Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-127 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II–444 rectifié, présenté par MM. Gilles, Dallier, Cambon, Calvet, Bonhomme, Bizet, Bignon, G. Bailly et Allizard, Mme Bouchart, MM. Bouchet et Buffet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cornu, Retailleau, Danesi et Dassault, Mme Debré, MM. Delattre et del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, M. P. Dominati, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mmes Duranton et Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, J.P. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Huré, Husson, Joyandet et Karoutchi, Mme Keller, M. Kennel, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Leleux et Lenoir, Mme Lopez, MM. Mandelli, Masclet, A. Marc et Mayet, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon, Morisset, Mouiller, Nègre, de Nicolaÿ, de Raincourt, Panunzi, Paul, Pellevat, Perrin, Pierre, Pillet, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, MM. Raison, Reichardt, Revet, D. Robert, Savary, Savin et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle et Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 33 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de l’article 1396 du code général des impôts est ainsi rédigé :
1° Le A est supprimé ;
2° Au premier alinéa du B, les mots : « Dans les communes autres que celles mentionnées au A » sont supprimés ;
3° Le C est ainsi modifié :
a) À la première phrase, la référence : « au A » est remplacée par la référence : « au B » et les mots : « , par l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme et, pour la majoration mentionnée au B » sont supprimés ;
b) À la dernière phrase, les références : « aux articles L. 2332-2 et L. 3332-1-1 » sont remplacées par la référence : « à l’article L. 2332-2 » ;
4° Le D est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du 1, les mots : « Les majorations prévues aux A et B ne sont pas applicables » sont remplacés par les mots : « La majoration prévue au B n’est pas applicable » ;
b) Au premier alinéa du 2, les mots : « des majorations prévues aux A et B » sont remplacés par les mots : « de la majoration prévue au B » ;
c) Au 3, les mots : « Les majorations prévues aux A et B ne sont pas prises » sont remplacés par les mots : « la majoration prévue au B n’est pas prise ».
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Le montant de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, la TFPNB, a explosé de 25 % en raison d’une hausse de 5 euros par mètre carré depuis le 1er janvier 2015 dans les zones dites « tendues », qui correspondent à vingt-huit agglomérations. L’augmentation sera encore plus disproportionnée à partir de 2017, avec une nouvelle hausse de 25 %, soit 10 euros par mètre carré.
Cette hausse de la taxe foncière est absolument confiscatoire : pour un terrain de 1 000 mètres carrés, la taxe foncière a pu passer de quelques centaines d’euros à plus de 5 000 euros en 2015 et pourrait passer à 10 000 euros en 2017. Ainsi, certains Français propriétaires ont parfois vu leur taxe foncière multipliée par cent ! Aujourd’hui, la situation est telle que certains maires, préoccupés par la situation de leurs administrés, refusent de communiquer à l’administration la liste des terrains constructibles sur leur commune.
Au regard de ce constat, le présent amendement tend à aligner le niveau et les modalités de la hausse de la TFPNB dans les zones tendues sur ce qui prévaut dans les zones non tendues, où la hausse est soumise à une décision du conseil municipal et limitée à un montant forfaitaire fixé entre 0 euro et 3 euros par mètre carré. La hausse, limitée à des proportions raisonnables, relèvera de la seule responsabilité du conseil municipal. Cet amendement se justifie d’autant plus que le « choc d’offre » attendu ne semble pas s’être réalisé.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ce sujet est bien connu du Sénat, qui avait appelé l’attention du Gouvernement, madame la secrétaire d’État, sur le risque de cette majoration automatique de la taxe foncière. L’année dernière, la commission des finances avait ainsi adopté, à l’unanimité,…
M. Michel Bouvard. Tout à fait !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. … je dis bien « à l’unanimité, un amendement tendant à rendre facultative et modulable cette hausse de la taxe foncière. Cette position, qui n’était donc pas « clivante » du point de vue politique, était partagée sur toutes les travées.
Mme Axelle Lemaire, qui était à votre place à l’époque, nous avait expliqué que notre position était très mauvaise et qu’elle n’aboutirait pas à libérer du foncier. Je me souviens des débats que nous avions eus ; l’avis du Gouvernement était défavorable et on nous disait que l’adoption de l’amendement mettrait à mal la politique volontariste consistant à libérer le foncier.
On s’aperçoit, un peu tard, qu’il y a un problème. C’est pourquoi la commission des finances ne peut que souscrire à cet amendement. Il y aura d’autres dispositions dans le projet de loi de finances rectificative mais aujourd’hui nous examinons le projet de loi de finances et on ne peut que supprimer cette majoration automatique.
