fait, les réfugiés ont longtemps été attirés par notre pays, qui est par excellence la patrie des droits de l’homme ; cette dernière expression devrait être beaucoup plus affirmée qu’elle ne l’est quelquefois.

Si les constats sont limpides comme les eaux cristallines des gaves pyrénéens (Sourires.), les solutions, elles, le sont beaucoup moins. De fait, ces dernières années, notre « petit cap du continent asiatique », comme disait Paul Valéry en parlant de l’Europe, a vu un afflux inégalé de migrants se former à ses frontières, du fait de l’explosion des conflits.

Dans certains pays, nous récoltons ce que nous avons semé. Ainsi, la Syrie est le pays qui compte actuellement le plus de déplacés : quelque 7,6 millions d’habitants ont dû, forcés par la guerre, changer de lieu d’habitation dans le pays. Selon le dernier rapport du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, la Syrie détient même l’affligeant record du plus grand nombre de déplacés jamais enregistré dans le monde : presque 4 millions de réfugiés.

L’Europe elle-même n’a pas encore pu trouver de solution, comme le débat européen sur les migrants l’a attesté de manière explosive. Alors que quelque 40 000 demandeurs d’asile sont arrivés en Italie et en Grèce depuis le 15 avril dernier et que des centaines se massent dans la frontalière Vintimille, que faut-il faire ? La question reste pendante.

Les deux assemblées se sont accordées sur certaines dispositions importantes du projet de loi, en particulier sur son article 16 bis, qui permet aux communes de prendre en compte dans le calcul du seuil minimal de logements locatifs sociaux rendu obligatoire par la loi dite « SRU » les places offertes dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile, et sur son article 16 ter, qui instaure un droit d’accès du délégué du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés aux lieux de rétention administrative.

Elles se sont également entendues sur l’article 6 bis du projet de loi, qui permet la communication au procureur de la République des informations ayant conduit au rejet définitif d’une demande d’asile fondé sur une clause d’exclusion.

Si les sujets de désaccord ponctuels entre l’Assemblée nationale et le Sénat ont été légion, nous restons persuadés que les deux chambres avaient les moyens de se mettre d’accord, à condition de faire preuve d’un peu de raison et, au fond, de bon sens.

Plusieurs points retiennent notre attention.

Tout d'abord, contrairement à l’Assemblée nationale, le Sénat est favorable à une déconcentration de l’OFPRA à titre expérimental, et nous le sommes également. Cette proposition de bon sens, issue du rapport de notre collègue Valérie Létard, a remporté l’adhésion des associations.

Aujourd’hui, l’OFPRA est situé en Île-de-France et elle dispose également d’une antenne en Guadeloupe pour les départements d’Amérique. De ce fait, la convocation de tous les demandeurs a lieu dans les locaux parisiens, à l’exception notable des personnes placées dans les centres de rétention administrative de Lyon et de Toulouse et des nombreuses demandes en Guyane et à Mayotte, qui font l’objet d’entretiens par visioconférence. L’installation de l’OFPRA dans les principales régions d’accueil des demandeurs doit permettre de les auditionner plus rapidement et de réduire par là même les délais de traitement, conformément aux objectifs du présent projet de loi.

Cette déconcentration participe de l’objectif de réduction des délais visé par le projet de loi, au même titre que deux des mesures votées par le Sénat, mais écartées par l’Assemblée nationale : l’inscription dans la loi du délai de trois mois imparti à l’OFPRA pour statuer sur une demande d’asile en procédure normale et la faculté pour cette autorité de clôturer l’examen d’une demande d’asile en cas d’abandon de son hébergement par un demandeur d’asile.

Nous le savons néanmoins, le principal point d’achoppement est l’article 14, qui traite du sort des déboutés. En effet, que faire une fois le demandeur d’asile définitivement débouté ? Le texte n’a pas trouvé de solution, même s’il est vrai que les solutions en la matière sont non pas législatives, mais avant tout politiques et administratives.

Certains d’entre nous ont déjà eu l’occasion de souligner les interrogations soulevées par la solution adoptée par le Sénat. La Haute Assemblée a souhaité que le rejet définitif d’une demande d’asile vaille obligation de quitter le territoire français sans possibilité de solliciter le maintien sur le territoire. Seulement, quid de la conventionalité d’une telle disposition au regard, par exemple, du principe international de droit à une vie familiale ?

La potentielle condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme, mais aussi l’engagement de la responsabilité de notre pays pour des lois non conventionnelles, ne sont pas des éléments qui peuvent être balayés d’un revers de la main.

Enfin, nous nous inscrivons également en porte à faux par rapport à la conception que se fait la Haute Assemblée du conseil d’administration de l’OFPRA. Nous sommes convaincus de l’opportunité de la présence de parlementaires au sein d’organismes extérieurs au Parlement, dans un souci évident de contrôle démocratique, mais aussi pour garantir une bonne connaissance du terrain.

Plus les demandeurs attendent la décision d’admission ou de rejet, plus les CADA sont engorgés, plus le coût de l’hébergement d’urgence augmente et plus les prestations financières et sociales sont lourdes pour les demandeurs d’asile et notre pays. L’efficience et la réduction du coût de l’exercice du droit d’asile pour notre pays dépendront donc toutes les deux de l’efficacité de la loi issue du processus législatif.

Dans ces conditions, les membres du groupe RDSE maintiendront leur position et leur vote exprimés lors de la précédente lecture. (Applaudissements sur les travées du RDSE. – M. Alain Richard applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Christophe-André Frassa.

M. Christophe-André Frassa. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mon propos sera bref, car mes excellents collègues François-Noël Buffet, rapporteur, et Roger Karoutchi, rapporteur pour avis, ont excellemment posé le problème, apportant des réponses unanimement saluées au sein de notre groupe.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. C’est vrai !

M. Roger Karoutchi, rapporteur pour avis de la commission des finances. Très bien ! Je propose que nous nous arrêtions là… (Sourires.)

M. Christophe-André Frassa. Je ne reviendrai pas sur l’échec de la commission mixte paritaire, considérant que tout a déjà été dit à ce sujet. Depuis plus de deux siècles, la France accueille les personnes persécutées dans leur pays d’origine.

Oui, le droit d’asile est profondément ancré dans notre histoire, dans notre culture et dans notre civilisation.

Oui, nous sommes tous viscéralement attachés à ce principe et nous souhaitons tous en assurer la pérennité.

Or, madame la secrétaire d'État, votre texte ne permettra pas de sauver durablement notre politique d’accueil des demandeurs d’asile. Le péché originel, nous le connaissons et vous le connaissez aussi : avoir refusé de discuter la question de l’asile avec celle de l’immigration, alors que le droit d’asile est devenu une machine à produire des clandestins. Notre responsabilité politique est pourtant de réussir à accueillir les réfugiés politiques, qui sont des combattants de la liberté, tout en parvenant à expulser les déboutés, qui sont des candidats à l’immigration clandestine.

Aujourd’hui, la France est perçue, par les demandeurs d’asile, comme un pays extrêmement attractif pour tous ceux qui souhaitent bénéficier des aides sociales et d’une possibilité de régularisation.

Nous devons légiférer avec clairvoyance et rigueur, dans cette perspective. C’est dans cet esprit que je salue les travaux que nous avons menés au Sénat et qui ont d’ailleurs ouvert la voie à une modification majeure dans ce texte après son passage à la Haute Assemblée : admettre, enfin, que la problématique centrale du droit d’asile, au-delà des délais de traitement des dossiers de demande d’asile, qui peuvent devenir « inhumains », porte sur le sort des demandeurs dont le dossier est refusé, après une analyse scrupuleuse de leur situation.

À cet égard, je salue le travail toujours approfondi effectué par l’OFPRA en la matière.

La Cour des comptes nous a alertés, dès le mois de février dernier, dans son rapport provisoire : le texte du Gouvernement « ne répond pas à la question centrale de la gestion des déboutés qui provoquent une embolie dans le système de l’asile et dans les structures d’hébergement d’urgence de droit commun. L’inconditionnalité de l’accueil, y compris pour les personnes déboutées du droit d’asile, s’oppose au respect des conditions de séjour régulier en France ».

C’est pourquoi nous regrettons que ni le Gouvernement ni l’Assemblée nationale n’aient accepté nos propositions, qui répondaient à ces préoccupations et aux lacunes inhérentes à ce texte.

En tant que sénateur des Français de l’étranger, il me paraît aujourd’hui incongru de légiférer, comme nous le faisons sur ce texte, c’est-à-dire sans avoir à l’esprit les récentes décisions prises au niveau européen. Quel engagement notre État prend-il à ce jour pour choisir d’accueillir ou non les migrants à nos frontières et aux frontières de l’Europe ?

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, nous ne pouvons pas et ne devons pas tomber dans les bons sentiments. En effet, notre discernement est fondamental, car nous parlons d’hommes et de femmes arrivant sur notre territoire dans la détresse et sans repères.

La commission des lois propose aujourd’hui un texte profondément équilibré, et c’est pourquoi le groupe des Républicains votera en sa faveur. Monsieur le président, j’avais annoncé que je serai bref : j’ai tenu parole ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous débattons de ce projet de loi alors même que la France et l’Europe se mobilisent pour faire face à une crise migratoire d’une ampleur tout à fait préoccupante. Cette crise devient même insoutenable au regard de la multiplication des drames successifs qui se sont joués ces derniers mois en Méditerranée.

La France, comme bien souvent, est aux avant-postes et elle est également une force de propositions au sein de l’Europe. Un nouveau dispositif se dessine d’ailleurs en Europe, et c’est tant mieux. La France doit l’accompagner par une réforme du droit d’asile sur son territoire, et c’est précisément l’objet de ce texte.

En effet, qu’ils viennent d’Irak, de Syrie ou d’Érythrée, les femmes et les hommes qui ont fui leur pays pour préserver leur intégrité physique, ainsi que celle de leur famille, doivent pouvoir faire valoir leurs droits dans le cadre de procédures efficaces et rapides.

Force est de le constater, aujourd’hui le droit d’asile est profondément affaibli. Cette réforme est donc salutaire et doit nous permettre de pallier les dysfonctionnements observés. Je rappellerai simplement un chiffre : entre 2007 et 2012, les demandes d’asile ont presque doublé en France et, malheureusement, durant cette période, aucune mesure n’a été envisagée pour mieux gérer cette augmentation.

L’OFPRA, comme la CNDA, n’est plus en mesure aujourd’hui, au vu de ses effectifs et de ses moyens, d’offrir des délais de traitement des demandes qui soient acceptables. Les dispositifs d’hébergement des demandeurs sont totalement saturés.

Heureusement, le Gouvernement a pris les choses en main et mobilise les moyens humains et matériels qui sont indissociables de la réforme que nous examinons. Il a également d’ores et déjà accentué sa lutte contre les filières de l’immigration clandestine.

Les débats au Sénat sur ce projet de loi ont été riches, et je suis satisfait de constater que la position de la majorité sénatoriale a évolué dans le bon sens. En effet, nous avons adopté une démarche consensuelle en décidant de raccourcir les délais, ce dont je ne peux que me réjouir, et la majorité sénatoriale a abandonné certaines des idées avancées en première lecture, comme le rejet automatique d’une demande valant obligation de quitter le territoire, qui était pour le moins ubuesque.

Toutefois, force est de constater qu’il reste encore, dans le texte qui nous est proposé par les rapporteurs, des dispositions qui sont inacceptables pour le groupe socialiste. Je pense notamment à la clôture du dossier déclenchée par l'abandon du lieu d'hébergement. Il en est de même concernant la volonté des rapporteurs de lier l’OFPRA dans son pouvoir d’appréciation en lui donnant des injonctions. Sur ces sujets, il reste donc encore un travail à effectuer.

Notre collègue Jean Yves Leconte a déposé plusieurs amendements, et j’espère que nos rapporteurs y seront sensibles. En effet, en l’état actuel du texte, le groupe socialiste s’abstiendra. En revanche, si le rapporteur et la commission des lois allaient dans le sens souhaité par Jean-Yves Leconte, nous pourrions revoir notre position et voter en faveur du texte, ce qui permettrait de parvenir à un large consensus. La balle est donc dans le camp des rapporteurs, et nous serons extrêmement attentifs au sort qui sera réservé aux amendements de notre collègue Leconte.

Enfin, et je m’adresse ici à la majorité sénatoriale, cessons de dire que la France serait aujourd’hui plus laxiste que ses voisins en matière de reconduite à la frontière des personnes en situation irrégulière ! C’est totalement erroné ; il n’existe aucune spécificité française sur ce point.

Plusieurs orateurs l’ont souligné, nous devons faire preuve de pragmatisme, tout en restant fidèles à nos valeurs en ce qui concerne l’attribution de l’asile pour les personnes pourchassées au sein de leur pays, dans la mesure où il s’agit d’un aspect essentiel de la République française. En effet, nous sommes tous attachés à ce droit d’asile. Cependant, nous devons aussi le faire vivre au quotidien, et c’est précisément l’objet de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile

Chapitre Ier

Dispositions relatives aux conditions d’octroi de l’asile

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Discussion générale (suite)
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Article 3

Article 2

Le chapitre Ier du titre Ier du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 711-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 711-2. – Les actes de persécution et les motifs de persécution, au sens de la section A de l’article 1er de la convention de Genève, du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, sont appréciés dans les conditions prévues aux paragraphes 1 et 2 de l’article 9 et au paragraphe 1 de l’article 10 de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection.

« S’agissant des motifs de persécution, les aspects liés au genre et à l’orientation sexuelle sont dûment pris en considération aux fins de la reconnaissance de l’appartenance à un certain groupe social ou de l’identification d’une caractéristique d’un tel groupe.

« Pour que la qualité de réfugié soit reconnue, il doit exister un lien entre l’un des motifs de persécution et les actes de persécution ou l’absence de protection contre de tels actes.

« Lorsque l’autorité compétente évalue si un demandeur craint avec raison d’être persécuté, il est indifférent que celui-ci possède effectivement les caractéristiques liées au motif de persécution ou que ces caractéristiques lui soient seulement attribuées par l’auteur des persécutions. » ;

2° Sont ajoutés des articles L. 711-3 à L. 711-6 ainsi rédigés :

« Art. L. 711-3. – Le statut de réfugié n’est pas accordé à une personne qui relève de l’une des clauses d’exclusion prévues aux sections D, E ou F de l’article 1er de la convention de Genève, du 28 juillet 1951, précitée.

« La même section F s’applique également aux personnes qui sont les instigatrices ou les complices des crimes ou des agissements mentionnés à ladite section ou qui y sont personnellement impliquées.

« Art. L. 711-4. – L’Office français de protection des réfugiés et apatrides met fin, de sa propre initiative ou à la demande de l’autorité administrative, au statut de réfugié lorsque la personne concernée relève de l’une des clauses de cessation prévues à la section C de l’article 1er de la convention de Genève, du 28 juillet 1951, précitée. Pour l’application des 5 et 6 de la même section C, le changement dans les circonstances ayant justifié la reconnaissance de la qualité de réfugié doit être suffisamment significatif et durable pour que les craintes du réfugié d’être persécuté ne puissent plus être considérées comme fondées.

« L’office met également fin à tout moment, de sa propre initiative ou à la demande de l’autorité administrative, au statut de réfugié lorsque :

« 1° Le réfugié aurait dû être exclu du statut de réfugié en application des sections D, E ou F de l’article 1er de la convention de Genève, du 28 juillet 1951, précitée ;

« 2° La décision de reconnaissance de la qualité de réfugié a résulté d’une fraude ;

« 3° Le réfugié doit, compte tenu de circonstances intervenues après la reconnaissance de cette qualité, en être exclu en application des sections D, E ou F de l’article 1er de la convention de Genève, du 28 juillet 1951, précitée.

« Art. L. 711-5. – Dans les cas prévus aux 1° et 2° de l’article L. 711-4, lorsque la reconnaissance de la qualité de réfugié résulte d’une décision de la Cour nationale du droit d’asile ou du Conseil d’État, la juridiction est saisie par l’office ou par le ministre chargé de l’asile en vue de mettre fin au statut de réfugié. Les modalités de cette procédure sont fixées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 711-6. – Le statut de réfugié est refusé ou il est mis fin à ce statut lorsque :

« 1° Il y a des raisons sérieuses de considérer que la présence en France de la personne concernée constitue une menace grave pour la sûreté de l’État ou la sécurité publique ;

« 2° La personne concernée a été condamnée en dernier ressort en France soit pour un crime, soit pour un délit constituant un acte de terrorisme ou puni de dix ans d’emprisonnement, et sa présence constitue une menace grave pour la société. »

M. le président. L'amendement n° 18, déposé par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, n’est pas soutenu.

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2
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Article 4

Article 3

Le chapitre II du même titre Ier est ainsi modifié :

1° L’article L. 712-1 est ainsi modifié :

a) Les deux premiers alinéas sont ainsi rédigés :

« Le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié et pour laquelle il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu’elle courrait dans son pays un risque réel de subir l’une des atteintes graves suivantes :

« a) La peine de mort ou une exécution ; »

b) Au c, le mot : « , directe » est supprimé et le mot : « généralisée » est remplacé par les mots : « qui peut s’étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle et » ;

2° L’article L. 712-2 est ainsi modifié :

a) À la fin du b, les mots : « de droit commun » sont supprimés ;

b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les a à c s’appliquent aux personnes qui sont les instigatrices, les auteurs ou les complices des crimes ou des agissements mentionnés à ces mêmes a à c ou qui y sont personnellement impliquées.

« La protection subsidiaire est refusée à une personne s’il existe des raisons sérieuses de penser, d’une part, qu’elle a commis, avant son entrée en France, un ou plusieurs crimes qui ne relèvent pas du champ d’application des a à d et qui seraient passibles d’une peine de prison s’ils avaient été commis en France et, d’autre part, qu’elle n’a quitté son pays d’origine que dans le but d’échapper à des sanctions résultant de ces crimes. » ;

3° L’article L. 712-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 712-3. – L’Office français de protection des réfugiés et apatrides met fin, de sa propre initiative ou à la demande de l’autorité administrative, au bénéfice de la protection subsidiaire lorsque les circonstances ayant justifié l’octroi de cette protection ont cessé d’exister ou ont connu un changement suffisamment significatif et durable pour que celle-ci ne soit plus requise.

« Par dérogation au premier alinéa, la protection subsidiaire est maintenue lorsque son bénéficiaire justifie de raisons impérieuses tenant à des atteintes graves antérieures pour refuser de se réclamer de la protection de son pays.

« L’office met également fin à tout moment, de sa propre initiative ou à la demande de l’autorité administrative, au bénéfice de la protection subsidiaire lorsque :

« 1° Son bénéficiaire aurait dû être exclu de cette protection pour l’un des motifs prévus à l’article L. 712-2 ;

« 2° La décision d’octroi de cette protection a résulté d’une fraude ;

« 3° Son bénéficiaire doit, à raison de faits commis après l’octroi de la protection, en être exclu pour l’un des motifs prévus à l’article L. 712-2. » ;

4° Il est ajouté un article L. 712-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 712-4. – Dans les cas prévus aux 1° et 2° de l’article L. 712-3, lorsque l’octroi de la protection subsidiaire résulte d’une décision de la Cour nationale du droit d’asile ou du Conseil d’État, la juridiction est saisie par l’office ou par le ministre chargé de l’asile en vue de mettre fin à la protection subsidiaire. Les modalités de cette procédure sont fixées par décret en Conseil d’État. » – (Adopté.)

Article 3
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Article 4 bis

Article 4

(Non modifié)

Le chapitre III du même titre Ier est ainsi modifié :

1° A L’article L. 713-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ils peuvent également l’être par la Cour nationale du droit d’asile dans les conditions prévues au chapitre III du titre III du présent livre. » ;

1° L’article L. 713-2 est ainsi modifié :

a) Le début du premier alinéa est ainsi rédigé : « Les persécutions ou menaces de persécutions prises en compte dans la reconnaissance de la qualité de réfugié et les atteintes graves ou menaces d’atteintes graves pouvant... (le reste sans changement). » ;

b) À la fin du second alinéa, les mots : « et des organisations internationales et régionales » sont remplacés par les mots et une phrase ainsi rédigée : « ou des partis ou organisations, y compris des organisations internationales, qui contrôlent l’État ou une partie importante du territoire de celui-ci. Cette protection doit être effective et non temporaire. » ;

c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Une telle protection est en principe assurée lorsque les autorités mentionnées au deuxième alinéa prennent des mesures appropriées pour empêcher les persécutions ou les atteintes graves, en particulier lorsqu’elles disposent d’un système judiciaire effectif permettant de déceler, de poursuivre et de sanctionner les actes constituant de telles persécutions ou de telles atteintes, et lorsque le demandeur a accès à cette protection. » ;

2° Après le mot : « grave », la fin de la première phrase de l’article L. 713-3 est ainsi rédigée : « , si elle peut, légalement et en toute sécurité, se rendre vers cette partie du territoire et si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’elle s’y établisse. » ;

3° Sont ajoutés des articles L. 713-4 à L. 713-6 ainsi rédigés :

« Art. L. 713-4. – Les craintes de persécutions prises en compte dans la reconnaissance de la qualité de réfugié et le risque réel de subir des atteintes graves pouvant donner lieu au bénéfice de la protection subsidiaire peuvent être fondés sur des événements survenus après que le demandeur d’asile a quitté son pays d’origine ou à raison d’activités qu’il a exercées après son départ du pays, notamment s’il est établi que les activités invoquées constituent l’expression et la prolongation de convictions ou d’orientations affichées dans son pays.

« Art. L. 713-5. – L’autorité judiciaire communique au directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et au président de la Cour nationale du droit d’asile, sur demande ou d’office, tout élément recueilli au cours d’une instance civile ou d’une information criminelle ou correctionnelle, y compris lorsque celle-ci s’est terminée par un non-lieu, de nature à faire suspecter qu’une personne qui demande l’asile ou le statut d’apatride ou qui s’est vu reconnaître le statut de réfugié, le bénéfice de la protection subsidiaire ou le statut d’apatride relève de l’une des clauses d’exclusion mentionnées aux articles L. 711-3 et L. 712-2 du présent code ou à l’article 1er de la convention de New York, du 28 septembre 1954, relative au statut des apatrides.

« Art. L. 713-6. – L’autorité judiciaire communique au directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et au président de la Cour nationale du droit d’asile, sur demande ou d’office, tout élément recueilli au cours d’une instance civile ou d’une information criminelle ou correctionnelle, y compris lorsque celle-ci s’est terminée par un non-lieu, de nature à faire suspecter le caractère frauduleux d’une demande d’asile ou du statut d’apatride. » – (Adopté.)

Chapitre Ier bis

Dispositions relatives au statut d’apatride

Article 4
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Article 5

Article 4 bis

(Non modifié)

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa de l’article L. 721-2 et au premier alinéa de l’article L. 721-3, les mots : « et apatrides » sont supprimés ;

1° bis Au 10° de l’article L. 313-11, la référence : « livre VII » est remplacée par la référence : « titre Ier bis du livre VIII » ;

2° Après le titre Ier du livre VIII, il est inséré un titre Ier bis ainsi rédigé :

« TITRE IER BIS

« LE STATUT D’APATRIDE

« CHAPITRE UNIQUE

« Art. L. 812-1. – La qualité d’apatride est reconnue à toute personne qui répond à la définition de l’article 1er de la convention de New York, du 28 septembre 1954, relative au statut des apatrides. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux apatrides en vertu de cette convention.

« Art. L. 812-2. – L’Office français de protection des réfugiés et apatrides reconnaît la qualité d’apatride aux personnes remplissant les conditions mentionnées à l’article L. 812-1, au terme d’une procédure définie par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 812-3. – L’Office français de protection des réfugiés et apatrides notifie par écrit sa décision au demandeur du statut d’apatride. Toute décision de rejet est motivée en fait et en droit et précise les voies et délais de recours.

« Aucune décision sur une demande de statut d’apatride ne peut naître du silence gardé par l’office.

« Art. L. 812-4. – L’Office français de protection des réfugiés et apatrides exerce la protection juridique et administrative des apatrides.

« Il assure cette protection, notamment l’exécution de la convention de New York, du 28 septembre 1954, précitée, dans les conditions prévues aux deux derniers alinéas de l’article L. 721-2.

« Il est habilité à délivrer aux apatrides les pièces nécessaires pour leur permettre d’exécuter les divers actes de la vie civile et à authentifier les actes et documents qui lui sont soumis, dans les conditions prévues à l’article L. 721-3.

« Art. L. 812-5. – Le ressortissant étranger qui a obtenu la qualité d’apatride et qui s’est vu délivrer la carte de séjour temporaire mentionnée au 10° de l’article L. 313-11 ou la carte de résident mentionnée au 9° de l’article L. 314-11 peut demander à bénéficier de la réunification familiale, dans les mêmes conditions que celles prévues à l’article L. 752-1 pour le ressortissant étranger qui a obtenu la qualité de réfugié.

« Art. L. 812-6. – L’article L. 752-2 est applicable au mineur non accompagné qui a obtenu la qualité d’apatride.

« Art. L. 812-7. – À moins que des raisons impérieuses de sécurité nationale ou d’ordre public ne s’y opposent, l’étranger reconnu apatride et titulaire d’un titre de séjour en cours de validité peut se voir délivrer un document de voyage dénommé “titre de voyage pour apatride” l’autorisant à voyager hors du territoire français.

« La durée de validité de ce document de voyage est fixée au IV de l’article 953 du code général des impôts.

« Ce document de voyage peut être retiré ou son renouvellement refusé lorsqu’il apparaît, après sa délivrance, que des raisons impérieuses de sécurité nationale ou d’ordre public le justifient.

« Art. L. 812-8. – Le présent titre est applicable, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la réforme du droit d’asile, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie. » – (Adopté.)

