M. le président. L'amendement n° 6, présenté par Mme Herviaux, M. Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, MM. Camani, Cornano, Filleul, J. C. Leroy, Madrelle, Miquel, Poher et Roux, Mmes Tocqueville, Espagnac et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
« Les entreprises ou les groupements d’entreprises mentionnés au premier alinéa du présent article recrutent (le reste sans changement)
La parole est à Mme Odette Herviaux.
Mme Odette Herviaux. Cet amendement vise à substituer « les entreprises ou les groupements d’entreprises » aux termes « les entreprises de manutention portuaire ou leurs groupements ».
M. le rapporteur a précédemment évoqué une opposition de principe, y compris aux amendements rédactionnels. Or, contrairement à ce qu’il avance, cet amendement n’est pas simplement rédactionnel.
En effet, la modification apportée en commission crée une incohérence au sein même de l’article 3 de la proposition de loi : le quatrième alinéa mentionne les entreprises de manutention portuaire ou leurs groupements, tandis que le deuxième alinéa, resté en l’état, fait référence aux entreprises et groupements d’entreprises.
Il ne doit pas y avoir d’ambigüité sur le lien entre ouvriers dockers, opérations de manutention et application de la CNU. C’est pourquoi, par souci de cohérence, il nous paraît nécessaire de rétablir la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Vaspart, rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Neuf amendements ont été déposés, qui visent à revenir au texte de l’Assemblée nationale. Mon avis sera défavorable sur ces neuf amendements.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que l’objectif du texte adopté en commission est de se limiter aux seules modifications rendues nécessaires par l’insécurité juridique découlant de l’extinction des dockers intermittents à l’origine de l’affaire de Port-la-Nouvelle.
S’agissant des autres modifications, relatives au périmètre de la priorité d’emploi des dockers, aux implantations industrielles en bord de quai, aux dockers occasionnels, comme je l’ai précisé tout à l’heure, nous ne remettons pas en cause la qualité du travail de Martine Bonny, ni celle du dialogue qui a eu lieu.
Il se trouve simplement que le Gouvernement n’a pas jugé bon d’accompagner ce travail purement juridique d’une étude d’impact économique des mesures proposées – nous n’avons pas du tout parlé d’économie ! –, afin de s’assurer que la compétitivité de l’ensemble de nos entreprises et de nos ports ne serait pas affectée.
Au cours de mes auditions – j’en ai mené un certain nombre –, j’ai entendu à ce sujet plusieurs craintes que nous ne pouvons appréhender correctement en l’absence d’une analyse économique sérieuse, port par port. En effet, je le rappelle à mon collègue Ronan Dantec, les us et coutumes des ports présentent des différences, notamment sur les périmètres d’intervention des dockers. C’est une réalité !
Aucune urgence, ni sur le terrain ni au niveau européen, ne justifie de s’affranchir de ce travail précieux, alors que nos ports ont besoin de stabilité pour accompagner la modeste reprise de leur activité.
En tout état de cause, le Parlement ne saurait se cantonner à un rôle de chambre d’enregistrement, fût-ce d’un dialogue social réussi, monsieur le secrétaire d’État.
Par conséquent, ma collègue Odette Herviaux ne sera pas surprise de ma position sur l’amendement n° 6. La formulation proposée introduit une ambigüité suggérant une extension potentielle du champ d’application de la priorité d’emploi des dockers. Cette suggestion est sans lien avec la correction du problème juridique que je viens de mentionner, lié à l’affaire de Port-la-Nouvelle. Or c’est là l’objectif premier du présent texte.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Je souhaiterais évoquer deux points qui me paraissent importants.
Premièrement, nous traitons là d’une question institutionnelle majeure. M. le secrétaire d’État évoquait un débat d’ordre politique. Je pense, pour ma part, que nous discutons d’une problématique institutionnelle de première importance.