Il y a par ailleurs eu d’autres sujets de ce type, comme la taxe communale sur la consommation finale d’électricité. Cela montre que le Gouvernement devrait parfois plus écouter le Sénat, qui est raisonnable dans ses demandes. Sans quoi, on s’aperçoit un peu tard de ses erreurs…
Mme la présidente. C’est donc un avis favorable sur l’amendement n° II-444 rectifié, monsieur le rapporteur général ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Le Gouvernement est conscient des effets inattendus de cette mesure et il est favorable à une modulation de la majoration par les communes ou par les établissements publics de coopération intercommunale.
Cela étant, la mesure contenue dans cet amendement ne répondrait pas à toutes les situations et la mise en œuvre dès 2016 ne paraît pas possible. M. le rapporteur général l’a dit, le Gouvernement reviendra devant vous, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, avec un amendement plus équilibré et permettant de répondre à l’ensemble des difficultés soulevées par cette mesure.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. M. le rapporteur général a fait le point sur une position de principe de la commission des finances, partagée en effet à l’unanimité.
Je veux seulement ajouter, à la suite de Mme la secrétaire d’État, que l’amendement proposé ne répond pas à la totalité des cas, car il ne vise que les zones particulièrement tendues. Ce n’est pas ainsi qu’il convient de répondre, il faut traiter la question de la modularité de manière générale.
Si j’ai bien compris, cela fera l’objet d’une proposition lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative. Quitte à reprendre ce texte, autant le faire de manière extrêmement solide et ne pas s’en tenir à un petit bout du sujet. C’est pourquoi notre groupe votera contre cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.
M. Dominique de Legge. Pour ma part, je suivrai l’avis de la commission pour une raison simple, qu’évoquait d’ailleurs tout à l’heure notre collègue Mme Beaufils : cela va dans le sens de la libre administration des collectivités territoriales. Je voterai donc volontiers cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Pour faire suite aux arguments développés par Mme la secrétaire d’État, on en reparlera dans le projet de loi de finances rectificative.
En tout état de cause, deux points posent problème dans cet amendement : la modularité a disparu ainsi que les zonages, puisqu’on enlève toutes les zones autres que la zone A. Pour ces deux motifs, je suis très défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Notre collègue Daniel Raoul vient de le dire, cet amendement pose une bonne question mais il faut chercher la bonne articulation de la modularité et du zonage pour y répondre.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur général, je précise que la commission des finances avait demandé le retrait de l’amendement, elle n’avait pas donné un avis favorable. Il me semble que c’était le point de vue collectif que nous avions exprimé.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je suis désolé, madame la présidente, c’est allé un peu vite hier soir, je l’avoue. Nous avions effectivement demandé le retrait de l’amendement pour des raisons de coordination avec le projet de loi de finances rectificative.
Néanmoins, sur le fond, je le répète, nous étions très largement favorables au principe – il y avait ainsi eu unanimité en 2015 pour que la modulation de cette taxe soit possible ; il nous avait alors été répondu que c’était impossible. On s’aperçoit aujourd’hui de l’erreur et on essaie de la corriger. Donc, sur le fond, je partage complètement l’intention des auteurs de l’amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Nous maintiendrons cet amendement et nous demanderons un scrutin public. Il faut que le Sénat fasse preuve de continuité et soit respecté ; il me semble utile de continuer de dire ce que nous pensons et d’insister sur la belle pagaille que cette disposition a engendrée.
Au moins, un vote au Sénat nous permettra de dire clairement à toutes les personnes concernées dans nos communes – il y en a, et elles sont souvent très modestes ! – que nous ne sommes pas du tout d’accord avec cette surimposition, élaborée à l’aveugle.
On parle beaucoup de zonage mais cela fait des années que nous demandons tous une mise à jour de toutes les valeurs locatives. Tous les zonages sont approximatifs. (M. Vincent Delahaye fait une moue dubitative.) Si, mes chers collègues, en milieu urbain, tous les zonages sont approximatifs et vous le savez ! En région parisienne, en tout cas, je peux vous le dire !
Même si nous faisons des efforts pour clarifier les responsabilités, il reste beaucoup de travail. Et quand cela va un peu mieux, cela tient à des initiatives des collectivités territoriales, non des services fiscaux.