Chapitre II

Dispositions relatives à la procédure d’examen des demandes d’asile

Section 1

Dispositions générales

Article 4 bis
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Article 5 bis

Article 5

(Non modifié)

Le chapitre Ier du titre II du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 721-2 est ainsi modifié :

a) Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« L’office exerce en toute impartialité les missions mentionnées ci-dessus et ne reçoit, dans leur accomplissement, aucune instruction.

« L’anonymat des agents de l’office chargés de l’instruction des demandes d’asile et de l’entretien personnel mené avec les demandeurs est assuré. » ;

b) Au début du troisième alinéa, le mot : « Il » est remplacé par les mots : « L’office » ;

2° L’article L. 721-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « réfugiés », sont insérés les mots : « et bénéficiaires de la protection subsidiaire » ;

b) Le deuxième alinéa est supprimé ;

c) Après le mot : « timbre », la fin de la seconde phrase du dernier alinéa est supprimée ;

3° Sont ajoutés des articles L. 721-4 à L. 721-6 ainsi rédigés :

« Art. L. 721-4, L. 721-5 et L. 721-5-1. – (Supprimés)

« Art. L. 721-6. – L’office établit chaque année un rapport retraçant son activité, fournissant des données quantitatives et qualitatives présentées par sexe sur la demande d’asile et l’apatridie et présentant les actions de formation délivrées aux agents, notamment en matière de persécutions en raison du sexe et de prise en compte de la vulnérabilité des demandeurs d’asile. Ce rapport est transmis au Parlement et rendu public. » – (Adopté.)

Article 5
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Article 6

Article 5 bis

L’article L. 722-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est remplacé par sept alinéas ainsi rédigés :

« L’office est administré par un conseil d’administration comprenant :

« 1° Deux parlementaires désignés l’un par l’Assemblée nationale et l’autre par le Sénat ;

« 2° Un représentant de la France au Parlement européen désigné par décret ;

« 3° Deux personnalités qualifiées reconnues pour leurs compétences dans les domaines juridique et géopolitique, un homme et une femme, nommées par le Président de l’Assemblée nationale pour une durée de trois ans après avis conforme de la commission permanente de l’Assemblée nationale chargée des lois constitutionnelles, rendu à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ;

« 4° Deux personnalités qualifiées reconnues pour leurs compétences dans les domaines juridique et géopolitique, un homme et une femme, nommées par le Président du Sénat pour une durée de trois ans après avis conforme de la commission permanente du Sénat chargée des lois constitutionnelles, rendu à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ;

« 5° Neuf représentants de l’État, désignés dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État par le ministre de l’intérieur, le ministre chargé de l’asile, le ministre des affaires étrangères, le ministre de la justice, le ministre chargé des affaires sociales, le ministre chargé des droits des femmes, le ministre chargé des outre-mer et le ministre chargé du budget ;

« 6° Un représentant du personnel de l’office, désigné dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. » ;

2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Le délégué du haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés assiste aux séances du conseil d’administration et peut y présenter ses observations et ses propositions. » – (Adopté.)

Article 5 bis
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Article 7

Article 6

L’article L. 722-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, les mots : « ainsi que, dans les conditions prévues par les dispositions communautaires en cette matière, la liste des pays considérés au niveau national comme des pays d’origine sûrs, mentionnés au 2° de l’article L. 741-4. Il » sont remplacés par le mot : « et » ;

2° Après le deuxième alinéa, sont insérés cinq alinéas ainsi rédigés :

« Un pays est considéré comme un pays d’origine sûr lorsque, sur la base de la situation légale, de l’application du droit dans le cadre d’un régime démocratique et des circonstances politiques générales, il peut être démontré que, d’une manière générale et uniformément pour les hommes comme pour les femmes, il n’y est jamais recouru à la persécution, ni à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants et qu’il n’y a pas de menace en raison d’une violence qui peut s’étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle dans des situations de conflit armé international ou interne.

« Le conseil d’administration fixe la liste des pays considérés comme des pays d’origine sûrs, dans les conditions prévues à l’article 37 et à l’annexe I de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale.

« Il examine régulièrement la situation dans les pays considérés comme des pays d’origine sûrs.

« Il veille à l’actualité et à la pertinence des inscriptions. Il radie de la liste les pays ne remplissant plus les critères mentionnés au quatrième alinéa et peut, en cas d’évolution rapide et incertaine de la situation dans un pays, en suspendre l’inscription.

« Les présidents des commissions permanentes chargées des affaires étrangères et des commissions permanentes chargées des lois constitutionnelles de l’Assemblée nationale et du Sénat, une association de défense des droits de l’homme, une association de défense des droits des étrangers ou des demandeurs d’asile ou une association de défense des droits des femmes ou des enfants peuvent saisir le conseil d’administration, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, d’une demande tendant à l’inscription ou à la radiation d’un État sur la liste des pays considérés comme des pays d’origine sûrs. » ;

2° bis (Supprimé)

3° (Suppression maintenue)

M. le président. L'amendement n° 26, présenté par M. Buffet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 7, seconde phrase

Remplacer le mot :

quatrième

par le mot :

neuvième

La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Il s'agit d’un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.

Mme Cécile Cukierman. Nous nous abstenons !

(L'article 6 est adopté.)

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Article 6
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Article 7 bis

Article 7

Le chapitre III du titre II du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Au début, est ajoutée une section 1 intitulée : « Garanties procédurales et obligations du demandeur » et comprenant les articles L. 723-1 à L. 723-9-1, dans leur rédaction résultant des 2° à 5° quater du présent article ;

2° L’article L. 723-1 est ainsi modifié :

aa) La première phrase est complétée par les mots : « dans un délai de trois mois » ;

a) Après le mot : « demande », la fin de la seconde phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « dont l’examen relève de la compétence d’un autre État en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d’engagements identiques à ceux prévus par le même règlement avec d’autres États. » ;

b) Le second alinéa est supprimé ;

3° Les articles L. 723-2 et L. 723-3 sont ainsi rédigés :

« Art. L. 723-2. – I. – L’office statue en procédure accélérée lorsque :

« 1° Le demandeur provient d’un pays considéré comme un pays d’origine sûr en application de l’article L. 722-1 ;

« 2° Le demandeur a présenté une demande de réexamen qui n’est pas irrecevable.

« II. – L’office peut, de sa propre initiative, statuer en procédure accélérée lorsque :

« 1° Le demandeur a présenté de faux documents d’identité ou de voyage, fourni de fausses indications ou dissimulé des informations ou des documents concernant son identité, sa nationalité ou les modalités de son entrée en France afin de l’induire en erreur ou a présenté plusieurs demandes d’asile sous des identités différentes ;

« 2° Le demandeur n’a soulevé à l’appui de sa demande que des questions sans pertinence au regard de la demande d’asile qu’il formule ;

« 3° Le demandeur a fait à l’office des déclarations manifestement incohérentes et contradictoires, manifestement fausses ou peu plausibles qui contredisent des informations vérifiées relatives au pays d’origine.

« III. – L’office statue également en procédure accélérée lorsque l’autorité administrative chargée de l’enregistrement de la demande d’asile constate que :

« 1° Le demandeur refuse de se conformer à l’obligation de donner ses empreintes digitales conformément au règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relatif à la création d’Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l’application efficace du règlement (UE) n° 604/2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride et relatif aux demandes de comparaison avec les données d’Eurodac présentées par les autorités répressives des États membres et Europol à des fins répressives, et modifiant le règlement (UE) n° 1077/2011 portant création d’une agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice ;

« 2° Lors de l’enregistrement de sa demande, le demandeur présente de faux documents d’identité ou de voyage, fournit de fausses indications ou dissimule des informations ou des documents concernant son identité, sa nationalité ou les modalités de son entrée en France afin d’induire en erreur l’autorité administrative ou a présenté plusieurs demandes d’asile sous des identités différentes ;

« 3° Sans motif légitime, le demandeur qui est entré irrégulièrement en France ou s’y est maintenu irrégulièrement n’a pas présenté sa demande d’asile dans le délai de quatre-vingt-dix jours à compter de son entrée en France ;

« 4° Le demandeur ne présente une demande d’asile qu’en vue de faire échec à une mesure d’éloignement ;

« 5° La présence en France du demandeur constitue une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l’État.

« IV. – La procédure ne peut être mise en œuvre à l’égard de mineurs non accompagnés que dans les cas prévus au I et au 5° du III du présent article.

« V. – Dans tous les cas, l’office procède à un examen individuel de chaque demande dans le respect des garanties procédurales prévues au présent chapitre. Il peut décider de ne pas statuer en procédure accélérée lorsque cela lui paraît nécessaire pour assurer un examen approprié de la demande, en particulier si le demandeur provenant d’un pays inscrit sur la liste mentionnée au cinquième alinéa de l’article L. 722-1 invoque des raisons sérieuses de penser que son pays d’origine ne peut pas être considéré comme sûr en raison de sa situation personnelle et au regard des motifs de sa demande.

« VI. – La décision de l’office mentionnée au II, celle de l’autorité administrative mentionnée au III ou le refus de l’office de ne pas statuer en procédure accélérée prévu au V ne peut pas faire l’objet, devant les juridictions administratives de droit commun, d’un recours distinct du recours qui peut être formé, en application de l’article L. 731-2, devant la Cour nationale du droit d’asile à l’encontre de la décision de l’office.

« Art. L. 723-3. – Pendant toute la durée de la procédure d’examen de la demande, l’office peut définir les modalités particulières d’examen qu’il estime nécessaires pour l’exercice des droits d’un demandeur en raison de sa situation particulière ou de sa vulnérabilité.

« Pour l’application du premier alinéa, l’office tient compte des informations sur la vulnérabilité qui lui sont transmises en application de l’article L. 744-6 et des éléments de vulnérabilité dont il peut seul avoir connaissance au vu de la demande ou des déclarations de l’intéressé.

« L’office peut statuer par priorité sur les demandes manifestement fondées ainsi que sur les demandes présentées par des personnes vulnérables identifiées comme ayant des besoins particuliers en matière d’accueil en application de l’article L. 744-6 ou comme nécessitant des modalités particulières d’examen.

« Lorsque l’office considère que le demandeur d’asile, en raison notamment des violences graves dont il a été victime ou de sa minorité, nécessite des garanties procédurales particulières qui ne sont pas compatibles avec l’examen de sa demande en procédure accélérée en application de l’article L. 723-2, il peut décider de ne pas statuer ainsi. » ;

4° L’article L. 723-3-1 devient l’article L. 723-8 ;

4° bis L’article L. 723-4 devient l’article L. 723-9 et est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les modalités de désignation et d’habilitation de ces agents sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

5° L’article L. 723-4 est ainsi rétabli :

« Art. L. 723-4. – L’office se prononce, au terme d’une instruction unique, sur la reconnaissance de la qualité de réfugié ou sur l’octroi de la protection subsidiaire.

« Il appartient au demandeur de présenter, aussi rapidement que possible, tous les éléments nécessaires pour étayer sa demande d’asile. Ces éléments correspondent à ses déclarations et à tous les documents dont il dispose concernant son âge, son histoire personnelle, y compris celle de sa famille, son identité, sa ou ses nationalités, ses titres de voyage, les pays ainsi que les lieux où il a résidé auparavant, ses demandes d’asile antérieures, son itinéraire ainsi que les raisons justifiant sa demande.

« Il appartient à l’office d’évaluer, en coopération avec le demandeur, les éléments pertinents de la demande.

« L’office peut effectuer des missions déconcentrées dans les territoires.

« L’office statue sur la demande en tenant compte de la situation prévalant dans le pays d’origine à la date de sa décision, de la situation personnelle et des déclarations du demandeur, des éléments de preuve et d’information qu’il a présentés ainsi que, le cas échéant, des activités qu’il a exercées depuis le départ de son pays d’origine et qui seraient susceptibles de l’exposer dans ce pays à des persécutions ou à des atteintes graves. L’office tient compte également, le cas échéant, du fait que le demandeur peut se prévaloir de la protection d’un autre pays dont il est en droit de revendiquer la nationalité.

« Le fait que le demandeur a déjà fait l’objet de persécutions ou d’atteintes graves ou de menaces directes de telles persécutions ou atteintes constitue un indice sérieux du caractère fondé des craintes du demandeur d’être persécuté ou du risque réel de subir des atteintes graves, sauf s’il existe des éléments précis et circonstanciés qui permettent de penser que ces persécutions ou ces atteintes graves ne se reproduiront pas.

« Lorsqu’une partie de ses déclarations n’est pas étayée par des éléments de preuve, il n’est pas exigé du demandeur d’autres éléments de justification s’il s’est conformé aux exigences prévues au deuxième alinéa et si ses déclarations sont considérées comme cohérentes et crédibles et ne sont pas contredites par des informations dont dispose l’office. » ;

5° bis L’article L. 723-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 723-5. – L’office peut demander à la personne sollicitant l’asile de se soumettre à un examen médical.

« Le fait que la personne refuse de se soumettre à cet examen médical ne fait pas obstacle à ce que l’office statue sur sa demande.

« Les résultats des examens médicaux sont pris en compte par l’office parallèlement aux autres éléments de la demande.

« Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’asile et de la santé, pris après avis du directeur général de l’office, fixe les catégories de médecins qui peuvent pratiquer l’examen médical, ainsi que les modalités d’établissement des certificats médicaux. » ;

5° ter Sont ajoutés des articles L. 723-6 et L. 723-7 ainsi rédigés :

« Art. L. 723-6. – L’office convoque le demandeur à un entretien personnel. Il peut s’en dispenser s’il apparaît que :

« 1° L’office s’apprête à prendre une décision reconnaissant la qualité de réfugié à partir des éléments en sa possession ;

« 2° Des raisons médicales, durables et indépendantes de la volonté de l’intéressé interdisent de procéder à l’entretien.

« Chaque demandeur majeur est entendu individuellement hors de la présence des membres de sa famille. L’office peut entendre individuellement un demandeur mineur, dans les mêmes conditions, s’il estime raisonnable de penser qu’il aurait pu subir des persécutions ou des atteintes graves dont les membres de la famille n’auraient pas connaissance.

« L’office peut procéder à un entretien complémentaire en présence des membres de la famille s’il l’estime nécessaire à l’examen approprié de la demande.

« Le demandeur se présente à l’entretien et répond personnellement aux questions qui lui sont posées par l’agent de l’office. Il est entendu dans la langue de son choix, sauf s’il existe une autre langue dont il a une connaissance suffisante.

« Si le demandeur en fait la demande et si cette dernière apparaît manifestement fondée par la difficulté pour le demandeur d’exposer l’ensemble des motifs de sa demande d’asile, notamment ceux liés à des violences à caractère sexuel, l’entretien est mené, dans la mesure du possible, par un agent de l’office du sexe de son choix et en présence d’un interprète du sexe de son choix.

« Le demandeur peut se présenter à l’entretien accompagné soit d’un avocat, soit d’un représentant d’une association de défense des droits de l’homme, d’une association de défense des droits des étrangers ou des demandeurs d’asile, d’une association de défense des droits des femmes ou des enfants ou d’une association de lutte contre les persécutions fondées sur le sexe ou l’orientation sexuelle. Les conditions d’habilitation des associations et les modalités d’agrément de leurs représentants par l’office sont fixées par décret en Conseil d’État ; peuvent seules être habilitées les associations indépendantes à l’égard des autorités des pays d’origine des demandeurs d’asile et apportant une aide à tous les demandeurs. L’avocat ou le représentant de l’association ne peut intervenir qu’à l’issue de l’entretien pour formuler des observations.

« L’absence d’un avocat ou d’un représentant d’une association n’empêche pas l’office de mener un entretien avec le demandeur.

« Sans préjudice de l’article L. 723-11-1, l’absence sans motif légitime du demandeur, dûment convoqué à un entretien, ne fait pas obstacle à ce que l’office statue sur sa demande.

« Sans préjudice des nécessités tenant aux besoins d’une action contentieuse, la personne qui accompagne le demandeur à un entretien ne peut en divulguer le contenu.

« Les modalités d’organisation de l’entretien sont définies par le directeur général de l’office.

« Un décret en Conseil d’État fixe les cas et les conditions dans lesquels l’entretien peut se dérouler par un moyen de communication audiovisuelle pour des raisons tenant à l’éloignement géographique ou à la situation particulière du demandeur.

« Art. L. 723-7. – I. – L’entretien personnel mené avec le demandeur, ainsi que les observations formulées, font l’objet d’une transcription versée au dossier de l’intéressé.

« La transcription est communiquée, à leur demande, à l’intéressé ou à son avocat ou au représentant de l’association avant qu’une décision soit prise sur la demande.

« Dans le cas où il est fait application de la procédure accélérée prévue à l’article L. 723-2, cette communication peut être faite lors de la notification de la décision.

« II. – Par dérogation au titre Ier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, lorsque l’entretien personnel mené avec le demandeur a fait l’objet d’une transcription et d’un enregistrement sonore, le demandeur ne peut avoir accès à cet enregistrement, dans des conditions sécurisées définies par arrêté du ministre chargé de l’asile, qu’après la notification de la décision négative de l’office sur la demande d’asile et pour les besoins de l’exercice d’un recours contre cette décision. Cet accès peut être obtenu auprès de l’office ou, en cas de recours, auprès de la Cour nationale du droit d’asile. Dans le cas d’un recours exercé en application de l’article L. 213-9, cet accès peut également être rendu possible auprès du tribunal administratif jusqu’au 31 décembre 2016.

« Le fait, pour toute personne, de diffuser l’enregistrement sonore réalisé par l’office d’un entretien personnel mené avec un demandeur d’asile est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

« III. – Les modalités de transcription de l’entretien personnel prévu au I, ainsi que les cas dans lesquels cet entretien fait l’objet d’un enregistrement sonore ou est suivi d’un recueil de commentaires, sont fixés par décret en Conseil d’État. » ;

5° quater Après l’article L. 723-9, il est inséré un article L. 723-9-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 723-9-1. – La collecte par l’office d’informations nécessaires à l’examen d’une demande d’asile ne doit pas avoir pour effet de divulguer aux auteurs présumés de persécutions ou d’atteintes graves l’existence de cette demande d’asile ou d’informations la concernant.

« Sans préjudice des dispositions de l’article L. 733-3-1, ne sont pas communicables par l’office les informations versées au dossier du demandeur ou relatives à leurs sources dont la divulgation porterait atteinte à la sécurité des personnes physiques ou morales ayant fourni ces informations ou à celle des personnes auxquelles elles se rapportent ou serait préjudiciable à la collecte d’informations nécessaires à l’examen d’une demande d’asile. » ;

6° Sont ajoutées des sections 2 à 4 ainsi rédigées :

« Section 2

« Demandes irrecevables

« Art. L. 723-10. – L’office peut prendre une décision d’irrecevabilité écrite et motivée, sans vérifier si les conditions d’octroi de l’asile sont réunies, dans les cas suivants :

« 1° Lorsque le demandeur bénéficie d’une protection effective au titre de l’asile dans un État membre de l’Union européenne ;

« 2° Lorsque le demandeur bénéficie du statut de réfugié et d’une protection effective dans un État tiers et y est effectivement réadmissible ;

« 3° En cas de demande de réexamen lorsque, à l’issue d’un examen préliminaire effectué selon la procédure définie à l’article L. 723-14, il apparaît que cette demande ne répond pas aux conditions prévues au même article.

« La notification de la décision d’irrecevabilité au demandeur d’asile précise les voies et délais de recours.

« Lors de l’entretien personnel prévu à l’article L. 723-6, le demandeur est mis à même de présenter ses observations sur l’application du motif d’irrecevabilité mentionné aux 1° ou 2° du présent article à sa situation personnelle.

« L’office conserve la faculté d’examiner la demande présentée par un étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection pour un autre motif.

« Section 3

« Retrait d’une demande et clôture d’examen d’une demande

« Art. L. 723-11. – Lorsque le demandeur l’informe du retrait de sa demande d’asile, l’office peut clôturer l’examen de cette demande. Cette clôture est consignée dans le dossier du demandeur.

« Art. L. 723-11-1. – L’office peut prendre une décision de clôture d’examen d’une demande dans les cas suivants :

« 1° Le demandeur, sans motif légitime, n’a pas introduit sa demande à l’office dans les délais prévus par décret en Conseil d’État et courant à compter de la remise de son attestation de demande d’asile ou ne s’est pas présenté à l’entretien à l’office ;

« 2° Le demandeur refuse, de manière délibérée et caractérisée, de fournir des informations essentielles à l’examen de sa demande en application de l’article L. 723-4 ;

« 3° Le demandeur n’a pas informé l’office, dans un délai raisonnable, de son lieu de résidence ou de son adresse et ne peut être contacté aux fins d’examen de sa demande d’asile ;

« 4° Le demandeur a abandonné, sans motif légitime, le lieu où il était hébergé en application de l’article L. 744-3.

« L’office notifie par écrit sa décision motivée en fait et en droit au demandeur d’asile. Cette notification précise les voies et délais de recours.

« Art. L. 723-12. – Si, dans un délai inférieur à neuf mois à compter de la décision de clôture, le demandeur sollicite la réouverture de son dossier ou présente une nouvelle demande, l’office rouvre le dossier et reprend l’examen de la demande au stade auquel il avait été interrompu. Le dépôt par le demandeur d’une demande de réouverture de son dossier est un préalable obligatoire à l’exercice d’un recours devant les juridictions administratives de droit commun, à peine d’irrecevabilité de ce recours.

« Le dossier d’un demandeur ne peut être rouvert qu’une seule fois en application du premier alinéa.

« Passé le délai de neuf mois, la décision de clôture est définitive et la nouvelle demande est considérée comme une demande de réexamen.

« Section 4

« Demandes de réexamen

« Art. L. 723-13. – Constitue une demande de réexamen une demande d’asile présentée après qu’une décision définitive a été prise sur une demande antérieure, y compris lorsque le demandeur avait explicitement retiré sa demande antérieure, lorsque l’office a pris une décision définitive de clôture en application de l’article L. 723-11-1 ou lorsque le demandeur a quitté le territoire, même pour rejoindre son pays d’origine. Ces dispositions s’appliquent sans préjudice du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride.

« Si des éléments nouveaux sont présentés par le demandeur d’asile alors que la procédure concernant sa demande est en cours, ils sont examinés, dans le cadre de cette procédure, par l’office si celui-ci n’a pas encore statué ou par la Cour nationale du droit d’asile si celle-ci est saisie.

« Art. L. 723-14. – À l’appui de sa demande de réexamen, le demandeur indique par écrit les faits et produit tout élément susceptible de justifier un nouvel examen de sa demande d’asile.

« L’office procède à un examen préliminaire des faits ou des éléments nouveaux présentés par le demandeur intervenus après la décision définitive prise sur une demande antérieure ou dont il est avéré qu’il n’a pu en avoir connaissance qu’après cette décision.

« Lors de l’examen préliminaire, l’office peut ne pas procéder à un entretien.

« Lorsque, à la suite de cet examen préliminaire, l’office conclut que ces faits ou éléments nouveaux n’augmentent pas de manière significative la probabilité que le demandeur justifie des conditions requises pour prétendre à une protection, il peut prendre une décision d’irrecevabilité.

« Art. L. 723-15. – (Supprimé)

« Art. L. 723-16. – Les conditions et les délais d’instruction des demandes d’asile dont l’office est saisi sont fixés par décret en Conseil d’État. »

M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Leconte, Mme Tasca, MM. Kaltenbach, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après le mot :

délai

insérer le mot :

moyen

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Par cet amendement, nous entendons préciser que le délai de trois mois dont dispose l’OFPRA pour examiner les demandes en procédure normale – durée maximale que la commission a souhaité réintroduire dans le projet de loi – est un délai moyen.

Nous l’avons vu en première lecture, nous sommes tous ici attachés à ce que la loi fixe un délai. Toutefois, faire référence à un délai de trois mois sans indiquer qu’il s’agit d’une durée moyenne revient, comme je l’indiquais lors de la discussion générale, à contraindre l’OFPRA à statuer sur ces dossiers en trois mois, y compris sur ceux qui sont plus complexes et dont l’instruction nécessite plus de temps. S’agissant de ces derniers, l’office devra par conséquent leur opposer un refus et les renvoyer vers la CNDA.

A contrario, faire référence à un délai moyen de trois mois permettrait d’assigner à l’OFPRA un objectif global de réduction des délais d’examen de l’ensemble des demandes qui sont formulées auprès de lui.

J’attire l’attention de M. le rapporteur sur ce point, en espérant qu’il changera d’avis sur cette question : faire référence à un délai moyen de trois mois serait probablement la seule façon de s’assurer que le texte final du projet de loi mentionnera un délai pour l’examen des demandes soumises à l’OFPRA. Un amendement dans ce sens avait été déposé à l’Assemblée nationale, mais il est devenu sans l’objet lors de la discussion. Saisissons cette chance ; c’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Nous avons déjà longuement débattu de cette disposition en première lecture. La commission maintient sa position et émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Je me suis exprimée à ce sujet lors de mon intervention dans la discussion générale. Le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Mon cher collègue, la référence à un délai moyen est dénuée de toute valeur juridique. Autrement dit, ne soyons pas dupes : l’adoption de cet amendement aurait pour seul effet de supprimer le droit pour le demandeur à obtenir une réponse dans un délai fixé par la loi. Voilà quelle serait la conséquence !

Je le répète, la notion de délai moyen n’existe pas dans notre droit. Si l’on devait vraiment se référer à un délai moyen, il faudrait alors, à la fin de l’année, établir des statistiques, afin de mesurer la durée moyenne d’examen des dossiers par l’OFPRA.

Si le délai moyen n’est pas respecté, quelle est la sanction ? Que fait-on du droit pour les demandeurs d’asile, qui sont pressés, d’obtenir une réponse ?

C’est parce que cet amendement tend à vider de toute substance le droit que nous entendons reconnaître à tout demandeur d’asile d’obtenir une réponse rapidement – au besoin en lui accordant une indemnité dans le cas où l’OFPRA se montrerait défaillant et ne respecterait pas l’obligation légale qui lui est faite de répondre dans le délai fixé – que la commission y est défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Si la référence à un délai moyen de trois mois avait les conséquences que vous décrivez, monsieur le président de la commission, je pourrais vous entendre, mais tel n’est pas le cas : ce délai est indicatif.