J’ai tout de même beaucoup de mal, monsieur le secrétaire d’État, à vous entendre dire et redire que, dès lors que le dialogue social a débouché sur un accord, le Parlement doit purement et simplement entériner ce dernier. Que faisons-nous ici ?...
Puisque vous avez le pouvoir d’amender à tout moment les textes, je vous suggère de déposer un amendement visant à prévoir que, à l’avenir, tout accord issu du dialogue social aura force de loi !
À quoi servons-nous si, dans un débat entamé depuis un peu plus d’une heure, chaque fois que nous voulons avancer sur cette proposition de loi, vous nous opposez l’importance du dialogue social et de l’accord obtenu et répondez : « Circulez, il n’y a rien à voir » ?
Oui, le dialogue social est important ! Mais le rôle du Parlement me paraît l’être tout autant. Il est pourtant quelque peu maltraité avec ce texte, que l’on nous présente comme une proposition de loi alors que, de toute évidence, il s’agit d’un projet de loi, que l’on cherche à faire adopter à la hussarde.
Je ne puis accepter, en tant que président de commission, que l’on traite ainsi le Parlement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. Jérôme Bignon. Très bien !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire. Deuxièmement, je veux évoquer un élément tout de même assez frappant, que le rapporteur a rapidement abordé tout à l’heure : monsieur le secrétaire d’État, à aucun moment, je ne vous ai entendu parler d’économie.
M. Jérôme Bignon. C’est la vérité !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire. Vous avez souligné l’importance du dialogue social, mais il semble que l’économie n’intéresse pas le Gouvernement ! Nous n’avons évoqué ni l’impact sur l’emploi ni l’impact sur les entreprises…
D’ailleurs – je ne l’ai pas signalé dans ma première intervention, mais j’y viens maintenant –, c’est sans doute pour cette raison que l’on a préféré la proposition de loi au projet de loi. Le second aurait imposé la réalisation d’une étude d’impact, que la première évite.
Ainsi, nous aurions pu mesurer les conséquences sur les entreprises et l’emploi, alors que, dans le cas présent, nous ne disposons d’aucun élément.
Tout cela n’est vraiment pas satisfaisant !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Peut-être n’ai-je pas été assez explicite dans mon discours d’introduction, monsieur le président de la commission. La question n’est pas juridique, et le vote auquel le Sénat va procéder est parfaitement normal du point de vue du fonctionnement des institutions. En revanche, vous ne pouvez pas échapper à la dimension politique du problème.
Vous avez parfaitement le droit de considérer que cette proposition de loi manque de clarté, qu’elle est insuffisante ou constitue un compromis boiteux. Je l’entends. Toutefois, ne caricaturez pas ma position : personne ne remettra en cause, ni aujourd'hui ni demain, le vote qui sera celui de cette assemblée. Je l’ai dit, il ne peut y avoir de conflit de légitimité, puisque le Parlement est seul légitime. C’est dans cette enceinte que le peuple s’exprime !
Par conséquent, je m’étonne que vous poursuiviez le débat. La situation est claire : je respecte votre position, mais je pense que vous commettez une erreur. Cette erreur n’est ni juridique ni institutionnelle ; elle est politique.
Vous prétendez en outre que je n’ai pas parlé d’économie, essayant probablement de reprendre de vieux schémas tirés de votre vision de ce que peut être un gouvernement de gauche… Franchement, le patronat lui-même juge bon le compromis qui a été trouvé ! Dès lors – j’agis ainsi par souci d’efficacité économique, mais ma position aurait été la même dans tous les cas de figure –, je préfère prendre en compte la position des acteurs économiques, plutôt que de recevoir de la part de la majorité sénatoriale un verdict à ce point sans nuance.
On peut penser que patronat et salariés se trompent, mais, de grâce, évitons la caricature ! D’autres questions de même nature se poseront et, à ce titre, je tiens à rappeler certains de mes propos d’ouverture, qui collent parfaitement à l’actualité.