Pour toutes ces raisons, nous demandons un scrutin public, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. J’ai bien entendu l’ensemble des remarques échangées. Je pense toutefois qu’il serait important d’attendre le projet de loi de finances rectificative, pour avoir un texte plus proche de ce qui se vit sur le terrain et qui ne soit pas écrit dans la précipitation. Même si de vraies questions sont posées, je pense qu’il y a encore besoin d’affiner la proposition.
Se donner quelques jours – puisque c’est de cela qu’il s’agit – me paraît judicieux. Je ne dis pas qu’il ne faut pas modifier, je dis simplement que la modification proposée n’est pas nécessairement la plus efficace.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-444 rectifié.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que la commission a sollicité le retrait de l’amendement et que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 98 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 189 |
Contre | 155 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 33 septies.
L'amendement n° II–102 rectifié, présenté par M. Delahaye, est ainsi libellé :
Après l’article 33 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1516 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Aucune mutation des propriétés bâties ou non bâties ne peut intervenir, que ce soit à titre gratuit ou onéreux, sans que la valeur locative des biens visés n’ait été mise à jour au cours des vingt-quatre mois précédant ladite mutation. »
La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Cet amendement, que l’on pourrait qualifier d’« amendement d’appel », concerne les valeurs locatives.
Vous savez, mes chers collègues, qu’une réforme de ces valeurs a été décidée en 2010.
Cette réforme est déjà compliquée à mettre en œuvre pour les locaux industriels, comme en témoignent les discussions encore en cours. Un amendement tendant à éviter que les petits commerces et les services de centre-ville ne soient pénalisés par rapport aux grandes surfaces et aux bureaux sera examiné prochainement.
On sait que la mise en œuvre sera encore plus difficile pour les locaux d’habitation. Une expérimentation a lieu dans cinq départements. Nous n’en connaissons pas encore les résultats, car le rapport qui doit être produit à ce sujet ne devrait être remis qu’au début de l’année 2016 – nous l’attendons déjà depuis un moment.
Pour ma part, je considère qu’une réforme d’ensemble risque d’être assez compliquée et politiquement assez difficile à assumer, quel que soit le Gouvernement qui la décide.
Cet amendement prévoit de réévaluer la valeur locative des locaux, pour mieux tenir compte de leur valeur réelle, à l’occasion de chaque mutation ou de chaque succession. Cela permettrait une mise à jour progressive de l’ensemble des biens, alors qu’une mise à jour brutale entraînerait forcément des transferts, souvent douloureux – en tout cas pour ceux qui verront leur taxe augmenter fortement – entre contribuables.
Même si c’est de manière progressive, l’adoption de cet amendement permettrait d’engager, enfin, la réforme des valeurs locatives.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Vincent Delahaye pose à juste titre la question de la révision des valeurs locatives, en particulier pour les habitations.
Vous le savez, mes chers collègues, ce sujet est un véritable serpent de mer. Son traitement est repoussé d’année en année.
Comme notre collègue l’a indiqué à l’instant, la révision des valeurs locatives a fait l’objet d’une expérimentation dans cinq départements. Nous ne disposons pas encore du rapport tirant les conclusions de cette expérimentation, que la direction générale des finances publiques, la DGFIP, nous avait pourtant promis, me semble-t-il, pour septembre 2015. Autrement dit, nous avons encore des doutes sur la volonté du Gouvernement de mener à bien cette réforme.
Je me souviens des interrogations qu’avait suscitées le report de la réforme des valeurs locatives professionnelles. Pour les locaux d’habitation, on sait que le sujet est extrêmement compliqué.
En l’occurrence, la méthode proposée est simple : il s’agit de saisir l’occasion de chaque mutation immobilière pour mettre à jour la valeur locative du bien concerné.
Je ne sais pas exactement comment on procéderait, concrètement, à cette révision. Il faudrait probablement remplir des fiches.
Au reste, on sait bien que, dans certains départements, les taux de rotation sont extrêmement faibles. Il faudrait donc des dizaines d’années pour parvenir à mettre à jour l’ensemble des valeurs locatives.
Toutefois, le dispositif de l’amendement n’est pas antinomique avec un travail de fond qui pourrait être réalisé sur une révision générale des valeurs locatives.
Si je suis plutôt favorable à l’amendement, je souhaiterais tout de même entendre le Gouvernement sur ses intentions et sur les raisons pour lesquelles la méthode que propose notre collègue n’est pas d'ores et déjà mise en œuvre.