Si l’OFPRA, quoi qu’il arrive, doit traiter chaque demande dans un délai maximum de trois mois, qu’en sera-t-il des dossiers plus complexes qui requièrent un délai plus important ? Devra-t-il opposer un refus et transmettre systématiquement le dossier à la CNDA, quitte à allonger le délai jusqu’à huit mois par exemple ? Je ne crois pas que ce soit très raisonnable. (M. le président de la commission des lois le conteste.)

Rien dans le texte ne nous permet de dire que l’introduction d’un délai de trois mois pour l’examen des demandes en procédure normale aura des conséquences positives, sauf peut-être sur les questions relatives au droit du travail, comme nous le verrons tout à l’heure.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 19, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 11 à 14

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Ces dispositions, combinées à celles de l’article 10, posent un problème de conformité à la Constitution, le principe d’égalité devant la justice et celui d’égalité des armes étant mis à mal.

En effet, le traitement d’une demande d’asile en procédure accélérée implique, en cas de rejet et de recours devant la CNDA, un passage devant un juge unique, qui statuera dans un délai expéditif de cinq semaines.

Or les alinéas 11 à 14 prévoient que l’OFPRA, partie à l’instance, décide, de façon discrétionnaire, en fonction de critères particulièrement subjectifs, du placement ou non d’une demande d’asile en procédure accélérée.

Il faut le rappeler, le respect du principe d’égalité devant la justice fait obstacle à ce que des justiciables se trouvant dans des conditions semblables soient jugés par des juridictions composées selon des règles différentes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la possibilité qui est offerte à l’OFPRA de statuer, sur son initiative, en procédure accélérée, au motif que cela entrerait en contradiction avec le principe d’égalité des armes devant la CNDA.

Je rappelle que, lors de la première lecture, tant en commission qu’en séance plénière, le Sénat a clarifié la rédaction de l’article 10, justement pour permettre au juge unique de renvoyer une affaire devant la formation collégiale, soit sur sa propre initiative, soit à la demande du requérant, précisément pour rétablir cette égalité de traitement et, partant, des armes.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. J’ai rappelé tout à l’heure dans mon propos que la priorisation du traitement des dossiers était assortie des mêmes garanties, lesquelles demeurent donc identiques, quelle que soit la procédure utilisée. De la même façon, comme vient de le dire M. le rapporteur, l’argument de l’atteinte au principe d’égalité est inopérant, puisque le projet de loi fixe des critères objectifs.

Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 27, présenté par M. Buffet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 22, seconde phrase

Remplacer le mot :

cinquième

par le mot :

dixième

La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il s'agit d’un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 42

Remplacer les mots :

résultats des examens

par les mots :

certificats

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Cet amendement vise à lever une ambiguïté dans la rédaction de l’alinéa 42 de l’article 7 du présent projet de loi, qui précise que l’OFPRA prend en compte les éléments résultant de l’examen médical auquel il a pu enjoindre à un demandeur de se soumettre parallèlement à la constitution de son dossier.

Il s’agit de préciser que l’office prend en compte les certificats médicaux établis par le médecin et non les résultats, dans la mesure où seul un médecin peut prendre connaissance d’un dossier médical.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 13, présenté par M. Leconte, Mme Tasca, MM. Kaltenbach, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 84

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. L’alinéa 84 prévoit que, si un demandeur d’asile a quitté sans autorisation son lieu d’hébergement, l’examen de sa demande est clôturé.

Non seulement le sort réservé à une demande d’asile ne devrait pas être lié à des considérations tenant à la présence ou non dans le lieu d’hébergement, mais encore le cas d’un abandon du lieu d’hébergement – ou du CADA – est déjà visé à l’article 15, qui dispose que le bénéfice des conditions matérielles d’accueil est suspendu si le demandeur d’asile a abandonné celui-ci.

Il en va de même si le demandeur n’a pas respecté, sans motif légitime, l’obligation qui lui est faite de se présenter aux autorités, s’il n’a pas répondu aux demandes d’informations ou s’il ne s’est pas rendu aux entretiens personnels organisés dans le cadre de la procédure d’asile.

Rien ne peut justifier qu’un même fait, à savoir l’abandon sans motif légitime du lieu d’hébergement, puisse à la fois conduire à la suspension des conditions matérielles d’accueil et surtout à la clôture de la demande d’asile. Cette dernière relève d’une problématique distincte des conditions liées à l’hébergement, et il n’est pas acceptable que, si une personne ne se présente pas pour une raison ou une autre, elle perde toute légitimité à voir sa demande examiner sur le fond.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Le Sénat et la commission des lois ont exprimé une position très claire : à partir du moment où il y a abandon du lieu d’hébergement, la procédure peut être clôturée par l’OFPRA.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 7
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Article 8

Article 7 bis

(Non modifié)

Le titre II du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :

« CHAPITRE IV

« Fin de la protection

« Art. L. 724-1. – Lorsque l’Office français de protection des réfugiés et apatrides envisage de mettre fin au statut de réfugié en application des articles L. 711-4 ou L. 711-6 ou au bénéfice de la protection subsidiaire en application de l’article L. 712-3, il en informe par écrit la personne concernée, ainsi que des motifs de l’engagement de cette procédure.

« Art. L. 724-2. – La personne concernée est mise à même de présenter par écrit ses observations sur les motifs de nature à faire obstacle à la fin du statut de réfugié ou du bénéfice de la protection subsidiaire.

« Si l’office estime toutefois nécessaire de procéder à un entretien personnel, celui-ci se déroule dans les conditions prévues à l’article L. 723-6.

« Art. L. 724-3. – La décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides mettant fin au statut de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire est notifiée par écrit à la personne concernée. Elle est motivée en fait et en droit et précise les voies et délais de recours. » – (Adopté.)

Section 2

Dispositions relatives à l’examen des demandes d’asile à la frontière

Article 7 bis
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Article 9

Article 8

I. – Le livre II du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 213-8, sont insérés des articles L. 213-8-1 et L. 213-8-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 213-8-1. – La décision de refuser l’entrée en France à un étranger qui se présente à la frontière et demande à bénéficier du droit d’asile ne peut être prise par le ministre chargé de l’immigration que si :

« 1° L’examen de la demande d’asile relève de la compétence d’un autre État en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d’engagements identiques à ceux prévus par le même règlement avec d’autres États ;

« 2° La demande d’asile est irrecevable en application de l’article L. 723-10 ;

« 3° Ou la demande d’asile est manifestement infondée.

« Constitue une demande d’asile manifestement infondée une demande qui, au regard des déclarations faites par l’étranger et des documents le cas échéant produits, est manifestement dénuée de pertinence au regard des conditions d’octroi de l’asile ou manifestement dépourvue de toute crédibilité en ce qui concerne le risque de persécutions ou d’atteintes graves.

« Sauf dans le cas où l’examen de la demande d’asile relève de la compétence d’un autre État, la décision de refus d’entrée ne peut être prise qu’après consultation de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui rend son avis dans un délai fixé par voie réglementaire et dans le respect des garanties procédurales prévues au chapitre III du titre II du livre VII. L’office tient compte de la vulnérabilité du demandeur d’asile. L’avocat ou le représentant d’une des associations mentionnées au huitième alinéa de l’article L. 723-6, désigné par l’étranger, est autorisé à pénétrer dans la zone d’attente pour l’accompagner à son entretien dans les conditions prévues au même article L. 723-6.

« Sauf si l’accès de l’étranger au territoire français constitue une menace grave pour l’ordre public, l’avis de l’office, s’il est favorable à l’entrée en France de l’intéressé au titre de l’asile, lie le ministre chargé de l’immigration.

« L’étranger autorisé à entrer en France au titre de l’asile est muni sans délai d’un visa de régularisation de huit jours. Dans ce délai, l’autorité administrative compétente lui délivre, à sa demande, une attestation de demande d’asile lui permettant d’introduire sa demande auprès de l’office.

« Art. L. 213-8-2. – Le 1° de l’article L. 213-8-1 n’est pas applicable en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin. » ;

2° L’article L. 213-9 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « asile », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « et, le cas échéant, d’une décision de transfert mentionnée à l’article L. 742-3 peut, dans les quarante-huit heures suivant la notification de ces décisions, en demander l’annulation au président du tribunal administratif. » ;

b) Le troisième alinéa est complété par les mots : « et, le cas échéant, contre la décision de transfert » ;

c) Après le mot : « administrative », la fin du cinquième alinéa est ainsi rédigée : « ou entachés d’une irrecevabilité manifeste non susceptible d’être couverte en cours d’instance. » ;

d) Au septième alinéa, les mots : « ne peut être exécutée avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures suivant sa » sont remplacés par les mots : « et, le cas échéant, la décision de transfert ne peuvent être exécutées avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures suivant leur » ;

e) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, les mots : « est annulé » sont remplacés par les mots : « et, le cas échéant, la décision de transfert sont annulés » ;

– à la seconde phrase, les mots : « une autorisation provisoire de séjour lui permettant de déposer » sont remplacés par les mots : « l’attestation de demande d’asile lui permettant d’introduire » ;

f) Après le mot : « asile », la fin du dernier alinéa est ainsi rédigée : « et, le cas échéant, la décision de transfert qui n’ont pas été contestées dans le délai prévu au premier alinéa ou qui n’ont pas fait l’objet d’une annulation dans les conditions prévues au présent article peuvent être exécutées d’office par l’administration. » ;

3° Le premier alinéa de l’article L. 221-1 est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« L’étranger qui arrive en France par la voie ferroviaire, maritime ou aérienne et qui n’est pas autorisé à entrer sur le territoire français peut être maintenu dans une zone d’attente située dans une gare ferroviaire ouverte au trafic international figurant sur une liste définie par voie réglementaire, dans un port ou à proximité du lieu de débarquement ou dans un aéroport, pendant le temps strictement nécessaire à son départ.

« Le présent titre s’applique également à l’étranger qui demande à entrer en France au titre de l’asile, le temps strictement nécessaire pour vérifier si l’examen de sa demande relève de la compétence d’un autre État en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d’engagements identiques à ceux prévus par le même règlement, si sa demande n’est pas irrecevable ou si elle n’est pas manifestement infondée.

« Lorsque l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, dans le cadre de l’examen tendant à déterminer si la demande d’asile n’est pas irrecevable ou manifestement infondée, considère que le demandeur d’asile, notamment en raison de sa minorité ou du fait qu’il a été victime de torture, de viol ou d’une autre forme grave de violence psychologique, physique ou sexuelle, nécessite des garanties procédurales particulières qui ne sont pas compatibles avec le maintien en zone d’attente, il est mis fin à ce maintien. L’étranger est alors muni d’un visa de régularisation de huit jours. Dans ce délai, l’autorité administrative compétente lui délivre, à sa demande, une attestation de demande d’asile lui permettant d’introduire cette demande auprès de l’office.

« Le maintien en zone d’attente d’un mineur non accompagné, le temps strictement nécessaire à l’examen tendant à déterminer si sa demande n’est pas irrecevable ou manifestement infondée, n’est possible que de manière exceptionnelle et seulement dans les cas prévus aux 1° et 2° du I, au 1° du II et au 5° du III de l’article L. 723-2. » ;

3° bis A Le même article L. 221-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. Il précise les modalités de prise en compte de la vulnérabilité du demandeur d’asile et, le cas échéant, de ses besoins particuliers. » ;

3° bis Après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 221-4, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Il est également informé des droits qu’il est susceptible d’exercer en matière de demande d’asile. » ;

4° À la fin de la seconde phrase de l’article L. 224-1, les mots : « un récépissé de demande d’asile » sont remplacés par les mots : « une attestation de demande d’asile lui permettant d’introduire sa demande d’asile ».

II. – À compter du 1er janvier 2017, le chapitre III du titre Ier du livre II du même code, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est ainsi modifié :

1° L’article L. 213-9 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« L’étranger qui a fait l’objet d’une décision de transfert mentionnée à l’article L. 742-3 peut, dans les quarante-huit heures suivant la notification de cette décision, en demander l’annulation au président du tribunal administratif. » ;

b) Après la première occurrence du mot : « décision », la fin du troisième alinéa est ainsi rédigée : « de transfert » ;

c) Le début du septième alinéa est ainsi rédigé : « La décision de transfert ne peut être exécutée avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures suivant sa notification... (le reste sans changement). » ;

d) Le début de l’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé : « Si la décision de transfert est annulée, il est... (le reste sans changement). » ;

e) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« La décision de transfert qui n’a pas été contestée dans le délai prévu au premier alinéa ou qui n’a pas fait l’objet d’une annulation dans les conditions prévues au présent article peut être exécutée d’office par l’administration. » ;

f) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La décision de refus d’entrée sur le territoire français au titre de l’asile en application du 1° de l’article L. 213-8-1 ne peut pas faire l’objet d’un recours distinct du recours qui peut être formé en application du présent article. » ;

2° Il est ajouté un article L. 213-10 ainsi rédigé :

« Art. L. 213-10. – L’étranger qui a fait l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire français au titre de l’asile en application des 2° et 3° de l’article L. 213-8-1 peut, dans les quarante-huit heures suivant la notification de cette décision, en demander l’annulation, au président de la Cour nationale du droit d’asile.

« Le président ou le président de formation de jugement qu’il désigne à cette fin statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État.

« Aucun autre recours ne peut être introduit contre la décision de refus d’entrée au titre de l’asile.

« L’étranger peut demander au président de la cour ou au président de formation de jugement désigné à cette fin le concours d’un interprète. L’étranger est assisté de son conseil s’il en a un. Il peut demander au président ou au président de formation de jugement désigné à cette fin qu’il lui en soit désigné un d’office.

« Par dérogation au quatrième alinéa, le président de la cour ou le président de formation de jugement désigné à cette fin peut, par ordonnance motivée, donner acte des désistements, constater qu’il n’y a pas lieu de statuer sur un recours et rejeter les recours ne relevant manifestement pas de la compétence de la cour ou entachés d’une irrecevabilité manifeste non susceptible d’être couverte en cours d’instance.

« L’audience se tient dans la salle d’audience attenante à la zone d’attente. Toutefois, afin d’assurer une bonne administration de la justice, eu égard aux conditions d’urgence attachées à ce recours, le président de la cour peut décider que la salle d’audience de la cour est reliée, en direct, par un moyen de communication audiovisuelle qui garantit la confidentialité de la transmission avec la salle d’audience attenante à la zone d’attente spécialement aménagée à cet effet ouverte au public, dans des conditions respectant les droits de l’intéressé à présenter leurs explications à la cour et s’y faire assister d’un conseil et d’un interprète. Une copie de l’intégralité du dossier est mise à sa disposition. Si l’intéressé est assisté d’un conseil et d’un interprète, ces derniers sont physiquement présents auprès de lui. Ces opérations donnent lieu à l’établissement d’un procès-verbal dans chacune des salles d’audience ou à un enregistrement audiovisuel ou sonore.

« La décision de refus d’entrée au titre de l’asile ne peut être exécutée avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures suivant sa notification ou, en cas de saisine du président de la cour, avant que ce dernier ou le président de formation de jugement désigné à cette fin n’ait statué.

« Le titre II du présent livre est applicable.

« Si le refus d’entrée au titre de l’asile est annulé, il est immédiatement mis fin au maintien en zone d’attente de l’étranger, qui est autorisé à entrer en France muni d’un visa de régularisation de huit jours. Dans ce délai, l’autorité administrative compétente lui délivre, à sa demande, l’attestation de demande d’asile lui permettant de déposer sa demande d’asile auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides.

« La décision de refus d’entrée au titre de l’asile qui n’a pas été contestée dans le délai prévu au premier alinéa ou qui n’a pas fait l’objet d’une annulation dans les conditions prévues au présent article peut être exécutée d’office par l’administration. »

III. – (Non modifié)

M. le président. L'amendement n° 20, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 25

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Un mineur non accompagné ne peut faire l’objet d’une mesure de maintien en zone d’attente. » ;

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Les pratiques aux frontières françaises concernant les mineurs se trouvent encore aujourd’hui en contradiction avec le droit international, la jurisprudence européenne et le droit interne. Rappelons le cas, au mois de juin 2015, de la petite Fanta Doumbia, Ivoirienne âgée de trois ans et demi, qui était retenue cinq jours sans ses parents en zone d’attente à l’aéroport de Roissy. À la même époque, la petite Andréane âgée de six ans s’est, elle aussi, retrouvée retenue dans cette zone d’attente. La fillette, qui voyageait seule, revenait du Cameroun.

Ces faits, s’ils s’avèrent emblématiques, ne restent pas isolés. Il devient urgent d’interdire explicitement le placement des mineurs demandeurs d’asile non accompagnés en zone d’attente.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Je souhaiterais tout d’abord rappeler les conditions requises pour permettre le maintien en zone d’attente des mineurs isolés.

Le maintien « n’est possible que de manière exceptionnelle » et seulement si le mineur provient d’un pays d’origine sûr, s’il formule une demande de réexamen, s’il a présenté de faux documents à l’OFPRA ou si sa présence sur le territoire constitue une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l’État.

Ce dispositif étant strictement encadré, avec des mesures ciblées et très précises, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement estime qu’il est nécessaire de conserver cette possibilité dans un cadre strictement défini par le projet de loi, afin d’éviter que les enfants ne soient victimes de réseaux d’immigration irrégulière ou de trafic d’êtres humains.

La procédure d’asile à la frontière permet un examen extrêmement attentif de la situation de ces mineurs. C’est seulement si le besoin de protection internationale ne trouve aucune justification qu’un réacheminement dans le pays d’origine et auprès de la famille est envisagé ; je tenais à le rappeler.

L’ouverture d’un droit inconditionnel à l’entrée des mineurs non accompagnés serait un signal extrêmement dommageable donné à l’intention des filières d’immigration clandestine.

Il est essentiel d’éviter les dévoiements des dispositifs à la frontière et le maintien des mineurs en zone d’attente remplit avant tout une fonction protectrice pour eux. Je rappelle que chaque mineur est encadré en permanence par un adulte et qu’un administrateur ad hoc est immédiatement désigné. De surcroît, les dispositions du présent projet de loi sont entièrement conformes au droit international et européen en la matière.

Le maintien en zone d’attente doit s’effectuer dans des conditions qui prennent en compte l’intérêt supérieur des enfants. Le ministre de l’intérieur vient d’ailleurs de rappeler aux forces de police le fait que les vérifications doivent être effectuées dans les délais les plus courts possibles, notamment lorsqu’il s’agit de très jeunes enfants.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.

Mme Esther Benbassa. La petite fille de six ans a été placée en zone d’attente parce qu’un agent de contrôle avait estimé que son visage ne correspondait pas à la photo figurant sur ses papiers d’identité. Il ne s’agissait aucunement de lutter contre les passeurs. Quant au cas de cette fillette de trois ans, on atteint des sommets… Dans les deux cas, ne dites pas qu’il s’agissait de garantir la sécurité. Qu’auraient pu faire de mal ces petits enfants ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 21, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 42 à 52

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Les alinéas 42 à 52 prévoient le transfert à la Cour nationale du droit d’asile du contentieux de l’entrée sur le territoire des demandeurs d'asile maintenus en zone d'attente, contentieux jusqu'à présent dévolu au tribunal administratif.

Ce transfert ne paraît pas souhaitable, car il est à craindre qu’une décision de refus d'entrée sur le territoire rendue par la CNDA ne lie par la suite cette même cour si elle est appelée à se prononcer sur la demande d’asile d’un requérant sorti de zone d’attente à la suite de l'intervention du juge des libertés et de la détention.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La position du Sénat sur ce sujet est constante depuis 2009. À partir du moment où le ministre est lié par la décision de l’OFPRA, il revient non pas au tribunal administratif, mais plutôt à la Cour nationale du droit d’asile, juge naturel de l’OFPRA, de statuer sur ce qui constitue malgré tout, sur le fond, une demande de protection internationale. En outre, l’OFPRA peut désormais déclarer irrecevable la demande ainsi formulée.

Il faut donc bien trancher une question de protection internationale. Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le présent projet de loi tend déjà à transformer en profondeur la CNDA. Or, de la capacité de la juridiction à se réformer dépend en partie la réussite de la réforme de l’asile dans son ensemble. Dans ces conditions, le transfert d’un contentieux nouveau qui est étranger à l’office et à l’organisation de la Cour n’apparaît pas opportun et présente, de notre point de vue, plus d’inconvénients que d’avantages.

C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 8.

(L'article 8 est adopté.)

Section 3

Dispositions relatives à l’examen des demandes d’asile en rétention

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Article 8
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 10

Article 9

I. – Le titre V du livre V du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :

« CHAPITRE VI

« Demandes d’asile en rétention

« Art. L. 556-1. – Lorsqu’un étranger placé en rétention en application de l’article L. 551-1 présente une demande d’asile, l’autorité administrative peut, si elle estime, sur le fondement de critères objectifs, que cette demande est présentée dans le seul but de faire échec à l’exécution de la mesure d’éloignement, maintenir l’intéressé en rétention le temps strictement nécessaire à l’examen de sa demande d’asile par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et, en cas de décision de rejet ou d’irrecevabilité de celui-ci, dans l’attente de son départ, sans préjudice de l’intervention du juge des libertés et de la détention. La décision de maintien en rétention est écrite et motivée. À défaut d’une telle décision, il est immédiatement mis fin à la rétention et l’autorité administrative compétente délivre à l’intéressé l’attestation mentionnée à l’article L. 741-1.

« L’étranger peut demander au président du tribunal administratif l’annulation de la décision de maintien en rétention dans les quarante-huit heures suivant sa notification. Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu’il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l’article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue après la notification de la décision de l’office relative au demandeur, dans un délai qui ne peut excéder soixante-douze heures, dans les conditions prévues au III de l’article L. 512-1 du présent code.

« Si, saisi dès le placement en rétention de l’étranger en application du même article L. 512-1, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu’il désigne à cette fin n’a pas encore statué sur ce premier recours, il statue sur les deux requêtes par une seule décision.

« En cas d’annulation de la décision de placement ou de maintien en rétention, il est immédiatement mis fin à la rétention et l’autorité administrative compétente délivre à l’intéressé l’attestation mentionnée à l’article L. 741-1. L’article L. 561-1 est applicable.

« À l’exception des cas mentionnés aux 3° et 4° de l’article L. 743-2, la mesure d’éloignement ne peut être mise à exécution avant que l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ait rendu sa décision ou, en cas de saisine du président du tribunal administratif, avant que ce dernier ou le magistrat désigné à cette fin ait statué.

« La demande d’asile est examinée selon la procédure accélérée prévue à l’article L. 723-2. L’office statue dans les conditions prévues aux articles L. 723-2 à L. 723-14 dans un délai de quatre-vingt-seize heures. Il tient compte de la vulnérabilité du demandeur d’asile.

« Il est mis fin à la rétention si l’office considère qu’il ne peut examiner la demande selon la procédure prévue à l’article L. 723-2 ou s’il reconnaît à l’étranger la qualité de réfugié ou lui accorde le bénéfice de la protection subsidiaire.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. Il précise les modalités de prise en compte de la vulnérabilité du demandeur d’asile et, le cas échéant, de ses besoins particuliers.

« Art. L. 556-2. – Les deuxième à cinquième alinéas de l’article L. 556-1 ne sont pas applicables en Guyane, en Guadeloupe, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin. »

II. – (Non modifié)

M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 10

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« En cas de décision de rejet, d’irrecevabilité ou de clôture prononcée par l’office, le président de la Cour nationale du droit d’asile ou le président de la formation de jugement qu’il désigne à cette fin, saisi d’un recours contre cette décision dans un délai de trois jours ouvrés suivant sa notification à l’étranger maintenu en rétention, statue dans un délai de trois jours ouvrés.

« L’exécution de la mesure d’éloignement ne peut intervenir avant l’expiration du délai de recours ou avant la notification de l’ordonnance du président qui peut mettre en œuvre les dispositions de l’article L. 733–2 ou renvoyer à une audience selon les modalités du deuxième alinéa de l’article L. 731–2. Dans ce dernier cas, il est immédiatement mis fin à la rétention et l’autorité administrative compétente délivre à l’intéressé l’attestation mentionnée à l’article L. 743–1. L’article L. 561–1 est applicable.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. En me fondant sur le fait que la CNDA est, comme l’a dit M. le rapporteur, le juge naturel de l’OFPRA, je me permets de présenter cet amendement.

Les directives européennes prévoient deux types de recours lorsque l'étranger maintenu en centre de rétention demande l’asile. Si l’OFPRA apporte une réponse négative, deux possibilités existent.

D'une part, un recours accéléré sur la légalité de la mesure de rétention décidée par l’autorité administrative. Le texte adopté par la commission des lois satisfait à ce besoin de recours suspensif.

D’autre part, un recours effectif contre les décisions de refus d'asile – y compris les décisions d'irrecevabilité et de clôture – qui donne lieu à un examen en fait et en droit de la demande et qui, s'il ne confère pas à l’intéressé le droit de se maintenir sur le territoire pendant ce temps, doit lui permettre de demander à une juridiction le droit de rester.

Or, sur ce point, le texte qui nous est soumis ne prévoit pas de recours effectif contre le refus d'asile.

La Cour nationale du droit d'asile étant le juge naturel des décisions de l'OFPRA, il est logique de lui conférer la compétence de se prononcer contre les décisions de rejet, en prévoyant un examen par un juge unique dans un délai de trois jours ouvrés compatible avec la rétention, en utilisant les possibilités qui ont été données à la CNDA par les ordonnances nouvelles.

Le contrôle du juge pourrait ainsi se limiter à vérifier si la demande n'est pas manifestement irrecevable ou ne présente pas d’éléments sérieux, auquel cas il statuerait selon les dispositions de l’article L. 733–2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui sont les ordonnances nouvelles ; à défaut, il déciderait de renvoyer à une audience selon les modalités prévues à l'article L. 731–2 du même code. Si la CNDA ne considérait pas que l’ordonnance nouvelle permettrait un rejet rapide, la personne considérée serait sortie du centre de rétention et serait délivrée une autorisation de maintien sur le territoire avec une possibilité d'assigner à résidence pour prévenir la fuite du demandeur qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement.