Aujourd'hui, nous avons un certain recul par rapport aux événements qui se sont déroulés à Port-la-Nouvelle, mais, en plein cœur de la crise, peu de solutions ont été avancées. On assistait effectivement à un conflit frontal entre, d’une part, le syndicat des salariés, et, d’autre part, des acteurs économiques – ils n’étaient pas le patronat représentatif –, cherchant à profiter de l’ambigüité de la loi pour faire, de leurs interventions menées dans des conditions sociales inacceptables, un élément préjudiciable aux autres.
Ainsi, dans cette affaire, démarche économique et démarche sociale sont intimement liées, et c’est précisément ce qui nous est dit au travers de la signature de l’accord. Vous ne voulez pas l’entendre, monsieur le président de la commission, et c’est votre droit. Néanmoins, franchement, ne venez pas caricaturer mes propos !
Je respecte la décision du Sénat, mais le conflit a été très dur. Le choix de Frédéric Cuvillier de mettre en place le groupe de travail présidé par Martine Bonny s’est inscrit dans une démarche de recherche d’un compromis et d’une solution. Cela n’a pas été simple ! Il a fallu trente réunions et des mois de travail pour concilier des intérêts évidemment contradictoires. Cependant, la solution est là.
En prenant le risque de rejeter cette solution, au motif qu’elle ne nous plaît pas, on fait renaître la situation de conflit, non pas, j’y insiste, avec les interlocuteurs habituels que sont l’UNIM et, plus généralement, le patronat, mais avec ceux qui vont à nouveau chercher à s’insérer dans les ambigüités ou imprécisions du droit positif pour recréer les conditions d’un conflit.
Nous sommes bien obligés de sortir de ce conflit. On nous propose une solution ; je la soutiens. Je respecte les positions de chacun, mesdames, messieurs les sénateurs. Mais que l’on n’emploie pas, dans le débat, des arguments que je n’ai pas utilisés, y compris l’argument économique !
L’apaisement, la paix sociale, un fonctionnement clairement établi, une concurrence loyale entre tous les acteurs patronaux grâce au respect des mêmes règles sociales m’apparaissent, du point de vue de l’efficacité économique, tout aussi pertinents que les éléments qui ont été avancés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Filleul. Monsieur le président de la commission, nous n’avons pas entendu, sur ces travées, les propos que vous reprochez à M. le secrétaire d’État.
En commission, nous avons été plusieurs à émettre des doutes quant au rapport, qui, effectivement, passe à côté d’une négociation sociale ayant abouti. D’où une certaine incompréhension de notre part, d’autant que la profession de docker a tout de même connu, dans son histoire, un certain nombre de situations difficiles.
Le compromis obtenu est soutenu par tous. Il permet de sécuriser le principe de priorité d’emploi des dockers, dont le savoir-faire est nécessaire à la sécurité des personnes et des biens. Il garantit également les acquis et permet de mettre en place des négociations port par port, en tenant compte des particularités locales, pour encourager les industriels à avoir recours à la main-d’œuvre de dockers.
Par conséquent, je considère que l’intervention de notre président de commission est hors de propos, eu égard au débat et à la nature de l’intervention de M. le secrétaire d’État. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.
Mme Odette Herviaux. Je veux simplement rappeler que le projet de charte annexé au rapport de Mme Bonny faisait explicitement référence à la « fiabilité » et à la « compétitivité » de nos ports. Aussi, que l’on ne nous reproche pas d’avoir ignoré les aspects économiques de la question !
Sachant ce qui s’est passé il y a quelques années dans nos ports – une période sur laquelle beaucoup se sont exprimés au cours de ce débat –, je tiens à saluer tous les partenaires de cette négociation, qui, je le pense, en faisant référence à la « fiabilité » et à la « compétitivité » de nos ports, ont montré qu’ils tenaient bien évidemment compte de leur développement économique et qu’ils réfléchissaient à la façon d’y favoriser l’installation d’entreprises.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.