La commission s’en remet donc à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. La mise à jour des valeurs locatives au fil des mutations comporte, nous semble-t-il, des risques majeurs, à la fois pour les contribuables et pour les collectivités.
Pour les contribuables, cette révision aurait pour effet immédiat de créer des ruptures d’égalité – y compris, éventuellement, entre voisins.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Elles existent déjà !
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Il faut bien en mesurer les effets.
La révision pourrait aussi conduire à freiner le marché immobilier.
En outre, la condition posée dans l’amendement nous semble même ne pas être compatible avec nos règles constitutionnelles.
Enfin, une révision des valeurs locatives assortie d’un dispositif de mise à jour permanente est engagée pour les locaux professionnels – vous en avez fait mention – et une expérimentation est en cours pour les locaux d’habitation.
Pour ces raisons, nous sommes défavorables à l’amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je veux simplement faire remarquer que, si cet amendement était voté par le Parlement, il faudrait informer les futurs acquéreurs de la possibilité d’une augmentation substantielle du montant des impôts.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement est intéressant,…
M. Francis Delattre. Ah !
Mme Marie-France Beaufils. … parce qu’il soulève une vraie question.
Ayant signé, hier, divers actes notariés relatifs à des sujets municipaux, j’ai été amenée à constater que c’est souvent au moment de la vente de biens que l’on découvre que des travaux y ont été réalisés, sans aucune déclaration. (M. Francis Delattre opine.)
M. Michel Bouvard. C’est vrai !
Mme Marie-France Beaufils. La mutation est donc un moment de mise à jour qui n’est pas négligeable.
M. Michel Bouvard. Loin de là !
Mme Marie-France Beaufils. Elle présente, ainsi, un intérêt pour l’évolution des bases locatives.
Madame la secrétaire d'État, je n’ai pas bien compris l’argument que vous avez avancé sur l’inégalité devant l’impôt.
M. Francis Delattre. Personne ne l’a compris !
Mme Marie-France Beaufils. En effet, la valeur locative peut être mise à jour par les services fiscaux dès aujourd'hui, en cas de permis de construire ou de déclaration de travaux ayant modifié la valeur locative du bien.
La mutation permet quant à elle d’intégrer, dans la valeur du bien, les travaux qui n’avaient pas été déclarés.
Si la proposition de notre collègue mérite sans doute d’être examinée un peu plus attentivement, je trouve que l’idée qui la sous-tend est intéressante. Par conséquent, je suis plutôt encline à voter l’amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.
M. Jean-François Longeot. Je trouve cet amendement excellent : il nous invite à engager la réforme des valeurs locatives, sur laquelle on réfléchit depuis des années et des années sans pour autant la mettre en œuvre, pour un ensemble de raisons que je n’exposerai pas maintenant.
Madame la secrétaire d'État, des inégalités, il en existe d'ores et déjà beaucoup dans nos communes, ne serait-ce qu’entre les biens récents et ceux qui le sont moins. D’ailleurs, j’aurais beaucoup de mal à croire un maire qui oserait me dire que tous les biens situés sur le territoire communal sont logés à la même enseigne… sauf s’il m’en amène les preuves – mais cela ne va pas être évident.
Au reste, l’adoption de l’amendement permettrait à l’acquéreur de savoir, au moment de la mutation, comment son bien sera classé.
Pour ce qui me concerne, je voterai cette proposition, que j’estime très intéressante.
Mme la présidente. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. La question qui est posée au travers de cet amendement est légitime, mais la proposition consistant à lui apporter une réponse de façon ponctuelle et au cas par cas dans les territoires ne me semble pas bonne.
En effet, comme Mme la secrétaire d'État l’a dit, le processus de révision des valeurs locatives est d'ores et déjà engagé. Nos collègues députés ont voté voilà deux jours un amendement au projet de loi de finances rectificative pour faciliter la mise en œuvre du dispositif pour les locaux commerciaux dès le 1er janvier 2017. Le dispositif sera également opérationnel pour les locaux d’habitation dans un délai aussi court que possible – je pense qu’il devrait pouvoir être concrétisé d’ici à très peu d’années.
D'ailleurs, on peut se féliciter du fait que ce soit le Sénat qui ait été à l’initiative de ce processus, puisque c’est dans cet hémicycle qu’avait été votée la mise en route de cette révision générale. (M. Jacques Chiron opine.)
Pourquoi serait-il dangereux de procéder à des révisions ponctuelles dans l’attente de cette révision générale ? Tout simplement parce que les évaluations des valeurs locatives qui seront faites tiendront compte de zonages en cours de révision.
Si l’on prend des dispositions parcellaires, au coup par coup, pour les seules résidences faisant l’objet d’une mutation, on définira des références de valeur locative tout à fait isolées du territoire environnant, sans intégrer la problématique d’ensemble. Celle-ci doit donner lieu à l’établissement de zonages homogènes par les commissions qui se réunissent dans chaque préfecture et donc au rétablissement d’une sorte d’équité de traitement entre les personnes vivant dans une même zone, comme l’a souligné Mme la secrétaire d'État, de manière à éviter les distorsions et les inégalités.
Dès lors, il me semble préférable d’attendre la discussion du projet de loi de finances rectificative pour évoquer avec le Gouvernement les solutions envisagées sur ce dossier.
En tout état de cause, je crains que les inégalités que pourrait engendrer l’adoption de l’amendement ne soient tout à fait préjudiciables.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. François Marc. Je ne le voterai donc pas. Mais peut-être notre collègue va-t-il le retirer…
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. À l’évidence, cet amendement recoupe deux sujets.
Le premier, c’est celui de la révision générale des bases ou de la révision au fil de l’eau que permettrait une actualisation des bases à chaque mutation. Cette dernière est intéressante, mais pose effectivement un problème constitutionnel que l’on ne peut pas évacuer. Je le dis en connaissance de cause, car ce problème m’avait été opposé lorsque, voilà quelques années, j’avais fait la même suggestion que M. Delahaye.
Le second sujet, notamment évoqué par Mme Beaufils, est celui de l’actualisation des bases locatives en raison de travaux effectués sur le bien. Très souvent, nous le savons, une partie de ces travaux n’est pas déclarée et les actualisations ne sont pas faites. (MM. François Marc et Daniel Raoul opinent.)
Je me demande s’il existe un moyen de scinder ces deux sujets distincts, c’est-à-dire, d’une part, la révision générale des bases avec les questions de sectorisation et autres, évoquées par François Marc, et le problème de constitutionnalité et, d’autre part, la prise en compte des travaux effectués sur le bien au moment d’une mutation – parce qu’il s’agit d’une bonne opportunité pour le faire – pour permettre une revalorisation de la valeur locative, ce qui est tout à fait indépendant du zonage.
La situation actuelle se traduit en effet par une perte de recettes pour les collectivités locales et par un manque de transparence dans l’évaluation de la valeur locative d’un bien.
Si nous parvenions à scinder ces deux sujets, je pense que nous pourrions nous accorder au moins sur le second d’entre eux qui, lui, n’est pas contestable et ne crée aucune inégalité ; au contraire, il remet de l’égalité.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Ma première impression, en lisant cet amendement, est positive.
La question de la revalorisation des valeurs locatives est un serpent de mer. Nous sentons tous la difficulté qu’il y aurait à la mettre en œuvre. Le jour où nous voudrons avancer sur cette question, nous savons pertinemment qu’il y aura des gagnants et des perdants, sachant qu’on ne voit jamais les gagnants et qu’on voit tous les perdants.
C'est la raison pour laquelle cet amendement, dans un premier temps, peut sembler assez astucieux. Son adoption permettrait de mettre discrètement en route cette réforme et de faire passer les choses plus facilement. Sur ce point, je suis sensible à l’argumentation de M. Delahaye.
En revanche, il reste deux points très importants qui ne sont pas réglés.
Premièrement, comme l’a souligné François Marc, la question très importante du zonage n’est pas traitée. Il faut pourtant l’aborder de manière sérieuse et solide, au risque de voir apparaître ici ou là des disparités qui, elles aussi, seraient inexplicables.
Deuxièmement, je vous le rappelle, la réforme des valeurs locatives doit s’opérer à recettes constantes pour les collectivités. Comment y parvenir à partir d’un système échevelé, opération par opération ? Il en découlera forcément un impact sur l’équilibre des finances des collectivités territoriales. (M. Jacques Chiron opine.) Dès lors, le cadre du projet de loi de finances ne convient plus…
Ce qui peut apparaître comme sympathique dans un premier temps et qui peut même, je le crois, être réintroduit lors d’une réflexion dans la question de la mise en œuvre doit être traité en amont en examinant l’ensemble de ces questions. On ne peut donc adopter cet amendement en l’état. Je pense néanmoins que ce qu’il comporte d’astucieux doit, peut-être, être conservé dans la mise en œuvre.