Cet amendement vise en définitive à s’assurer qu’un étranger placé en centre de rétention administrative et ayant formulé une demande d’asile rejetée par l’OFPRA dispose néanmoins d’un recours effectif sur cette décision.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement a trait au recours en urgence devant la CNDA pour les requêtes formulées par des personnes placées en rétention. La situation est un peu différente de celle qui est visée à l’article précédent.

Nous avons déjà discuté d’un dispositif similaire en première lecture, pour lequel la commission et moi-même n’avions pas caché notre intérêt. Cela va, d’ailleurs, dans le sens du transfert du contentieux de l’asile à la frontière devant la CNDA. Cependant, nous avions aussi expliqué clairement que, dans cette affaire, il fallait avancer pas à pas, et ne pas surcharger la Cour.

La première étape aurait pu concerner ce que nous avons évoqué tout à l’heure, c’est-à-dire le contentieux à la frontière transféré. Néanmoins, en l’occurrence, nous serions sans doute allés un peu trop vite, un peu trop loin. En revanche, il faut garder cette idée à l’esprit. Je rappelle que nous avions proposé de retenir l’intervention de la CNDA à la frontière plutôt qu’en rétention pour des questions de concentration sur Roissy de la majeure partie du contentieux.

Pour ces raisons, la commission sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Tout d’abord, le dispositif que vous proposez, monsieur Leconte, vient compliquer un peu plus le texte qui a été adopté par la commission des lois. Ensuite, il n’est pas envisageable de créer une telle procédure d’urgence devant la CNDA. Enfin, votre dispositif aurait un effet contraire à celui que vous souhaitez, puisqu’il aurait pour conséquence de prolonger le délai de rétention.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Monsieur Leconte, l'amendement n° 6 est-il maintenu ?

M. Jean-Yves Leconte. N’ayant aucune illusion sur l’issue…

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Funeste !

M. Jean-Yves Leconte. … de cet amendement, je le retire, monsieur le président.

J’insiste sur l’importance, pour la CNDA, de prendre progressivement tout l’espace qui lui revient en tant que juge de l’OFPRA. Au demeurant, je ne proposais pas de créer une nouvelle procédure puisque la procédure d’urgence existe déjà : ce sont les ordonnances nouvelles.

C’est une idée qu’il faudra garder à l’esprit.

M. le président. L'amendement n° 6 est retiré.

Je mets aux voix l'article 9.

(L'article 9 est adopté.)

Chapitre III

Dispositions relatives à la Cour nationale du droit d’asile

Article 9
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 12

Article 10

I. – Le titre III du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 731-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 731-2. – La Cour nationale du droit d’asile statue sur les recours formés contre les décisions de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides prises en application des articles L. 711-1 à L. 711-4, L. 712-1 à L. 712-3, L. 713-1 à L. 713-4, L. 723-1 à L. 723-8, L. 723-10, L. 723-13 et L. 723-14. À peine d’irrecevabilité, ces recours doivent être exercés dans le délai d’un mois à compter de la notification de la décision de l’office, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« La Cour nationale du droit d’asile statue en formation collégiale, dans un délai de cinq mois à compter de sa saisine. Toutefois, sans préjudice de l’application de l’article L. 733-2, lorsque la décision de l’office a été prise en application des articles L. 723-2 ou L. 723-10, le président de la Cour nationale du droit d’asile ou le président de formation de jugement qu’il désigne à cette fin statue dans un délai de cinq semaines à compter de sa saisine. De sa propre initiative ou à la demande du requérant, le président de la cour ou le président de formation de jugement désigné à cette fin peut, à tout moment de la procédure, renvoyer à la formation collégiale la demande s’il estime que celle-ci ne relève pas de l’un des cas prévus aux mêmes articles L. 723-2 et L. 723-10 ou qu’elle soulève une difficulté sérieuse. La cour statue alors dans les conditions prévues à la première phrase du présent alinéa. » ;

« La Cour statue sur les recours formés contre les décisions de refus d’entrée sur le territoire français au titre de l’asile en application des 2° et 3° de l’article L. 213-8-1 dans les conditions prévues à l’article L. 213-9-1.

1° bis A La dernière phrase de l’article L. 731-3 est complétée par les mots : « dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État » ;

1° bis Le chapitre Ier est complété par un article L. 731-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 731-4. – Le rapport d’activité de la Cour nationale du droit d’asile est rendu public. Il comprend notamment des données quantitatives et qualitatives présentées par sexe et les actions de formation des agents et des membres des formations de jugement, en particulier sur les persécutions en raison du sexe. » ;

2° L’article L. 732-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « sections » est remplacé par les mots : « formations de jugement » ;

b) Le 2° est complété par les mots : « , en raison de ses compétences dans les domaines juridique ou géopolitique » ;

c) Le 3° est ainsi modifié :

– après le mot : « qualifiée », sont insérés les mots : « de nationalité française, » ;

– après le mot : « État », la fin est ainsi rédigée : « , en raison de ses compétences dans les domaines juridique ou géopolitique. » ;

d) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :

« Les formations de jugement sont regroupées en chambres elles-mêmes regroupées en sections. Les nombres des sections et chambres sont fixés par arrêté du vice-président du Conseil d’État.

« Le président de formation de jugement désigné par le président de la Cour nationale du droit d’asile en application du deuxième alinéa de l’article L. 213-9-1 et du second alinéa de l’article L. 731-2 est nommé soit parmi les magistrats permanents de la cour, soit parmi les magistrats non permanents ayant au moins un an d’expérience en formation collégiale à la cour.

« La durée du mandat des membres de la Cour nationale du droit d’asile est fixée par décret en Conseil d’État. » ;

2° bis L’article L. 733-1 est ainsi modifié :

a) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Aux mêmes fins, le président de cette juridiction peut également prévoir la tenue d’audiences foraines au siège d’une juridiction administrative ou judiciaire, après accord du président de la juridiction concernée. » ;

b) À la fin du dernier alinéa, la référence : « deuxième alinéa » est remplacée par la référence : « présent article » ;

3° Après l’article L. 733-1, sont insérés des articles L. 733-1-1 et L. 733-1-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 733-1-1. – Les débats devant la Cour nationale du droit d’asile ont lieu en audience publique après lecture du rapport par le rapporteur. Toutefois, le huis clos est de droit si le requérant le demande. Le président de la formation de jugement peut également décider que l’audience aura lieu ou se poursuivra hors la présence du public, si les circonstances de l’affaire l’exigent. Il peut également interdire l’accès de la salle d’audience aux mineurs ou à certains d’entre eux.

« Art. L. 733-1-2. – (Supprimé) » ;

3° bis L’article L. 733-2 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « section », sont insérés les mots : « , de chambre ou de formation de jugement » ;

b) À la fin, les mots : « d’une formation collégiale » sont remplacés par les mots : « de l’une des formations prévues à l’article L. 731-2 » ;

c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. Il précise les conditions dans lesquelles le président et les présidents de section, de chambre ou de formation de jugement peuvent, après instruction, statuer par ordonnance sur les demandes qui ne présentent aucun élément sérieux susceptible de remettre en cause la décision d’irrecevabilité ou de rejet du directeur général de l’office. » ;

4° Le chapitre III est complété par des articles L. 733-3-1 et L. 733-4 ainsi rédigés :

« Art. L. 733-3-1. – La collecte par la Cour nationale du droit d’asile d’informations nécessaires à l’examen d’un recours contre une décision du directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ne doit pas avoir pour effet de divulguer aux auteurs présumés de persécutions ou d’atteintes graves l’existence de cette demande d’asile ou d’informations la concernant.

« Si, devant la cour, l’office s’oppose à la communication au requérant d’informations ou de leurs sources dont la divulgation porterait atteinte à la sécurité des personnes physiques ou morales ayant fourni ces informations ou à celle des personnes physiques ou morales auxquelles ces informations se rapportent, il saisit le président de la cour. L’office expose dans sa demande les motifs qui justifient cette confidentialité.

« Si le président ou le magistrat désigné à cette fin estime la demande de l’office justifiée, l’office produit tous les éléments d’information relatifs à la demande d’asile, à l’exclusion de ceux mentionnés au deuxième alinéa du présent article pour lesquels il ne transmet qu’un résumé. L’ensemble de ces éléments est communiqué à la formation de jugement, au rapporteur et au requérant.

« Si le président ou le magistrat désigné à cette fin estime que les informations et les sources mentionnées au même deuxième alinéa n’ont pas un caractère confidentiel et si l’office décide de maintenir cette confidentialité, il produit tous les éléments d’information relatifs à la demande d’asile, à l’exclusion de ceux qu’il juge confidentiels pour lesquels il ne transmet qu’un résumé. L’ensemble de ces éléments est communiqué à la formation de jugement, au rapporteur et au requérant.

« La cour ne peut fonder sa décision exclusivement sur des informations dont la source est restée confidentielle à l’égard du requérant.

« Art. L. 733-4. – Saisie d’un recours contre une décision du directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, la Cour nationale du droit d’asile statue, en qualité de juge de plein contentieux, sur le droit du requérant à une protection au titre de l’asile au vu des circonstances de fait dont elle a connaissance au moment où elle se prononce.

« La cour ne peut annuler une décision du directeur général de l’office et lui renvoyer l’examen de la demande d’asile que lorsqu’elle juge que l’office a pris cette décision sans procéder à un examen individuel de la demande ou en se dispensant, en dehors des cas prévus par la loi, d’un entretien personnel avec le demandeur et qu’elle n’est pas en mesure de prendre immédiatement une décision positive sur la demande de protection au vu des éléments établis devant elle.

« Sans préjudice du deuxième alinéa, le requérant ne peut utilement se prévaloir de l’enregistrement sonore de son entretien personnel qu’à l’appui d’une contestation présentée dans le délai de recours et portant sur une erreur de traduction ou un contresens, identifié de façon précise dans la transcription de l’entretien et de nature à exercer une influence déterminante sur l’appréciation du besoin de protection. »

II. – (Non modifié)

III. – La loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique est ainsi modifiée :

1° Au dernier alinéa de l’article 3, les mots : « commission des recours des réfugiés » sont remplacés par les mots : « Cour nationale du droit d’asile » ;

1° bis Le titre Ier de la première partie est complété par un article 9-4 ainsi rédigé :

« Art. 9-4. – Le bénéfice de l’aide juridictionnelle peut être demandé devant la Cour nationale du droit d’asile dans le cadre d’un recours dirigé contre une décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le délai de recours contentieux et au plus tard lors de l’introduction du recours. Son bénéfice est de plein droit, sauf si le recours est manifestement irrecevable. » ;

2° Au quatrième alinéa de l’article 14, les mots : « Commission des recours des réfugiés » sont remplacés par les mots : « Cour nationale du droit d’asile » ;

3° Après les mots : « président de », la fin du quatrième alinéa de l’article 16 est ainsi rédigée : « formation de jugement mentionnés à l’article L. 732-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. »

M. le président. L'amendement n° 22, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La Cour nationale du droit d’asile statue en formation collégiale, dans un délai de six mois à compter de sa saisine. Toutefois, sans préjudice de l’article L. 733-2, lorsque la décision de l’office a été prise en application des articles L. 723-2 ou L. 723-10, la cour statue dans un délai de trois mois. Si le président de la formation de jugement ou le président de la Cour nationale du droit d’asile estime, le cas échéant d’office et à tout moment de la procédure, que la demande ne relève pas de l’un des cas prévus aux mêmes articles L. 723-2 et L. 723-10 ou qu’elle soulève une difficulté sérieuse, la Cour nationale du droit d’asile statue dans les conditions de délai de la procédure normale, c’est-à-dire dans un délai de six mois. » ;

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Les dispositions de l’alinéa 4 de l’article 10 combinées à l’article 7 posent un problème de conformité à la Constitution.

En effet, les principes d’égalité devant la justice et d’égalité des armes sont mis à mal par la possibilité d’une audience de certains demandeurs d’asile devant un juge unique dans un délai exagérément raccourci de cinq semaines, sur décision de l’OFPRA ou de la préfecture au regard de critères purement subjectifs.

Or, en matière administrative, le Conseil constitutionnel n’habilite pas le pouvoir réglementaire à « fixer des catégories de matières ou des questions à juger qui ne reposeraient pas sur des critères objectifs ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Devant la Cour, le délai d’instruction des dossiers est de cinq mois en procédure normale et de cinq semaines en procédure accélérée. Par ailleurs, existe la possibilité d’un juge unique.

Ce point fait l’objet d’un accord entre l’Assemblée nationale et le Sénat, afin d’essayer de réduire le délai d’instruction des dossiers.

Aussi, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, qui porte atteinte à l’un des points importants de cette réforme.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Nous voterons contre cet amendement qui tend à remettre en cause un point central du dispositif prévu dans le projet de loi.

Je sais les réserves que peut susciter cette disposition de la part des avocats intervenant à la Cour nationale du droit d’asile. Toutefois, j’en suis convaincu, l’accélération des délais qui pourra en résulter, et alors qu’il existe déjà des formations à juge unique – ce sont les ordonnances nouvelles –, rendra notre dispositif d’asile plus attractif pour les réels demandeurs d’asile et démontrera que nous avons eu raison de l’adopter.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 23, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

Mme Esther Benbassa. Cet amendement n’a plus d’objet, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 23 n’a en effet plus d’objet.

L'amendement n° 28, présenté par M. Buffet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Remplacer la référence :

L. 213–9–1

par la référence :

L. 213–10

II. – Alinéa 17

1° Remplacer la référence :

L. 213–9–1

par la référence :

L. 213–10

2° Remplacer le mot :

second

par le mot :

deuxième

La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 11 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 40, II (Non modifié)

Rédiger ainsi ce paragraphe :

II. - Le code de justice administrative est ainsi modifié :

1° Au dernier alinéa de l'article L. 233–5, le mot : « section » est remplacé par les mots : « formation de jugement et de président de chambre » ;

2° Le second alinéa de l’article L. 234–3 est ainsi modifié :

a) La première phrase est ainsi modifiée :

- Après le mot : « section », sont insérés les mots : « ou de chambre » ;

- Les mots : « une fois » sont supprimés ;

b) La seconde phrase est supprimée ;

3° L’article L. 234–3–1 est abrogé.

4° À la première phrase de l'article L. 234–4, après les mots : « huit chambres », sont insérés les mots : « ou de président de section à la Cour nationale du droit d'asile ».

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Cet amendement vise à assouplir la législation actuellement en vigueur, qui limite le mandat des magistrats permanents nommés à la Cour nationale du droit d’asile à un mandat de trois ans renouvelable une fois. Il modifie en ce sens l’article L. 234–3 du code de justice administrative, en prévoyant que les mandats des magistrats permanents nommés à la CNDA peuvent être renouvelés à leur demande.

Il supprime, en conséquence, la règle de la double affectation, posée à l’article L. 234–3–1 du même code.

Cette règle évitait aux magistrats nommés à la CNDA de se retrouver sans affectation à la fin de leur mandat et avait été introduite en 2012 pour assurer le respect du principe d’inamovibilité.

Avec l’amendement qu’il vous est proposé d’adopter, la nomination d’un magistrat à la CNDA s’apparentera à une nomination comme une autre au sein de la juridiction administrative. Il participe donc de l’alignement de la CNDA sur le droit commun de la juridiction administrative, ce qui va dans le sens de l’ensemble des évolutions de cette juridiction depuis 2009, date de son rattachement au Conseil d’État.

En outre, le Gouvernement considère que la mesure proposée s’inscrit dans l’objectif de renforcer la professionnalisation de cette juridiction administrative spécialisée. En effet, il y aurait une incohérence à poser des conditions d’expérience et d’ancienneté pour qu’un magistrat puisse être nommé à temps plein à la CNDA, sans parallèlement permettre aux magistrats qui se sont spécialisés dans ce contentieux de continuer à exercer leurs fonctions.

Enfin, alors que le projet de loi opère une réforme ambitieuse de la CNDA et que plusieurs des magistrats permanents, nommés lors de la création de ces fonctions en 2009, voient leur mandat arriver à échéance, il ne paraît pas opportun de priver la juridiction de ses meilleurs éléments. Nul ne doute du professionnalisme et de l’investissement dont ont fait preuve ces magistrats pour la réussite de la réforme.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Exact !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Cet amendement reprend également certaines mesures qui ont déjà été adoptées conformes par le Sénat et l’Assemblée nationale et qui tendent à mettre les dispositions du code de justice administrative en cohérence avec la nouvelle organisation interne de la CNDA dessinée par ce projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement nous est aujourd’hui soumis pour la première fois depuis le début de l’examen du présent texte. Toutefois, nous comprenons les circonstances particulières qui ont conduit le Gouvernement à le déposer. Aussi, la commission des lois, qui l’a examiné ce matin, a émis un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Toutes les études et les discussions dont le fonctionnement de la CNDA a fait l’objet nous conduisent à considérer que cet amendement va dans le bon sens.

Certes, on peut regretter qu’il ait été déposé au dernier moment : peut-être aurions-nous pu débattre de telle ou telle disposition particulière.

En tout état de cause, je l’ai déjà indiqué, à l’instar de M. le rapporteur : nous avons d’autres ambitions pour la CNDA. Ces dernières exigent que cette instance continue, parallèlement, à améliorer son mode de fonctionnement.

À mon sens, les dispositions de cet amendement s’inscrivent dans cette perspective, en renforçant la stabilité de ces formations de jugement. Les décisions de la CNDA gagneront ainsi en robustesse. Bien entendu, nous voterons cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Monsieur Leconte, sous le Consulat, il y avait une chambre qui discutait sans voter, et une autre qui votait sans discuter : la chambre des bavards et la chambre des muets. (Sourires.)

Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)

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Chapitre IV

Dispositions relatives à l’accès à la procédure d’asile et à l’accueil des demandeurs

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Article 10
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 13

Article 12

(Non modifié)

Le chapitre Ier du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé :

« CHAPITRE IER

« Enregistrement de la demande d’asile

« Art. L. 741-1. – Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l’asile se présente en personne à l’autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d’engagements identiques à ceux prévus par le même règlement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« L’enregistrement a lieu au plus tard trois jours ouvrés après la présentation de la demande à l’autorité administrative compétente, sans condition préalable de domiciliation. Toutefois, ce délai peut être porté à dix jours ouvrés lorsqu’un nombre élevé d’étrangers demandent l’asile simultanément.

« L’étranger est tenu de coopérer avec l’autorité administrative compétente en vue d’établir son identité, sa ou ses nationalités, sa situation familiale, son parcours depuis son pays d’origine ainsi que, le cas échéant, ses demandes d’asile antérieures. Il présente tous documents d’identité ou de voyage dont il dispose.

« Lorsque l’enregistrement de sa demande d’asile a été effectué, l’étranger se voit remettre une attestation de demande d’asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d’État. La durée de validité de l’attestation est fixée par arrêté du ministre chargé de l’asile.

« La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l’étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l’article L. 211-1. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus aux 4° et 5° de l’article L. 743-2.

« Cette attestation n’est pas délivrée à l’étranger qui demande l’asile à la frontière ou en rétention.

« Art. L. 741-2 à L. 741-4. – (Non modifiés) »

M. le président. Je mets aux voix l'article 12.

(L'article 12 est adopté.)

Article 12
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Article 14

Article 13

I. – Le chapitre II du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé :

« CHAPITRE II

« Procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de la demande d’asile

« Art. L. 742-1. – Lorsque l’autorité administrative estime que l’examen d’une demande d’asile relève de la compétence d’un autre État qu’elle entend requérir, l’étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu’à la fin de la procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de sa demande et, le cas échéant, jusqu’à son transfert effectif à destination de cet État. L’attestation délivrée en application de l’article L. 741-1 mentionne la procédure dont il fait l’objet. Elle est renouvelable durant la procédure de détermination de l’État responsable et, le cas échéant, jusqu’à son transfert effectif à destination de cet État.

« Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l’État d’accorder l’asile à toute personne dont l’examen de la demande relève de la compétence d’un autre État.

« Art. L. 742-2. – L’autorité administrative peut, aux fins de mise en œuvre de la procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de la demande d’asile et du traitement rapide et du suivi efficace de cette demande, assigner à résidence le demandeur.

« La décision d’assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois et renouvelée une fois dans la même limite de durée, par une décision également motivée.

« Le demandeur astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés doit se présenter aux convocations de l’autorité administrative, répondre aux demandes d’information et se rendre aux entretiens prévus dans le cadre de la procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de sa demande d’asile. L’autorité administrative peut prescrire à l’étranger la remise de son passeport ou de tout document justificatif de son identité, dans les conditions prévues à l’article L. 611-2.

« Art. L. 742-3. – Sous réserve du second alinéa de l’article L. 742-1, l’étranger dont l’examen de la demande d’asile relève de la responsabilité d’un autre État peut faire l’objet d’un transfert vers l’État responsable de cet examen.

« Toute décision de transfert fait l’objet d’une décision écrite motivée prise par l’autorité administrative.

« Cette décision est notifiée à l’intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d’avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l’intéressé n’est pas assisté d’un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend.

« Art. L. 742-4. – I. – L’étranger qui a fait l’objet d’une décision de transfert mentionnée à l’article L. 742-3 peut, dans le délai de sept jours à compter de la notification de cette décision, en demander l’annulation au président du tribunal administratif.

« Le président ou le magistrat qu’il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l’article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine.

« Aucun autre recours ne peut être introduit contre la décision de transfert.

« L’étranger peut demander au président du tribunal ou au magistrat désigné par lui le concours d’un interprète. L’étranger est assisté de son conseil, s’il en a un. Il peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin qu’il lui en soit désigné un d’office.

« L’audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du rapporteur public, en présence de l’intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas.

« Toutefois, si, en cours d’instance, l’étranger est placé en rétention en application de l’article L. 551-1 du présent code ou assigné à résidence en application de l’article L. 561-2, il est statué selon la procédure et dans le délai prévus au II du présent article.

« II. – Lorsque qu’une décision de placement en rétention prise en application de l’article L. 551-1 ou d’assignation à résidence prise en application de l’article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert, l’étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l’annulation de la décision de transfert et de la décision de placement en rétention ou d’assignation à résidence.

« Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans le délai prévus au III de l’article L. 512-1.

« Il est également statué selon la même procédure et dans le même délai sur le recours formé contre une décision de transfert par un étranger qui fait l’objet, en cours d’instance, d’une décision de placement en rétention ou d’assignation à résidence. Dans ce cas, le délai de soixante-douze heures pour statuer court à compter de la notification par l’administration au tribunal de la décision de placement en rétention ou d’assignation à résidence.

« Art. L. 742-5. – Les articles L. 551-1 et L. 561-2 sont applicables à l’étranger faisant l’objet d’une décision de transfert dès la notification de cette décision.

« La décision de transfert ne peut faire l’objet d’une exécution d’office ni avant l’expiration d’un délai de sept jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l’article L. 551-1 ou d’assignation à résidence prise en application de l’article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s’il a été saisi.

« Art. L. 742-6. – Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L’autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l’intéressé. »

II à IV. – (Non modifiés)

M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Leconte, Mme Tasca, MM. Kaltenbach, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 12 et 22

Remplacer le mot :

sept

par le mot :

quinze

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Rassurez-vous, monsieur le président, je ne serai pas très « bavard ». (Sourires.) Je propose simplement de remplacer « sept » par « quinze », afin de porter à quinze jours le délai de recours contre une décision de transfert vers un autre État membre. Il s’agit là de l’application du règlement de Dublin.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission a décidé de s’en tenir à un délai, non de quinze, mais de sept jours. Aussi, elle émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Sagesse.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 13.

(L'article 13 est adopté.)

Article 13
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Article 14 bis

Article 14

I. – Le titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« CHAPITRE III

« Droit au maintien sur le territoire français

« Art. L. 743-1. – L’étranger dont l’examen de la demande d’asile relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu’à la notification de la décision de l’office ou, si un recours a été formé, jusqu’à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d’asile. L’attestation délivrée en application de l’article L. 741-1, dès lors que la demande d’asile a été introduite auprès de l’office, est renouvelable jusqu’à ce que l’office et, le cas échéant, la cour statuent.

« Art. L. 743-1-1 et L. 743-1-2. – (Suppression maintenue)

« Art. L. 743-2. – Par dérogation à l’article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l’article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l’attestation de demande d’asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque :

« 1° L’Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris une décision d’irrecevabilité en application des 1° ou 2° de l’article L. 723-10 ;

« 1° bis Le demandeur a informé l’office du retrait de sa demande d’asile en application de l’article L. 723-11 ;

« 2° L’office a pris une décision de clôture en application de l’article L. 723-11-1. L’étranger qui obtient la réouverture de son dossier en application de l’article L. 723-12 bénéficie à nouveau du droit de se maintenir sur le territoire français ;

« 3° L’étranger n’a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l’objet d’une décision d’irrecevabilité par l’office en application du 3° de l’article L. 723-10, qu’en vue de faire échec à une mesure d’éloignement ;

« 4° L’étranger présente une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d’une première demande de réexamen ;

« 5° L’étranger fait l’objet d’une décision définitive d’extradition vers un État autre que son pays d’origine ou d’une décision de remise sur le fondement d’un mandat d’arrêt européen ou d’une demande de remise par une cour pénale internationale.

« Les conditions de renouvellement et de retrait de l’attestation de demande d’asile sont fixées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 743-3 et L. 743-3-1. – (Suppression maintenue)

« Art. L. 743-4. – L’étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l’article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l’objet d’une mesure d’éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI.

