M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Dans ma question, je déplorais surtout l’absence de concertation avec les intercommunalités et le bloc communal.
Madame la secrétaire d’État, vous venez de me lire la réponse de M. le secrétaire d’État chargé des transports. Vous avez rappelé que le préfet François Philizot avait pour mission de rencontrer les acteurs territoriaux, en insistant sur le rôle des régions.
Or, pour nous, les acteurs territoriaux, ce sont également les intercommunalités et les agglomérations, qui doivent être totalement intégrées aux instances de dialogue, afin d’améliorer la situation dans nos territoires.
fermeture de la base régionale d'air france à nice
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 1167, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur le maintien des bases régionales Air France, tout particulièrement celle de Nice, dont la fermeture a été annoncée en mai dernier. Cette menace pèse également sur les bases régionales de Marseille et Toulouse.
J’ai bien pris acte de l’accord signé le 17 juillet dernier entre les syndicats de personnels et la direction d’Air France pour maintenir la base niçoise. Mais cet accord est très temporaire, puisqu’il s’achève le 31 octobre 2016, ce qui signifie que des négociations vont reprendre dans un climat social plus que tendu. La pérennité de la base est donc relative, ce à quoi s’ajoute la restructuration des effectifs, en cours de négociation, qui menacerait des emplois dans les escales du sud-est de la France, à Nice ou en Corse.
Pourtant, les bases qui ont été introduites en 2011, afin de répondre à la concurrence des compagnies à bas coût sur les liaisons de court courrier, ont reçu le soutien du PDG d’Air France, qui a vanté leur avantage stratégique lors de son audition devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale en juillet dernier.
Si jamais la base de Nice devait fermer, cela ne serait pas sans conséquence dans et pour les Alpes-Maritimes. Les salariés niçois d’Air France sont implantés localement avec leurs familles. Certains ont réalisé un achat immobilier, leurs conjoints travaillent dans le département et leurs enfants sont scolarisés dans l’académie de Nice. Au total, deux cents familles sont concernées.
Le service de la « navette », qui relie Nice, fidélise les passagers aux équipages régionaux, tout en permettant d’accélérer la rapidité de rotation des avions. Les personnels navigants de réserve répondent à toutes sortes d’imprévus pour garantir la continuité du service.
Madame la secrétaire d’État, en mai, l’État a renforcé sa participation au capital d’Air France en achetant 5,1 millions d’actions supplémentaires, pour atteindre une participation de 17 %.
La semaine dernière, le Gouvernement a témoigné à plusieurs reprises son soutien à la direction d’Air France s’agissant d’un nécessaire plan de redressement face à la concurrence.
Compte tenu de l’échéance du 31 octobre 2016, je souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur une éventuelle nouvelle remise en cause de la base régionale de Nice, qui est pourtant une réussite dans notre territoire, un vecteur d’emplois locaux et une implantation défendue par le PDG de la compagnie.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. Madame la sénatrice, la compagnie Air France avait décidé, à l’été 2011, d’établir des bases dans plusieurs villes de province et d’y lancer des services vers des destinations en France et en Europe. Cette initiative, qui avait pour objectif d’améliorer la productivité du secteur moyen-courrier, a été une réussite opérationnelle, notamment grâce à la mobilisation des salariés autour de ce projet.
Cependant, la société a estimé que l’exploitation de ces bases de province n’avait pas atteint l’équilibre économique et que les services lancés n’avaient pas totalement trouvé leur clientèle. De manière plus globale, l’entreprise considère que le redressement des secteurs court et moyen-courrier de la compagnie passe par une rationalisation de cette activité. Air France a donc, depuis plusieurs mois déjà, réduit progressivement son programme de vols au départ de ces bases.
La compagnie a ainsi initialement annoncé, en mai 2015, la fermeture des trois bases de Marseille, Nice et Toulouse, avec prise d’effet à partir d’octobre.
Cependant, après avoir signé en juillet de nouveaux accords, dont vous avez fait mention, madame la sénatrice, la compagnie a annoncé le maintien de ces bases pour les personnels navigants commerciaux jusqu’au 31 octobre 2016.
Cet horizon est conforme à l’échéance de l’accord collectif global des personnels navigants commerciaux. La question des bases s’inscrit donc dans un périmètre de négociations et de perspectives plus large.
L’issue positive trouvée en juillet dernier conforte le Gouvernement dans son attachement au dialogue social. Les défis qui se présentent à Air France dans les mois à venir sont importants, et le Gouvernement restera attentif aussi bien à l’évolution de la situation économique de l’entreprise qu’aux préoccupations des salariés, l’enjeu primordial restant le redressement de la compagnie. Le Gouvernement appelle ainsi tous les acteurs concernés à reprendre le chemin des négociations, afin de restaurer ensemble la compétitivité de la compagnie et de trouver des accords pérennes assurant l’avenir de l’entreprise, en particulier des bases de province, dont celle de Nice qui vous est chère, madame la sénatrice.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. J’ai bien entendu la réponse de Mme la secrétaire d’État et l’engagement pris par le Gouvernement dans le cadre du dialogue social qui doit pouvoir se mettre en place au sein de la compagnie Air France. Il convient de faire en sorte que ces bases aériennes, qui représentent véritablement un plus pour les territoires concernés, à savoir Marseille, Toulouse et Nice, voient leur pérennité garantie à l’horizon 2016 et au-delà. Sur notre territoire, cela répond véritablement à un besoin exprimé par les salariés de la compagnie.
On peut néanmoins demeurer inquiets. Certes, le plan social annoncé, qui toucherait 2 900 emplois à Air France, ne prévoit pas de départs contraints. Toutefois, à la suite du refus des syndicats de le parapher, des licenciements secs sont à craindre en dernier recours. Outre la base aérienne, si sa pérennité n’était malheureusement pas assurée, ce sont également quarante-huit emplois qui pourraient être menacés en Corse et dans d’autres escales du sud-est de la France. Pour l’ensemble de ces raisons, nous serons extrêmement vigilants.
Au-delà du plan social et de ce qu’il adviendra, il serait important de réfléchir à d’autres pistes d’économies pour la compagnie Air France, d’ailleurs évoquées par la Cour des comptes : je pense notamment au budget global des billets fléchés à destination des salariés d’Air France, qui représente un montant important pour la compagnie.
nuisances du trafic aérien de l'aéroport de genève
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 1201, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Gilbert Roger. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’attire l’attention de M. le secrétaire d’État auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur les nuisances sonores et environnementales causées par le trafic aérien de l’aéroport international de Genève que subissent les communes haut-savoyardes.
L’Association française des riverains de l’aéroport de Genève, l’AFRAG, composée de plus de cent membres et soutenue par les communes d’Yvoire, Nernier, Messery et Chens-sur-Léman, milite pour le déplacement des trajectoires aériennes de la rive française vers le milieu du Petit Lac, par le biais d’une approche dite segmentée et la limitation des vols de nuit.
Le bruit mesuré à Nernier par l’European Aircraft Noise Services au passage d’un avion varie de 65 à 72 décibels. Or le premier vol est à six heures du matin et le dernier à minuit, compris les samedis et dimanches, et bon nombre d’avions sortent leur train d’atterrissage avant ou au-dessus de Nernier.
Le tribunal administratif fédéral suisse a débouté l’AFRAG, le 17 juin 2015, de sa demande de modification du règlement d’exploitation de l’aéroport de Genève, arguant que la décision de l’Office fédéral de l’aviation civile de ne pas modifier la trajectoire devait être confirmée, afin de garantir les conditions de sécurité. Or deux experts indépendants, dont le cabinet néerlandais NLR, reconnu mondialement pour son expertise dans ce domaine, ont confirmé le fait qu’une approche segmentée était techniquement réalisable, sans aucune incidence sur la sécurité des vols.
Les autorités suisses ont déjà mis en œuvre une telle solution à l’aéroport de Zürich, après que l’Allemagne a décidé d’interdire aux appareils qui atterrissent à Zürich de survoler son territoire de nuit. De nombreux autres aéroports – ceux de Nice et de Francfort notamment – ont adopté ce dispositif.
Je souhaite donc savoir si les services de M. le secrétaire d’État peuvent prendre contact avec les autorités suisses, en vue d’apporter une solution au problème des nuisances sonores et environnementales subies par les riverains haut-savoyards.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. Monsieur le sénateur Gilbert Roger, des contacts ont en réalité déjà lieu avec les autorités suisses, et ce depuis un certain temps.
Ces contacts doivent bien entendu se faire dans le respect du principe de la souveraineté de chaque État. À cet égard, il convient de rappeler que la définition des trajectoires aériennes relatives à l’aéroport de Genève relève de la seule responsabilité des autorités suisses.
Cela étant dit, voici les éléments que je suis aujourd’hui en mesure de vous communiquer, et notamment l’historique des procédures intervenues sur ce sujet.
L’Office fédéral de l’aviation civile suisse, l’OFAC, avait approuvé, en 2001, les règlements d’exploitation de l’aéroport de Genève. Cette décision a par la suite été contestée par l’association française des riverains de l’aéroport de Genève, ou AFRAG, devant la commission fédérale suisse chargée d’instruire de tels recours en matière d’infrastructures et d’environnement.
Le désaccord de cette association de riverains français portait, en particulier, sur la procédure d’arrivée en piste 23. Celle-ci est source de nuisances : elle conduit en effet les avions à survoler certaines communes françaises de la rive sud du lac Léman.
La commission a statué en confirmant la validité des règlements d’exploitation de l’aéroport de Genève. Elle a toutefois requis à l’époque que soit étudiée la faisabilité d’une procédure d’approche qui passerait par le milieu du lac Léman.
Un projet a été élaboré en ce sens par le prestataire de la navigation aérienne suisse, Skyguide, et soumis, pour approbation, à l’autorité de l’aviation civile suisse à la fin de l’année 2010.
Ce projet était cependant assorti d’une demande de dérogation à la réglementation aéronautique internationale, en raison d’un alignement tardif avec l’axe de piste. En septembre 2012, l’autorité suisse a fait savoir qu’elle ne donnait pas son aval à cette nouvelle procédure d’arrivée, et ce pour des motifs de sécurité.
Cette décision a été à son tour contestée par l’AFRAG auprès, cette fois, du tribunal administratif fédéral suisse. Celui-ci a cependant rejeté ce recours en validant la position de l’autorité suisse, par un arrêt rendu au printemps dernier.
Dans ce contexte, l’objectif est désormais de rechercher – dans la mesure du possible et dans le respect des décisions intervenues, des règlements et des objectifs de sécurité qui s’y attachent – les moyens susceptibles de réduire les nuisances subies par les riverains, et cela, bien évidemment, sans remettre en cause l’exploitation de cet aéroport.
La Direction générale de l’aviation civile française va donc poursuivre le dialogue déjà engagé avec ses homologues suisses et mené jusqu’à présent – je tiens à le souligner – de manière constructive. Le sujet a été abordé à plusieurs reprises ; il serait notamment opportun de s’inspirer des exemples que vous avez cités.
Toute évolution du dispositif aérien genevois ne me semble devoir s’envisager que dans un climat apaisé, affranchi de la menace de contentieux juridiques tels que ceux qui ont été engagés ces dernières années.
La voie contentieuse n’a pas abouti ; il faut désormais continuer sur la piste – c’est le cas de le dire – du dialogue constructif.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger.
M. Gilbert Roger. Je remercie Mme la secrétaire d’État pour sa réponse, et invite M. Alain Vidalies à nous tenir informés des suites de ce dossier.
Comme vous l’avez dit, qui peut le plus peut le moins : les cas de Nice ou de Francfort, et l’exemple de ce que les autorités allemandes ont obtenu des autorités suisses, montrent que ces dernières, loin de souhaiter déclarer la guerre à la France, sont prêtes à s’engager sur la voie d’une solution intelligente permettant de ménager à la fois la tranquillité des riverains français et l’existence de trajectoires d’atterrissage pour les avions suisses.
accès au revenu de solidarité active
M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, auteur de la question n° 1197, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
M. Jean-Léonce Dupont. Ma question porte sur les conditions d’accès au revenu de solidarité active, le RSA, qui, dans certaines situations, permettent à des personnes nanties et bien avisées d’obtenir des droits en toute légalité.
Depuis la décentralisation du revenu minimum d’insertion, en 2004, et la généralisation du RSA, le département que je préside, le Calvados, s’est fortement investi dans la gestion de ces dispositifs, et notamment dans l’examen des demandes.
Après plus de dix années de fonctionnement, les services de mon département constatent de plus en plus souvent que des personnes détenant des capitaux importants sollicitent et obtiennent le RSA.
Dans le Calvados, ce phénomène, loin d’être anodin, tend même à se développer. Ainsi, entre 2012 et 2013, le nombre de bénéficiaires du RSA a progressé de 10 %, et, sur cette même période, le nombre de personnes ayant déclaré des placements a progressé de 24 %.
En effet, dans l’évaluation des situations patrimoniales, les intérêts des comptes d’épargne sont pris en compte non pas à proportion de leur valeur réelle, mais au taux forfaitaire de 3 %.
Certains ont parfaitement compris cette opportunité. On trouve même, sur certains blogs, des conseils avisés de ce type : « Quand on est au RSA, il faut privilégier ce type d’épargne. L’idéal, c’est de faire diversion : avoir son compte courant dans une banque, et ses comptes d’épargne non imposables dans un autre établissement, de façon à brouiller les pistes. ».
Je constate également que, pour échapper à la prise en compte de certains placements, des bénéficiaires déposent des sommes importantes – plusieurs dizaines de milliers d’euros – sur des comptes courants. Ils profitent ainsi du fait que la Caisse nationale des allocations familiales, ou CNAF, estimant que l’argent des comptes courants est destiné aux dépenses quotidiennes du foyer, refuse d’intégrer ces sommes dans l’évaluation des ressources !
Dans le système actuel, une personne qui détient 180 000 euros de placements peut donc avoir droit au RSA, et surtout bénéficier des droits connexes.
Cette situation particulièrement choquante ne s’accorde pas aux objectifs de la loi du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, qui dispose dans son article 1er que ce dispositif « concourt à la réalisation de l’impératif national de lutte contre la pauvreté et les exclusions. »
Dans ce contexte, le président du conseil départemental devrait pouvoir refuser le bénéfice du RSA au motif que le demandeur ne se trouve pas dans une situation de pauvreté, et pourrait donc s’assumer financièrement. Cela éviterait qu’il ne profite d’un système de solidarité destiné aux plus démunis.
Dans le contexte de grave crise sociale que nous connaissons actuellement, et dans la perspective d’une bonne gestion des deniers publics, il conviendrait de réserver le dispositif du RSA aux personnes qui en ont réellement besoin. Il serait ainsi opportun que notre réglementation soit plus précise, par exemple en fixant un montant de capitaux au-delà duquel le RSA ne serait pas accordé – l’indice du seuil de pauvreté calculé chaque année par l’INSEE pourrait constituer une base objective –, mais aussi en intégrant dans le calcul, au-delà d’un certain seuil, les sommes déposées sur des comptes courants.
Cela irait dans le sens d’une meilleure justice sociale. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Monsieur le sénateur Jean-Léonce Dupont, vous m’interrogez sur la prise en compte des capitaux dans le calcul du revenu de solidarité active.
Le RSA est calculé en prenant en compte l’ensemble des ressources de toutes les personnes composant le foyer.
Dans ce cadre, les capitaux non productifs de revenus – je pense par exemple aux résidences secondaires ou aux avoirs financiers – sont valorisés comme des revenus.
Vous craignez que ces règles ne permettent pas d’intégrer au calcul les moyens financiers de certaines personnes qui, en principe, ne devraient pas bénéficier de ce dispositif de solidarité.
D’aucuns trouvent pourtant cette règle rigoureuse : les avoirs financiers sont par exemple valorisés à 3 % de leur montant, ce qui signifie que cette estimation forfaitaire peut être supérieure à leur rendement effectif.
Vous évoquez en particulier l’exemple de bénéficiaires du RSA qui laisseraient des sommes très importantes sur leur compte bancaire afin que ces dernières échappent à l’évaluation des ressources pour le calcul du RSA.
Il peut s’agir dans ce cas d’une fraude : lorsque le train de vie est manifestement disproportionné par rapport aux ressources déclarées, les caisses d’allocations familiales, ou CAF, mettent en œuvre la procédure « d’évaluation du train de vie », qui permet justement de mettre un terme à des situations, rares mais choquantes, de personnes pour lesquelles le bénéfice des minima sociaux ou de prestations sociales n’est pas justifié.
Les CAF, comme les autres organismes de sécurité sociale, ont en outre la possibilité de croiser des données fiscales et bancaires ; ce data mining permet de cibler les comportements éventuellement frauduleux.
Le Gouvernement demeure donc pleinement attaché à l’attribution, à juste droit, des minima sociaux.
Le juste droit consiste à améliorer le taux de recours, en versant les prestations à ceux qui y sont éligibles ; mais le juste droit revient aussi à verser les minima sociaux à ceux seulement qui en remplissent les conditions.
Les CAF renforcent donc l’efficacité et le ciblage de leurs contrôles, afin d’améliorer le taux de recours aux prestations, tout en multipliant, année après année, le nombre de fraudes évitées ou détectées.
C’est par le développement de cette double approche que nous mettrons fin à des comportements frauduleux qui peuvent – et je m’en inquiète – conduire certains de nos concitoyens à douter de notre système de protection sociale et à dénoncer, parfois trop rapidement, un « assistanat » largement fantasmé.
M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.
M. Jean-Léonce Dupont. Madame la secrétaire d’État, il semble que nous ne vivions pas tout à fait les mêmes situations !
M. Christian Cambon. En effet !
M. Jean-Léonce Dupont. Nous sommes naturellement d’accord sur la nécessité absolue d’un système de solidarité. Or un tel système, pour être effectivement approuvé par l’ensemble de la population, doit permettre une distribution juste, à rebours des situations telles que celles que j’ai décrites.
Au-delà de cette nécessité de reconnaissance et d’acceptation du système de solidarité par l’ensemble de la population, vous n’ignorez pas les difficultés absolument considérables que rencontrent aujourd’hui les départements : on annonce en effet que certains départements seront probablement en état de cessation de paiement à la fin de l’année, qu’un tiers d’entre eux le seront peut-être dans un an, et deux tiers peut-être dans deux ans.
Les mesures que je propose reviendraient simplement à garantir une application stricte de la loi par une définition un peu plus précise des seuils d’éligibilité aux revenus de solidarité, par exemple en prenant pour base le seuil de pauvreté.
Ces mesures permettraient de résoudre, au moins en partie, les très graves difficultés que nous traversons. Si vous n’avez pas conscience de ces difficultés, vous serez très rapidement rattrapés par la réalité de la situation vécue, aujourd’hui, par les conseils départementaux ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
application des conventions collectives au sein des entreprises d'insertion
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la question n° 1179, adressée à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
M. Martial Bourquin. Ma question a pour objet la vitalité des entreprises œuvrant au titre de l’économie sociale et solidaire, et, plus spécifiquement, des entreprises d’insertion.
La loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire témoigne de l’importance que le Gouvernement attache à ce secteur dans la lutte pour la réduction du chômage de longue durée et la création d’activités productives innovantes et non délocalisables.
Notre pays compte 600 entreprises d’insertion, qui emploient 38 000 salariés ; ces entreprises font partie intégrante du tissu économique, dans des secteurs aussi utiles et divers que les transports, les déchets, le bâtiment, l’environnement.
La mission essentielle de ces entreprises consiste cependant, en premier lieu, à faciliter le retour à l’emploi durable des personnes qui en sont très éloignées.
Au sein de ces entreprises d’insertion cohabitent donc des salariés permanents – des encadrants, des formateurs – et des personnels en insertion bénéficiant d’un contrat de travail particulier, d’une durée maximale de deux ans.
Or les conventions collectives s’appliquent aujourd’hui de la même manière à ces deux catégories de salariés – personnels encadrants, demandeurs d’emploi de longue durée –, sans tenir compte ni de la spécificité des entreprises d’insertion et de la mission d’intégration dans l’emploi qu’elles remplissent ni de la durée très variable des contrats de travail des personnels en insertion de ces entreprises.
Je vous demande donc, madame la secrétaire d’État, d’adapter les conventions collectives à cette dualité.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Monsieur le sénateur Martial Bourquin, comme vous l’avez dit, l’insertion par l’activité économique permet à des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, de bénéficier de contrats de travail et d’une démarche individualisée d’accompagnement social et professionnel.
L’objectif est simple : faciliter l’insertion professionnelle durable sur le marché du travail.
Le contrat à durée déterminée d’insertion, prévu pour les structures de l’insertion par l’activité économique, demeure soumis aux règles de droit commun qui régissent les contrats à durée déterminée, hors dérogation expresse.
Le code du travail prévoit ainsi que les salariés recrutés en contrat à durée déterminée doivent être traités sur un pied d’égalité avec les titulaires d’un contrat à durée indéterminée. Ils bénéficient des mêmes droits et obligations, ainsi que des avantages accordés en application de la loi, de la convention collective ou des usages en vigueur. Ils ne peuvent donc pas être écartés du bénéfice d’une mesure à raison de leur seule qualité de salarié sous contrat à durée déterminée.
Les entreprises d’insertion sont des acteurs économiques qui ne peuvent pas ignorer, d’une part, la vocation des partenaires sociaux de créer des garanties à travers les conventions collectives ou accords collectifs pour l’ensemble des salariés d’un champ professionnel défini, et, d’autre part, la volonté réaffirmée du Gouvernement de laisser aux acteurs de la vie économique et sociale le soin d’élaborer les normes de leurs professions secteurs. C’est aussi un enjeu de régulation du jeu de la concurrence : la même règle s’applique à tous.
La France est l’un des pays qui bénéficient de la plus large couverture conventionnelle, grâce au recours à l’extension. Au 31 décembre 2012, quelque 710 conventions collectives de branche couvraient 15,3 millions de salariés.
Au regard des enjeux de l’insertion professionnelle des plus fragiles d’entre nous, faire bénéficier les salariés en insertion des avantages conventionnels est cohérent avec l’évolution du secteur, qui est d’ailleurs perçu comme vecteur de cohésion sociale, de développement des territoires et d’amélioration des conditions de vie.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin.
M. Martial Bourquin. Madame la secrétaire d'État, je souscris à votre plaidoyer en faveur de l’accès des demandeurs d’emploi à la convention collective prévue pour les entreprises d’insertion.
Simplement, je tiens à faire part d’une demande, au nom des entreprises d’insertion : prenons en compte la spécificité du métier des encadrants, qui y effectuent leur carrière pour former les demandeurs d’emploi et les aider à rebondir. Il s’agit non pas d’élaborer une autre convention collective, mais simplement d’adapter celle qui est en vigueur pour tenir compte de cette dualité.
Mme la secrétaire d’État a évoqué la possibilité d’une négociation par branches. Il faut que la négociation reconnaisse la spécificité du métier et valorise ces personnels, qui donnent de leur cœur et de leur savoir-faire au service des chômeurs de longue durée. Reconnaître leur compétence et leur motivation, c’est aussi les mobiliser !
coût du traitement social du chômage