(L'amendement est adopté.) – (Exclamations étonnées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Gérard Cornu. Il fallait demander un scrutin public !
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
(Non modifié)
L’article L. 5343-4 du code des transports est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les ouvriers dockers professionnels intermittents sont les ouvriers dockers qui étaient titulaires de la carte professionnelle au 1er janvier 1992 et qui n’ont pas conclu de contrat de travail à durée indéterminée avec une entreprise de manutention portuaire ou avec un groupement d’entreprises de même objet. » ;
2° À la première phrase du second alinéa, les mots : « le docker » sont remplacés par les mots : « l’ouvrier docker ». – (Adopté.)
Article 5
L’article L. 5343-6 du code des transports est ainsi rédigé :
« Art. L. 5343-6. – Les ouvriers dockers occasionnels constituent pour les entreprises ou les groupements d’entreprises mentionnés au troisième alinéa de l’article L. 5343-3 du présent code une main-d’œuvre d’appoint à laquelle il n’est fait appel qu’en cas d’insuffisance du nombre d’ouvriers dockers professionnels.
« Cette main-d’œuvre d’appoint est employée dans le respect de l’article L. 1242-1 du code du travail et du principe de mensualisation posé à l’article L. 5343-3 du présent code.
« Les ouvriers dockers occasionnels ne sont pas tenus de se présenter à l’embauche et peuvent travailler ailleurs que sur le port sans autorisation spéciale. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 2 rectifié est présenté par Mme Jouve, MM. Amiel, Castelli, Collin, Collombat, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
L'amendement n° 7 est présenté par Mme Herviaux, M. Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, MM. Camani, Cornano, Filleul, J.C. Leroy, Madrelle, Miquel, Poher et Roux, Mmes Tocqueville, Espagnac et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 5343-6. – Les ouvriers dockers occasionnels sont les ouvriers dockers qui, afin d’exercer les travaux de manutention portuaire mentionnés à l’article L. 5343-7 du présent code, concluent avec une entreprise ou avec un groupement d’entreprises un contrat de travail à durée déterminée en application du 3° de l’article L. 1242-2 du code du travail et régi par la convention collective nationale unifiée applicable aux entreprises de manutention portuaire.
II. – Alinéa 2
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
« Les ouvriers dockers occasionnels constituent pour les entreprises ou les groupements d'entreprises mentionnés au premier alinéa de l'article L. 5343-3 du présent code...
La parole est à Mme Mireille Jouve, pour présenter l’amendement n° 2 rectifié.
Mme Mireille Jouve. Le texte initial de cet article visait à renforcer et à valoriser le statut des ouvriers dockers occasionnels, afin de remédier à la disparition programmée des dockers intermittents.
Par conséquent, dans le périmètre bien défini de la priorité d’emploi, il me paraît important de clarifier le statut des ouvriers dockers occasionnels via un contrat de travail à durée déterminée conclu avec l’entreprise de manutention et régi par une convention collective.
En commission, monsieur le rapporteur, vous avez fait valoir que, dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, le texte favorisait les ouvriers dockers occasionnels au détriment de travailleurs intérimaires classiques.
Toutefois, eu égard à la dangerosité des travaux de manutention, et dans un périmètre où la sécurité doit primer, je pense qu’il faut privilégier une main-d’œuvre dont la qualification est spécifique et reconnue, et ce d’autant plus lorsque le port fait face à un surcroît d’activité.
C’est pourquoi je propose, par cet amendement, d’en revenir à la version du texte adopté par l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour présenter l'amendement n° 7.
Mme Odette Herviaux. Cet amendement vise également à rétablir la rédaction initiale de l’article 5.
Comme vient de le dire Mme Jouve, il est en effet nécessaire de conforter dans la loi la définition des dockers occasionnels, qui, jusqu’à présent, n’existait que par la négative dans le code des transports. Il est également essentiel de préciser que les contrats conclus sont régis par la convention collective unifiée applicable aux entreprises de manutention portuaire.
Ainsi, l’article 5 définit les dockers occasionnels par rapport au contrat de travail qui les lie à leur employeur, le « contrat de travail à durée déterminée d’usage constant », et fait référence à la convention collective du 5 avril 2011.
En définitive, il est nécessaire de consolider le statut des dockers occasionnels, qui constituent une main-d’œuvre d’appoint importante pour répondre aux fluctuations de l’activité portuaire.
C’est ce que nous demandons au travers de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Vaspart, rapporteur. La commission a en effet supprimé la définition des dockers occasionnels proposée dans le texte, au motif qu’elle risquait potentiellement de perturber le fonctionnement de certaines entreprises. En tout état de cause, une étude d’impact économique aurait permis d’apprécier concrètement l’incidence de cette mesure sur les ports français et les entreprises utilisatrices.
La commission émet donc un avis défavorable.
Tout à l’heure, j’ai entendu parler de dogmatisme. Je veux bien tout accepter, mais le dogmatisme, ce n’est pas dans mes gènes, si j’ose dire.
M. Michel Vaspart, rapporteur. Non, cher collègue ! Je le répète : ce n’est pas dans mes gènes.
Les premières auditions auxquelles la commission a procédé m’avaient conforté dans l’idée de proposer un vote conforme de l’article 5. Cependant, les auditions ultérieures – elles ont été nombreuses au total – m’ont convaincu qu’il fallait disjoindre le règlement du problème soulevé par le cas de Port-la-Nouvelle, qui est un vrai sujet et qui est réglé spécifiquement par le texte adopté par la commission, du reste de la proposition de loi.
En effet, l’ensemble de ces questions mériterait d’être traité dans un projet de loi à part entière, présenté par le ministère chargé des transports, auquel serait adjointe une étude d’impact et qui ferait l’objet de deux lectures dans chaque chambre.
Tout à l’heure, il a été question d’économie, mais sait-on quelles seront les conséquences de ce que nous nous apprêtons à voter sur les entreprises utilisatrices de nos ports français ? Non, parce qu’on ne dispose pas d’une étude d’impact ! Un tel document me semble essentiel pour ne pas commettre d’erreur quand on vote les lois de la République.
Monsieur le secrétaire d'État, une dernière chose : le dialogue social réussi a parfois conduit à des excès dans un certain nombre de domaines, rendant nos entreprises non compétitives ; on l’a quelque peu vérifié dans le domaine des transports.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2 rectifié et 7.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 17 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 153 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 5.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 18 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 217 |
Contre | 124 |
Le Sénat a adopté.
Article 6
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 3 rectifié est présenté par Mme Jouve, MM. Amiel, Castelli, Collin, Collombat, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
L'amendement n° 8 est présenté par Mme Herviaux, M. Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, MM. Camani, Cornano, Filleul, J.C. Leroy, Madrelle, Miquel, Poher et Roux, Mmes Tocqueville, Espagnac et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 5343-7 du code des transports est ainsi rédigé :
« Art. L. 5343-7. – Afin de garantir la sécurité des personnes et des biens, un décret en Conseil d’État détermine les travaux de chargement et de déchargement des navires et des bateaux dans les ports maritimes de commerce qui sont prioritairement effectués par des ouvriers dockers appartenant à l’une des catégories définies à l’article L. 5343-2.
« Toutefois, les conditions dans lesquelles sont effectués les travaux de chargement et de déchargement des navires et des bateaux pour le compte propre d’un titulaire d’un titre d’occupation domaniale comportant le bord à quai sont fixées conformément à une charte nationale signée entre les organisations d’employeurs et de salariés représentatives du secteur de la manutention portuaire, les organisations représentatives des autorités portuaires et les organisations représentatives des utilisateurs de service de transport maritime ou fluvial. »
La parole est à Mme Mireille Jouve, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié.
Mme Mireille Jouve. Lors de la réunion de la commission, M. le rapporteur a supprimé l’article 6, au motif que les questions abordées, à savoir le périmètre d’emploi des dockers et les implantations industrielles, débordaient largement le problème d’insécurité juridique lié à l’extinction des dockers intermittents et qu’elles risquaient de remettre en cause des équilibres fragiles.
Cette interprétation me semble erronée, pour deux raisons.
Premièrement, en maintenant le droit en vigueur, on entretient les difficultés actuelles, suscitées par l’interprétation de la notion réglementaire de « lieux à usage public », source de conflits locaux. À l’inverse, le texte, avant son examen en commission, précisait dans la loi la justification de l’existence de la priorité de l’emploi des dockers, à savoir la sécurité des personnes et des biens. En quoi cette rédaction méconnaîtrait-elle davantage le droit européen, le périmètre de la priorité de l’emploi n’étant pas étendu par rapport à la situation actuelle ?
Deuxièmement, l’article 6 prévoyait la mise en œuvre d’une « charte nationale » concernant les nouvelles implantations industrielles en bord de quai.
Cette charte, il faut le souligner, est issue de concertations poussées et d’un dialogue social fructueux avec l’ensemble des acteurs concernés. En outre, elle ne me semble pas de nature à remettre en cause les équilibres fragiles que je viens d’évoquer, puisqu’elle concerne non pas l’existant, mais seulement les nouvelles implantations.
Par ailleurs, les auteurs de la proposition de loi ont voulu en faire un mécanisme souple, capable d’être adapté port par port, suivant les négociations entre les différents acteurs locaux. J’y insiste : pourquoi se priver d’un dispositif approuvé par la majorité des partenaires sociaux ?
Pour toutes ces raisons, je propose de rétablir la version du texte issue des travaux de l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour présenter l’amendement n° 8.
Mme Odette Herviaux. Cet amendement vise lui aussi à rétablir l’article 6, dont l’objectif est double.
Premièrement, il s’agit de procéder à la réécriture juridique de la règle de priorité des dockers sur les autres personnels. La définition d’un périmètre d’activité réservé aux dockers serait ainsi fondée sur la nécessité de « garantir la sécurité des personnes et des biens ».
Cet apport du texte initial, préconisé dans le rapport de Martine Bonny, est essentiel, car il permet de faire reconnaître par la loi le caractère d’intérêt général de l’activité de docker. Il permet aussi de se conformer aux exigences de la commission européenne.
Deuxièmement, l’article 6 prévoit la mise en place d’une charte nationale pour les opérations de manutention effectuées pour le compte propre d’entreprises occupant le bord à quai – il en va ainsi des implantations industrielles. Cet objectif est fondamental.
Le titulaire d’une autorisation d’occuper le bord à quai est une entreprise qui peut librement exercer son activité, conformément au droit de l’Union européenne. Dès lors, la conciliation entre la priorité d’emploi des dockers et la liberté de l’entreprise ne peut se faire par une règle impérative.
À cet égard, la charte constitue une solution souple, fondée sur la négociation entre les différentes parties prenantes. Elle sera signée par les représentants des employeurs, des syndicats de dockers, des autorités portuaires et des organisations d’utilisateurs de services de transport maritime.
Le projet de charte nationale est connu : il figure dans le rapport rédigé par Mme Bonny. Ce projet garantit les acquis, ce qui est très important, et permet de mettre en place des négociations, port par port, en tenant compte des particularités locales, pour encourager les industriels à avoir recours à la main d’œuvre de dockers.
Bien évidemment, mon groupe ne s’oppose pas, par principe, au dialogue social. Au contraire, nous pensons que celui-ci doit être soutenu et encouragé. C’est pourquoi nous demandons le rétablissement de l’article 6.