« Art. L. 743-5. – Sans préjudice des articles L. 556-1 et L. 743-2, lorsque l’étranger sollicitant l’enregistrement d’une demande d’asile a fait l’objet, préalablement à la présentation de sa demande, d’une mesure d’éloignement prise en application du livre V, celle-ci, qui n’est pas abrogée par la délivrance de l’attestation prévue à l’article L. 741-1, ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de l’office, lorsqu’il s’agit d’une décision de rejet, d’irrecevabilité ou de clôture, ou, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d’asile contre une décision de rejet, avant la notification de la décision de la cour. »

II. – Le chapitre Ier du titre Ier du livre III du même code est ainsi modifié :

1° A À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 311-4, les mots : « d’un récépissé d’une » sont remplacés par les mots : « d’une attestation de » ;

 À l’article L. 311-5, les mots : « d’un récépissé de demande d’asile » sont remplacés par les mots : « d’une attestation mentionnée aux articles L. 741-1, L. 742-1 ou L. 743-1 » ;

2° Le même article L. 311-5 est complété par les mots : « ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire en application du livre VII » ;

 Après le même article L. 311-5, sont insérés des articles L. 311-5-1 et L. 311-5-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 311-5-1. – L’étranger auquel la qualité de réfugié est reconnue par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d’asile est admis à souscrire une demande de délivrance de carte de résident.

« Dans un délai de huit jours à compter de sa demande, il est mis en possession d’un récépissé de demande de titre de séjour, qui vaut autorisation de séjour d’une durée de validité de six mois renouvelable et qui porte la mention “reconnu réfugié”.

« Ce récépissé confère à son titulaire le droit d’exercer la profession de son choix dans les conditions prévues à l’article L. 314-4.

« Art. L. 311-5-2. – L’étranger qui s’est vu accorder le bénéfice de la protection subsidiaire par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d’asile est admis à souscrire une demande de délivrance de carte de séjour.

« Dans un délai de huit jours à compter de sa demande, il est mis en possession d’un récépissé de demande de titre de séjour, qui vaut autorisation de séjour d’une durée de validité de six mois renouvelable.

« Ce récépissé confère à son titulaire le droit d’exercer la profession de son choix dans les conditions prévues à l’article L. 314-4. »

M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Leconte, Mme Tasca, MM. Kaltenbach, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4, seconde phrase

Après le mot :

office,

insérer les mots :

vaut autorisation provisoire de séjour et

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement tend à préciser que l’attestation de demande d’asile remise au demandeur dont l’examen de la demande relève de la compétence de la France vaut autorisation provisoire de séjour. Il tient compte de la nécessité de garantir pleinement les droits des demandeurs d’asile dont la France reçoit la demande, un régime spécifique et distinct restant applicable à ceux dont la demande est soumise au règlement de Dublin III.

Un équilibre avait été atteint à l’Assemblée nationale : d’un côté, il était précisé que l’attestation remise au demandeur d’asile vaut autorisation provisoire de séjour et, de l’autre, il était assuré que le dépôt d’une demande d’asile et la délivrance d’une attestation d’asile n’emporteraient pas l’abrogation des éventuelles obligations de quitter le territoire français précédemment notifiées.

Nous proposons de restaurer cet équilibre via cet amendement, qui tend par ailleurs à expliciter davantage encore le contenu du droit au maintien.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Les dispositions de cet amendement sont évidemment contraires à la rédaction retenue par la commission.

De plus, je précise que la commission a supprimé la mention « vaut autorisation provisoire de séjour », au motif qu’elle était redondante avec la notion même de droit au maintien sur le territoire, comme Mme Boistard l’a expliqué en séance publique à l’Assemblée nationale, lors de la première lecture.

Aussi, l’avis est défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement considère que l’équilibre atteint par l’Assemblée nationale a été rompu en commission, au Sénat. Il souhaite le rétablir et émet, en conséquence, un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 24, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette attestation autorise à travailler en application de l’article L. 5221-5 du code du travail.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Le présent amendement tend à joindre, au droit au maintien sur le territoire, un accès inconditionnel au marché du travail, qui ne soit soumis ni à une autorisation préalable ni à une durée minimale de séjour du demandeur.

Certes, la directive Accueil fixe une telle durée de neuf mois. Cependant, cette directive ne constitue qu’un socle commun de garantie. Aussi, rien n’empêche d’aller plus loin en supprimant cette condition de durée.

En effet, il paraît aujourd’hui aussi irrationnel que contradictoire de continuer à dénoncer le prétendu coût des demandeurs d’asile sans offrir à ces derniers un véritable accès au travail et, partant, des moyens de subsistance qui leur seraient propres.

J’ajoute qu’en autorisant les demandeurs d’asile à travailler, on renforcerait la lutte contre le travail au noir, ce qui engendrerait des recettes fiscales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission et le Sénat ont préféré s’en tenir aux dispositions fixées par la directive Accueil, dont l’article 15 du présent texte assure la transposition. Aussi, l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. À nos yeux, le point d’équilibre atteint à l’issue des débats entre l’Assemblée nationale et le Sénat est satisfaisant. Mieux vaut s’en tenir là. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 24.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 14.

(L'article 14 est adopté.)

Article 14
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Article 15

Article 14 bis

Le titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un chapitre III bis ainsi rédigé :

« CHAPITRE III BIS

« Accompagnement des personnes déboutées de leur demande d’asile

« Art. L. 743-6. – L’étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé et auquel a été notifié une obligation de quitter le territoire français en application de l’article L. 511-1 peut être assigné à résidence, dans les conditions définies à l’article L. 561-2, dans un lieu d’hébergement où il peut lui être proposé une aide au retour dans les conditions prévues à l’article L. 512-5.

« Art. L. 743-7. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent chapitre. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 8 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 25 est présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Bosino, pour présenter l’amendement n° 8.

M. Jean-Pierre Bosino. La question du droit d’asile est-elle soluble dans les vicissitudes de la programmation et de l’exécution budgétaires ? Telle est l’interrogation qui nous vient à l’esprit à la lecture des dispositions de la section « orientation des demandeurs » de l’article 15.

À nos yeux, ces mesures confondent la faculté d’encadrer la gestion de la demande d’asile et le développement d’une logique de rétention administrative. En résulte une déplorable confusion entre exercice du droit d’asile et immigration dite « ordinaire ».

Par son avis sur les politiques européennes en matière de droit d’asile, dont cet article est une transposition, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, souligne la possibilité, laissée aux États membres, de recourir à la rétention des demandeurs d’asile. De surcroît, elle relève le risque de pérennisation en Europe d’un tel « système d’internement administratif ». Enfin, elle précise que cette solution ne saurait être considérée comme satisfaisante au regard des droits de l’homme et que « la référence à cette solution dans les directives n’interdit nullement à la France, comme aux autres pays, de considérer la rétention comme un pis-aller et de rechercher, avec persévérance, les moyens permettant de ne pas y recourir. »

Toutefois, il est regrettable que la directive Accueil se borne à affirmer la subsidiarité du placement en rétention, sans définir les mesures moins coercitives pouvant être efficacement appliquées. Cette omission ne doit pas dissuader la France de poursuivre dans cette voie ; c’est ce que vise notre amendement.

Certes, la France dispose des capacités d’accueil définies par le schéma national. Mais nous pouvons évidemment éprouver cette crainte : que la volonté affichée de réduire les délais d’instruction des demandeurs d’asile et le développement d’hébergement collectif des demandeurs n’éloignent effectivement l’exercice du droit d’asile d’un respect de la spécificité des situations vécues à ce titre.

Un centre d’accueil de demandeurs d’asile ne peut devenir, par la force des choses et les nécessités d’une certaine conception de la dépense publique, une forme de centre de rétention administrative. Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 25.

Mme Esther Benbassa. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. En première lecture, notre commission des lois et, plus largement, le Sénat ont décidé de retenir un amendement déposé par notre collègue Valérie Létard et émanant, en réalité, du rapport établi par elle-même et le député Jean-Louis Touraine. Si un demandeur est débouté de sa demande d’asile, ce document indique qu’il faut s’efforcer d’organiser la situation.

À cet égard, je rappelle qu’une expérimentation est en cours en Moselle : la réflexion et le travail sont déjà engagés.

Aujourd’hui, la commission n’a pas de raison de revenir sur sa décision, bien au contraire. Aussi, elle émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à ce qu’un meilleur accompagnement des personnes déboutées de leur demande d’asile soit assuré. Le plan « Répondre au défi des migrations, respecter les droits, faire respecter le droit », présenté en conseil des ministres le 17 juin dernier, fait référence au dispositif de prise en charge des personnes déboutées, qui – M. le rapporteur l’a rappelé – est en cours d’expérimentation.

En revanche, il n’est pas nécessaire de mentionner dans la loi l’expérimentation et l’éventuelle création de ces centres.

Aussi, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée. Peut-être cette dernière estimera-t-elle qu’il convient, symboliquement, de maintenir ce point dans le présent texte. À nos yeux, une telle mention n’est pas nécessaire, mais elle ne pose pas non plus de problème particulier.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 et 25.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 14 bis.

(L'article 14 bis est adopté.)

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Article 14 bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 16

Article 15

Le titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :

« CHAPITRE IV

« Conditions d’accueil des demandeurs d’asile

« Section 1

« Dispositif national d’accueil

« Art. L. 744-1. – Les conditions matérielles d’accueil du demandeur d’asile, au sens de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale, sont proposées à chaque demandeur d’asile par l’Office français de l’immigration et de l’intégration après l’enregistrement de la demande d’asile par l’autorité administrative compétente, en application du présent chapitre. Les conditions matérielles d’accueil comprennent les prestations et l’allocation prévues au présent chapitre.

« L’office peut déléguer à des personnes morales, par convention, la possibilité d’assurer certaines prestations d’accueil, d’information et d’accompagnement social et administratif des demandeurs d’asile pendant la période d’instruction de leur demande.

« Le demandeur d’asile qui ne dispose ni d’un hébergement, au sens du 1° de l’article L. 744-3, ni d’un domicile stable bénéficie du droit d’élire domicile auprès d’une personne morale conventionnée à cet effet pour chaque département, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 744-2. – Le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile fixe la répartition des places d’hébergement destinées aux demandeurs d’asile sur le territoire national. Il est arrêté par le ministre chargé de l’asile, après avis des ministres chargés du logement et des affaires sociales. Il est transmis au Parlement.

« Un schéma régional est établi par le représentant de l’État dans la région, après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement concerné et en conformité avec le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile. Il fixe les orientations en matière de répartition des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile sur le territoire de la région et présente le dispositif régional prévu pour l’enregistrement des demandes ainsi que le suivi et l’accompagnement des demandeurs d’asile. Il tient compte du plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées et est annexé à ce dernier, en application du troisième alinéa de l’article 2 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement.

« Sans préjudice de la participation financière demandée aux demandeurs d’asile en fonction de leurs ressources, les frais d’accueil et d’hébergement dans les lieux d’hébergement destinés aux demandeurs d’asile sont pris en charge par l’État.

« Art. L. 744-3. – Les décisions d’admission dans un lieu d’hébergement pour demandeurs d’asile, de sortie de ce lieu et de changement de lieu sont prises par l’Office français de l’immigration et de l’intégration, après consultation du directeur du lieu d’hébergement, sur la base du schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et, le cas échéant, du schéma régional prévus à l’article L. 744-2 et en tenant compte de la situation du demandeur.

« Sont des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile :

« 1° Les centres d’accueil pour demandeurs d’asile mentionnés à l’article L. 348-1 du code de l’action sociale et des familles ;

« 2° Toute structure bénéficiant de financements du ministère chargé de l’asile pour l’accueil de demandeurs d’asile et soumise à déclaration, au sens de l’article L. 322-1 du même code.

« Les demandeurs d’asile accueillis dans les lieux d’hébergement mentionnés aux 1° et 2° du présent article peuvent bénéficier d’un accompagnement social et administratif.

« Le représentant de l’État dans le département peut s’opposer pour des motifs d’ordre public à la décision d’admission d’un demandeur d’asile dans un lieu d’hébergement. Dans ce cas, l’office est tenu de prendre une nouvelle décision d’admission. L’office s’assure de la présence dans les lieux d’hébergement des personnes qui y ont été orientées pour la durée de la procédure.

« Art. L. 744-4. – Dans le cadre de sa mission d’accueil des demandeurs d’asile définie à l’article L. 5223-1 du code du travail, l’Office français de l’immigration et de l’intégration coordonne la gestion de l’hébergement dans les lieux d’hébergement mentionnés à l’article L. 744-3 du présent code.

« À cette fin, il conçoit, met en œuvre et gère, dans les conditions prévues par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, un traitement automatisé de données relatives aux capacités des lieux d’hébergement, à l’utilisation de ces capacités et aux demandeurs d’asile qui y sont accueillis.

« Les personnes morales chargées de la gestion des lieux d’hébergement mentionnés à l’article L. 744-3 sont tenues de déclarer à l’office, dans le cadre du traitement automatisé de données, les places disponibles dans les lieux d’hébergement. Ces personnes morales sont tenues d’alerter l’autorité administrative compétente en cas d’absence injustifiée des personnes qui y ont été orientées pour la durée de la procédure et en cas de comportement violent ou de manquement grave au règlement du lieu d’hébergement.

« Art. L. 744-5. – Les lieux d’hébergement mentionnés à l’article L. 744-3 accueillent les demandeurs d’asile pendant la durée d’instruction de leur demande d’asile ou jusqu’à leur transfert effectif vers un autre État européen. Cette mission prend fin à l’expiration du délai de recours contre la décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou à la date de la notification de la décision de la Cour nationale du droit d’asile ou à la date du transfert effectif vers un autre État, si sa demande relève de la compétence de cet État.

« Les personnes morales qui assurent la gestion du lieu d’hébergement peuvent exiger le versement d’une caution, dans des conditions définies par arrêté. Le montant de la caution est restitué à la sortie du lieu d’hébergement, déduit le cas échéant des sommes dues par le bénéficiaire au titre de son hébergement.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles les personnes s’étant vu reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire peuvent être maintenues dans un lieu d’hébergement mentionné au même article L. 744-3 à titre subsidiaire et temporaire.

« Sauf décision motivée de l’autorité administrative compétente ou de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, les personnes ayant fait l’objet d’une décision de rejet définitive ne peuvent se maintenir dans un lieu d’hébergement mentionné au même article L. 744-3. À l’expiration, le cas échéant, du délai de maintien, l’autorité administrative compétente ou l’Office français de l’immigration et de l’intégration peut, après mise en demeure restée infructueuse, demander en justice qu’il soit enjoint à cet occupant sans titre d’évacuer ce lieu. »

« Le quatrième alinéa du présent article est applicable aux personnes qui ont un comportement violent ou commettent des manquements graves au règlement du lieu d’hébergement.

« La demande est portée devant le président du tribunal administratif, qui statue sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative et dont l’ordonnance est immédiatement exécutoire.

« Section 2

« Évaluation des besoins

« Art. L. 744-6. – À la suite de la présentation d’une demande d’asile, l’Office français de l’immigration et de l’intégration est chargé de procéder, dans un délai raisonnable, à une évaluation de la vulnérabilité de ce dernier afin de déterminer, le cas échéant, ses besoins particuliers en matière d’accueil. Ces besoins particuliers sont également pris en compte s’ils deviennent manifestes à une étape ultérieure de la procédure d’asile. Dans la mise en œuvre des droits des demandeurs d’asile et pendant toute la période d’instruction de leur demande, il est tenu compte de la situation spécifique des personnes vulnérables.

« L’évaluation de la vulnérabilité vise, en particulier, à identifier les mineurs, les mineurs non accompagnés, les personnes en situation de handicap, les personnes âgées, les femmes enceintes, les parents isolés accompagnés d’enfants mineurs, les victimes de la traite des êtres humains, les personnes atteintes de maladies graves, les personnes souffrant de troubles mentaux et les personnes qui ont subi des tortures, des viols ou d’autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, telles que des mutilations sexuelles féminines.

« L’évaluation de la vulnérabilité du demandeur est effectuée par des agents de l’Office français de l’immigration et de l’intégration ayant reçu une formation spécifique à cette fin.

« Lors de l’évaluation, le demandeur est informé de sa possibilité de bénéficier de l’examen de santé gratuit prévu à l’article L. 321-3 du code de la sécurité sociale.

« Les informations attestant d’une situation particulière de vulnérabilité sont transmises, après accord du demandeur d’asile, par l’Office français de l’immigration et de l’intégration à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides. L’évaluation de la vulnérabilité par l’Office français de l’immigration et de l’intégration ne préjuge pas de l’appréciation par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides de la vulnérabilité du demandeur en application de l’article L. 723-3 ou du bien-fondé de sa demande.

« Ces informations peuvent faire l’objet d’un traitement automatisé, dans les conditions fixées par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. Ce décret est pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés en tant qu’il précise les modalités de transmission à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides des données relatives à la vulnérabilité et aux besoins particuliers des demandeurs d’asile, la durée de conservation et les conditions de mise à jour des informations enregistrées, les catégories de personnes pouvant y accéder et les modalités d’habilitation de celles-ci ainsi que, le cas échéant, les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leur droit d’accès.

« Section 3

« Orientation des demandeurs

« Art. L. 744-7. – Le bénéfice des conditions matérielles d’accueil, définies à l’article L. 348-1 du code de l’action sociale et des familles et à l’article L. 744-1 du présent code, est subordonné à l’acceptation par le demandeur d’asile de l’hébergement proposé, déterminé en tenant compte de ses besoins, de sa situation au regard de l’évaluation prévue à l’article L. 744-6 et des capacités d’hébergement disponibles.

« Le demandeur est préalablement informé, dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend, des conséquences de l’acceptation ou du refus de l’hébergement proposé.

« Sans préjudice de l’article L. 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles, en cas de refus ou d’abandon de l’hébergement proposé en application du premier alinéa du présent article, le demandeur d’asile ne peut être hébergé dans un établissement mentionné au 8° du I de l’article L. 312-1 du même code et à l’article L. 322-1 dudit code ou bénéficier de l’application de l’article L. 300-1 du code de la construction et de l’habitation.

« Après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, un décret en Conseil d’État détermine les informations qui doivent être fournies par l’Office français de l’immigration et de l’intégration au service intégré d’accueil et d’orientation pour la mise en œuvre du troisième alinéa du présent article.

« Art. L. 744-8. – Sauf situation particulière du demandeur, le bénéfice des conditions matérielles d’accueil est :

« 1° Suspendu si, sans motif légitime, le demandeur d’asile a abandonné son lieu d’hébergement déterminé en application de l’article L. 744-7, n’a pas respecté l’obligation de se présenter aux autorités, n’a pas répondu aux demandes d’informations ou ne s’est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d’asile ;

« 2° (Supprimé)

« 3° Retiré si le demandeur d’asile a dissimulé ses ressources financières ou a fourni des informations mensongères relatives à sa situation familiale ou en cas de comportement violent ou de manquement grave au règlement du lieu d’hébergement ;

« 4° Refusé si le demandeur présente une demande de réexamen de sa demande d’asile ou s’il n’a pas sollicité l’asile, sans motif légitime, dans le délai prévu au 3° du III de l’article L. 723-2 ;

« 5° (Supprimé)

« La décision de suspension, de retrait ou de refus des conditions matérielles d’accueil est écrite et motivée. Elle prend en compte la vulnérabilité du demandeur.

« Lorsque le bénéfice des conditions matérielles d’accueil a été suspendu, le demandeur d’asile peut en demander le rétablissement à l’Office français de l’immigration et de l’intégration.

« Section 4

« Allocation pour demandeur d’asile

« Art. L. 744-9. – Le demandeur d’asile qui a accepté les conditions matérielles d’accueil proposées en application de l’article L. 744-1 bénéficie d’une allocation pour demandeur d’asile s’il satisfait à des conditions d’âge et de ressources. L’Office français de l’immigration et de l’intégration ordonne son versement dans l’attente de la décision définitive lui accordant ou lui refusant une protection au titre de l’asile ou jusqu’à son transfert effectif vers un autre État responsable de l’examen de sa demande d’asile.

« Le versement de l’allocation prend fin au terme du mois qui suit celui de la notification de la décision définitive concernant cette demande. Son montant est révisé, le cas échéant, une fois par an, en fonction de l’évolution des prix, hors tabac, prévue dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances de l’année.

« L’allocation pour demandeur d’asile est incessible et insaisissable. Pour son remboursement, en cas de versement indu, l’Office français de l’immigration et de l’intégration peut procéder à des retenues sur les échéances à venir dues à quelque titre que ce soit. Le montant des retenues ne peut dépasser un plafond, déterminé selon des modalités prévues par voie réglementaire, sauf en cas de remboursement intégral de la dette en un seul versement si le bénéficiaire opte pour cette solution.

« Les blocages de comptes courants de dépôts ou d’avances ne peuvent avoir pour effet de faire obstacle à l’insaisissabilité de l’allocation.

« Un décret définit le barème de l’allocation pour demandeur d’asile, en prenant en compte les ressources de l’intéressé, son mode d’hébergement et, le cas échéant, les prestations offertes par son lieu d’hébergement. Le barème de l’allocation pour demandeur d’asile prend en compte le nombre d’adultes et d’enfants composant la famille du demandeur d’asile et accompagnant celui-ci.

« Ce décret précise, en outre, les modalités de versement de l’allocation pour demandeur d’asile.

« Art. L. 744-10. – (Non modifié)

« Section 5

« Accès au marché du travail

« Art. L. 744-11. – L’accès au marché du travail peut être autorisé au demandeur d’asile lorsque l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, pour des raisons qui ne sont pas imputables au demandeur, n’a pas statué sur la demande d’asile dans un délai de neuf mois à compter de l’introduction de la demande. Dans ce cas, le demandeur d’asile est soumis aux règles de droit commun applicables aux travailleurs étrangers pour la délivrance d’une autorisation de travail.

« Le demandeur d’asile qui accède au marché du travail, dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article, bénéficie des actions de formation professionnelle continue prévues à l’article L. 6313-1 du code du travail. »

M. le président. L'amendement n° 4 rectifié, présenté par Mme Létard, MM. Bonnecarrère et Guerriau, Mme Joissains, M. Tandonnet, Mme Gatel, M. Capo-Canellas, Mme Jouanno et MM. Bockel, Médevielle, Roche et Cigolotti, est ainsi libellé :

Alinéa 10, première phrase

Remplacer les mots :

après avis du comité régional de l'habitat et de l'hébergement concerné

par les mots :

en concertation avec les collectivités et établissements compétents en matière d’habitat

La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. J’ai évoqué cet amendement lors de la discussion générale. Il est relatif à la consultation de la conférence territoriale de l’action publique sur le schéma régional déclinant le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile, qui a été supprimée du texte, à juste titre. Une telle consultation n’entrait pas, en effet, dans les attributions de cette instance.

Son remplacement par un avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement, ou CRHH, ne nous apparaît toutefois pas comme une solution satisfaisante. Il importe avant tout que la création de nouvelles places d’hébergement pour les demandeurs d’asile s’effectue en association avec les élus des communes et des intercommunalités concernées, qui doivent être consultés et participer à l’élaboration de tels projets.

Cet amendement vise donc à revenir à la rédaction adoptée par le Sénat en première lecture, qui permet d’associer plus étroitement les collectivités à l’élaboration de ces projets.

À mon sens, prendre l’avis du CRHH ne permettra pas, loin de là, aux élus locaux d’obtenir satisfaction dans la conception de ce schéma.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Je demande à notre collègue de retirer son amendement, qui tend à rétablir le texte du Sénat prévoyant une consultation des collectivités et des établissements compétents en matière d’habitat préalablement à l’élaboration du schéma régional d’accueil. Celui-ci constitue une nouveauté importante introduite dans ce texte : un dispositif d’accueil directif.

Nous nous sommes heurtés à une difficulté : s’il est souhaitable de consulter les collectivités locales, il reste toutefois à définir lesquelles sont concernées, à l’échelle régionale. Faut-il consulter toutes les communes, une seule commune, une communauté de communes ? C’est une question complexe. (Mme Valérie Létard fait un signe de dénégation.)

L’Assemblée nationale a maintenu le principe d’une consultation, mais a prévu que celle-ci se ferait par le biais du comité régional de l’habitat et de l’hébergement.

Selon la loi, le CRHH est « chargé de procéder aux concertations permettant de mieux répondre aux besoins en matière d’habitat et d’hébergement et de favoriser la cohérence des politiques locales ». Sa composition permet d’associer les collectivités territoriales, leurs groupements et les professionnels intervenant dans le domaine de l’habitat et du logement.

Il nous semble plus réaliste et plus efficace de consulter les collectivités territoriales et les organismes compétents en matière d’habitat par le biais de cette structure organisée que de prévoir une consultation ad hoc, à l’échelle de la région, de l’ensemble des collectivités et des organismes compétents en matière d’habitat.

Enfin, les CRHH coordonnent déjà les plans locaux d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées, élaborés à l’échelle du département, dont une annexe comporte le schéma de répartition des dispositifs d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile.

Pour ces raisons d’efficacité et d’organisation, la commission accorde sa faveur au texte voté à l’Assemblée nationale et sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, son avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, vous proposez de soumettre l’adoption du schéma régional d’accueil à une concertation préalable avec les collectivités et les établissements compétents en matière d’habitat. Il est nécessaire, bien évidemment, que le préfet de région associe les élus locaux, afin de tenir compte des circonstances économiques, sociales et politiques propres à chaque commune accueillant ou étant susceptible d’accueillir des demandeurs d’asile.

Cette consultation est d’ores et déjà prévue. Elle aura l’intérêt de prendre en compte les difficultés rencontrées par les collectivités qui accueillent de nombreuses personnes en situation de précarité, ou de permettre l’orientation des personnes accompagnées d’enfants vers des communes qui disposent des capacités nécessaires pour les accueillir.

Pour autant, votre amendement aurait pour conséquence d’élargir très sensiblement le champ de la consultation. (Mme Valérie Létard hoche la tête en signe de dénégation.) En effet, en l’absence de précisions sur le statut des collectivités et établissements compétents en matière d’habitat visés dans le texte de votre amendement, le préfet se trouverait contraint d’organiser une concertation préalable avec tout type de collectivités et d’établissements, publics comme privés. Cela retarderait considérablement l’ouverture des places d’hébergement nécessaires.

Il n’est donc pas souhaitable d’intégrer une telle disposition dans le texte. En outre, celle-ci est d’ordre réglementaire et n’a donc pas sa place dans la loi.

Le ministre de l’intérieur m’a toutefois demandé de prendre en son nom l’engagement que les modalités de la consultation préalable des collectivités territoriales seront précisées dans l’instruction relative aux schémas régionaux d’accueil qu’il va adresser aux préfets de région, afin que ces schémas prennent bien en compte l’ensemble des préoccupations que vous exprimez.

Pour ces raisons, je souhaite que vous retiriez cet amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. J’entends bien les remarques qui m’ont été faites. Dans l’amendement, toutefois, nous avions pris la peine de mentionner les « collectivités et établissements compétents en matière d’habitat », c’est-à-dire les EPCI qui exercent la compétence de la délégation des aides à la pierre, et qui sont donc membres des CRHH, ni plus ni moins !

Comme je l’ai précisé dans la discussion générale et lors de la présentation de cet amendement, nous demandons que ce schéma soit élaboré en concertation avec les collectivités, afin d’en faire une coproduction. Le texte de la commission va moins loin que cela en prévoyant de prendre l’avis du CRHH. Cet organisme n’est pas exclusivement constitué des EPCI qui ont reçu délégation des aides à la pierre, il comprend aussi d’autres partenaires.

Le préfet aura le dernier mot sur la décision relative au schéma, c’est une évidence. Reste qu’il est plus facile d’éviter les difficultés, les dysfonctionnements et les réactions négatives des élus des territoires à l’échelle des EPCI qui exercent la compétence et la délégation des aides à la pierre en concevant ce schéma avec eux plutôt qu’en le leur soumettant après son élaboration.

La rédaction que nous proposons me semble donc plus protectrice des élus à l’échelle pertinente. C’est d’ailleurs ce qui est prévu dans le cadre du CRHH, lequel rassemble les mêmes niveaux de collectivités. Il n’est pas question d’en critiquer le rôle : comme présidente d’agglomération, j’y participe de façon assidue. Mais cette question sera noyée dans une masse de dossiers. En outre, son avis consultatif sera beaucoup moins protecteur.

J’entends les propositions du rapporteur. Je suis très favorable à l’élaboration par l’État d’un schéma directif, mais il me semble que son efficacité requiert qu’il soit préparé avec ceux qui vont l’accompagner au quotidien : les élus des territoires.

Mme Cécile Cukierman. Vous avez raison, c’est le bon sens !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l’amendement.)

M. le président. L’amendement n° 9, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 52, première phrase

Supprimer les mots :

qui a accepté les conditions matérielles d’accueil proposées en application de l’article L. 744-1

La parole est à M. Christian Favier.

M. Christian Favier. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à travers cet amendement, nous souhaitons permettre aux demandeurs d’asile de bénéficier de l’allocation financière sans être contraints d’accepter l’offre d’hébergement de l’OFII.

Notre position de fond consiste à éviter que l’exercice du droit d’asile dans notre pays ne conduise peu à peu à une sorte d’homothétie entre centre d’accueil de demandeurs d’asile et centre de rétention administrative.

Cet alinéa 52 est d’autant plus discutable que son maintien risque de produire l’effet inverse à celui qui est recherché. Les décisions qu’il motivera conduiront en effet presque inévitablement à la généralisation d’un contentieux administratif relatif aux motifs des expulsions prononcées à l’encontre des demandeurs d’asile ayant manifesté leur refus d’entrer en centre d’accueil ou ayant eu l’idée de changer de lieu de résidence, fût-ce temporairement.

L’alinéa 38 établit, en effet, le principe du tout ou rien.

Un demandeur d’asile, selon ces dispositions, ne pourra qu’accepter la proposition qui lui est faite et n’aura pas la possibilité de faire valoir sa volonté d’être hébergé dans une structure différente, comme un centre d’hébergement et de réinsertion sociale, un hôtel social, un foyer de jeunes travailleurs, chez un proche, voire de faire valoir son droit au logement opposable.

Cette disposition dessine le cadre d’une sorte d’assignation à résidence, qui est loin d’apporter une réponse satisfaisante à la spécificité de la demande d’asile, au regard, notamment, des flux migratoires.

Il s’agit là, en outre, d’une transposition pour le moins restrictive de la directive Accueil.

Cette conception de l’asile, qui fait de l’Europe de Schengen une sorte de forteresse de plus en plus imprenable, ne peut convenir, au vu de la situation actuelle. C’est pourquoi, mes chers collègues, nous vous invitons à voter en faveur de notre amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’avis est défavorable. Le schéma directif d’hébergement est une innovation contenue dans ce texte à laquelle nous sommes favorables. Pour que cette mesure soit efficace, il est nécessaire de lui adjoindre des dispositifs pertinents. L’attribution de l’ADA, l’allocation pour demandeur d’asile, en fait partie. Il ne faut donc surtout pas modifier ce point, au risque de l’empêcher de donner des résultats. Il s’agit en effet de mettre en place correctement la chaîne de l’hébergement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est également défavorable. Cette proposition porterait atteinte à une disposition que le Gouvernement considère comme essentielle : la subordination du versement de l’allocation à l’acceptation des conditions matérielles d’accueil et de la solution d’hébergement proposée par l’administration.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 9.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 3, présenté par M. Karoutchi, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéas 59 à 62

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Roger Karoutchi, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement qui avait déjà été adopté par le Sénat en première lecture et que l’Assemblée nationale a bien évidemment retiré. Il vise à revenir sur la disposition qui permet l’ouverture du marché du travail aux demandeurs d’asile lorsqu’il n’a pas été statué sur leur demande neuf mois après son dépôt, contre douze mois aujourd’hui.

Cela pose d’abord une question de forme : pourquoi le Gouvernement entend-il insérer dans la loi cette disposition, qui est strictement d’ordre réglementaire ? S’il souhaitait passer à un délai de neuf mois, il pouvait le faire par décret, sans qu’il soit nécessaire de le faire figurer dans la loi.

Est-il vraiment nécessaire d’émettre ainsi un signal en direction des réseaux de passeurs en leur disant : « Allez-y, nous réduisons encore le délai à partir duquel un demandeur d’asile peut essayer d’entrer sur le marché du travail » ?

Je relève ensuite un élément de fond. J’entends que la directive européenne de 2013 fixerait ce délai à neuf mois. Certes. Mais elle prévoit également la possibilité d’établir des priorités et il faut, bien sûr, accorder la priorité aux étrangers en situation régulière.

Or les étrangers en situation régulière peuvent être évidemment des immigrés en situation régulière qui ont accès au marché du travail.

Le demandeur d’asile dont la demande est satisfaite voit son problème réglé. En revanche, prenons le cas de celui dont la demande est en cours de traitement : au bout de neuf mois, il entre sur le marché du travail et est embauché dans une entreprise. Un mois plus tard, il est débouté de sa demande d’asile. Croyez-vous sincèrement que vous aurez facilité le raccompagnement aux frontières ? Non, naturellement.

La règle en vigueur aujourd’hui fixe un délai de douze mois. Si le Gouvernement parvient réellement à faire en sorte que la procédure de demande d’asile, entre l’OFPRA et la CNDA, se déroule dans un délai de neuf mois, ces dispositions seront alors sans objet. En effet, dans ce cas, après neuf mois, le demandeur aura obtenu une réponse, positive ou négative, ce qui règle le problème.

Mais pourquoi changer les délais de l’accessibilité du marché du travail, alors que le délai de neuf mois fixé pour la procédure n’est pas encore une réalité ? Cela n’a pas de sens !

En somme, ce sujet ressortit du domaine réglementaire et non législatif, et l’ouverture du marché du travail n’est pas une obligation de la directive de 2013, qui accorde la capacité de faire des priorités. Dans ces conditions, cette mesure me semble constituer un signal, qui n’a pas lieu d’être, en direction des réseaux.

M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Leconte et Mme Jourda, est ainsi libellé :

Alinéa 61

1° Première phrase

a) Remplacer les mots :

peut être

par le mot :

est

b) Après le mot :

apatrides

insérer les mots :

ou le cas échéant la Cour nationale du droit d’asile

2° Seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Notre collègue Esther Benbassa nous proposait tout à l’heure d’ouvrir l’accès au marché du travail à tout demandeur d’asile.

Pour ma part, je suis largement en accord avec les raisons qu’elle avançait à l’appui de son amendement. Notre collègue Roger Karoutchi a cependant rappelé les arguments qui s’y opposent.

Cela étant dit, le texte en discussion aujourd’hui, s’il exprime une position d’équilibre, n’est pas totalement conforme à la directive Accueil. Je veux la citer, en particulier à l’intention de M. Karoutchi : « Les États membres décident dans quelles conditions l’accès au marché du travail est octroyé au demandeur, conformément à leur droit national, tout en garantissant que les demandeurs ont un accès effectif à ce marché. » J’insiste sur ce dernier point, que la Commission européenne a précisé dans une communication : selon elle, si des conditions d’accès à l’emploi des demandeurs d’asile peuvent être imposées, elles ne doivent pas en pratique être limitatives au point d’entraver l’accès à l’emploi.

Or les conditions dans lesquelles le projet de loi prévoit cet accès à l’emploi ne sont pas équivalentes à celles auxquelles est soumis un étranger en situation régulière. De fait, la situation du demandeur d’asile sera plutôt similaire à celle d’une personne qui voudrait entrer en France pour travailler ou à celle des étudiants. Ces derniers ont le droit de travailler vingt heures ; en revanche, s’ils demandent plus d’heures de travail, ils doivent remplir un certain nombre de conditions, celles-là mêmes qu’on veut imposer aux demandeurs d’asile après ce délai de neuf mois.

Je constate donc que le texte, dans son état actuel, ne répond pas à la demande de la directive. Quelle est en effet la situation du demandeur d’asile après neuf mois ? Suivant les objectifs de ce projet de loi, l’examen de son dossier par l’OFPRA devrait être effectué dans un délai de trois mois, auxquels s’ajoutent cinq mois d’examen par la CNDA. La procédure entière, si l’on croit à cette réforme, devrait donc durer huit mois : tout marcherait bien.

Si pourtant sa demande n’a pas reçu de réponse après neuf mois, il a en principe le droit de travailler, mais on constate que, de fait, les conditions d’accès au marché du travail sont plutôt léonines et équivalentes à celles qui s’imposent à tout étranger désireux de venir travailler en France. Cela n’est pas conforme à la directive Accueil. Voilà pourquoi je vous propose de voter cet amendement, qui vise à rendre effectif le droit au travail après neuf mois.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Sur l’amendement n° 3, la commission des lois a émis un avis défavorable.

En première lecture, notre collègue Roger Karoutchi avait déposé en séance publique un amendement identique. Ce dernier avait été adopté malgré l’avis défavorable de la commission.

Notre avis reste défavorable pour une simple et bonne raison : à nos yeux, la retranscription de la directive nous fixe le délai de neuf mois. Dès lors, il convient de s’en tenir à ce délai. Cela étant, je concède que le Sénat a voté un amendement identique en première lecture. Ce n’est en aucun cas un message subliminal. (Sourires.)

La situation est différente sur l’amendement n° 5. En effet, celui-ci a pour objet d’élargir très fortement l’accès au marché du travail du demandeur d’asile. Il vise notamment à ouvrir cet accès alors même que la demande d’asile est en cours d’examen par la CNDA, ainsi qu’à supprimer le principe de la délivrance d’une autorisation de travail.

Les auteurs de cet amendement vont donc, pour le coup, très au-delà de ce que prévoit la directive Accueil. Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. L’avis du Gouvernement est défavorable sur ces deux amendements.

Nous nous référons pourtant à la même directive, qui contient la disposition suivante : « Les États membres veillent à ce que les demandeurs aient accès au marché du travail dans un délai maximum de neuf mois à compter de la date d’introduction de la demande de protection internationale ». Ce texte est très clair à mes yeux.

Ces alinéas de l’article 15 transposent les dispositions de cette directive de 2013 ; il est donc nécessaire de les maintenir pour assurer la conformité du texte à cette directive.

Le dispositif que nous envisageons est équilibré, puisque l’accès au marché du travail ne sera possible que dans le cas d’un retard dans la procédure qui ne soit pas imputable au demandeur. Il ne permet pas à un demandeur d’asile d’accéder au marché du travail dans les mêmes conditions qu’un réfugié. En effet, contrairement à ce dernier, le demandeur d’asile devra obtenir une autorisation de travail auprès de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, la DIRECCTE. Enfin, la situation de l’emploi reste opposable au demandeur.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié.

(L'article 15 est adopté.)

Article 15
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Article 17

Article 16

(Non modifié)

Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Après les mots : « réinsertion sociale », la fin du 2° de l’article L. 111-2 est supprimée ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 111-3-1, les mots : « et les centres d’accueil pour demandeurs d’asile » sont supprimés ;

3° Le 10° de l’article L. 121-7 est abrogé ;

4° À l’article L. 121-13, la référence : « L. 341-9 » est remplacée par la référence : « L. 5223-1 » ;

5° Au premier alinéa de l’article L. 264-10, les mots : « leur admission au séjour au titre de » sont supprimés ;

6° Après l’article L. 312-8, il est inséré un article L. 312-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 312-8-1. – Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 312-8 du présent code, les centres d’accueil pour demandeurs d’asile mentionnés à l’article L. 744-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile communiquent les résultats d’au moins une évaluation interne dans un délai fixé par décret. » ;

7° La deuxième phrase du deuxième alinéa du I de l’article L. 313-1-1 est complétée par les mots : « ou s’agissant des centres d’accueil pour demandeurs d’asile » ;

8° L’article L. 313-9 est ainsi modifié :

a) Le 5° est abrogé ;

b) À la deuxième phrase du septième alinéa, la référence : « 5° » est remplacée par la référence : « 4° » ;

9° L’article L. 348-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 348-1. – Les personnes dont la demande d’asile a été enregistrée conformément à l’article L. 741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile peuvent bénéficier d’un hébergement en centre d’accueil pour demandeurs d’asile, à l’exception des personnes dont la demande d’asile relève d’un autre État, au sens de l’article L. 742-1 du même code. » ;

10° Le I de l’article L. 348-2 est ainsi rédigé :

« I. – Les centres d’accueil pour demandeurs d’asile ont pour mission d’assurer l’accueil, l’hébergement ainsi que l’accompagnement social et administratif des personnes dont la demande d’asile a été enregistrée, pendant la durée d’instruction de cette demande. » ;

11° L’article L. 348-3 est abrogé ;

12° Le premier alinéa de l’article L. 348-4 est ainsi rédigé :

« L’État conclut une convention avec le centre d’accueil pour demandeurs d’asile ou un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens avec la personne morale gestionnaire de ce centre. » ;

13° Le 1° du I et le III de l’article L. 541-1 sont abrogés ;

14° Le 3° du I de l’article L. 541-2 est abrogé ;

15° Le IX de l’article L. 543-1 est abrogé. – (Adopté.)

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Article 16
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Article 18 (Texte non modifié par la commission)

Article 17

La cinquième partie du code du travail est ainsi modifiée :

1° L’article L. 5223-1 est ainsi modifié :

a) Le 2° est complété par les mots : « et à la gestion de l’allocation pour demandeur d’asile mentionnée à l’article L. 744-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« L’office établit chaque année un rapport retraçant son activité, fournissant des données quantitatives et qualitatives présentées par sexe et présentant les actions de formation délivrées aux agents, en particulier sur la prise en compte des enjeux relatifs au sexe et à la vulnérabilité des demandeurs d’asile. Ce rapport est transmis au Parlement et rendu public. »

1° bis (Supprimé)

2° Les 1°, 1° bis, 2° et 4° de l’article L. 5423-8 sont abrogés ;

3° Le 3° de l’article L. 5423-9 est abrogé ;

4° L’article L. 5423-11 est ainsi rédigé :

« Art. L. 5423-11. – L’allocation temporaire d’attente est versée mensuellement, à terme échu. » – (Adopté.)

Chapitre V

Dispositions relatives au contenu de la protection

Article 17
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Article 19 (Texte non modifié par la commission)

Article 18

(Non modifié)

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 313-13 est ainsi rédigé :

« Art. L. 313-13. – Sauf si leur présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire mentionnée à l’article L. 313-11 est délivrée de plein droit :

« 1° À l’étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l’article L. 712-1 ;

« 1° bis À son conjoint, son partenaire avec lequel il est lié par une union civile ou son concubin, s’il a été autorisé à séjourner en France au titre de la réunification familiale dans les conditions prévues à l’article L. 752-1 ;

« 2° À son conjoint ou au partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d’au moins dix-huit ans, si le mariage ou l’union civile est postérieur à la date d’introduction de sa demande d’asile, à condition que le mariage ou l’union civile ait été célébré depuis au moins un an et d’une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ;

« 3° À ses enfants dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l’article L. 311-3 ;

« 4° À ses ascendants directs au premier degré si l’étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection est un mineur non marié.

« Sans préjudice du troisième alinéa du II de l’article L. 752-1, la condition prévue à l’article L. 311-7 n’est pas exigée.

« Le délai pour la délivrance de la carte de séjour temporaire après la décision d’octroi de la protection subsidiaire par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d’asile est fixé par décret en Conseil d’État.

« Par dérogation aux articles L. 311-2 et L. 313-1, la carte délivrée au titre du présent article est renouvelable dans les mêmes conditions pour une durée de deux ans. Elle donne droit à l’exercice d’une activité professionnelle. » ;

1° bis À la première phrase de l’article L. 314-7-1, la référence : « du second alinéa » est supprimée ;

2° L’article L. 314-11 est ainsi modifié :

a) (Supprimé)

b) Le 8° est ainsi rédigé :

« 8° À l’étranger reconnu réfugié en application du livre VII ainsi qu’à :

« aa) Son conjoint, son partenaire avec lequel il est lié par une union civile ou son concubin, s’il a été autorisé à séjourner en France au titre de la réunification familiale dans les conditions prévues à l’article L. 752-1 ;

« a) Son conjoint ou son partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d’au moins dix-huit ans, si le mariage ou l’union civile est postérieur à la date d’introduction de sa demande d’asile, à condition que le mariage ou l’union civile ait été célébré depuis au moins un an et d’une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ;

« b) Ses enfants dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l’article L. 311-3 ;

« c) Ses ascendants directs au premier degré si l’étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection est un mineur non marié.

« Le délai pour la délivrance de la carte de résident après la décision de reconnaissance de la qualité de réfugié par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d’asile est fixé par décret en Conseil d’État. » ;

3° La section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre III est complétée par un article L. 311-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-8-1. – Lorsqu’il est mis fin au statut de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire par décision définitive de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par décision de justice ou lorsque l’étranger renonce à ce statut ou à ce bénéfice, la carte de résident mentionnée au 8° de l’article L. 314-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée à l’article L. 313-13 est retirée.

« Dans les cas prévus au premier alinéa du présent article, l’autorité administrative statue, dans un délai fixé par décret en Conseil d’État, sur le droit au séjour des intéressés à un autre titre.

« La carte de résident ou la carte de séjour temporaire ne peut être retirée en application du même premier alinéa quand l’étranger est en situation régulière depuis au moins cinq ans. » ;

4° L’article L. 314-8-2 est ainsi modifié :

a) (Supprimé)

b) Au dernier alinéa, après le mot : « conjoint », sont insérés les mots : « le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, son concubin » ;

5° Le chapitre Ier du titre Ier du livre V est complété par un article L. 511-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 511-5. – En cas de reconnaissance de la qualité de réfugié ou d’octroi de la protection subsidiaire, l’autorité administrative abroge l’obligation de quitter le territoire français qui, le cas échéant, a été prise. Elle délivre sans délai au réfugié la carte de résident prévue au 8° de l’article L. 314-11 et au bénéficiaire de la protection subsidiaire la carte de séjour temporaire prévue à l’article L. 313-13. »

M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Buffet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéas 6 et 18

Remplacer les mots :

et d’une

par les mots :

et sous réserve d’une

La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 18, modifié.

(L'article 18 est adopté.)

Article 18 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 19 bis A

Article 19

(Non modifié)

Le titre V du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé :

« TITRE V

« CONTENU DE LA PROTECTION ACCORDÉE

« CHAPITRE IER

« Information et accès aux droits

« Art. L. 751-1. – L’étranger qui a obtenu le statut de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire en application du présent livre VII et a signé le contrat d’accueil et d’intégration prévu à l’article L. 311-9 bénéficie d’un accompagnement personnalisé pour l’accès à l’emploi et au logement.

« À cet effet, l’autorité administrative conclut avec les collectivités territoriales et les autres personnes morales concernées ou souhaitant participer à cet accompagnement une convention prévoyant les modalités d’organisation de celui-ci.

« Art. L. 751-2. – (Non modifié)

« CHAPITRE II

« Réunification familiale et intérêt supérieur de l’enfant

« Art. L. 752-1 et L. 752-2. – (Non modifiés)

« Art. L. 752-3. – Lorsqu’une protection au titre de l’asile a été octroyée à une mineure invoquant un risque de mutilation sexuelle, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, tant que ce risque existe et tant que l’intéressée est mineure, lui demande de se soumettre à un examen médical visant à constater l’absence de mutilation. L’office transmet au procureur de la République tout refus de se soumettre à cet examen ou tout constat de mutilation.

« Aucun constat de mutilation sexuelle ne peut entraîner, à lui seul, la cessation de la protection accordée à la mineure au titre de l’asile. Il ne peut être mis fin à ladite protection à la demande des parents ou des titulaires de l’autorité parentale tant que le risque de mutilation sexuelle existe.

« L’office doit observer un délai minimal de trois ans entre deux examens, sauf s’il existe des motifs réels et sérieux de penser qu’une mutilation sexuelle a effectivement été pratiquée ou pourrait être pratiquée.

« Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’asile et de la santé, pris après avis du directeur général de l’office, définit les modalités d’application du présent article et, en particulier, les catégories de médecins qui peuvent pratiquer l’examen mentionné au premier alinéa.

« CHAPITRE III

« Documents de voyage

« Art. L. 753-1, L. 753-2 et L. 753-2-1. – (Non modifiés)

« Art. L. 753-3. – (Supprimé)

« Art. L. 753-4 et L. 753-5. – (Non modifiés)

« Chapitre IV

(Division et intitulé supprimés)

« Art. L. 754-1. – (Supprimé) »

M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Leconte, Mme Tasca, MM. Kaltenbach, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

« À cet effet et afin de favoriser l’accès aux droits des bénéficiaires d’une protection au titre de l’asile, l’État conclut au niveau national avec les personnes morales concernées une convention permettant la mise en place d’un accompagnement adapté et prévoyant les modalités d’organisation de cet accompagnement. Dans le cadre fixé par la convention nationale, des conventions régionales peuvent être conclues notamment avec les collectivités territoriales intéressées.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Le présent amendement vise à rétablir la rédaction de l'alinéa 7 de l'article 19 dans la version adoptée par le Sénat en première lecture.

La rédaction adoptée par le Sénat nous paraît à la fois plus solide juridiquement et plus favorable pour l'étranger ayant obtenu le statut de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire.

En effet, l’amendement prévoit la conclusion d’une convention-cadre au niveau national entre, d’une part, l’État, c’est-à-dire le ministère de l’intérieur et l’OFII, et, d’autre part, les acteurs publics de l’insertion, parmi eux, on peut notamment citer l’OFPRA, la Caisse nationale des allocations familiales, Pôle-Emploi, la Caisse nationale d’assurance maladie et l’Union sociale pour l’habitat. Cette convention-cadre permettra d'assurer un meilleur échange d'information et de mieux définir les rôles de chacun. Elle peut être déclinée sur les territoires, au niveau local, pour améliorer l’intégration des réfugiés.

Nous sommes convaincus que la conclusion d'une convention fixant un cadre global constitue un préalable indispensable pour assurer de façon effective, au niveau local, l'accès à l'emploi, au logement et aux droits sociaux pour les bénéficiaires d'une protection au titre de l'asile. Elle constitue également pour ces bénéficiaires la garantie d'un traitement uniforme sur l'ensemble du territoire.

En première lecture, la commission des lois du Sénat et le Gouvernement avaient tous deux formulé un avis favorable sur cet amendement ; nous ne comprendrions pas que la commission change aujourd’hui d’avis.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission demande le retrait de cet amendement. Faute de quoi, son avis serait défavorable.

Ce sujet, parmi d’autres, a fait l’objet de discussions lors de la réunion de la commission mixte paritaire. Il est ressorti de ces discussions que les dispositions votées à l’Assemblée nationale, qui reprennent d’ailleurs exactement le texte initial du projet de loi, sont certes moins ambitieuses que ce que nous avions souhaité, mais sont surtout plus opérationnelles.

En effet, suivant le texte issu de l’Assemblée nationale, chacune des préfectures pourra signer des conventions avec les collectivités pour l’accompagnement des réfugiés. En revanche, le dispositif prévu dans cet amendement – la signature d’une convention à l’échelle nationale – me paraît beaucoup plus compliqué – je n’ose pas dire un peu plus lourd, mais c’est tout de même la réalité.

Enfin, le périmètre des acteurs associés à ces conventions est plus large dans le texte qui nous revient de l’Assemblée nationale. En effet, il intègre aussi les personnes morales souhaitant participer à cet accompagnement des réfugiés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Même avis.

M. Jean-Yves Leconte. Je retire l’amendement, monsieur le président !

M. le président. L'amendement n° 15 est retiré.

Je mets aux voix l'article 19.

(L'article 19 est adopté.)

Article 19 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 19 ter

Article 19 bis A

(Suppression maintenue)

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Chapitre V bis

Dispositions relatives à l’intégration des réfugiés

Article 19 bis A
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 19 quater

Article 19 ter

(Non modifié)

Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Le titre IV du livre III est complété par un chapitre IX ainsi rédigé :

« CHAPITRE IX

« Centres provisoires d’hébergement

« Art. L. 349-1. – Les étrangers s’étant vu reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire en application du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile peuvent bénéficier d’un hébergement en centre provisoire d’hébergement.

« Art. L. 349-2. – I. – Les centres provisoires d’hébergement ont pour mission d’assurer l’accueil, l’hébergement ainsi que l’accompagnement linguistique, social, professionnel et juridique des personnes qu’ils hébergent, en vue de leur intégration.

« II. – Les centres provisoires d’hébergement coordonnent les actions d’intégration des étrangers s’étant vu reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire en application du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile présents dans le département.

« III. – Pour assurer l’intégration des publics qu’ils accompagnent, les centres provisoires d’hébergement concluent des conventions avec les acteurs de l’intégration.

« Art. L. 349-3. – I. – Les décisions d’admission dans un centre provisoire d’hébergement, de sortie de ce centre et de changement de centre sont prises par l’Office français de l’immigration et de l’intégration, après consultation du directeur du centre. À cette fin, les places en centres provisoires d’hébergement sont intégrées au traitement automatisé de données mentionné à l’article L. 744-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

« II. – Les personnes accueillies participent à proportion de leurs ressources à leurs frais d’hébergement, de restauration et d’entretien.

« III. – Les conditions de fonctionnement et de financement des centres provisoires d’hébergement sont fixées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 349-4. – L’État conclut une convention avec le centre provisoire d’hébergement ou un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens avec la personne morale gestionnaire de ce centre.

« Cette convention doit être conforme à une convention type dont les stipulations sont déterminées par décret et prévoient notamment les objectifs, les moyens, les activités et les modalités de contrôle d’un centre provisoire d’hébergement. » ;

2° La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 345-1 est complétée par les mots : « définis au chapitre IX du titre IV du livre III du présent code ». – (Adopté.)

Chapitre V ter

Dispositions relatives à l’hébergement d’urgence des étrangers déboutés de leur demande d’asile

Article 19 ter
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 20 (Texte non modifié par la commission)

Article 19 quater

L’article L. 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent article n’est applicable à l’étranger dont la demande d’asile a été définitivement rejetée et qui a fait l’objet d’une demande d’éloignement devenue définitive qu’en cas de circonstances particulières faisant apparaître, pendant le temps strictement nécessaire à son départ, une situation de détresse suffisamment grave pour faire obstacle à son départ. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 10 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 16 est présenté par M. Leconte, Mme Tasca et MM. Kaltenbach et Sueur.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Supprimer cet article.

II. – En conséquence, chapitre V ter

Supprimer cette division et son intitulé.

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 10.

Mme Cécile Cukierman. Cet article 19 quater, introduit par la commission des lois, est, comme je l’ai expliqué dans la discussion générale, inadmissible – comme d’ailleurs tous ceux qui sont relatifs aux déboutés –, dans la mesure où il refuse aux étrangers dont la demande d’asile a été définitivement rejetée l’hébergement d’urgence.

À travers le texte issu des travaux de la commission, la majorité sénatoriale de droite a rédigé le parfait manuel de gestion des demandeurs d’asile déboutés : création de centres pour les enfermer, refus de l’hébergement d’urgence et – c’est le point d’orgue ! – interdiction de réclamer un titre de séjour sur un fondement autre que celui du droit d’asile, tel que la situation familiale ou médicale, ce qui est d’ailleurs anticonstitutionnel.

Au nom des libertés, du respect de nos valeurs, de la Constitution, ainsi que des conventions signées et adoptées par la France, nous ne pouvons pas mettre en place de tels dispositifs, qui abîmeraient notre pays et notre histoire.

Les personnes déboutées du droit d’asile doivent avoir accès au dispositif d’hébergement d’urgence. Cela n’est absolument pas négociable et ne devrait même pas faire l’objet d’une discussion dans nos assemblées.

Sur la forme du débat, soulignons qu’un seul amendement, le nôtre, avait été déposé en première lecture – nous avons été rejoints cette fois-ci – sur ce dispositif visant à mettre purement et simplement les personnes déboutées à la rue, dans l’attente d’une expulsion. C’est une honte pour notre République ! Nous regrettons qu’un sujet aussi grave soit traité de manière aussi peu approfondie.

Combien de ces déboutés produits industriellement par la « machine », qui seront toujours plus nombreux si cette réforme venait à être adoptée en l’état, n’ont pas de chemin de retour, même organisé, vers leur pays d’origine ? Ce retour est impossible aujourd’hui, il le sera toujours demain. Je pense notamment à la Somalie, à l’Érythrée, au Soudan, à la Libye, à la Syrie, à l’Afghanistan, à l’Irak, à l’Iran ou encore au Bangladesh, tous pays interdisant, de par la nature de leur régime, des retours organisés.

Si certains ont noté la gravité du drame syrien, cause d’un grand nombre d’accords en Europe, ces mêmes politiques ont-ils une simple idée de la nature des récits de ces réfugiés, lesquels détaillent leurs craintes et les persécutions qu’ils ont subies ?

Pour ces raisons – mais il y aurait encore beaucoup à dire ! –, je vous invite, mes chers collègues, à voter notre amendement de suppression. Ainsi, vous assumerez vos responsabilités et vous ferez preuve, sinon d’humanisme, du moins d’un peu de lucidité et de bon sens.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l'amendement n° 16.

M. Jean-Yves Leconte. Si cet amendement, qui est identique à l’amendement n° 10, était rejeté, cela signifierait qu’un demandeur d’asile débouté et sans abri, qui serait dans une situation de détresse médicale, psychique ou sociale grave, mais insuffisante pour faire obstacle à son départ, ne pourrait plus bénéficier d’aucun hébergement d’urgence. Voilà pourquoi il convient d’adopter un tel amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Je voudrais tout de même préciser quelques points.

On ne peut pas laisser dire que cette mesure s’appliquera sans conditions et que, dès lors que le demandeur aura été débouté de sa demande, il devra quitter immédiatement l’hébergement d’urgence qu’il occupe.

En effet, le texte de la commission retranscrit très précisément les conditions fixées par le Conseil d’État. Une telle disposition ne s’applique que dans le cas où la personne déboutée a d’abord fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire national et dans certaines conditions. Je cite l’article 19 quater : « Le présent article n’est applicable à l’étranger dont la demande d’asile a été définitivement rejetée et qui a fait l’objet d’une demande d’éloignement devenue définitive qu’en cas de circonstances particulières faisant apparaître, pendant le temps strictement nécessaire à son départ, une situation de détresse suffisamment grave pour faire obstacle à son départ. »

Cette disposition est donc particulièrement encadrée et précise. Elle ne relève pas de l’arbitraire ni ne correspond à la situation décrite par les sénateurs qui viennent de présenter les amendements identiques nos 10 et 16.

C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.

Est-il encore nécessaire de rappeler que les CADA sont aujourd’hui pleins : les demandeurs doivent être logés – c’est le droit –, tandis qu’il faut qu’à un moment ou à un autre les déboutés puissent s’en aller, si l’on veut que le système fonctionne.

L’article 19 quater vise à prendre des mesures claires, selon la jurisprudence du Conseil d’État, c'est-à-dire selon des critères clairement établis, qui, de notre point de vue, ne posent aucune difficulté.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Les auteurs de ces amendements proposent de supprimer l’article 19 quater. Cet article a été réintroduit lors de l’examen du texte en commission des lois et vise à limiter l’accès des personnes déboutées du droit d’asile aux dispositifs d’hébergement d’urgence de droit commun.

Sans méconnaître les nombreuses ordonnances du Conseil d’État sur lesquelles l’article prend appui, le Gouvernement considère que l’inscription dans la loi d’une jurisprudence établie dans le cadre d’un contentieux précis et déterminé, celui du référé-liberté, va au-delà de ce qui est souhaitable.

Cette jurisprudence établit que l’État ne sera pas condamné comme ayant porté une atteinte grave à une liberté fondamentale dans le cadre de la procédure de référé-liberté s’il n’héberge pas de manière inconditionnelle et illimitée une personne déboutée du droit d’asile. Cette jurisprudence était indispensable pour éviter que l’État ne soit mis en cause pour ne pas avoir pu héberger un débouté de l’asile qui doit, par ailleurs, quitter le territoire national, mais elle ne doit pas être lue comme posant un principe général interdisant l’accès des personnes déboutées de l’asile à l’hébergement d’urgence.

Il incombe aux gestionnaires et à l’autorité administrative d’examiner au cas par cas si l’attribution d’un hébergement est possible et nécessaire en fonction de la situation de détresse des intéressés. Il incombe également à l’autorité administrative locale – le Gouvernement y est attentif – d’éviter que des personnes déboutées de l’asile ne se maintiennent indéfiniment dans un centre d’hébergement d’urgence sans qu’une solution de retour puisse être préparée.

Toutefois, l’inscription dans la loi d’un tel principe, privant les déboutés de l’asile de tout accès à l’hébergement d’urgence, paraît excessive.

C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable sur ces deux amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Je voudrais brièvement répondre à Mme la secrétaire d’État.

Lorsque le Conseil d’État rend une décision, particulièrement de cette nature, il le fait forcément sur la base du cas particulier qui lui est soumis. Il n’empêche que sa jurisprudence s’applique de façon plus large, car le Conseil d’État établit un principe.

En matière administrative, on sait que les décisions rendues par le Conseil d’État font jurisprudence pendant de longues décennies. Il n’est pas rare aujourd'hui de faire référence à des décisions déjà anciennes. Il ne s’agit donc pas seulement d’un arrêt de circonstance. C’est aussi un arrêt qui établit des principes.

L’objectif de la commission des lois et du Sénat est de retranscrire ces principes, de surcroît en établissant des conditions bien précises, dans la loi.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 10 et 16.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 19 quater.

(L'article 19 quater est adopté.)

Chapitre VI

Dispositions relatives aux outre-mer

Article 19 quater
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 21 (Texte non modifié par la commission)

Article 20

(Non modifié)

I. – (Non modifié)

II. – Le titre VI du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Dispositions relatives aux outre-mer » ;

2° Il est rétabli un article L. 761-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 761-1. – Pour l’application du présent livre à Mayotte :

« 1° Le 1° du III de l’article L. 723-2 n’est pas applicable ;

« 2° Au premier alinéa de l’article L. 741-1, les mots : “et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride” ne sont pas applicables ;

« 3° Le chapitre II du titre IV n’est pas applicable ;

« 4° (Supprimé)

« 5° Le 1° de l’article L. 744-3 n’est pas applicable ;

« 6° L’article L. 744-9 est ainsi rédigé :

« “Art. L. 744-9. – Le demandeur d’asile dont la demande est enregistrée à Mayotte peut bénéficier d’un hébergement dans une structure mentionnée au 2° de l’article L. 744-3 et des aides matérielles.” » ;

3° L’article L. 762-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 762-1. – Le présent livre est applicable dans les îles Wallis et Futuna dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la réforme du droit d’asile et sous réserve des adaptations suivantes :

« 1° Au dernier alinéa de l’article L. 712-2, les mots : “en France” sont remplacés, deux fois, par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« 2° À l’article L. 723-2 :

« a) Au 1° du II, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” ;

« b) Le 1° du III n’est pas applicable ;

« c) Au 2° du III, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” ;

« d) Au 3° du III, les mots : “en France” sont remplacés, deux fois, par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” ;

« e) Au 5° du III, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« f) (Supprimé)

« 2° bis À l’article L. 723-3 :

« a) Au deuxième alinéa, les mots : “des informations sur la vulnérabilité qui lui sont transmises en application de l’article L. 744-6 et” sont supprimés ;

« b) Au troisième alinéa, les mots : “comme ayant des besoins particuliers en matière d’accueil en application du même article L. 744-6 ou” sont supprimés ;

« 3° À l’article L. 741-1 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” et les mots : “et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride” ne sont pas applicables ;

« b) À la fin de la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : “mentionnés à l’article L. 211-1” sont remplacés par les mots : “requis par l’ordonnance n° 2000-371 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers dans les îles Wallis et Futuna” ;

« 4° À l’article L. 741-3 :

« a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” ;

« b) Le dernier alinéa est supprimé ;

« 5° Le chapitre II du titre IV n’est pas applicable ;

« 6° À la première phrase de l’article L. 743-1, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” ;

« 7° À l’article L. 743-2 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” ;

« b) À la fin de la seconde phrase du 2°, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” ;

« 8° (Supprimé)

« 9° À l’article L. 743-4, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” et la seconde occurrence des mots : “le territoire français” est remplacée par les mots : “les îles Wallis et Futuna” ;

« 9° bis À l’article L. 743-5, la référence : “des articles L. 556-1 et” est remplacée par les mots : “de l’article” et la référence : “du livre V” est remplacée par la référence : “de l’ordonnance n° 2000-371 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers dans les îles Wallis et Futuna” ;

« 10° Le chapitre IV du titre IV n’est pas applicable ;

« 11° Au premier alinéa de l’article L. 751-1, la référence : “L. 311-9” est remplacée par la référence : “6-3 de l’ordonnance n° 2000-371 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers dans les îles Wallis et Futuna” ;

« 12° À l’article L. 752-1 :

« a) (Supprimé)

« b) Le premier alinéa du II est ainsi rédigé :

« “Les deux dernières phrases du premier alinéa et le dernier alinéa du I de l’article 42 et l’article 43 de ladite ordonnance sont applicables.” ;

« c) Aux deux derniers alinéas du II, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “dans les îles Wallis et Futuna” ;

« 13° (Supprimé) » ;

4° L’article L. 763-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 763-1. – Le présent livre est applicable en Polynésie française dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la réforme du droit d’asile et sous réserve des adaptations suivantes :

« 1° Au dernier alinéa de l’article L. 712-2, les mots : “en France” sont remplacés, deux fois, par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« 2° À l’article L. 723-2 :

« a) Au 1° du II, le mot : “France” est remplacé par les mots : “Polynésie française” ;

« b) Le 1° du III n’est pas applicable ;

« c) Au 2° du III, le mot : “France” est remplacé par les mots : “Polynésie française” ;

« d) Au 3° du III, le mot : “France” est remplacé, deux fois, par les mots : “Polynésie française” ;

« e) Au 5° du III, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« f) (Supprimé)

« 2° bis À l’article L. 723-3 :

« a) Au deuxième alinéa, les mots : “des informations sur la vulnérabilité qui lui sont transmises en application de l’article L. 744-6 et” sont supprimés ;

« b) Au troisième alinéa, les mots : “comme ayant des besoins particuliers en matière d’accueil en application du même article L. 744-6 ou” sont supprimés ;

« 3° À l’article L. 741-1 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Polynésie française” et les mots : “et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride” ne sont pas applicables ;

« b) À la fin de la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : “mentionnés à l’article L. 211-1” sont remplacés par les mots : “requis par l’ordonnance n° 2000-372 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Polynésie française” ;

« 4° À l’article L. 741-3 :

« a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Polynésie française” ;

« b) Le dernier alinéa est supprimé ;

« 5° Le chapitre II du titre IV n’est pas applicable ;

« 6° À la première phrase de l’article L. 743-1, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Polynésie française” ;

« 7° À l’article L. 743-2 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Polynésie française” ;

« b) À la fin de la seconde phrase du 2°, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Polynésie française” ;

« 8° (Supprimé)

« 9° À l’article L. 743-4, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Polynésie française” et la seconde occurrence des mots : “le territoire français” est remplacée par les mots : “la Polynésie française” ;

« 9° bis À l’article L. 743-5, la référence : “des articles L. 556-1 et” est remplacée par les mots : “de l’article” et la référence : “du livre V” est remplacée par la référence : “de l’ordonnance n° 2000-372 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Polynésie française” ;

« 10° Le chapitre IV du titre IV n’est pas applicable ;

« 11° Au premier alinéa de l’article L. 751-1, la référence : “L. 311-9” est remplacée par la référence : “6-3 de l’ordonnance n° 2000-372 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Polynésie française” ;

« 12° À l’article L. 752-1 :

« a) (Supprimé)

« b) Le premier alinéa du II est ainsi rédigé :

« “Les deux dernières phrases du premier alinéa et le dernier alinéa du I de l’article 44 et l’article 45 de ladite ordonnance sont applicables.” ;

« c) Aux deux derniers alinéas du II, le mot : “France” est remplacé par les mots : “Polynésie française” ;

« 13° (Supprimé) » ;

5° L’article L. 764-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 764-1. – Le présent livre est applicable en Nouvelle-Calédonie dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la réforme du droit d’asile et sous réserve des adaptations suivantes :

« 1° Au dernier alinéa de l’article L. 712-2, les mots : “en France” sont remplacés, deux fois, par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« 2° À l’article L. 723-2 :

« a) Au 1° du II, le mot : “France” est remplacé par le mot : “Nouvelle-Calédonie” ;

« b) Le 1° du III n’est pas applicable ;

« c) Au 2° du III, le mot : “France” est remplacé par le mot : “Nouvelle-Calédonie” ;

« d) Au 3° du III, le mot : “France” est remplacé, deux fois, par le mot : “Nouvelle-Calédonie” ;

« e) Au 5° du III, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« f) (Supprimé)

« 2° bis À l’article L. 723-3 :

« a) Au deuxième alinéa, les mots : “des informations sur la vulnérabilité qui lui sont transmises en application de l’article L. 744-6 et” sont supprimés ;

« b) Au troisième alinéa, les mots : “comme ayant des besoins particuliers en matière d’accueil en application du même article L. 744-6 ou” sont supprimés ;

« 3° À l’article L. 741-1 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Nouvelle-Calédonie” et les mots : “et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride” ne sont pas applicables ;

« b) À la fin de la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : “mentionnés à l’article L. 211-1” sont remplacés par les mots : “requis par l’ordonnance n° 2002-388 du 20 mars 2002 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie” ;

« 4° À l’article L. 741-3 :

« a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Nouvelle-Calédonie” ;

« b) Le dernier alinéa est supprimé ;

« 5° Le chapitre II du titre IV n’est pas applicable ;

« 6° À la première phrase de l’article L. 743-1, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Nouvelle-Calédonie” ;

« 7° À l’article L. 743-2 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Nouvelle-Calédonie” ;

« b) À la fin de la seconde phrase du 2°, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Nouvelle-Calédonie” ;

« 8° (Supprimé)

« 9° À l’article L. 743-4, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “en Nouvelle-Calédonie” et la seconde occurrence des mots : “le territoire français” est remplacée par les mots : “la Nouvelle-Calédonie” ;

« 9° bis À l’article L. 743-5, la référence : “des articles L. 556-1 et” est remplacée par les mots : “de l’article” et la référence : “du livre V” est remplacée par la référence : “de l’ordonnance n° 2002-388 du 20 mars 2002 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie” ;

« 10° Le chapitre IV du titre IV n’est pas applicable ;

« 11° Au premier alinéa de l’article L. 751-1, la référence : “L. 311-9” est remplacée par la référence : “6-3 de l’ordonnance n° 2002-388 du 20 mars 2002 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie” ;

« 12° À l’article L. 752-1 :

« a) (Supprimé)

« b) Le premier alinéa du II est ainsi rédigé :

« “Les deux dernières phrases du premier alinéa et le dernier alinéa du I de l’article 44 et l’article 45 de ladite ordonnance sont applicables.” ;

« c) Aux deux derniers alinéas du II, le mot : “France” est remplacé par le mot : “Nouvelle-Calédonie” ;

« 13° (Supprimé) » ;

6° Le chapitre VI est ainsi rédigé :

« CHAPITRE VI

« Dispositions applicables à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon

« Art. L. 766-1. – Le présent livre est applicable à Saint-Barthélemy dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la réforme du droit d’asile et sous réserve des adaptations suivantes :

« 1° Au dernier alinéa de l’article L. 712-2, les mots : “en France” sont remplacés, deux fois, par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« 2° À l’article L. 723-2 :

« a) Au 1° du II, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “à Saint-Barthélemy” ;

« b) Le 1° du III n’est pas applicable ;

« c) Au 2° du III, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “à Saint-Barthélemy ” ;

« d) Au 3° du III, les mots : “en France” sont remplacés, deux fois, par les mots : “à Saint-Barthélemy” ;

« e) Au 5° du III, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« 3° Au premier alinéa de l’article L. 741-1, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “à Saint-Barthélemy” et les mots : “et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride” ne sont pas applicables ;

« 4° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 741-3, le mot : “français” est remplacé par les mots : “de Saint-Barthélemy” ;

« 5° Le chapitre II du titre IV n’est pas applicable ;

« 6° À l’article L. 743-1 :

« a) À la première phrase, le mot : “français” est remplacé par les mots : “de Saint-Barthélemy” ;

« b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« “Si l’office décide d’entendre le demandeur hors de la collectivité de Saint-Barthélemy, celui-ci reçoit les autorisations nécessaires.” ;

« 7° À l’article L. 743-2 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “à Saint-Barthélemy” ;

« b) À la seconde phrase du 2°, le mot : “français” est remplacé par les mots : “de Saint-Barthélemy” ;

« 8° (Supprimé)

« 9° À l’article L. 743-4, les mots : “ sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “à Saint-Barthélemy” et la seconde occurrence des mots : “le territoire français” est remplacée par le mot : “Saint-Barthélemy” ;

« 10° Aux deux derniers alinéas du II de l’article L. 752-1, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “à Saint-Barthélemy ”.

« Art. L. 766-2. – Le présent livre est applicable à Saint-Martin dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la réforme du droit d’asile et sous réserve des adaptations suivantes :

« 1° Au dernier alinéa de l’article L. 712-2, les mots : “en France” sont remplacés, deux fois, par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« 2° À l’article L. 723-2 :

« a) Au 1° du II, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “à Saint-Martin” ;

« b) Le 1° du III n’est pas applicable ;

« c) Au 2° du III, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “à Saint-Martin” ;

« d) Au 3° du III, les mots : “en France” sont remplacés, deux fois, par les mots : “à Saint-Martin” ;

« e) Au 5° du III, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« 3° Au premier alinéa de l’article L. 741-1, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “à Saint-Martin” et les mots : “et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride” ne sont pas applicables ;

« 4° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 741-3, le mot : “français” est remplacé par les mots : “de Saint-Martin” ;

« 5° Le chapitre II du titre IV n’est pas applicable ;

« 6° À l’article L. 743-1 :

« a) À la première phrase, le mot : “français” est remplacé par les mots : “de Saint-Martin” ;

« b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« “Si l’office décide d’entendre le demandeur hors de la collectivité de Saint-Martin, celui-ci reçoit les autorisations nécessaires.” ;

« 7° À l’article L. 743-2 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “à Saint-Martin” ;

« b) À la fin de la seconde phrase du 2°, le mot : “français” est remplacé par les mots : “de Saint-Martin” ;

« 8° (Supprimé)

« 9° À l’article L. 743-4, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “à Saint-Martin” et la seconde occurrence des mots : “le territoire français” est remplacée par le mot : “Saint-Martin” ;

« 10° Aux deux derniers alinéas du II de l’article L. 752-1, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “à Saint-Martin”.

« Art. L. 766-3. – Pour l’application du présent livre à Saint-Pierre-et-Miquelon :

« 1° Le 1° du III de l’article L. 723-2 n’est pas applicable ;

« 2° Au premier alinéa de l’article L. 741-1, les mots : “et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride” ne sont pas applicables ;

« 3° Le chapitre II du titre IV n’est pas applicable ;

« 4° (Supprimé)

« 5° À l’avant-dernier alinéa du II de l’article L. 752-1, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “à Saint-Pierre-et-Miquelon”. » ;

7° Il est ajouté un chapitre VII ainsi rédigé :

« CHAPITRE VII

« Dispositions particulières à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La Réunion

« Art. L. 767-1. – Pour l’application du présent livre en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à La Réunion :

« 1° Le 1° du III de l’article L. 723-2 n’est pas applicable ;

« 2° Au premier alinéa de l’article L. 741-1, les mots : “et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride” ne sont pas applicables ;

« 3° Le chapitre II du titre IV n’est pas applicable ;

« 4° (Supprimé) »

M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Buffet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 45

Remplacer les mots :

ladite ordonnance

par les mots :

l'ordonnance n° 2000–371 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers dans les îles Wallis et Futuna

II. – Alinéa 80

Remplacer les mots :

ladite ordonnance

par les mots :

l'ordonnance n° 2000–372 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en Polynésie française

III. – Alinéa 115

Remplacer les mots :

ladite ordonnance

par les mots :

l'ordonnance n° 2002–388 du 20 mars 2002 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie

La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 20, modifié.

(L'article 20 est adopté.)

Article 20 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 23

Article 21

(Non modifié)

I. – L’ordonnance n° 2000-371 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers dans les îles Wallis et Futuna est ainsi modifiée :

1° L’article 6-7 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « d’un récépissé d’une demande d’asile » sont remplacés par les mots : « d’une attestation de demande d’asile » ;

b) Au dernier alinéa, après le mot : « réfugié », sont insérés les mots : « ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire » et les mots : « d’un récépissé de demande d’asile » sont remplacés par les mots : « d’une attestation de demande d’asile » ;

1° bis Après l’article 13-1, il est inséré un article 13-2 ainsi rédigé :

« Art. 13-2. – Lorsqu’il est mis fin au statut de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire par décision définitive de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par décision de justice, ou lorsque l’étranger renonce à ce statut ou à ce bénéfice, la carte de résident mentionnée à l’article 20 ou la carte de séjour temporaire mentionnée à l’article 17 est retirée.

« Dans les cas prévus au premier alinéa du présent article, l’autorité administrative statue, dans un délai fixé par décret en Conseil d’État, sur le droit au séjour des intéressés à un autre titre.

« La carte de résident ou la carte de séjour temporaire ne peut être retirée en application du même premier alinéa quand l’étranger est en situation régulière depuis au moins cinq ans. » ;

2° L’article 17 est ainsi rédigé :

« Art. 17. – Sauf si leur présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l’article 16 est délivrée de plein droit :

« 1° À l’étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

« 2° À son conjoint, son partenaire avec lequel il est lié par une union civile ou à son concubin, dans les conditions fixées à l’article L. 752-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

« 3° À ses enfants dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l’article 11 ;

« 4° À ses ascendants directs au premier degré si l’étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection est un mineur non marié.

« La condition prévue à l’article 6-1 n’est pas exigée.

« Le délai pour la délivrance de la carte de séjour temporaire après la décision d’octroi de la protection subsidiaire par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d’asile est fixé par décret en Conseil d’État.

« Par dérogation à l’article 14, la carte délivrée au titre du présent article est renouvelable dans les mêmes conditions pour une durée de deux ans. Elle donne droit à l’exercice d’une activité professionnelle. » ;

3° Le 9° de l’article 20 est ainsi rédigé :

« 9° À l’étranger qui a été reconnu réfugié en application du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ainsi qu’à :

« a) Son conjoint, son partenaire avec lequel il est lié par une union civile ou à son concubin, dans les conditions fixées à l’article L. 752-1 du même code ;

« b) Ses enfants dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l’article 11 ;

« c) Ses ascendants directs au premier degré si l’étranger qui a été reconnu réfugié est un mineur non marié.

« Le délai pour la délivrance de la carte de résident après la décision de reconnaissance de la qualité de réfugié par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par la Cour nationale du droit d’asile est fixé par décret en Conseil d’État ; »

4° Au 1° de l’article 37, les mots : « Commission des recours des réfugiés » sont remplacés par les mots : « Cour nationale du droit d’asile » et, après les mots : « de réfugié », sont insérés les mots : « ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire » ;

5° L’article 45 est ainsi rédigé :

« Art. 45. – Tout étranger présent dans les îles Wallis et Futuna et souhaitant solliciter l’asile présente sa demande dans les conditions fixées aux chapitres Ier et III du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. » ;

6° À l’article 46, après le mot : « refusé », sont insérés les mots : « ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir en France en application de l’article L. 743-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile » ;

6° bis Le huitième alinéa du I de l’article 48 est ainsi modifié :

a) Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« À cette fin, il peut bénéficier d’une assistance linguistique. » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Cette irrecevabilité n’est pas opposable à l’étranger qui invoque, au soutien de sa demande, des faits survenus après l’expiration de ce délai. » ;

7° À la seconde phrase du VI de l’article 50, la seconde occurrence des mots : « un récépissé » est remplacée par les mots : « une attestation ».

II. – L’ordonnance n° 2000-372 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Polynésie française est ainsi modifiée :

1° L’article 7-1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « d’un récépissé d’une demande d’asile » sont remplacés par les mots : « d’une attestation de demande d’asile » ;

b) Au dernier alinéa, après le mot : « réfugié », sont insérés les mots : « ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire » et les mots : « d’un récépissé de demande d’asile » sont remplacés par les mots : « d’une attestation de demande d’asile » ;

1° bis Après l’article 14-1, il est inséré un article 14-2 ainsi rédigé :

« Art. 14-2. – Lorsqu’il est mis fin au statut de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire par décision définitive de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par décision de justice, ou lorsque l’étranger renonce à ce statut ou à ce bénéfice, la carte de résident mentionnée à l’article 22 ou la carte de séjour temporaire mentionnée à l’article 18 est retirée.

« Dans les cas prévus au premier alinéa du présent article, l’autorité administrative statue, dans un délai fixé par décret en Conseil d’État, sur le droit au séjour des intéressés à un autre titre.

« La carte de résident ou la carte de séjour temporaire ne peut être retirée en application du même premier alinéa quand l’étranger est en situation régulière depuis au moins cinq ans. » ;

2° L’article 18 est ainsi rédigé :

« Art. 18. – Sauf si leur présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l’article 17 est délivrée de plein droit :

« 1° À l’étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

« 2° À son conjoint, son partenaire avec lequel il est lié par une union civile ou à son concubin, dans les conditions fixées à l’article L. 752-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

« 3° À ses enfants dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l’article 12 ;

« 4° À ses ascendants directs au premier degré si l’étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection est un mineur non marié.

« La condition prévue à l’article 6-1 n’est pas exigée.

« Le délai pour la délivrance de la carte de séjour temporaire après la décision d’octroi de la protection subsidiaire par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d’asile est fixé par décret en Conseil d’État.

« Par dérogation à l’article 15, la carte délivrée au titre du présent article est renouvelable dans les mêmes conditions pour une durée de deux ans. Elle donne droit à l’exercice d’une activité professionnelle. » ;

3° Le 9° de l’article 22 est ainsi rédigé :

« 9° À l’étranger qui a été reconnu réfugié en application du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ainsi qu’à :

« a) Son conjoint, son partenaire avec lequel il est lié par une union civile ou à son concubin, dans les conditions fixées à l’article L. 752-1 du même code ;

« b) Ses enfants dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l’article 12 ;

« c) Ses ascendants directs au premier degré si l’étranger qui a été reconnu réfugié est un mineur non marié.

« Le délai pour la délivrance de la carte de résident après la décision de reconnaissance de la qualité de réfugié par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par la Cour nationale du droit d’asile est fixé par décret en Conseil d’État ; »

4° Au 1° de l’article 39, les mots : « Commission des recours des réfugiés » sont remplacés par les mots : « Cour nationale du droit d’asile » et, après les mots : « de réfugié », sont insérés les mots : « ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire » ;

5° L’article 47 est ainsi rédigé :

« Art. 47. – Tout étranger présent en Polynésie française et souhaitant solliciter l’asile présente sa demande dans les conditions fixées aux chapitres Ier et III du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. » ;

6° À l’article 48, après le mot : « refusé », sont insérés les mots : « ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir en France en application de l’article L. 743-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile » ;

6° bis Le huitième alinéa du I de l’article 50 est ainsi modifié :

a) Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« À cette fin, il peut bénéficier d’une assistance linguistique. » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Cette irrecevabilité n’est pas opposable à l’étranger qui invoque, au soutien de sa demande, des faits survenus après l’expiration de ce délai. » ;

7° À la seconde phrase du VI de l’article 52, la seconde occurrence des mots : « un récépissé » est remplacée par les mots : « une attestation ».

III. – L’ordonnance n° 2002-388 du 20 mars 2002 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie est ainsi modifiée :

1° L’article 6-7 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « d’un récépissé d’une demande d’asile » sont remplacés par les mots : « d’une attestation de demande d’asile » ;

b) Au dernier alinéa, après le mot : « réfugié », sont insérés les mots : « ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire » et les mots : « d’un récépissé de demande d’asile » sont remplacés par les mots : « d’une attestation de demande d’asile » ;

1° bis Après l’article 14-1, il est inséré un article 14-2 ainsi rédigé :

« Art. 14-2. – Lorsqu’il est mis fin au statut de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire par décision définitive de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par décision de justice, ou lorsque l’étranger renonce à ce statut ou à ce bénéfice, la carte de résident mentionnée à l’article 22 ou la carte de séjour temporaire mentionnée à l’article 18 est retirée.

« Dans les cas prévus au premier alinéa du présent article, l’autorité administrative statue, dans un délai fixé par décret en Conseil d’État, sur le droit au séjour des intéressés à un autre titre.

« La carte de résident ou la carte de séjour temporaire ne peut être retirée en application du même premier alinéa quand l’étranger est en situation régulière depuis au moins cinq ans. » ;

2° L’article 18 est ainsi rédigé :

« Art. 18. – Sauf si leur présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l’article 17 est délivrée de plein droit :

« 1° À l’étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

« 2° À son conjoint, son partenaire avec lequel il est lié par une union civile ou à son concubin, dans les conditions fixées à l’article L. 752-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

« 3° À ses enfants dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l’article 12 ;

« 4° À ses ascendants directs au premier degré si l’étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection est un mineur non marié.

« La condition prévue à l’article 6-1 n’est pas exigée.

« Le délai pour la délivrance de la carte temporaire de séjour après la décision d’octroi de la protection subsidiaire par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d’asile est fixé par décret en Conseil d’État.

« Par dérogation à l’article 15, la carte délivrée au titre du présent article est renouvelable dans les mêmes conditions pour une durée de deux ans. Elle donne droit à l’exercice d’une activité professionnelle. » ;

3° Le 5° de l’article 22 est ainsi rédigé :

« 5°À l’étranger qui a été reconnu réfugié en application du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ainsi qu’à :

« a) Son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile lorsque le mariage ou l’union civile est antérieur à la date de cette obtention ou, à défaut, lorsqu’il a été célébré depuis au moins un an, sous réserve d’une communauté de vie effective entre les époux ou partenaires, ou son concubin si ce dernier avait, avant la date à laquelle le réfugié a déposé sa demande d’asile, une liaison suffisamment stable et continue avec lui ;

« b) Ses enfants dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l’article 12 ;

« c) Ses ascendants directs au premier degré si l’étranger qui a été reconnu réfugié est un mineur non marié.

« Le délai pour la délivrance de la carte de résident après la décision de reconnaissance de la qualité de réfugié par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par la Cour nationale du droit d’asile est fixé par décret en Conseil d’État ; »

4° Au 1° de l’article 39, les mots : « Commission des recours des réfugiés » sont remplacés par les mots : « Cour nationale du droit d’asile » et, après les mots : « de réfugié », sont insérés les mots : « ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire » ;

5° L’article 47 est ainsi rédigé :

« Art. 47. – Tout étranger présent en Nouvelle-Calédonie et souhaitant solliciter l’asile présente sa demande dans les conditions fixées aux chapitres Ier et III du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. » ;

6° À l’article 48, après le mot : « refusé », sont insérés les mots : « ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir en France en application de l’article L. 743-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile » ;

6° bis Le huitième alinéa du I de l’article 50 est ainsi modifié :

a) Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« À cette fin, il peut bénéficier d’une assistance linguistique. » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Cette irrecevabilité n’est pas opposable à l’étranger qui invoque, au soutien de sa demande, des faits survenus après l’expiration de ce délai. » ;

7° À la seconde phrase du VI de l’article 52, la seconde occurrence des mots : « un récépissé » est remplacée par les mots : « une attestation ».

M. le président. L'amendement n° 31, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Á son conjoint ou au partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d’au moins dix-huit ans, si le mariage ou l’union civile est postérieur à la date d’introduction de sa demande d’asile, à condition que le mariage ou l’union civile ait été célébré depuis au moins un an et sous réserve d’une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ;

II. - Après l'alinéa 20

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …) Son conjoint ou son partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d’au moins dix-huit ans, si le mariage ou l’union civile est postérieur à la date d’introduction de sa demande d’asile, à condition que le mariage ou l’union civile ait été célébré depuis au moins un an et sous réserve d’une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ;

III. - Après l'alinéa 45

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Á son conjoint ou au partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d’au moins dix-huit ans, si le mariage ou l’union civile est postérieur à la date d’introduction de sa demande d’asile, à condition que le mariage ou l’union civile ait été célébré depuis au moins un an et sous réserve d’une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ;

IV. - Après l'alinéa 53

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …) Son conjoint ou son partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d’au moins dix-huit ans, si le mariage ou l’union civile est postérieur à la date d’introduction de sa demande d’asile, à condition que le mariage ou l’union civile ait été célébré depuis au moins un an et sous réserve d’une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ;

V. - Après l'alinéa 78

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Á son conjoint ou au partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d’au moins dix-huit ans, si le mariage ou l’union civile est postérieur à la date d’introduction de sa demande d’asile, à condition que le mariage ou l’union civile ait été célébré depuis au moins un an et sous réserve d’une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ;

VI. - Alinéa 86

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« …) Son conjoint, son partenaire avec lequel il est lié par une union civile ou à son concubin, s’il a été autorisé à séjourner en France dans les conditions fixées à l’article L. 752-1 du même code ;

« a) Son conjoint ou à son partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d’au moins dix-huit ans, si le mariage ou l’union civile est postérieur à la date d’introduction de sa demande d’asile, à condition que le mariage ou l’union civile ait été célébré depuis au moins un an et sous réserve d’une communauté de vie effective entre époux ou partenaires ;

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Il s’agit d’un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission n’a pas pu examiner cet amendement. Néanmoins, à titre personnel, j’émets un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 21, modifié.

Mme Esther Benbassa. Je vote pour !

(L'article 21 est adopté.)

Chapitre VII

Dispositions finales

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Article 21 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 23

I A. – Les articles L. 723-3, L. 723-6, L. 723-7, L. 723-13, L. 723-14 et L. 744-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans leur rédaction résultant de la présente loi, s’appliquent aux demandes d’asile présentées à compter du 20 juillet 2015.

I B. – Les dispositions de l’article L. 741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans leur rédaction résultant de la présente loi, s’appliquent aux demandes d’asile présentées à compter du lendemain de la publication de la présente loi, en tant qu’elles prévoient que l’enregistrement de la demande d’asile intervient dans un délai de trois jours ouvrés à compter de sa présentation.

I. – Sous réserve des dispositions du I B du présent article, les articles L. 213-8-1, L. 213-8-2, L. 213-9 dans sa rédaction résultant du 2° du I de l’article 8 de la présente loi, L. 221-1, L. 224-1, L. 311-5, L. 556-1, L. 556-2, L. 722-1, L. 723-1 et L. 723-2, L. 723-5, L. 723-10 à L. 723-12, le second alinéa de l’article L. 731-2, les articles L. 741-1 à L. 741-3, L. 742-1 à L. 742-6 et L. 743-1 à L. 743-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ainsi que l’article L. 777-2 du code de justice administrative, dans leur rédaction résultant de la présente loi, s’appliquent aux demandes d’asile présentées à compter d’une date fixée par décret en Conseil d’État, qui ne peut être postérieure au 1er novembre 2015.

bis. – (Suppression maintenue)

II. – Les articles L. 744-1 à L. 744-5 et L. 744-7 à L. 744-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les articles L. 111-2, L. 111-3-1, L. 121-13, L. 264-10, L. 312-8-1, L. 313-1-1, L. 313-9, L. 348-1, L. 348-2 et L. 348-4 du code de l’action sociale et des familles et les articles L. 5223-1, L. 5423-8, L. 5423-9 et L. 5423-11 du code du travail, dans leur rédaction résultant de la présente loi, s’appliquent aux demandeurs d’asile dont la demande a été enregistrée à compter d’une date fixée par décret en Conseil d’État, qui ne peut être postérieure au 1er novembre 2015.

III, III bis et IV. – (Non modifiés)

V. – Les I A à I du présent article, en tant qu’ils concernent l’application du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.

M. le président. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 3

1° Après la référence :

L. 224–1,

insérer la référence :

L. 311–4,

2° Remplacer la référence :

L. 741–3

par la référence :

L. 741–4

II. - Après l’alinéa 4

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les articles L. 751–1 et L. 751–2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans leur rédaction résultant de la présente loi, entrent en vigueur à compter d’une date fixée par décret en Conseil d’État, qui ne peut être postérieure au 1er novembre 2015.

III. - Alinéa 5

Remplacer la référence :

L. 744–5

par la référence :

L. 744–4

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Cet amendement concerne les conditions d’entrée en vigueur de la loi. J’ai évoqué ce point dans mon intervention au cours de la discussion générale. Aussi, je considère que cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 23, modifié.

Mme Esther Benbassa. Je vote pour !

(L'article 23 est adopté.)

M. le président. Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l'objet de la nouvelle lecture.

Vote sur l'ensemble

Article 23
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Comme annoncé lors de la discussion générale, le groupe socialiste et républicain s’abstiendra lors du vote sur l’ensemble du projet de loi, compte tenu des évolutions que la commission des lois a donné à ce texte. Nous avons largement expliqué lors de la discussion générale et de la présentation des amendements que cette rédaction ne nous convient pas.

Toutefois, je ne doute pas que le projet de loi sera adopté par l’Assemblée nationale sous une forme plus favorable. Avec ce texte, la France disposera d’un outil pour promouvoir et mieux défendre le droit d’asile.

Une crise migratoire frappe aujourd'hui l’Europe, laquelle a besoin d’une boussole afin d’assurer une meilleure répartition solidaire des demandeurs d’asile. L’exemple du dispositif national d’accueil que nous instituons mérite d’inspirer des réflexions européennes sur un dispositif européen d’accueil ou sur ce que notre ministre de l’intérieur appelle « une répartition solidaire des demandeurs d’asile » prenant en compte les préoccupations et les contraintes de chaque pays de l’Union européenne.

L’Europe ne peut pas continuer à discuter de 40 000 demandeurs d’asile, alors que nous voyons que le Liban, la Turquie ou la Jordanie accueillent chacun plus de 1 million de réfugiés, eu égard à la situation géopolitique à leurs portes. L’Europe doit accompagner ces pays et être solidaire.

J’ai la conviction qu’avec ce projet de loi la France a les moyens de parler avec fierté à ses partenaires européens pour défendre une répartition solidaire des demandeurs d’asile sur l’ensemble de l’Union européenne.

Néanmoins, dans l’état actuel du texte, compte tenu des modifications que la commission des lois a voulu imposer à notre assemblée et de la rédaction qui sera votée aujourd'hui, le groupe socialiste et républicain s’abstiendra. Il s’en remet à l’Assemblée nationale pour rétablir un certain nombre de dispositions que nous avons défendues ici sans succès.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, vous avez mené les débats très rapidement : vous avez fait souffler le mistral sur la Haute Assemblée. (Sourires.)

Pour rester dans ce ton et être moi-même rapide, je dirai simplement que mon groupe s’abstiendra, comme en première lecture. Je reviens pas sur les raisons pour lesquelles nous ne voterons ni pour, ni contre ce projet de loi.

Nous sommes toutefois satisfaits que notre groupe ait apporté une pierre à l’édifice. En effet, à travers l’amendement adopté à la fin de la discussion lors de la première lecture, on a changé l’intitulé du projet de loi, ce qui n’est pas rien. En effet, « projet de loi relatif à la réforme de l’asile » faisait quelque peu penser aux asiles d’aliénés ou asiles psychiatriques. L’intitulé « projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile » marquera notre collaboration à l’examen de ce texte. (M. le président de la commission des lois applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, le mistral se calme parfois, donc j’utiliserai le temps qui m’est imparti. Pour faire écho au formidable Mondial la Marseillaise à pétanque qui se déroule en ce moment, il faut parfois prendre son temps pour bien pointer et réussir. (Sourires.)

Le texte initial du Gouvernement présentait déjà, bien évidemment, plusieurs mesures contestables, comme nous l’avons dit lors de la discussion générale, notamment la multiplication des procédures accélérées et le droit de recours quasiment illusoire pour les demandeurs d’asile. Comme nous venons de le voir rapidement mais sûrement, la droite sénatoriale a rendu ce projet de loi encore plus dur, notamment à l’endroit des personnes déboutées de leur demande. Le texte prévoit en effet leur assignation à résidence dans des centres dédiés en vue de préparer leur éloignement, ce qui confine à un véritable enfermement administratif, à l’article 14 bis ; la restriction de l’accès à l’hébergement d’urgence pour ces personnes, à l’article 19 quater – je n’y reviens pas ; ou encore le transfert du contentieux des décisions de refus d’entrée sur le territoire au titre de l’asile prises sur avis conforme de l’OFPRA à la CNDA plutôt qu’au juge administratif de droit commun, à l’article 8.

Autant de mesures qui vont dans le sens d’une surenchère sécuritaire et démagogue.

C’est devenu un des leitmotiv de la droite – je ne parlerai pas ici de l’extrême droite, qui n’est pas venue participer à ces débats ! – : si seulement un quart des demandeurs d’asile voient leurs demandes aboutir, c’est donc, nous dit-on, que les trois quarts seraient des fraudeurs. C’est une rhétorique trompeuse et infondée ! Les déboutés sont avant tout et dans la plupart des cas des personnes n’ayant pas eu la chance d’être pleinement entendues. Une personne dont la famille a été massacrée peut mettre longtemps avant de réussir à faire le récit de son expérience, tant la souffrance est grande et intime.

Nous le disons avec force, ces dispositifs ne doivent pas trouver leur place dans notre législation. Le droit d’asile mérite mieux que cela. Nous ne devons pas lésiner sur les moyens pour défendre cette composante intrinsèque des valeurs de notre République.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cette version du projet de loi. Effectivement, cher collègue Jean-Claude Requier, il ne s’agit pas d’un projet de loi sur l’asile au sens de l’enfermement, mais bien du droit d’asile, qui vise à permettre à celles et ceux qui sont de fait exclus de leur pays ou rejetés par lui de poursuivre leur vie. Nous voulons leur dire que nous pouvons la faire ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux simplement vous dire en quelques mots combien nous pouvons être fiers, me semble-t-il, du travail accompli par notre assemblée dans le cadre de la navette parlementaire.

En effet, au travers des différentes lectures, même si la commission mixte paritaire n’a pas abouti, nous avons réussi à faire évoluer et converger de nombreux points de ce texte. Certes, cette nouvelle lecture permet de réaffirmer quelques points de divergence sur lesquels le Sénat souhaite de nouveau alerter nos collègues députés, non pas parce que nous sommes des obsédés, si je puis dire, de la rétention ou de l’enfermement des demandeurs d’asile. Il ne me semble pas que mes collègues sénateurs aient tenu un tel discours dans cette enceinte. Bien au contraire, nos débats ont été empreints à la fois d’humanité et de fermeté.

Pour qu’une loi soit efficiente, il faut tout simplement qu’elle soit équilibrée pour pouvoir tenir sur ses deux pieds, que sont l’humanité et une application ferme de la loi. Ce n’est que de cette façon que l’on pourra avancer pour mettre en œuvre les procédures de demande d’asile dans les délais exigés par la directive européenne.

Comment être efficace avec les Syriens réfugiés, par exemple, qui ont besoin qu’on agisse dans les plus brefs délais ? Comment leur permettre de rester sur le territoire, de bénéficier du droit de travailler, d’avoir un hébergement, en vue d’une intégration dans les meilleures conditions ? Ne soyons pas « embolisés » parce que nous n’avons pas été capables de faire la part des choses et d’accompagner les demandeurs d’asile avec tout le respect qui se doit et dans des conditions qui ne sont pas l’enfermement ou des conditions inhumaines. Bien au contraire.

Vous savez, mes chers collègues, à quel problème nous sommes aujourd'hui confrontés en matière d’hébergement d’urgence.

Il faut continuer à accompagner les demandeurs d’asile déboutés dans les structures d’hébergement d’urgence de droit commun, mais il ne faut pas faire converger toutes les personnes dans les mêmes structures, qui ne sont pas forcément adaptées. Les centres dédiés à l’accompagnement au retour ne sont pas des centres fermés, pas plus qu’ils ne sont des centres de rétention – de tels centres de rétention administrative existent déjà. Il s’agit là de structures d’hébergement d’urgence pour accompagner les demandeurs d’asile déboutés dans le processus de retour, pour ce qui concerne les démarches tant administratives que financières parce qu’ils ne relèvent pas de l’asile et ne sont pas en situation régulière dans notre pays.

Il convient donc de proposer des structures adaptées à ces personnes pour permettre, demain, aux personnes relevant du dispositif d’hébergement d’urgence de droit commun d’avoir accès à des places d’hébergement. Aujourd'hui, je le répète, tous les publics convergent vers les mêmes structures, ce qui conduit à une explosion du système. Or tout le monde nous demande de le remettre sur pied.

Non seulement ces personnes doivent être accompagnées dans la dignité et le respect, mais il faut aussi, bien sûr, créer les places nécessaires. Tel est le problème majeur que doit traiter le Gouvernement dans notre pays : il faut créer des places pour accompagner les demandeurs d’asile déboutés vers le retour, en leur proposant un hébergement dans des structures adaptées. Voilà l’enjeu ! D’ailleurs, une expérimentation a été lancée avec l’opérateur Adoma.

Nous devons avoir à notre disposition le dispositif nécessaire, avec les CADA, les centres d’accueil de demandeurs d’asile, et l’accompagnement d’urgence dans une phase intermédiaire. Ayons des outils adaptés à la réalité de ce public.

Humanité et fermeté, ce n’est pas autre chose que l’on veut ! Ne caricaturons pas ces débats, qui ont été à la hauteur de notre institution : empreints de respect. Saluons aussi le travail de M. le ministre de l’intérieur, qui a en l’occurrence beaucoup écouté le Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l'ensemble du projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile.

Mme Esther Benbassa. Je vote contre !

(Le projet de loi est adopté.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
 

16

Prise d’effet de nominations à une commission mixte paritaire

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2014–1090 du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées et visant à favoriser l’accès au service civique pour les jeunes en situation de handicap.

En conséquence, les nominations intervenues lors de notre séance du 25 juin dernier prennent effet.

17

Communication du Conseil constitutionnel

M. le président. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le mardi 7 juillet, que, en application de l’article 61–1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel, d’une part, une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L. 631–19–1 du code de commerce (Redressement judiciaire des entreprises) (2015–486 QPC) et, d’autre part, un arrêt de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L. 624–5 du code de commerce (Difficulté des entreprises – Détermination du patrimoine du débiteur) (2015–487 QPC).

Les textes de cette décision et de cet arrêt de renvoi sont disponibles à la direction de la séance.

Acte est donné de cette communication.

18

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 8 juillet 2015 :

À quatorze heures trente :

Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense (n° 494, 2014-2015) ;

Rapport de M. Jean-Pierre Raffarin, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 547, 2014-2015) ;

Texte de la commission (n° 548, 2014-2015) ;

Avis de M. Dominique de Legge, fait au nom de la commission des finances (n° 524, 2014-2015).

À seize heures quinze, le soir et, éventuellement, la nuit :

Sous réserve de la publication du décret du Président de la République et de la communication de la lettre d’ordre du jour du Gouvernement, déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, en application de l’article 50-1 de la Constitution, sur la situation de la Grèce et les enjeux européens.

Suite du projet de loi actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART