Sommaire
Présidence de M. Jean-Pierre Caffet
Secrétaires :
M. François Fortassin, Mme Colette Mélot.
3. Souhaits de bienvenue à un nouveau ministre
Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication
4. Liberté de création, architecture et patrimoine. – Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
Articles additionnels après l'article 13 quater (suite)
Amendement n° 249 rectifié de M. Patrick Abate. – Retrait.
Amendement n° 109 rectifié de M. David Assouline. – Adoption de l'amendement rétablissant l'article.
Articles additionnels après l'article 14 A
Amendement n° 113 rectifié de M. David Assouline. – Retrait.
Amendement n° 53 rectifié ter de M. Claude Kern. – Non soutenu.
Article additionnel après l'article 14
Amendement n° 250 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Amendement n° 115 rectifié de M. David Assouline. – Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article additionnel après l'article 16 bis
Amendement n° 252 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Amendement n° 502 de la commission. – Adoption de l’amendement rédigeant l’intitulé du chapitre.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture
Article additionnel avant l’article 17 A
Amendement n° 253 de M. Patrick Abate. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 503 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 117 rectifié de M. David Assouline. – Retrait.
Amendement n° 340 du Gouvernement. – Rejet par scrutin public.
Adoption, par scrutin public, de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 17 A
Amendement n° 522 du Gouvernement. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 372 de Mme Marie-Christine Blandin. – Retrait.
Amendement n° 119 rectifié de M. David Assouline. – Adoption.
Amendement n° 255 de M. Patrick Abate. – Retrait.
Amendement n° 470 rectifié de M. Jean-Claude Luche. – Non soutenu.
Amendement n° 356 rectifié de M. Jean-Claude Luche. – Non soutenu.
Amendement n° 441 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Rejet.
Amendement n° 118 rectifié bis de M. David Assouline. – Retrait.
Amendement n° 323 de M. David Assouline. – Adoption.
Amendement n° 120 rectifié ter de Mme Dominique Gillot. – Devenu sans objet.
Amendement n° 121 rectifié ter de Mme Dominique Gillot. – Devenu sans objet.
Amendement n° 122 rectifié ter de Mme Dominique Gillot. – Devenu sans objet.
Amendement n° 442 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Devenu sans objet.
Amendement n° 256 de M. Patrick Abate. – Retrait.
Amendement n° 322 de M. Vincent Eblé. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 126 rectifié de M. David Assouline. – Adoption.
Amendement n° 125 rectifié de M. David Assouline. – Adoption.
Amendement n° 127 rectifié de M. David Assouline. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 17 bis
Amendement n° 128 rectifié M. David Assouline. – Retrait.
Article additionnel après l’article 18 A
Amendement n° 343 rectifié bis de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Amendement n° 129 rectifié de M. Franck Montaugé. – Adoption.
Amendement n° 342 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 130 rectifié de M. David Assouline. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 18
Amendement n° 132 rectifié de M. David Assouline. – Retrait.
Amendement n° 133 rectifié de M. David Assouline. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Isabelle Debré
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l'article 18 bis
Amendement n° 213 rectifié bis de M. Gérard César. – Retrait.
Amendement n° 203 rectifié de M. Philippe Bonnecarrère. – Retrait.
Amendement n° 404 rectifié de Mme Corinne Bouchoux. – Retrait.
Amendement n° 410 de Mme Corinne Bouchoux. – Retrait.
Amendement n° 258 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 18 quater A – Adoption.
Amendement n° 259 de M. Patrick Abate. – Retrait.
Adoption de l’article.
Articles 18 quater, 18 quinquies et 18 sexies (nouveau)
Amendement n° 260 de M. Patrick Abate. – Retrait.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l'article 19
Adoption de l’article.
Article additionnel après l'article 19 bis
Mme Françoise Férat, rapporteur de la commission de la culture
Amendement n° 480 du Gouvernement. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 135 rectifié de M. David Assouline. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 262 de M. Patrick Abate. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 263 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Amendement n° 137 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 136 rectifié de M. David Assouline. – Adoption.
Amendement n° 264 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Amendement n° 411 rectifié de M. Éric Doligé. – Retrait.
Amendement n° 43 rectifié ter de Mme Dominique Estrosi Sassone. – Retrait.
Amendement n° 267 de M. Patrick Abate. – Retrait.
Amendement n° 139 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 453 rectifié de Mme Mireille Jouve. – Rejet.
Amendement n° 269 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Amendement n° 289 rectifié de M. Jean-Marc Gabouty. – Non soutenu.
Amendement n° 141 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 270 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Amendement n° 412 rectifié de M. Éric Doligé. – Rejet.
Amendement n° 143 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 321 de M. Vincent Eblé. – Retrait.
Amendement n° 444 rectifié bis de M. Jean-Claude Requier. – Retrait.
Amendement n° 344 de M. Jean-Claude Boulard. – Non soutenu.
Amendement n° 16 rectifié bis de Mme Colette Mélot. – Retrait.
Amendement n° 261 de M. Patrick Abate. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Article 20 bis A (nouveau) – Adoption.
Suspension et reprise de la séance
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 355 du Gouvernement. – Retrait.
Adoption de l’article.
Amendement n° 490 du Gouvernement. – Rectification.
Amendement n° 490 rectifié du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 196 rectifié de Mme Caroline Cayeux. – Retrait.
Amendement n° 392 de M. Michel Bouvard. – Non soutenu.
Amendement n° 508 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 145 rectifié de M. David Assouline. – Adoption.
Amendement n° 146 rectifié de M. David Assouline. – Retrait.
Amendement n° 146 rectifié ter de M. David Assouline, repris par M. Jacques Legendre. – Adoption.
Amendement n° 384 de M. Franck Montaugé. – Non soutenu.
Amendement n° 147 rectifié bis de M. David Assouline. – Retrait.
Amendement n° 214 rectifié de M. Georges Patient. – Retrait.
Amendement n° 443 rectifié de M. Jean-Claude Requier. – Rectification.
Amendement n° 443 rectifié bis de M. Jean-Claude Requier. – Adoption.
Amendement n° 385 de M. Franck Montaugé. – Non soutenu.
Amendement n° 406 de Mme Corinne Bouchoux. – Adoption.
Amendement n° 460 rectifié de Mme Mireille Jouve. – Non soutenu.
Amendement n° 199 de M. Alain Vasselle. – Non soutenu.
Amendement n° 148 rectifié de M. David Assouline. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Mme Françoise Férat, rapporteur
Renvoi de la suite de la discussion.
5. Communication du Conseil constitutionnel
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Pierre Caffet
vice-président
Secrétaires :
M. François Fortassin,
Mme Colette Mélot.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Renvoi pour avis unique
M. le président. J’informe le Sénat que la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’économie bleue (n° 370, 2015-2016), dont la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable est saisie au fond, est envoyée pour avis, à sa demande, à la commission des affaires économiques.
3
Souhaits de bienvenue à un nouveau ministre
M. le président. Madame la ministre de la culture et de la communication, je vous souhaite la bienvenue dans cet hémicycle et forme des vœux pour la réussite de votre action dans les nouvelles responsabilités qui vous ont été confiées.
La parole est à Mme la présidente de la commission de la culture.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Madame la ministre, chère Audrey Azoulay, au nom des membres de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, je vous adresse nos salutations républicaines à l’occasion de votre nomination et vous souhaite la bienvenue au Sénat pour la reprise de nos travaux sur le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine.
Nous avons déjà effectué un travail très important sur ce texte, maintes fois annoncé, maintes fois différé, et enfin inscrit à l’ordre du jour. Je ne vous cache pas que nous avons été quelque peu désorientés, hier, à l’annonce du changement intervenu à la tête du ministère de la culture et de la communication.
Néanmoins, sachez que nous sommes dans un état d’esprit constructif, comme il est de tradition au Sénat. Nous nous engageons donc avec confiance dans la poursuite de nos travaux.
Certains d’entre nous ont la chance de vous connaître et savent que nous allons pouvoir travailler de manière fructueuse avec vous.
Madame la ministre, au nom de tous les membres de la commission de la culture, soyez la bienvenue !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, madame la présidente de la commission de la culture, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de vous faire part de l’émotion qui est la mienne au moment de prendre la parole devant la Haute Assemblée. Je mesure la responsabilité qui m’a été confiée par le Président de la République.
Je voudrais tout particulièrement saluer certains sénateurs que je connais bien, que j’apprécie et avec lesquels je me réjouis de pouvoir œuvrer.
Je ne suis pas sans savoir qu’un travail important a déjà été réalisé sur ce texte, tant en commission qu’en séance publique. Le Gouvernement a d’ailleurs été amené à faire évoluer ses positions, ce dont je me réjouis, car j’ai pu constater dans d’autres fonctions, avec beaucoup de bonheur, que les apports du Sénat étaient toujours constructifs.
M. le président. Merci, madame la ministre.
4
Liberté de création, architecture et patrimoine
Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (projet n° 15, texte de la commission n° 341, rapport n° 340).
Madame la ministre, mes chers collègues, je vous informe que nous siégerons jusqu’à vingt heures ce soir. Pour l’organisation de la suite de nos travaux, il faudra très probablement que la conférence des présidents se réunisse mardi.
Dans la discussion de texte de la commission, nous poursuivons, au sein du chapitre III du titre Ier, l’examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 13 quater.
TITRE Ier (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES À LA LIBERTÉ DE CRÉATION ET À LA CRÉATION ARTISTIQUE
Chapitre III (suite)
Promouvoir la diversité culturelle et élargir l’accès à l’offre culturelle
Articles additionnels après l'article 13 quater (suite)
M. le président. L'amendement n° 249 rectifié, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 13 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin de préserver la diversité culturelle et artistique du spectacle vivant au plan national, les sociétés commerciales ayant :
- pour filiale au sens de l’article L. 233-1 du code de commerce une personne morale ayant pour objet ou exerçant les activités d’entrepreneur de spectacles, ou la possession d’un titre d’effet équivalent pour une entreprise ressortissante d’un État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ;
- une participation dans le capital de cette personne morale au sens de l’article L. 233-2 du même code ;
- ou la contrôlant au sens de l’article L. 233-3 dudit code, ainsi que les sociétés commerciales ayant pour objet ou exerçant les activités pour lesquelles la ou les licences d’entrepreneur de spectacle, ou la possession d’un titre d’effet équivalent à la licence dans le cas d’une entreprise ressortissante d’un État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen, sont nécessaires, et qui sont filiales, bénéficient de participation dans leur capital ou sont contrôlées au sens des articles précités du code de commerce ;
ne peuvent se trouver dans plus de deux situations suivantes, lorsque le chiffre d’affaires de leurs activités à ce titre dépasse un seuil fixé par voie réglementaire :
- exercer l’activité d’exploitation de lieux de spectacles ;
- exercer l’activité de production de spectacles ;
- exercer l’activité de diffusion de spectacles ;
- exercer l’activité de distribution ou de sous-distribution de billets de spectacles, à l’exclusion des sociétés exploitant une salle dont elles assurent en tout ou partie la distribution des billets ;
- exercer l’activité d’édition de production ou de distribution phonographique.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. À mon tour, je souhaite la bienvenue à Mme la ministre. J’espère que nous conduirons ensemble dans cet hémicycle de fructueux travaux en faveur des arts et de la culture.
J’adresse également mes amitiés à Mme Fleur Pellerin, que nous n’avons pas eu l’occasion de saluer avant son départ.
Cet amendement vise à défendre encore la diversité culturelle, à partir d’un constat relativement simple : la concentration d’activités identiques mais liées entre quelques mains conduit bien souvent à une uniformisation des contenus et, partant, à une mise à mal de la diversité culturelle. Notre position, vous le savez, est constante, sur cette question comme sur celle de la presse.
Nous souhaitons limiter le cumul d’activités par quelques personnes, qui, bien souvent, se disent qu’en contrôlant à la fois la création, la conception, la distribution et la promotion, elles pourront la façonner. N’est-ce pas là, au fond, la définition même de la concentration culturelle et artistique ?
L’enjeu n’est pas tant d’empêcher les sociétés commerciales de pratiquer une activité pour laquelle elles ont des compétences reconnues, mais bien de limiter le cumul d’activités en tant que phénomène nuisible à la diversité culturelle.
L’amendement a donc pour objet d’empêcher les sociétés commerciales, lorsque leur chiffre d’affaires dépasse un seuil fixé par voie réglementaire, de cumuler plus de deux activités parmi les suivantes : l’exploitation de lieux de spectacles ; la production et la diffusion de spectacles ; la distribution de billets de spectacles ; l’édition de production ou de distribution photographique.
À titre d’exemple, il nous apparaît aujourd’hui dangereux qu’une même personne puisse à la fois produire un spectacle, gérer sa promotion ou encore louer la salle dans laquelle il se joue, et ce pour une raison très simple : comment s’assurer que cette personne n’utilisera pas, pour ses seuls spectacles, une salle parfois publique, mais qui serait sous gestion privée ?
Madame la ministre, je pense que vous aurez saisi l’intention qui est la nôtre avec cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Madame la ministre, je m’associe bien entendu aux vœux de bienvenue de Mme la présidente de la commission de la culture. Vous arrivez non seulement au beau milieu de la discussion d’un texte, mais également entre deux amendements portant sur le même sujet : l’un qui a été débattu hier et l’autre qui vient d’être présenté. C’est un peu compliqué !
Cet amendement vise, comme celui d’hier, à encadrer les concentrations excessives dans le domaine du spectacle vivant. Nous avons déjà développé hier les arguments nous conduisant à émettre un avis défavorable à l’adoption de cet amendement, en l’état, en tout cas, même si l’on comprend bien l’objectif visé.
Je le répète, la législation actuelle comporte déjà des outils de contrôle et de régulation pour les grosses opérations de concentration.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication. Je comprends la préoccupation exprimée au sujet d’une possible concentration des salles dédiées au spectacle vivant. Nous devons bien entendu faire en sorte de préserver la diversité artistique qui s’exprime dans ces lieux, mais, aujourd’hui, compte tenu de la législation existante, je vous propose, de retirer cet amendement, faute de quoi, à l’instar de M. le rapporteur, j’émettrai un avis défavorable. J’ajoute, mais j’imagine que cela a été évoqué hier, qu’une étude est en cours au ministère de la culture pour permettre de mieux préciser les choses.
M. le président. Madame Gonthier-Maurin, maintenez-vous votre amendement ?
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous avons eu à plusieurs reprises l’occasion de porter cette préoccupation, mais, en guise de cadeau de bienvenue à Mme la ministre, je retire l’amendement. (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 249 rectifié est retiré.
Chapitre IV
Développer et pérenniser l’emploi et l’activité professionnelle
Article 14 A
(Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 109 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport sur la situation du dialogue social et de la représentativité des négociateurs professionnels du secteur du spectacle vivant et enregistré.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Madame la ministre, je vous souhaite à mon tour la bienvenue au Sénat !
Cet amendement vise à réintégrer le dispositif supprimé lors de l’examen en commission par notre rapporteur, qui, nous le savons, n’aime pas beaucoup les rapports. (Sourires.)
Cependant, le rapport dont il s’agit ici est essentiel, dans la mesure où il porterait sur la situation du dialogue social et sur la représentativité des négociateurs professionnels du secteur du spectacle vivant et enregistré.
Nous connaissons les difficultés des employés du secteur, nombre d’entre eux subissant les affres du régime de l’intermittence. Nous savons également qu’un certain nombre de menaces permanentes pèsent sur les annexes VIII et X de la convention UNEDIC.
Le secteur est le seul qui ne soit pas représenté au niveau multiprofessionnel, bien que la FESAC, qui regroupe plus de trente organisations, dispose pleinement des compétences pour négocier à ce niveau. J’y reviendrai d’ailleurs en présentant un amendement visant à soutenir le quatrième champ multiprofessionnel.
À mon sens, il est important que nous disposions de ce rapport d’expertise, qui nous donnerait des éléments pour continuer à analyser le spectacle vivant. J’espère donc, monsieur le rapporteur, que vous serez plus diligent à l’égard de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Vous avez ma réponse dans votre commentaire, ma chère collègue…
Notre commission a supprimé cet article, comme elle a supprimé les huit autres demandes de rapport contenues dans ce texte. Nous avons également émis un avis défavorable sur les nombreuses autres demandes de rapport présentées par amendement. Au Sénat, depuis quelque temps, nous essayons d’éviter d’introduire dans la loi des dispositions n’ayant pas de caractère normatif.
Sur la forme, donc, je ne puis qu’être défavorable à cet amendement.
Sur le fond, maintenant, car c’est l’objet de votre préoccupation, la rédaction d’un rapport sur ce sujet ne me paraît pas constituer une réponse suffisante au problème soulevé par la représentativité des négociateurs professionnels dans le domaine du spectacle vivant, compte tenu de l’imminence de l’ouverture des négociations sur la nouvelle convention d’assurance chômage.
Mieux vaudrait déterminer directement les parties qui seront autorisées à prendre place autour de la table des négociations, par exemple par le biais d’un décret, comme l’avait proposé la commission des affaires sociales du Sénat lors de l’examen du projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi, au printemps dernier.
Pour ces deux raisons, de forme et de fond, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Nous sommes favorables à cet amendement, qui s’inscrit dans la dynamique que vous avez rappelée, madame la sénatrice. Je rappelle en effet que les partenaires sociaux du domaine du spectacle se sont vu confier des responsabilités nouvelles, notamment dans le cadre de la discussion sur le régime de l’assurance chômage.
À notre sens, il est important que cette étude, qui est très attendue par les partenaires sociaux, puisse être faite.
M. le président. En conséquence, l'article 14 A est rétabli dans cette rédaction.
Articles additionnels après l'article 14 A
M. le président. L'amendement n° 113 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 14 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1254-24 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il ne peut être conclu de contrat de portage salarial pour l’emploi d’un travailleur des professions de la production cinématographique, de l’audiovisuel ou du spectacle pour lequel il est d’usage de recourir à un contrat de travail à durée déterminée, en application du 3° de l’article L. 1242-2. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Madame Azoulay, à mon tour, je voudrais vous souhaiter bonne chance. Je forme le vœu que nous puissions travailler du mieux possible sur ce texte important. Je tiens également à saluer le travail fourni par Mme Fleur Pellerin.
Madame la ministre, nous nous connaissons. Vous êtes compétente, je le sais, et vous êtes une femme de culture. Je sais à quel point vous aimez la culture, ce qui est très important pour nous qui travaillons sur ces sujets et percevons cet attachement à la culture comme un vrai supplément d’âme. Aujourd'hui plus que jamais, la culture, c’est notre âme, et il faut des ministres qui aiment la culture.
Cet amendement est surtout un appel pour obtenir des précisions sur des pratiques abusives, rendues possibles par les imprécisions de la loi, qui inquiètent les intermittents du spectacle. Je sais que notre collègue Maryvonne Blandin, qui ne peut malheureusement pas être aujourd'hui en séance, tenait beaucoup à cet amendement.
Je l’ai maintenu dans un premier temps, au moins pour entendre la ministre sur ce sujet, mais si les réponses du Gouvernement sont satisfaisantes, il va de soi que je le retirerai.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement vise à interdire le portage salarial dans les domaines du cinéma, de l’audiovisuel et du spectacle.
Les textes formulent déjà les choses assez clairement puisqu’une ordonnance du 2 avril 2015 est venue encadrer strictement l’activité de portage et les modalités de recours au portage salarial. Ainsi, une entreprise ne peut faire appel à un salarié « porté » que pour « l’exécution d’une tâche occasionnelle, ne relevant pas de son activité normale et permanente ou pour une prestation ponctuelle nécessitant une expertise dont elle ne dispose pas ».
Par ailleurs, les entreprises de portage ne peuvent strictement faire que du portage et elles sont les seules à pouvoir en faire. Par conséquent, il nous semble que la législation empêche d’ores et déjà que des entreprises du spectacle vivant puissent faire elles-mêmes du portage.
Une mission commune au ministère de la culture et au ministère des affaires sociales est chargée d’examiner en ce moment le dispositif de la licence d’entrepreneur du spectacle vivant et la question du portage salarial fait partie de la lettre de mission actuelle. Je pense donc, mon cher collègue, qu’il faut lui laisser le temps de rendre ses conclusions.
Pour ces raisons, et parce que la situation est en cours d’évolution, la commission vous demande, mon cher collègue, de retirer votre amendement, comme vous l’avez proposé. À défaut, j’émettrais, au nom de la commission, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. La position du Gouvernement est la même que celle de la commission. En effet, depuis l’ordonnance de 2015, nous disposons des moyens juridiques qui nous permettent de parer au risque que vous pointez légitimement. De plus, comme vient de le dire M. le rapporteur, une mission est en cours. Le travail qu’elle réalise actuellement permettra de répondre à votre légitime préoccupation.
J’émettrais, au nom du Gouvernement, un avis défavorable si l’amendement était maintenu.
M. le président. Monsieur Assouline, l'amendement n° 113 rectifié est-il maintenu ?
M. David Assouline. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 113 rectifié est retiré.
L'amendement n° 110 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 14 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 2° de l’article L. 2152-2 du code du travail, après les mots : « économie sociale et solidaire, », sont insérés les mots : « soit du secteur du spectacle vivant et enregistré, ».
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement, qui prévoit la création d’un quatrième champ multiprofessionnel du spectacle, est important à plusieurs titres.
Le champ du spectacle est aujourd'hui un niveau de négociation hybride, car le législateur ne connaît que trois niveaux de représentativité : la branche professionnelle, le niveau multiprofessionnel et le niveau interprofessionnel. Le secteur de la culture est le seul des secteurs professionnels à demeurer hors champ. Il n’est représenté ni dans le champ multiprofessionnel ni dans le champ interprofessionnelle.
Cette proposition permet donc de régler la question de la représentativité patronale au niveau du champ du spectacle en lui conférant un niveau de représentativité déjà existant, mais juridiquement non sécurisé aujourd'hui. Non seulement elle ne remet pas en cause le principe de délégation des négociations des annexes VIII et X, mais elle vient, au contraire, la compléter en rendant la consultation obligatoire en cas d’échec des négociations du secteur.
Je rappelle que l’organisme qui représente les employeurs du spectacle vivant, la Fédération des syndicats patronaux des entreprises du spectacle vivant, de l’audiovisuel et du cinéma, la FESAC, gère les questions sociales communes aux neuf branches du secteur du spectacle. Outre qu’il négocie les accords, il est compétent sur la question de l’assurance chômage, mais aussi sur l’ensemble des autres questions sociales. Je pense, bien sûr, à la sécurisation des parcours professionnels, à la médecine du travail, à la pénibilité…
À ce jour, il est hors champ et les organismes représentatifs du secteur n’ont jamais pu être associés à la préparation des accords nationaux interprofessionnels qui sont transposés en l’état dans la loi. Les conséquences peuvent en être lourdes pour le secteur.
À ce titre et compte tenu des spécificités d’emploi dans le spectacle, il paraît vraiment essentiel que le secteur soit consulté par les organisations interprofessionnelles, comme le sont les secteurs de l’économie sociale et solidaire, de l’agriculture et des professions libérales, qui constituent les trois champs multiprofessionnels déjà définis par le code du travail.
La création de ce quatrième champ permettra aussi aux organisations du secteur d’être associées aux discussions sur la question du financement du paritarisme et, ainsi, sur le niveau du financement que pourra obtenir le secteur - et même chacune des branches du spectacle. Cela garantirait en outre de ne pas mettre en péril les équilibres financiers des partenaires sociaux du spectacle.
L’adoption de notre amendement octroyant une reconnaissance légale à un champ multiprofessionnel du spectacle vivant et enregistré permettrait véritablement d’asseoir des modalités d’association plus poussées des partenaires sociaux représentatifs de l’ensemble du spectacle, d’une part, à la négociation des règles d’assurance chômage des artistes et techniciens, d’autre part, plus largement, à l’ensemble des questions sociales qui les concernent.
Ce quatrième champ est très attendu par les professionnels. J’espère que la commission et le Gouvernement émettront un avis favorable sur cette proposition.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. À plusieurs reprises, depuis le mois de novembre, pendant les auditions et en réunion de commission, nous nous sommes demandé si toutes les demandes formulées auprès de nous sur les aspects sociaux ou les relations syndicales – les sujets sont infinis ! - avaient vraiment leur place dans ce texte dont je le rappelle qu’il est « relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine ». En 2014, le Parlement a largement débattu de la loi relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale. Ce cadre était probablement le mieux adapté pour régler ces problèmes que vous soulevez tout à fait légitimement.
En l’état, cet amendement a déjà été rejeté par la commission. Vous revenez avec la même proposition, ce que je comprends, connaissant votre opiniâtreté et votre souci d’aboutir, que je respecte profondément.
Cette question relève principalement du champ de la commission des affaires sociales, que nous avons consultée sur le sujet. Ce mécanisme a été créé par la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale. Le Sénat a donc déjà eu l’occasion de s’exprimer sur le sujet, et il s’est prononcé contre : lors de l’examen de la loi précitée, l’amendement avait reçu deux avis défavorables, l’un de la commission des affaires sociales, l’autre du Gouvernement.
On ne peut pas parler d’organisations multiprofessionnelles pour le spectacle vivant et enregistré comme on le fait pour les activités agricoles, les professions libérales ou l’économie sociale et solidaire ne relevant pas du champ couvert par des organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, c'est-à-dire la FNSEA, l’UNAPL, et l’UDS.
Sans remettre en cause, sur le fond, vos propositions, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. Monsieur le rapporteur, vous venez d’indiquer que la commission des affaires sociales du Sénat avait émis un avis défavorable sur le sujet. Il en va de même du ministère des affaires sociales.
Cela étant, je comprends votre position, madame la sénatrice. Aujourd'hui, dans le dispositif instauré pour la négociation sur l’assurance chômage, il est déjà prévu un mécanisme d’articulation au niveau interprofessionnel. C’est un premier élément de réponse.
Second élément de réponse, le rapport vient d’être rétabli dans le texte. Il va permettre de faire un état des avancées et difficultés potentielles sur la représentativité dans le secteur du spectacle.
M. le président. Madame Robert, l'amendement n° 110 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sylvie Robert. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14 A.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 53 rectifié ter, présenté par MM. Kern, Bonnecarrère et Lasserre, Mme Gatel, M. L. Hervé, Mmes Joissains et Billon et MM. Médevielle, Guerriau, Luche et Cigolotti, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 112 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 14 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 4622-6 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au deuxième alinéa, dans le cas des dépenses effectuées pour les journalistes rémunérés à la pige relevant de l’article L. 7111-3, pour les salariés relevant des professions mentionnées à l’article L. 5424-22 et pour ceux définis à l’article L. 7123-2 ces frais sont répartis proportionnellement à la masse salariale. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. L’article L.4622-6 du code du travail soulève des difficultés d’ordre pratique. Il dispose que « les dépenses afférentes aux services de santé au travail sont à la charge des employeurs. Dans le cas de services communs à plusieurs entreprises, ces frais sont répartis proportionnellement au nombre des salariés. »
Beaucoup d’entreprises emploient des artistes et des techniciens du spectacle, des journalistes rémunérés à la pige et des mannequins. Les personnes qui emploient ce type de personnel sont, par définition, des multiemployeurs.
Sur la base des dispositions du code du travail, chaque employeur devrait verser une cotisation pour chaque contrat d’engagement, alors même qu’une seule visite médicale serait effectuée. Cette situation remettrait en cause tous les efforts entrepris depuis des décennies afin de favoriser la surveillance médicale de ces populations parfois fragilisées.
En outre, la proportionnalité des frais assise sur l’effectif semble peu en adéquation avec les missions des services de santé au travail telles qu’elles ont été consacrées par la réforme de 2011, laquelle leur a octroyé un caractère de plus en plus collectif.
Nous proposons donc de définir une assiette centrée sur la masse salariale, ce qui permettrait de prendre en considération les spécificités des personnels visés. Cette solution répondrait à une logique économique plus claire et plus pertinente.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement, comme celui qui n’a pas été défendu, vise à ce que le coût d’adhésion à la médecine du travail des employeurs d’intermittents, de journalistes rémunérés à la pige et de mannequins soit calculé non sur la base du nombre de personnes employées au cours d’une année, mais proportionnellement à la masse salariale, c’est-à-dire au prorata entre les différents employeurs.
Cette question relève essentiellement du champ de la commission des affaires sociales. Néanmoins, cet amendement appelle de ma part plusieurs commentaires.
On peut d’abord s’étonner que cette question surgisse soudainement, alors que la rédaction de l’article L. 4622-6 du code du travail est déjà ancienne : elle date de 2007.
Ensuite, la réforme de la médecine du travail est aujourd’hui à l’étude. Un rapport a été rendu au Gouvernement le 21 mai dernier et cette question devrait être abordée dans le projet de loi que la ministre du travail présentera, selon le calendrier parlementaire qui nous a été transmis, en mars prochain. Ce type de dispositions y trouverait davantage sa place.
Enfin, l’adoption de cet amendement ouvre la voie à des revendications multiples. Pourquoi ne pas également prévoir des dispositions similaires dans le secteur du nettoyage, où la grande majorité des emplois sont à temps partiel ?
Il existe un autre risque sur lequel je voudrais attirer votre attention : celui de voir échapper à la visite médicale obligatoire, du fait de problèmes d’organisation, un certain nombre d’intermittents du spectacle qui ont plusieurs employeurs, chacun pensant que l’autre s’en occupe. Actuellement, ils ont la responsabilité de veiller sur la santé de leurs salariés.
Pour toutes ces raisons, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Le Gouvernement est favorable à cette proposition, qui vise à remédier à un dispositif per capita inadapté pour les pigistes, mannequins et intermittents, qui ont une multiplicité d’employeurs.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14 A.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 37 rectifié quater est présenté par MM. G. Bailly et Bouchet, Mmes Canayer et Cayeux, M. Huré, Mme Imbert, M. Mouiller, Mmes Morhet-Richaud, Estrosi Sassone, Lopez et Lamure, M. D. Laurent, Mmes M. Mercier et Deroche et MM. Raison et Perrin.
L'amendement n° 171 rectifié est présenté par MM. Vaugrenard et Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 14 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du premier alinéa de l’article 20 de loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat, le mot : « indépendante » est supprimé.
L’amendement n° 37 rectifié quater n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Sylvie Robert, pour défendre l’amendement n° 171 rectifié.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement vise à élargir la définition des métiers d’art. En effet, celle-ci ne concerne aujourd’hui que les personnes physiques, ainsi que les dirigeants sociaux des personnes morales qui exercent, à titre principal ou secondaire, une activité indépendante –j’ai bien dit « indépendante » – de production de création, de transformation, de conservation, de restauration du patrimoine. Nous proposons d’y intégrer les nombreux salariés qui œuvrent dans les ateliers, manufactures ou entreprises de notre territoire et qui contribuent tout autant au rayonnement et à la transmission des métiers d’art.
Nous sommes très attachés à tous ces métiers qui maillent notre territoire. La suppression du mot « indépendante » permettrait d’élargir cette notion de métiers d’art.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La définition des métiers d’art mérite évidemment réflexion. La qualité d’artisan est intrinsèquement liée à l’accomplissement d’un travail indépendant et, pour l’instant, la définition vise les personnes indépendantes ou des entreprises, mais pas des salariés. Y inclure les salariés des entreprises, ce que de nombreuses organisations souhaitent, est un vaste sujet.
Mme Sylvie Robert. C’est très important !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Parmi les salariés d’entreprises manufacturières – maroquinerie, bijouterie… – se trouvent des mains d’or, de véritables artistes, qui suscitent l’admiration de tous.
Cela étant, cette mesure est prématurée et mérite approfondissement. La suppression du terme « indépendant » ouvre la possibilité à tout salarié intervenant dans le domaine des métiers d’art de se prévaloir de la qualité d’artisan, quelle que soit potentiellement la nature de l’activité de son entreprise. Cette évolution est de nature à créer une certaine insécurité juridique lors de litiges opposant des artisans indépendants et des salariés dans les métiers concernés.
Dans son rapport pour avis sur le projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, notre collègue Didier Marie était très clair sur le fait que l’appellation « artisan » ne visait non pas les individus, mais les entreprises : « L’article 20 [de la loi du 5 juillet 1996] ne définit pas de manière exhaustive les métiers d’art, mais seulement les entreprises qui, au sein des artisans, “relèvent des métiers d’art” ».
C’est pourquoi, même si nous sommes tous sensibles à cette question, il ne paraît pas souhaitable de toucher aujourd’hui à la rédaction de l’article 20, ce qui risquerait de remettre en cause un équilibre qui existe depuis 1996.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Les métiers d’art sont une richesse extraordinaire pour la France, et pas seulement dans le secteur culturel, et nous pourrions valoriser davantage ces savoir-faire. Il est vrai que la définition qui figure aujourd’hui dans la loi ne couvre pas toutes les situations où l’excellence des métiers d’art trouve à s’exprimer. Je pense notamment à la Manufacture nationale de Sèvres ou à la Manufacture des tapisseries des Gobelins, établissements que je connais bien.
Le Gouvernement préférerait engager une concertation entre les différents départements ministériels concernés ainsi qu’avec les organisations professionnelles pour parvenir à la rédaction juridique la plus pertinente. Pour autant, compte tenu de l’importance du sujet, sur cet amendement, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14 A.
L'amendement n° 111 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 14 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport sur la situation des arts visuels en termes d’économie, d’emploi, de structuration et de dialogue social.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Le secteur des arts visuels n’est pas une industrie culturelle : il est constitué d’une multitude d’acteurs – privés, publics et surtout associatifs – qui maillent l’ensemble du territoire, ce qui fait sa force mais aussi sa faiblesse. Il en résulte notamment que les arts visuels sont régulièrement les oubliés et les « parents pauvres » de toutes les politiques publiques.
L’amendement, adopté lors de l’examen du texte en commission, vise à permettre aux artistes visuels d’être rémunérés au titre de l’exploitation de leurs œuvres en ligne. Je m’en réjouis.
Il reste néanmoins beaucoup à faire, en particulier en termes de droits sociaux. Je l’ai souligné dans le rapport pour avis sur la création et le cinéma que je remets chaque année ainsi que dans les débats précédents : la situation de la couverture sociale et des droits sociaux de ces professions est lamentable pour un pays comme la France, qui, depuis longtemps, s’honore tant de grands artistes dans ces domaines.
Ces quelques grands noms très connus masquent la situation de la plus grande partie des artistes. Le public a tendance à penser que les artistes vivent tous très bien de leurs œuvres et de leur art ; il ignore que, dans leur majorité, les artistes vivent sous le seuil de pauvreté et que leur situation sociale n’est pas bonne du tout.
Il convient notamment de consolider et moderniser le régime de sécurité sociale des artistes-auteurs. C’est aujourd’hui un impératif. Dans la pratique, le droit commun n’est pas respecté, notamment par l’Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs, l’AGESSA, qui ne collecte pas la cotisation vieillesse des assujettis.
Les photographes sont toujours tenus d’exercer trois années d’activité pour pouvoir bénéficier du régime de sécurité sociale. Parmi l’ensemble des déclarants en bénéfices non commerciaux, les artistes-auteurs sont à la fois les plus précaires et les seuls pénalisés pour le calcul de leurs cotisations sociales en raison d’une majoration artificielle de leurs BNC de 15 %. Les artistes-auteurs paient ainsi systématiquement des cotisations sociales, y compris la CSG et la CRDS, sur un montant supérieur à ce qu’ils ont réellement perçu. Et je pourrais poursuivre cette énumération.
À chaque fois, on m’a rétorqué que le ministère de la culture avait conscience de cette situation, mais qu’il fallait une négociation avec le ministère des affaires sociales et le ministère du travail. Or cela fait deux ans que l’on attend des réunions. Ce n’est plus possible ! L’adoption de cet amendement permettra d’accélérer les choses.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Mon cher collègue, pour une fois, je vais vous surprendre !
M. David Assouline. Ah ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Hier, ici même, nous avons longuement débattu de l’importance que, tous, nous accordions aux arts visuels – et nous étions un peu plus nombreux, au passage. Par cohérence, puisque nous venons d’adopter la demande d’un rapport sur le spectacle vivant, il serait mal compris que nous rejetions la demande d’un rapport sur les arts visuels, compte tenu de l’intérêt que nous portons à ce secteur.
Par conséquent, sur cet amendement, la commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme Sylvie Robert. La prochaine fois, elle émettra un avis favorable ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La prochaine fois, c’est vous qui irez dans mon sens ! (Rires.)
M. Le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Ce rapport est un aiguillon pour le Gouvernement, qui l’invite à mener un travail important sur ces questions. Comme cela a été souligné, ce chantier a à la fois des dimensions sociales et fiscales. Des avancées ont eu lieu, mais, vous avez raison, monsieur le sénateur, on peut probablement aller plus loin.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14 A.
Article 14
L’article L. 7121-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° (nouveau) Au 10°, après les mots : « metteur en scène », sont insérés les mots : « et le chorégraphe » et le mot : « sa » est remplacé par le mot : « leur » ;
2° Sont ajoutés des 11° à 13° ainsi rédigés :
« 11° L’artiste de cirque ;
« 12° Le marionnettiste ;
« 13° Les personnes dont l’activité est reconnue comme un métier d’artiste-interprète par les conventions collectives du spectacle vivant étendues. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 14
M. le président. L'amendement n° 250, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Pour garantir le recours au contrat à durée déterminée d’usage, le contrat de travail contient les éléments précis et concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi. Les accords ou conventions collectives définissent ce que sont les éléments précis et concrets. Ils précisent dans quels cas il s’agit d’un usage constant du contrat à durée déterminée et dans quels cas il s’agit d’un surcroît d’activité.
II. – Lorsqu’un même salarié employé régulièrement sous contrat à durée déterminée d’usage sur le même emploi a effectué auprès d’une même entreprise un volume moyen annuel de 75 % de la durée annuelle de travail, en référence au nombre d’heures équivalent temps plein défini dans chaque convention collective, constaté sur deux années consécutives, l’employeur propose un contrat à durée indéterminée, soit un contrat à durée indéterminée de droit commun à temps complet, dans les conditions précisées ci-après. Les éventuelles dérogations pour les spectacles exploités sur une longue durée sont traitées dans les conventions collectives.
Lorsque la succession de contrat à durée déterminée sur un même poste pour le même objet, contractée par différents salariés, a pour effet d’atteindre l’équivalent de 100 % sur vingt-quatre mois d’un poste équivalent à temps complet, ce poste est couvert par un contrat à durée indéterminée à temps complet.
III. – La proposition d’un contrat à durée indéterminée de droit commun à temps complet en application du I est faite par l’employeur dans les deux mois suivant la réalisation des conditions susvisées, par lettre recommandée avec avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge.
Les organisations syndicales de salariés et d’employeurs sont destinataires de ces courriers. Elles peuvent intervenir à tout moment pour rendre effective la requalification en contrat à durée indéterminée. À cette fin l’employeur est tenu de leur fournir le registre du personnel.
Dans le cas où le salarié concerné refuserait la requalification en contrat à durée indéterminée l’employeur organise le recrutement sur ce poste de travail en contrat à durée indéterminée.
L’employeur, en application du II, organise dans les deux mois suivant la réalisation des conditions susvisées, le recrutement d’un salarié en contrat à durée indéterminée à temps complet pour couvrir le poste de travail réputé, désormais, être un emploi permanent, en tenant compte des conditions de recrutement précisées dans les conventions collectives. Les salariés, ayant le plus rempli de contrats de travail ou dont la durée de travail est la plus importante pour couvrir ce poste, ont une priorité d’examen de leur dossier pour se voir proposer un contrat à durée indéterminée.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise à renforcer la sécurité des artistes intermittents et à prévoir, dans un premier temps, que, lors de l’établissement d’un contrat à durée déterminée d’usage, ou CDDU, ce dernier contienne une motivation à son recours, justifiant en quoi l’activité contractualisée est par nature temporaire. Les éléments constituant cette justification sont renvoyés aux négociations et conventions collectives.
Ce faisant, nous entendons lutter contre le système de « permittence », trop souvent utilisé par les structures artistiques et culturelles, qui fragilise à la fois l’emploi et le salarié. Serait ainsi prévue une requalification en contrat à durée indéterminée de droit commun, dans le cas où un salarié aurait, sur deux ans, cumulé au sein d’une même entreprise et sur un même poste un volume moyen annuel équivalent à 75 % de la durée annuelle de travail.
Il s’agit à la fois d’une mesure de transparence et de justice sociale.
C’est une mesure de transparence, car l’établissement de critères permettant de justifier le caractère temporaire de l’activité doit permettre de limiter le recours à des CDDU qui, par nature, détournent des dispositions législatives et conventionnelles.
C’est une mesure de justice sociale, car le phénomène de permittence porte en son sein même une précarisation du travail. L’imprévisibilité due au recours aux CDDU perd tout sens logique lorsque l’activité est par nature permanente.
Par ailleurs, l’argument entendu régulièrement selon lequel un CDDU favoriserait les salariés, qui pourraient obtenir des indemnités de fin d’activité, semble bien léger si l’on fait le calcul des pertes engendrées par l’absence d’évolution de carrière et le préjudice subi en matière de retraites.
Pour finir, l’adoption de cet amendement renforcerait les dispositions jurisprudentielles des jugements de la chambre sociale de la Cour de cassation des 23 janvier et 24 septembre 2008, ainsi que du 30 novembre 2010.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Je ne suis pas certain que l’adoption de cet amendement soit génératrice d’un dynamisme extraordinaire dans la création artistique, ce qui est tout de même l’objet de ce projet de loi.
Sur le problème du recours au CDDU au détriment d’emplois permanents dans le milieu artistique, des avancées significatives ont été enregistrées en la matière avec la loi du 17 août 2015 relative dialogue social et à l’emploi. L’article 34 a ainsi donné aux organisations représentatives d’employeurs et de salariés dans le domaine de l’intermittence jusqu’au 31 mars 2016 pour négocier entre elles les conditions de recours au CDDU. Il les a également autorisées à réviser, dans le même délai, les listes des emplois pouvant être pourvus par CDDU, en adéquation avec les règles fixées par le code du travail.
Quelques mois à peine après avoir profondément renouvelé le cadre de la négociation dans le domaine de l’intermittence et avoir donné aux partenaires sociaux la possibilité de discuter entre eux sur les sujets qui les touchent directement, il serait dommage que le législateur ne laisse pas le temps à la négociation de se dérouler et vienne dicter les règles en la matière.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement, mais pour des raisons de calendrier plus que de fond.
En effet, des discussions en commissions mixtes paritaires ont lieu en ce moment même sur les conditions de recours aux CDDU et sur la liste des métiers concernés. Si cet amendement était adopté, on s’immiscerait dans le dialogue social actuellement en cours.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise à introduire davantage de transparence. En quoi serait-il en contradiction avec la négociation et le dialogue social ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 250.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 15
(Non modifié)
I. – Lorsque les collectivités territoriales ou leurs groupements, au sens du deuxième alinéa de l’article L. 5111-1 du code général des collectivités territoriales, agissent en qualité d’entrepreneur de spectacles vivants, les artistes du spectacle vivant qu’ils engagent pour une mission répondant à un besoin permanent sont soumis aux dispositions applicables aux agents contractuels de la fonction publique territoriale.
II. – Ces artistes sont soumis au code du travail lorsqu’ils sont employés dans les conditions prévues au 3° de l’article L. 1242-2 du même code. – (Adopté.)
Article 16
(Non modifié)
I. – Les entrepreneurs de spectacles vivants détenant une licence en application de l’article L. 7122-3 du code du travail mettent à la disposition du ministre chargé de la culture les informations contenues dans les relevés mentionnés à l’article 50 sexies H de l’annexe 4 au code général des impôts, y compris pour les spectacles dont ils confient la billetterie à des tiers, en précisant, d’une part, les informations du prix global payé par le spectateur ou, s’il y a lieu, de la mention de la gratuité définies au 4° du III de l’article 50 sexies B de la même annexe et, d’autre part, le nom du spectacle, le domaine, la localisation et le type de lieu de chaque représentation.
II. – Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret.
M. le président. L'amendement n° 115 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Les entrepreneurs de spectacles vivants détenant une licence en vertu de l’article L. 7122-3 du code du travail, ainsi que toute personne qui assure la vente au public de places ou d’abonnements pour des spectacles, mettent à disposition du ministre chargé de la culture, de ses établissements publics et de l’auteur de chaque spectacle ou de la société de perception et de répartition des droits relevant du titre II du livre III de la première partie du code de la propriété intellectuelle qui le représente, les informations contenues dans les relevés mentionnés aux articles 50 sexies B et 50 sexies H de l’annexe 4 du code général des impôts, y compris pour les spectacles dont ils confient la billetterie à des tiers, en précisant, d’une part, les informations du prix global payé par le spectateur ou, s’il y a lieu, de la mention de la gratuité définie au 4° du III de l’article 50 sexies B de la même annexe et, d’autre part, le nom du spectacle, le domaine, la localisation et le type de lieu de chaque représentation ainsi que les éventuelles remises ou commissions appliquées, leur montant et leurs bénéficiaires.
II. – Les organisations représentatives des entrepreneurs de spectacles vivants peuvent conclure avec les sociétés de perception et de répartition des droits relevant du titre II du livre III de la première partie du code de la propriété intellectuelle des accords pour définir les modalités et conditions de communication à ces sociétés des informations mentionnées au I du présent article.
III. – Les modalités d’application du I sont précisées par décret.
À défaut d’un accord tel que prévu au II dans les six mois de l’entrée en vigueur de la présente loi, les modalités et conditions de la communication des informations aux sociétés de perception et de répartition des droits sont fixées par décret.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Toutes les études récentes montrent que, à l’exception de la plupart des salles de moins de 100 places, la très grande majorité des théâtres privés et quelques théâtres publics ont institué, depuis quelques années, des frais de location, d’un montant souvent compris entre 1 et 3 euros, voire davantage.
Selon les théâtres, ces frais se justifiaient par le coût du développement des nouvelles technologies. Il leur a en effet fallu investir dans de nouveaux équipements nécessaires à la mise en place de la billetterie informatisée et des nouveaux modes de contrôle d’accès – des douchettes pour la lecture des codes-barres –, à la mise en œuvre et à la gestion d’un système de réservation via internet. Enfin, il leur a fallu prendre en compte les frais liés aux paiements par carte bancaire.
La pratique des frais de location en vigueur dans les théâtres privés parisiens, syndiqués ou non, est désormais quasiment généralisée. Elle s’est même étendue à certains théâtres publics parisiens.
C’est là une spécificité parisienne, car, en dehors de Paris, la pratique de frais de location semble peu répandue, à de rares exceptions – les grandes salles, les Zénith.
Les pratiques en matière de frais de réservation sont relativement hétérogènes. Ces frais sont prélevés soit par le site internet des salles, soit par des entreprises de billetterie. Les prix peuvent être fixes ou non sur un même spectacle ; ils peuvent varier en fonction du prix de la place. Ces frais ne sont pas toujours précisés et détaillés.
En plus de ces frais de location, se mettent aussi désormais en place des abonnements payants, dans certains lieux du secteur public comme auprès d’opérateurs privés, permettant de bénéficier de places à tarif réduit pour les spectacles et dont les montants encaissés par les théâtres ou les intermédiaires n’entrent pas dans l’assiette de calcul des droits d’auteurs.
Mais j’en viens au fait.
Dans les tarifs observés, les frais prélevés par les théâtres peuvent représenter jusqu’à 40 % du prix de la place, même si, en moyenne, ils se situent, pour les places à plein tarif, entre 5 % et 10 % du prix du billet pour les places de première et deuxième catégorie et aux alentours de 15 % pour les places de troisième catégorie. À ces chiffres, il convient d’ajouter les éventuels frais prélevés par les entreprises de réservation indépendantes, qui varient entre 8 % et 11 %.
Certaines salles vertueuses isolent bien l’ensemble de ces frais, mais ce n’est pas toujours le cas. La pratique des organisateurs de spectacles ou des personnes qui assurent la vente des spectacles, notamment au public, n’étant pas uniforme, il serait utile qu’elle puisse faire l’objet d’une information précise du ministère de la culture et de la communication, ainsi que de l’auteur ou de son représentant, généralement une société d’auteurs.
Cette transparence est indispensable pour contrôler la réalité des redditions de comptes sur les exploitations. Le projet de loi, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale, a d’ailleurs prévu l’amélioration de la transparence de la billetterie.
En conséquence, nous proposons une rédaction plus précise de l’article 16 afin d’avancer sur ce sujet et de rassurer les auteurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement vise à étendre l’accès aux données de remontée de la billetterie aux établissements publics qui dépendent du ministère de la culture, ainsi qu’aux auteurs de spectacles et aux sociétés de gestion de droits d’auteur.
Je rappelle que l’article 16 a pour objectif final la mise en place d’un observatoire de la création – nous y sommes tous favorables, ce sujet étant à l’ordre du jour depuis de nombreuses années.
Cet observatoire, qui serait directement placé auprès du ministre de la culture, serait chargé d’analyser les secteurs du spectacle vivant, des arts plastiques et des industries culturelles qui y sont liées.
Une base légale était nécessaire pour que cet observatoire puisse avoir accès aux données concernant les billetteries, lesquelles constitueront pour l’observatoire une source importante d’informations pour mener à bien sa mission.
Votre souhait de permettre aux auteurs et aux sociétés de gestion des droits d’auteurs d’avoir accès à ces données est tout à fait compréhensible, car il serait en effet utile qu’ils y aient accès.
Avec le développement de la billetterie en ligne, les frais de réservation et d’intermédiation, ainsi que les éventuelles rétrocommissions, ne sont pas pris en compte dans l’assiette de rémunération des auteurs, alors qu’ils s’imputent au prix des places payé par les spectateurs. Il y a là un véritable problème, qui se pose d’ailleurs également dans les cinémas, nous le savons.
Néanmoins, je ne sais pas si l’article 16 est le meilleur vecteur pour introduire ces dispositions, compte tenu de son objectif, qui est la création d’un observatoire.
Nous souhaiterions donc entendre le Gouvernement sur ce point, et nous nous rallierons sans doute à son avis.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Monsieur le sénateur, vous souhaitez que les informations qui remonteront des entrepreneurs de spectacles vivants vers le ministère de la culture en matière de billetterie aillent également directement vers les sociétés de perception et de répartition des droits, les SPRD.
L’instauration de cet observatoire et des remontées systématiques prévues à l’article 16 est absolument fondamentale pour le secteur du spectacle, car, on le sait, il est essentiel de bien connaître les flux économiques et ce qui se passe dans les professions pour mener une politique éclairée, comme nous le souhaitons. L’instauration de cet observatoire un donc très grand progrès, attendu par tous.
Cela étant dit, cet observatoire n’a pas été conçu pour alimenter directement les SPRD aujourd'hui. L’objectif est d’abord de recueillir le maximum de données, lesquelles devront évidemment pouvoir servir également aux différentes sociétés civiles pour élaborer leur propre politique, leurs propres remontées de recettes et leurs propres systèmes de perception.
Nous souhaitons tous la transparence que vous appelez de vos vœux. Dans l’attente d’une expertise plus fine de votre proposition, monsieur le sénateur, et d’éventuelles solutions contractuelles entre cet observatoire et les SPRD, solutions qui auraient notre préférence, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. En conséquence, l'article 16 est ainsi rédigé.
Article 16 bis
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le III de l’article L. 136-5 est ainsi rétabli :
« III. – La contribution sociale généralisée due sur les indemnités de congés payés et sur les avantages conventionnels y afférents, servis par les caisses de congés payés en application de l’article L. 3141-30 du code du travail, est précomptée par la caisse de congés payés instituée pour les employeurs mentionnés à l’article L. 5424-22 du même code, responsable, en application de la dérogation prévue au dernier alinéa de l’article L. 243-1-3 du présent code, du versement des cotisations de sécurité sociale et des contributions mentionnées à l’article L. 136-2, à l’article 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale et au 1° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles. » ;
2° L’article L. 243-1-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le 2° du présent article ne s’applique pas aux employeurs mentionnés à l’article L. 5424-22 du code du travail. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 16 bis
M. le président. L'amendement n° 523 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 16 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003 est ainsi modifiée :
1° L’article 76 est ainsi modifié :
a) La deuxième phrase du II du A est ainsi rédigée :
« Les catégories de spectacles et les critères d'affectation de la taxe sont précisés par décret » ;
b) Le C est abrogé ;
2° L’article 77 est ainsi modifié :
a) La seconde phrase du II du A est ainsi rédigée :
« Les catégories de spectacles et les critères d'affectation de la taxe sont précisés par décret. » ;
b) Le B est abrogé.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement vise à clarifier les critères d’affectation de la taxe fiscale sur les spectacles instituée par la loi de finances rectificative pour 2003 au profit, d’une part, du Centre national de la chanson, des variétés et du jazz, le CNV, et, d’autre part, de l’Association pour le soutien du théâtre privé, l’ASTP.
Aujourd'hui, des critères sont définis par décrets, mais ils ne sont pas satisfaisants, car ils sont assez restrictifs. Ils posent ainsi des difficultés d’interprétation récurrentes, lesquelles sont parfois spectaculaires, pour l’affectation des taxes, notamment pour les comédies musicales et les spectacles d’humour. Cela a pour conséquence de multiplier les arbitrages au sein de la commission prévue par le décret, voire des contentieux fort longs.
Le présent amendement tend à confier au pouvoir réglementaire le soin de définir des critères d’affectation de la taxe afin d’adapter le dispositif aux évolutions constantes des genres de spectacles et ainsi de prévenir ou de résoudre les litiges entre les organismes percepteurs, voire de diminuer le contentieux.
Cette disposition n'aura aucune incidence sur l'assiette, le taux et le rendement de cette taxe. Il s’agit d’effectuer un partage plus clair entre le CNV d’une part et l’ASTP d’autre part, en accord d’ailleurs avec ces organismes, qui ont été consultés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Il est en effet souhaitable de procéder à une clarification et de lever certaines incertitudes.
Cet amendement ayant été déposé tardivement par le Gouvernement, la commission n’a pas pu l’examiner. C’est donc à titre personnel que j’émettrai un avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16 bis.
Chapitre V
Enseignement supérieur de la création artistique et enseignement artistique spécialisé
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 252, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi l'intitulé de cette division :
Éducation artistique et culturelle, enseignement artistique
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement, simple en apparence, est sur le fond d’une grande importance, puisqu’il vise à modifier l’intitulé du chapitre V du titre Ier du texte.
Si l’intégration de l’enseignement aux arts et à la culture est une bonne chose, nous considérons que la modification de l’intitulé de ce chapitre permettrait de répondre aux besoins d’intelligibilité de la loi. Il est ainsi proposé de remplacer l’intitulé actuel, pour l’heure uniquement centré sur l’enseignement supérieur de la création artistique et l’enseignement spécialisé aux arts et à la culture, afin de prendre en compte l’éducation artistique et culturelle au sens le plus large possible.
Il s’agit notamment de prendre en considération les avancées effectuées ces dernières années, et ce à tous les niveaux éducatifs pour sensibiliser les enfants aux arts et à la culture. Parcours culturels et artistiques à l’école élémentaire, développement, autant que faire se peut, des conservatoires par les collectivités territoriales, initiatives indépendantes de sensibilisation aux arts et à la culture : c’est l’ensemble de ces actions et programmes qui devraient être pris en compte dans un texte ayant pour objet de consacrer la liberté de la création artistique et la culture pour toutes et tous.
M. le président. L'amendement n° 502, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi l'intitulé de cette division :
Enseignement artistique spécialisé, enseignement supérieur de la création artistique et de l'architecture
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission a souhaité modifier l’intitulé du chapitre V pour y faire figurer les sujets qui y sont abordés et qui n’avaient probablement pas encore été traités au début de l’examen du texte.
Nous proposons de libeller ainsi le titre du chapitre : « Enseignement artistique spécialisé, enseignement supérieur de la création artistique et de l'architecture ».
Mme Audrey Azoulay, ministre. Nous sommes défavorables à l’amendement n° 252, compte tenu du champ du sujet. En revanche, nous sommes favorables à l’intitulé que propose la commission.
M. le président. Madame Gonthier-Maurin, l'amendement n° 252 est-il maintenu ?
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Oui, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, l’intitulé du chapitre V du titre Ier du projet de loi est ainsi rédigé.
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Il n’étonnera personne que je prenne la parole, à ce stade du débat, sur les conservatoires, ce réseau exceptionnel d’établissements initialement portés par le plan Landowski, dont le maillage est important.
Mers chers collègues, vous connaissez tous mon engagement de longue date pour la défense des enseignements artistiques. Je rappelle que j’ai rédigé un rapport d’information au nom de la commission des affaires culturelles en 2007 et que j’ai récemment déposé deux propositions de loi, preuve s’il en est que ce sujet n’a jamais été abandonné ici au Sénat.
Madame la ministre, je sais gré à votre prédécesseur, Fleur Pellerin, d’avoir reconnu en juin dernier que le ministère n’était pas à l’aise avec ce que le Gouvernement faisait subir aux conservatoires depuis 2012. Rappelons que les crédits de l’État n’ont en effet cessé de se réduire comme peau de chagrin jusqu’à disparaître en loi de finances pour 2015. Ils ont été rétablis pour l’année 2016. De là à proclamer un « plan conservatoires », comme cela a été fait, nous pensons qu’il y a une marge.
Je rappelle tout de même que les crédits pour 2016 n’ont même pas retrouvé leur niveau de 2014, lequel n’était déjà pas celui de 2012, et que les dispositions de l’article 17 A que nous examinerons dans quelques instants ne sont pas encore totalement satisfaisantes, même si je reconnais que cet article s’est enrichi à l’Assemblée nationale de quelques dispositions que nous proposions déjà ici.
Je remercie la commission de la culture, suivant notre rapporteur, Jean-Pierre Leleux, d’avoir jugé bon de reprendre les dispositions que j’avais proposées dans ma proposition de loi de juillet 2015. Je pense qu’il est indispensable que nous puissions régler aujourd’hui, à l’occasion de la discussion de ce texte, la question des conservatoires, qui vivent une crise institutionnelle majeure depuis 2004, doublée d’une crise financière.
Il me semble indispensable d’assurer un développement harmonieux et raisonné de ces établissements et d’ériger les régions en chefs de file des enseignements artistiques spécialisés dans les territoires. Tel est le sens des dispositions qui ont été adoptées par la commission de la culture.
Je serais très heureuse, madame la ministre, que vous puissiez nous apporter au cours de ce débat quelques éléments d’information plus précis sur le financement des conservatoires par l’État, notamment sur les critères et les modalités de répartition des crédits.
J’aimerais également savoir ce qu’il adviendra de l’article L. 216-2-1, qui figure toujours dans la loi et qui prévoit le transfert de l’État aux régions des crédits pour financer les ex-CEPI, les cycles d’enseignement professionnel initial. C’est un point extrêmement important.
Je tiens enfin à vous faire part de l’inquiétude de l’ensemble des acteurs, des directeurs de conservatoire, des professeurs, des parents d’élèves et des élèves s’agissant du fréquent changement de dénomination de ce troisième cycle professionnalisant des établissements : hier CEPI, aujourd'hui COP – classe d’orientation professionnelle –, demain classe prépa… Peut-être n’y a-t-il là qu’un simple glissement sémantique, qu’une simple substitution de nom, mais d’aucuns craignent à brève échéance la disparition de ce cycle spécifique, lequel est pourtant très clairement défini et préconisé dans le schéma national d’orientation pédagogique de votre ministère, ainsi que dans les différents décrets et arrêtés qui s’y rapportent.
Article additionnel avant l’article 17 A
M. le président. L'amendement n° 253, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 17 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’État et les collectivités territoriales garantissent une véritable égalité d’accès aux enseignements artistiques, à l’apprentissage des arts et de la culture. Cette politique s’exprime notamment par le financement de l’enseignement artistique spécialisé au travers des conservatoires communaux, de communautés de communes, départementaux et régionaux. Ces derniers sont ouverts à toutes et tous et sont des lieux essentiels pour l’initiation, l’éducation et le perfectionnement artistique et culturel.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement, qui fait écho aux préoccupations formulées par Mme la présidente de la commission, vise à rappeler, dès le début du chapitre consacré à l’enseignement artistique et culturel, le rôle fondamental de l’État et des collectivités territoriales dans la constitution d’une société de la culture et des arts, une société où ces domaines sont l’affaire de toutes et tous, et pas seulement la représentation d’une élite par elle-même.
La compétence partagée de la culture, qui pourrait être améliorée, mobilise la puissance publique à tous les échelons, de l’État central et déconcentré aux communes, en passant par les régions et, de plus en plus, par les intercommunalités.
Avant d’aborder le chapitre sur l’enseignement artistique et culturel, il semble essentiel de rappeler le rôle que chacune ou chacun doit tenir, pour permettre une véritable égalité d’accès aux enseignements, à l’apprentissage, à la sensibilisation vis-à-vis des arts et de la culture.
Par ailleurs, l’enjeu est de rappeler la nécessité de pérenniser, de renforcer la situation des conservatoires, aujourd’hui mis à mal financièrement, malgré des engagements ministériels qu’il convient de saluer, car ils ont le mérite d’exister, bien qu’insuffisants au regard de la situation d’urgence touchant certaines structures.
Vous connaissez notre attachement aux conservatoires, qui constituent à nos yeux un outil essentiel à l’initiation, l’éducation et le perfectionnement artistique et culturel. Installés depuis souvent plusieurs décennies dans les quartiers de vie et populaires, ils favorisent, en relation avec les écoles élémentaires et les collèges du secteur, un accès privilégié à la culture et aux arts à des enfants qui n’auraient jamais pu passer les portes de structures privées.
Toutefois, ce constat, cet idéal, doit être relativisé. La précarisation de la situation des conservatoires a mené un certain nombre d’entre eux à augmenter leurs tarifs pour survivre, excluant malheureusement de plus en plus ceux qui ne pourraient jamais se tourner vers des structures privées
L’enjeu de cet amendement est donc de rendre vivant l’idéal d’une puissance publique profondément et concrètement engagée dans l’instauration d’une société des arts et de la culture.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement tend à introduire un article additionnel avant l’article 17 A, relatif à l’enseignement supérieur.
Il est proposé de rappeler en termes très généraux la responsabilité de l’État et des collectivités territoriales en matière d’enseignement artistique, ainsi que les missions des conservatoires, qui seraient « des lieux essentiels pour l’initiation, l’éducation et le perfectionnement artistique et culturel ». Certes…
Il ne semble pas opportun d’ajouter un tel article volant sur l’enseignement artistique et les missions des conservatoires. Depuis des années, les lois s’alourdissent progressivement, avec des dispositions qui font doublon. Au Sénat, nous nous efforçons d’être synthétiques, afin d’éviter que la loi ne finisse par devenir une suite d’affirmations péremptoires sans portée juridique.
Je préférerais qu’un tel article additionnel ne figure pas dans le texte. Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Les conservatoires constituent un exemple intéressant du travail qui est réalisé conjointement par l’État et les collectivités locales en matière culturelle. L’État était présent dans le fonctionnement des conservatoires sur le plan budgétaire de manière assez résiduelle. Pour autant, on a constaté très rapidement les problèmes que son désengagement posait en termes de fonctionnement, et même de doctrine quant à la politique d’éducation menée par les conservatoires.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est revenu sur ce premier mouvement. Je crois qu’il a entendu les préoccupations tout à fait légitimes de Mme la présidente de la commission.
De nouveaux moyens ont été obtenus dès 2016. Une augmentation de 8 millions d'euros a été décidée en loi de finances initiale pour les conservatoires. Cela leur permettra de retrouver cette ambition partagée entre l’État et les collectivités que vous appelez de vos vœux et de prendre davantage en compte l’évolution des réalités territoriales, en structurant mieux l’offre publique.
Vous m’avez interrogée sur les critères qui vont guider le réengagement de l’État auprès des conservatoires. Ils ont été énoncés de manière claire auprès des collectivités et des conservatoires. Ils s’articulent autour de trois lignes fortes.
Premièrement, les conservatoires doivent intégrer et enseigner des disciplines actuelles en terme musical.
Deuxièmement – c’est une dimension transversale de l’éducation artistique et culturelle –, les conservatoires doivent proposer un travail collectif à nos enfants, que ce soit dans les chorales, les orchestres, et pas uniquement un travail individuel, puisque c’est une part également très importante de l’éducation artistique et culturelle.
Troisièmement, les tarifs que proposent les conservatoires doivent être modulés en fonction des revenus des familles, ce qui est aussi un critère important. Même si cela existe déjà souvent, ce n’est pas partout le cas.
Vous avez évoqué la rédaction du texte et le flottement qui en résulterait dans le code de l’éducation. On pourra éventuellement procéder à une codification en deuxième lecture.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 253.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le rapporteur, nous ne voulons évidemment pas faire une loi bavarde. Mais le rôle de la loi, c’est aussi de poser des principes fondateurs d’une grande ambition !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 17 A.
Article 17 A
Le titre Ier du livre II du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Au 3° du I de l’article L. 214-13, les mots : « le cycle d’enseignement initial dispensé par les établissements d’enseignement artistique » sont remplacés par les mots : « l’enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant » ;
2° L’article L. 216-2 est ainsi modifié :
aa) La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « , à vocation professionnelle ou amateur » ;
a) À la dernière phrase du même premier alinéa, les mots : « cycle d’enseignement professionnel initial » sont remplacés par les mots : « enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant » ;
a bis (nouveau)) Le même premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Leur mission est également la formation des amateurs et le développement de leur pratique ; à ce titre ces établissements peuvent apporter, avec leurs enseignants, leur concours aux actions conduites en matière d’éducation artistique et culturelle. » ;
a ter (nouveau)) À la fin de la seconde phrase du troisième alinéa, les mots : « le schéma départemental » sont remplacés par les mots : « les schémas régional et départemental » ;
a quater (nouveau)) À la deuxième phrase du quatrième alinéa, après les mots : « communes concernées », sont insérés les mots : « ou le cas échéant avec leurs groupements » ;
b) Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :
« La région organise l’enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant. Elle participe à son financement dans des conditions précisées par convention avec les collectivités gestionnaires des établissements, après concertation dans le cadre de la conférence territoriale de l’action publique. Elle adopte un schéma régional de développement des enseignements artistiques, en concertation avec les collectivités concernées et après avis de la conférence territoriale de l’action publique. » ;
c) À la deuxième phrase de l’avant-dernier alinéa, après le mot : « définit », sont insérés les mots : « un schéma national d’orientation pédagogique dans le domaine de l’enseignement public spécialisé de la musique, de la danse et de l’art dramatique ainsi que » ;
d (nouveau)) Le même avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il coordonne, au plan régional ou interrégional, l’organisation des examens du diplôme national prévu au présent article et délivre ledit diplôme. »
M. le président. La parole est à Mme Dominique Gillot, sur l’article.
Mme Dominique Gillot. À ce stade de notre discussion, je voudrais m’exprimer sur l’enseignement supérieur.
L’enseignement supérieur, c’est l’investissement pour l’émergence des savoirs, pour l’avenir, pour la jeunesse
C’est un modèle pour l’élévation du niveau de compétences, anticipant les innovations et les métiers de demain.
C’est l’implication renforcée des acteurs, publics ou d’intérêt général, au service de la réussite des étudiants dès le premier cycle.
Ce sont des synergies entre des cultures éducatives et professionnelles différentes, issues des écoles, des universités, des classes préparatoires, afin d’enrichir les pratiques de chacun des acteurs.
Nous avons contribué à façonner l’enseignement supérieur par la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, dite loi ESR, en affirmant le rôle stratège de l’État, avec la mise en place de cotutelles entre différents départements ministériels. Nous avons inscrit dans la loi les stratégies nationales d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation, qui sont coordonnées pour relever les défis sociaux, culturels, économiques et scientifiques actuels.
Les articles 17 A, 17 et 17 bis, qui traitent de l’enseignement supérieur artistique et culturel, doivent s’intégrer dans une telle logique
Les écoles d’enseignement artistique et culturel, qu’elles soient territoriales ou nationales, sont de service public ou d’intérêt général, comme l’ensemble des établissements qui délivrent des diplômes d’un niveau supérieur au baccalauréat, visant une offre de qualité, avec des passerelles permettant des réorientations fructueuses des étudiants.
Elles participent de cet espace de formation ambitieux, pour la réussite de tous dès le premier cycle, en favorisant les approches transdisciplinaires, nourries par une recherche interdisciplinaire.
Ayant été rapporteur de la loi ESR, je m’attacherai à plaider pour le rassemblement des enseignements supérieurs artistiques et culturels dans l’enseignement supérieur national.
Le développement des relations entre tous les acteurs de l'enseignement supérieur et de la recherche d’un même territoire participe de la stratégie nationale de l’enseignement supérieur, en concertation avec la communauté culturelle et scientifique, les ministères concernés, les collectivités locales et les partenaires sociaux.
La cotutelle du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche et du ministère et de la culture et de la communication contribue à une meilleure complémentarité et à meilleure lisibilité de l’offre de formation, grâce à la mutualisation, la simplification et l’harmonisation des différents cursus, comme des diplômes.
En 2002, le ministère de la culture, qui est signataire des accords de Bologne, s’était engagé à harmoniser ses enseignements supérieurs dans le schéma licence-master-doctorat, ou LMD, en respectant leurs spécificités.
Il est temps de concrétiser un tel engagement, qui est attendu par un grand nombre d’enseignants artistiques et culturels. Ils aspirent à une reconnaissance de leurs compétences et de leurs capacités, une reconnaissance similaire à celle de leurs collègues des grandes écoles ou des universités.
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue !
Mme Dominique Gillot. Le ministère de la culture et de la communication et celui de l’éducation nationale ne doivent pas laisser passer une telle occasion, sous l’arbitrage de Matignon. J’espère que vous y serez sensible, madame la ministre.
M. le président. L'amendement n° 503, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
cycle d'enseignement
insérer le mot :
professionnel
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement vise à la rectification d’une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 117 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 8, 10 et 11
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement concerne le chef de filat des régions s’agissant des enseignements artistiques.
Je tiens d’abord à réaffirmer l’attachement du groupe socialiste aux conservatoires, notamment dans leurs évolutions pédagogiques. On a parlé tout à l’heure de pratiques collectives. Une évolution extrêmement importante s’est produite au sein de nos conservatoires, d’un point de vue non seulement pédagogique, mais aussi territorial, afin qu’un certain nombre d’enfants, et pas seulement les enfants captifs, puissent intégrer ces beaux outils.
Nous soulevons une question plus complexe. Je reconnais la ténacité de la présidente de la commission en la matière, mais la solution envisagée m’inspire des réserves. J’étais déjà réticente auparavant, et je le suis peut-être encore plus aujourd'hui.
Ce n’est pas forcément une opposition de fond. À mon sens, il y a une vraie logique à ce que les régions s’intéressent aux conservatoires ; je pense qu’elles doivent le faire.
Pour autant, il ne me paraît pas souhaitable de légiférer sans délai pour que les régions assument le chef de filat en matière d’enseignement supérieur artistique des conservatoires sans avoir préalablement mené une étude d’impact et, surtout, sans les avoir consultées. Qui dit « chef de filat » dit « transfert de charges et de financements ». Or nous ne connaissons pas l’année de référence ; nous ne savons pas quel serait l’impact financier d’une telle décision pour les régions, notamment les grandes régions, puisque les périmètres ont changé. Je ne suis pas sûre qu’il soit opportun de prendre une telle décision aujourd'hui.
Nous avons voté la création d’une commission « culture » dans les conférences territoriales de l’action publique, les CTAP. Ces commissions « culture » seront peut-être animées par les régions, qui président les CTAP. Elles me semblent constituer le cadre parfaitement approprié pour permettre aux régions d’organiser et d’articuler ces enseignements sur l’ensemble du territoire, en lien avec les différentes collectivités territoriales.
Il me semble plus juste d’aller dans cette direction. Je rappelle que des pôles d’enseignement artistique supérieur se sont créés. Il y a ainsi un pôle extrêmement intéressant au sein de l’interrégion Bretagne – Pays de la Loire. Il me paraît donc souhaitable de mettre les conservatoires en cohérence avec ces grands pôles.
Mais, en tout état de cause, nous ne souhaitons pas que la région devienne chef de file en matière d’enseignement artistique spécialisé. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 340, présenté par le Gouvernement, est ainsi rédigé :
I. – Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
« La région organise et peut participer au financement, dans le cadre du contrat de plan mentionné à l’article L. 214-13, de l’enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant. » ;
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement va dans le même sens que celui qui vient d’être présenté – nous souhaitons également la suppression du chef de filat de la région –, mais la rédaction est différente.
L’amendement du Gouvernement repose sur la claire répartition des compétences et des missions entre les différentes collectivités territoriales résultant de la loi de 2004. Elle est d’ailleurs confirmée dans le projet de loi. C’est dans ce cadre que l’État se réengage auprès des conservatoires.
Mais il ne me semble pas nécessaire d’organiser un chef de filat de la région en matière d’enseignement artistique spécialisé. En effet, comme le président de région préside et fixe l’ordre du jour des CTAP – vous les avez évoquées –, il pourra aisément soumettre le sujet au débat.
Il faut une coordination accrue entre les différentes collectivités territoriales et l’État pour qu’une telle politique se développe efficacement au profit de tous les enfants et de tous les jeunes, sur tous les territoires. Ce sera bien l’objectif des CTAP.
Nous nous inscrivons plutôt dans une logique partenariale et de concertation entre les divers niveaux de collectivités. Nous ne sommes donc pas favorables à un chef de filat.
Par ailleurs, j’appelle de mes vœux un engagement volontaire des régions pour l’organisation, le développement et le financement des classes préparatoires, qui permettent l’accès à l’enseignement supérieur ; certes, ce financement est optionnel. Cela doit se faire en tenant compte des compétences affirmées par les régions pour le développement de la formation professionnelle, notamment à l’article L. 214-13 du code de l’éducation.
J’en suis convaincue, la reprise du dialogue entre l’État et les collectivités territoriales ne peut qu’être favorable à cet engagement partagé de l’État et des régions au côté des villes et des agglomérations, en lien avec les départements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission a fortement appuyé le chef de filat de la région sur l’enseignement artistique spécialisé, que ces deux amendements, légèrement différents, tendent à supprimer. Je rappelle que Catherine Morin-Desailly a même déposé une proposition de loi sur le sujet.
La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République n’a pas clarifié les compétences entre collectivités : la culture demeure une « compétence partagée ».
Je suis sensible à l’argument de Mme Robert sur l’action future de la CTAP. Néanmoins, il nous semble important que la région exerce le chef de filat de coordination.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 117 rectifié ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je sollicite le retrait de cet amendement, au profit de celui du Gouvernement.
M. le président. Madame Robert, l’amendement n° 117 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sylvie Robert. Non, monsieur le président ; je le retire, au profit de l’amendement n° 340.
M. le président. L’amendement n° 117 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote sur l’amendement n° 340.
Mme Dominique Gillot. Je comprends bien le souhait du Gouvernement d’introduire une précision dans le texte.
Toutefois, l’expression : « La région organise » me semble de nature à créer une difficulté. Elle semble indiquer une suprématie de la région en matière d’organisation de l’enseignement supérieur.
Nous avons déjà eu ce débat lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles et du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.
Je suis défavorable à une telle rédaction. Si la région peut « participer au financement », elle ne doit pas « organiser ».
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Madame Gillot, le terme auquel vous faites référence concerne seulement le troisième cycle professionnalisant.
Madame Robert, il est plus que temps de trouver une solution claire sur le sujet, qui fait débat depuis maintenant treize ans entre parents d’élèves, professeurs, directeurs de conservatoires et représentants des collectivités ; je les ai auditionnés à de très nombreuses reprises.
Nous le savons, la position de l’Association des régions de France, l’ARF a été ambiguë et changeante. Sa crainte principale tenait au surcoût qu’un tel changement pourrait entraîner, au-delà du transfert des crédits de l’État.
Or, dans une étude que je tiens à votre disposition, j’ai démontré que les deux expérimentations très réussies menées en Nord-Pas-de-Calais et en Poitou-Charentes – elles se poursuivent actuellement – n’avaient pas entraîné de surcoût avéré.
Le transfert des crédits de l’État est une question importante. C’est pourquoi je vous ai interrogée tout à l’heure, madame la ministre. En principe, la loi votée en 2004 s’applique. Si la ligne de crédits a été reconstituée, elle doit être transférée.
Au demeurant, à l’heure où les grandes régions se mettent en place et où un certain nombre de compétences et d’ambitions ont été précisées, notamment en matière de développement économique et de formation professionnelle, il serait opportun d’inscrire le rôle de la région comme chef de file. Ce faisant, la région jouerait un rôle non pas d’ordonnateur, mais de coordonnateur. Elle veillerait, en lien, bien évidemment, avec la commission « culture » de la CTAP, au développement harmonisé sur le territoire de cet enseignement, pour permettre à chaque enfant d’organiser son parcours d’enseignement.
En outre, les schémas départementaux étant également mentionnés dans le texte, préciser le chef de filat, c’est aussi réaffirmer que l’égalité d’accès de tous les jeunes à ces établissements doit s’organiser à l’échelon le plus cohérent, en l’occurrence la région.
Vous le voyez, nous défendons une ambition, ce qui n’exclut pas la logique partenariale.
Je le constate en tant que conseillère régionale de Normandie : dans la période actuelle, nous sommes tous obligés de travailler les uns avec les autres, pour définir des objectifs et mettre en place des financements.
Les différents acteurs concernés attendent que nous tranchions sur cette question.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Je suis très partagée. Je comprends les arguments de ceux qui résistent au chef de filat, car la décentralisation est aujourd’hui victime du fait que les moyens ne suivent pas.
Toutefois, le chef de filat a été expérimenté dans ma région. Je sais combien ce dispositif favorise une mue féconde des conservatoires. La région finance aussi de très petites structures, notamment de musiques actuelles et de musiques du monde ; la signature de conventions entre le conservatoire et ces structures s’en trouve donc facilitée. Ainsi, dans le Nord - Pas-de-Calais, des violonistes tsiganes, dont la performance dépasse celle des enseignants du conservatoire, ont pu conclure une convention de ce type, qui concourt à l’entrée de toutes les formes de musique au conservatoire et à la désacralisation de l’accès à ces lieux d’enseignement que nous appelons de nos vœux.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 340.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 151 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 145 |
Contre | 198 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’article 17 A, modifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 152 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 216 |
Contre | 125 |
Le Sénat a adopté.
Article additionnel après l’article 17 A
M. le président. L’amendement n° 522, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 17 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Le chapitre IX du titre III du livre II de la première partie du code de l’éducation est ainsi modifié :
a) À l’intitulé, les mots : « Le conseil territorial de l’éducation nationale et » sont supprimés ;
b) Est insérée une section 1 ainsi rédigée :
« Section 1
« Les instances consultatives en matière d’enseignement supérieur et de recherche dans les domaines relevant du ministre chargé de la culture
« Art. L. 239-1 – Le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels est placé auprès du ministre chargé de la culture.
« Il est consulté sur les orientations générales de la politique du ministère chargé de la culture en matière d’enseignement supérieur et de recherche dans les domaines de la création artistique, de l’architecture et du patrimoine.
« Il a notamment pour mission d’assurer la cohérence des formations et de la recherche dans ces domaines au regard des enjeux des secteurs professionnels concernés.
« Il donne un avis sur l’accréditation des établissements assurant des formations supérieures dans les domaines susmentionnés relevant du ministre chargé de la culture à l’exception de celle prévue à l’article L. 752-1.
« Il peut être également consulté sur les projets de textes législatifs ou réglementaires relatifs à l’enseignement supérieur et à la recherche dans les domaines susmentionnés. Il peut faire des propositions au ministre chargé de la culture sur toute question relative à son domaine de compétence.
« Il comprend notamment des représentants élus des personnels et des étudiants de ces établissements, ainsi que des représentants des secteurs professionnels principalement concernés.
« Un décret précise les attributions, la composition et les règles de fonctionnement du Conseil, ainsi que les conditions de nomination ou d’élection de ses membres, et notamment les conditions dans lesquelles est assurée la parité entre les femmes et les hommes. » ;
2° Au début de la troisième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 232-1, sont insérés les mots : « Le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels prévu à l’article L. 239-1 du présent code, ».
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement a pour objet la création du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels, le CNESERAC. Le ministère de la culture a besoin d’une telle structure – il en existe déjà dans d’autres ministères certificateurs – pour contribuer aux décisions stratégiques sur les questions d’enseignement supérieur et de recherche.
Cette instance renforcera la cohérence du réseau, composé des 100 établissements d’enseignement artistique supérieur, qui forment 37 000 étudiants, et d’une douzaine d’établissements de recherche.
Elle permettra de débattre et de mieux prendre en compte les spécificités de ce réseau, qui se caractérise en particulier par un lien très fort avec le monde des artistes. En effet, dans ces écoles, les intervenants sont souvent des professionnels de l’art et de la culture, ce qui constitue une spécificité importante de ce réseau.
Elle constituera à la fois un parlement des établissements et une structure opérationnelle représentant les différents acteurs – je pense aux dirigeants, aux enseignants, aux chercheurs, aux personnels administratifs, aux étudiants… –, aux côtés de personnalités qualifiées.
J’en suis convaincue, nous avons particulièrement besoin de ce lieu de débat, dans le contexte actuel de la stratégie nationale de l’enseignement supérieur et de la stratégie nationale de la recherche.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement aborde un sujet important, dont nous n’avons pas fini de parler. En tout cas, il est souhaitable que le débat se poursuive et qu’il reste effectivement une disposition dans le présent projet de loi.
Je le rappelle, dans l’examen des articles et des amendements, la commission a eu le souci constant de privilégier, pour les établissements concernés, une insertion dans notre système d’enseignement supérieur français et européen. C’est indispensable à la lisibilité et à la reconnaissance de notre système d’enseignement supérieur.
Mais tous les établissements ne sont pas au même point sur le chemin de cette « parfaite » insertion. Les écoles nationales supérieures d’architecture sont très avancées. Les écoles d’art le sont moins ; elles se rapprochent progressivement du droit commun, mais conservent encore des spécificités.
Il est souhaitable de maintenir un équilibre entre un objectif clair d’insertion à terme et des modalités prenant en compte les spécificités des établissements, afin de les accompagner sur ce chemin de l’insertion.
La question centrale de la forme que doit prendre le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, CNESER, dans le secteur culturel rejoint ce débat. Les rigueurs de l’article 40 ne permettent pas aux parlementaires de s’aventurer sur ce terrain. C’est pourquoi nous attendions avec impatience votre proposition relative à cette instance consultative, madame la ministre.
Vous envisagez la création d’un CNESERAC, c’est-à-dire d’un CNESER « culture », qui serait indépendant du CNESER du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
À titre personnel, j’aurais souhaité une intégration plus forte dans le CNESER de droit commun, par la création d’une section « culture » en son sein, pour éviter la prolifération de structures nouvelles.
Toutefois, afin de ne pas empêcher l’insertion de cette instance consultative dans le projet de loi, quelle que soit sa forme, j’émets à titre personnel – la commission n’a pas pu se prononcer – un avis de sagesse, tout en réservant mes éventuelles propositions de remplacement pour la deuxième lecture. Le sujet pourra ainsi être inscrit, et nous pourrons en discuter dans les semaines à venir, au cours la navette parlementaire.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote.
Mme Dominique Gillot. Je suis un peu embarrassée. Cet amendement du Gouvernement est arrivé tardivement. Nous n’avons pas eu le temps d’en discuter.
Compte tenu de mon intervention précédente, vous l’imaginez bien, en tant qu’ancien rapporteur du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche, je ne suis pas favorable à la création d’un CNESER particulier pour la culture.
L’insertion des enseignements culturels dans l’enseignement supérieur et la recherche ne peut se réaliser que par un rassemblement avec toutes les autres disciplines. Un tel regroupement sur l’ensemble du territoire et avec les organismes de recherche permettrait d’élaborer un projet commun et coordonné des politiques de formation et des stratégies de recherche, à même d’assurer un rayonnement national et international.
Le décloisonnement doit être conçu comme un outil de changement. Et aucune école, aucun établissement, ne doit rester sur le côté.
Même si je comprends le souci du ministère de la culture de disposer d’un organe de concertation pour avancer sur le rôle de l’enseignement supérieur artistique et culturel, la création par la loi d’un tel organe me semblerait un retour en arrière par rapport à l’ambition de la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche. Ce texte donnait un rôle d’animation, tous domaines confondus, au CNESER, en partenariat avec les ministères thématiques.
L’évolution des pratiques, des enseignements et de la recherche montre que des disciplines considérées comme artistiques sont aujourd’hui très attendues et appréciées dans le milieu de la recherche, ce qui aurait été plus difficile voilà encore quelques années. Le design ou les métiers artistiques s’intègrent parfaitement, de manière transdisciplinaire, dans la recherche qui fonde l’enseignement supérieur aujourd’hui.
Je souhaite qu’il y ait une réflexion au cours de la navette parlementaire pour préciser la place de l’enseignement supérieur artistique et culturel.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous n’avons pas eu le temps de travailler en commission sur cet amendement. Toutefois, a priori, ma philosophie globale va dans le sens de ce que vient de défendre Mme Gillot : pas de création d’un nouveau CNESER pour la culture et des activités artistiques.
À mon sens, nous avons besoin d’organiser une plus grande osmose, une plus grande fluidité, entre les différents parcours.
Je suis donc assez dubitative. Nous ne suivrons pas le Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Je souhaite saluer la sagesse de M. le rapporteur, qui nous invite à conserver l’amendement du Gouvernement pour laisser la réflexion se poursuivre au cours de la navette parlementaire.
À mon sens, un CNESER « culture » est extrêmement attendu par les professionnels, car il met en valeur la spécificité de leurs enseignements. Cela ne signifie pas – j’entends les arguments de notre collègue Dominique Gillot – que ces derniers ne soient pas inscrits dans la problématique de l’enseignement supérieur. Mais nous devons d’abord intégrer leurs spécificités.
Au demeurant, je rappelle qu’il existe depuis très longtemps un CNESER pour l’agriculture, créé justement pour travailler sur les particularités du secteur.
Les différents objectifs ne sont pas contradictoires.
Pour notre part, nous sommes favorables à l’amendement du Gouvernement. La navette parlementaire permettra de continuer à travailler pour parfaire le nouvel outil.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Le débat est effectivement complexe.
Sur le fond, le fait de prévoir un seul organisme pour l’enseignement supérieur ne peut à l’évidence que tirer vers le haut en termes de qualité, de complémentarité, de stratégie nationale ou d’interdisciplinarité. Cela semble le bon sens.
Mais il y a tout de même des problèmes.
Avec une telle solution, une partie de l’enseignement supérieur artistique ne serait pas intégrée et resterait en dehors, coupée du reste. Il faut mettre en place un organisme permettant à tous de travailler ensemble.
En outre, il faut bien le dire, les enseignements artistiques et culturels sont parfois regardés avec hauteur par une partie de l’enseignement supérieur, qui se considère comme détenteur d’un certain nombre de vérités. Ce regard distant sur l’art et la culture serait accentué si les enseignements artistiques et culturels étaient fondus dans un organisme général, d’autant que le phénomène existe parfois déjà vis-à-vis des sciences humaines.
Mme Dominique Gillot. Ce n’est pas vrai !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. On peut retourner l’argument !
M. David Assouline. Je connais ce milieu, mes chères collègues !
D’un côté, il nous faut exiger le même label de sérieux et de qualité pour l’art et la culture. De l’autre, nous avons aujourd’hui besoin d’un organe de concertation pour l’ensemble de l’enseignement supérieur artistique et culturel, ainsi que d’une stratégie pour imposer sa reconnaissance.
Il faudra réfléchir dans la navette aux liens entre les deux structures ; évitons qu’elles ne se développent de manière contradictoire et finissent par se regarder en chiens de faïence.
M. le président. Il faut conclure, M. Assouline !
M. David Assouline. Le débat qui commence doit se poursuivre, ce qui ne sera pas possible si nous rejetons l’amendement du Gouvernement. Nous avons déjà connu une telle situation hier.
Je pense que nous réussirons en fin de compte à trouver un consensus.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Je soutiens l’avis personnel de M. le rapporteur. Il est important que le débat puisse continuer durant la navette parlementaire.
J’entends parfaitement les arguments de Dominique Gillot.
Je le rappelle, notre collègue Jean-Claude Luche, rapporteur des crédits du programme 224, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », de la mission « Culture » – cela inclut donc les enseignements artistiques –, avait déposé un amendement. Malheureusement, celui-ci, qui a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40, n’a pas pu suivre son chemin. Il s’inscrivait dans la même logique que le vôtre, madame la ministre.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Ce débat constitue donc bien un sujet d’intérêt pour notre commission. Il faut entendre certains arguments en faveur de la création de ce CNESER dédié à l’enseignement artistique et culturel.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Il est utile de pouvoir continuer à discuter du sujet. D’ailleurs, à l’instar de M. Assouline, je crois tout à fait possible de trouver un consensus.
En revanche, j’attire votre attention sur un écueil éventuel. Si l’Assemblée nationale vote ce nouvel article sans le modifier, nous ne pourrons plus en discuter.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17 A.
Article 17
Les chapitres IX et X du titre V du livre VII de la troisième partie du code de l’éducation sont ainsi rédigés :
« CHAPITRE IX
« Les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques
« Art. L. 759-1. – I. – Les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques concourent à la réalisation des objectifs et des missions du service public de l’enseignement supérieur pour ce qui concerne le spectacle vivant et les arts plastiques et participent aux stratégies nationales de l’enseignement supérieur et de la recherche ainsi qu’aux regroupements d’établissements d’enseignement supérieur mentionnés au 2° de l’article L. 718-3. Ils ont pour mission d’assurer la formation initiale ou continue tout au long de la vie ainsi que la validation des acquis de l’expérience dans les métiers :
« 1° Du spectacle, notamment ceux d’artiste-interprète, d’auteur, d’enseignant et de technicien dans les domaines de la musique, de la danse, du théâtre et du cirque ;
« 2° De la création plastique et industrielle, notamment ceux d’artiste et de designer.
« II. – Dans l’exercice de leur mission, les établissements mentionnés au I peuvent :
« 1° Conduire des activités de recherche en art, en assurer la valorisation et participer à la politique nationale de recherche ;
« 2° Former à la transmission en matière d’éducation artistique et culturelle ;
« 3° Participer à la veille artistique, scientifique et technique et à l’innovation dans ses différentes dimensions, notamment pédagogique ;
« 4° Contribuer à la vie culturelle, économique, sociale et environnementale du territoire en développant des partenariats, notamment avec les institutions culturelles, les collectivités territoriales, les associations, les entreprises, les autres établissements d’enseignement supérieur et l’ensemble des établissements d’enseignement, notamment dans le cadre du parcours d’éducation artistique et culturelle ;
« 5° Concourir au développement de la coopération artistique, culturelle, scientifique, technique et pédagogique internationale.
« Art. L. 759-2. – (Non modifié) Pour les établissements mentionnés au I de l’article L. 759-1, les accréditations prévues à l’article L. 123-1 sont régies par l’article L. 613-1, sous réserve des adaptations suivantes :
« 1° La liste des diplômes délivrés par ces établissements autres que ceux définis au deuxième alinéa de l’article L. 613-1 est fixée par le ministre chargé de la culture ;
« 2° Les attributions exercées par le ministre chargé de l’enseignement supérieur en application du quatrième alinéa du même article L. 613-1 sont exercées par le ministre chargé de la culture et, en ce qui concerne les établissements ayant le caractère d’établissement public national, les modalités d’accréditation sont fixées conjointement par les ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la culture ;
« 3° Les cinquième, septième et dernier alinéas dudit article L. 613-1 ne s’appliquent pas ;
« 4° Pour l’application du sixième alinéa du même article L. 613-1, l’arrêté d’accréditation de l’établissement n’est pas soumis au respect du cadre national des formations et emporte habilitation à délivrer les diplômes nationaux et les diplômes d’écoles dont la liste est annexée à l’arrêté ;
« 5° L’organisation des études et des diplômes, ainsi que les modalités de l’évaluation des formations dans les disciplines du spectacle vivant et des arts plastiques, sont fixées par voie réglementaire.
« Art. L. 759-3. – (Non modifié) Les établissements mentionnés au 1° du I de l’article L. 759-1 peuvent conclure, en vue d’assurer leur mission, des conventions de coopération avec d’autres établissements de formation.
« L’accréditation des établissements publics d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques peut emporter habilitation de ces derniers, après avis conforme du ministre chargé de la culture, à délivrer, dans leurs domaines de compétences, conjointement avec des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, des diplômes de troisième cycle au sens de l’article L. 612-7.
« Art. L. 759-4. – (Non modifié) Le personnel enseignant des établissements mentionnés au I de l’article L. 759-1 comprend des enseignants titulaires. Il comprend également des enseignants associés ou invités et des chargés d’enseignement, qui assurent leur service dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 952-1. Les enseignants de ces établissements peuvent être chargés d’une mission de recherche, dans des conditions fixées par décret.
« Art. L. 759-5. – (Non modifié) Les établissements relevant de l’initiative et de la responsabilité des collectivités territoriales, qui assurent une préparation à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques, peuvent être agréés par l’État s’ils satisfont à des conditions d’organisation pédagogique définies par décret.
« Les étudiants inscrits dans les établissements agréés du domaine des arts plastiques sont affiliés aux assurances sociales dans les conditions et sous les réserves prévues à la section 3 du chapitre Ier du titre VIII du livre III du code de la sécurité sociale.
« CHAPITRE X
« Les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du cinéma et de la communication audiovisuelle
« Art. L. 75-10-1. – (Non modifié) Les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du cinéma et de la communication audiovisuelle sont, lorsqu’ils sont placés sous la tutelle du ministre chargé de la culture, accrédités par ce ministre pour la durée du contrat pluriannuel signé avec l’État, selon des modalités fixées conjointement avec le ministre chargé de l’enseignement supérieur.
« L’arrêté d’accréditation emporte habilitation de l’établissement à délivrer des diplômes d’école et des diplômes nationaux autres que ceux définis à l’article L. 613-1. »
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l’article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Les articles 17 A, 17 et 17 bis concernent l’enseignement de la culture, des arts et de l’architecture. C’est une question primordiale.
Vous le verrez rapidement, le groupe CRC a déposé des amendements pour enrichir l’article 17.
Si la dynamique semble être la bonne, il convient de lui donner un coup de pouce, sous peine que l’ambition ne reste insuffisante.
Comme je l’indiquais, la volonté exprimée par le Gouvernement de rapprocher les établissements supérieurs spécialisés des arts et de la culture du système « traditionnel » universitaire aura le soutien du groupe CRC. C’est bien cette logique qui inspire nos amendements. J’ai pris bonne note des décisions qui viennent d’être prises pour permettre au débat de se poursuivre.
Toutefois, les portes de sortie laissées, notamment en matière de dérogations au principe de cadrage national des diplômes ou de conditions de poursuite d’études, loin d’être une reconnaissance des spécificités de ces enseignements, me semblent présenter un risque pour tout le monde : en premier lieu, pour les filières universitaires des arts et de la culture – musicologie, musique, histoire de l’art, etc. –, qui, bien souvent, voient leur légitimité remise en cause alors que leur compétence est unanimement reconnue ; en deuxième lieu, pour les étudiants des filières universitaires et des établissements spécialisés, qui connaissent de grandes difficultés pour passer d’une structure à une autre ; en dernier lieu, pour les établissements spécialisés, qui pourraient profiter de ce rapprochement pour nouer de nouveaux contacts et de nouveaux partenariats, tout en accueillant des publics plus divers.
Les amendements que nous vous proposerons viseront à rapprocher encore établissements spécialisés et universités, dans l’intérêt de toutes et tous, en reconnaissant les spécificités de chacun.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 372, présenté par Mmes Blandin, Bouchoux et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Supprimer les mots :
de la création artistique
II. – Alinéa 4
1° Première phrase
Supprimer les mots :
de la création artistique
2° Seconde phrase,
Après les mots :
acquis de l’expérience
insérer les mots :
, ils veillent au respect de la diversité artistique, professionnelle et culturelle, ils forment également aux activités de médiation
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Madame la ministre, vous avez reçu dès votre arrivée dans cet hémicycle l’hommage de M. le rapporteur, membre du groupe Les Républicains, de la présidente de la commission, membre du groupe centriste, et des orateurs des groupes CRC et socialiste. Puisque nous abordons la discussion du premier amendement du groupe écologique, j’ai à mon tour le devoir et le plaisir de vous souhaiter la bienvenue !
L’amendement n° 372 vise tout d’abord à simplifier les intitulés des établissements d’enseignement supérieur du spectacle vivant et des arts plastiques.
Ensuite, et c’est l’essentiel, il tend à ajouter dans leurs missions le « respect de la diversité artistique, professionnelle et culturelle ». L’absence de ces termes nous semble dommageable : la transmission et le contour de ce qui constitue le patrimoine commun, présent et à venir, sont en jeu.
Enfin, nous proposons d’intégrer le terme « médiation ». Dans leurs activités futures, les artistes peuvent être amenés à intervenir auprès de personnes de tous âges, de toutes origines, de tous milieux, et dans des environnements autres que scolaires, qu’il s’agisse des hôpitaux, des prisons, des quartiers. Ces actions ne se limitent pas à la transmission d’un savoir qui donnerait des clés pour accéder à l’art ; elles installent des dialogues nourris de la présence de la culture en chacun. La médiation contient la notion de rencontre entre l’œuvre et le public. Dans la perspective de la démocratie culturelle, la médiation est pensée à partir de la notion de relation, envisagée comme une expérience partagée susceptible de produire un enrichissement mutuel.
Or, actuellement, l’enseignement de la médiation est restreint à une option. L’évolution des métiers requiert de plus en plus d’être en lien avec les publics. Un établissement de formation supérieure ne doit donc plus laisser aucun artiste sortir de ses rangs sans quelques notions sur le sujet.
M. le président. L’amendement n° 119 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4, seconde phrase
Après les mots :
des acquis
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
de l’expérience. Ils veillent au respect de la diversité artistique, professionnelle et culturelle ; ils forment également aux activités de médiation dans les métiers :
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement vise à faire apparaître les notions de « diversité artistique » et d’« activités de médiation » dans la mission de formation assurée par les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique. C’est cohérent avec un certain nombre de problématiques que nous avons soulevées depuis le début de l’examen de ce projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Madame Blandin, j’ai été très sensible à vos propos sur la médiation, qui est aujourd’hui une dimension stratégique majeure pour la conquête de nouveaux publics et les avancées de la démocratisation culturelle.
En revanche, votre amendement vise également à supprimer la référence à la « création artistique », ce qui me gêne. J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 372 et un avis favorable sur l’amendement n° 119 rectifié.
M. le président. Madame Blandin, l’amendement n° 372 est-il maintenu ?
Mme Marie-Christine Blandin. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 372 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 119 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 255, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 759-1-… – L’État, par le biais de son représentant, s’assure de l’existence et du développement de passerelles possibles et facilitées entre les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique et les filières universitaires des arts.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. À nos yeux, le rapprochement souhaité par le Gouvernement entre les établissements d’enseignement supérieur des arts et de la culture et le système d’enseignement supérieur et de recherche, que nous pouvons considérer comme « traditionnel », est une bonne chose.
Toutefois, si la démarche va dans le bon sens, il nous semble essentiel d’aller plus loin. Cet enrichissement a vocation à sécuriser la position des étudiants des établissements spécialisés, tout en reconnaissant la spécificité de ces établissements, à nulle autre pareille.
Il s’agit aussi, et c’est le cœur de notre amendement, de garantir aux étudiants des parcours fluides et sans cahots, dans une liberté de choix, comme je l’ai évoqué tout à l’heure.
Nous proposons donc que l’État, par le biais du recteur, s’assure de l’existence et, le cas échéant, de la création de passerelles entre les structures d’enseignement supérieur des arts et de la culture et les filières universitaires correspondantes. Ces dernières, bien que plus en plus développées, souffrent aujourd’hui d’une dévalorisation de leurs activités. Il apparaît de fait essentiel de favoriser les passerelles entre les différents parcours et filières.
Le rapprochement s’effectuerait au bénéfice non seulement des structures spécialisées, qui verraient leur intégration dans le système « traditionnel » de l’enseignement et de la recherche renforcée – de fait, de nouvelles possibilités s’ouvrent à elles –, mais également des étudiants, qui pourraient passer d’une structure à l’autre au gré de leur volonté, dans le respect des règles applicables aux autres filières.
Nous y voyons enfin un bénéfice pour les filières universitaires, qui verraient ainsi leur compétence dans le domaine des arts et de la culture mieux reconnue et leur légitimité renforcée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Il est proposé d’obliger l’État à développer des passerelles entre les écoles et les filières universitaires d’art. La commission est évidemment favorable aux passerelles ; la capillarité entre les différentes écoles est utile.
Mais je rappelle que les établissements sont autonomes et qu’il n’appartient pas à la loi de les obliger à créer des passerelles. Celles-ci se créeront naturellement, dans un esprit bien compris de partage.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Mon analyse rejoint celle de M. le rapporteur. En effet, les écoles de la création artistique ont déjà su nouer des partenariats avec les universités. Ces échanges se sont d’ailleurs considérablement intensifiés dans les filières universitaires. Je pense notamment au grade de master dans les filières d’arts plastiques et, bientôt, me dit-on, au grade de licence pour le spectacle vivant.
De même, la création et l’esprit des communautés d’universités et d’établissements vont renforcer ces liens.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Madame Gonthier-Maurin, l’amendement n° 255 est-il maintenu ?
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Non, je le retire, monsieur le président. Mais j’ai soulevé la problématique.
M. le président. L’amendement n° 255 est retiré.
L’amendement n° 470 rectifié, présenté par MM. Luche, Lasserre, Guerriau, Capo-Canellas et Gabouty, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 356 rectifié, présenté par MM. Luche, Lasserre, Bonnecarrère, Guerriau, Capo-Canellas et Gabouty, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 441 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Jouve, MM. Amiel, Bertrand, Castelli, Fortassin et Hue, Mme Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
différenciés en fonction de leur domaine de formation dans les domaines du spectacle vivant ou des arts plastiques
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Je voudrais à mon tour souhaiter la bienvenue au Sénat à Mme la ministre, au nom du groupe du RDSE.
Ce groupe n’est pas le plus nombreux du Sénat, mais il est le plus ancien. Il a succédé au groupe de la Gauche démocratique, très puissant sous la IIIe République, et même sous la IVe République. Il appartient donc à l’histoire, au patrimoine et à la culture du Sénat ! (Exclamations amusées.)
L’amendement n° 441 rectifié vise à différencier les regroupements d’établissements publics en fonction de leur domaine de formation, selon que cela relève du spectacle vivant ou des arts plastiques, afin d’éviter des regroupements d’établissements publics dont les objectifs et les missions sont différents.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Les auteurs de cet amendement proposent que les regroupements d’établissements soient différenciés en fonction de leur domaine de formation : spectacle vivant ou arts plastiques.
Or les regroupements d’établissements ont justement pour objet de faire se rencontrer des établissements aux objectifs, aux méthodes et aux missions différentes. Cette pluridisciplinarité est précisément une source de richesse dans les regroupements.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je souhaite tout d’abord remercier M. le sénateur Requier pour ses mots très aimables.
Je souscris à l’analyse de la commission. Nous essayons de favoriser le rapprochement des disciplines, le croisement des méthodes. Les artistes le font de plus en plus. Les écoles ne doivent pas aller à l’encontre de ce mouvement, qui me paraît fécond pour la création.
L’avis du Gouvernement est donc également défavorable.
M. le président. L’amendement n° 118 rectifié bis, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Ils ne peuvent prendre la forme de régie directe.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Le choix du statut de l’établissement est une question importante. Dans un certain nombre de collectivités locales, cela a constitué un frein à la transformation d’un certain nombre d’associations en établissements publics de coopération culturelle, ou EPCC.
En outre, les statuts très publics, censés garantir une forme de pérennité de moyens, n’empêchent malheureusement pas les collectivités territoriales de se retirer et de réduire leurs financements.
De nombreux établissements d’enseignement supérieur dans le champ du spectacle vivant ont un statut associatif et souhaitent le conserver, par exemple dans le Nord, car cela offre davantage de réactivité et de souplesse.
La seule exigence de la loi, du point de vue du statut de ces établissements d’enseignement supérieur, est qu’ils ne soient pas inclus dans une collectivité territoriale, c’est-à-dire qu’ils ne fonctionnent pas en régie directe. Ils doivent être bien indépendants. Le statut associatif respecte cette exigence.
Nous demandons donc simplement de laisser la liberté de choix aux personnes et structures concernées, en excluant l’option de la régie directe.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Il faudrait laisser la liberté de choix tout en interdisant le statut de régie ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Une telle disposition me paraît un peu intrusive. Il faut laisser aux collectivités locales la liberté de décider, en attendant qu’une évolution vers des statuts sans doute préférables, comme celui de l’EPCC, s’effectue progressivement.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Les auteurs de cet amendement souhaitent interdire aux établissements en régie directe d’assurer des missions d’enseignement en création artistique.
Aujourd’hui, comme ces établissements sont dépourvus d’autonomie juridique et pédagogique, ils ne peuvent pas réellement assumer de mission d’enseignement. En effet, pour pouvoir délivrer des diplômes inscrits dans le système LMD, ils doivent déjà jouir de l’autonomie. Votre attente me semble donc déjà satisfaite.
En revanche, la forme associative, qui assure l’autonomie à l’établissement, est souple et adaptée, voire plus adaptée que celle d’établissement public dans certains cas. Je pense par exemple à l’école du CLN de Saint-Étienne ou au Théâtre national de Bretagne.
Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Madame Robert, l’amendement n° 118 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Sylvie Robert. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 118 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 310 rectifié bis, présenté par MM. Luche, Lasserre, Bonnecarrère et Guerriau, Mme Gatel et MM. Capo-Canellas et Gabouty, n’est pas soutenu.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Monsieur le président, j’en reprends le texte, au nom de la commission.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 526, présenté par M. Leleux et Mme Férat, au nom de la commission, et ainsi libellé :
I. - Alinéa 4, seconde phrase
Supprimer les mots :
ainsi que la validation des acquis de l’expérience
II. - Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
“…° Assurer la validation des acquis de l’expérience dans les métiers du spectacle et de la création plastique et industrielle ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement vise à insérer la validation des acquis de l’expérience non pas au sein de la mission générale des établissements, mais parmi les missions facultatives. En effet, tous les établissements n’ont pas vocation à le faire, mais il faut au moins leur en laisser la possibilité.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. La validation des acquis de l’expérience est une mission obligatoire des établissements d’enseignement supérieur, conformément à la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale. Il n’est donc pas possible de la rendre optionnelle.
Mais je comprends la volonté de s’adapter à la situation de certains établissements de petite taille avec de faibles effectifs qui ne disposent pas toujours des possibilités matérielles d’organiser une telle filière dans leurs enseignements. Le ministère préconise alors d’examiner la possibilité de mutualisations avec d’autres établissements sur le territoire, afin de mettre en œuvre cette offre.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l’amendement n° 526 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Non, je le retire, monsieur le président.
Toutefois, il faudrait peut-être rappeler aux établissements concernés qu’une telle possibilité existe ; ce n’est pas toujours connu. Nous proposions simplement de l’indiquer plus explicitement.
M. David Assouline. Ne rendons pas la loi bavarde ! (Sourires.)
Mme Françoise Férat, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Vous en savez quelque chose, mon cher collègue ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. L’amendement n° 526 est retiré.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 323, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 13 à 18
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 759-2. – Les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques sont accrédités par arrêté du ministre chargé de la culture, après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels, pour la durée du contrat pluriannuel signé avec l’État. L’arrêté emporte habilitation de l’établissement à délivrer des diplômes d’école et les diplômes nationaux dont la liste est annexée à l’arrêté. Pour les établissements publics nationaux, les modalités d’accréditation sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la culture, après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels.
« L’organisation des études et des diplômes ainsi que les modalités de l’évaluation des formations dans les disciplines du spectacle vivant et des arts plastiques sont fixées par voie réglementaire. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement tend à améliorer la lisibilité du dispositif s’agissant de l’accréditation des établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques.
Il vise ainsi à clarifier la rédaction de l’article L. 759-2 du code de l’éducation, relatif aux accréditations des établissements de la création artistique relevant du ministère de la culture et de la communication, afin de répondre au principe de clarté de la loi et de respecter l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi.
L’article L. 123-1 du code de l’éducation fixe le principe de l’accréditation « des établissements d’enseignement supérieur relevant d’un autre département ministériel » que celui qui est chargé de l’enseignement supérieur. Mais il n’en prévoit pas le mécanisme. Il convient donc de le préciser dans le cas des établissements de la création artistique relevant du ministère de la culture et de la communication.
Il apparaît toutefois inadapté de se référer au mécanisme qui a été prévu à l’article L. 613-1 du code de l’éducation pour les établissements sous tutelle du ministère chargé de l’enseignement supérieur. En effet, les nombreuses adaptations nécessaires prévues par la rédaction initiale du projet de loi rendent difficilement compréhensible le mécanisme finalement applicable.
La rédaction proposée permet donc d’éviter d’éventuelles erreurs d’interprétation de l’application de l’article L. 613-1 du code de l’éducation aux établissements susmentionnés.
Cet amendement permet en outre d’introduire l’avis du CNESERAC dans la procédure d’accréditation des établissements et dans la procédure d’élaboration de l’arrêté interministériel fixant les modalités d’accréditation.
M. le président. L’amendement n° 120 rectifié ter, présenté par Mme D. Gillot et M. Antiste est ainsi libellé :
Alinéa 14
Après la référence :
L. 613-1
insérer les mots :
et inscrits au répertoire national des certifications professionnelles,
L’amendement n° 121 rectifié ter, présenté par Mme D. Gillot et M. Antiste est ainsi libellé :
Alinéa 15
Supprimer les mots :
et, en ce qui concerne les établissements ayant le caractère d’établissement public national,
L’amendement n° 122 rectifié ter, présenté par Mme D. Gillot et M. Antiste est ainsi libellé :
Alinéa 18
Après les mots :
sont fixées
insérer les mots :
conjointement par les ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la culture
La parole est à Mme Dominique Gillot, pour présenter ces trois amendements.
Mme Dominique Gillot. Les formations supérieures en France constituent un système complexe, avec une multitude de types d’établissements différents, et encore plus de diplômes.
Depuis les années deux mille, plusieurs réformes visent à simplifier ce paysage, afin de le rendre plus lisible et plus visible pour les jeunes souhaitant s’y orienter, leurs familles, et le milieu socioprofessionnel. Le passage au LMD définit les niveaux de diplôme du supérieur. Le cadre national des formations définit l’architecture et les domaines de formation et vise à rationaliser les intitulés de diplôme, afin de garantir une égalité sur le marché de l’emploi pour les étudiants ayant obtenu un diplôme similaire dans deux établissements différents.
Les post-diplômes délivrés par les écoles vont à l’encontre de ces deux principes ; ils sont présentés comme intermédiaires entre les niveaux master et doctorat, et leur accessibilité au sein d’un seul établissement donne lieu à des inégalités territoriales.
L’amendement n° 121 rectifié ter vise donc à réserver l’accréditation aux diplômes ayant reçu une reconnaissance du milieu socioprofessionnel, par leur inscription au répertoire national des certifications professionnelles, le RNCP.
Les amendements nos 121 rectifié ter et 122 rectifié ter ont pour objet de retrouver la cohérence de la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, qui a défini plusieurs principes, dont la nécessité de renforcer les interactions entre l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur quels que soient le statut et le domaine de formation. Cela s’est traduit par la construction des stratégies nationale de l’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation, qui viennent d’être validées par les partenaires sociaux du secteur.
Le rôle de stratège de l’État, avec des établissements plus autonomes d’un point de vue opérationnel, se traduit également par la cotutelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche sur l’ensemble des formations supérieures, afin que chaque ministère puisse apporter en bonne intelligence sa propre expertise dans la conduite de ces politiques.
Ces amendements s’inscrivent dans la logique suivante : la définition d’une stratégie nationale d’accréditation des formations, dont l’approche pédagogique ne saurait différer entre un établissement national et un établissement territorial ; un ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche qui participe à l’accréditation de toutes les formations supérieures, pour garantir l’application des stratégies nationales ; un ministère de la culture et de la communication qui traduit les spécificités des établissements dont il assume la cotutelle pédagogique, au sein du cadre général.
Les cotutelles avec les autres ministères thématiques, tels que l’industrie ou l’agriculture, qui a déjà été évoquée pour justifier la création d’un CNESERAC, fonctionnent ainsi.
Je le rappelle, le CNESER dédié à l’agriculture a été créé en 2000, donc avant la loi de 2013, qui vise à harmoniser, coordonner et décloisonner les enseignements supérieurs à l’échelle nationale.
M. le président. L’amendement n° 442 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mme Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les établissements d’enseignement supérieur d’arts plastiques et du spectacle vivant mentionnés à l’article L. 759-1 relèvent du contrôle pédagogique de l’État.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. L’amendement n° 122 rectifié ter, défendu par Mme Dominique Gillot, vise à confier le contrôle des établissements d’enseignement supérieur d’arts plastiques et de théâtre conjointement aux ministères chargés de l’enseignement supérieur et de la culture.
Par cet amendement, dans le même esprit, nous proposons simplement de rappeler le contrôle pédagogique de l’État, au sens large, sur ces établissements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. L’amendement n° 323 introduit une nouvelle référence au CNESERAC. La commission n’a pas pu y travailler. J’émets un avis de sagesse, voire un avis favorable, afin de permettre la poursuite du débat.
Mme Gillot, dont je reconnais et respecte l’expertise sur le sujet, nous propose, par l’amendement n° 120 rectifié ter, d’inscrire les diplômes au RNCP. Cela nous paraît trop restrictif. Les écoles d’art dispensent actuellement des diplômes qui ne figurent pas au RNCP et qui méritent néanmoins d’être reconnus et inscrits sur l’arrêté du ministre chargé de la culture. L’avis de la commission est donc défavorable.
À l’amendement n° 121 rectifié ter, il est proposé que les modalités d’accréditation des établissements d’enseignement dans le domaine de la culture, qu’il s’agisse ou non d’établissements publics nationaux, soient fixées conjointement par le ministre chargé de l’enseignement supérieur et le ministre chargé de la culture.
Cette extension du rôle du ministère de l’enseignement supérieur suscite des interrogations. Mme la ministre de la culture nous donnera sans doute son avis. Certains établissements, notamment les établissements publics de coopération culturelle créés par les collectivités locales, ne sont pas à proprement parler placés sous la tutelle du ministère de la culture, à laquelle celui-ci est seulement associé. Il paraît ainsi difficile d’étendre la définition des modalités d’accréditation au-delà du ministère de la culture. L’avis est donc défavorable.
De même, comme le ministère de la culture n’exerce pas de tutelle directe sur les établissements publics de coopération culturelle – il est simplement associé à leur tutelle –, il semble difficile d’étendre le rôle du ministère de l’enseignement supérieur au-delà de ce qui est prévu aujourd’hui. L’avis est donc également défavorable sur l’amendement n° 122 rectifié ter.
L’amendement n° 442 rectifié vise à préciser que le contrôle pédagogique des établissements est assuré par l’État. C’est évidemment le cas. Il nous semble donc inutile de l’indiquer dans la loi. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je souligne d’abord que les dispositions relatives à l’enseignement supérieur en matière artistique et culturelle ont fait l’objet d’un travail conjoint avec le ministère de l’enseignement supérieur. Le texte est d’ailleurs passé pour avis devant le CNESER, où il a obtenu un large soutien. Le travail a donc été effectué en concertation avec l’autre ministère concerné.
Je suis tout à fait favorable à l’amendement n° 323. Son adoption rendrait le droit plus clair et plus accessible. C’est un bon objectif !
En revanche, je suis défavorable aux amendements nos 120 rectifié ter, 121 rectifié ter et 122 rectifié ter, pour les raisons qu’a évoquées M. le rapporteur.
Enfin, il est vrai que le contrôle pédagogique relève de l’État. Mais comme il y a plusieurs manières de le rappeler, j’émets un avis de sagesse sur l’amendement n° 442 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote.
Mme Dominique Gillot. Je ne voudrais pas apparaître comme sectaire !
Je ne préconise pas d’aller au-delà de ce qui existe. Je souhaite simplement que l’on ne détricote pas ce qui a été instauré au mois de juillet 2013. L’Assemblée nationale avait alors introduit la tutelle unique de l’enseignement supérieur et de la recherche sur toutes les formations et tous les diplômes d’enseignement supérieur. Notre Haute Assemblée s’est ralliée à une cotutelle, c’est-à-dire à un dialogue, une coconstruction entre le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et les ministères thématiques.
Madame la ministre, je ne doute pas que le travail a été intense entre le ministère de l’enseignement supérieur et le ministère de la culture. Mais je n’en ai pas eu les mêmes retours que vous. Nous en rediscuterons par la suite.
L’amendement n° 120 rectifié ter, qui vise à inscrire les diplômes des écoles supérieures d’art et de la culture au RNCP, a le soutien du ministère de l’enseignement supérieur.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 120 rectifié ter, 121 rectifié ter, 122 rectifié ter et 442 rectifié n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 256, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Une coopération active et une relation partenariale entre les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique et les filières universitaires des arts est encouragée par l’État par le biais de son représentant.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement est dans la même veine que les précédents. Il vise à réaffirmer le lien entre les établissements spécialisés de l’enseignement supérieur et les filières universitaires des arts et de la culture. Je ne doute pas qu’il risque d’obtenir la même réponse… (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement vise à indiquer que l’État encourage la coopération entre les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique et les universités. À nos yeux, cela va de soi. En outre, les établissements sont autonomes.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Ainsi que Mme Gonthier-Maurin le pressentait, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.
M. le président. Madame Gonthier-Maurin, l'amendement n° 256 est-il maintenu ?
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 256 est retiré.
L'amendement n° 322, présenté par MM. Eblé et Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 26 et 27
Rédiger ainsi ces alinéas :
« Art. L. 75-10-1. – Les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du cinéma et de la communication audiovisuelle sont accrédités par arrêté du ministre chargé de la culture, après avis du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels, pour la durée du contrat pluriannuel signé avec l’État. L’arrêté emporte habilitation de l’établissement à délivrer des diplômes d’école et les diplômes nationaux dont la liste est annexée à l’arrêté. Pour les établissements publics nationaux, les modalités d’accréditation sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la culture, après avis du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels.
« L’organisation des études et des diplômes ainsi que les modalités de l’évaluation des formations dans les disciplines du cinéma et de la communication audiovisuelle sont fixées par voie réglementaire. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Dans un souci d’unité et de cohérence des nouvelles procédures d’accréditation dans l’enseignement supérieur de la création artistique, et à l’instar de la procédure d’accréditation des établissements d’enseignement dans le domaine du spectacle vivant et des arts plastiques, cet amendement a pour objet d’introduire l’avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels dans la procédure d’accréditation des établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du cinéma et de la communication audiovisuelle.
En outre, dès lors que les établissements dans les domaines du cinéma et de la communication audiovisuelle et dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques sont soumis aux mêmes procédures d’accréditation, il convient d’harmoniser les textes sur le sujet.
Par cet amendement, nous proposons ainsi de reprendre la rédaction de l’article L. 759-2 du code de l’éducation, relatif à la procédure d’accréditation pour les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Le CNESERAC repasse par ici, comme le furet ! (Sourires.)
La commission n’a pas pu examiner cet amendement. Mais, comme nous souhaitons poursuivre le débat au cours de la navette, j’émets un avis de sagesse, plutôt favorable, sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je suis tout à fait sensible au souci d’harmonisation dans la rédaction des nouvelles procédures d’accréditation de l’enseignement supérieur pour la création artistique.
Cet amendement vise à introduire les avis obligatoires du CNESERAC dans la procédure d’accréditation des établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du cinéma et de la communication audiovisuelle.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote sur l'article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. J’ai déjà donné à plusieurs reprises mon sentiment sur l’article 17.
Toutefois, je souhaiterais vous faire part d’une interrogation, voire d’une crainte. Les mots : « chargés d’enseignement » réapparaissent aux articles 17 et 17 bis. Nous le savons, cette dénomination, qui avait cours jusqu’en 2013, avait été remplacée par « appartenant à la fonction publique », à la suite d’un accord conclu entre les ministères, les organisations syndicales et les écoles d’architecture, permettant ainsi de s’acheminer vers une « CDIsation ». J’aimerais donc avoir des explications quant à cette réapparition.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante, est reprise à midi.)
M. le président. La séance est reprise.
Article 17 bis
Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° (nouveau) Le premier alinéa de l’article L. 752-1 est ainsi modifié :
a) La référence : « L. 613-2 » est remplacée par la référence : « L. 613-1 » ;
b) Les références : « L. 952-1, L. 952-3 » sont remplacées par les références : « L. 952-1 à L. 952-3 » ;
2° Le chapitre II du titre V du livre VII de la troisième partie est complété par un article L. 752-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 752-2. – Les écoles nationales supérieures d’architecture concourent à la réalisation des objectifs et des missions du service public de l’enseignement supérieur pour ce qui concerne l’architecture et participent aux stratégies nationales de l’enseignement supérieur et de recherche ainsi qu’aux regroupements d’établissements d’enseignement supérieur mentionnés au 2° de l’article L. 718-3. Elles ont pour mission d’assurer la formation initiale et continue tout au long de la vie des professionnels de l’architecture et du paysage.
« Dans l’exercice de leur mission, les écoles mentionnées au premier alinéa :
« 1° Conduisent des activités de recherche en architecture, en assurent la valorisation et participent aux écoles doctorales mentionnées à l’article L. 612-7 ;
« 2° Forment à la transmission en matière d’éducation architecturale et culturelle ;
« 3° Participent à la veille artistique, scientifique et technique et à l’innovation dans ses différentes dimensions, notamment pédagogique ;
« 4° et 5° (Supprimés)
« 6° Contribuent à la vie culturelle, économique, sociale et environnementale du territoire en développant des partenariats, notamment avec les institutions culturelles, les collectivités territoriales, les entreprises et les autres établissements d’enseignement supérieur ;
« 7° Concourent au développement de la coopération architecturale, culturelle, scientifique, technique et pédagogique internationale ;
« 8° (Supprimé)
3° (nouveau) L’article L. 962-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 962-1. – I. – Le personnel enseignant des établissements mentionnés à l’article L. 752-2 comprend des enseignants-chercheurs. Il comprend également des enseignants associés ou invités et des chargés d’enseignement, qui assurent leur service dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 952-1.
« II. – Par dérogation au statut général des fonctionnaires de l’État, des personnalités ne possédant pas la qualité de fonctionnaire peuvent être recrutées et titularisées à tout niveau de la hiérarchie des corps d’enseignants des écoles d’architecture selon les modalités fixées par décret en Conseil d’État. Ce décret précise notamment les conditions dans lesquelles les qualifications des intéressés sont appréciées par l’instance nationale.
« Des personnalités n’ayant pas la nationalité française peuvent, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, être nommées dans un corps d’enseignants des écoles d’architecture. »
M. le président. L'amendement n° 126 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6, seconde phrase
Après le mot :
architecture
insérer les mots :
, du cadre de vie
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement, qui a fait l’objet d’une longue discussion en commission, tend à préciser que les écoles nationales supérieures d’architecture, les ENSA, assurent la formation des professionnels du cadre de vie sur l’ensemble des problématiques liées à l’aménagement et à l’urbanisme. Nous voulons que la qualification des professionnels et la compétence des écoles qui les forment soient reconnues en la matière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cette proposition a effectivement fait débat en commission. De fait, nous jugions l’expression « cadre urbain » préférable à celle de « cadre de vie », qui nous est suggérée. À ce stade, je m’en remets à la sagesse de notre Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Pour ma part, je trouve la notion de « cadre de vie » très pertinente, car celle de « cadre urbain » laisse de côté la ruralité, où les architectes interviennent également.
Madame Robert, vous avez raison : l’architecture est pluridisciplinaire, et son champ englobe le cadre de vie. J’émets donc un avis favorable sur votre amendement.
M. le président. L'amendement n° 125 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, D. Gillot, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer les mots :
aux écoles doctorales mentionnées
par les mots :
à la politique nationale de recherche mentionnée
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement vise à assurer la cohérence de la participation des établissements d’enseignement supérieur relevant d’une cotutelle assumée en partie par le ministère de la culture et de la communication à la politique nationale de recherche. La rédaction que nous proposons prévient tout risque d’exclusion des écoles nationales supérieures d’architecture de la politique nationale de recherche, en ne limitant pas leur contribution aux seules écoles doctorales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La modification proposée serait peu opérante. L’alinéa 6 de l’article 17 bis prévoit déjà la participation des écoles nationales supérieures d’architecture à la stratégie nationale de recherche. En outre, il me paraît important de maintenir une référence aux écoles doctorales. Dans ces conditions, j’émets un avis de sagesse, plutôt défavorable… (Sourires.) Tout est dans la nuance !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 127 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Rétablir le 4° dans la rédaction suivante :
« 4° Délivrent des enseignements permettant de s’adapter aux exigences professionnelles internationales ;
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement nous semble important. Les écoles nationales supérieures d’architecture sont depuis de nombreuses années très engagées dans les programmes Erasmus. Dans ce cadre, elles envoient un grand nombre d’architectes dans les autres États de l’Union européenne et, réciproquement, font appel à des enseignants d’origine étrangère, qui enrichissent les formations grâce à une ouverture sur la diversité des pratiques.
Nous proposons donc d’affirmer la vocation de formation à l'échelon international des écoles nationales supérieures d’architecture. Ces établissements doivent être pleinement intégrés dans les réseaux internationaux de l’enseignement supérieur, afin que nos futurs architectes puissent se présenter avec les meilleures chances de réussite aux concours d’architecture européens et internationaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Ma sagesse légendaire me conduit à émettre un avis favorable sur cet amendement ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. L’avis du Gouvernement est également favorable. La présence de notre architecture au plan international est un enjeu de première importance. Quand notre architecture s’exporte, elle entraîne dans son sillage des entreprises, des savoir-faire et des artistes français.
M. le président. Je mets aux voix l'article 17 bis, modifié.
(L'article 17 bis est adopté.)
Article additionnel après l’article 17 bis
M. le président. L'amendement n° 128 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, D. Gillot, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 17 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 232-1 du code de l’éducation, les mots : « des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel » sont remplacés par les mots : « des établissements publics délivrant des diplômes nationaux de l’enseignement supérieur ».
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Avis de sagesse.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels sera l’instance appropriée pour satisfaire l’objectif des auteurs de cet amendement. Avis défavorable.
M. David Assouline. Je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 128 rectifié est retiré.
Titre II
DISPOSITIONS RELATIVES AU PATRIMOINE CULTUREL ET À LA PROMOTION DE L’ARCHITECTURE
Chapitre Ier
Renforcer la protection et améliorer la diffusion du patrimoine culturel
Article 18 A
L’article L. 1 du code du patrimoine est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il s’entend également du patrimoine immatériel constitué notamment par les pratiques, les représentations, les expressions, les connaissances et les savoir-faire ainsi que les instruments, les objets, les artefacts et les espaces culturels qui contribuent à une expression culturelle. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 18 A
M. le président. L'amendement n° 343 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel et Antiste, Mmes Bataille, Bonnefoy, Campion, Claireaux et Conway-Mouret, MM. Courteau et Duran, Mmes Féret, Guillemot et Jourda, MM. Lalande, Mazuir, Miquel, Patriat et Sutour, Mme Tocqueville, M. Vaugrenard et Mme Yonnet, est ainsi libellé :
Après l’article 18 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 621-29-2 du code du patrimoine est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Une commune, propriétaire ou à affectataire domanial d’un immeuble classé ou inscrit, qui ne dispose pas des moyens nécessaires à l’exercice de la maîtrise d’ouvrage de l’opération, du fait de l’insuffisance de ses ressources ou de la complexité du projet de travaux, peut demander une assistance à l’établissement public de coopération intercommunale duquel elle relève. »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. En tant qu’élus locaux, acteurs de terrain, nous sommes nombreux à connaître les difficultés que rencontrent les petites communes pour entretenir leur patrimoine historique, qui peut pourtant être un facteur de développement du tourisme local.
Les budgets communaux ne sont souvent pas de taille à supporter les coûts des travaux d’entretien. Dans mon département, certaines communes doivent se contenter de condamner les accès à des monuments pour garantir la sécurité de nos concitoyens. Du coup, une partie de notre patrimoine historique dépérit et est vouée à l’abandon, faute de moyens.
Cet amendement vise à prendre en compte les difficultés auxquelles se heurtent nombre de petites communes pour entretenir leur patrimoine. C’est un enjeu vital pour nos monuments historiques et la préservation de notre patrimoine !
Plus précisément, nous proposons de permettre à l’échelon intercommunal, le plus pertinent en la matière, de financer des travaux d’entretien et de rénovation. Il ne s’agit pas d’instaurer un dispositif coercitif ; nous voulons simplement ouvrir une possibilité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Madame la ministre, je vous souhaite à mon tour la bienvenue au Sénat, en me réjouissant que vous soyez, comme nous, très attachée au présent projet de loi.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Monsieur Cabanel, vous proposez qu’une commune puisse solliciter son intercommunalité pour mutualiser – c’est le mot à la mode – l’entretien des monuments historiques situés sur son territoire. Si votre intention est parfaitement compréhensible, des considérations de droit me conduisent à émettre un avis défavorable sur votre amendement. Si la commune a confié à l’intercommunalité sa compétence dans le domaine du patrimoine, la mutualisation va de soi ; dans le cas contraire, elle n’est pas possible.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je comprends les préoccupations dont procède l’idée d’autoriser les communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale à demander une assistance à celui-ci. Je ne méconnais pas les difficultés techniques qui se posent déjà aujourd’hui.
Je souhaite seulement pouvoir me concerter avec le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, car la disposition proposée concerne les relations entre les intercommunalités et leurs communes membres, qui relèvent du code général des collectivités territoriales.
Dans ces conditions, je sollicite le retrait de l’amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Mme la rapporteur comme Mme la ministre ont reconnu que le problème soulevé par M. Cabanel était bien réel. Il faut donc le prendre en compte. Si nous voulons que la réflexion se poursuive au cours de la navette, nous devons adopter cet amendement, sachant que la rédaction de la disposition pourra être modifiée ultérieurement.
Dans ce débat, nous devons montrer notre souci d’écouter l’expertise particulière des élus locaux, qui sont très attachés à la défense du patrimoine, comme vous, madame la ministre.
Quand les élus sont motivés pour prendre des initiatives, ce qui n’est pas toujours le cas, et proposent, à la lumière de leur expérience concrète du terrain, une solution face à une difficulté qui se pose, encourageons-les !
Je prends au mot la commission et le Gouvernement, qui ont reconnu la réalité du problème : adoptons cet amendement pour permettre au débat de se poursuivre, quitte à rechercher ensuite une meilleure rédaction juridique dans le cadre du travail interministériel, qui reste nécessaire.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Il n’y a aucun lien entre notre opposition à cet amendement et engagement en faveur de la protection du patrimoine. Je rappelle simplement qu’il y a une impossibilité légale. En vertu du code général des collectivités territoriales, une intercommunalité n’est pas tenue de prendre en charge l’entretien des monuments historiques situés sur son territoire si elle n’en a pas reçu la compétence. Le plus simple serait que les communes concernées décident d’agir ensemble et, le cas échéant, d’exercer cette compétence de manière intégrée.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Je ne comprends pas l’objection de Mme la rapporteur.
Il est fréquent que des communes prennent en charge la restauration de monuments, par exemple d’églises, sans contrevenir à la loi.
Notre amendement vise à résoudre le problème qui se pose lorsque les coûts des travaux excèdent les capacités de financement des communes. Je ne vois pas le rapport avec la question de la compétence sur les monuments historiques.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Pardonnez-moi d’insister : en vertu du code général des collectivités territoriales, si l’établissement public de coopération intercommunale est d’accord pour concourir à une opération d’entretien ou de restauration, il prend la compétence, ce qui règle le problème.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 343 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 18 B
Le livre Ier du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa de l’article L. 111-7 est supprimé ;
2° Le chapitre Ier du titre Ier est complété par des articles L. 111-8 à L. 111-11 ainsi rédigés :
« Art. L. 111-8. – L’importation de biens culturels appartenant à l’une des catégories prévues à l’article 1er de la convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, faite à Paris le 14 novembre 1970, en provenance directe d’un État non membre de l’Union européenne et partie à cette convention est subordonnée à la production d’un certificat ou de tout autre document équivalent autorisant l’exportation du bien établi par l’État d’exportation lorsque la législation de cet État le prévoit. À défaut de présentation dudit document, l’importation est interdite.
« Art. L. 111-9. – Sous réserve de l’article L. 111-10, il est interdit d’importer, d’exporter, de faire transiter, de vendre, d’acquérir et d’échanger des biens culturels présentant un intérêt archéologique, artistique, historique ou scientifique lorsqu’ils ont quitté illicitement le territoire d’un État dans les conditions fixées par une résolution du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies adoptée en ce sens.
« Art. L. 111-10. – Dans le cas où les biens culturels se trouvent dans une situation d’urgence et de grave danger en raison d’un conflit armé ou d’une catastrophe sur le territoire de l’État qui les possède ou les détient, l’État peut, à la demande de l’État propriétaire ou détenteur ou lorsqu’une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies a été prise en ce sens, mettre provisoirement à disposition des locaux sécurisés pour les recevoir en dépôt et en informe l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture.
« L’État rend les biens culturels à l’État propriétaire ou détenteur après cessation de la situation ayant occasionné leur mise à l’abri ou à tout moment à la demande de ce dernier.
« Les biens culturels accueillis dans les conditions prévues au présent article sont insaisissables pendant la durée de leur séjour sur le territoire national.
« Pendant leur mise en dépôt sur le territoire national, des prêts peuvent être consentis, après accord de l’État qui les a confiés, pour faire circuler ces biens culturels dans le cadre de l’organisation d’expositions nationales ou internationales, destinées à faire connaître ce patrimoine en danger. En cas de sortie du territoire national, l’État qui accueille l’exposition garantit l’insaisissabilité des biens concernés pendant la durée de l’exposition.
« Art. L. 111-11. – Les modalités d’application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;
3° L’article L. 114-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa de cet article est ainsi rédigé :
« I. – Est puni de cinq années d’emprisonnement et d’une amende de 450 000 euros le fait, pour toute personne d’exporter ou de tenter d’exporter : » ;
b) Sont ajoutés des II et III ainsi rédigés :
« II. – Est puni des mêmes peines le fait, pour toute personne, d’importer un bien culturel en infraction à l’article L. 111-8.
« III. – Est puni des mêmes peines le fait, pour toute personne, d’importer, d’exporter, de faire transiter, de vendre, d’acquérir ou d’échanger un bien culturel en infraction à l’article L. 111-9.
« Les auteurs des infractions aux interdictions définies au même article L. 111-9 encourent, en outre, la confiscation des biens en cause. » ;
4° Le titre II est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« CHAPITRE IV
« Annulation de l’acquisition d’un bien culturel en raison de son origine illicite
« Art. L. 124-1. – La personne publique propriétaire d’un bien culturel appartenant au domaine public mobilier, au sens de l’article L. 2112-1 du code général de la propriété des personnes publiques, peut agir en nullité de la vente, de la donation entre vifs ou du legs de ce bien lorsqu’il lui est apporté la preuve qu’il a été volé ou illicitement exporté après l’entrée en vigueur, à l’égard de l’État d’origine et de la France, de la convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, faite à Paris le 14 novembre 1970.
« La personne publique propriétaire demande, en outre, au juge d’ordonner la restitution du bien à l’État d’origine ou au propriétaire légitime s’il en a fait la demande.
« La personne publique propriétaire a droit au remboursement du prix d’acquisition par le vendeur.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. »
M. le président. L'amendement n° 129 rectifié, présenté par MM. Montaugé et Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 111-9-… – Les biens culturels extra européens saisis en douane ou reconnus comme sortis illégalement de pays hors de l’Union européenne, peuvent, sous réserve de l’accord des pays d’origine ou de leur non-réclamation, être exposés temporairement, déposés ou dévolus prioritairement dans un musée de France en région reconnu pour sa spécialité en vue de leur conservation et de leur présentation.
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Cet amendement vise à mettre en valeur et, le cas échéant, à conserver les biens culturels extra européens saisis en douane ou reconnus comme sortis illégalement de pays hors de l’Union européenne dont les États d’origine ne réclament pas le retour à l’issue des procédures administratives et de la procédure judiciaire prévues dans le code du patrimoine. Une telle mesure permettrait la valorisation des biens culturels non réclamés en même temps que l’enrichissement des collections des musées de France en région ayant élaboré des projets culturels et scientifiques adéquats.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cet amendement vise à valoriser dans un musée français des biens culturels en provenance d’États étrangers, avec l’accord de l’État d’origine ou en l’absence de réclamation.
La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement correspond à la proposition n° 16 du rapport rédigé à la demande du Président de la République par Jean-Luc Martinez, président-directeur du Louvre, sur la protection du patrimoine en situation de conflit armé. Cela rejoint aussi les réflexions des sénatrices Sylvie Robert et Bariza Khiari, qui s’intéressent de longue date à la question.
Sur le plan politique, le Gouvernement souscrit pleinement à l’intention des auteurs de l’amendement. Sur le plan juridique, nous considérons qu’il est déjà possible de mettre en œuvre les mesures proposées s’agissant des biens saisis parce qu’exportés illicitement d’un pays extérieur à l’Union européenne, en priorité dans des musées de France territoriaux. Néanmoins, l’objectif étant largement partagé dans cet hémicycle, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Nous avons un doute quant à la rédaction de l’amendement. Pour nous, le fait de conserver ces biens culturels dans les collections des musées français ne pose aucun problème en cas d’accord des pays d’origine. En revanche, il en va différemment dans le cas de la non-réclamation des œuvres. En effet, nous nous trouvons dans une situation internationale très instable – c’est le moins que l’on puisse dire ! –, puisqu’il existe des États faillis.
Par ailleurs, même si les auteurs de l’amendement ont indiqué que les biens ne pouvaient être considérés comme non réclamés qu’« à l’issue des procédures administratives prévues aux articles L. 112-3 et L. 112-4 et de la procédure judiciaire prévue à l’article L. 112-6 du code du patrimoine », cela n’est pas précisé dans le dispositif même qui nous est proposé.
Par conséquent, on peut avoir un doute sur le fait d’affirmer sans autre précision que ces dispositions valent en cas de non-réclamation des œuvres par les États d’origine. On sait d’évidence que certains États regorgent d’œuvres d’art faisant l’objet de trafics et qu’ils ne sont aujourd’hui pas en mesure, d’un point de vue administratif, de réclamer quoi que ce soit. D’une certaine manière, ces États n’ont pas réellement d’existence en ce moment.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. La préoccupation qui vient d’être exprimée est juste. Je propose de revoir la rédaction de cet amendement de manière plus approfondie au cours de la navette. Il arrive en effet que certains États disparaissent temporairement avant, parfois, de réapparaître.
Si l’amendement vise à valoriser les biens culturels saisis, il ne doit pas pour autant aboutir à leur captation au détriment des États d’origine, qui, on le souhaite, sont susceptibles de renaître et de retrouver à terme leur patrimoine.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 342, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 12 et 13
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
a) Au début du premier alinéa, est insérée la référence : « I.- » ;
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Le présent amendement a pour objet de rétablir le quantum de peine de prison prévu par l’article L. 114-1 du code du patrimoine pour les faits d’exportation illicite de biens culturels.
Cette sanction est également applicable aux infractions d’importation illicite, d’une part, et aux infractions d’importation, d’exportation, de transit, de vente, d’acquisition et d’échange de biens culturels ayant quitté illicitement le territoire d’un État protégé par une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, d’autre part.
Je le rappelle, les nouvelles infractions dont il est question ont été adoptées par l’Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement. Elles sont destinées à lutter plus efficacement contre le trafic illicite de biens culturels, notamment, comme c’est souvent le cas, quand ce trafic illicite est susceptible d’être lié à des opérations de financement du terrorisme.
Aujourd’hui, les peines prévues sont de deux ans de prison et de 450 000 euros d’amende. Or la commission de la culture du Sénat a souhaité les alourdir en portant de deux à cinq ans le quantum de la peine de prison encourue.
L’objectif de la commission est louable, puisqu’il s’agit au premier chef de lutter contre les auteurs des trafics illicites de biens culturels, dont l’action peut bénéficier aux réseaux terroristes.
Néanmoins, je crains que l’on ne fragilise juridiquement le dispositif en cherchant à frapper plus fort. Un tel dispositif sera très large, et pourra être qualifié de disproportionné : il s’appliquera à tous les auteurs d’exportation et d’importation illicite de biens culturels, au-delà des seuls complices d’actes de terrorisme.
Par conséquent, le Gouvernement vous propose de revenir à un quantum de deux ans de prison, ce qui est déjà lourd, mais paraît plus équilibré. Le dispositif actuel permet par ailleurs d’infliger une forte sanction pécuniaire à l’encontre des personnes coupables de trafic de biens culturels.
M. le président. L'amendement n° 130 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 13
1° Remplacer le mot :
cinq
par le mot :
dix
2° Remplacer le nombre :
450 000
par le nombre :
7 500 000
La parole est à Mme Sylvie Robert.
M. David Assouline. Elle va encore alourdir les sanctions !
Mme Sylvie Robert. C’est vrai, mon amendement vise à alourdir considérablement les peines prévues ! (Sourires.)
J’ai souhaité le présenter, car M. le rapporteur n’avait pas su me répondre avec précision lorsque je lui avais demandé en commission pourquoi la peine de prison encourue était portée à cinq ans.
Le sujet me tient à cœur. Je considère qu’il s’agit d’un enjeu international très important aujourd’hui. Au passage, j’espère réellement que le rapport du directeur du musée du Louvre, dont j’ai lu avec beaucoup d’attention les préconisations, sera suivi d’effets. Il y a en effet beaucoup de travail à accomplir.
En présentant cet amendement, qui est en quelque sorte un amendement d’appel, je tenais à dire que la peine doit être à la hauteur de l’enjeu. J’avais d’ailleurs trouvé une référence au trafic de stupéfiants. Il faut le savoir, Daech tire des ressources quotidiennes très importantes du trafic de biens culturels. Je souhaitais rappeler ces éléments devant la Haute Assemblée.
Pour autant, mes chers collègues, je retire mon amendement, au profit de celui du Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 130 rectifié est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 342 ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Nous sommes évidemment plus que favorables à l’établissement d’une sanction en cas d’exportation ou de tentative d’exportation d’un bien culturel ou d’un trésor national.
Simplement, nous nous étions rapprochés de la commission des lois du Sénat lors de l’examen du texte en commission pour tenter de déterminer une peine de prison proportionnée au regard de la sanction financière prévue. Il nous a alors semblé qu’une peine de deux ans de prison n’était pas suffisante. Cela étant, cinq ans, c’est peut-être une sanction trop lourde.
Profitons de la navette parlementaire pour que les deux commissions des lois de l’Assemblée nationale et du Sénat, ainsi que les deux commissions de la culture, puissent améliorer le dispositif et faire en sorte qu’il existe une vraie proportionnalité entre la sanction pécuniaire et la peine de prison. La cohérence entre les deux est nécessaire.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. J’approuve la position du Gouvernement, qui souhaite sécuriser juridiquement le dispositif. Il ne faudrait pas contribuer à laisser passer encore plus de personnes entre les mailles du filet en modifiant le texte actuel !
Dès lors que la rédaction actuelle du texte n’offre pas une telle sécurité juridique, je préfère que l’on en rediscute dans le cadre de la navette et que l’on conserve le dispositif gouvernemental, d’autant plus que ce dernier a fait l’objet d’une expertise.
Néanmoins, je veux vous alerter sur le fait qu’il faut montrer une grande fermeté sur le sujet.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Bien sûr !
M. David Assouline. Depuis que les ressources pétrolières sont bombardées, le trafic de biens culturels a pour conséquence immédiate d’alimenter directement et abondamment le terrorisme à l’échelon international, ce que M. le ministre des finances a d’ailleurs réaffirmé à plusieurs reprises.
Madame la ministre, il faudrait évaluer à sa juste mesure l’argument concernant la proportionnalité du dispositif. Certains auteurs de trafics considèrent aujourd’hui qu’ils peuvent payer les amendes, car les trafiquants ont généralement de quoi payer.
Si l’on veut réellement criminaliser les trafics illicites et faire en sorte que cela ne s’apparente pas à de la délinquance en col blanc, il faut que les sanctions soient aussi lourdes pour les trafiquants que pour les auteurs, par exemple, d’un vol de voiture ou de mobylette. Comme ces derniers n’ont souvent pas les moyens de payer les amendes, ils sont envoyés en prison !
Je souhaite donc que l’on évalue la proportionnalité des sanctions en matière de trafic de biens culturels. Il ne faut pas que la sanction financière soit lourde sans que la peine de prison soit en adéquation. Les deux sanctions doivent être proportionnées. Je suis favorable à ce que la réflexion se poursuive lors de la navette.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. En complément des propos de mon collègue David Assouline, je souhaiterais que la navette nous permette de mesurer avec précision les effets qu’induit le niveau de la peine encourue, afin que d’autres biens susceptibles de se situer dans le périmètre de la disposition retenue n’en subissent pas les conséquences.
Je pense donc que nous pouvons adopter l’amendement du Gouvernement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 18 B, modifié.
(L'article 18B est adopté.)
Article 18
(Non modifié)
I. – Le 4° de l’article L. 115-1 du code du patrimoine est ainsi rédigé :
« 4° Donne son avis sur les décisions de cession des biens appartenant aux collections des personnes privées gestionnaires de fonds régionaux d’art contemporain. »
II. – Le titre Ier du livre Ier du même code est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« CHAPITRE VI
« Fonds régionaux d’art contemporain
« Art. L. 116-1. – Le label “fonds régional d’art contemporain”, dit “FRAC”, peut être attribué à la personne morale de droit public ou de droit privé à but non lucratif qui en ferait la demande, dès lors que celle-ci justifie détenir une collection constituée d’œuvres d’art contemporain :
« 1° Acquises, sauf exception, du vivant de l’artiste, avec des concours publics et sur proposition d’une instance composée de personnalités qualifiées dans le domaine de l’art contemporain ou par dons et legs ;
« 2° Représentatives de la création contemporaine française et étrangère dans le domaine des arts graphiques et plastiques ainsi que des arts appliqués ;
« 3° Destinées à la présentation au public dans et hors les murs, notamment en des lieux non dédiés à l’art ;
« 4° Faisant l’objet d’actions de médiation et d’éducation artistique et culturelle en direction des publics ;
« 5° Portées sur un inventaire.
« Art. L. 116-2. – Le label est attribué par décision du ministre chargé de la culture.
« Dans le cas où le demandeur du label est une personne morale de droit privé à but non lucratif, il doit justifier de l’inscription, dans ses statuts, d’une clause prévoyant l’affectation irrévocable des biens acquis par dons et legs ou avec le concours de l’État ou d’une collectivité territoriale à la présentation au public. Ces biens ne peuvent être cédés, à titre gratuit ou onéreux, qu’aux personnes publiques ou aux personnes morales de droit privé à but non lucratif qui se sont engagées, au préalable, à maintenir l’affectation de ces biens à la présentation au public. La cession ne peut intervenir qu’après approbation de l’autorité administrative après avis de la Commission scientifique nationale des collections.
« Les modalités d’attribution et de retrait du label ainsi que les conditions de conservation et de présentation au public des œuvres concernées sont précisées par décret en Conseil d’État. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 18
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos 4 rectifié, 40 rectifié et 448 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 4 rectifié est présenté par Mmes Mélot et Duchêne, MM. Houel et Pellevat, Mmes Cayeux et Garriaud-Maylam, MM. Buffet, Dufaut, Mandelli, Mouiller, Grand, D. Laurent, Trillard et Kennel, Mmes Di Folco et Morhet-Richaud, M. Laufoaulu, Mmes Giudicelli et Imbert, MM. Cornu, Reichardt, B. Fournier et Bouchet, Mme Lopez, MM. Retailleau, G. Bailly et Pointereau, Mme Duranton, MM. Pinton, Masclet et P. Leroy, Mme Deromedi et M. Perrin.
L'amendement n° 40 rectifié est présenté par M. Kern, Mme Joissains, M. Lasserre, Mme Gatel et MM. L. Hervé, Médevielle, Marseille, Guerriau, Luche, Cigolotti et Détraigne.
L'amendement n° 448 rectifié est présenté par Mme Laborde, MM. Barbier, Bertrand, Castelli, Collombat, Fortassin et Guérini, Mme Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 111-2 du code du patrimoine, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les biens qui, eu égard à leur importance particulière pour le patrimoine national au point de vue de l’histoire, de l’art ou de l’archéologie, entrent dans l’une des catégories définies par décret en Conseil d’État, ce certificat précise que ces biens ne peuvent faire l’objet, dans le délai d’un an courant à compter de sa délivrance, d’une vente publique, d’une vente de gré à gré au sens de l’article L. 321-9 du code de commerce ou assimilées que si cette vente est réalisée sur le territoire français. »
La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié.
Mme Colette Mélot. Madame la ministre, prenant la parole pour la première fois au cours de cette séance, je voudrais vous féliciter au nom du groupe Les Républicains et vous adresser des vœux de réussite dans vos nouvelles fonctions.
Cet amendement concerne le droit de préemption de l’État sur les œuvres d’art les plus importantes. Le code du patrimoine reconnait à l’État un droit de préemption sur toute vente publique d’œuvres d’art. Ce mécanisme est primordial pour la protection du patrimoine culturel français, comme l’a rappelé une décision récente du Conseil d’État. C’est l’exercice du droit de préemption qui a concouru au maintien d’œuvres célèbres dans le patrimoine français et à l’enrichissement de nos musées.
Cependant, le dispositif mis en place n’est pas suffisamment efficace, puisque le droit de préemption ne peut pas s’appliquer lorsque la vente d’une œuvre d’art est réalisée à l’étranger. La localisation de la vente à l’étranger rend donc totalement inopérant l’exercice du droit de préemption par l’État.
Pour assurer l’effectivité de ce droit, nous proposons de subordonner la délivrance du certificat d’exportation à la réalisation de toute vente publique en France.
La question de la constitutionnalité d’un tel amendement a été soulevée lors de son examen en commission. On notera tout d’abord que le dispositif n’interdit pas la vente de ces œuvres à des étrangers ou leur sortie du territoire. Pour que l’État puisse exercer son droit de préemption, il faut seulement que la vente des pièces les plus importantes soit localisée en France.
En vertu de la jurisprudence constitutionnelle, ces restrictions, pour être acceptables, doivent répondre à un motif d’intérêt général et être proportionnées.
Or, dans le cas présent, la mesure est justifiée par un motif d’intérêt général : garantir de l’effectivité du droit de préemption de l’État pour assurer le maintien de biens culturels en France. Le Conseil constitutionnel a d’ailleurs considéré à plusieurs reprises, notamment en 2011 et en 2014, que le maintien de biens culturels en France présentait un caractère d’intérêt général.
En outre, le dispositif de l’amendement respecte le critère de proportionnalité, car il est limité aux seuls biens les plus significatifs et les plus importants du point de vue de l’art, de l’architecture ou de l’histoire, et figurant sur une liste fixée par décret.
Enfin, le phénomène de délocalisation des ventes d’œuvres d’art entraîne des conséquences économiques et sociales directes pour les maisons de vente. Le déficit annuel du secteur a atteint environ 250 millions d’euros au cours des dernières années.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l'amendement n° 40 rectifié.
M. Yves Détraigne. Mon amendement est identique à celui qui vient d’être parfaitement défendu. Je n’ai rien à ajouter, sinon que je souhaite la bienvenue à la nouvelle ministre de la culture ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l'amendement n° 448 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Il est défendu, ce qui prouve que l’on peut parler de culture et aimer la culture sans nécessairement se montrer bavard ! (Rires sur certaines travées.)
M. le président. L'amendement n° 131 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 111-2 du code du patrimoine, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas où le propriétaire desdits biens envisage de les céder dans le cadre d’une vente publique dans un délai d’un an à compter de la demande du certificat mentionné au premier alinéa du présent article, celui-ci est délivré sous condition de réalisation de la vente publique ou de la vente de gré à gré au sens de l’article L. 321-9 du code de commerce sur le territoire français. Un décret en Conseil d’État fixe la liste des catégories de biens, qui, eu égard à leur importance particulière pour le patrimoine national au point de vue de l’histoire, de l’art ou de l’archéologie, relèvent du champ d’application du présent alinéa. »
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Madame la ministre, je tenais tout d’abord à vous saluer et à vous féliciter, ainsi qu’à vous souhaiter courage et bonne chance dans le cadre de vos missions.
Je n’ajouterai pas grand-chose à ce qui vient d’être dit, si ce n’est que le phénomène de délocalisation des ventes d’œuvres d’art à l’étranger, notamment à Londres, New York et Hong-Kong, s’est accéléré au cours des dernières années pour représenter environ 250 millions d’euros par an. Cela a des conséquences économiques, fiscales et sociales directes pour le secteur des maisons de vente.
À Paris, le marché de l’art a été désorganisé. Je crois même que la place de Paris ne représente plus qu’environ 6 % du marché mondial de l’art, et a régressé au cinquième rang mondial.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ces quatre amendements visent à subordonner la délivrance du certificat d’exportation à l’engagement du propriétaire de ne pas vendre son œuvre à l’étranger au cours de l’année qui suit. Ces dispositions s’appliqueraient à une catégorie intermédiaire de biens situés entre les trésors nationaux et les biens culturels.
Leurs auteurs justifient leur proposition par la volonté de faciliter l’exercice du droit de préemption de l’État. L’argument est intéressant, mais, sur un plan strictement juridique, la mesure contreviendrait au droit européen.
L’article 36 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne limite clairement aux seuls « trésors nationaux » le champ de la possibilité de faire obstacle au principe de libre circulation des marchandises. La nouvelle catégorie qu’il est proposé de créer ne relevant pas de cette catégorie des trésors nationaux, rien ne saurait justifier la mise en place de nouvelles conditions pour la délivrance du certificat d’exportation.
Par ailleurs, on peut s’interroger sur les raisons pour lesquelles la durée de l’interdiction, pour le propriétaire, de vendre son œuvre à l’étranger se limite à un an. Il est évident que les places étrangères trouveront rapidement une parade.
Je tiens à signaler que, constatant le déclin de la place de Paris face aux maisons de vente aux enchères anglo-saxonnes et asiatiques, la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale a décidé la création d’une mission d’information sur le marché de l’art, présidée par Michel Herbillon et dont Sophie Dessus a été nommée rapporteur.
Cette mission pourrait dégager des solutions au problème soulevé par les amendements que nous examinons. Dans ces conditions, peut-être vaudrait-il mieux lui laisser le temps de travailler sereinement. Peut-être pourrions-nous être associés à ses réflexions…
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Ces quatre amendements ont pour objet, dans un souci de protection du patrimoine national, mais aussi d’appui au marché de l’art français, d’assortir la délivrance de certains certificats d’exportation d’un délai d’un an, à compter de cette délivrance, pendant lequel toute vente hors de France ne serait pas autorisée.
Les deux objectifs que l’on cherche ainsi à atteindre sont louables, mais leur combinaison au sein d’un même instrument pose un certain nombre de problèmes, notamment juridiques, relevés par Mme la rapporteur.
Comme vous, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis préoccupée par le phénomène de délocalisation des ventes d’art vers d’autres places de marché, où sont valorisés des biens culturels issus de notre pays. Mais, quand on examine les chiffres d’affaires en jeu, on constate que ce phénomène concerne surtout l’art contemporain. Or celui-ci n’est pas visé par le dispositif des certificats d’exportation, qui ne sont pas exigés pour les œuvres de moins de cinquante ans. Dès lors, l’adoption de la disposition ne permettrait pas de satisfaire complètement à l’objectif de protection de la place parisienne.
Mme la rapporteur a cité la mission qui a été confiée aux députés Michel Herbillon et Sophie Dessus. Il pourrait effectivement être fort utile que le Sénat soit associé à ses travaux.
Tout comme Mme Férat, je crains que des stratégies de contournement de la législation en matière de certificats d’exportation ne soient susceptibles d’être mises en œuvre, ce qui irait à l’encontre de l’objectif de protection du patrimoine.
Enfin, se pose la question du respect du droit communautaire, avec une possible entrave à la libre circulation des biens et une atteinte aux droits de propriété, qui pourraient apparaître disproportionnées au regard de l’objectif d’intérêt général visé.
En conclusion, même s’il partage les intentions de leurs auteurs, le Gouvernement n’est pas favorable à ces amendements.
M. le président. Madame Mélot, l'amendement n° 4 rectifié est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Je suis évidemment sensible au premier argument avancé par Mme la rapporteur, celui du respect du droit européen, mais les délocalisations hors de l’Union européenne, vers New York ou Hong Kong, notamment, sont nombreuses.
Mettre en place une mission spécifique, à l’instar de l’Assemblée nationale, pourrait être fort intéressant !
Par ailleurs, madame la ministre, j’ai relevé que vous étiez sensible aux arguments que j’ai essayé de développer. À mes yeux, le sujet mérite vraiment d’être approfondi. Il y va de la protection de notre patrimoine ! Je vous remercie donc de m’avoir entendue. Pour l’heure, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 4 rectifié est retiré.
Monsieur Détraigne, l'amendement n° 40 rectifié est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. Non, je vais le retirer également, monsieur le président, en souhaitant que la mission d’information rende rapidement ses conclusions. Il n’est pas rare que l’on nous annonce l’engagement d’une réflexion et que, deux ans ou trois ans plus tard, les choses en soient toujours au même point ! Madame la ministre, nous comptons sur vous pour faire avancer ce dossier !
Mais, pour l’heure, je retire l’amendement.
M. le président. L'amendement n° 40 rectifié est retiré.
Monsieur Requier, l'amendement n° 448 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Requier. Ma collègue première signataire de cet amendement tient à celui-ci. En outre, je crains que la mesure ne finisse aux oubliettes si elle ne peut être débattue à l’Assemblée nationale.
Je maintiens donc l’amendement.
M. David Assouline. Nous maintenons également l’amendement n° 131 rectifié.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 18.
Article 18 bis A
(Non modifié)
L’article L. 441-2 du code du patrimoine est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils établissent un projet scientifique et culturel, qui précise la manière dont sont remplies ces missions. »
M. le président. L'amendement n° 132 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
Ils établissent
insérer les mots :
, en concertation avec les associations culturelles locales,
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Je m’exprime au nom de Gisèle Jourda, qui, à son grand regret, ne pouvait être parmi nous aujourd'hui.
Cet amendement vise à introduire une consultation des associations culturelles locales lors de l’élaboration des projets scientifiques et culturels – les PSC – des musées de France.
Une telle concertation avec le public modifierait les pratiques en matière de patrimoine culturel et renforcerait la démocratie culturelle. Nous souhaitons vivement que soient mises en œuvre de telles pratiques, que la convention de Faro promeut depuis 2005.
Il s’agit également d’une recommandation formulée de longue date par la Fédération française des sociétés d’amis de musées, dont je tiens ici à saluer le travail, ainsi que le dynamisme de ses adhérents.
Nous sommes convaincus que les dispositifs de cette nature facilitent les échanges et favorisent leur diversité, apportant ainsi une contribution sérieuse à la qualité du cadre de vie et à ce « vivre ensemble » dont nous parlons tant en ce moment !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir l’élaboration des projets scientifiques et culturels des musées de France en concertation avec les associations culturelles locales.
L’élaboration d’un bon projet scientifique et culturel suppose évidemment l’organisation de consultations destinées à mieux connaître les attentes des uns et des autres. Pour autant, faut-il en faire une obligation, de surcroît de nature législative ? Il me semble que non.
Adopter une telle disposition introduirait des contraintes et des lourdeurs dans le processus d’élaboration du projet scientifique et culturel, d’autant que la notion d’« associations culturelles locales » est particulièrement vague. On pourrait alors imaginer qu’un projet puisse être contesté au motif que l’ensemble des associations pouvant se prétendre « culturelles » n’auraient pas été interrogées.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Rendre obligatoire, au travers de la loi, la concertation avec les associations culturelles locales en vue de l’élaboration des projets scientifiques et culturels des musées de France me semble, comme à Mme la rapporteur, poser certaines difficultés.
Le projet scientifique et culturel est véritablement au cœur de la démarche du musée ; c’est ce qui conditionne sa labellisation en tant que musée de France.
Il est évident que son élaboration appelle une concertation avec l’ensemble des parties prenantes, dont les associations culturelles locales ou les associations d’amis du musée.
Je comprends donc la préoccupation exprimée, mais, comme cela vient d’être souligné, la notion d’« associations culturelles locales » est fort large. En adoptant une telle disposition, on risque effectivement d’alourdir la procédure et de gêner l’élaboration des projets scientifiques et culturels. L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Les arguments de Mme la rapporteur et de Mme la ministre sont convaincants. Nous ne voulons surtout pas fragiliser le dispositif. C’est pourquoi nous retirons l’amendement n° 132 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 132 rectifié est retiré.
L'amendement n° 133 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le projet inclut un volet éducatif qui précise les activités et partenariats proposés aux établissements d’enseignement scolaire.
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement tend à prévoir que le projet scientifique et culturel devra comporter un volet éducatif détaillant les partenariats avec les établissements scolaires et les activités proposées dans ce cadre.
L’inscription de cette mention dans le PSC est extrêmement importante, car l’école constitue pour beaucoup d’enfants le premier moyen d’accès aux musées et aux pratiques culturelles et artistiques, voire le seul.
Réciproquement, les parcours d’éducation artistique et culturelle seraient construits davantage en concertation entre les établissements scolaires et les musées locaux.
Pour avoir longtemps vécu l’organisation de voyages scolaires et la visite de musées avec des élèves issus de milieux sociaux divers, je peux dire que s’il est très important de permettre à tous les enfants d’accéder aux musées, il faut aussi veiller à la bonne adaptation au public scolaire de la présentation des œuvres et de l’organisation des visites.
C’est pourquoi il est important que le volet éducatif soit élaboré en partenariat avec les établissements scolaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Il s’agit, au travers de cet amendement, d’insérer un volet pédagogique au sein des projets scientifiques et culturels des musées. Ces derniers comportent déjà un important volet consacré à la question des publics, au nombre desquels figure, bien évidemment, le public scolaire. Ils doivent en particulier expliciter les politiques mises en place à destination des différents publics, les services offerts au public et la politique culturelle engagée par l’établissement en direction de publics spécifiques, dont le public scolaire.
La mise en place d’un service éducatif compte parmi les questions qu’un chef d’établissement doit se poser au moment de l’élaboration de son projet scientifique et culturel. Dans ces conditions, il ne me paraît pas nécessaire d’inscrire une telle disposition dans la loi, d’autant que sa nature législative prête à discussion et que, encore une fois, son adoption serait susceptible d’ouvrir la voie à une multitude de demandes relatives aux différents volets – accessibilité, personnes âgées, partenariats avec les entreprises… – devant figurer dans un PSC.
Au bénéfice de ces observations, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement tend à ce que les projets scientifiques et culturels des musées, dont l’importance cruciale vient d’être rappelée, incluent un volet éducatif.
Il s’agit là d’un sujet majeur, et les musées prennent d’ailleurs de plus en plus conscience – c’est une évolution récente tout à fait louable – du caractère fondamental du volet éducatif de leur action. Celui-ci est un outil essentiel de démocratisation culturelle, car il permet de faire venir les familles au musée.
Plusieurs initiatives ont été prises en la matière ces dernières années. Je voudrais en particulier saluer deux d’entre elles : d’une part, la création de la Petite Galerie du Louvre, dédiée aux enfants ; d’autre part, l’opération « La classe, l’œuvre ! », qui fait des enfants des guides et des médiateurs dans les musées.
Il me semble donc important d’insérer ce volet éducatif au cœur du projet scientifique et culturel du musée. Le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Nous sommes tous attachés à l’éducation artistique et culturelle, priorité que le Gouvernement a maintes fois réaffirmée. Nos musées disposent en effet de services de médiation culturelle, qui proposent des projets au public scolaire. Même si ces projets peuvent parfois apparaître insuffisants, il conviendra en tout cas de réaffirmer le bien-fondé de la mission de ces services.
Cela étant dit, pourquoi ériger en priorité l’éducation artistique et culturelle plutôt, par exemple, que le développement de l’accessibilité, domaine dans lequel il reste beaucoup de progrès à faire ? Pourquoi faudrait-il privilégier, dans la loi, tel objectif plutôt que tel autre ? Ne conviendrait-il pas de renvoyer à un décret la définition des objectifs du projet scientifique et culturel ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Des actions sont aussi menées en faveur de la promotion de l’accessibilité. Par exemple, un prix de l’accessibilité est décerné chaque année.
À mon sens, la mission éducative se distingue des autres en ce qu’elle a un caractère universel. L’établir comme une priorité peut favoriser l’évolution de nos musées.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Selon Mme la présidente de la commission, inscrire dans la loi l’inclusion d’un volet éducatif dans les projets scientifiques et culturels des musées risquerait d’être au détriment de toutes les autres missions de ces derniers. Pour ma part, je ne le crois pas. Comme cela a été dit, non seulement la dimension éducative a un caractère universel, mais les expériences en cours montrent qu’attirer les enfants dans les musées permet d’y faire venir aussi les familles dans leur diversité. Il y a là un effet d’entraînement qui me paraît important. J’insiste sur le bien-fondé de cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Après avoir insisté sur l’importance particulière de l’accès à la culture et à la connaissance pour les futurs citoyens, nous ne pouvons que voter cet amendement.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Isabelle Debré.)
PRÉSIDENCE DE Mme Isabelle Debré
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine.
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus à l’article 18 bis.
Article 18 bis
À l’article L. 211-1 du code du patrimoine, après le mot : « documents », sont insérés les mots : « , et données ».
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, sur l'article.
M. Pierre Laurent. Nous nous félicitons de la démarche de nos collègues députés visant à prendre en compte la question des archives dans le présent texte, puisqu’il s’agit d’une dimension à part entière des grandes problématiques culturelles et patrimoniales.
Cependant, si nous apprécions que la protection des archives classées soit renforcée par les articles 18 quater et 18 quinquies, nous sommes circonspects quant à la manière dont seront ou pourront être mutualisés un certain nombre de services. Les garanties offertes en la matière par la rédaction actuelle du texte ne sont pas suffisantes à nos yeux.
Si nous pouvons entendre que certaines communes ne peuvent assumer un service d’archives, il nous semble hasardeux d’automatiser l’application du principe de mutualisation et, surtout, de limiter le rôle du préfet dans le processus. Il est notamment prévu de supprimer le pouvoir de prescription et de substitution du représentant de l’État inscrit à l’article L. 212-2 du code du patrimoine, ce qui nous inquiète ; nous présenterons des amendements sur ce point.
Par ailleurs, aucune disposition ne vise à revenir sur ce que certains ministères considèrent comme des avancées de la loi du 15 juillet 2008 mais que nous jugeons, pour notre part, problématiques, s’agissant de l’accès aux archives. Certaines archives sont considérées comme incommunicables hors du cadre du secret défense, notamment les archives dont on présume qu’elles pourraient permettre de fabriquer des armes de destruction massive. Sous ce prétexte, on empêche les personnes irradiées par les essais nucléaires français d’accéder à des documents pouvant servir leurs démarches. Il en va de même pour les archives faisant apparaître le comportement d’une personne, y compris lorsqu’il s’est manifesté dans le cadre d’une activité publique, pouvant lui porter préjudice s’il est dévoilé. Nous pensons que de telles limitations devraient être levées. Pour l’heure, il peut arriver que des historiens ou des journalistes se trouvent empêchés d’accéder à des archives pour des motifs qui nous paraissent discutables.
Nous serons vigilants sur ces questions, ainsi que sur celles qui touchent à la réutilisation commerciale d’archives publiques par des sociétés privées. Il s’agit certes de protéger les archives, mais aussi de permettre l’information des citoyens et la recherche scientifique et historique.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l'article.
Mme Marie-Christine Blandin. Je voudrais évoquer la spécificité des archives photographiques des services des collectivités. Il n’existe pas d’encadrement, pas de guide sur le stockage des images, la qualité de leur référencement ou l’obligation de renseigner les champs IPTC, en vue d’une réutilisation.
Je signale au passage que ces champs indiquent les noms des auteurs des clichés, qui, bien que fonctionnaires, conservent l’entièreté de leur droit moral, comme le précise l’article L. 121-4 du code de la propriété intellectuelle.
J’ajoute que ces images font parfois l’objet d’appels d’offres de numérisation des services informatiques des collectivités ne prenant pas en compte les volumes de pixels gigantesques nécessaires, ni la volatilité du numérique, qui impose des réenregistrements réguliers, voire des modernisations de support.
Je lance un message d’alerte : il serait bon que, pour la bonne conservation de notre patrimoine commun d’archives, y compris décentralisées, l’on prenne en compte cette problématique de l’archivage des images.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 18 bis.
(L'article 18 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 18 bis
Mme la présidente. L'amendement n° 213 rectifié bis, présenté par MM. César, P. Leroy, Gilles, Trillard et Commeinhes, Mme Des Esgaulx, MM. Pintat, de Raincourt, Houel, Lefèvre et Pillet, Mme Lamure, MM. Doligé, Savin et B. Fournier, Mme Deroche, MM. Danesi, Buffet, Dufaut et J.P. Fournier, Mme Deseyne, M. Husson, Mme Cayeux, MM. Bouchet, Vasselle, Milon et Laufoaulu, Mme Imbert, MM. D. Laurent, Karoutchi, Longuet, Laménie, Grand, Mandelli, Mayet, Mouiller et Bizet, Mme Morhet-Richaud, MM. Chasseing et G. Bailly, Mmes Gruny et Primas et MM. Gremillet et Pointereau, est ainsi libellé :
Après l'article 18 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code du patrimoine est ainsi modifié :
1° Le titre Ier du livre IV est complété par un article L. 410-… ainsi rédigé :
« Art. L. 410-… – Les musées gérés par une personne morale de droit privé sont organisés et financés par celle-ci.
« Les musées gérés par une personne morale de droit privé auxquels l'appellation « musée privé de France » a été attribuée sont régis par les articles L. 441-1 et suivants et bénéficient des mêmes avantages fiscaux que ceux relevant de l’appellation « musée de France ». » ;
2° L'article L. 442-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« L’appellation « musée privé de France » peut être attribuée à la personne morale de droit privé qui en fait la demande, dès lors que celle-ci justifie détenir une collection permanente significative d’œuvres d’art ou d’objets de collection, à condition qu’elles soient portées sur un inventaire et destinées à être présentées dans un établissement recevant du public ouvert au moins six mois par an et existant depuis plus de deux ans.
« L’appellation est attribuée par décision du ministre chargé de la culture. Les modalités d’attribution et de retrait de l’appellation « musée privé de France » sont précisées par décret en Conseil d’État. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Cet amendement fera certainement le bonheur de tous…
Nous avons, ces dernières années, mis en place une fiscalité et un cadre juridique extrêmement contraignants. Les musées privés représentent aujourd’hui à peu près 15 % des entrées de l’ensemble des musées, le reste étant réparti entre les musées nationaux et les musées publics.
Les musées nationaux et les musées publics reçoivent des subventions de l’État ou des collectivités, qui leur permettent de tenir.
En revanche, nombre de petits musées privés, notamment en province, ne bénéficient d’aucune aide publique. Leurs ressources se résument ainsi aux recettes des entrées. Si on applique à ces recettes une fiscalité trop forte, les petits musées privés ne s’en sortent plus. D’ailleurs, beaucoup d’entre eux ferment.
Nous proposons donc de créer un label « musée privé de France », qui concernerait les musées abritant des collections dignes de ce nom et ouverts au public au moins six mois par an. Ne serait-il alors pas possible d’aligner la fiscalité pesant sur les recettes de leurs entrées sur celle qui s’applique aux musées publics, afin de sauver les petits musées privés de province, qui connaissent aujourd’hui de grandes difficultés ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. La commission n’est pas favorable à la création d’une appellation spécifique « musée privé de France ».
M. Roger Karoutchi. Et voilà ! Et pourquoi ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Aujourd’hui, toute personne privée peut créer un musée, à condition qu’il soit à but non lucratif. Mettre en œuvre votre proposition, monsieur Karoutchi, serait sans doute fort complexe. Les obligations administratives ou scientifiques qui pèsent sur les musées publics justifient la différence de traitement que vous avez soulignée. Toutefois, je pense qu’il nous faut retravailler cette question.
Nous ne fermons pas la porte, mais, pour l’heure, il ne nous semble pas possible de créer cette nouvelle catégorie de musées, qui ne nous paraît pas présenter un intérêt pour le public.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement a pour objet de créer une nouvelle appellation « musée privé de France », pour que ces musées privés bénéficient des avantages liés à l’appellation « musée de France », notamment en matière fiscale.
Ce qui importe pour déterminer le régime fiscal, c’est de savoir si le musée considéré, que son statut soit privé ou public, est ou non à but lucratif. Le statut importe peu, puisqu’il existe des musées associatifs, des musées de France qui sont des structures de droit privé à vocation d’intérêt général, pour lesquels le législateur a veillé à ce que le régime fiscal soit en harmonie avec le but non lucratif de l’établissement. Cela est d’ailleurs en conformité avec les prescriptions du Conseil international des musées, l’ICOM, qui définit le musée comme une institution permanente sans but lucratif au service de la société et de son développement.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Karoutchi, l'amendement est-il maintenu ?
M. Roger Karoutchi. J’ai la solide habitude d’être battu quand la commission s’oppose à mes amendements… Je vais donc retirer celui-ci, mais je demande à la commission de bien vouloir travailler sur cette question.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Absolument !
M. Roger Karoutchi. J’entends bien vos arguments, madame la ministre, mais, franchement, que l’on me démontre le but lucratif de certains petits musées de province ! Leur création résulte souvent de la volonté de personnalités ou de donateurs locaux, auxquels ils ne rapportent rien. Leur viabilité est aujourd’hui compromise.
Récemment encore, plusieurs petits musées de nos provinces ont été contraints de fermer. Je ne dis pas qu’ils abritaient des collections extraordinaires, mais les petits musées contribuent à la diversité culturelle !
Je retire donc l’amendement, mais il faut vraiment réfléchir aux moyens de maintenir la viabilité de nos petits musées privés de province.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Monsieur Karoutchi, je le confirme, nous devons continuer à travailler sur ce sujet. Il importe de prendre en compte la qualité scientifique des collections et leur intérêt pour le public.
M. Roger Karoutchi. Oui !
Mme Françoise Férat, rapporteur. Travaillons en ce sens, en lien, bien entendu, avec les services de Mme la ministre. Il convient d’élaborer un cahier des charges et de construire un dispositif solide, pour tirer l’ensemble des structures vers le haut.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 203 rectifié, présenté par MM. Bonnecarrère, Capo-Canellas, Laurey, Cadic, Cigolotti et Tandonnet, Mme Goy-Chavent, M. Marseille, Mme Doineau, M. Guerriau, Mme Billon, M. L. Hervé, Mme Gatel et M. Gabouty, est ainsi libellé :
Après l’article 18 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 212-3 du code du patrimoine, il est inséré un article L. 212-3-… ainsi rédigé :
« Art. L. 212-3-… – Chaque collectivité territoriale, établissement public de coopération intercommunale ou organisme public peut créer un service d’archives. Il est considéré comme un service d’archives constitué s’il répond aux critères suivants :
« - des locaux adaptés, conformes aux normes définies pour la conservation des archives et comprenant des magasins distincts de la salle de lecture et des bureaux du personnel,
« - un budget individualisé,
« - un personnel permanent dirigé par un agent de catégorie A ou B titulaire d’un diplôme d’archivistique ou ayant acquis une expérience archivistique approfondie.
« Dans le cas, où il ne répond pas à ces critères, le service d’archives est considéré comme une cellule d’archives. »
La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.
M. Philippe Bonnecarrère. Le monde des archives a quelquefois le sentiment de ne pas être perçu à sa juste valeur, d’être considéré, dans le fonctionnement de nos services publics, comme un élément quelque peu secondaire. Or la conservation des documents d’archives est une mission essentielle.
Le présent amendement vise à donner une définition du service public des archives. J’ai cru comprendre que ses dispositions ont été jugées de nature réglementaire mais que, pour des raisons purement matérielles, l’article 41 de la Constitution ne lui a pas été opposé.
Mme Françoise Férat, rapporteur. C’est bien cela !
M. Philippe Bonnecarrère. J’indique par avance que je ne ferai pas de difficulté pour retirer cet amendement d’appel, que nous avons déposé pour susciter un débat sur ce qu’est aujourd’hui un service public des archives et appeler l’attention de la société française sur l’importance de la préservation des archives publiques.
Mme la présidente. L'amendement n° 404 rectifié, présenté par Mmes Bouchoux, Blandin et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 212-3 du code du patrimoine, il est inséré un article L. 212-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 212-3-1 – Chaque collectivité territoriale, groupement intercommunal ou organisme public peut créer un service public d’archives.
« Lorsque le service public d’archives comprend des locaux adaptés, conformes aux normes définies pour la conservation des archives et contenant des magasins distincts de la salle de lecture et des bureaux du personnel, un budget individualisé, un personnel permanent dirigé par un agent de catégorie A ou B titulaire d’un diplôme d’archivistique ou ayant acquis une expérience archivistique approfondie, il est qualifié de service public d’archives constitué.
« Lorsque le service public d’archives ne comprend pas les éléments précités, il est qualifié de cellule d’archives. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Nous entendons, nous aussi, lancer un appel à la reconnaissance du service public des archives, dont nous proposons d’insérer une définition dans le code du patrimoine.
La commission a travaillé sur ce sujet pour prendre en compte toutes les évolutions à l’œuvre, à l’heure de l’open data, mais il faut à mon sens aller encore un peu plus loin en matière d’accès effectif aux documents. Cela passe par une excellente gestion et une définition précise des services concernés.
À l’origine, l’article 9 du projet de loi pour une République numérique introduisait dans le droit français la mention d’un nouveau service public des données de référence. À cet égard, je trouve dommage l’absence de reconnaissance du service public des archives dans un projet de loi relatif au patrimoine, ne serait-ce que pour compenser le fait que, dans trop de séries policières, les enquêteurs ne donnant pas satisfaction sont mutés aux « archives »… (Sourires.)
Nous avons grand besoin des professionnels des archives. Dans les communes, les intercommunalités, les départements et les régions, dans les domaines de l’enseignement supérieur et de la recherche, tous les acteurs du monde des archives nous écoutent : adressez-leur des paroles réconfortantes, madame la ministre !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Bien entendu, on ne peut que souscrire aux objectifs énoncés, qu’il s’agisse de l’adaptation des locaux d’archives, de leur mise en conformité avec les normes, des exigences liées à la numérisation, de la nécessité de pouvoir s’appuyer sur un personnel permanent…
Madame la ministre, je me tourne vers vous : il vous appartient de rédiger la circulaire nécessaire.
La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. La politique des archives est une mission essentielle du ministère de la culture. Elle concerne les textes, les photographies, l’audiovisuel, le cinéma, avec les problématiques nouvelles que pose le numérique, en particulier en matière de conservation à très long terme des données.
Vous avez évoqué les archives photographiques des collectivités territoriales, madame Blandin. L’État aide celles-ci à se doter de systèmes d’archivage numérique. C’est là une première réponse.
Vous avez également évoqué ces séries télévisées où les personnages dont on veut se débarrasser sont affectés aux archives, mais, dans ces mêmes séries, c’est souvent la mémoire qui permet de démêler l’intrigue ! (Sourires.) Sans mémoire, il est en fait bien difficile d’envisager l’avenir…
Cela étant, les mesures proposées sont de niveau réglementaire. Aussi le Gouvernement émet-il un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Monsieur Bonnecarrère, l’amendement n° 203 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Bonnecarrère. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 203 rectifié est retiré.
Madame Blandin, l’amendement n° 404 rectifié est-il maintenu ?
Mme Marie-Christine Blandin. Étant satisfaite des réponses qui viennent de m’être apportées, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 404 rectifié est retiré.
L'amendement n° 410, présenté par Mmes Bouchoux, Blandin et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 212-10 du code du patrimoine est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le contrôle scientifique et technique de l’État exercé sur le service public d’archives constitué tel que défini à l’article L. 212-3-1 est défini par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement est également retiré, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 410 est retiré.
Article 18 ter
(Non modifié)
Après l’article L. 212-4 du code du patrimoine, il est inséré un article L. 212-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 212-4-1. – La conservation des archives numériques peut faire l’objet d’une mutualisation entre services publics d’archives, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. Par dérogation aux articles L. 212-6, L. 212-6-1, L. 212-11 et L. 212-12, le présent article s’applique aux collectivités territoriales et à leurs groupements à fiscalité propre. »
Mme la présidente. L'amendement n° 258, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La mutualisation des services ne peut contrevenir au principe de maillage territorial et s’assure de la continuité et de l’accessibilité du service public d’archives. En ce sens, le représentant de l’État peut faire des prescriptions à des communes susceptibles de mutualiser leurs services municipaux d’archives. »
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement vise à mieux préciser les conditions dans lesquelles peut être opérée une mutualisation de services d’archives : une telle mutualisation ne saurait contrevenir au principe de maillage territorial et doit garantir la continuité et l’accessibilité du service public des archives.
Dans sa rédaction actuelle, l’article prévoit qu’une mutualisation de services communaux d’archives est possible, sous l’égide des intercommunalités et sous certaines conditions.
Nous pouvons parfaitement comprendre cette volonté de mutualiser, mais nous souhaitons obtenir des garanties supplémentaires. Nous regrettons vivement que les conditions et les modalités de mutualisation de services communaux d’archives soient fixées par voie réglementaire. À nos yeux, il serait préférable qu’elles le soient par le législateur.
Selon que la mutualisation vise à garantir la préservation d’archives mises en danger faute de moyens dans de petites communes, à dégager des économies d’échelle ou à prendre en compte des considérations techniques, la situation n’est pas la même.
Dans cette perspective, le présent amendement tend à permettre aux représentants de l’État d’adresser des prescriptions aux services d’archives communaux susceptibles d’opérer une mutualisation. Il nous paraît essentiel que l’État, par l’intermédiaire des préfets, puisse juger de la pertinence et de la justification de ces projets de mutualisation, dans le respect à la fois de la politique d’emploi des archivistes et des missions de service public.
À ce titre, il est prévu que le représentant de l’État s’assure de la pérennité et de la continuité du service public, ainsi que de son accessibilité pour l’ensemble des citoyens, dans le cadre des mutualisations envisagées. L’objectif est de préserver les emplois utiles au maintien de la qualité et de l’accessibilité des archives et le maillage territorial des services d’archives.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Monsieur Laurent, l’article 18 ter prévoit la possibilité de mutualiser les archives numériques, mais pas les archives physiques. Chaque service restera juridiquement responsable de ses documents et en gèrera la communication aux demandeurs. Cet amendement me semble donc inutile. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Pour les raisons que Mme la rapporteur vient d’exposer, le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Laurent, l’amendement n° 258 est-il maintenu ?
M. Pierre Laurent. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je souhaite appeler l’attention de la Haute Assemblée, et notamment de son bureau, sur un sujet qui exige d’être clarifié pour la bonne tenue de nos débats.
En présentant l’amendement n° 203 rectifié, M. Bonnecarrère a lui-même admis que ses dispositions étaient d’ordre réglementaire. Mme la rapporteur et Mme la ministre l’ont confirmé. Dès lors, pourquoi cet amendement n’a-t-il pas été déclaré irrecevable au titre de l’article 41 de la Constitution avant la séance publique ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ce n’est pas le seul…
M. David Assouline. Certes, madame la rapporteur, mais l’article 41 ne peut plus être appliqué de manière discrétionnaire ! Deux de nos amendements auxquels nous attachions beaucoup d’importance, relatifs l’un aux directions régionales des affaires culturelles, l’autre au Conseil national des professions des arts visuels, se sont vu opposer l’article 41 et n’ont donc pu être présentés en séance. J’accepte les règles, à condition qu’elles soient les mêmes pour tout le monde !
Mme la présidente. Monsieur Assouline, la procédure à laquelle vous faires référence n’est entrée en vigueur que le 15 avril 2015. Elle est mise en œuvre de manière progressive. Lorsque les dispositions d’un amendement sont manifestement d’ordre réglementaire, il est déclaré irrecevable au titre de l’article 41 de la Constitution. Lorsque tel n’est pas le cas, on permet encore son examen en séance publique.
M. David Assouline. D’accord !
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Monsieur Assouline, la situation actuelle n’est effectivement pas acceptable. Alain Richard et moi-même allons soumettre à M. le président du Sénat une proposition visant à rationaliser la procédure relative aux articles 40 et 41 de la Constitution avant la fin de cette session. (Marques d’approbation.)
M. Vincent Eblé. Très bien !
Mme la présidente. Je rappelle que c’est le président du Sénat qui déclare l’irrecevabilité d’un amendement, sur proposition du président de la commission concernée.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Tout à fait !
Mme la présidente. Cette nouvelle règle se met en place petit à petit. Laissons un peu de temps au temps… (Sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 258.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 18 ter.
(L'article 18 ter est adopté.)
Article 18 quater A
I. – L’article L. 212-11 du code du patrimoine est ainsi rédigé :
« Art. L. 212-11. – Les archives produites ou reçues par les communes de moins de 2 000 habitants :
« 1° Peuvent être confiées en dépôt, par convention, au service d’archives du groupement de communes à fiscalité propre dont elles sont membres ou au service d’archives de la commune membre désignée par ce groupement pour gérer les archives de celui-ci, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État ;
« 2° Sont déposées au service départemental d’archives compétent à l’expiration d’un délai de cent vingt ans pour les registres de l’état civil et de cinquante ans pour les autres documents n’ayant plus d’utilité administrative et destinés à être conservés à titre définitif. Toutefois, après déclaration auprès du représentant de l’État dans le département et accord de l’administration des archives, la commune peut conserver elle-même ses archives ou les confier au service d’archives du groupement de communes à fiscalité propre auquel elle appartient ou au service d’archives de la commune membre désignée par ce groupement pour gérer les archives de celui-ci, dans les conditions prévues au 1°.
« Par exception, les archives numériques peuvent être déposées avant l’expiration de leur durée d’utilité administrative. »
II. – (Supprimé) – (Adopté.)
Article 18 quater B
(Non modifié)
L’article L. 212-12 du code du patrimoine est ainsi rédigé :
« Art. L. 212-12. – Les archives produites ou reçues par les communes de 2 000 habitants ou plus peuvent être déposées par le maire, par convention :
« 1° Au service d’archives du groupement de communes à fiscalité propre dont elles sont membres ou au service d’archives de la commune membre désignée par ce groupement pour gérer les archives de celui-ci, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État ;
« 2° Au service départemental d’archives compétent à l’expiration d’un délai de cent vingt ans pour les registres de l’état civil et de cinquante ans pour les autres documents n’ayant plus d’utilité administrative et destinés à être conservés à titre définitif.
« Par exception, les archives numériques peuvent être déposées avant l’expiration de leur durée d’utilité administrative. »
Mme la présidente. L'amendement n° 259, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Après les mots :
le maire,
insérer les mots :
après avis du conseil municipal,
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le dépôt au service départemental d'archives est prescrit d'office par le représentant de l’État, après une mise en demeure restée sans effet, lorsqu'il est établi que la conservation des archives d'une commune n'est pas convenablement assurée. »
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. S’il n’est pas question pour nous de remettre en cause la faculté, pour les communes, de déposer leurs documents d’archives auprès des services d’archives intercommunaux, car nous avons conscience des difficultés que peuvent rencontrer certaines d’entre elles, la rédaction actuelle de l’article 18 quater B ne nous paraît pas suffisamment précise et n’apporte pas assez de garanties.
Tout d’abord, sans vouloir alourdir plus que nécessaire une procédure que l’on pourrait considérer « de fonctionnement », il nous semble que ce devrait être au conseil municipal, et non au maire, de décider du dépôt des documents d’archives dans un service d’archives extérieur à la municipalité. Bien évidemment, rien n’empêche que la convention prévue à l’alinéa 1 soit signée par les villes, ce qui serait d’ailleurs logique. Toutefois, nous considérons que l’assemblée délibérante devrait donner son avis sur un tel transfert.
Ensuite, la rédaction actuelle de l’article ne fait mention nulle part de la faculté du préfet de faire des prescriptions ou même de se substituer au maire en cas de manquement mettant en danger les archives municipales.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Monsieur Laurent, concernant le I de votre amendement, je voudrais vous rassurer : le dépôt des documents d’archives n’intervient qu’après une délibération du conseil municipal. Le transfert des archives ne peut donc se faire en catimini, si j’ose dire, à l’insu d’une partie du conseil municipal.
Le II de votre amendement me semble également inutile, puisque son dispositif figure déjà dans le code du patrimoine, qui prévoit le dépôt d’office des archives des communes, quelle que soit leur taille, auprès des services départementaux d’archives, lorsque leurs conditions de conservation les mettent en péril.
Vous pouvez donc être pleinement rassuré sur les deux points qui vous préoccupent.
La commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je crois également que cet amendement est satisfait par le droit existant, qu’il s’agisse de l’association du conseil municipal pour décider du dépôt des archives communales au service départemental d’archives ou de la possibilité, pour le préfet, de prescrire un dépôt d’office, prévu dans certains cas par l’article L. 212-13 du code du patrimoine pour des pièces présentant un intérêt historique.
L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Laurent, maintenez-vous l’amendement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 259 est retiré.
Je mets aux voix l'article 18 quater B.
(L'article 18 quater B est adopté.)
Article 18 quater
(Non modifié)
Après le premier alinéa de l’article L. 212-25 du code du patrimoine, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elles ne peuvent être divisées ou aliénées par lot ou pièce sans l’autorisation de l’administration des archives. » – (Adopté.)
Article 18 quinquies
(Non modifié)
Le 2° de l’article L. 214-8 du code du patrimoine est ainsi rédigé :
« 2° Toute opération susceptible de modifier ou d’altérer des archives classées, ainsi que toute division ou aliénation par lot ou pièce d’archives classées, réalisées sans les autorisations administratives prévues à l’article L. 212-25 ; ». – (Adopté.)
Article 18 sexies (nouveau)
I. – L’article L. 211-4 du code du patrimoine est ainsi rédigé :
« Art. L. 211-4. – Les archives publiques sont :
« 1° Les documents qui procèdent de l’activité de l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics et des autres personnes morales de droit public. Les actes et documents des assemblées parlementaires sont régis par l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires ;
« 2° Les documents qui procèdent de la gestion d’un service public ou de l’exercice d’une mission de service public par des personnes de droit privé ;
« 3° Les minutes et répertoires des officiers publics ou ministériels et les registres de conventions notariées de pacte civil de solidarité. »
II. – Les 1° et 3° de l’article L. 211-4 du code du patrimoine, dans leur rédaction résultant du I du présent article, s’appliquent à compter du 29 avril 2009. – (Adopté.)
Article 18 septies (nouveau)
À la première phrase de l’article L. 214-10 du code du patrimoine, après le mot : « articles », sont insérées les références : « 311-4-2, 322-2, 322-3-1, 322-4, ».
Mme la présidente. L'amendement n° 260, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Il ne nous paraît pas opportun, en l’état, d’inscrire dans ce texte une interdiction d’accès aux locaux dans lesquels peuvent être consultés des documents d’archives à toute personne ayant volé ou dégradé de tels documents dans ces mêmes locaux. Ce n’est pas que nous trouvions normal qu’une telle personne puisse continuer à accéder auxdits locaux, mais nous pensons que cette éventuelle mesure d’éloignement doit relever d’une décision de justice.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Monsieur Laurent, vous avez parfaitement raison : c’est bien évidemment d’une procédure judiciaire qu’il s’agit. Simplement, l’interdiction que nous avons prévue est une mesure conservatoire. En effet, la destruction ou le vol d’archives entraîne l’engagement d’une procédure judiciaire, mais cette dernière n’empêche pas l’auteur de récidiver, le cas échéant, dans l’attente du jugement.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Il est également défavorable, pour les mêmes raisons.
Je rappelle qu’une telle décision peut également relever des prérogatives d’ordre public de l’autorité administrative dans d’autres cas. Cette disposition ne fait qu’étendre à des infractions relatives aux archives, dans le but de les protéger, une législation d’ores et déjà en vigueur pour des infractions du même ordre.
Mme la présidente. Maintenez-vous l’amendement, monsieur Laurent ?
Mme la présidente. L’amendement n° 260 est retiré.
Je mets aux voix l'article 18 septies.
(L'article 18 septies est adopté.)
Article 19
(Non modifié)
Le livre IV du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° A Au dernier alinéa de l’article L. 430-1, la référence : « , L. 452-2 » est supprimée ;
1° L’article L. 452-1 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« L’instance scientifique consultée peut assortir son avis de prescriptions motivées. Lorsque les travaux sont réalisés alors qu’un avis défavorable a été émis par l’instance scientifique ou qu’ils ne sont pas réalisés conformément à ses prescriptions, le ministre chargé de la culture peut mettre en demeure le propriétaire de les interrompre et ordonner toute mesure conservatoire utile afin d’assurer la préservation du bien.
« La mise en demeure est notifiée au propriétaire. » ;
b) Au début du second alinéa, le mot : « Elle » est remplacé par les mots : « La restauration » ;
2° L’article L. 452-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 452-2. – Lorsque l’intégrité d’un bien appartenant à la collection d’un musée de France est gravement compromise par l’inexécution ou la mauvaise exécution de travaux de conservation ou d’entretien, l’autorité administrative peut mettre en demeure le propriétaire de la collection de prendre toute disposition nécessaire ou de procéder aux travaux conformes aux prescriptions qu’elle détermine. La mise en demeure indique le délai dans lequel les mesures ou les travaux sont entrepris. Pour les travaux, elle précise également la part de dépense supportée par l’État, laquelle ne peut être inférieure à 50 %. Elle précise en outre les modalités de versement de la part de l’État.
« La mise en demeure est notifiée au propriétaire.
« Lorsque le propriétaire ne donne pas suite à la mise en demeure de prendre toute disposition nécessaire, l’autorité administrative ordonne les mesures conservatoires utiles et, notamment, le transfert provisoire du bien dans un lieu offrant les garanties voulues.
« Lorsque le propriétaire ne donne pas suite à la mise en demeure de réaliser les travaux nécessaires ou conformes, l’autorité administrative fait procéder auxdits travaux conformément à la mise en demeure. » ;
3° Après l’article L. 452-2, il est inséré un article L. 452-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 452-2-1. – En cas d’exécution d’office, le propriétaire est tenu de rembourser à l’État le coût des travaux exécutés par celui-ci, dans la limite de la moitié de son montant. La créance ainsi née au profit de l’État est recouvrée suivant la procédure applicable aux créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine aux échéances fixées par l’autorité administrative, qui peut les échelonner sur une durée de quinze ans au plus, les sommes dues portant intérêt au taux légal à compter de la notification de leur montant au propriétaire.
« Le propriétaire peut toujours s’exonérer de sa dette en faisant abandon de son bien à l’État. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 19
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 346 rectifié ter est présenté par MM. Husson, Raison, Commeinhes, de Nicolaÿ, Milon, Longuet, Emorine, Masclet et Kennel, Mmes Duchêne et Deromedi, MM. Mayet, Mandelli et Dufaut, Mmes Morhet-Richaud et Imbert et MM. Laménie, Pellevat, Chaize, Gournac, Cornu, Vaspart, B. Fournier et Chasseing.
L'amendement n° 462 rectifié est présenté par MM. Barbier, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mme Laborde et MM. Mézard, Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l’article L. 451-9 du code du patrimoine est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée :
« , ni à ceux dont la dimension historique nationale, notamment par leur caractère symbolique, leur ancienne appartenance aux collections de la couronne, leur provenance d’un monument historique appartenant à l’État, est affirmée par décision du ministre chargé de la culture rendue sur avis du Haut Conseil des musées de France. Cette disposition annule les transferts concernés intervenus en application de l’article 1er de la loi n° 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France. »
La parole est à Mme Marie-Annick Duchêne, pour présenter l’amendement n° 346 rectifié ter.
Mme Marie-Annick Duchêne. Cet amendement a été préparé par notre collègue Jean-François Husson.
L’article 13 de la loi n° 2002-5 du 4 janvier 2002 a prévu « le transfert de propriété » des « biens des collections nationales confiés par l’État à une collectivité territoriale avant le 7 octobre 1910 ». Cette mesure de simplification administrative a eu cependant pour conséquence de démembrer le noyau des œuvres à la base des collections nationales, à savoir celles provenant des collections de la Couronne.
Ces œuvres, réunies pour la plupart à partir du règne de François Ier, en particulier durant ceux de Louis XIV et de Louis XVI, jouissent d’une cohérence historique, voire artistique, exceptionnelle. D’autres œuvres, notamment celles qui proviennent de monuments historiques appartenant à l’État, gagneraient à demeurer propriété de la nation.
Par exemple, il serait souhaitable que deux tableaux des Quatre saisons commandées par Louis XIV pour son château de Marly, inscrits dans les inventaires du musée du Louvre, retrouvent leur destination première.
L’élaboration de son avis par le Haut Conseil des musées de France sera facilitée par le travail de récolement effectué préalablement aux transferts.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 462 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement a été excellemment défendu par ma collègue. Je n’ai rien à ajouter.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ces amendements visent à annuler le transfert de propriété de l’État vers les collectivités territoriales prévu par la loi de 2002 relative aux musées de France pour ce qui concerne les biens qui revêtent une dimension historique nationale.
Si je comprends bien, le dispositif présenté constitue une sorte de pendant à la protection mise en place pour les domaines nationaux, au bénéfice des œuvres présentant une dimension historique nationale par leur caractère symbolique, leur appartenance aux anciennes collections de la Couronne ou leur provenance d’un monument historique de l’État.
Néanmoins, il convient de rappeler que, en ce qui concerne la protection des domaines nationaux, le projet de loi ne prévoit pas la renationalisation de ces derniers, dont certaines parties continueront d’appartenir à des collectivités territoriales et à des personnes privées, ce qui complique la situation.
Ces amendements présentent, en outre, d’autres difficultés.
En termes d’affichage, comment expliquer à des collectivités à qui l’on a volontairement transféré la propriété d’œuvres pour enrichir et pérenniser les collections de leurs musées que l’on revient sur ce transfert, alors que ces œuvres constituent bien souvent les pièces maîtresses de leurs collections ? Cela me semble extrêmement difficile.
En termes juridiques, l’annulation prévue a-t-elle un caractère rétroactif et des conséquences financières ?
Mes chers collègues, je comprends bien vos motivations, mais les dispositions actuelles me semblent suffisantes pour permettre des prêts ou des dépôts. À mon sens, il vaut mieux mettre des partenariats en œuvre pour que le plus grand nombre puisse profiter de telles expositions.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Ces amendements ont pour objet d’introduire des exceptions à un dispositif mis en place par la loi relative aux musées de France et intégré à l’article L. 451-9 du code du patrimoine.
Cet article prévoit le transfert automatique des biens des collections nationales appartenant à l’État qui ont été déposés dans un musée de France d’une collectivité territoriale avant le 7 octobre 1910. Les auteurs de ces amendements proposent d’y déroger pour certains biens particuliers, d’importance majeure, afin d’éviter de démembrer le noyau des œuvres fondatrices des collections nationales.
Je me permettrai d’exprimer un désaccord de fond avec cette proposition, puisque ces biens, transférés à l’occasion de grandes vagues de dépôts, constituent aujourd’hui le cœur et la richesse de ces musées répartis sur l’ensemble du territoire. Il me semble qu’il importe au contraire que ces derniers puissent les conserver et développer des collections majeures.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer ces amendements, faute de quoi j’y serai défavorable.
Mme la présidente. Madame Duchêne, maintenez-vous l’amendement n° 346 rectifié ter ?
Mme Marie-Annick Duchêne. Pour être tout à fait complète, je tiens à ajouter que M. Husson souhaitait, dans une optique de circulation des œuvres, que les quatre tableaux des Quatre saisons puissent être exposés ensemble par roulement dans chacun des trois musées entre lesquels ils sont répartis actuellement. Cela étant précisé, je retire l’amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 346 rectifié ter est retiré.
Monsieur Requier, l’amendement n° 462 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Requier. Je ne veux pas dépouiller les musées de province : ce serait contraire à ma philosophie. Je retire donc l’amendement.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Madame Duchêne, j’ai bien compris cette volonté de partage, de mise en valeur de toutes ces œuvres, au bénéfice d’un plus large public. Toutefois, je le répète, il me semble préférable, dans cette optique, de développer les partenariats et les échanges.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je souscris parfaitement à l’objectif de circulation des œuvres. On doit pouvoir faire encore mieux en la matière.
Article 19 bis
(Non modifié)
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 15 octobre de chaque année, un rapport détaillé sur l’établissement de la liste des ayants droit auxquels restituer les œuvres spoliées et sur l’intégration aux collections nationales des œuvres répertoriées « Musées Nationaux Récupération ».
Cette intégration ne peut se faire que pour les œuvres répertoriées « Musées Nationaux Récupération » pour lesquelles une recherche approfondie établit qu’elles n’ont pas fait l’objet d’une spoliation ou pour lesquelles on ne peut établir qu’elles ont fait l’objet d’une spoliation.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, sur l'article.
M. David Assouline. En matière d’archives, il aurait été prématuré d’ouvrir un débat sur autre chose que la conservation, mais il faudra un jour réfléchir à la question de l’accès aux archives pour les citoyens, les chercheurs, les journalistes.
À l’heure d’internet et de la mise en ligne de certaines archives, nos réglementations sont très limitatives, à telle enseigne que, parfois, nos propres chercheurs peuvent plus facilement accéder à des archives secrètes aux États-Unis qu’à certaines archives françaises tout à fait anodines…
Nous devrons envisager une démocratisation de l’accès aux archives, pour assurer une transparence – maîtrisée, cela va de soi – qui permettra de lutter contre le développement, favorisé par les nouvelles technologies, des théories complotistes. À l’heure actuelle, l’inaccessibilité de trop de documents d’archives laisse la porte ouverte au n’importe quoi.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l’article.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet article prévoit la remise au Parlement d’un rapport sur les œuvres spoliées durant la Seconde Guerre mondiale. Corinne Bouchoux a travaillé, au nom de la commission de la culture, sur ce dossier douloureux, en particulier sur l’intégration aux collections nationales des œuvres répertoriées « Musées nationaux récupération », ou MNR, désignation qui avait sombré dans l’oubli dans nombre de musées, où les œuvres en question étaient parfois exposées sans mention particulière, quand elles n’étaient pas enfouies dans les réserves ! Ce travail a donné lieu à quelques restitutions solennelles, très émouvantes, par le ministère de la culture. Le rapport, accepté par la commission, permettra d’assainir totalement la situation à l’avenir.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 19 bis.
(L'article 19 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 19 bis
Mme la présidente. L'amendement n° 297 rectifié, présenté par MM. Montaugé et Assouline, Mmes Blondin, Monier, S. Robert et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L 451-11 du code du patrimoine, il est inséré un article L 451-… ainsi rédigé :
« Art. L. 451-… – Des pôles nationaux de référence sont créés pour rassembler, conserver et valoriser des collections publiques non présentées, selon des thématiques précises définies préalablement dans un projet scientifique et culturel.
« L’État reconnaît, par une labellisation spécifique, les musées de France candidats qui, après avis du Haut conseil des musées de France et en lien avec les grands départements patrimoniaux dont ils relèvent, se constituent en pôle national de référence.
« Le label de pôle national de référence est déterminé par l’histoire et la nature particulière des collections du musée candidat. La dénomination et la répartition des pôles relèvent du ministère chargé de la culture.
« La réunion de collections spécifiques en un même lieu, sans transfert obligatoire de propriété, fait l’objet d’une convention entre le pôle national de référence et l’État et d’une convention de gestion entre les collectivités publiques propriétaires. Les conventions peuvent prévoir des dépôts compensatoires entre les collections publiques nationales et les musées territoriaux.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Au travers de cet amendement, nous proposons une politique nationale de valorisation des collections éparses détenues par les musées de France.
Nous proposons que l’État reconnaisse, par une labellisation spécifique, les musées de France qui, sous réserve de l’avis du Haut Conseil des musées de France et en lien direct avec les grands départements dont ils relèvent, se constituent en pôles nationaux de référence.
Ces pôles nationaux de référence sont destinés à rassembler, à conserver et à valoriser en région des collections publiques non présentées, selon des thématiques précises définies préalablement dans un projet scientifique et culturel.
En effet, les musées de France sont dotés d’exceptionnelles collections, à la qualité et à la diversité reconnues. Toutefois, nombre d’entre elles ne sont pas exposées, non en raison d’un manque de place, mais parce qu’elles ne correspondent pas au projet scientifique du musée. Elles n’en constituent pas moins un patrimoine de grande valeur, qui mériterait une plus large diffusion.
À ce jour, par exemple, en matière de collections américaines, 173 musées abritent plus de 193 000 pièces réparties de la façon suivante : le musée du quai Branly accueille bien entendu l’essentiel de ces collections, avec un peu plus de 163 000 pièces, soit 84 % du total, le musée d’Auch, qui m’est cher, abrite 10 000 objets, soit 5 % de l’ensemble, les 11 % restants, soit un peu plus de 20 000 pièces, étant répartis entre 171 autres musées.
On constate une forte proportion d’ensembles de moins de 50 pièces. C’est une situation singulière, observée dans d’autres domaines. Dans ces conditions, très peu de musées disposent de collections suffisantes pour développer une présentation pertinente.
Dans le même esprit, la création d’autres pôles nationaux de référence pourrait être envisagée, par exemple pour les arts océaniens à Rochefort, pour les arts africains à Bordeaux, pour les arts asiatiques à Nice, pour les arts d’Amérique du Nord à Boulogne-sur-Mer, pour les arts du Mexique à Marseille, pour les arts hispaniques à Castres, pour les arts de l’Amazonie à Lyon, avec le musée des Confluences…
La création de ce label de pôle national de référence permettrait la reconnaissance de la spécificité de ces collections, le soin qui a été apporté à leur mise en valeur et la qualité du travail scientifique mené, en même temps qu’elle permettrait le rassemblement des collections dans des lieux privilégiés, et donc plus attractifs pour le public.
Mis en place à l’échelle nationale et pour des collections de nature très diverse, le dispositif proposé pourrait constituer un axe nouveau et original des politiques territorialisées du ministère de la culture, contribuant à l’aménagement et à la valorisation des territoires ruraux, et ce sans que cela coûte quoi que ce soit à l’État.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cet amendement vise à permettre la création de musées labellisés « pôles nationaux de référence », qui pourraient, dans un domaine particulier, bénéficier de l’apport de collections publiques non présentées. Votre proposition, mon cher collègue, est évidemment tout à fait intéressante et séduisante, tant nous sommes attachés au partage de la culture.
Tout d’abord, la constitution d’un pôle sur un domaine ou un thème particulier permettrait au musée concerné de bénéficier de l’apport d’œuvres bloquées dans les réserves d’autres musées. Ensuite, cette formule permettrait au public d’avoir plus facilement accès à des œuvres jusqu’à présent rarement présentées.
Pour autant, monsieur le sénateur, cela est déjà possible, au travers de réseaux de partenariat culturel. C’est une question de volonté.
Par ailleurs, la création de ce nouveau label aurait un coût, qui n’a pas été expertisé, et supposerait – ce point me semble très important – la participation de personnels scientifiques qui interviennent déjà dans le cadre des réseaux d’échanges que j’évoquais à l’instant.
Je demande, au nom de la commission, le retrait de cet amendement. Sinon, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Monsieur le sénateur, je salue votre connaissance fine des collections que vous avez mentionnées. Comme Mme la rapporteur, je suis sensible à votre proposition, mais l’instrument législatif me paraît peu adapté à une telle démarche, qui doit reposer sur le volontariat et l’adhésion de tous.
Il existe un certain nombre d’instruments qui permettent les prêts, les dépôts, les transferts entre les musées de France, que l’État favorise et encourage sur la base des projets scientifiques et culturels.
Eu égard aux nombreux exemples que vous avez cités, cette problématique, qui n’est pas sans lien avec celle de la circulation des collections, est peut-être négligée, je l’admets. Il me semblerait intéressant de la prendre en compte dans la réflexion engagée au sein du ministère de la culture sur ce que doivent être les musées du XXIe siècle.
Je vous propose de vous rallier à cette démarche plutôt que de procéder par la voie législative.
Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Je ne me range pas aux arguments développés par Mme la rapporteur.
L’article 3 du projet de loi, que nous avons adopté mardi soir, traduit une volonté gouvernementale forte de promotion des labels dans le domaine de la création. Nous ne demandons rien d’autre que la labellisation de musées un peu particuliers implantés en région. Cela permettrait de constituer une force indéniable en termes de promotion, tout en favorisant un travail scientifique de qualité. Il ne tient qu’au Gouvernement de définir, le cas échéant dans un décret, les critères d’attribution du label, notamment en termes de qualité du personnel scientifique.
Madame la ministre, je vous remercie de votre proposition. Je suis convaincu qu’il y a un travail de fond à réaliser, qui profitera à l’ensemble des musées de France.
On peut également envisager un système de contrats de dépôts compensatoires au bénéfice des musées qui prêteront des œuvres aux pôles nationaux de référence. Je le répète, il y a une véritable politique nationale de valorisation de nos collections à concevoir. J’espère que nous aurons l’occasion d’y travailler ensemble. Pour l’heure, je maintiens mon amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Eblé, pour explication de vote.
M. Vincent Eblé. Je voudrais appuyer la proposition de mon collègue Montaugé.
En ma qualité de rapporteur spécial de la commission des finances pour les crédits du ministère de la culture, j’ai eu l’occasion de constater, l’année dernière, une baisse très sensible des moyens de l’État mis à la disposition des établissements pour l’acquisition de nouvelles œuvres.
On nous avait alors expliqué qu’il s’agissait d’intensifier la circulation des œuvres. Nous sommes tout à fait d’accord avec cette orientation, mais encore faut-il que des outils soient disponibles pour la mettre en œuvre.
Le présent amendement va plus loin, puisqu’il prévoit un fléchage d’établissements ayant vocation, en raison de la richesse de leurs collections, à devenir chefs de file dans tel ou tel domaine artistique et à présenter au public des œuvres de grande qualité parfois enfouies, aujourd’hui, dans les réserves d’autres musées.
Au travers de la mise en place d’une telle labellisation, il s’agit d’inciter au regroupement des œuvres dans un certain nombre d’établissements pilotes.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 297 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 19 bis.
Chapitre II
Réformer le régime juridique des biens archéologiques et des instruments de la politique scientifique archéologique
Article 20
Le livre V du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° L’article L. 510-1 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « vestiges », il est inséré le mot : « , biens » ;
b) Après la première occurrence du mot : « humanité, », sont insérés les mots : « y compris le contexte dans lequel ils s’inscrivent, » ;
2° L’article L. 522-1 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Il est le garant de la qualité scientifique des opérations d’archéologie. » ;
b) À la fin de la seconde phrase, les mots : « les missions de contrôle et d’évaluation de ces opérations » sont remplacés par les mots : « le contrôle scientifique et technique et l’évaluation de ces opérations en lien avec les commissions interrégionales de la recherche archéologique » ;
c) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« Il est destinataire de l’ensemble des données scientifiques afférentes aux opérations archéologiques. » ;
2° bis À la deuxième phrase de l’article L. 522-2, les mots : « de vingt et un jours » sont remplacés par les mots : « d’un mois » ;
2° ter L’article L. 522-7 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces services contribuent à l’exploitation scientifique des opérations d’archéologie qu’ils réalisent et à la diffusion de leurs résultats et peuvent participer à l’exploitation scientifique des opérations d’archéologie réalisées sur le territoire de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales dont ils relèvent. » ;
2°quater (nouveau) L’article L. 522-5 est ainsi modifié :
a) Au second alinéa, après le mot : « définir », sont insérés les mots : « après enquête publique conduite par les autorités publiques compétentes, » ;
b) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« L’État recueille l’avis des maires des communes sur le territoire desquelles sont situés les projets de zones de présomption de prescriptions archéologiques et, le cas échéant, celui des présidents des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’urbanisme.
« Les zones de présomption de prescriptions archéologiques sont indiquées sur un ou plusieurs documents graphiques et annexées au plan local d’urbanisme ou au document d’urbanisme en tenant lieu, ou à la carte communale.
« Le certificat d’urbanisme prévu à l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme indique si le terrain est situé dans une zone de présomption de prescriptions archéologiques. » ;
3° L’article L. 522-8 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « agréés » est remplacé par le mot : « habilités » ;
b) Le second alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« L’habilitation est attribuée, à la demande de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales dont relève le service, après avis du Conseil national de la recherche archéologique, par arrêté des ministres chargés de la culture et de la recherche. Elle est délivrée au vu d’un dossier établissant la capacité scientifique et technique du service et son organisation administrative.
« L’habilitation pour réaliser des opérations de diagnostic et de fouilles archéologiques préventives est attribuée automatiquement aux services archéologiques des collectivités territoriales agréés à la date d’entrée en vigueur de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. » ;
c) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« L’habilitation peut être refusée, suspendue ou retirée par décision motivée, après avis du Conseil national de la recherche archéologique.
« Le service habilité transmet tous les cinq ans au ministre chargé de la culture un bilan scientifique et technique de son activité en matière d’archéologie préventive. » ;
3° bis A (nouveau) Le a de l’article L. 523-4 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La collectivité ou le groupement de collectivités fait connaître sa décision au représentant de l’État dans la région dans un délai de vingt et un jours à compter de la réception de la notification de prescription de diagnostic ; »
3° bis L’article L. 523-7 est ainsi modifié :
a) À la dernière phrase du premier alinéa, les références : « des troisième et quatrième alinéas » sont remplacées par la référence : « du troisième alinéa » ;
b) le deuxième alinéa est ainsi modifié :
– le début est ainsi rédigé : « Faute d’un accord entre les parties sur les modalités de l’établissement de la convention, ces délais… (le reste sans changement). » ;
– est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« Dans ce cas, lorsque l’État ne s’est pas prononcé dans un délai fixé par voie réglementaire, la prescription est réputée caduque. » ;
c) Le troisième alinéa est supprimé ;
3° ter Le premier alinéa de l’article L. 523-8 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) À la seconde phrase, les mots : « leur mise en œuvre » sont remplacés par les mots : « la mise en œuvre des opérations de fouilles terrestres et subaquatiques » ;
4° Après l’article L. 523-8, sont insérés des articles L. 523-8-1 et L. 523-8-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 523-8-1. – L’agrément pour la réalisation de fouilles prévu à l’article L. 523-8 est délivré par l’État pour cinq ans, après avis du Conseil national de la recherche archéologique, au vu d’un dossier établissant la capacité scientifique, technique et financière ainsi que l’organisation administrative du demandeur.
« L’agrément peut être refusé, suspendu ou retiré par décision motivée, après avis du Conseil national de la recherche archéologique.
« Art L. 523-8-2 (nouveau). – Les opérateurs agréés définis à l’article L. 523-8 assurent l’exploitation scientifique des opérations d’archéologie préventive et la diffusion de leurs résultats. Ils concourent à l’enseignement, à la diffusion culturelle et à la valorisation de l’archéologie.
« Pour l’exécution de leurs missions, l’ensemble des opérateurs agréés peuvent s’associer, par voie de convention, à d’autres personnes morales dotées de services de recherche archéologique. » ;
5° L’article L. 523-9 est ainsi rédigé :
« Art. L.523-9. – L’offre de la personne chargée de la réalisation de la fouille comporte le projet scientifique d’intervention et les conditions de sa mise en œuvre. Ce projet détermine les modalités de la réalisation de l’opération archéologique prescrite, les méthodes et techniques utilisées et les moyens humains et matériels prévus.
« L’offre précise la date prévisionnelle de début de l’opération de fouilles, sa durée et le prix de réalisation des fouilles, les conditions et délais de mise à disposition du terrain par la personne projetant d’exécuter les travaux et de l’intervention de la personne chargée de la réalisation de la fouille, les indemnités dues en cas de dépassement de ces délais et la date de remise du rapport final d’opération.
« Préalablement au choix de la personne chargée de la réalisation de la fouille par la personne projetant d’exécuter les travaux, celle-ci transmet le projet scientifique d’intervention de l’offre qu’elle a retenue à l’État qui procède à la vérification de sa conformité aux prescriptions de fouilles édictées en application de l’article L. 522-2.
« La mise en œuvre du contrat est subordonnée à la délivrance de l’autorisation de fouilles par l’État. » ;
5° bis Au deuxième alinéa de l’article L. 523-10, les mots : « visée au deuxième alinéa de l’article L. 523-9 » sont remplacés par les mots : « de fouilles par l’État » ;
5° ter L’article L. 523-11 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, la première occurrence des mots : « de fouilles » est supprimée et la seconde occurrence des mots : « de fouilles » est remplacée par les mots : « d’opération » ;
– après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque les opérations d’archéologie préventive sont réalisées sur le territoire d’une collectivité territoriale disposant d’un service archéologique, l’opérateur est tenu de remettre à la collectivité territoriale dont relève le service un exemplaire du rapport d’opération. » ;
– à la deuxième phrase, la seconde occurrence du mot : « ou » est remplacée par le signe : « , » et, après le mot : « supérieur », sont insérés les mots : « ou par les services de collectivités territoriales mentionnés à l’article L. 522-8 et par tout autre opérateur agréé mentionné à l’article L. 523-8 » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
6° Les articles L. 523-12, L. 523-14, L. 531-4, L. 531-5, L. 531-11, L. 531-16, L. 531-17 et L. 531-18 sont abrogés ;
6° bis Après le mot : « agrément, », la fin de l’article L. 523-13 est ainsi rédigée : « ou de son habilitation, la poursuite des opérations archéologiques inachevées est confiée à l’établissement public mentionné à l’article L. 523-1. Celui-ci élabore un projet scientifique d’intervention soumis à la validation de l’État.
« Un contrat conclu entre la personne projetant l’exécution des travaux et l’établissement public mentionné à l’article L. 523-1 fixe les délais de réalisation de l’opération.
« Les biens archéologiques mis au jour et la documentation scientifique sont remis à l’État, qui les confie à l’établissement public mentionné à l’article L. 523-1 afin qu’il en achève l’étude scientifique. » ;
6° ter Le premier alinéa de l’article L. 531-8 est supprimé ;
7° La division et l’intitulé de la section 4 du chapitre Ier du titre III sont supprimés ;
8° Le chapitre Ier du titre IV est ainsi rédigé :
« CHAPITRE IER
« Régime de propriété du patrimoine archéologique
« Section 1
« Biens archéologiques immobiliers
« Art. L. 541-1. – Les dispositions de l’article 552 du code civil relatives aux droits du propriétaire du sol ne sont pas applicables aux biens archéologiques immobiliers mis au jour à la suite d’opérations archéologiques ou de découvertes fortuites réalisées sur des terrains dont la propriété a été acquise après la promulgation de la loi n° 2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l’archéologie préventive. Ces biens archéologiques immobiliers appartiennent à l’État dès leur mise au jour à la suite d’opérations archéologiques ou en cas de découverte fortuite.
« L’État verse au propriétaire du fonds où est situé le bien une indemnité destinée à compenser le dommage qui peut lui être occasionné pour accéder audit bien. À défaut d’accord amiable sur le montant de l’indemnité, celle-ci est fixée par le juge judiciaire.
« Art. L. 541-2. – Lorsque les biens archéologiques immobiliers sont mis au jour sur des terrains dont la propriété a été acquise avant la promulgation de la loi n° 2001-44 du 17 janvier 2001 précitée, l’autorité administrative statue sur les mesures définitives à prendre à l’égard de ces biens. Elle peut, à cet effet, ouvrir pour ces biens une instance de classement en application de l’article L. 621-7.
« Art. L. 541-3. – Lorsque le bien est découvert fortuitement et qu’il donne lieu à une exploitation, la personne qui assure cette exploitation verse à l’inventeur une indemnité forfaitaire ou, à défaut, intéresse ce dernier au résultat de l’exploitation du bien. L’indemnité forfaitaire et l’intéressement sont calculés en relation avec l’intérêt archéologique de la découverte.
« Section 2
« Biens archéologiques mobiliers
« Sous-section 1
« Propriété
« Art. L. 541-4. – Les articles 552 et 716 du code civil ne sont pas applicables aux biens archéologiques mobiliers mis au jour à la suite d’opérations de fouilles archéologiques ou de découvertes fortuites réalisées sur des terrains dont la propriété a été acquise après la date d’entrée en vigueur de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. Ces biens archéologiques mobiliers sont présumés appartenir à l’État dès leur mise au jour au cours d’une opération archéologique et, en cas de découverte fortuite, à compter de la reconnaissance de l’intérêt scientifique justifiant leur conservation.
« Lors de la déclaration de la découverte fortuite qu’elle doit faire en application de l’article L. 531-14 du présent code, la personne déclarante est informée, par les services de l’État chargés de l’archéologie, de la procédure de reconnaissance de l’intérêt scientifique de l’objet susceptible d’être engagée. L’objet est placé sous la garde des services de l’État jusqu’à l’issue de la procédure.
« La reconnaissance de l’intérêt scientifique de l’objet est constatée par un acte de l’autorité administrative, pris sur avis d’une commission d’experts scientifiques. L’autorité administrative se prononce au plus tard cinq ans après la déclaration de la découverte fortuite. La reconnaissance de l’intérêt scientifique de l’objet emporte son appropriation publique. Cette appropriation peut être contestée pour défaut d’intérêt scientifique de l’objet devant le juge administratif dans les délais réglementaires courant à compter de l’acte de reconnaissance.
« Quel que soit le mode de découverte de l’objet, sa propriété publique, lorsqu’elle a été reconnue, peut être à tout moment contestée devant le juge judiciaire par la preuve d’un titre de propriété antérieur à la découverte.
« Art. L. 541-5. – Les biens archéologiques mobiliers mis au jour sur des terrains acquis avant la date d’entrée en vigueur de la loi n° … du … précitée sont confiés, dans l’intérêt public, aux services de l’État chargés de l’archéologie pendant le délai nécessaire à leur étude scientifique, dont le terme ne peut excéder cinq ans.
« L’État notifie leurs droits au propriétaire du terrain et, en cas de découverte fortuite, à l’inventeur. Si, à l’issue d’un délai d’un an à compter de cette notification, le propriétaire et, en cas de découverte fortuite, l’inventeur n’ont pas fait valoir leurs droits, une nouvelle notification leur est adressée dans les mêmes formes.
« Si, à l’issue d’un délai d’un an à compter de cette nouvelle notification, le propriétaire et, en cas de découverte fortuite, l’inventeur n’ont pas fait valoir leurs droits, la propriété des biens archéologiques mobiliers mis au jour est transférée à titre gratuit à l’État.
« Chacune des notifications adressées au propriétaire et, le cas échéant, à l’inventeur comporte la mention du délai dont il dispose pour faire valoir ses droits et précise les conséquences juridiques qui s’attachent à son inaction dans ce délai.
« Lorsque seul l’un des deux a fait valoir ses droits, les biens archéologiques mobiliers sont partagés entre l’État et celui-ci, selon les règles de droit commun.
« Les biens qui sont restitués à leur propriétaire à l’issue de leur étude scientifique peuvent faire l’objet de prescriptions destinées à assurer leur bonne conservation et leur accès par les services de l’État. Les sujétions anormales qui peuvent en résulter sont compensées par une indemnité. À défaut d’accord amiable, l’action en indemnité est portée devant le juge judiciaire.
« Sous-section 2
« Ensemble archéologique mobilier et aliénation des biens mobiliers
« Art. L. 541-6. – Lorsque les biens archéologiques mobiliers mis au jour constituent un ensemble cohérent dont l’intérêt scientifique justifie la conservation dans son intégrité, l’autorité administrative reconnaît celui-ci comme tel. Cette reconnaissance est notifiée au propriétaire.
« Toute aliénation à titre onéreux ou gratuit d’un bien archéologique mobilier ou d’un ensemble n’appartenant pas à l’État reconnu comme cohérent sur le plan scientifique en application du premier alinéa, ainsi que toute division par lot ou pièce d’un tel ensemble, est soumise à déclaration préalable auprès des services de l’État chargés de l’archéologie.
« Section 3
« Transfert et droit de revendication
« Art. L. 541-7. – L’État peut transférer à titre gratuit la propriété des biens archéologiques mobiliers lui appartenant à toute personne publique qui s’engage à en assurer la conservation et l’accessibilité sous le contrôle scientifique et technique des services chargés de l’archéologie.
« Art. L. 541-8. – L’État peut revendiquer, dans l’intérêt public, pour son propre compte ou pour le compte de toute personne publique qui en fait la demande, la propriété des biens archéologiques mobiliers, moyennant une indemnité fixée à l’amiable ou à dire d’expert désigné conjointement.
« À défaut d’accord sur la désignation de l’expert, celui-ci est nommé par le juge judiciaire.
« À défaut d’accord sur le montant de l’indemnité, celle-ci est fixée par le juge judiciaire.
« Art. L. 541-9. – Les modalités d’application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d’État. »
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Avant que nous abordions l’examen de cet article, je souhaiterais rappeler l’ambition du Gouvernement en matière d’archéologie préventive.
Avant d’être un secteur économique dont les conditions d’organisation suscitent maintes discussions, l’archéologie préventive est une politique scientifique ancrée dans les territoires.
Je regretterais que la majorité sénatoriale défasse le dispositif que l’Assemblée nationale a adopté en première lecture. À l’issue d’un débat constructif entre majorité et opposition, les députés ont cherché à apporter des réponses pragmatiques aux dysfonctionnements que nous constatons tous.
Le Gouvernement avait souhaité que le débat parlementaire soit éclairé en amont et nourri au préalable par une mission parlementaire confiée à la députée Martine Faure, qui a remis un rapport intitulé : « Pour une politique publique équilibrée de l’archéologie préventive ».
L’Assemblée nationale dans son ensemble a salué la qualité de ce rapport. Je n’approuve pas le texte issu des travaux de votre commission, même si je note avec satisfaction des points de convergence, notamment sur la présomption de propriété publique des biens mobiliers et immobiliers archéologiques.
Je rappellerai tout d’abord que ce projet de loi renforce la reconnaissance du rôle des collectivités territoriales en matière d’archéologie, les faisant passer d’un dispositif d’agrément limité dans le temps à un dispositif d’habilitation pérenne. Il consacre aussi au niveau législatif leur compétence en matière d’exploitation des données scientifiques. Il s’agit là, me semble-t-il, d’une avancée importante dans le partenariat entre l’État et les collectivités territoriales en matière culturelle.
Pour autant, je défends l’idée que le rôle de l’État doit être renforcé, position que vous soutenez d’ailleurs en matière d’espaces protégés, mesdames, messieurs les sénateurs.
Ce ne serait pas faire honneur à l’archéologie préventive, qui est pourtant au fondement de la connaissance de ce que nous sommes, de ce qu’est l’histoire de notre nation, que de ne la considérer que sous l’angle d’une activité économique concurrentielle de droit commun. Il faut tenir compte de ses spécificités et de son rôle dans la connaissance de notre patrimoine.
Je rappellerai, à titre d’exemple, la découverte exceptionnelle qu’a permise une opération d’archéologie préventive menée à Lavau – dans une région qui doit être chère à votre cœur, madame la rapporteur –, sur un terrain destiné à accueillir une zone commerciale. Cette fouille, menée par l’INRAP, l’Institut national de recherches archéologiques préventives, a permis de mettre au jour une nécropole, active entre 1300 avant Jésus-Christ et 300 après Jésus-Christ : il s’agit de la fameuse « tombe à char », dont nous gardons tous les images en tête, parfaitement bien conservée, contenant notamment un très beau chaudron en bronze.
Cette découverte a suscité l’intérêt du monde entier et constitue désormais un élément important du patrimoine de l’humanité tout entière. Les élus concernés, parmi lesquels votre collègue sénateur de l’Aube et président de l’Association des maires de France,…
M. Roger Karoutchi. François Baroin !
Mme Audrey Azoulay, ministre. … dont la commune a vocation à recevoir ces vestiges fabuleux, savent bien l’importance de ceux-ci pour la notoriété de leur territoire, qui accueillera de nombreux visiteurs souhaitant découvrir ce patrimoine exceptionnel.
En matière d’archéologie préventive, ce projet de loi n’est ni contre les entreprises privées d’archéologie ni contre les archéologues qui en sont salariés. Il ne constitue pas non plus une défense sans nuances d’un système qui a été ouvert à la concurrence et qu’il nous faut simplement mieux réguler et mieux adapter.
Il ne faudrait pas non plus caricaturer l’archéologie préventive, comme on le fait trop souvent en la présentant comme une source de délais, de pertes de temps : les délais de fouilles sont encadrés et les retards ont bien souvent une tout autre cause que l’archéologie préventive.
Lors de la discussion générale, Mme Estrosi Sassone a mis en cause le principe même de la politique d’archéologie préventive, et en particulier l’INRAP. Sur ce sujet, je souhaiterais apporter quelques précisions à la Haute Assemblée.
Concernant l’opération évoquée par votre collègue, le diagnostic a été réalisé par le service archéologique de la ville de Nice, cela en deux fois, car l’aménageur n’avait pas pris la peine de libérer tous les terrains, encore encombrés par la présence d’une ancienne entreprise de casse automobile.
La prescription de fouille qui a ensuite été émise a été confiée par l’office public de l’habitat présidé par Mme Estrosi Sassone à une entreprise privée agréée, France archéologie, qui s’est retirée du marché des fouilles en 2013.
Enfin, le dossier de fouille a été déposé au mois d’octobre 2011. La fouille a été réalisée au début de 2012 et, dès la fin de la du mois de février de la même année, donc très rapidement, l’État validait la libération du terrain au profit de l’aménageur.
Nous sommes donc loin du tableau apocalyptique lié à de prétendus délais abusifs de l’INRAP qui a été dressé par votre collègue. L’INRAP n’a pas grand-chose à voir avec ce dossier, qui a été traité par des opérateurs départementaux et privés.
Pour autant, des problèmes existent dans le secteur de l’archéologie préventive. C’est pourquoi le rapport de Mme Faure évoque la nécessité de mettre en place un dispositif encadré par l’action de l’État, dans lequel les règles seraient claires et la concurrence équitable.
La Cour des comptes, dans son dernier rapport public, rappelle que « les dispositions incluses dans le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine voté par l’Assemblée nationale, notamment celle qui prévoit de renforcer les conditions d’agrément des opérateurs privés, vont dans la bonne direction » et appelle l’État à « mieux réguler le secteur ». Elle n’adresse pas que des compliments à l’INRAP et à l’État, mais elle donne une orientation.
Dans le même temps, il faut demander à l’opérateur public de poursuivre ses efforts de modernisation, dans un cadre qui doit être équitable et clair. Cette modernisation a été engagée, mais elle n’est pas encore achevée.
Ce sont ces principes que l’Assemblée nationale, dans un certain consensus, a bien voulu promouvoir avec le Gouvernement. C’est pour toutes ces raisons que le Gouvernement a déposé, à l’article 20, un amendement que je défendrai dans quelques instants.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je voudrais exposer la position de la commission de la culture sur ce sujet particulièrement sensible, en insistant sur le fait que nous l’avons abordé sans a priori, en organisant de nombreuses auditions et en partageant nos expériences personnelles.
Oui, madame la ministre, nous sommes pour une archéologie préventive de qualité, mais nous refusons l’opposition archaïque entre des acteurs publics qui seraient dotés de toutes les vertus et des acteurs privés qui agiraient au mépris de la qualité des opérations de fouilles.
Oui, nous défendons l’ouverture à la concurrence du secteur de l’archéologie préventive opérée par la loi de 2003. Ceux qui regretteraient le temps béni où l’INRAP se trouvait en situation de monopole n’ont sans doute jamais eu à faire faire des travaux de fouilles à cette époque !
Oui, l’État dispose déjà de moyens suffisants pour s’assurer de la qualité des opérateurs et des opérations de fouilles.
Les opérateurs autres que l’INRAP sont soumis à un agrément qui doit être renouvelé tous les cinq ans et qui peut être retiré à tout moment. Croyez-vous sincèrement qu’ils ont intérêt à faire du mauvais travail ?
Quant à l’aménageur, s’il choisit un projet qui ne respecte pas les prescriptions posées par l’État, il n’obtiendra pas d’autorisation de fouilles, ce qui est très bien. Enfin, les services régionaux d’archéologie ont un pouvoir de contrôle sur place, qui peut aboutir au retrait de l’autorisation.
Pourquoi l’Assemblée nationale a-t-elle donc complètement modifié la rédaction initiale du projet de loi, qui nous satisfaisait globalement, au point de remettre en cause l’équilibre de la loi de 2003 ? Est-ce à dire que, compte tenu des déboires financiers de l’INRAP, la priorité a changé ? Il faut sauver le soldat INRAP, comme l’indiquait, en langage certes plus administratif, la lettre de mission adressée à la députée Martine Faure, même s’il faut pour cela permettre à l’État d’assurer – je cite Mme Faure – « une véritable mission de régulation économique du secteur ».
Or, je le dis sans aucun esprit polémique, nous ne pouvons accepter une telle situation.
Tout d’abord, le problème me semble être pris à l’envers. Entre 2004 et 2014, le budget de l’INRAP a crû de 66 %, ses effectifs ont augmenté de 16,5 %, et même de 33 % si l’on ne prend en compte que les contrats à durée indéterminée, alors que, parallèlement, le nombre des diagnostics et des fouilles effectués par l’INRAP diminuait respectivement de 41 % et de 52 %. Dans le même temps, les subventions exceptionnelles du ministère de la culture, accordées au-delà du budget initial, se sont élevées à 168,3 millions d’euros ! Le mauvais rendement de la redevance d’archéologie préventive a certes sa part de responsabilité dans la situation, mais, comme le rappelle la Cour des comptes, ce sont également les lourds problèmes en matière de gestion des ressources humaines et de gouvernance qui sont à l’origine de celle-ci.
Or, plutôt que de s’attaquer à une réforme structurelle de l’INRAP, le Gouvernement préfère s’en prendre aux services archéologiques des collectivités territoriales et aux opérateurs agréés, en réduisant le champ de leur activité, en multipliant les tracasseries administratives, voire en essayant d’orienter le choix des aménageurs, à qui on dénie toute capacité d’analyse et tout sens des responsabilités. Le plus grave, c’est que, à vouloir défendre l’INRAP à tout prix, l’État court le risque de voir son impartialité mise en doute dans le cadre de l’exercice ses missions régaliennes.
M. Yves Détraigne. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Comme l’a dit Mme la ministre, l’archéologie préventive est au fondement de la connaissance de ce que nous sommes.
Notre groupe défendra un certain nombre d’amendements visant à revenir sur les changements apportés au texte par la majorité sénatoriale en commission.
Nous reconnaissons au chapitre II de ce projet de loi deux mérites : la reconnaissance du rôle des services d’archéologie préventive des collectivités territoriales et leur distinction des opérateurs privés, d’une part ; une très timide tentative de revenir sur le désengagement global de l’État, d’autre part.
C’est sur ce dernier point que nous sommes le plus inquiets. Du monopole de l’INRAP avant 2003, on est passé au « tout-concurrence ». Avec ce projet de loi, le Gouvernement, en voulant faire plaisir à tout le monde, ne satisfait personne. Bien entendu, la brèche laissée ouverte a été parfaitement exploitée par la majorité sénatoriale.
Exit donc le monopole de l’INRAP sur les fouilles subaquatiques dans le domaine public, exit l’interdiction de la sous-traitance pour les fouilles accordées intuitu personae, exit la maîtrise d’ouvrage scientifique de l’État ; bienvenue, en revanche, à la mise en concurrence des services d’archéologie préventive des collectivités territoriales, bienvenue aux mesures favorisant indirectement un certain dumping social.
Mon discours pourra vous paraître dur, mais les dangers qui menacent notre patrimoine sont grands. Le groupe CRC a donc fait le choix de défendre une série d’amendements tendant à réaffirmer sa volonté de voir l’État prendre ses responsabilités en matière d’archéologie préventive, en assurant, a minima, la maîtrise d’ouvrage scientifique et la maîtrise d’ouvrage lorsque des opérations de fouilles sont financées majoritairement par le fonds national dédié.
Nous revendiquons aussi un contrôle de l’État sur les opérateurs privés, que ce soit en matière sociale, technique ou financière. Il s’agit tout de même d’assurer la préservation de biens communs de la nation. Il s’agit aussi de se prémunir, dans la mesure où l’INRAP se retrouve dans l’obligation de prendre le relais en cas de défaillance d’un opérateur privé. On demande donc à l’État de laisser faire le marché, mais on prévoit tout de même un filet de sécurité au cas où…
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, sur l'article.
Mme Marie-Pierre Monier. Nous abordons l’examen de l’un des articles du projet de loi qui donnent lieu à des prises de position antagonistes et à des débats particulièrement vifs.
Le cadre juridique de l’archéologie préventive s’est bâti sur les lois de 2001 et de 2003. Quinze ans plus tard, il paraît opportun de l’évaluer et d’y apporter les corrections nécessaires.
En outre, comme l’a souligné de nouveau le dernier rapport public de la Cour des comptes, plusieurs mesures d’ajustement doivent être mises en œuvre rapidement afin de mieux réguler le secteur de l’archéologie préventive.
En effet, comme le relève le Livre blanc de l’archéologie préventive et le confirme le rapport de Martine Faure, la loi de 2003 a conduit à une concurrence non régulée, au détriment de la qualité scientifique, provoquant de profonds dysfonctionnements concurrentiels du secteur.
Les auditions auxquelles nous avons procédé nous ont montré à quel point la demande était forte que l’État garantisse la qualité scientifique des opérations.
Plusieurs points nous paraissent fondamentaux dans ce texte, en premier lieu la réaffirmation du rôle essentiel de régulation que doit jouer l’État au moyen de sa maîtrise d’ouvrage scientifique des opérations de fouilles.
Parallèlement, nous devons veiller à ce que l’INRAP soit parfaitement en mesure de remplir les missions de service public dont il est investi. Ces deux sujets ne manqueront pas d’être discutés lors de l’examen des amendements.
La loi doit également reconnaître et consacrer le rôle particulier que jouent les collectivités territoriales dans la politique publique d’archéologie, et favoriser la simplification des démarches administratives pour ces collectivités, afin d’améliorer la coopération des acteurs publics. Nous y reviendrons.
Le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale intégrait ces éléments et redonnait à l’État et au service public de l’archéologie préventive des outils pour assumer leurs missions et réduire les déséquilibres du secteur dénoncés par la plupart des acteurs. Mais, par le biais d’amendements adoptés en commission, notre rapporteur a souhaité revenir sur les avancées majeures apportées par cette partie du texte en matière de régulation, ce qui dénature ce dernier.
Le point le plus marquant est sans doute la suppression de la maîtrise d’ouvrage scientifique de l’État sur les opérations de fouilles. Or il faut rappeler que l’archéologie préventive est un bien commun, dont les enjeux s’expriment en termes de préservation du patrimoine, certes, mais également de contribution à la connaissance de l’histoire de nos sociétés.
Pour nous, en matière d’archéologie, l’intérêt général scientifique et culturel doit primer sur les questions de coût ou de foncier.
Mme la présidente. L'amendement n° 480, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 6 à 10
Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :
a) La seconde phrase est supprimée ;
b) Sont ajoutés six alinéas ainsi rédigés :
« Il veille à la cohérence et au bon fonctionnement du service public de l’archéologie préventive dans ses dimensions scientifique, économique et financière, notamment dans le cadre des missions prévues à l’article L. 523-8-1.
« Il exerce la maîtrise d’ouvrage scientifique des opérations d’archéologie préventive et, à ce titre :
« 1° Prescrit les mesures visant à la détection, à la conservation ou à la sauvegarde par l’étude scientifique du patrimoine archéologique ;
« 2° Désigne le responsable scientifique de toute opération ;
« 3° Assure le contrôle scientifique et technique et évalue ces opérations ;
« 4° Est destinataire de l’ensemble des données scientifiques afférentes aux opérations. » ;
II. – Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
notamment dans le cadre de la convention prévue à l’article L. 522-8
III. – Alinéas 14 à 19
Supprimer ces alinéas.
IV. – Alinéas 22 à 24
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
b) Le second alinéa est ainsi rédigé :
« L’habilitation est attribuée, à la demande de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales dont relève le service, par arrêté des ministres chargés de la culture et de la recherche. Elle est délivrée au vu d’un dossier établissant la capacité administrative, scientifique et technique du service. Ce dossier contient un projet de convention avec l’État fixant les modalités de leur participation à l’exploitation scientifique des opérations d’archéologie préventive. Elle est valable sur le territoire de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales demandeur. » ;
V. – Alinéa 26
Supprimer les mots :
, après avis du Conseil national de la recherche archéologique
VI. – Alinéas 28 et 29
Supprimer ces alinéas.
VII. – Alinéa 33
Supprimer cet alinéa.
VIII. – Alinéa 38
Rétablir le a) dans la rédaction suivante :
« a) À la première phrase, les mots : « La réalisation » sont remplacés par les mots : « L’État assure la maîtrise d’ouvrage scientifique » et, après la référence : « L. 522-1 », sont insérés les mots : «. Leur réalisation » ;
IX. – Après l’alinéa 39
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
c) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« Les opérations de fouilles sous-marines intervenant sur le domaine public maritime et la zone contiguë définie à l’article L. 532-12 sont confiées à l’établissement public mentionné à l’article L. 523-1. » ;
X. – Alinéas 41 à 44
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 523-8-1. – L’agrément pour la réalisation de fouilles prévu à l’article L. 523-8 est délivré par l’État, après avis du Conseil national de la recherche archéologique, pour une durée fixée par voie réglementaire, au vu d’un dossier établissant la capacité scientifique, administrative, technique et financière du demandeur et son respect d’exigences en matière sociale, financière et comptable.
« L’agrément peut être refusé, suspendu ou retiré par décision motivée.
« La personne agréée transmet chaque année à l’autorité compétente de l’État un bilan scientifique, administratif, social, technique et financier de son activité en matière d’archéologie préventive. » ;
XI. – Alinéas 45 à 49
Remplacer ces alinéas par quinze alinéas ainsi rédigés :
5° L’article L. 523-9 est ainsi modifié :
a) Au début, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu’une prescription de fouilles est notifiée à la personne qui projette d’exécuter les travaux, celle-ci sollicite les offres d’un ou de plusieurs des opérateurs mentionnés à l’article L. 523-8.
« Les éléments constitutifs des offres des opérateurs sont définis par arrêté du ministre chargé de la culture. Ils comportent notamment un projet scientifique d’intervention, le prix proposé et une description détaillée des moyens humains et techniques mis en œuvre.
« Préalablement au choix de l’opérateur par la personne qui projette d’exécuter les travaux, celle-ci transmet à l’État l’ensemble des offres reçues. L’État procède à la vérification de leur conformité aux prescriptions de fouilles édictées en application de l’article L. 522-2, note le volet scientifique et s’assure de l’adéquation entre les projets et les moyens prévus par l’opérateur. » ;
b) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– après le mot : « prix », sont insérés les mots : « , les moyens techniques et humains mis en œuvre » ;
– sont ajoutés deux phrases ainsi rédigées :
« Le projet scientifique d’intervention en est une partie intégrante. La mise en œuvre du contrat est subordonnée à la délivrance de l’autorisation de fouilles par l’État. » ;
c) Le deuxième alinéa est supprimé ;
d) Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« L’État s’assure que les conditions d’emploi du responsable scientifique de l’opération sont compatibles avec la réalisation de l’opération jusqu’à la remise du rapport de fouilles.
« La prestation qui fait l’objet du contrat ne peut être sous-traitée. Elle est exécutée sous l’autorité des personnels scientifiques dont les compétences ont justifié l’agrément de l’opérateur. » ;
e) À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « quatrième » et le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;
f) À la première phrase du dernier alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;
XII. – Alinéas 54 et 55
Supprimer ces alinéas.
XIII. – Alinéa 56
Supprimer les mots :
et par tout autre opérateur agréé mentionné à l’article L. 523-8
XIV. – Alinéa 57
Rédiger ainsi cet alinéa :
b) Au dernier alinéa, les mots : « afférente à l’opération » sont remplacés par les mots : « , constituée de l’ensemble des données scientifiques afférentes à l’opération, » ;
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement vise à rétablir les dispositions votées à l’Assemblée nationale.
Il rappelle l’attachement du Gouvernement aux principes suivants : premièrement, l’affirmation et le renforcement du rôle de l’État comme garant de la qualité scientifique et du bon fonctionnement du service public de l’archéologie préventive ; deuxièmement, l’affirmation de sa mission de régulation du marché de l’archéologie préventive –le laisser-faire en la matière étant incompatible avec les enjeux, l’État doit veiller au bon équilibre du secteur pour favoriser la qualité scientifique des fouilles ; troisièmement, la reconnaissance du rôle particulier des collectivités territoriales et de leurs services, avec la procédure d’habilitation pérenne et la convention passée avec l’État ; quatrièmement, le renforcement du contrôle des opérateurs, y compris dans la dimension financière, pour limiter les risques de faillites.
L’agrément ne devra être délivré qu’à des opérateurs qui respectent leurs obligations légales, ce qui n’a, hélas ! pas toujours été le cas dans le passé… Un dispositif d’évaluation préalable des offres des opérateurs sera mis en œuvre, afin de garantir à la fois la qualité scientifique des opérations et la sécurité juridique des aménageurs. L’évaluation des offres s’effectuera donc plus en amont, pour rendre la procédure plus sûre et plus rapide.
L’amendement affirme aussi le monopole de l’opérateur public dans le cas bien particulier de la réalisation des opérations sous-marines, pour des raisons à la fois opérationnelles et scientifiques que nous pouvons tous comprendre, puisque l’intervention archéologique sur le domaine public maritime induit le respect de règles dont l’État est le garant.
Pour toutes ces raisons qui ne sont en rien idéologiques, mais traduisent simplement une volonté profonde de mener au mieux cette importante et belle politique patrimoniale, j’invite la Haute Assemblée à adopter cet amendement. Il s’agit non pas de défendre le soldat INRAP, mais de pouvoir s’appuyer sur une politique d’archéologie préventive pérenne et au service de tous.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je n’entrerai pas, à ce stade, dans un long développement sur ce dispositif. L’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 480.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 153 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 154 |
Contre | 187 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 135 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 10
Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :
a) La seconde phrase est supprimée ;
b) Sont ajoutés six alinéas ainsi rédigés :
« Il veille à la cohérence et au bon fonctionnement du service public de l’archéologie préventive dans ses dimensions scientifique, économique et financière, notamment dans le cadre des missions prévues à l’article L. 523-8-1.
« Il exerce la maîtrise d’ouvrage scientifique des opérations d’archéologie préventive et, à ce titre :
« 1° Prescrit les mesures visant à la détection, à la conservation ou à la sauvegarde par l’étude scientifique du patrimoine archéologique ;
« 2° Désigne le responsable scientifique de toute opération ;
« 3° Assure le contrôle scientifique et technique et évalue ces opérations ;
« 4° Est destinataire de l’ensemble des données scientifiques afférentes aux opérations. » ;
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement tend à revenir au texte adopté par l’Assemblée nationale, qui prévoyait un dispositif cohérent dans lequel l’État était le garant non seulement de la qualité scientifique de l’ensemble des opérations d’archéologie préventive, mais aussi du bon fonctionnement et de la cohérence de l’ensemble du service public de l’archéologie préventive.
Il nous semble important d’octroyer à l’État la maîtrise d’ouvrage sur l’ensemble des opérations de diagnostic et de fouilles et qu’à ce titre il puisse prescrire et contrôler toute donnée scientifique afférente aux opérations.
Je rappelle que le Conseil constitutionnel a estimé, dans sa décision du 31 juillet 2003, que la loi de 2003 préservait l’intérêt général, dans la mesure où l’État restait prescripteur, que l’opérateur public conservait l’exclusivité de l’exploitation des résultats et que les opérations de fouilles ne pouvaient s’effectuer qu’après agrément des sociétés chargées de celles-ci.
Il y a bel et bien deux conceptions de l’archéologie préventive qui s’affrontent : d’une part, celle issue de la loi de 2001, qui a créé l’INRAP, établissement public doté d’une mission de service public en matière d’archéologie préventive, et fait primer l’intérêt général ; d’autre part, celle issue de la réforme de 2003, qui a procédé à une libéralisation de l’archéologie préventive et ouvert le marché des fouilles aux sociétés privées.
Dans un tel contexte, la recherche du « moins-disant » prévaut parfois sur la qualité scientifique.
Mme la présidente. L'amendement n° 262, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 8 à 10
Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :
b) La seconde phrase est supprimée ;
c) Sont ajoutés six alinéas ainsi rédigés :
« Il veille à la cohérence et au bon fonctionnement du service public de l'archéologie préventive dans ses dimensions scientifique, économique et financière, notamment dans le cadre des missions prévues à l'article L. 523-8-1.
« Il exerce la maîtrise d'ouvrage scientifique des opérations d'archéologie préventive et, à ce titre :
« 1° Prescrit les mesures visant à la détection, à la conservation ou à la sauvegarde par l'étude scientifique du patrimoine archéologique ;
« 2° Désigne le responsable scientifique de toute opération ;
« 3° Assure le contrôle scientifique et technique et évalue ces opérations ;
« 4° Est destinataire de l'ensemble des données scientifiques afférentes aux opérations. » ;
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise à réintroduire, au sein de l’article 20, l’affirmation du rôle de l’État en tant que garant scientifique du service public de l’archéologie préventive. Cette disposition, initialement inscrite dans le texte, va en effet dans le bon sens.
Il est prévu que l’État, en tant que maître d’œuvre scientifique, soit une force de prescription et de contrôle scientifique et technique des opérations.
Le choix de supprimer ces dispositions opéré en commission se conformait au principe aménageur-payeur-décideur, qui met en question les visées mêmes de l’archéologie préventive. À cet égard, il est dommage que la conception de notre collègue député Patrick Bloche – celle de biens communs de la nation – n’ait été reprise ni dans le texte de l’Assemblée nationale ni dans celui de la commission, car elle résume à elle seule l’intérêt d’une maîtrise d’ouvrage scientifique de l’État.
Les biens archéologiques, en tant que biens communs de la Nation, participent de la construction de la mémoire nationale. Dans ce cadre, la démarche consistant à les dévoiler, à les expliquer et à les présenter au public, autrement dit l’archéologie préventive, relève clairement de l’intérêt général. Qui d’autre que l’État peut être le garant de la construction de la mémoire nationale ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Si ces deux amendements étaient adoptés, l’État ne serait plus simplement le garant de la qualité scientifique des opérations archéologiques : il aurait vocation à influencer les dimensions économique et financière du service public de l’archéologie préventive, afin d’assurer sa cohérence et son bon fonctionnement.
La commission s’est interrogée sur ces dispositions ; elle les a jugées un peu vagues, et aussi susceptibles de justifier un interventionnisme exagéré de la part de l’État, qui est déjà soupçonné de partialité. N’oublions pas, en effet, que celui-ci a une position délicate en tant que responsable des prescriptions de fouilles et de la qualité scientifique des opérations d’archéologie. Son attitude à l’égard de l’ensemble des opérateurs doit être neutre, mais, en tant que tutelle de l’INRAP, sa position est forcément influencée par les tensions à la fois sociales et financières que connaît cet établissement public administratif.
C’est aussi pour ces raisons que la commission a rejeté la disposition que reprennent les amendements nos 135 rectifié et 162, visant à faire en sorte que l’État assure la maîtrise d’ouvrage scientifique. Vous l’avez compris, elle soulève des interrogations juridiques, notamment en termes de responsabilité. Son adoption créerait un mélange des genres, qui pourrait mettre l’État en porte-à-faux.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je ne peux que souscrire au rétablissement du texte de l’Assemblée nationale en ce qui concerne le rôle de l’État comme garant du bon fonctionnement du service public de l’archéologie préventive.
Il est indispensable de rappeler les fondements du rôle de l’État dans la conduite de cette politique publique, notamment sur le plan scientifique. On l’a dit, la Cour des comptes elle-même appelle l’État à mieux jouer son rôle en la matière.
Comme vous le savez, je suis très attachée à l’équilibre du texte tel qu’il a été établi par l’Assemblée nationale et je remercie les auteurs de ces amendements permettant de préciser le rôle de l’État, résumé par la formule « maîtrise d’ouvrage scientifique », qui me paraît tout à fait pertinente.
L’avis est donc favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.
M. Philippe Bonnecarrère. J’ai souvent travaillé avec les services publics de l’archéologie et je dois dire que j’ai toujours eu à me louer à la fois de la qualité du travail de l’INRAP et des délais. Mon opinion au sujet de cet établissement est donc un peu plus nuancée que celle de Mme la rapporteur.
Cela étant dit, comme en toute chose, il faut trouver un équilibre.
L’amendement du Gouvernement conduisait, par exemple, à ce que les services de l’État notent le volet scientifique et s’assurent de l’adéquation entre les projets et les moyens prévus par l’opérateur dans le cadre d’un appel d’offres ouvert par des collectivités locales. Sur ce sujet, la rédaction de l’Assemblée nationale me paraît relever d’une complète illégalité !
J’ai écouté avec attention les observations de Mme Monier, qui a fait référence à une décision du Conseil constitutionnel. Or, à l’évidence, ma chère collègue, cette décision ne vous permet pas de prévoir, comme vous le faites dans votre amendement, que l’État « exerce la maîtrise d’ouvrage scientifique des opérations d’archéologie préventive ». Vous nous avez en effet rappelé la décision du Conseil constitutionnel qui a validé la disposition faisant que les services de l’État sont prescripteurs. Or le prescripteur est forcément extérieur à la convention et ne peut pas revendiquer la maîtrise d’ouvrage scientifique !
Cela m’amène à soutenir résolument la position de Mme le rapporteur, qui est la seule susceptible de respecter la règle de droit en cette matière.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Les arguments qui ont été opposés à ces deux amendements par Mme la rapporteur sont tout à fait éloquents : ils démontrent que la préservation du bien commun l’intéresse en vérité fort peu ! L’invocation de la partialité supposée de l’État prouve que la seule chose qui préoccupe vraiment ceux qui veulent défaire l’article 20 tel qu’adopté à l’Assemblée nationale, c’est non pas l’intérêt public et l’intérêt patrimonial de l’État, mais la défense d’une logique de marché.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 135 rectifié.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 154 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 154 |
Contre | 187 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 262.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 155 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 154 |
Contre | 187 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 263, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
, notamment dans le cadre de la convention prévue à l’article L. 522-1
II. – Alinéas 22 à 24
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
b) Le second alinéa est ainsi rédigé :
« L'habilitation est attribuée, à la demande de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales dont relève le service, par arrêté des ministres chargés de la culture et de la recherche. Elle est délivrée au vu d'un dossier établissant la capacité administrative, scientifique et technique du service. Ce dossier contient un projet de convention avec l'État fixant les modalités de leur participation à l'exploitation scientifique des opérations d'archéologie préventive. Elle est valable sur le territoire de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales demandeur. » ;
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il est bon de constater – c’est l’un des points positifs des mesures proposées par le Gouvernement – qu’une différentiation est effectuée entre services des collectivités territoriales et opérateurs privés, marquée par la distinction entre une habilitation et un agrément.
Si le fondement même de cette différentiation n’a pas été remis en cause, la majorité sénatoriale a fait le choix de supprimer la disposition prévoyant que la demande d’habilitation des services archéologiques des collectivités territoriales soit fondée sur un projet de convention entre l’État et ledit service d’archéologie préventive. Un tel document est pour nous essentiel, l’État étant le garant de la préservation des données récoltées. Le projet de convention ouvrirait aux services locaux la participation à l’exploitation scientifique des données, tout en assurant le rôle de l’État.
Si la fonction publique territoriale ne possède pas de corps de recherche en son sein, lui refuser de participer à l’exploitation scientifique des opérations d’archéologie préventive revient peu ou prou à nier ses compétences scientifiques. À l’inverse, il serait tout aussi malvenu de lui confier l’exploitation globale des données scientifiques, pour des raisons tant techniques que politiques.
Techniquement, tous les services locaux n’ont pas les compétences scientifiques pour exploiter les données. Politiquement, les résultats des fouilles archéologiques étant des biens communs de la nation, il est essentiel d’assurer à l’État une mission d’exploitation des opérations d’archéologie préventive.
Par ailleurs, la suppression de la délimitation territoriale de l’habilitation des services est un autre problème. Elle permettait à chaque service d’avoir une compétence pleine et entière sur le territoire de sa collectivité sans empêcher des partenariats entre services, lesquels, je le signale, existent déjà.
Ce que la majorité sénatoriale propose aujourd’hui, c’est une mise en concurrence entre les services archéologiques des collectivités territoriales, au mépris du principe de territorialité de leurs compétences.
Cet amendement tend donc à rétablir, à l’article 20, le projet de conventionnement entre l’État et les collectivités territoriales, ainsi que la délimitation territoriale de l’habilitation à exercer des fouilles archéologiques.
Mme la présidente. L'amendement n° 137 rectifié, présenté par MM. Assouline et D. Bailly, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 23 et 24
Rédiger ainsi ces alinéas :
« L’habilitation est attribuée, à la demande de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales dont relève le service, par arrêté des ministres chargés de la culture et de la recherche. Elle est délivrée au vu d’un dossier établissant la capacité administrative, scientifique et technique du service. Ce dossier contient un projet de convention avec l’État fixant les modalités de leur participation à l’exploitation scientifique des opérations d’archéologie préventive.
« Un décret en conseil d’État fixe les conditions dans lesquelles les services des collectivités territoriales agréés à la date d’entrée en vigueur de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, sont dispensés de l’habilitation prévue à l’alinéa précédent. » ;
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement vise à revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale. Il s’agit de prévoir pour les services d’archéologie des collectivités une procédure d’habilitation à réaliser des projets d’archéologie préventive beaucoup plus sécurisante que celle qui est envisagée par notre rapporteur.
L’existence d’une convention est à cet égard primordiale. Elle permettra en particulier de fixer précisément les objectifs scientifiques territoriaux de ces services et de faciliter ainsi la mise en œuvre de partenariats avec l’INRAP, l’Institut national de recherches archéologiques préventives. Je rappelle que le rapport de 2016 de la Cour des comptes appelle de nouveau au développement de tels partenariats, afin de faciliter la mutualisation des coûts et des compétences.
En différenciant la procédure d’habilitation de celle de l’agrément réservé aux opérateurs privés, le projet de loi répond à une demande de simplification tout en portant une reconnaissance particulière aux services d’archéologie des collectivités.
Toutefois, simplifier ne signifie pas supprimer tout contrôle. La vérification de la capacité administrative nous paraît devoir être maintenue, ne serait-ce que pour que les services de l’État aient une idée de la dimension des services des collectivités.
Enfin, il ne nous semble pas opportun de prévoir une automaticité d’habilitation des services archéologiques des collectivités territoriales déjà en exercice. Nous préférons renvoyer au pouvoir réglementaire le soin d’en fixer les conditions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je vous prie de bien vouloir m’excuser, mes chers collègues, car certains des avis de la commission sur les amendements sont particulièrement longs, mais je me dois de vous en faire part dans leur totalité.
L’amendement n° 263, comme l’amendement n° 137 rectifié, tend à obliger la collectivité souhaitant obtenir une habilitation pour son service archéologique à signer un projet de convention avec l’État, fixant ainsi les modalités de sa participation à l’exploitation scientifique des opérations d’archéologie préventive.
De deux choses l’une : soit il s’agit simplement d’exhorter les acteurs publics de l’archéologie préventive à coopérer, et le projet de loi prévoyant un projet de convention, et non pas une convention, il n’y a pas a priori d’obligation de résultat, et cette disposition n’a donc rien à faire dans la loi ; soit la collectivité et l’État doivent parvenir à un accord et, dans ce cas, on peut se demander si l’État ne se servira pas de cette convention pour faire pression sur les collectivités territoriales et orienter leurs décisions en matière d’archéologie préventive.
Enfin, il ne faut pas oublier que l’INRAP est légalement chargé de l’exploitation scientifique des opérations, ce qui est normal. Cette convention aura donc forcément vocation à être tripartite. Dans ce cas, pourquoi ne pas le dire clairement ?
Ces amendements tendent également à limiter géographiquement le champ de l’habilitation. L’un des arguments avancés est que, dans 97 % des cas, les services archéologiques sont actifs uniquement sur le territoire de la collectivité territoriale dont ils dépendent. Il me semble justement que c’est un réel problème.
À l’heure où nous parlons de mutualisation, pourquoi vouloir instaurer une limitation rigide dans la loi, qui aura peu d’effets pratiques, mais qui entravera les possibilités de partenariat et de mutualisation des compétences entre les collectivités ? En pleine refonte de l’intercommunalité, imaginez qu’une commune obtienne un agrément, mais que celui-ci ne soit pas valable pour l’ensemble du territoire de l’EPCI. Cela n’aurait pas de sens. Et l’on peut même aller plus loin dans l’absurde et imaginer des situations encore plus complexes !
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je me suis déjà exprimée sur l’article, en expliquant que le Gouvernement souhaitait un retour au texte de l’Assemblée nationale.
Mme la rapporteur a évoqué les projets de convention entre l’État et les collectivités locales. Ces projets ne concerneront que l’État et les collectivités locales, pas l’INRAP.
L’idée est véritablement de construire ce pôle public d’archéologie préventive, de reconnaître un statut spécifique aux services d’archéologie des collectivités territoriales et de renforcer la coopération entre les acteurs publics par cette convention.
En ce qui concerne les limites territoriales qui sont prévues dans le texte dont le rétablissement est demandé, vous avez évoqué les intercommunalités, madame Monier, ce qui montre que vous partagez notre préoccupation. On pourra effectivement examiner s’il n’y a pas, à la marge, des cas justifiant de prévoir des exceptions, afin d’épouser les contours d’un territoire qui serait plus pertinent que la stricte limite administrative.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Sur cette question de la territorialité, je souhaite me faire l’écho d’une préoccupation exprimée par le sénateur Dominique Bailly, qui ne peut être présent aujourd'hui en séance.
Dans certains départements, en effet, il peut arriver qu’il n’y ait pas de service d’archéologie préventive. Notre collègue m’a demandé de citer l’exemple de sa commune à Orchies dans le Nord. Les fouilles d’archéologie préventive sont réalisées par la communauté d’agglomération du Douaisis, une intercommunalité du département qui exerce cette compétence depuis plus de trente ans. Elle a ainsi développé des compétences et un savoir-faire qui lui permettent d’intervenir rapidement et de réaliser des opérations de bonne qualité scientifique.
Le département du Nord, qui n’est pas une exception dans notre pays, n’est pas doté d’un service dédié à l’archéologie préventive. Comme pour de nombreuses autres communes et intercommunalités voisines, l’exercice de cette compétence par la communauté d’agglomération du Douaisis est crucial pour le développement de nos communes et notre développement. M. Dominique Bailly considère donc qu’il est important, dans certains cas, d’élargir le périmètre.
Mme la présidente. L'amendement n° 136 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 15 et 17
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. La carte archéologique constitue le document d’identité de toutes les zones présentant un intérêt patrimonial, car recelant de potentiels vestiges archéologiques, patrimoine commun de tous les Français.
Le code du patrimoine confie son élaboration à l’État, qui peut s’adjoindre les services de l’INRAP et ceux des collectivités territoriales. Or le texte issu de la commission propose que l’État, pourtant garant du service public d’archéologie préventive, partage cette compétence non seulement par la conduite d’une enquête publique, mais aussi par le recueil des avis des maires des communes ou des présidents d’EPCI des territoires concernés par la présomption de prescription archéologique.
Quand on connaît le peu de goût des aménageurs pour l’archéologie préventive, on peut s’inquiéter de la mise en place d’une telle procédure, qui ne manquera pas d’entraîner des pressions multiples et – je le crains – une carte très incomplète à l’avenir.
Outre ces appréciations d’opportunité, je ne vois pas sur quel fondement juridique l’État, garant des opérations scientifiques, devrait, pour l’élaboration d’un document purement scientifique, recourir à une procédure digne de celles qui s’appliquent aux marchés publics.
Nous souhaitons donc, par notre amendement, supprimer ces alinéas.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer l’obligation d’enquête publique et d’avis des élus concernés pour l’établissement des zones de présomption de prescriptions archéologiques.
Sur proposition de Mme Estrosi Sassone, la commission de la culture a adopté un amendement qui vise justement à faire figurer ces zones dans les documents d’urbanisme. Cette mesure nous paraît particulièrement pertinente.
En revanche, comme le prévoient les auteurs de l'amendement n° 136 rectifié, il n’est pas nécessaire de soumettre l’établissement desdites zones à une enquête publique supplémentaire et à l’avis des exécutifs concernés, dans la mesure où celles-ci résultent d’un travail scientifique mené en collaboration avec les collectivités territoriales.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Le Gouvernement est également favorable à cet amendement : il importe effectivement de ne pas alourdir la procédure.
Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 264, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Après le mot :
scientifique
insérer le mot
, financier
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La suppression, par la commission du Sénat, de l’obligation faite aux services habilités de l’archéologie préventive de présenter au ministère, tous les cinq ans, un bilan financier de leurs activités nous semble problématique. En effet, si le contrôle budgétaire des collectivités existe bel et bien par le biais du compte administratif annuel, il semble essentiel qu’un tel bilan financier soit établi séparément par les services locaux d’archéologie, et ce pour plusieurs raisons.
Si le compte administratif est bien transmis à l’État par le biais de son représentant localement, ce n’est pas le préfet qui délivre l’habilitation aux services de fouilles archéologiques. Il semble plus pertinent que le réceptionnaire du bilan financier des services habilités soit celui qui, justement, délivre les habilitations, c'est-à-dire le ministère de la culture.
Ensuite, pour précis qu’il soit, le compte administratif ne permettra jamais de réellement cibler les frais d’investissement et de fonctionnement des services habilités en matière d’archéologie préventive.
Pour ces raisons, qui tiennent tant à l’efficacité de la démarche qu’à transparence de cette dernière, il est proposé de réinstaurer dans le bilan quinquennal produit par les services habilités des collectivités territoriales en direction du ministère un volet financier.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ma chère collègue, je voudrais vous rassurer en ce qui concerne le contrôle des collectivités territoriales. Le compte administratif, bien sûr, ne préjuge en rien de la bonne dépense des deniers de la commune. Néanmoins, nous avons autour de nous des trésoriers, sans même parler de la chambre régionale des comptes, qui s’assurent du bon usage des deniers publics. Je vous enjoins à faire confiance à ces collectivités territoriales.
Si je voulais faire preuve d’un peu de malice cet après-midi, je dirais qu’il serait bon aussi d’appliquer cette méthode à l’INRAP, de manière à pouvoir s’extraire de ce cercle infernal. (Sourires.)
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 411 rectifié, présenté par M. Doligé, Mme Billon, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Estrosi Sassone, MM. de Legge et de Nicolaÿ, Mmes Deroche, Deromedi et Deseyne, MM. B. Fournier, J. Gautier, Gournac, Gremillet et Joyandet, Mmes Lamure et Lopez, M. Mayet, Mme Morhet-Richaud et MM. Morisset, Reichardt et Savin, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 29
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Le coût du diagnostic imposé par les services de l’État ne peut en aucun cas représenter plus de 5 % de la valeur du terrain.
« Lorsque le délai de réalisation du diagnostic rend impossible la réalisation de l’opération projetée sur le terrain concerné, un délai compatible avec le projet est fixé par le représentant de l’État dans le département. Le nouveau délai est proposé dans les quinze jours de la demande de révision du délai initial formulée par la personne projetant d’exécuter les travaux ou de vendre le terrain concerné. » ;
La parole est à Mme Caroline Cayeux.
Mme Caroline Cayeux. Les coûts et délais qui résultent des contraintes légales entraînent parfois l'impossibilité pour un opérateur de réaliser son projet. Il arrive ainsi que le coût soit en décalage avec la valeur du terrain, ce qui signifie que, pour pouvoir assurer les recherches archéologiques, il faut dépenser plus que la valeur du terrain, ce qui va mettre l’opération en déséquilibre. Les délais cumulés avec ces problèmes financiers rendent impossible la faisabilité de l'opération. Dans ce cas, il faudrait trouver une solution compatible avec l'intérêt de l'opération.
Nous proposons donc d’insérer deux alinéas à l’article 20. Le premier prévoit que « le coût du diagnostic ne peut en aucun cas représenter plus de 5 % de la valeur du terrain », le second qu’un « nouveau délai est proposé dans les quinze jours de la demande de révision du délai initial formée par la personne projetant d’exécuter les travaux ou de vendre le terrain concerné ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cet amendement vise effectivement à limiter le coût et la durée du diagnostic.
Depuis l’adoption de la loi de finances pour 2016, le coût du diagnostic est financé par l’État à travers une subvention aux opérateurs. Les aménageurs ne sont donc pas impliqués dans son financement.
Par ailleurs, la durée de l’opération de diagnostic est arrêtée de manière conventionnelle entre l’aménageur et l’opérateur. Si l’une des parties est en désaccord avec la durée prévue, ce qui peut arriver, ainsi que vous nous l’avez signalé, ma chère collègue, elle peut saisir le préfet de région qui arrêtera une durée.
Cet amendement étant satisfait, me semble-t-il, par la réglementation en vigueur, j’y suis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. L’aménagement du territoire et la protection du patrimoine archéologique constituent deux missions de service public qui ne doivent pas être opposées et qui doivent être mises en œuvre en concertation et dans le respect des intérêts légitimes de l’une et de l’autre. C’est bien ce que fait l’archéologie préventive.
Les opérations de diagnostic sont financées par l’opérateur d’archéologie qui reçoit une part de la redevance d’archéologie préventive. L’exigibilité de la redevance est liée aux opérations d’aménagement et non pas à la réalisation des interventions elles-mêmes.
Enfin, la détermination des délais de réalisation des opérations de diagnostic, qui vous préoccupe, madame Cayeux, relève de la convention passée entre l’opérateur et l’aménageur. En cas de désaccord, il peut être fait appel à l’arbitrage du préfet de région.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme Caroline Cayeux. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° 411 rectifié est retiré.
L'amendement n° 43 rectifié ter, présenté par Mme Estrosi Sassone, M. Mandelli, Mme Cayeux, MM. Lemoyne et Mouiller, Mme Morhet-Richaud, M. de Legge, Mme Primas, MM. Lefèvre, Doligé, Trillard, Pillet, Bizet et B. Fournier, Mmes Procaccia et Troendlé, MM. Cardoux, Chasseing, Revet, Pointereau, Savin et Mayet, Mmes Deroche et Deromedi, MM. Houpert, D. Laurent et Kennel, Mmes Di Folco et Lamure, MM. J.P. Fournier, Raison et Perrin, Mme Duchêne, MM. Longuet et Nègre, Mme Debré et MM. Laménie, Chaize, Béchu, Charon, Rapin, Pellevat, Gremillet, Darnaud et Genest, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 36
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le dernier alinéa est complété par les mots : « dans un délai de trois mois à compter de la fin du diagnostic fixé par la convention » ;
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Cet amendement vise à intégrer dans le projet de loi un délai, qui n’est actuellement pas prévu, pour la remise du rapport de diagnostic d'archéologie préventive.
Les signataires de cet amendement proposent que le rapport soit remis dans un délai de trois mois à compter de la fin du diagnostic, ce qui permettra d’informer, dans un temps raisonnable, les personnes projetant d’exécuter les travaux, ainsi que les propriétaires des terrains.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ma chère collègue, je comprends parfaitement votre préoccupation, car, en termes de délais, nous avons eu souvent à souffrir… (Sourires.)
Votre amendement vise justement à réduire les délais d’attente des aménageurs susceptibles d’entreprendre des travaux sur un terrain. Toutefois, il convient de savoir que le délai est prévu dans la convention signée entre l’aménageur et l’opérateur. Ce n’est donc pas comme s’il n’y avait pas de délai du tout !
Si les deux parties ne parviennent pas à s’entendre précisément sur le délai de retour, l’une d’elles peut saisir le préfet de région, qui fixera lui-même le délai. En revanche, il nous paraît difficile d’accepter un délai de trois mois pour toutes les opérations. En effet, on ne peut pas exiger le même délai pour un diagnostic concernant plusieurs centaines de kilomètres d’une voie TGV, par exemple, et pour un diagnostic visant la construction d’un lotissement de 3 000 mètres carrés.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les raisons qui viennent d’être exprimées par Mme la rapporteur.
Mme la présidente. Madame Procaccia, l'amendement n° 43 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Je comprends parfaitement l’argument selon lequel, en fonction du type d’archéologie préventive réalisée, les délais peuvent être plus ou moins longs. Toutefois, le fait de ne pas prévoir de délai pose quand même problème, et la saisine du préfet de région n’est pas de nature, à mon avis, à faire avancer rapidement les choses.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Comme je viens de le souligner, mais sans doute ne l’ai-je pas dit suffisamment fort, il est possible, dans la convention signée entre l’aménageur et l’opérateur, de notifier des délais. C’est seulement dans le cas où le délai n’est pas respecté, alors qu’il a été fixé en toute connaissance de cause entre les parties, qu’on peut saisir le préfet de région. Dès lors, on peut mieux mesurer la durée du chantier et mettre en place les délais qui conviennent.
Mme Catherine Procaccia. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° 43 rectifié ter est retiré.
L'amendement n° 267, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 38
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
a) À la première phrase, les mots : « La réalisation » sont remplacés par les mots : « L'État assure la maîtrise d'ouvrage scientifique » et, après la référence : « L. 522-1 », sont insérés les mots : « . Leur réalisation » ;
La parole est à M. Daniel Laurent.
M. Daniel Laurent. Cet amendement vise à rétablir l’alinéa 38 de l’article 20 qui a été supprimé et qui visait à réaffirmer la maîtrise d’ouvrage scientifique. Dans la mesure où nous avons déjà débattu tout à l’heure de cette question, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 267 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 138 rectifié est présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 268 est présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 39
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« Les opérations de fouilles sous-marines intervenant sur le domaine public maritime et la zone contiguë définie à l’article L. 532-12 sont confiées à l’établissement public mentionné à l’article L. 523-1. » ;
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l'amendement n° 138 rectifié.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement tend à prévoir le monopole de l’INRAP sur les fouilles effectuées sur le domaine public, en zone sous-marine contigüe. Je tiens à préciser qu’il s’agit d’une zone restreinte appartenant au domaine public, soit, conformément au droit international, jusqu’à vingt-quatre miles des côtes, calculés depuis la « ligne de base droite ».
Avec la transition énergétique, on peut penser que le développement de l’éolien va connaître un essor certain et que des efforts seront déployés en ce domaine. Or, l’installation de ces éoliennes en mer ne pose pas de problème, l’INRAP optant pour une politique d’évitement de la zone en cas de présence d’épaves.
En revanche, il y a quelques semaines, les archéologues de l’INRAP ont découvert, au large de Carnac, des alignements semblables à ceux du site bien connu. Il semble donc opportun de combler rapidement le vide juridique laissé par la loi de 2001 ; jusqu’à présent, un bureau du ministère de la culture était chargé d’exécuter les opérations en mer, après prescription de l’État.
Pour ceux qui craindraient que ce dispositif n’entrave la liberté d’entreprendre, je rappelle que le Conseil constitutionnel, qui avait été saisi de la loi de 2001 relative à l’archéologie préventive, avait estimé, dans sa décision du 16 janvier 2001, que les droits exclusifs conférés à un établissement public en matière de fouilles d’archéologie préventive n’étaient pas contraires à la liberté d’entreprendre, en raison des contraintes de service public pesant sur cet établissement et de l’intérêt général qui s’attache à la préservation du patrimoine archéologique menacé par les opérations d’aménagement.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour présenter l’amendement n° 268.
M. Pierre Laurent. Tout comme le précédent, cet amendement vise à rétablir le monopole de l’INRAP sur les opérations de fouilles sous-marines intervenant sur le domaine public maritime et la zone contiguë.
On touche là au cœur du débat sur l’article 20. La majorité sénatoriale multiplie les efforts pour nous convaincre que la suppression de tous ces articles se justifie par l’amélioration des conditions de mise en œuvre de l’archéologie préventive entre l’État et les collectivités locales. En l’occurrence, on ne peut pas avancer cet argument, et la restauration du monopole public pour les fouilles sous-marines paraît relever de l’évidence si l’on considère leur intérêt scientifique et la protection du domaine public maritime. Il est, à mes yeux, très révélateur que la majorité sénatoriale aille jusqu’à proposer la suppression de ce monopole de l’INRAP.
Nous proposons pour notre part de réintroduire cette disposition dans le projet de loi, pour des raisons de maîtrise scientifique de ces fouilles, mais aussi parce que cela contribuerait à rétablir l’efficacité de l’INRAP, dont la capacité de mener à bien sa mission a été amoindrie par la concurrence telle qu’elle a été organisée jusqu’à présent.
Pour toutes ces raisons, nous proposons de revenir sur ce point au texte issu des débats à l’Assemblée nationale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ces amendements tendent à prévoir un monopole de l’INRAP pour réaliser des fouilles sous-marines sur le domaine public maritime et la zone contiguë.
Or la commission s’oppose à la mise en place d’un tel monopole de l’INRAP. Le Gouvernement essaie de nous convaincre que ce marché n’est pas prometteur, mais, dans le même temps, il organise ce monopole. Je ne comprends pas très bien cette logique ou, plutôt, je crains de ne trop la comprendre : il s’agit d’assurer l’INRAP de nouvelles sources de revenus provenant d’une activité qui, me semble-t-il, a vocation à se développer – quelqu’un a mentionné, tout à l’heure, le développement des éoliennes.
Ce monopole soulève deux problèmes. Tout d’abord, il constitue une entrave à la libre concurrence ; ensuite, il ne permettra pas d’assurer une prestation de meilleure qualité. Compte tenu des contraintes spécifiques liées aux milieux aquatiques et aux infrastructures nécessaires, l’INRAP ne sera pas capable de faire face à ses missions dans des délais raisonnables en cas d’augmentation de la demande dans ce secteur. La diversification de l’offre me semble donc nécessaire, et nous en revenons, une fois encore, aux fameux délais.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Il importe, me semble-t-il, de bien tenir compte de la spécificité du domaine maritime. Si le Gouvernement plaide pour le retour au texte initial, donc au monopole en la matière, ce n’est absolument pas sur le fondement d’une position générale relative à l’INRAP, mais en raison des spécificités du domaine public maritime.
Il y aura de plus en plus d’opérations de développement de projets d’aménagement en mer, et les interventions d’archéologie préventive en mer nécessitent de lourds investissements matériels et une forte technicité. Il est également nécessaire d’atteindre une expertise et un seuil critique minimal. C’est pourquoi le recours à un opérateur unique, l’INRAP, permettrait de garantir la qualité des interventions, tant sur le plan technique que scientifique.
Compte tenu du nombre encore peu important de fouilles, il vaut mieux se concentrer sur un opérateur, pour qu’il puisse atteindre ce seuil critique.
En l’état actuel des textes, l’INRAP est déjà le seul habilité à réaliser des opérations de diagnostic sur le domaine public maritime, pour lequel il n’existe pas de marché concurrentiel. Pour des raisons de sécurité, de cohérence scientifique et d’économies d’échelle, et compte tenu de la spécificité du domaine public maritime, il serait donc souhaitable que l’INRAP se voie confier seul la réalisation des opérations de fouilles.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Tout a été dit par Mme la rapporteur : nous parlons de protection de biens communs de la nation ; elle s’intéresse au partage de ce qu’elle appelle un « marché prometteur » !
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.
M. Yves Détraigne. Mes chers collègues, notre débat risque de tomber dans la caricature.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Surtout, ne touchons pas au marché !
M. Yves Détraigne. Les services de l’INRAP, contrôlés par l’État, auraient le sens de l’intérêt public et du bien commun, et les services privés de fouilles, qui sont pourtant agréés, ne seraient là que pour faire faire des économies aux collectivités qui les rétribuent et s’engraisser…
M. Pierre Laurent. Qui a parlé de « marché prometteur » ?
M. Yves Détraigne. Cette vision des choses n’est pas raisonnable. Si un service privé de fouilles est agréé, il est tout aussi capable de faire le travail que l’INRAP, et peut-être même parfois dans de meilleurs délais.
Dès lors, pourquoi s’opposer à la proposition de la commission ?
M. Alain Fouché. Il a raison !
Mme Catherine Procaccia. Excellente intervention !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 138 rectifié et 268.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 139 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 41 et 42
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 523-8-1. – L’agrément pour la réalisation de fouilles prévu à l’article L. 523-8 est délivré par l’État, après avis du Conseil national de la recherche archéologique, pour une durée fixée par voie réglementaire, au vu d’un dossier établissant la capacité scientifique, administrative, technique et financière du demandeur et son respect d’exigences en matière sociale, financière et comptable.
« L’agrément peut être refusé, suspendu ou retiré par décision motivée.
« La personne agréée transmet chaque année à l’autorité compétente de l’État un bilan scientifique, administratif, social, technique et financier de son activité en matière d’archéologie préventive.
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. S’agissant de la procédure d’agrément pour opérer des fouilles, nous avons deux points principaux d’achoppement avec la commission.
Le premier porte sur la vérification du respect du droit social par l’opérateur lors de la procédure d’agrément. Comment peut-on agréer un opérateur s’il se révèle qu’il a ensuite recours à des personnes non titulaires de contrat en bonne et due forme, faiblement rémunérées, et possiblement embauchées à la journée, ce qui ne garantirait pas une poursuite sérieuse des opérations, ou à des personnes qui ne présenteraient pas les qualifications scientifiques requises pour procéder aux fouilles ?
Par ailleurs, l’établissement annuel d’un bilan scientifique, administratif, social, technique et financier de leur activité par les opérateurs bénéficiant d’un agrément pour fouilles nous semble important pour établir un suivi effectif de ces opérations fondamentales en termes de patrimoine et d’héritage commun à tous.
Ces deux arguments nous conduisent à penser qu’il convient de préférer la version issue des débats de l’Assemblée nationale à celle qui a été adoptée par la commission du Sénat.
Mme la présidente. L’amendement n° 453 rectifié, présenté par Mme Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéas 41 et 42
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 523-8-1. – L’agrément pour la réalisation de fouilles prévu à l’article L. 523-8 est délivré par l’État, après avis du Conseil national de la recherche archéologique, pour une durée fixée par voie réglementaire, au vu d’un dossier établissant la capacité scientifique, administrative, technique et financière du demandeur et son respect d’exigences en matière sociale, financière et comptable.
« L’agrément peut être refusé, suspendu ou retiré par décision motivée, après avis du Conseil national de la recherche archéologique.
« La personne agréée transmet chaque année à l’autorité compétente de l’État un bilan scientifique, administratif, social, technique et financier de son activité en matière d’archéologie préventive.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. D’après les recommandations de la commission d’évaluation scientifique, économique et sociale de l’archéologie, les conditions d’obtention de l’agrément pour les opérateurs privés ne sont pas assez strictes, au vu du caractère scientifique des opérations à mener.
La commission a pourtant décidé de les rendre plus souples en prévoyant une réévaluation de l’agrément tous les cinq ans. Nous pensons à l’inverse qu’il faut un contrôle plus rigoureux, d’autant que certaines lacunes dans les projets des opérateurs privés ne sont pas décelables lors de l’examen de l’agrément.
C’est pourquoi cet amendement tend à revenir à une réévaluation annuelle de l’agrément accordé par l’État, tout en conservant l’avis du Conseil national de la recherche archéologique en cas de refus ou de suspension.
Mme la présidente. L'amendement n° 269, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 41
Compléter cet alinéa par les mots :
et son respect d’exigences en matière sociale, financière et comptable
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement vise à réintroduire la disposition obligeant les opérateurs privés demandant l’agrément du ministère à respecter des exigences en matière sociale, financière et comptable.
Il apparaît essentiel que le ministère ait un droit de regard, ou plutôt que les opérateurs privés prennent l’engagement de respecter un certain nombre d’exigences. L’ouverture à la concurrence de 2003 a conduit à la multiplication particulièrement importante du nombre d’opérateurs sur le marché, certains d’entre eux se lançant dans une course à la réduction des coûts de fonctionnement et dans des pratiques de dumping social, au mépris parfois de la qualité des opérations menées.
Pour cela, trois leviers ont pu être actionnés par ces opérateurs : la dégradation des conditions de travail des salariés, la réduction des délais d’intervention et la baisse de la qualité des prestations fournies. Ces pratiques ont aussi créé une concurrence déloyale à l’égard de l’INRAP.
Nous proposons donc que le respect par tous les opérateurs d’engagements sociaux, financiers et comptables soit clairement inscrit dans la loi, afin de garantir le caractère qualitatif des opérations d’archéologie préventive et d’assurer de bonnes conditions de travail aux professionnels du secteur.
Mme la présidente. L’amendement n° 289 rectifié, présenté par M. Gabouty, Mme Billon, M. Canevet, Mme Gatel, M. Guerriau, Mmes Létard et Loisier et M. Tandonnet, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 139 rectifié, 453 rectifié et 269 ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je ne voudrais pas laisser penser que nous sommes en train de brader la qualité des diagnostics et des fouilles archéologiques. Ce que j’entends me laisse quasiment sans voix !
Pour justifier l’avis défavorable de la commission sur les amendements nos 139 rectifié et 453 rectifié, je ne retiendrai que le « respect d’exigences en matière sociale, financière et comptable » par les candidats à l’agrément.
La commission pense que ce contrôle outrepasse les compétences du ministère de la culture et que les obligations en matière de droit du travail ou de comptabilité exigent une expertise différente. Faut-il rappeler qu’il existe une inspection du travail pour contrôler les entreprises ?
Je ne discuterai pas des aspects scientifiques et techniques de l’agrément, sauf pour dire qu’il faut arrêter de penser que nous sommes en train de laisser filer l’élément essentiel, à savoir l’expertise scientifique des opérateurs de fouilles.
Quant au contrôle financier, nous l’avons évoqué tout à l’heure, et je n’y reviens pas. Il est effectué par les trésoriers et par la Cour des comptes. L’INRAP est d’ailleurs bien placé pour savoir ce que pense la Cour des comptes de sa gestion… Cessons de laisser penser que nous voudrions brader le patrimoine en baissant la garde au niveau social ou technique. Tel n’est pas le cas !
La commission est donc défavorable à ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Ces amendements visent à rétablir le texte initial relatif à la procédure d’agrément.
Madame la rapporteur, vous évoquez le rapport de la Cour des comptes et vous appelez à ne pas caricaturer le débat. Or la Cour des comptes a certes demandé à l’INRAP de faire des efforts de gestion, mais elle estime aussi, en examinant objectivement les prix pratiqués, que la question de la concurrence déloyale se pose.
Les opérateurs privés ont en effet baissé leurs prix de 30 %, tandis qu’ils sont restés stables du côté de l’INRAP et des collectivités territoriales. Je doute que l’on puisse expliquer cette diminution seulement par les gains de productivité extraordinaires qu’auraient effectués les opérateurs privés… L’écart est tel qu’il y a, selon moi, un problème d’équité de la concurrence entre les différents opérateurs.
La procédure d’agrément, qui vise à rendre les choses plus équitables, me semble faire sens, et c’est pourquoi je suis favorable à ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Nous avons préparé nos avis avec des auditions, des documents et nos propres expériences, qui sont partagées par de nombreuses personnes.
Permettez-moi simplement de lire un paragraphe du rapport d’activité de l’INRAP : l’établissement a été conduit « à consentir des remises tarifaires compatibles avec les exigences de qualité scientifique des interventions ». Nous avons également eu accès à des documents montrant que l’INRAP a consenti des remises de 35 %. Comment voulez-vous que la concurrence soit loyale avec de tels procédés ?
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Vous vous en défendez, madame la rapporteur, mais, sur ce sujet, nous avons un classique débat entre la gauche et la droite.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Pas du tout !
M. David Assouline. Vous avez l’air de penser que nous ne sommes pas sensibles au fait qu’il puisse y avoir un secteur privé, avec une dynamique, une autonomie et une créativité qui lui sont propres. Ce n’est pas la question !
Quand on parle de recherche et de science, il est de tradition que la collectivité publique regarde les choses au plus près. Il arrive même qu’elle interdise la concurrence, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Et dans un marché qui peut – vous l’avez dit – être florissant, elle fait en sorte de faire attention aux distorsions de concurrence. Or, vous proposez, pour votre part, d’enlever tous les éléments qui peuvent permettre que cette concurrence soit loyale.
Normalement, la représentation nationale, qui ne représente pas une entreprise privée quelconque, est plutôt attachée à ce que l’opérateur public puisse continuer ses missions, sans être grignoté au fur et à mesure par des entreprises privées. Celles-ci peuvent baisser le coût du travail, ont un niveau de protection sociale moins élevé, peuvent faire évoluer leur convention collective et ont, globalement, moins d’impératifs que les organismes publics. De leur côté, ceux-ci obéissent à des règles strictes et subissent un contrôle plus intense sur leurs activités.
Vous voulez grignoter certaines sécurités ; c’est votre point de vue. Et au fond, vous estimez que l’INRAP, ce n’est pas génial !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Je souhaite insister sur le fait que nous parlons, nous aussi, d’efficacité.
La Cour des comptes constatait qu’il est nécessaire de réguler différemment les choses, si nous voulons aller vers davantage de qualité et d’efficacité. Vous pouvez le nier, mais tous les observateurs sérieux de ce dossier le reconnaissent : il existe un problème de concurrence déloyale sur le marché de l’archéologie préventive.
Il faut le traiter de la bonne manière, c’est-à-dire en faisant respecter un certain niveau d’exigences pour s’assurer de la qualité du travail scientifique et d’une bonne exécution des travaux, au profit de tous, y compris des collectivités territoriales et des aménageurs. Nous sommes soucieux de ce niveau d’exigences, et il ne faut pas nier les difficultés.
En outre, en cas de défaillance des opérateurs privés – situation qui se produit fréquemment –, qui est appelé à la rescousse ? L’INRAP ! Il faut donc lui assurer les moyens de pouvoir travailler dans de bonnes conditions au service de tous.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Comme l’indiquait Mme la ministre, le rapport de la Cour des comptes présenté hier au Sénat donne les chiffres des prix moyens facturés à l’hectare : le coût de l’INRAP est de 318 euros, celui des collectivités territoriales de 278 euros et celui des opérateurs privés de 230 euros.
Je vais aller dans le même sens que M. Laurent : on peut effectivement se poser des questions. Il s'agit tout de même d’une sacrée différence ! Finalement, le coût à l’hectare pour les collectivités territoriales se rapproche plus de celui de l’INRAP que de celui des opérateurs privés. Cela met bien en exergue la question des modalités de fonctionnement des opérateurs privés.
En outre, comme cela vient d’être indiqué, il y a eu des abandons de chantier. Ces problèmes existent, ils ont été soulevés par la Cour des comptes. Il faut donc être vigilant, non seulement sur la qualité scientifique – nous sommes tous d’accord sur ce point, y compris Mme la rapporteur –, mais aussi sur les autres aspects de la question.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. J’ai entendu ce qu’a indiqué Mme Monier, mais il faut savoir que 48 % des opérations sont traitées par l’INRAP, ce qui maintient la guerre des prix. Les opérateurs privés sont conscients de la gravité de la situation, qu’ils partagent avec l’INRAP.
Il faut trouver un juste équilibre dans les prix, ni plus ni moins. Je voudrais oublier que l’INRAP est subventionné, mais ce point doit aussi entrer en ligne de compte, car cela maintient les prix au plus bas.
M. David Assouline. C’est le service public !
Mme Françoise Férat, rapporteur. Il est plus facile de réduire les prix lorsqu’on sait que l’on sera soutenu financièrement d’une autre manière que lorsque l’on est une entreprise qui doit justifier ses comptes et s’inquiéter de l’emploi.
Je voudrais dire, à ce stade de la discussion – et je me tourne vers vous, monsieur Assouline –, que je ne suis pas du tout en train de mener une bataille politicienne.
M. David Assouline. Politique, oui !
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je ne voudrais pas laisser penser qu’il y a deux camps : les opérateurs privés et les collectivités, d'une part, et l’INRAP, d'autre part.
Je viens d’en parler à Mme la ministre et je souhaite que l’on trouve un équilibre qui soit juste pour tous, avec des délais et des prix qui soient raisonnables. Il y a du travail pour tout le monde ! Collectivités, opérateurs et aménageurs ne demandent pas autre chose.
À l’issue de nos débats et des diverses prises de position de part et d’autre de l’assemblée, on doit pouvoir prendre en compte cette situation et la régler. D’ailleurs, nous la connaissons parfaitement les uns et les autres, certes avec des approches différentes.
Nous ne visons qu’un seul objectif : une mise en ordre de marche effective, avec une bonne qualité de réalisation. C’est dans l’intérêt de tout le monde, en particulier de nos concitoyens.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je souhaite revenir rapidement sur quelques éléments.
Mme la rapporteur a évoqué les remises consenties par l’INRAP, mais elles sont justement liées à la concurrence, qui pratique des prix nettement plus bas.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Non, c’est l’inverse !
Mme Audrey Azoulay, ministre. En outre, les opérateurs privés entre eux sont aussi amenés à déposer des recours contentieux pour concurrence déloyale et prix anormalement bas.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cela se comprend dans cette situation.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Il y a donc bien un problème, et il ne vient pas seulement de l’INRAP ou des collectivités.
Je souligne que l’INRAP reçoit des subventions au titre des missions de service public qu’il exerce sur tout le territoire et à tout moment. Les opérateurs n’ont pas cette contrainte. Enfin, même si cet argument est subsidiaire, les opérateurs privés ont accès au crédit d’impôt recherche.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ils n’y auront bientôt plus accès !
Mme Audrey Azoulay, ministre. Nous en discuterons tout à l’heure, mais il est vrai que ce n’est pas l’élément le plus déterminant.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 140 rectifié est présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 454 rectifié est présenté par Mme Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 43 et 44
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° 140 rectifié.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement vise à supprimer la compétence attribuée aux acteurs agréés en matière d’exploitation scientifique des opérations d’archéologie préventive. Je rappelle que, lorsqu’il a examiné la loi de 2003, le Conseil constitutionnel s’est prononcé contre la délégation de cette mission de l’INRAP.
Par ailleurs, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication propose de reprendre, mot pour mot, les derniers alinéas de l’article L. 523-1 du code du patrimoine, qui définissent le rôle de l’INRAP.
Or, s’il est normal que le niveau législatif précise le cadre dans lequel un établissement public est amené à fonctionner, cela n’a aucun sens lorsqu’il s’agit d’entreprises privées. Les opérateurs privés sont généralement positionnés sur des créneaux extrêmement pointus et ne sauraient assumer une mission globale de service public en matière de recherche.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 454 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ces amendements visent à supprimer la reconnaissance, au niveau législatif, de l’implication des opérateurs agréés et de leurs agents dans la recherche archéologique, que nous avons introduite en commission. Pourquoi un tel ostracisme ?
Selon certains collègues, comme pour le Gouvernement, les opérateurs privés ne seraient attirés que par le profit ! Honnêtement, si des archéologues avaient fait fortune dans leur branche, je crois que cela se saurait !
En réalité, ces gens sont des passionnés ; ils ont fait les mêmes études que les archéologues de l’INRAP et passent souvent d’une structure à l’autre. Ils entretiennent d’ailleurs, pour la plupart, de bonnes relations avec leurs homologues. Ils font de la recherche, en liaison avec les opérations de fouilles qu’ils mènent, voire, pour les opérateurs les plus importants, ils établissent des programmes de fouilles, qui servent ensuite à leur recherche. Par conséquent, pourquoi ne pas reconnaître ce travail ?
Je citerai, à cet égard, le livre blanc sur l’archéologie : « Les agents des services archéologiques des collectivités territoriales, ainsi que les archéologues des autres opérateurs agréés, développent des programmes de recherche ou contribuent à des programmes interinstitutionnels, alors qu’ils ne peuvent prétendre, en règle générale, qu’au titre officieux de chercheur associé dans les unités mixtes de recherche. Cette situation ne se justifie pas sur le fond : elle introduit de véritables inégalités dans les parcours professionnels des différents acteurs de l’archéologie, une source de tensions et de frustrations, ainsi qu’une absence de reconnaissance des compétences scientifiques des individus et des organismes, tant au niveau national qu’international. »
Mes chers collègues, je m’arrête là, mais je vous engage à lire la suite de cet extrait du livre blanc, qui est tout à fait intéressant.
La commission a donc donné un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 140 rectifié et 454 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 141 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 45 à 49
Remplacer ces alinéas par seize alinéas ainsi rédigés :
5° L’article L. 523-9 est ainsi modifié :
a) Au début, sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu’une prescription de fouilles est notifiée à la personne qui projette d’exécuter les travaux, celle-ci sollicite les offres d’un ou de plusieurs des opérateurs mentionnés à l’article L. 523-8.
« Les éléments constitutifs des offres des opérateurs sont définis par arrêté du ministre chargé de la culture. Ils comportent notamment un projet scientifique d’intervention, le prix proposé et une description détaillée des moyens humains et techniques mis en œuvre.
« Préalablement au choix de l’opérateur par la personne qui projette d’exécuter les travaux, celle-ci transmet à l’État l’ensemble des offres reçues. L’État procède à la vérification de leur conformité aux prescriptions de fouilles édictées en application de l’article L. 522-2, rend un avis motivé sur le volet scientifique et s’assure de l’adéquation entre les projets et les moyens prévus par l’opérateur. » ;
b) Le premier alinéa est ainsi modifié :
- après le mot : « prix », sont insérés les mots : « , les moyens techniques et humains mis en œuvre » ;
- sont ajoutés deux phrases ainsi rédigées :
« Le projet scientifique d’intervention en est une partie intégrante. La mise en œuvre du contrat est subordonnée à la délivrance de l’autorisation de fouilles par l’État. » ;
c) Le deuxième alinéa est supprimé ;
d) Après le deuxième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« L’État s’assure que les conditions d’emploi du responsable scientifique de l’opération sont compatibles avec la réalisation de l’opération jusqu’à la remise du rapport de fouilles.
« La fonction de responsable scientifique d’opération, une fois l’arrêté d’autorisation de fouille délivré, ne peut être déléguée.
« La réalisation de l’opération de fouilles ne peut être sous-traitée. Elle est exécutée sous l’autorité des personnels scientifiques dont les compétences ont justifié l’agrément de l’opérateur. » ;
e) À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « quatrième » et le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;
f) À la première phrase du dernier alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement vise à donner compétence à l’État pour fixer le cahier des charges des opérations de fouilles, comme c'était initialement prévu dans le projet de loi. Il s’agit donc d’un rétablissement du texte dans une version qui nous semble plus conforme à l’esprit de la mission de service public de l’archéologie préventive, mission dont l’État doit être le garant.
En particulier, cet amendement tend à rétablir la transmission au service de l’État, pour validation scientifique, de l’ensemble des offres reçues préalablement au choix que devra ensuite effectuer l’aménageur.
La Cour des comptes, dans son rapport pour 2016, présenté par Didier Migaud au Sénat hier matin, estime justement que ces dispositions vont dans la bonne direction pour garantir le libre jeu de la concurrence.
L’amendement vise néanmoins à modifier le texte adopté par l’Assemblée nationale, afin de préciser la notion de sous-traitance. En effet, la version de l’Assemblée nationale interdit la sous-traitance pour l’ensemble de la prestation.
Le texte que nous proposons limite cette interdiction à l’opération de fouilles. Il est fondamental d’interdire ce type de délégation pour veiller à la qualité scientifique des opérations, ce qui est conforme aux articles R. 522-1 et suivants du code du patrimoine, selon lesquels le responsable scientifique est désigné nommément pour toute opération de fouille.
En revanche, les opérations de terrassement, phase fondamentale de décapage qui requiert des engins avec chauffeurs dont aucun opérateur, y compris l’INRAP, ne dispose, doivent pouvoir être déléguées à des entreprises compétentes.
Comme tout opérateur, l’INRAP recourt à la sous-traitance, en conformité avec le code des marchés publics, dans le cadre de collaborations avec les collectivités territoriales, mais surtout auprès d’entreprises privées pour opérer le terrassement.
Nous demandons donc que la sous-traitance demeure autorisée, mais dans un cadre bien précis.
Mme la présidente. L’amendement n° 270, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 45 à 49
Remplacer ces alinéas par quinze alinéas ainsi rédigés :
5° L’article L. 523-9 est ainsi modifié :
a) Au début, sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu’une prescription de fouilles est notifiée à la personne qui projette d’exécuter les travaux, celle-ci sollicite les offres d’un ou de plusieurs des opérateurs mentionnés à l’article L. 523-8.
« Les éléments constitutifs des offres des opérateurs sont définis par arrêté du ministre chargé de la culture. Ils comportent notamment un projet scientifique d’intervention, le prix proposé et une description détaillée des moyens humains et techniques mis en œuvre.
« Préalablement au choix de l’opérateur par la personne qui projette d’exécuter les travaux, celle-ci transmet à l’État l’ensemble des offres reçues. L’État procède à la vérification de leur conformité aux prescriptions de fouilles édictées en application de l’article L. 522-2, note le volet scientifique et s’assure de l’adéquation entre les projets et les moyens prévus par l’opérateur. » ;
b) Le premier alinéa est ainsi modifié :
- après le mot : « prix », sont insérés les mots : « , les moyens techniques et humains mis en œuvre » ;
- sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :
« Le projet scientifique d’intervention en est une partie intégrante. La mise en œuvre du contrat est subordonnée à la délivrance de l’autorisation de fouilles par l’État. » ;
c) Le deuxième alinéa est supprimé ;
d) Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« L’État s’assure que les conditions d’emploi du responsable scientifique de l’opération sont compatibles avec la réalisation de l’opération jusqu’à la remise du rapport de fouilles.
« La prestation qui fait l’objet du contrat ne peut être sous-traitée. Elle est exécutée sous l’autorité des personnels scientifiques dont les compétences ont justifié l’agrément de l’opérateur. » ;
e) À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « quatrième » et le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;
f) À la première phrase du dernier alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Il s’agit du dernier amendement de réintroduction que nous présentons à l’article 20. Cette disposition répond à la même préoccupation que celle que vient d’exprimer notre collègue.
Même si nous avons des doutes sur la pleine efficacité de la procédure de contrôle a priori des offres des opérateurs, nous regrettons profondément la disparition de cette disposition intervenue lors de l’examen du texte par la commission. Nous proposons donc le rétablissement de ce contrôle a priori, sanctionné par une notation des candidatures d’opérateurs.
Il s’agit pour nous d’assurer des prestations de qualité, mais aussi d’assister les aménageurs, pas toujours en capacité de choisir leur opérateur autrement que par la voie des critères économiques. Ce contrôle permet donc de vérifier non seulement la qualité de la prestation, mais aussi l’absence de pratique illicite.
Nous regrettons la disparition des dispositions adoptées par l’Assemblée nationale, tout comme nous regrettons et condamnons la disparition de l’interdiction de sous-traiter des fouilles, qui ne peut, en aucun cas, se justifier.
En interdisant la sous-traitance, nous voulons garantir la transparence et lutter contre les pratiques frauduleuses telles que les candidatures prête-noms. Il est essentiel que l’aménageur et l’État puissent identifier clairement qui pratique les opérations de fouilles, car c’est une question d’honnêteté et d’égalité entre les candidats.
L’attribution du contrat de fouilles est forcément influencée par le nom du responsable technique reconnu pour ses savoirs et ses compétences. Il est étonnant, de ce point de vue, que la majorité sénatoriale lutte farouchement contre les signatures de complaisance dans le cadre de l’architecture et, ici encore, défende une disposition qui peut, en laissant la porte ouverte à la sous-traitance, introduire des pratiques regrettables.
Mme la présidente. L’amendement n° 412 rectifié, présenté par M. Doligé, Mme Billon, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. de Legge et de Nicolaÿ, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, J. Gautier, Gournac, Gremillet et Joyandet, Mmes Lamure et Lopez, M. Mayet, Mme Morhet-Richaud et MM. Morisset, Reichardt et Savin, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 49
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Le coût des travaux de fouilles imposés par les services de l’État ne peut en aucun cas représenter plus de 5 % de la valeur du terrain.
« Lorsque le délai de réalisation des travaux rend impossible la réalisation de l’opération projetée sur le terrain concerné, un délai de travaux compatible avec le projet est fixé par le représentant de l’État. Le nouveau délai est proposé dans les quinze jours de la demande de révision du délai initial formulée par la personne projetant d’exécuter les travaux ou de vendre le terrain concerné. » ;
La parole est à Mme Caroline Cayeux.
Mme Caroline Cayeux. Cet amendement est proche de l’amendement n° 411 rectifié, que j’ai retiré tout à l’heure.
Nous tenons à ce que le coût des travaux de fouilles ne soit pas trop en décalage par rapport à la valeur des terrains. Nous nous inscrivons toujours dans la perspective d’une simplification des procédures, afin de permettre un déroulement plus rapide des travaux.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Nous sommes au cœur du débat sur l’archéologie préventive. Mes chers collègues, je vous demande donc par avance de m’excuser si je suis un peu longue, mais je pense que ces explications seront de nature à balayer nos dernières interrogations.
Les amendements nos 141 rectifié et 270 tendent à rétablir la disposition votée par l’Assemblée nationale, qui oblige les aménageurs à soumettre l’ensemble des offres au contrôle des services régionaux de l’archéologie, qui devront, en outre, noter le volet scientifique. Nous nous y opposons pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, nous estimons que la notation du volet scientifique des offres outrepasse le rôle de l’État. L’aménageur est le seul maître d’ouvrage et il est de sa responsabilité et de sa compétence de choisir l’offre qui lui convient le mieux, l’État étant bien entendu chargé de vérifier que le projet scientifique d’intervention respecte le cahier des charges qu’il a établi. En réalité, la disposition proposée par les auteurs de ces deux amendements crée une suspicion généralisée d’incompétence à l’encontre des opérateurs et des aménageurs.
Ensuite, cette mesure risque soit d’être inopérante, car les services régionaux de l’archéologie seront incapables de faire face à cette surcharge de travail, soit d’accentuer les risques de favoritisme, puisque le Gouvernement prévoit de renforcer les effectifs de ses services régionaux avec du personnel de l’INRAP : ce dernier se retrouvera donc juge et partie !
Que veut-on atteindre par cette mesure ? La fin de la guerre des prix que se livrent l’INRAP, les services archéologiques des collectivités territoriales et les opérateurs privés ? Ces derniers ont leur part de responsabilité, mais ils ne peuvent pas jouer ce jeu longtemps sans remettre en cause leur viabilité économique. En revanche, lorsque l’INRAP, qui assure 48 % des fouilles, accorde des remises de 35 %, il influence durablement les prix à la baisse, sans pour autant en subir les conséquences financières, puisque son déficit est systématiquement compensé par des subventions d’équilibre exceptionnelles.
J’invite donc les auteurs de ces amendements à s’adresser avec moi à Mme la ministre pour lui demander de rédiger enfin le guide de bonne conduite pour la passation des marchés de fouilles d’archéologie préventive, d’arrêter enfin les normes en matière d’établissement des devis et de renforcer les capacités de contrôle et d’évaluation scientifique des services régionaux de l’archéologie. Si ces demandes obtenaient satisfaction, nous n’aurions plus besoin des mesures contenues dans ces amendements.
Par ailleurs, les auteurs de ces amendements cherchent à améliorer la rédaction des dispositions relatives au responsable scientifique, mais le résultat n’est pas satisfaisant. Ils proposent de préciser – pardonnez ces propos très techniques – que « la fonction de responsable scientifique d’opération, une fois l’arrêté d’autorisation de fouilles délivré, ne peut être déléguée. » En l’occurrence, c’est déjà le cas ! En plus de l’arrêté d’autorisation de fouilles, le préfet signe un arrêté de désignation du responsable scientifique de l’opération de fouilles. De grâce, cessons de polluer la loi !
J’en viens maintenant à la question de la sous-traitance.
Les auteurs de l’amendement n° 141 rectifié proposent d’inscrire dans la loi que « la réalisation de l’opération de fouilles ne peut être sous-traitée ». Cette rédaction est bien meilleure que celle du projet de loi initial. Prenons garde, malgré tout, que l’État ne confonde pas sous-traitance et « co-traitance ». En effet, il arrive régulièrement que deux opérateurs fassent une offre compatible.
En revanche, la disposition selon laquelle l’opération de fouilles « est exécutée sous l’autorité des personnels scientifiques dont les compétences ont justifié l’agrément de l’opérateur » non seulement porte à confusion, mais est sans intérêt en raison de l’arrêté de désignation dont j’ai parlé précédemment.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur les amendements nos 141 rectifié et 270.
En ce qui concerne l’amendement n° 412 rectifié, le dispositif actuel essaie de concilier la sauvegarde du patrimoine archéologique national avec le développement économique. Néanmoins, il est de la responsabilité de l’aménageur de vérifier in fine si le coût des fouilles remet en cause son projet et, le cas échéant, de choisir un autre emplacement. La commission a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je voudrais revenir sur le déroulement des procédures.
Les aménageurs qui sélectionnent les opérateurs le font en général – on les comprend – sur des critères de prix et de délais, car ils ne disposent pas des compétences requises pour évaluer la qualité technique et scientifique des offres.
En revanche, si cette compétence scientifique et technique est insuffisante dans l’offre retenue, ils vont se trouver in fine empêchés de mener à bien leur projet, ce qui pourra allonger les délais de réalisation. En effet, si les fouilles ne sont pas autorisées, ils s’exposent au risque de devoir sélectionner un nouvel opérateur en cas de refus de l’État.
L’objectif de rétablissement du texte adopté par l’Assemblée nationale est bien de garantir la qualité scientifique et de sécuriser le choix des opérateurs par les aménageurs en amont de la signature des contrats, ce qui permettra aussi de garantir le respect des délais.
Une fois les offres des opérateurs validées d’un point de vue scientifique par l’État, les aménageurs auront bien évidemment toute liberté de choisir les opérateurs qu’ils souhaitent, notamment en tenant compte des délais et des prix proposés. Il nous semble donc que le dispositif initial est un élément de sécurisation et de garantie des délais.
C’est pourquoi j’émets un avis favorable sur les amendements nos 141 rectifié et 270.
En revanche, l’amendement n° 412 rectifié a un autre objet, que nous avons déjà évoqué lors de l’examen d’un précédent amendement. L’avis du Gouvernement reste défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote sur l’amendement n° 141 rectifié.
Mme Marie-Pierre Monier. Je voudrais tout d’abord revenir sur la façon dont la commission a rédigé le texte. Je comprends qu’une seule offre sera retenue et soumise aux services de l’État pour vérification de sa conformité.
Or nos auditions ont révélé qu’il était fondamental que plusieurs offres soient examinées, et c’est la raison pour laquelle le texte initial du projet de loi le prévoyait. En effet, auparavant, une seule offre était soumise à examen ; lorsque sa conformité scientifique n’était pas reconnue, il fallait relancer une procédure pour choisir un autre opérateur. C’est justement pour éviter ce risque de rallongement de la procédure qu’il a été décidé que plusieurs offres devaient être soumises au contrôle scientifique et que l’aménageur pouvait ensuite effectuer son choix.
Il est vrai que la présence du terme « noter » dans le texte adopté par l’Assemblée nationale a parfois été mal perçue, parce qu’elle a été assimilée à un classement qui aurait pu influer sur le choix de l’opérateur. Peut-être ce point mériterait-il d’être revu.
Ensuite, je voudrais insister sur la notion de qualité scientifique. En effet, une démarche scientifique très stricte doit être observée lorsque l’on veut fouiller, car le prélèvement sans méthode d’un bien détruit les couches stratigraphiques permettant de restituer le contexte archéologique. Il faut être conscient que l’objet des fouilles est non pas seulement de trouver des objets, mais aussi d’analyser l’ensemble du contexte. Si ces opérations ne sont pas effectuées de manière rigoureuse d’un point de vue scientifique et technique, des données fondamentales sont détruites.
Il est donc normal que la délivrance des autorisations administratives n’intervienne qu’après un contrôle scientifique et technique très vigilant de la part de l’État.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 142 rectifié est présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 455 rectifié est présenté par Mme Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 56
Supprimer les mots :
et par tout opérateur agréé mentionné à l’article L. 523-8
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° 142 rectifié.
Mme Marie-Pierre Monier. Nous ne souhaitons pas autoriser les sociétés privées à exploiter les rapports de fouilles.
Il est opportun que ces rapports de fouilles puissent être exploités par les services d’archéologie des collectivités territoriales, puisque la coopération scientifique entre l’État et les collectivités territoriales en matière d’archéologie sera définie par l’intermédiaire des conventions prévues dans la procédure d’habilitation.
En revanche, le permettre pour des opérateurs privés serait contraire au principe de l’exclusivité de l’exploitation des résultats de fouilles par l’opérateur public, qui avait été, je le rappelle à nouveau, posé en 2003 par le Conseil constitutionnel.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 455 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Dans un souci d’intérêt public, il est justifié de permettre aux services archéologiques des collectivités territoriales – quand celles-ci en possèdent ! – sur le territoire desquelles une opération de fouilles a été réalisée d’accéder à l’exploitation scientifique des résultats des fouilles en étant destinataire du rapport de fouilles, même quand ils n’ont pas participé à ces dernières.
En revanche, il ne semble pas opportun que des opérateurs privés, même agréés, aient accès aux résultats d’opérations de fouilles auxquelles ils n’ont pas participé.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ces amendements identiques tendent à supprimer la possibilité offerte aux opérateurs agréés de se faire transmettre les rapports d’opération à des fins d’études scientifiques. Ce serait tout de même dommage ! Ces dispositions, une fois de plus, présentent une image quelque peu caricaturale, selon laquelle les acteurs publics de l’archéologie feraient de la recherche, mais pas les acteurs privés. Or tel n’est pas le cas !
En 2013, on relève, pour cent équivalents temps plein, une moyenne de trente publications scientifiques à l’INRAP, contre vingt-huit chez les opérateurs privés. Personne n’a à rougir de cette situation ! Pourquoi donc empêcher les seconds d’avoir accès aux rapports d’opérations de fouilles des autres, lorsqu’ils souhaitent les utiliser dans un but seulement scientifique ?
L’avis de la commission est donc défavorable sur ces amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Ma remarque de soutien à ces amendements risque de ne pas détendre l’atmosphère : la majorité sénatoriale est très prompte à défendre le secret des affaires, y compris lorsque la connaissance de certaines formules de molécules ou de données sanitaires apparaît conforme à l’intérêt public. Et aujourd’hui, alors qu’un partenaire fait de la production scientifique avec ses propres moyens, il faudrait soudain que tout le monde joue cartes sur table !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 142 rectifié et 455 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 143 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 60
Après le mot :
fixe
insérer les mots :
le prix et
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. L’INRAP, au titre de sa mission de service public, est chargé de mener à terme toutes les opérations non achevées pour cause de défaillance d’un opérateur. Il convient donc de prévoir une rémunération de l’Institut pour l’accomplissement de cette mission.
Les sommes que reçoit cet organisme au titre de subventions pour compensation de charges de service public sont forfaitaires, et rien ne précise qu’elles sont destinées à prendre en charge les opérations délaissées par d’autres opérateurs.
Sur ce point, les projets annuels de performance, ou PAP, annexés au budget ne flèchent rien, et le ministère indique que cette compensation permet de prendre en charge « des dépenses publiques liées aux missions qui ne sont pas financées par la redevance pour l’archéologie préventive, notamment la capacité d’intervention permanente de l’établissement pour toutes les périodes chronologiques et sur l’ensemble du territoire. »
Je rappelle que, jusqu’à cette année, cette compensation comblait seulement le manque à gagner dû à l’insuffisance du produit de la redevance d’archéologie préventive, la RAP. De plus, la partie consacrée à l’archéologie préventive du rapport de la Cour des comptes de 2016 ne considère pas le paiement demandé par l’INRAP pour la reprise des fouilles comme un dysfonctionnement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Sans aucun esprit polémique, je souhaite rappeler que l’INRAP a obtenu depuis 2015 le versement d’une subvention pour charge de service public, dont la commission de la culture s’interroge non seulement sur la pertinence, mais également sur la constitutionnalité.
Pour justifier cette subvention, le Gouvernement avance l’obligation pour l’INRAP de poursuivre des opérations de fouilles qui auraient été interrompues en cas de cessation d’activité de l’opérateur chargé de ladite fouille ou de retrait de son agrément.
Nous ne pouvons admettre que l’aménageur soit obligé de payer une seconde fois une prestation qu’il a déjà payée ! Tel est en effet le sens de cet amendement.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, cet amendement a pour objet de rétablir le texte de l’Assemblée nationale en ce qui concerne le contenu du contrat passé entre un aménageur et l’INRAP lorsque l’établissement public est contraint de reprendre une opération inachevée.
Cette reprise des fouilles, en cas de défaillance d’un opérateur, doit se dérouler dans de bonnes conditions économiques. Or le maître d’ouvrage d’une opération laissée inachevée n’en a pas nécessairement payé la totalité du prix, car les règlements se font souvent par tranches.
Il n’y a pas de raison que les prestations réalisées par l’INRAP pour achever l’opération ne donnent pas lieu au paiement du prix correspondant par le maître d’ouvrage de la fouille. Il est légitime que cette reprise d’opération, qui constitue une charge pour l’établissement, soit intégrée dans une convention entre l’opérateur et l’aménageur.
L’avis du Gouvernement est donc favorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je rappellerai les chiffres : trois faillites en treize ans. Il ne s’agit donc pas d’une situation catastrophique, contre laquelle l’INRAP devrait absolument se prémunir ! L’aménageur a déjà payé une fois son prestataire, et l’on demande ici que l’INRAP soit payé une seconde fois. Nous ne sommes donc pas d’accord.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Nous envisageons cette situation différemment. Ces interventions n’entrent pas dans les missions premières de l’INRAP, mais constituent une surcharge, qui se manifeste lorsque l’Institut est contraint de pallier un manquement des opérateurs.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Trois faillites en treize ans !
Mme la présidente. L’amendement n° 321, présenté par MM. Eblé et Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 69
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas d’opérations archéologiques conduites par les services agréés d’une collectivité territoriale sur une propriété de celle-ci, les vestiges ainsi découverts appartiennent à ladite collectivité.
La parole est à M. Vincent Eblé.
M. Vincent Eblé. Cet amendement vise à inscrire dans la loi que les mobiliers de fouilles découverts dans le cadre d’opérations archéologiques conduites par des services agréés d’une collectivité locale sur la propriété de celle-ci lui appartiennent.
Il s’agit donc d’une sorte de dérogation au principe d’appropriation des mobiliers de fouilles par l’État, sans pour autant que le principe de propriété publique soit mis en cause : lorsque la double condition de conduite des opérations archéologiques par la collectivité sur sa propriété est remplie, alors ce qui est exhumé lui appartient.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je comprends parfaitement votre préoccupation d’éviter que les collectivités ne soient dépouillées d’un patrimoine qu’elles auraient mis à jour sur leur territoire.
Il convient néanmoins de rappeler que celles-ci, si elles souhaitent conserver et valoriser leur patrimoine, peuvent bénéficier de transferts de propriété à titre gratuit de la part de l’État. Cela ne pose aucune difficulté, et votre amendement me semble donc satisfait.
La commission émet par conséquent un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement vise à conférer à une collectivité territoriale la possibilité de devenir propriétaire des objets mobiliers découverts au cours de fouilles, à la double condition qu’elle conduise elle-même ces opérations archéologiques et que ces fouilles se déroulent sur des terrains qui lui appartiennent.
Comme l’a rappelé Mme la rapporteur, le projet de loi contient déjà des dispositions permettant d’opérer des transferts de propriété à titre gratuit de l’État au profit des collectivités.
Monsieur le sénateur, je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Eblé, l’amendement n° 321 est-il maintenu ?
M. Vincent Eblé. Je le retire, madame la présidente, non sans souligner la différence fondamentale qui existe entre reconnaître la propriété de la collectivité et obtenir de l’État un transfert de propriété !
Mme la présidente. L’amendement n° 321 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 444 rectifié bis, présenté par MM. Requier, Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéas 77 à 80
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. L’article L. 541-4 nouveau du code du patrimoine transfère au profit de l’État le régime de propriété des biens issus des fouilles archéologiques.
Si cet article est adopté, il est certain que les trésors archéologiques découverts, surtout de manière fortuite, ne seront plus révélés, car le propriétaire du fonds n’y aura plus intérêt. Par cet amendement, nous proposons donc de supprimer cette disposition, afin que les mises au jour de trésors archéologiques soient révélées et connues de tous.
Mme la présidente. L’amendement n° 344, présenté par M. Boulard, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 444 rectifié bis ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer la présomption de propriété publique sur les biens archéologiques mobiliers mis au jour sur des terrains dont la propriété a été acquise après la date d’entrée en vigueur de la présente loi et lorsqu’ils ont un intérêt scientifique.
Cette disposition a été introduite dans l’article 20 du présent projet de loi, dont elle constitue une mesure phare. Elle se justifie par le fait que les biens archéologiques mobiliers permettent d’expliquer l’histoire de notre société et doivent donc relever du domaine public.
L’avis de la commission est par conséquent défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. La propriété publique n’est pas un obstacle à la déclaration des découvertes. La grande majorité des biens archéologiques sont découverts dans le cadre d’opérations archéologiques contrôlées par l’État. On entend beaucoup moins parler des découvertes fortuites !
Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable.
M. Jean-Claude Requier. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 444 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 16 rectifié bis, présenté par Mmes Mélot et Duchêne, MM. Houel et Pellevat, Mmes Cayeux et Garriaud-Maylam, MM. Dufaut, Mouiller, D. Laurent et Trillard, Mme Di Folco, M. Kennel, Mme Morhet-Richaud, M. Laufoaulu, Mmes Giudicelli et Imbert, MM. Cornu, Reichardt et Bouchet, Mme Lopez, MM. G. Bailly et Pointereau, Mme Duranton, MM. Masclet et P. Leroy, Mme Deromedi, M. Raison et Mme Gruny, est ainsi libellé :
Alinéas 87 à 97
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise le régime de propriété du patrimoine archéologique.
Outre qu’il sera facteur de complexité, puisque les règles ne seront pas les mêmes selon la date d’acquisition du terrain où sera effectuée la découverte – une différence est introduite entre les terrains acquis au 1er janvier 2001 et ceux qui l’ont été avant cette date –, le dispositif proposé ne manquera pas d’entraîner des effets pervers. En effet, dans l’incertitude sur la possibilité d’obtenir une indemnité, comme c’était le cas auparavant, les inventeurs auront intérêt à dissimuler leurs découvertes et à les écouler sur les marchés parallèles.
En comparant le système proposé ici à celui qui est en vigueur au Royaume-Uni, il apparaît que l’efficacité du Treasure Act britannique, fondé sur une logique opposée à celle du présent projet de loi, montre que c’est en préservant les intérêts de l’inventeur que l’on multiplie les découvertes archéologiques susceptibles d’enrichir les collections publiques.
Cet amendement tend donc à supprimer le dispositif introduit par le projet de loi dans le cas des biens mobiliers.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. La présomption de propriété publique sur les biens archéologiques est justifiée. En effet, le patrimoine archéologique est le bien commun de la nation, puisqu’il permet de retracer l’histoire du développement de l’humanité. Plusieurs pays ont adopté un système similaire : la Grèce, l’Allemagne ou encore la Suisse.
Ma chère collègue, je comprends votre crainte que les inventeurs cessent de se soumettre à l’obligation de déclaration de leurs découvertes. Hélas, ils sont déjà peu nombreux à le faire.
Mme Colette Mélot. Eh oui !
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cette disposition sensibilisera les inventeurs de bonne foi sur le fait que le patrimoine archéologique ne peut être accaparé par des individus.
Les inventeurs peu scrupuleux sont, eux, déjà hors la loi. En revanche, le projet de loi donne à l’État les moyens de récupérer ces biens, notamment à l’occasion de ventes ou de sorties du territoire.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable, ce que je regretterais infiniment.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Mélot, l’amendement n° 16 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Je voulais attirer l’attention sur ce point, parce qu’il me semble que certaines découvertes risquent d’être dissimulées. Certes, la plupart des biens trouvés sont déposés dans des services de l’État, mais il me semblait possible de donner aux inventeurs la liberté de prendre eux-mêmes leur décision.
Cela dit, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 16 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 261, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les difficultés rencontrées par les agents nationaux, régionaux et communaux de l’archéologie préventive pour user de passerelles entre les différents services publics de l’archéologie préventive et sur l’opportunité d’un statut unifié d’archéologue.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Mes chers collègues, je m’apprête à subir votre courroux, puisque les auteurs de cet amendement demandent au Gouvernement la remise au Parlement d’un rapport. (Sourires.) Celui-ci porterait sur les difficultés rencontrées par les agents nationaux, régionaux et communaux en matière de passerelles entre les différents échelons de l’archéologie préventive.
Par ailleurs, il nous semble essentiel de travailler à l’unification du statut d’archéologue, la situation actuelle expliquant pour partie les difficultés que je viens d’évoquer.
Ce rapport doit permettre de remettre à plat les questions statutaires au bénéfice des salariés de l’Institut national de recherches archéologiques préventives, l’INRAP, et des services locaux. Dans le premier cas, la dérogation, accordée en 2001, permettant à l’Institut de recruter des agents non titulaires a conduit à une généralisation des CDD et à des situations ubuesques.
Cette dérogation n’a plus de sens aujourd’hui. J’en veux pour exemple que des agents de l’INRAP central se trouvent obligés de démissionner pour rejoindre un service archéologique territorial déconcentré. L’argument invoqué en 2001, qui, pour le coup, se tenait, consistait à justifier cette dérogation par l’existence d’une taxe affectée dont l’établissement assurait directement le recouvrement. Or cet argument tombe, puisque ladite taxe est supprimée.
Supprimer cette dérogation et titulariser les agents, c’est à la fois sécuriser la position de ces derniers et lever une bonne partie des barrages à la mobilité des personnels entre l’INRAP, les services régionaux de l’archéologie et le Centre national de la recherche scientifique, le CNRS.
La situation est plus complexe entre les services déconcentrés et les services décentralisés, ces derniers ne disposant pas de corps de recherche dans la fonction publique territoriale. La possibilité ouverte aux collectivités depuis 2003 de recruter comme agents non titulaires des travailleurs de l’INRAP en CDI a rapidement montré ses limites et les risques qu’elle comportait, malgré la conservation pour ces agents de certains bénéfices de leur ancien contrat.
Ce rapport devrait permettre de dégager des réflexions, des solutions, notamment s'agissant de la création d’un statut unifié d’archéologue liant ensemble des travailleurs de la fonction publique, cette dernière piste trouvant un écho particulier à nos yeux.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ma chère collègue, vous êtes exaucée deux fois, et encore bien plus vite que vous ne l’imaginiez, puisque, le 15 décembre dernier, les ministres de la culture et de l’éducation nationale ont confié à M. Philippe Barbat, directeur de l’Institut national du patrimoine, la mission de rédiger un rapport sur ce sujet.
Nous pourrons en prendre connaissance très rapidement, et quand je dis très rapidement, c’est encore plus vite qu’on ne l’imagine, puisque ce sera le 29 février prochain. Je ne mets pas en doute les compétences de M. Barbat, mais ce délai semble très court ! Sur ce point, vous êtes donc parfaitement exaucée.
En ce qui concerne les personnels, permettez-moi de lire un paragraphe de sa lettre de mission, qui achèvera de nous éclairer : « Par ailleurs, la mobilité des agents de l’INRAP, notamment vers les services de l’État, serait de nature à renforcer les compétences techniques et scientifiques de ces services, qui vont être particulièrement sollicités dans la mise en œuvre des dispositions de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. » C’est à se demander si l’on a encore besoin de travailler sur ce texte de loi ! (Sourires.)
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je comprends la préoccupation qui est exprimée, à savoir créer des possibilités de mobilité pour les archéologues, notamment pour les agents de l’INRAP, et faciliter cette mobilité.
Cette mobilité sera utile ; elle l’est déjà lorsqu’elle existe, pour faire bénéficier les services de l’État et les collectivités territoriales des compétences techniques et scientifiques de ces agents hautement qualifiés, et de contribuer ainsi à l’amélioration de la politique publique de l’archéologie nationale. Elle peut également se révéler utile pour offrir une deuxième carrière à des archéologues qui ne peuvent plus aller sur le terrain.
Il est vrai que le statut dérogatoire qui régit les agents de cet établissement public, l’INRAP, constitue parfois un frein à la mobilité des agents. Plusieurs pistes peuvent être envisagées et évaluées, et comme cela a été rappelé par Mme la rapporteur, la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche et le ministère de la culture et de la communication ont missionné le directeur de l’Institut national du patrimoine pour mener une réflexion et formuler des propositions précisément et rapidement sur ces questions.
Madame la sénatrice, cet amendement me semblant satisfait, je vous demande de bien vouloir le retirer.
Mme la présidente. Madame Gonthier-Maurin, l'amendement n° 261 est-il maintenu ?
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je ne doute pas que nous entendrons rapidement au sein de la commission le fruit de toutes ces réflexions et propositions !
En attendant, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 261 est retiré.
Je mets aux voix l'article 20, modifié.
(L'article 20 est adopté.)
Article 20 bis A (nouveau)
Après le chapitre II du titre II du livre V du code du patrimoine, il est inséré un chapitre II bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE II BIS
« Instances scientifiques
« Section 1
« Le Conseil national de la recherche scientifique
« Art. L. 522-9. – Le Conseil national de la recherche archéologique est placé auprès du ministre chargé de la culture.
« Il est présidé par le ministre chargé de la culture ou, en son absence, par le vice-président désigné dans les conditions prévues à l’article L. 522-12.
« Art. L. 522-10. – Le Conseil national de la recherche archéologique est compétent pour les questions relatives aux recherches archéologiques sur le territoire national, sous réserve des compétences attribuées aux commissions interrégionales de la recherche archéologique définies à la section 2 du présent chapitre.
« Le Conseil national de la recherche archéologique est consulté sur toute question intéressant la recherche archéologique que lui soumet le ministre chargé de la culture.
« Il examine et il propose toute mesure relative à l’étude scientifique du patrimoine archéologique et à son inventaire, à la publication et à la diffusion des résultats de la recherche ainsi qu’à la protection, à la conservation et à la mise en valeur de ce patrimoine.
« À ce titre, le Conseil national de la recherche archéologique :
« 1° Propose au ministre chargé de la culture les objectifs généraux de la recherche, assure une mission de prospective scientifique ainsi que l’harmonisation nationale des programmations interrégionales et émet des avis sur les principes, les méthodes et les normes de la recherche en archéologie ;
« 2° Peut être consulté sur tout dossier transmis au ministre chargé de la culture par le représentant de l’État dans la région, siège de commission interrégionale de la recherche archéologique, en particulier sur les dossiers concernant plusieurs interrégions ;
« 3° Contribue à la mise en place de réseaux et de partenariats scientifiques aux niveaux national et international ;
« 4° Participe à la réflexion en matière d’archéologie dans le cadre de la coopération européenne et internationale et en apprécie les effets, notamment dans les domaines de la formation et des échanges de savoir-faire ;
« 5° Procède à toute évaluation scientifique à la demande du ministre chargé de la culture ;
« 6° Établit chaque année la liste des experts compétents pour déterminer la valeur d’objets provenant de fouilles archéologiques et de découvertes fortuites.
« Il émet, en outre, les avis mentionnés aux articles L. 522-8, L. 523-8 et L. 523-8-1.
« Art. L. 522-11. – Le Conseil national de la recherche archéologique élabore, tous les quatre ans, un rapport détaillé sur l’état de la recherche archéologique effectuée sur le territoire national.
« Art. L. 522-12. – Outre son président, le Conseil national de la recherche archéologique comprend :
« 1° Cinq représentants de l’État, membres de droit :
« 2° Quatorze personnalités qualifiées, nommées par arrêté du ministre chargé de la culture, choisies en raison de leurs compétences scientifiques en matière d’archéologie, dont :
« a) Deux membres issus des corps des conservateurs généraux du patrimoine, conservateurs du patrimoine, ingénieurs de recherche et ingénieurs d’étude compétents en matière d’archéologie et affectés dans une direction régionale des affaires culturelles, à la direction générale des patrimoines ou dans un service à compétence nationale rattaché à cette direction ;
« b) Un membre choisi au sein des conservateurs généraux du patrimoine et conservateurs du patrimoine ou du cadre d’emplois des conservateurs territoriaux du patrimoine, affecté dans un musée de France conservant des collections archéologiques ;
« c) Deux membres choisis parmi les agents de l’Institut national de recherches archéologiques préventives ;
« d) Deux membres choisis parmi les conservateurs du patrimoine ou les attachés de conservation du patrimoine travaillant dans un service archéologique de collectivité territoriale ;
« e) Deux membres choisis parmi les opérateurs agréés mentionnés à l’article L. 523-8 ;
« f) Deux membres choisis parmi les directeurs de recherche, les chargés de recherche et les ingénieurs du Centre national de la recherche scientifique, compétents en matière d’archéologie du territoire national, après avis des sections compétentes du Comité national de la recherche scientifique, à raison d’un membre par section ;
« g) Deux membres choisis parmi les professeurs et maîtres de conférences des universités ou les personnels qui leur sont assimilés, compétents en matière d’archéologie du territoire national, après avis des sections compétentes du Conseil national des universités ;
« h) Un membre choisi parmi les chercheurs spécialisés en archéologie exerçant leurs fonctions dans des institutions étrangères ;
« 3° Quatorze membres élus en leur sein par les commissions interrégionales de la recherche archéologique à raison de deux membres par commission ;
« Le vice-président du Conseil national de la recherche archéologique est désigné par arrêté du ministre chargé de la culture après accord du ministre chargé de la recherche parmi les membres mentionnés au 2°.
« Art. L. 522-13. – Un décret en Conseil d’État précise ses modalités de fonctionnement ainsi que les conditions de désignation de ses membres et la durée de leurs mandats.
« Section 2
« Les commissions interrégionales de la recherche scientifique
« Art. L. 522-14. – Les commissions interrégionales de la recherche scientifique sont au nombre de sept. Elles sont présidées par le représentant de la région dans laquelle la commission interrégionale a son siège, ou par son représentant.
« Art. L. 522-15. – Chaque commission interrégionale de la recherche archéologique est compétente pour les questions relatives aux recherches archéologiques qui relèvent de son ressort territorial.
« Elle procède à l’évaluation scientifique des opérations archéologiques et de leurs résultats. Elle examine pour chaque région le bilan de l’année écoulée et le programme de l’année à venir et formule toute proposition et tout avis sur l’ensemble de l’activité archéologique, y compris pour le développement des études et des publications.
« Elle participe à l’élaboration de la programmation scientifique et établit, à l’issue de son mandat, un rapport sur l’activité de la recherche archéologique dans son ressort.
« Sur saisine du représentant de l’État dans la région, elle émet des avis dans les cas prévus par décret en Conseil d’État.
« Elle peut également être consultée sur toute question que lui soumet le représentant de l’État dans la région.
« Art. L. 522-16. – Les six commissions interrégionales de la recherche archéologique métropolitaines comprennent chacune, outre leur président, huit membres compétents pour les recherches archéologiques, nommés par le représentant dans la région sur proposition du directeur régional des affaires culturelles de la région siège de la commission, à savoir :
« a) Un directeur de recherche, un chargé de recherche ou un ingénieur du Centre national de la recherche scientifique, après avis des sections compétentes du Comité national de la recherche scientifique ;
« b) Un professeur, un maître de conférences des universités, ou un membre des personnels qui leur sont assimilés, après avis des sections compétentes du Conseil national des universités ;
« c) Un conservateur général du patrimoine, un conservateur du patrimoine, un ingénieur de recherche, un ingénieur d’étude ou un assistant ingénieur compétent en matière d’archéologie et affecté dans une direction régionale des affaires culturelles, à la direction générale des patrimoines ou dans un service à compétence nationale en relevant ;
« d) Un agent d’une collectivité territoriale compétent en matière d’archéologie ;
« e) Trois spécialistes choisis en raison de leur compétence en matière d’archéologie, dont au moins un choisi parmi les opérateurs agréés mentionnés à l’article L. 523-8 ;
« f) Un agent de la filière scientifique et technique de l’Institut national de recherches archéologiques préventives, après avis du conseil scientifique de cet établissement public.
« Un membre du service de l’inspection des patrimoines compétent en matière d’archéologie, désigné par le ministre chargé de la culture, assiste aux séances avec voix consultative.
« Dans chaque commission, au moins trois membres n’ont pas leur résidence administrative dans le ressort des régions sur le territoire desquelles s’exerce la compétence de celle-ci.
« Art. L. 522-17. – Un décret en Conseil d’État précise leurs modalités de fonctionnement ainsi que les conditions de désignation de leurs membres et la durée de leurs mandats. » – (Adopté.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Madame la présidente, je sollicite une suspension de séance d’une dizaine de minutes.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante.)
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 144 rectifié est présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 271 est présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 405 est présenté par Mmes Bouchoux, Blandin et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 456 rectifié est présenté par Mme Jouve et M. Mézard.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article 244 quater B du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Les dépenses engagées dans le cadre des contrats de fouilles archéologiques prévus à l’article L. 523-9 du code du patrimoine n’ouvrent pas droit à ce crédit d’impôt. »
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° 144 rectifié.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement tend à exclure les sociétés privées de fouilles archéologiques du bénéfice du crédit d’impôt recherche, ou CIR.
Si ce crédit d’impôt est utile et efficace pour le maintien et le développement de l’investissement innovant, la question de son application aux fouilles archéologiques doit être posée, dans la mesure même où sa raison d’être est de soutenir les efforts des entreprises en matière de recherche et de développement. Son utilisation pour subventionner les opérations d’archéologie préventive n’est pas conforme à cet esprit, les dépenses afférentes aux contrats de fouilles archéologiques n’étant pas destinées à financer une recherche menée en amont d’un processus de production. De fait, les fouilles sont la production des opérateurs concernés.
En outre, l’éligibilité de ces dépenses au CIR entraîne un effet d’aubaine au bénéfice des opérateurs privés et une grave distorsion de concurrence au préjudice des opérateurs publics. Songez que, en 2014, le CIR a représenté 15 % du chiffre d’affaires de l’un des premiers opérateurs privés du secteur !
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 271.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement nous tient particulièrement à cœur. Il faut dire qu’il est assez singulier de voir les dépenses engagées pour les fouilles archéologiques entrer dans le champ d’application du crédit d’impôt recherche. En quoi creuser fait-il avancer la recherche et progresser l’état de l’art ? Nous nous le demandons bien !
Madame la rapporteur, si je voulais vous taquiner, je vous dirais, à vous qui à plusieurs reprises nous avez traités d’idéologues, que c’est ici votre majorité qui se trouve prise en flagrant délit de défense d’un avantage déloyal bénéficiant aux opérateurs privés !
En effet, comme il vient d’être expliqué, l’application du CIR dans le domaine des fouilles archéologiques induit une distorsion de concurrence entre les opérateurs privés agréés par l’État, qui profitent de ce crédit d’impôt, et les opérateurs publics – collectivités territoriales, universités et Institut national de recherches archéologiques préventives –, qui n’y ont pas droit. L’argent public ainsi reversé aux opérateurs privés représenterait entre 3 et 4 millions d’euros par an, soit en moyenne entre 8 % et 12 % du chiffre d’affaires de ces entreprises.
Ce phénomène amplifie la « spirale déflationniste » dénoncée par notre collègue députée Martine Faure dans son rapport de mai dernier. Décrivant une véritable « guerre des prix », Mme Faure a ainsi jugé que, « compte tenu de la faiblesse des progrès techniques et des gains de productivité réalisables pour une activité essentiellement scientifique, il est permis de s’interroger sur la baisse drastique des prix facturés par les opérateurs privés », avant d’ajouter : « Si la faiblesse de leurs coûts de structure peut rendre compte d’une partie des écarts constatés, l’évolution des prix met en évidence une spirale déflationniste préoccupante pour la viabilité financière du secteur et pour sa capacité à faire prévaloir durablement la qualité scientifique des opérations ».
Je pourrais citer des noms d’entreprises, mais il n’y a pas besoin d’exemples pour se persuader que l’on peut tout à fait légitimement s’interroger sur le but de ce système !
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour présenter l’amendement n° 405.
Mme Corinne Bouchoux. D’accord avec les deux argumentaires qui viennent d’être exposés, je considère que le crédit d’impôt recherche, qui n’est pas forcément dépourvu d’utilité dans certains secteurs et appliqué à certaines conditions, n’est pas justifiable dans le domaine de l’archéologie préventive.
Certes, quelques opérations de fouilles constituent une forme de recherche, mais l’éligibilité de ces opérations au CIR entraîne une concurrence déloyale, puisque, par définition, seuls les opérateurs privés peuvent profiter de l’avantage fiscal. Il en résulte aussi une pression à la baisse sur les salaires des jeunes archéologues.
C’est pourquoi, sans faire de procès d’intention à quiconque, nous invitons le Sénat à adopter ces amendements identiques.
Mme la présidente. L’amendement n° 456 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 144 rectifié, 271 et 405 ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ces amendements identiques tendent à rétablir dans le projet de loi la disposition adoptée par l’Assemblée nationale pour interdire aux opérateurs privés du secteur archéologique de bénéficier du crédit d’impôt recherche.
Mes chers collègues, je vous signale que l’article 244 quater B du code général des impôts, qui détermine les modalités d’application de ce crédit d’impôt, n’exclut à ce jour aucun secteur d’activité de son champ d’application.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Et après ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Pour être éligibles au dit crédit, les dépenses ayant vocation à être déduites de l’impôt sur les sociétés doivent être affectées à la réalisation d’opérations de recherche. L’adoption de ces amendements priverait donc les entreprises concernées de la possibilité de mener des opérations de recherche. La commission ne voit pas très bien quel en serait le bénéfice.
Au demeurant, nous estimons qu’il revient aux services de l’État de s’assurer de la bonne utilisation du crédit d’impôt recherche par les opérateurs de droit privé en archéologie préventive, auxquels il n’y a pas de raison de refuser a priori le bénéfice du dispositif. À cet égard, je précise que l’État exerce largement sa mission de contrôle, comme il est tout à fait normal ; une entreprise a même fait l’objet d’un contrôle fiscal au cours de deux années consécutives !
À tous ceux qui s’opposent à l’application du CIR aux dépenses engagées dans le cadre des contrats de fouille, je fais observer que cette question s’inscrit dans le débat plus général qui oppose le ministère de la culture au ministère de la recherche en ce qui concerne la définition du périmètre de la recherche en archéologie préventive. Je ne crois pas que ce débat puisse être tranché au détour d’un amendement.
J’ajoute que, en adoptant une vision que je trouve quelque peu restrictive de la notion de recherche, les auteurs des amendements rendent encore moins légitime la subvention pour charges de service public dont bénéficie l’Institut national de recherches archéologiques préventives.
À cet égard, qu’il me soit permis de répondre par quelques chiffres à ceux qui nous accusent de vouloir, comme de mauvais sujets, octroyer un avantage aux opérateurs privés : de 2004 à 2014, l’INRAP a cumulé 168 millions d’euros de subventions exceptionnelles et vu son budget augmenter de 66 %, ainsi que ses effectifs de 16,5 % – de 33 % pour les contrats à durée indéterminée –, alors que le nombre des diagnostics et des fouilles diminuait de moitié. Madame Gonthier-Maurin, expliquez-moi où est le privilège accordé aux opérateurs privés et en faveur de qui la concurrence serait faussée ?
Mes chers collègues, comme vous l’aurez certainement compris, la commission est défavorable à ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je commencerai par dire que je partage la préoccupation que vous exprimez sur le rôle et l’importance du crédit d’impôt recherche dans le secteur de l’archéologie préventive, ainsi que votre préoccupation quant aux effets qu’il peut induire sur les conditions de concurrence dans le secteur. Ce sujet est d’ailleurs mentionné dans le rapport public de la Cour des comptes, comme on l’a très brièvement dit tout à l’heure.
Le crédit d’impôt recherche a pour but d’inciter à la réalisation en France d’opérations de recherche et développement. Il s’agit d’un instrument central de la politique conduite par le Gouvernement en matière de soutien à l’innovation et au développement économique, et donc à la création d’emplois.
Comme on l’a déjà dit, c’est une mesure dont l’application est générale aujourd’hui et qui ne cible pas tel ou tel secteur. En revanche, son bénéfice est conditionné à la réalisation de travaux de recherche et de développement qui permettent de faire progresser l’état des connaissances, tout en résolvant des difficultés scientifiques ou techniques.
Il est bien sûr possible de réaliser des travaux de recherche et développement dans le domaine archéologique. Il faudrait simplement savoir de quels travaux il s’agit exactement et rappeler que toute dépense d’archéologie n’a évidemment pas vocation à être éligible au crédit d’impôt recherche.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Bien sûr !
Mme Audrey Azoulay, ministre. Il y a donc une voie à trouver entre les dispositions actuelles et une approche consistant à priver les entreprises d’un secteur donné du bénéfice du crédit d’impôt recherche, alors même que celles-ci auraient effectivement des dépenses de recherche qui y seraient éligibles. En effet, une telle démarche fragiliserait le dispositif non seulement au regard de ses objectifs généraux, mais aussi au regard du principe d’égalité devant l’impôt, voire au regard du droit communautaire.
En revanche, on est tout à fait légitime à comprendre les chiffres qui ont été donnés – entre 5 % et 20 % à un moment donné d’un chiffre d’affaires –, à aller regarder, de façon générale, quels sont les éléments d’assiette déclarés au titre de ce crédit d’impôt.
Le ministère de la culture a donc attiré l’attention du ministère des finances et du ministère de la recherche sur ce point, et je m’engage à rendre compte du résultat de ces échanges dans les meilleurs délais, en tout état de cause d’ici à la deuxième lecture du texte.
C’est pourquoi je demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.
M. Philippe Bonnecarrère. Sur ces amendements, la situation est extrêmement paradoxale.
Première observation : alors que nous avons évoqué tout à l’heure le contrôle scientifique sur la qualité des fouilles, il me semble qu’il n’y a rien d’anormal à ce que des organismes privés habilités aient un travail de recherche, soient en mesure d’en justifier et puissent ensuite se voir appliquer les dispositions fiscales en vigueur.
Deuxième observation – cela figurait implicitement dans les propos de Mme la rapporteur et il me semble l’avoir également entendu dans l’intervention de Mme la ministre – : vouloir, par voie d’amendement, priver un secteur professionnel ou une catégorie d’entreprises du bénéfice du crédit d’impôt recherche constitue une atteinte manifeste au principe d’égalité.
À mon avis, en choisissant ce thème, mes chers collègues, vous allez tout droit à une inconstitutionnalité, et ce d’autant qu’il s’agit d’une question que connaît bien le Sénat. En effet, cet argument a déjà été largement employé par l’un au moins des groupes de la Haute Assemblée lorsqu’il est intervenu en matière de santé. Vous aviez alors lancé un débat sur la légitimité d’autoriser les établissements privés de santé à accéder à ce même type de dispositions fiscales, au titre des dépenses de recherche qu’ils sont en mesure de justifier. Or personne n’a finalement demandé que ces secteurs d’activité soient exclus du bénéfice du crédit d’impôt recherche.
La position de Mme la rapporteur est donc à la fois cohérente sur le plan intellectuel et exacte. Mes chers collègues, elle vous évite également d’encourir le risque d’une inconstitutionnalité, à mon sens évidente, de la disposition que vous proposez
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la ministre, merci de vous être engagée pour davantage de transparence sur cette question ! C’est précisément sur la transparence et l’accès de tous à l’information que repose la confiance.
Cela étant, je voudrais tout de même dire qu’il est du devoir du législateur de contrôler une dépense fiscale qui atteindra bientôt 6 milliards d’euros !
Pour ma part, je ne veux exclure personne du bénéfice du crédit d’impôt recherche. En réalité, la question n’est pas d’exclure du bénéfice de ce dispositif le secteur de l'archéologie préventive mais de vérifier – c’est pourquoi je viens de vous adresser mes remerciements, madame la ministre – si les travaux qui sont déclarés au titre du crédit d’impôt recherche relèvent bien non pas de l’innovation – il y a une confusion entre le crédit d’impôt innovation et le crédit d’impôt recherche –, mais de la recherche. Il s’agit de s’assurer que ces dépenses contribuent vraiment à l’accroissement de la recherche effectuée par les entreprises privées de notre pays. Je ne demande rien d’autre !
Mme Françoise Férat, rapporteur. Nous sommes donc d’accord !
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Monsieur Bonnecarrère, le parallèle que vous faites avec la santé est tout de même un peu surprenant.
De quoi s’agit-il ici ? Si on veut rester concret, l’activité dans le domaine de l’archéologie préventive consiste d’abord à fouiller et à sortir des éléments menacés. Par conséquent, on produit quelque chose. Les travaux de recherche n’interviennent qu’ensuite : ceux qui réalisent les fouilles ne sont pas ceux qui, par la suite, exploitent ces fouilles, les datent et travaillent sur leur contenu.
Il est tout de même paradoxal que l’on détourne le crédit d’impôt recherche et que la principale entreprise du secteur parvienne à tirer de ce dispositif 15 % de son chiffre d’affaires ! Pourtant, cette situation ne respecte pas du tout les canons classiques de l’économie, et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle ce crédit d’impôt a été créé. Il y a bel et bien un détournement !
Combien de chercheurs, c’est-à-dire de personnes qui font de la recherche – j’y insiste car il faut veiller à ne galvauder ni ce terme ni cette qualité –, sont missionnés et payés dans le cadre d’opérations de fouille archéologique ? Vous allez avoir du mal à me répondre, mes chers collègues !
En revanche, je suis conscient qu’il y a bien un travail d’interprétation, d’analyse et de recherche sur les éléments qui ont été sortis à la suite des fouilles. Seulement, pour ces opérations-là, ce ne sont pas les entreprises qui ont réalisé les fouilles qui sont à l’œuvre.
Chaque fois que l’on discute de ces questions, on entend des mots désagréables sur l’organisme public en charge de l’archéologie préventive. À chaque fois, ce sont les organismes privés dont on entend dire qu’on les empêcherait de travailler, alors qu’ils bénéficient pourtant du crédit d’impôt recherche !
Tout à l’heure, vous nous avez dit qu’il fallait absolument enlever certaines règles pour que les organismes privés soient dans une situation de concurrence loyale avec l’INRAP. Désormais, vous voulez en plus qu’ils bénéficient d’un avantage, le crédit d’impôt recherche, auquel l’INRAP n’a pas droit. Cela fait beaucoup !
Il y a un déséquilibre manifeste dans la façon dont le débat s’articule et un déséquilibre dans votre façon d’aborder le sujet, madame la rapporteur !
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Il y a un point sur lequel nous sommes tous d’accord : dès lors que la France et les Français consentent un gros effort en faveur de la recherche archéologique, il doit bien y avoir non seulement des activités de fouille, avec tout ce que cela représente comme travail, mais également une recherche véritable. La qualité de la recherche est une chose primordiale, que l’organisme qui entreprend les fouilles soit un organisme public ou privé !
Je suis d’accord avec Mme Gonthier-Maurin quand elle insiste sur la nécessaire qualité de la recherche et sur la réalité de cette recherche. Je suis également d’accord pour dire que l’on ne doit en aucun cas diminuer la qualité de la recherche pour être plus concurrentiel et gagner la bataille des prix, par exemple. Ce serait aller à l’encontre de ce qu’a voulu la représentation nationale lors de l’examen des lois successives sur l’archéologie préventive.
En revanche, si nous devons vérifier de manière très attentive la qualité de cette recherche, on ne doit pas créer de différence a priori entre la recherche menée par un organisme public et celle d’un organisme privé.
Pour nous, ce qui doit compter, c’est la réalité et la qualité de la recherche !
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. Madame la ministre, merci tout d’abord de votre réponse et du souci de transparence et de clarté que vous avez manifesté.
Je crains de ne pas être tant en désaccord que cela avec notre collègue Jacques Legendre. En effet, pour notre part, nous ne disons pas qu’il n’y a pas d’activités de recherche dans le privé, y compris lors de la phase préalable aux fouilles archéologiques. Je pense qu’il existe des docteurs et des doctorants qui font réellement de la recherche. On a pu le constater au cours des travaux de la mission sénatoriale sur le crédit d’impôt recherche, même si ceux-ci n’ont pas pu être fructueux.
Ce qui importe, c’est que la transparence sur les dépenses de recherche progresse vraiment. Il faut également faire en sorte que le crédit d’impôt recherche ne bénéficie qu’aux entreprises qui font de la vraie recherche. Or qui dit vraie recherche, dit embauche de docteurs et de doctorants. C’est là où il y a sûrement des progrès à faire.
Je ne voudrais pas faire de parallèle inutile entre le secteur de l’archéologie et le monde de la finance ou de l’informatique, mais je crois me souvenir – Mme Gonthier-Maurin me contredira peut-être – qu’il s’agit justement des trois secteurs pour lesquels on constate une fragilité dans le contrôle des dépenses en matière de recherche.
Par conséquent, nous demandons des statistiques sur le nombre de docteurs recrutés et sur la véracité des dépenses dans ce domaine, sans pour autant être soupçonneux outre mesure.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Madame Bouchoux, vous venez d’exprimer parfaitement ce que j’aurais tenté de dire moi-même. Madame la sénatrice, vous avez trouvé le ton juste et l’équilibre nécessaire à cette discussion.
Monsieur Assouline, je n’ai aucune envie de polémiquer avec vous, mais comprenez qu’entendre parler de concurrence déloyale me fâche quelque peu. Tout à l’heure, je n’avais aucune envie de redonner les chiffres, mais lorsque j’ai entendu cette expression, je me suis senti obligé de le faire, et j’en suis sincèrement désolé.
Dans cette assemblée, nous cherchons des solutions d’équilibre – nous en avons parlé tout à l’heure –, de telle sorte que tout le monde y trouve son compte et que des emplois, de quelque nature qu’ils soient, puissent être créés, ni plus ni moins. (Mme Brigitte Gonthier-Maurin s’exclame.) Or les modalités du crédit d’impôt recherche telles que l’on vient de les énoncer me semblent tout à fait convenir. Transparence et confiance, voilà des mots qui me semblent intéressants !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 144 rectifié, 271 et 405.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 20 bis demeure supprimé.
Chapitre III
Valoriser les territoires par la modernisation du droit du patrimoine et la promotion de la qualité architecturale
Article 21
Un label « centre culturel de rencontre » est attribué par le ministre chargé de la culture à toute personne morale de droit public ou de droit privé à but non lucratif qui en fait la demande et qui, jouissant d’une autonomie de gestion, occupe de manière permanente un site patrimonial ouvert au public qu’elle contribue à entretenir ou à restaurer et qui met en œuvre, sur ce site, un projet culturel d’intérêt général en partenariat avec l’État, une ou plusieurs collectivités territoriales ou un groupement de collectivités territoriales. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’attribution et de retrait du label. – (Adopté.)
Article 21 bis
(Supprimé)
Article 22
L’intitulé du livre VI du code du patrimoine est ainsi rédigé : « Monuments historiques, sites patrimoniaux protégés et qualité architecturale ».
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Au-delà des débats qui se poursuivront sur les autres articles du projet de loi, je crois pouvoir dire que nous partageons l’objectif de conserver, restaurer et transmettre aux générations futures le patrimoine de notre pays. Nous souhaitons tous que vivent ou renaissent des espaces patrimoniaux. Si ceux-ci ont pu déserter nos villes, nos bourgs et nos villages, ils font la richesse et l’attractivité de la France, et sont surtout des lieux de vie pour l’ensemble de nos concitoyens.
C’est pourquoi nous cherchons collectivement au travers de ce projet de loi à rendre nos politiques patrimoniales toujours plus efficaces, tout en prenant en compte les évolutions de l’environnement dans lequel elles s’inscrivent.
Avant que nous ne débutions nos discussions sur les articles relatifs aux espaces protégés, je souhaiterais clarifier quelques points, à la lumière des interventions qui se sont déroulées en commission et qui ont conduit à faire évoluer le texte transmis par l’Assemblée nationale.
Si certaines des questions ou des préoccupations qui se sont exprimées me semblent tout à fait légitimes et doivent trouver des réponses dans le cadre de nos travaux, d’autres évolutions ne permettront peut-être pas, en revanche, de nous retrouver complètement lors de cette première lecture.
De mon côté, il me semble qu’il reste un différend qui est loin d’être un détail (Sourires.) : cela concerne le souhait de votre commission de remplacer la notion de « cité historique » par celle de « site patrimonial protégé ».
Nous sommes tous d’accord pour considérer que les acronymes actuels comme les AVAP pour « aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine » ou les ZPPAUP pour « zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager », par exemple, ou encore la catégorie des « secteurs sauvegardés » sont incompréhensibles. (Mme Sylvie Robert opine.) Ils le sont évidemment pour nos concitoyens et probablement aussi pour une grande partie des parlementaires, en dehors des spécialistes du sujet. Ils ne permettent donc pas d’avoir une bonne compréhension des enjeux et permettent encore moins aux Français de se les approprier, alors même qu’il s’agit de leur cadre de vie. Aussi, il y a un problème ! (Sourires.)
Les termes « cités historiques » ne font pas l’unanimité, je le sais. On peut donc être ouvert à une autre appellation, qui permette d’identifier sans ambiguïté les espaces protégés sur lesquels notre législation s’applique, tout en présentant une formulation simple et claire. Cette formulation, nos concitoyens pourraient se l’approprier ; ils pourraient s’en emparer pour faire vivre les territoires, dont ils tireraient ainsi une plus grande fierté encore.
M. Jean-Pierre Leleux, dont je connais l’engagement en faveur des pratiques patrimoniales, mais aussi d’autres politiques culturelles, a proposé une appellation différente : celle de « site patrimonial protégé ».
Il me semble que nous pouvons encore progresser entre notre proposition et la vôtre. Nous pouvons effectivement craindre que cette dernière ne se transforme rapidement en « SPP » ou autre acronyme. Il faudrait au contraire rechercher une dénomination qui ne favorise pas les acronymes et soit évocatrice d’images pour les Français.
Donc, le cheminement du texte n’est pas terminé et j’espère poursuivre, avec vous, cette recherche d’un nom qui nous rassemble, et qui rassemblera les Français.
J’en viens, sur le fond, à la question du risque, précédemment pointé, de désengagement de l’État s’agissant de la protection des espaces protégés.
Je voudrais d’abord lever un malentendu : ce n’était évidemment pas l’intention que le Gouvernement souhaitait afficher à travers ce texte. Que celui-ci ait été compris comme tel est révélateur d’un problème.
Le Gouvernement vous a entendus sur ce point, et essaiera de répondre à vos préoccupations par un amendement à l’article 24.
Je réaffirme solennellement que l’État continuera de jouer un rôle majeur en matière de protection.
Il le fera à travers les décisions qu’il prendra sur le classement des « cités historiques » – expression que je retiens à ce stade –, à travers les aides techniques et financières qu’il apporte aux collectivités territoriales pour les documents d’urbanisme, à travers les aides fiscales incitatives qu’il maintiendra dans ces espaces.
Il le fera aussi grâce aux architectes des Bâtiments de France, par le biais des accords que ceux-ci donneront en matière d’autorisations de travaux ou des conseils qu’ils peuvent apporter en amont.
Il le fera encore via la participation des services de l’État dans les commissions nationale et régionales, dont le rôle a été renforcé lors des débats à l’Assemblée nationale.
À cet égard, il est souhaitable – je vous rejoins sur ce point – que la commission nationale en charge de ces questions puisse demander un rapport ou émettre un avis sur l’état de la conservation du patrimoine en « cités historiques ».
Dans le cadre de cette protection patrimoniale, un point est majeur : l’élaboration, l’adoption puis la mise en œuvre des documents d’urbanisme dans les espaces protégés.
Vous avez soulevé une question de fond sur le degré de précision de ces documents et sur la manière dont la protection patrimoniale, qui doit s’exercer dans le temps long, peut s’articuler avec les enjeux d’aménagement du territoire, qui, eux, à travers les documents d’urbanisme, peuvent évoluer plus souvent.
À partir de la réflexion que vous avez menée, mesdames, messieurs les sénateurs, et qui a été partagée au sein de votre commission, je proposerai donc, au travers d’un amendement, une nouvelle rédaction. J’espère que celle-ci trouvera un large consensus, en réaffirmant clairement la place de l’État dans la mise en œuvre des espaces protégés… sans oublier, bien sûr, les collectivités territoriales. Aucune politique patrimoniale ne peut effectivement être menée sans action des collectivités concernées.
Un dernier mot – mais il a son importance au-delà de ce débat précis – : si la loi Malraux a permis de sauver et de préserver le patrimoine de ces nombreux centres anciens, il faut aussi les faire vivre au quotidien, en particulier sous un angle économique.
Il y a donc un enjeu autour des pistes de travail que nous pourrions trouver pour favoriser la vitalité économique des cités historiques. C’est un défi qui nous attend tous, et qui transcende les questions sémantiques ou le rôle de l’État que nous venons d’évoquer.
Mme la présidente. L'amendement n° 355, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
sites patrimoniaux protégés
par les mots :
cités historiques
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Comme je l’indiquais, je préférerais qu’à ce stade nous conservions l’appellation « cité historique », tout en m’engageant à rester ouverte sur des évolutions ultérieures, qui pourraient survenir au cours de la navette.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je suis particulièrement ravie d’entendre vos propos, madame la ministre.
Nous étions persuadés que la dénomination « cité historique » ne convenait pas, et vous l’avez vous-même reconnu. Comme la présidente de la commission le faisait remarquer en aparté, on pense immédiatement à une cité médiévale. Cela ne contentait personne.
L’ajout de l’Assemblée nationale, qui permettait un élargissement aux espaces ruraux, n’a fait que démontrer un peu plus l’inadéquation de la formule. Sous la houlette du rapporteur Jean-Pierre Leleux, nous avons donc trouvé cette dénomination : « site patrimonial protégé ».
Nous avons bien compris que votre prédécesseur était arc-bouté sur ce titre. Nous avons donc été tout aussi arc-boutés sur l’idée qu’il fallait trouver autre chose. Après en avoir discuté avec les membres de la commission, notamment Mmes Blandin et Bouchoux, nous étions plutôt enclins à retravailler la question pour trouver une dénomination qui conviendrait.
Vous l’avez donc compris, madame la ministre, nous ne nous accrochons pas à notre proposition et sommes parfaitement heureux de savoir que nous allons peut-être pouvoir travailler ensemble sur le sujet. J’en suis particulièrement ravie.
Bien évidemment, nous rediscuterons d’un certain nombre de points au cours de l’examen de l’article 24.
Hélas, la commission émettra tout de même un avis défavorable sur votre amendement, afin que nous puissions continuer à travailler autour de notre dénomination.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Ce sont deux débats qui nous occupent ici : celui sur l’appellation et celui sur le fond.
Nous étions disposés à encourager les efforts de simplification, de lisibilité et de modernisation affichés dans le projet gouvernemental ; dans le même temps, un consensus existait au sein de la commission pour que l’on ne jette pas par-dessus bord les politiques mises en place depuis une trentaine d’années, politiques sur lesquelles Yves Dauge, par exemple, a beaucoup travaillé, et qui ont fait leur preuve.
Sur le fond, donc, vos propos marquent une évolution, madame la ministre, et ce serait tout de même bête que l’on ne retienne qu’un « affrontement », une polémique sur le nom.
Je sais que le Gouvernement tenait à son appellation, car elle symbolisait la simplification qu’il souhaitait mettre en avant. Pour autant, elle ne recouvrait pas la totalité de la réalité que nous voulons affirmer. Au-delà de ce que désignent les termes « cité historique », il y a un patrimoine plus large, et là, nous avons une difficulté.
Je ne suis pas non plus d’accord avec la formulation proposée par la commission. Elle ne crée pas d’appétit ; elle n’est pas attractive ; elle n’offre aucun support de communication et ne permet aucune appropriation. Pourtant c’est ainsi qu’il faut le penser : une expression porteuse de valorisation et susceptible d’être comprise, y compris à l’international.
En tous les cas, il faut trouver la formule la plus simple, faisant référence à l’histoire, mais aussi à un patrimoine plus vaste et, en particulier, naturel.
Pour ma part, j’aurais proposé : « sites historiques et protégés ». Mais je sais que le terme « site » pose problème, car il relève d’autres réglementations. (M. Vincent Eblé opine.)
Par conséquent, poursuivons le travail, mais ne nous focalisons pas sur le seul nom. Puisque nous n’avons pas trouvé le bon, laissons celui qui est issu des travaux de l’Assemblée nationale.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Gardons le nôtre !
M. David Assouline. L’engagement de la ministre doit être noté. C’est un gage, aussi, de possible rapprochement des uns vers les autres. Pour la première fois, un déblocage est opéré avec l’annonce de la recherche d’une nouvelle terminologie dans le cadre de la navette. En prendre acte, ce n’est pas procéder à un vote sanction, juste après les propos que la ministre vient de tenir.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Je crois qu’aucune des appellations employées n’est totalement satisfaisante.
« Sites patrimoniaux protégés » relève du vocabulaire administratif. Nous avons déjà connu pire : quand il fallait défendre et veiller sur une ZPPAUP, ce n’était pas nécessairement très attractif.
Mais « cités historiques » est tout de même trop restrictif.
D’abord, l’expression donne un sentiment de resserrement sur les centres urbains, alors que nous avons aussi, dans les secteurs ruraux, des zones qui méritent d’être protégées. De ce point de vue, les villes et les pays d’art et d’histoire rendent mieux compte de la situation, mais ils ne sont pas répartis de la même manière partout sur le territoire.
Ensuite, l’appellation « cités historiques » donne l’impression qu’il faut déjà une certaine profondeur historique – plusieurs centaines années – pour mériter le titre. Or toutes nos villes, me semble-t-il, ont une histoire et prétendre que telle cité est historique, ce serait nier l’historicité des autres.
Prenons l’exemple de la ville du Havre : massacrée durant la Seconde Guerre mondiale, rebâtie selon des normes très modernes, cette ville est néanmoins particulièrement intéressante sur le plan architectural. Pourrait-on l’appeler « cité historique » ?… Les termes ne conviennent pas tout à fait !
Je crois donc que personne, en ce moment, ne détient la bonne solution. Mais la dénomination plus administrative de « site patrimonial protégé », telle qu’elle est proposée, laisse le débat ouvert. Ce n’est peut-être pas la peine de commencer à clore celui-ci en revenant à l’appellation « cité historique ».
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Nous avons tous entendu les arguments rappelant ce vilain acronyme ZPPAUP… Effectivement, c’est en soi un repoussoir.
Notons toutefois que, d’une certaine manière, c’est l’hôpital qui se moque de la Charité. Le sigle est en effet employé non pas par les habitants, mais par les services des collectivités et du ministère.
L’appellation « cités historiques » a l’avantage d’être compréhensible et mobilisatrice. Son seul problème, c’est qu’elle ne recouvre pas l’ensemble des réalités. En outre, le terme « cité » évoque nettement le bâti, et beaucoup moins les abords, le cadre naturel qui l’entoure et lui fait écrin. D’ailleurs, l’UNESCO ne s’y trompe pas, qui classe le Val de Loire, c’est-à-dire l’ensemble, et non les seules cités de Loire ou les seuls châteaux de Loire.
Mme la rapporteur a trouvé une réponse, avec la formule « sites patrimoniaux protégés », et voilà qu’on la menace de réduire celle-ci à « SPP ». C’est vrai, madame la rapporteur, qu’il y a là un risque majeur.
M. Yves Détraigne. On verra !
Mme Marie-Christine Blandin. En revanche, je salue les avancées que vous venez de faire, madame la ministre, s’agissant des termes « cités historiques ».
Nous n’en avons pas connu de telles dans les semaines qui ont précédé. Nous avions presque l’impression que les tee-shirts « cités historiques » étaient déjà imprimés (Sourires sur plusieurs travées.) et les commandes passées à un célèbre publiciste. Dès lors, nos propositions d’amendement ne manqueraient pas de tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution, pour cause de pertes du budget de l’État.
En conséquence, et comme chacun ici, je crois, j’appelle de mes vœux cette recherche d’une nouvelle appellation. D’ailleurs, nos amis du RDSE ont une proposition, qui donnera lieu à la présentation d’un amendement n° 447 rectifié, me semble-t-il.
En tout cas, madame la ministre, il faut vraiment qu’il y ait de la verdure ! Mettez-nous : « cités et paysages remarquables » ! Trouvez une expression qui parle au cœur de tout le monde ! Ainsi, nous pourrons avancer.
Pour notre part, nous n’allons faire de peine ni à vous-même ni à la rapporteur, en nous abstenant.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.
M. Philippe Bonnecarrère. Je remercie Mme la rapporteur d’avoir élargi la discussion et d’avoir admis qu’un travail de mise au point pouvait effectivement être mené pour trouver la terminologie la plus adaptée à ce que nous souhaitons tous mettre en œuvre.
Il vous appartient désormais, madame la rapporteur, notamment vis-à-vis d’un groupe qui vous est cher, de donner quelques indications sur la position à prendre – restons-nous calés sur la proposition de la commission ou sur celle du Gouvernement ? –, sachant, nous l’avons bien compris, que la navette sera mise à profit pour élaborer une autre proposition.
J’ajouterai, dans le souci d’être objectif et attentif à tous les points, que nous avons également pris bonne note, dans les propos de Mme la ministre, au-delà de son ouverture sur la terminologie, de son ouverture sur le fond. C’est un autre pas fait en direction de la commission.
Je pense, en particulier, à l’équilibre que la commission a essayé de rechercher sur les approches patrimoniales. Notre groupe est sensible à cette question et nous espérons avoir confirmation de cette ouverture au fil des débats.
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Eblé, pour explication de vote.
M. Vincent Eblé. Je voudrais tout d’abord saluer l’ouverture à laquelle Mme la ministre vient de nous inviter. Sans doute la réflexion mérite-t-elle d’être poursuivie et, sous cet angle, mon intervention restera aussi raisonnablement ouverte.
Je ne suis pas certain qu’il faille rechercher absolument une appellation qui évoque un label de nature touristique. L’objectif, ce n’est pas de porter l’attention sur un lieu pour y attirer des visiteurs ; c’est de définir un espace dans lequel va s’appliquer un droit particulier de l’urbanisme lié à une réalité patrimoniale. Par conséquent, à cette appellation doivent être attachées des règles contraignantes pour les opérateurs immobiliers. C’est la raison pour laquelle une appellation en Z, aussi technocratique qu’elle pût apparaître, ne me heurtait pas. Néanmoins, si j’entends les arguments inverses, je ne peux pas cautionner une appellation contenant le mot « site » parce qu’elle viendrait en concurrence avec la réglementation en vigueur qui s’applique aux sites classés et aux sites inscrits. Techniquement, cela ne me paraît donc pas envisageable.
Selon moi, il existe une appellation qui non seulement est attractive, mais encore qui, dans l’esprit de tout un chacun, est contraignante – même si c’est de façon limitée – : l’appellation « patrimoine mondial de l’UNESCO ». Pourquoi ne pas retenir, par exemple, l’appellation « patrimoine national » ? Nous sommes tous attachés ici à ce que la définition des conditions de protection des monuments ne soit pas laissée à la seule liberté des autorités locales, mais que l’État ait son mot à dire. À cet égard, il y a sans doute là une piste de réflexion pour les semaines à venir. Toujours est-il que, à ce stade, compte tenu de l’ensemble des éléments indiqués, je m’en tiens pour ma part à l’appellation « cité historique ».
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je me félicite aussi de l’ouverture qu’a faite Mme la ministre. J’étais quelque peu réticente à l’égard de l’appellation « cité historique », qui me donnait l’impression d’un enfermement qui aurait pu conduire éventuellement à une mise en concurrence entre ceux qui auraient eu la chance, grâce à leur patrimoine, de bénéficier de cette appellation et les autres, quoique leur patrimoine pût être tout à fait intéressant.
C’est bien de vouloir mettre à profit la navette, mais il y a un problème : si l’on vote l’amendement du Gouvernement qui tend à rétablir l’appellation « cité historique », alors le vote sera conforme et le débat sera clos. (Mme Corinne Bouchoux et M. Jacques Legendre opinent. – Mme Catherine Procaccia s’exclame.) Voilà le dilemme auquel nous sommes confrontés, mes chers collègues !
Mme la présidente. La parole est à Mme Caroline Cayeux, pour explication de vote.
Mme Caroline Cayeux. J’entends bien vos propos, madame la ministre, et prends note de votre volonté d’ouverture concernant cette question de l’appellation. Parmi les orateurs qui se sont exprimés, notre collègue Vincent Eblé a évoqué l’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO. Il faut quand même savoir que l’obtention de ce label est un vrai parcours du combattant.
Pardonnez-moi de faire preuve d’un peu de chauvinisme, mais, ayant entrepris cette démarche au nom de ma ville de Beauvais, qui compte une cathédrale remarquable, je me suis vu répondre qu’on n’inscrivait plus de tels édifices au patrimoine mondial de l’UNESCO.
J’en reviens au label « ville d’art et d’histoire ». Obtenir celui-ci nous a pris beaucoup de temps, il a fallu monter un dossier important et il a même été nécessaire que nous revoyions deux fois notre copie. Si nous nous félicitons aujourd’hui de l’avoir obtenu, il faut savoir néanmoins qu’il impose des contraintes urbanistiques à la ville de Beauvais – ce dont je me félicite – lorsqu’il s’agit notamment de lancer des procédures de rénovation urbaine.
Ce label – et cela vaut également pour les autres appellations en Z – a vocation à protéger l’urbanisme remarquable, les monuments historiques et à imposer des contraintes de construction à des promoteurs indélicats ou à des élus qui n’étaient pas tellement au fait de ces questions, et à libérer les droits à construire. Aussi, il est important que ce projet de loi garantisse la protection des sites historiques – pardonnez-moi de reprendre cette dénomination – des villes qui en possèdent.
Au-delà du symbole se pose aussi – et c’est là où je voulais en venir – un problème budgétaire. Il n’est pas toujours facile de faire face aux dépenses d’entretien et de rénovation de ces sites, d’assumer les frais de construction dans leur périmètre. Se pose alors la question de la répartition des dépenses y afférentes entre l’État et les collectivités.
À titre personnel, je préférerais que soit retenue l’appellation « cité historique ».
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.
M. Yves Détraigne. En écoutant les interventions des uns et des autres, je me disais, avec mon ami Jacques Legendre, que l’on avait lancé un concours pour trouver le meilleur sigle. Alors permettez-moi d’apporter ma contribution.
Pourquoi ne pas retenir le mot « site » plutôt que le mot « cité » ? On a parlé du patrimoine, alors on pourrait parler de « site patrimonial ». On a parlé de qualité, alors pourquoi ne pas parler de « site patrimonial de qualité » ? Et puisqu’il faut bien remarquer ces sites, alors pourquoi ne pas parler de « site patrimonial de qualité remarquable », ou SPQR, ce qui présenterait l’avantage de nous renvoyer à l’histoire ? (Rires.)
Par conséquent, puisque cette appellation peut faire consensus ou, à défaut, être le plus petit dénominateur commun, je vous propose de retenir SPQR, ou « site patrimonial de qualité remarquable ».
Mme la présidente. Mon cher collègue, je vous remercie de cette contribution.
La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. Beaucoup de communes ont retenu une terminologie propre. L’un de nos collègues évoquait l’appellation « cité d’art et d’histoire ». Les communes qui l’ont obtenue ont dû se battre pendant des années pour parvenir à leurs fins.
Pour ma part, j’ai été maire pendant plus de trente ans d’une ville « cité médiévale » comptant cinq châteaux forts et une collégiale exceptionnelle et qui a obtenu le label « cité d’art et d’histoire ». Mais, sur toutes les cartes, il est indiqué « cité médiévale ».
Simplement, je pose la question suivante : quel sera le coût de l’opération s’il faut changer tous les panneaux, modifier tous les dépliants ? Il risque d’atteindre un montant extraordinaire et il appartiendra aux collectivités de l’assumer, car je ne pense pas que l’État les y aidera.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je ne reviens pas sur le fond de notre discussion. Nous avons bien compris que le mot « site » peut prêter à confusion et que l’appellation « cité historique » ne convenait pas non plus.
En tout cas, je trouve que ce débat a été extraordinaire : les idées foisonnent, les esprits sont en éveil et, comme l’a proposé Mme la ministre, je vous invite, mes chers collègues, à continuer de phosphorer, de faire tourner nos petites cellules grises afin de trouver une dénomination qui convienne à tous.
Pour répondre à la question de notre collègue Philippe Bonnecarrère, je veux lui dire que, à l’issue de ce débat, nous aurions tous envie de lever la main comme un seul homme – et comme une seule femme ! – pour approuver la proposition de la ministre. Simplement, si nous votons l’amendement du Gouvernement, l’article 22 sera voté conforme et donc, pour une simple raison de formalisme, il nous sera impossible de revenir sur cette question, ce qui ne satisfera ni le Gouvernement ni le Sénat.
Aussi, il nous faut, hélas, voter contre votre amendement. Madame la ministre, vous n’imaginez pas à quel point j’en suis désolée.
Mme Catherine Procaccia. Il est quand même rare d’entendre ça !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La vérité m’oblige à dire qu’il fut un temps – au mois de juillet – où l’administration du ministère était assez ouverte à une modification de l’appellation. Je me souviens de la réponse qu’on m’avait alors faite : « Écoutez, ce n’est pas forcément génial, mais si vous nous faites une proposition plus cohérente, nous serons à l’écoute. »
Puis, à l’approche de l’examen par le Sénat du projet de loi, la position du ministère s’est quelque peu durcie. Aussi, je suis heureux de vous entendre, madame la ministre, parce que le travail va ainsi pouvoir se poursuivre durant la navette.
Il me paraît important d’ajouter deux petits points à cette réflexion.
Premièrement, et c’est à mon sens essentiel, nous nous inscrivons dans une démarche non pas de marketing, mais de protection patrimoniale. Certes, il vaut mieux avoir un panneau « cité historique » à l’entrée d’une commune qu’un panneau « site patrimonial », mais il faut quand même que les mots reflètent la réalité. Par conséquent, quand on voit cette appellation, il faut pouvoir se dire que, dans ce lieu, le maire, le président de la communauté a pris à bras-le-corps la protection de son patrimoine, qui doit être respecté.
Je le répète, la démarche n’est pas celle de la promotion touristique, même s’il s’y attache des effets secondaires positifs.
Deuxièmement, « cité historique », c’est une belle appellation, mais elle est tellement commune que je crains que beaucoup de villes ne se la soient déjà appropriée et n’aient apposé le panneau à leur entrée. Si ce label devait désormais emporter des contraintes juridiques, les communes en question devraient alors y renoncer, hélas !
Quant au label « ville d’art et d’histoire », il faudra qu’on en reparle un jour, car on ne sait pas comment il évoluera dans les années à venir. Cela étant, les villes qui l’ont obtenu n’apposent pas un panneau « VAH » à leur entrée ; elles mentionnent bien « ville d’art et d’histoire », et cela se passe très bien.
M. Alain Fouché. Oui !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous avons longuement évoqué cette question avec nos collègues membres de la commission, avec sa présidente, avec la rapporteur Françoise Férat ; puisque nous ne sommes pas tout à fait mûrs, laissons prospérer la réflexion…
M. Alain Fouché. Voilà !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. … afin de trouver une locution plus sémantiquement adaptée.
M. Alain Fouché. Il faudra penser au coût, aussi !
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Tout a été dit par l’ensemble des collègues qui sont intervenus.
Madame la ministre, je vous remercie vivement de cette ouverture que vous nous proposez ; elle nous permettra, au cours de la navette, de trouver une appellation adéquate.
Vous l’aurez compris, à quelque groupe qu’ils appartiennent, et pas seulement ceux qui sont membres de la commission, les élus sont extrêmement attachés à leur territoire, ils vivent ces réalités patrimoniales au sens large et ils ont besoin de s’approprier une appellation attestant une action de protection du patrimoine afin de porter ce projet de politique culturelle et patrimoniale.
Nous sommes favorables à la modernisation de la législation et à la fusion des trois appellations en une seule pour autant qu’elle soit porteuse de sens et surtout qu’elle traduise une réelle démarche de protection de notre patrimoine. Toutefois, je ne veux pas anticiper sur les débats à venir.
Encore une fois, madame la ministre, je vous remercie, car ce sujet nous tenait particulièrement à cœur.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Compte tenu de nos échanges, je retire l’amendement du Gouvernement. (Applaudissements.)
Mme la présidente. L'amendement n° 355 est retiré.
Je mets aux voix l'article 22.
(L'article 22 est adopté.)
Article 23
Le titre Ier du livre VI du code du patrimoine est ainsi rédigé :
« TITRE IER
« DISPOSITIONS GÉNÉRALES
« CHAPITRE IER
« Institutions
« Art. L. 611-1. – La Commission nationale du patrimoine et de l’architecture est consultée en matière de création et de gestion de servitudes d’utilité publique et de documents d’urbanisme institués dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel, notamment dans les cas prévus aux articles L. 621-1, L. 621-5, L. 621-6, L. 621-8, L. 621-12, L. 621-29-9, L. 621-31, L. 621-35, L. 622-1, L. 622-1-1, L. 622-1-2, L. 622-3, L. 622-4, L. 622-4-1 et L. 631-2 du présent code et à l’article L. 313-1 du code de l’urbanisme.
« Elle peut proposer toutes mesures propres à assurer la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine et de l’architecture. Elle peut demander à l’État d’engager une procédure de classement ou d’inscription au titre des monuments historiques en application des articles L. 621-1, L. 621-25, L. 622-1 ou L. 622-20 du présent code.
« Elle procède à l’évaluation des politiques de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel.
« En outre, elle peut être consultée sur les études, sur les travaux et sur toute question relative au patrimoine et à l’architecture en application du présent livre et de la sous-section 2 de la section 4 du chapitre Ier du titre V du livre Ier et du chapitre III du titre Ier du livre III du code de l’urbanisme.
« Placée auprès du ministre chargé de la culture, elle comprend des personnes titulaires d’un mandat électif national, des personnes titulaires d’un mandat électif local, des représentants de l’État, des membres d’associations ou de fondations ayant pour objet de favoriser la connaissance, la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine et des personnalités qualifiées.
« Son président est choisi parmi les sénateurs ou les députés. En cas d’empêchement du président pour tout ou partie d’une séance, la présidence de la commission est assurée par le représentant du ministre chargé de la culture.
« Un décret en Conseil d’État précise sa composition, les conditions de désignation de ses membres et ses modalités de fonctionnement.
« Art. L. 611-2. – La commission régionale du patrimoine et de l’architecture est consultée en matière de création et de gestion de servitudes d’utilité publique et de documents d’urbanisme institués dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel, notamment dans les cas prévus aux articles L. 621-31, L. 622-10 et L. 632-2 du présent code et à l’article L. 151-29-1 du code de l’urbanisme.
« Elle peut proposer toutes mesures propres à assurer la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine et de l’architecture.
« En outre, elle peut être consultée sur les études et sur les travaux ainsi que sur toute question relative au patrimoine et à l’architecture en application du présent livre et de la sous-section 2 de la section 4 du chapitre Ier du titre V du livre Ier du code de l’urbanisme.
« Placée auprès du représentant de l’État dans la région, elle comprend des personnes titulaires d’un mandat électif national, des personnes titulaires d’un mandat électif local, des représentants de l’État, des membres d’associations ou de fondations ayant pour objet de favoriser la connaissance, la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine et des personnalités qualifiées.
« Un décret en Conseil d’État détermine sa composition, les conditions de désignation de ses membres et ses modalités de fonctionnement.
« Art. L. 611-3. – (Non modifié) Les règles relatives au conseil des sites de Corse sont fixées à l’article L. 4421-4 du code général des collectivités territoriales.
« CHAPITRE II
« Dispositions relatives aux biens inscrits au patrimoine mondial
« Art. L. 612-1. – L’État et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs groupements assurent, au titre de leurs compétences dans les domaines du patrimoine, de l’environnement et de l’urbanisme, la protection, la conservation et la mise en valeur du bien reconnu en tant que bien du patrimoine mondial en application de la convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel, adoptée par la Conférence générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, le 16 novembre 1972, lors de sa XVIIe session.
« Pour assurer la protection du bien, une zone, dite “zone tampon”, incluant son environnement immédiat, les perspectives visuelles importantes et d’autres aires ou attributs ayant un rôle fonctionnel important en tant que soutien apporté au bien et à sa protection est, sauf s’il est justifié qu’elle n’est pas nécessaire, délimitée autour de celui-ci en concertation avec les collectivités territoriales intéressées puis arrêtée par l’autorité administrative.
« Pour assurer la préservation de la valeur universelle exceptionnelle du bien, un plan de gestion comprenant les mesures de protection, de conservation et de mise en valeur à mettre en œuvre est élaboré conjointement par l’État et les collectivités territoriales intéressées, pour le périmètre de ce bien et, le cas échéant, de sa zone tampon, puis arrêté par l’autorité administrative.
« Lorsque l’autorité compétente en matière de schéma de cohérence territoriale ou de plan local d’urbanisme engage l’élaboration ou la révision d’un schéma de cohérence territoriale ou d’un plan local d’urbanisme, le représentant de l’État dans le département porte à sa connaissance les dispositions du plan de gestion du bien. Le périmètre de la zone tampon et le plan de gestion sont pris en compte dans les documents d’urbanisme des collectivités territoriales concernées, afin d’assurer la protection, la conservation et la mise en valeur du bien et la préservation de sa valeur universelle exceptionnelle.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
« CHAPITRE III
« Dispositions diverses
(Division et intitulé nouveaux)
« Art. L. 613–1. – Les règles relatives à la protection des monuments naturels et des sites sont fixées au titre IV du livre III du code de l’environnement. »
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 490, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
1° Remplacer les mots :
du patrimoine et de l’architecture
par les mots :
des cités et monuments historiques
2° Supprimer la référence :
L. 621–29–9
II. – Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
III. – Alinéa 11, première phrase
Remplacer les mots :
les sénateurs ou les députés
par les mots :
les titulaires d’un mandat électif national qui en sont membres
IV. – Alinéa 13
1° Après la référence :
L. 622–10
insérer la référence :
, L. 631–4
2° Remplacer les mots :
à l’article L. 151–29–1
par les mots :
aux articles L. 151–29–1 et L. 313–1
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement traitant également d’appellation, il est retiré, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 490 est retiré.
L'amendement n° 196 rectifié, présenté par Mme Cayeux, MM. Milon, Mouiller, de Nicolaÿ, Mandelli, Laufoaulu, Danesi, J.P. Fournier, Cardoux, Chasseing, Laménie, Cambon et Gournac, Mme Lamure, M. Pellevat, Mme Deroche et MM. Houel et J. Gautier, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 611-2. – La commission régionale du patrimoine et de l'architecture est consultée en matière de création et de gestion de servitudes d'utilité publique et de documents d'urbanisme institués dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel, notamment dans les cas prévus aux articles L. 632-31, L. 622-10, L. 631-6 et L. 632-2 du présent code.
La parole est à Mme Caroline Cayeux.
Mme Caroline Cayeux. Il s’agit d’un amendement de coordination du fait de la création de ces articles.
Mme la présidente. L'amendement n° 392, présenté par M. Bouvard, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 508, présenté par Mme Férat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après la référence :
L. 622-10
insérer la référence :
, L. 631-4
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
Si vous me le permettez, madame la présidente, je reviens sur l’amendement n° 490 du Gouvernement, dont le III nous convenait assez bien. Nous étions parfaitement d’accord avec vous, madame la ministre, puisque vous leviez une ambiguïté concernant la présidence de la Commission nationale.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Très bien !
Mme la présidente. Madame la ministre, vous pouvez, si vous le souhaitez, reprendre dès maintenant le III de votre amendement.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cela arrangerait-il la commission ?…
Dans ces conditions, je reprends dès à présent ce III, madame la présidente.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 490 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
Alinéa 11, première phrase
Remplacer les mots :
les sénateurs ou les députés
par les mots :
les titulaires d’un mandat électif national qui en sont membres
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 196 rectifié ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. La commission émet malheureusement un avis défavorable. L’adoption de cet amendement aurait pour effet de supprimer la référence à l’article L. 151–29 du code de l’urbanisme, alors même que la rédaction de cet article prévoit une saisine de la commission régionale. Sa référence doit donc être impérativement citée. En outre, cet amendement opère une coordination avec un amendement que l’auteur propose à l’article 24 et pour lequel la commission est réservée. Telle est la difficulté à laquelle nous sommes confrontés.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 196 rectifié et 508 ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Concernant l’amendement n° 196 rectifié, l’avis est défavorable. Sur l’amendement n° 508, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Madame Cayeux, l'amendement n° 196 rectifié est-il maintenu ?
Mme Caroline Cayeux. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 196 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 508.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 145 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Remplacer les mots :
et de gestion
par les mots :
, de gestion et de suivi
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Cet amendement tend à préciser les missions de la Commission nationale.
La plupart de nos amendements aux articles 23 et 24 seront guidés par une seule idée : mieux protéger et contrôler le patrimoine, et permettre aux autorités compétentes de garantir, à tout moment, une préservation optimale de celui-ci.
Nous souhaitons donc que la Commission nationale intervienne non seulement en matière de création et de gestion des servitudes d’utilité publique et des différents documents d’urbanisme, mais également en matière de suivi.
La gestion ne signifie pas forcément le suivi, qui constitue une mission de tous les instants. À ce titre, la Commission nationale pourra, à tout moment, surveiller l’évolution d’un bien ou d’un élément patrimonial protégé à quelque titre que ce soit.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. La commission partageant évidemment cette préoccupation, l’avis est favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 146 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Lepage, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle est également consultée sur tout projet de vente ou d’aliénation du patrimoine français situé à l’étranger, protégé ou présentant une valeur historique ou culturelle particulière.
La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. Cet amendement vise à protéger davantage le patrimoine immobilier français à l’étranger, dès lors qu’il est classé ou qu’il présente une valeur historique ou culturelle particulière, en en soumettant tout projet de vente ou d’aliénation à une consultation de la Commission nationale des cités et monuments historiques.
Depuis 2010, effectivement, la politique immobilière du ministère des affaires étrangères n’est plus financée que par les cessions de biens, principalement à l’étranger, car aucun crédit d’investissement n’est plus inscrit au budget général. Outre des bureaux ou appartements, sans valeur historique ou culturelle particulière, des biens prestigieux et particulièrement emblématiques du rayonnement de la France à l’étranger ont également été cédés.
L’un des derniers en date est le Palais Clam-Gallas, à Vienne, vendu au Qatar pour 22 millions d’euros. D’autres immeubles, comme la Maison de France à Berlin, véritable symbole de l’entente franco-allemande, ont échappé à la cession, grâce à la mobilisation des élus et des citoyens, français comme allemands.
Cette braderie continue, puisque la France envisage de vendre en 2017 les bâtiments de sa chancellerie et de son consulat général à Londres ! Ces ventes sont devenues parfois inévitables lorsqu’on a trop attendu pour engager les travaux nécessaires : je pense notamment à l’Institut wallon à Amsterdam.
Ces ventes suscitent toujours une vive opposition de la part des francophiles des pays concernés et elles sont un très mauvais signal pour l’image de la France à l’étranger.
Des solutions alternatives existent bien souvent. J’ai ainsi en tête l’exemple du Palazzo Lenzi, à Florence. Ce magnifique palais, attesté déjà en 1470 et qui abrite l’Institut français depuis 1908, était promis à une vente à la découpe en 2010. L’émoi suscité par ce projet a permis une reconsidération de la situation. En définitive, le Palais abrite toujours aujourd’hui l’Institut français et le consulat honoraire. Cependant, deux espaces loués du rez-de-chaussée accueillent des boutiques, dont une librairie française. Le troisième étage doit être également prochainement valorisé, par une vente ou une location. En outre, une médiathèque a été créée au rez-de-chaussée, bénéficiant ainsi d’un accès direct sur la rue, augmentant la visibilité de l’Institut.
En définitive, un réaménagement du Palais Lenzi a permis tout à la fois de tirer profit, sur le long terme, du bâtiment par une location partielle, tout en conservant un bien prestigieux et en valorisant la présence française à Florence.
Il me semble donc que la consultation préalable de la Commission nationale des cités et monuments historiques doit pouvoir pallier des ventes inconsidérées.
Je vous demande donc de bien vouloir voter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Si la commission partage pleinement la préoccupation, telle que l’a évoquée Mme Lepage, de mieux encadrer les cessions de l’État, et s’inquiète de plusieurs ventes intervenues au cours des dernières années, la rédaction proposée dans le présent amendement semble malheureusement trop floue. En effet, le classement ou l’inscription au titre des monuments historiques ne vaut pas pour les immeubles situés hors du territoire de la France. Dès lors, comment entendre les mots de « patrimoine protégé ou présentant une valeur historique ou culturelle particulière » ? En l’état actuel, la commission ne peut, hélas, émettre un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Lepage, l'amendement n° 146 rectifié est-il maintenu ?
Mme Claudine Lepage. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 146 rectifié est retiré.
M. Jacques Legendre et Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Dommage !
Mme la présidente. Mes chers collègues, l’un d’entre vous peut reprendre cet amendement s’il n’en est pas cosignataire.
La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. L’obstacle qui a été évoqué, nous pourrons le faire disparaître si nous supprimons simplement les mots « protégé ou ». Un immeuble « présentant une valeur historique ou culturelle particulière », ce n’est pas un classement, tout en étant bien inclus dans la définition de ce que veut protéger notre collègue. Le terme « protégé », quant à lui, ne peut être valable que sur le territoire français.
C’est pourquoi je reprends cet amendement avec la suppression des termes susvisés, madame la présidente.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 146 rectifié bis, présenté par M. Legendre, et ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle est également consultée sur tout projet de vente ou d’aliénation du patrimoine français situé à l’étranger présentant une valeur historique ou culturelle particulière.
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je voudrais simplement soutenir cette proposition, qui est une proposition de bon sens.
Comme ma collègue l’a rappelé, nous avons un excellent patrimoine, qui est un emblème de notre rayonnement au-delà des frontières. Nous y sommes très attachés et nous devons tout faire pour le garder chaque fois que cela sera possible. Cette proposition de ma collègue Claudine Lepage, reprise par mon collègue Legendre, est vraiment excellente et je voudrais essayer de convaincre la commission et le Gouvernement de la soutenir.
M. David Assouline. La reprise de l’amendement rouvre-t-elle une discussion, madame la présidente ?
Mme la présidente. L’article 49, alinéa 6 bis, du règlement dispose : « Un amendement retiré par son auteur, après que sa discussion a commencé, peut être immédiatement repris par un sénateur qui n’en était pas signataire. … »
M. David Assouline. Oui, je le sais, madame la présidente.
Mme la présidente. Vous m’avez posé une question, j’y réponds, monsieur Assouline, mais laissez-moi achever : « La discussion se poursuit à partir du point où elle était parvenue. »
M. David Assouline. Ah, voilà !
Mme la présidente. Donc, la discussion se poursuit, et je vous donne bien volontiers la parole, pour explication de vote.
M. David Assouline. Mon interrogation portait seulement sur le dernier point. Je ne savais pas, lorsqu’un amendement est repris, si cela rouvrait un temps de parole comme s’il s’agissait d’un nouvel amendement. C’est tout ! On en apprend tous les jours au Sénat sur les procédures…
M. Jacques Legendre. C’est vrai !
M. David Assouline. Quoi qu’il en soit, comme j’apprécie le consensus qui se dégage ici, je souhaite juste que l’amendement soit présenté par M. Legendre et par Mme Lepage.
Mme la présidente. Malheureusement, ce ne sera pas possible, puisque Mme Lepage, signataire, l’avait retiré. Il ne s’agira donc que de l’amendement de M. Legendre.
M. Vincent Eblé. Je le reprends, madame la présidente ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Vous ne pouvez le reprendre une nouvelle fois, il a déjà été repris !
M. Vincent Eblé. Je n’étais pas signataire, madame la présidente, donc je souhaite pouvoir le reprendre avec mon collègue, s’il en est d’accord.
Mme la présidente. Nous discutons d’un amendement n° 146 rectifié bis, et M. Legendre en est maître, puisque c’est lui qui l’a repris.
M. Jacques Legendre. Madame la présidente, si c’est possible, je souhaiterais que le nom de Mme Lepage y soit associé ; sinon, les débats que nous avons ici montreront bien que l’origine de cet amendement est double et que Mme Lepage en a la part initiale. (Mme Corinne Bouchoux applaudit.)
Mme Éliane Assassi. Très bien !
Mme la présidente. Malheureusement, le règlement ne le permet pas. Mais je reconnais là votre fair-play, monsieur Legendre.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 146 rectifié bis ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je m’interroge sur une éventuelle modification de cet amendement, car il faudrait, après les termes « tout projet de vente ou d’aliénation du patrimoine français », ajouter les termes « de l’État ». Sinon, un amendement aussi flou que celui-ci pourrait laisser penser qu’après tout il y aurait une mainmise sur le bien en question. Il faut donc bien préciser que l’on parle de biens appartenant à l’État.
À cette heure, je ne mesure vraiment pas les conséquences de cette disposition. Aussi, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Monsieur Legendre, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par Mme la rapporteur ? M. Assouline va être content : il s’agirait ainsi d’un amendement déposé par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et républicain, repris ensuite par M. Legendre et dont l’ultime rectification est suggérée par la commission. Cette solution est épatante, car elle devrait satisfaire tout le monde ! (Sourires.)
M. Jacques Legendre. Madame la présidente, je rectifie l’amendement dans le sens suggéré par Mme la rapporteur.
Mme la présidente. Vous voyez, il suffit de demander ! (Nouveaux sourires.)
Il s’agit donc de l’amendement n° 146 rectifié ter, présenté par M. Legendre, et ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle est également consultée sur tout projet de vente ou d’aliénation du patrimoine français de l'État situé à l’étranger présentant une valeur historique ou culturelle particulière.
Madame la ministre, confirmez-vous l’avis défavorable du Gouvernement ?
M. Alain Fouché. Oh là là !
M. Alain Fouché. Très bien !
Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
M. Vincent Eblé. Incroyable unanimité !
Mme la présidente. L'amendement n° 384, présenté par MM. Montaugé et Cabanel, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 147 rectifié bis, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Elle peut, à tout moment, intervenir dans le cadre de ses compétences mentionnées à l’article L. 631–5.
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Lors du débat en commission, les sénateurs du groupe socialiste et républicain ont obtenu, à l’article 24, l’adoption d’un amendement tendant à rendre la Commission nationale compétente pour intervenir dans la gestion des cités historiques, en demandant la remise d’un rapport ou en émettant un avis sur l’état de conservation du site protégé considéré.
Ce rapport pourra être rédigé en interne, ou dans le cadre d’une mission d’inspection ou par toute personne publique ou privée mandatée par l’autorité compétente.
Nous avons également prévu que ces rapports et avis soient transmis au maire ou au président de l’EPCI. Cette transmission pourrait donner lieu à un débat au sein du conseil municipal ou du conseil communautaire s’agissant des communautés de communes ou des communautés d’agglomération.
À nos yeux, cette mission de contrôle permanent du patrimoine considéré, quelle que soit sa dénomination – cité historique, site patrimonial protégé, etc. –, est essentielle. Nous souhaitons donc que le présent article, détaillant les attributions de la Commission nationale, y fasse référence.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Le présent amendement tend à ce que la Commission nationale puisse demander un rapport ou émettre un avis sur l’état de conservation des cités historiques. Or cette demande me semble satisfaite par l’article 24, tel qu’il est issu des travaux de la commission.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Tout à fait !
Mme la présidente. Madame Monier, l’amendement n° 147 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Marie-Pierre Monier. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 147 rectifié bis est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 194 rectifié est présenté par Mme Cayeux, MM. Trillard, D. Laurent, Vasselle, de Nicolaÿ, Laufoaulu, Mouiller, Danesi et J.P. Fournier, Mme Deromedi, MM. Mandelli, Milon, Mayet, Cardoux, Chasseing, Laménie, Cambon et Gournac, Mme Lamure, M. Pellevat, Mme Deroche et MM. Houel, J. Gautier, A. Marc et Gremillet.
L'amendement n° 390 est présenté par M. Bouvard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 10
Remplacer les mots :
des membres
par les mots :
des représentants
La parole est à Mme Caroline Cayeux, pour présenter l’amendement n° 194 rectifié.
Mme Caroline Cayeux. Il s’agit de prévoir que, au sein de la Commission nationale, les associations soient représentées par leurs représentants qui ont délégation, et non par des « membres » qui représentent l’association intuitu personæ.
Mme la présidente. L’amendement n° 390 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 194 rectifié ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Le présent amendement vise à ce que les associations puissent dépêcher, au sein de la Commission nationale, un « représentant » plutôt qu’un de leurs membres.
Madame Cayeux, je vous l’avoue, je n’ai pas découvert cet amendement sans surprise car la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale a été proposée par les associations de patrimoine elles-mêmes.
Au demeurant, le terme suggéré pourrait, me semble-t-il, susciter une confusion. Le représentant légal d’une association ne peut en aucun cas être son président.
Aussi, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Cayeux, l’amendement n° 194 rectifié est-il maintenu ?
Mme Caroline Cayeux. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Pour ma part, je comprends l’esprit qui sous-tend cet amendement. Il faut envisager le cas d’associations plus ou moins bien structurées, s’apparentant à des collectifs. Placé dans une situation délicate, un membre d’une telle association peut prétendre qu’il ne peut voter, puisqu’il n’en a pas le mandat ! Aussi, il est bon que des représentants précis soient mandatés.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Mais c’est bien le cas !
M. Jean-Claude Requier. Voilà pourquoi je voterai le présent amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 214 rectifié, présenté par MM. Patient, Cornano, S. Larcher, Antiste et Karam et Mme Claireaux, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Après les mots :
des représentants de l'État,
insérer les mots :
des membres des services patrimoniaux des collectivités territoriales,
La parole est à M. Antoine Karam.
M. Antoine Karam. Les membres des services patrimoniaux des collectivités territoriales semblent rester absents de ce dispositif. Or leur représentation a son importance sur les plans politique et technique. Il convient donc de l’assurer !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Mon cher collègue, les craintes que vous exprimez à travers cet amendement nous semblent infondées : les commissions régionales du patrimoine et des sites, à l’instar des commissions départementales des objets mobiliers, dont les nouvelles commissions régionales devraient reprendre les attributions, sont aujourd’hui composées, en application d’une liste fixée par voie réglementaire, de plusieurs personnes travaillant dans le domaine du patrimoine au sein des collectivités territoriales.
Dès lors, je me tourne vers Mme la ministre, pour qu’elle me confirme si le texte de la commission répond d’ores et déjà à ces préoccupations.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Le Gouvernement a la même lecture que la commission de ces dispositions. Il émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Karam, l’amendement n° 214 rectifié est-il maintenu ?
M. Antoine Karam. Ayant l’assurance que les représentants des services des collectivités territoriales seraient bien présents au sein de ces instances, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 214 rectifié est retiré.
L'amendement n° 443 rectifié, présenté par M. Requier, Mme Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La commission régionale du patrimoine et de l'architecture est présidée par une personne titulaire d'un mandat électif.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Composées des représentants de l’État, d’élus, de membres d’associations et de fondations, les commissions régionales du patrimoine et de l’architecture doivent, comme la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture, être présidées par un élu. Il s’agit de sauvegarder l’indépendance de décision de ces nouvelles instances.
M. Alain Fouché. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Monsieur Requier, ces dispositions s’inscrivent dans la droite ligne de nos travaux de commission, qui ont conduit à confier la présidence de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture à un député ou à un sénateur.
Cela étant, il nous paraît important de rectifier cet amendement, afin de préciser que le président de la commission régionale est une personne titulaire d’un mandat électif et qui est membre de cette commission.
M. Alain Fouché. C’est préférable !
Mme Françoise Férat, rapporteur. Sous réserve de cette modification, la commission émet un avis favorable.
Mme la présidente. Monsieur Requier, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par Mme la rapporteur ?
M. Jean-Claude Requier. Bien sûr, et je rectifie donc ainsi cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 443 rectifié bis, présenté par M. Requier, Mme Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Vall, et ainsi libellé :
Alinéa 16
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La commission régionale du patrimoine et de l'architecture est présidée par une personne titulaire d'un mandat électif qui en est membre.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement ?
M. Alain Fouché. Oh !
Mme Audrey Azoulay, ministre. La Commission nationale sera bien présidée par un élu, mais le Gouvernement n’est pas favorable à ce que tel soit le cas à l’échelle régionale.
M. Alain Fouché. C’est bien dommage !
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. M. Requier a raison : mieux vaut confier ces fonctions à un élu qu’à un représentant de l’État, qui sera aux ordres de je ne sais qui. Un élu est beaucoup plus indépendant. Les représentants de l’État, eux, ne sont pas indépendants,…
M. David Assouline. Quelle défiance envers l’État !
M. Alain Fouché. … et ce quel que soit l’État !
Mme la présidente. L'amendement n° 385, présenté par MM. Montaugé et Cabanel, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 406, présenté par Mmes Bouchoux, Blandin et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Compléter cet alinéa par les mots :
, et des réserves de biosphère classées sur la liste « MAB and Biosphere » établie par le Conseil international de coordination du programme sur l’homme et la biosphère de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. À travers cet amendement, nous proposons d’inscrire au titre du présent article la réserve MAB, man and biosphere, classée par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture.
Je le sais, en voyant le mot « biosphère », la commission a immédiatement brandi son carton rouge en déclarant : « Nous ne débattons pas du projet de loi de biodiversité ! » (Sourires au banc des commissions.) Toutefois, je précise que ce classement émane de l’UNESCO, instance en charge du patrimoine et de la culture, et non du programme des Nations unies pour l’environnement, le PNUE, ou de l’Union internationale pour la conservation de la nature, l’UICN, organisation onusienne en charge des espèces protégées. Il s’agit bel et bien d’un classement patrimonial, qui comprend par exemple la vallée de la Dordogne et regroupe, à ce titre, sa faune et sa flore mais aussi ses châteaux et même les barrages hydroélectriques.
M. Jean-Claude Requier. Eh oui !
Mme Marie-Christine Blandin. Bref, mes chers collègues, votez pour ou contre cet amendement, mais n’allez pas croire qu’il a pour objet la biodiversité. Surtout, que ces dispositions ne suscitent aucun contresens ! Le classement en question n’aura jamais sa place dans un texte de loi relatif à l’environnement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Madame Blandin, avant d’entendre vos explications, nous pensions effectivement – j’emploie bien l’imparfait – que ces dispositions relevaient davantage du code de l’environnement que du code du patrimoine.
Néanmoins, à ce stade de la discussion, je suis un peu troublée par votre intervention. Aussi, la commission s’en remet à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Madame la sénatrice, je comprends bien la préoccupation exprimée via cet amendement. Néanmoins, au sein du ministère de la culture, nous voyons mal comment une telle disposition s’articulerait au présent texte. Peut-être pouvons-nous nous laisser le temps de l’examiner plus en détail ? (Mme Marie-Christine Blandin opine.) Mais, à ce stade, c’est difficile.
Mme la présidente. Si j’ai bien compris, l’avis du Gouvernement est défavorable, madame le ministre.
La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. Je me réjouis de la nouvelle écoute dont bénéficie cet amendement. Je le dis à mon tour : ce sujet n’est en rien une lubie d’écologistes, et il tient extrêmement à cœur à de très nombreuses associations et à un certain nombre de professions, dont celle de paysagiste. Dans le cadre de leurs enseignements, les écoles de paysagistes abordent bel et bien le classement dont il s’agit, au titre de la culture.
Ne balayons pas cette proposition, ce qui reviendrait à en perdre le fil et à la réduire à néant. Je conçois que l’on puisse s’y opposer, mais elle présente un réel intérêt. Je souligne que cette question compte d’ardents défenseurs de tous bords. Peut-être quelqu’un, de l’autre côté de l’hémicycle, va-t-il voler à mon secours !
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote, et pour éventuellement voler au secours de Mme Bouchoux… (Sourires.)
M. Alain Houpert. Je trouve cet amendement sympathique, dans la mesure où il télescope une loi, à savoir la loi sur l’eau, qui devient une calamité pour le patrimoine historique, en particulier des cours d’eau. En effet, à cause de ce texte, qui impose le retour des rivières et des plans d’eau à leur trajet historique, on voit constamment sur notre territoire des moulins ou des déversoirs du XIIIe siècle, construits par nos devanciers, des moines cisterciens, qui ont maîtrisé la nature.
Le grand Buffon, né à Montbard, donc qui est Bourguignon comme moi, avait coutume de dire que « la nature est cultivée ». Pour ma part, je dis qu’elle a été maîtrisée par nos ancêtres, et je soutiendrai ce rapport, que je trouve, je le répète, sympathique. La biosphère ne vient pas que de la préhistoire ; elle a aussi été créée par l’homme.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. J’interviens rarement sur la biosphère (Sourires.), mais je crois que nous devons voter cet amendement, de sorte que le débat puisse se poursuivre (Mmes Corinne Bouchoux et Marie-Christine Blandin opinent.) et que nous puissions affiner nos positions durant la navette.
Si nous ne le votons pas, je crains que ce problème ne soit définitivement évacué. (Mme Corinne Bouchoux opine de nouveau.) Je voterai donc cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Je voudrais apporter un élément complémentaire, qui ne va pas faciliter notre choix, mais qui va sans doute faciliter l’avis de la commission.
La mention des réserves de biosphère au sein du présent alinéa nécessiterait d’élaborer une zone tampon et un plan de gestion. Avez-vous mesuré cela, madame Blandin ? Cela correspond-il aux demandes en matière de protection de ces espaces ?
Pour le coup, je me dois finalement de donner un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Je suis interpellé par le fait d’inscrire dans le droit français, cher collègue Jacques Legendre, l’expression « MAB and Biosphere ». (Sourires.)
M. Yves Détraigne. Entre guillemets ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. C’est en effet cela que l’on va inscrire dans le code du patrimoine.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 406.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 460 rectifié, présenté par Mme Jouve et M. Mézard, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 199, présenté par M. Vasselle, n’est pas non plus soutenu.
L'amendement n° 148 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 24, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Les documents d’urbanisme des collectivités territoriales concernées sont conformes au plan de gestion et respectent le périmètre de la zone tampon afin d’assurer la protection, la conservation et la mise en valeur du bien et la préservation de sa valeur universelle exceptionnelle.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Le texte résultant des travaux de la commission indique que « le périmètre de la zone tampon et le plan de gestion sont pris en compte dans les documents d’urbanisme des collectivités ».
Or, s’agissant de biens inscrits à l’UNESCO, les documents d’urbanisme des collectivités ne peuvent entrer en contradiction avec la zone tampon ou le plan de gestion sans méconnaître les obligations internationales qui s’imposent à l’État en matière de protection du patrimoine mondial. Il convient donc, et c’est l’objet de notre amendement, de prévoir une réelle conformité de ces documents avec le périmètre et le plan de gestion.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Cet amendement vise à imposer que les documents d’urbanisme soient conformes au plan de gestion et respectent le périmètre de la zone tampon.
Il va plus loin que le texte proposé par la commission, qui évoque la seule nécessité d’une prise en compte.
La notion de conformité peut poser problème. Si on l’imposait, le document d’urbanisme pourrait devenir immédiatement illégal, dans le cas où des modifications seraient nécessaires.
Il faudrait alors prévoir que cette obligation de conformité emporte en parallèle révision, le cas échéant, des documents d’urbanisme. Compte tenu de la lourdeur des procédures de révision, il me semble qu’une disposition aussi contraignante pourrait se révéler problématique.
La commission a donc émis un avis défavorable, préférant s’en tenir à sa propre rédaction, qui paraît plus équilibrée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Robert, l’amendement n° 148 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sylvie Robert. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 148 rectifié est retiré.
La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote sur l'article.
M. Philippe Bonnecarrère. Je souhaite revenir sur l’amendement qui vient d’être retiré. Je demande à Mme la rapporteur et à Mme la ministre de profiter de la navette pour revoir cette question. Il y a une incompréhension totale sur ce qu’est le plan de gestion, que vous intégrez dans les documents d’urbanisme.
Le plan de gestion n’est pas un acte normatif. Il y a une incompréhension sur la constitution des dossiers en cette matière. Ce qui est normatif, c’est la décision prise entre l’État et la convention mondiale, lorsque l’on définit une valeur universelle exceptionnelle. C’est cet élément qui vaut engagement pour l’État français. Le plan de gestion c’est un document que nos collectivités établissent, mais qui est très général, ayant un caractère intentionnel. Je vous assure qu’il n’a aucun caractère normatif.
Pour prendre un seul exemple, dans un plan de gestion sont évoquées les conditions d’entretien ou de nettoyage de votre site. Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de prévoir dans nos documents d’urbanisme s’il faut nettoyer une fois, deux fois, trois fois ou quatre fois par semaine. Je caricature un peu, et je vous prie de bien vouloir m’en excuser, mais je vous suggère de retravailler pendant la navette ce qui, effectivement, doit entrer dans nos documents d’urbanisme, c’est-à-dire ce qui a un caractère normatif.
Mme la présidente. Madame la ministre, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, il est dix-neuf heures vingt-cinq. Si vous en êtes d’accord, je vous propose de commencer l’examen de l’article 24, sachant que nous n’irons évidemment pas au bout, puisque je serai obligée de lever la séance à vingt heures au plus tard, pour reprendre l’examen du projet de loi sans doute mardi prochain, à quatorze heures trente.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Article 24
I. – Le titre II du livre VI du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° A (nouveau) L’article L. 621-4 est complété par les mots : « , après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture » ;
1° B (nouveau) Au premier alinéa de l’article L. 621-5 et à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 621-6, après les mots : « autorité administrative, », sont insérés les mots : « après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture, » ;
1° Au second alinéa de l’article L. 621-5, au deuxième alinéa de l’article L. 621-6, à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 621-12 et à la seconde phrase de l’article L. 622-3, les mots : « Commission nationale des monuments historiques » sont remplacés par les mots : « Commission nationale du patrimoine et de l’architecture » ;
2° Après le premier alinéa de l’article L. 621-9, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure, au sens des articles 524 et 525 du code civil, à un immeuble classé ou à une partie d’immeuble classée au titre des monuments historiques ne peuvent en être détachés sans autorisation de l’autorité administrative. » ;
3° Après le deuxième alinéa de l’article L. 621-27, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure, au sens des articles 524 et 525 du code civil, à un immeuble inscrit ou à une partie d’immeuble inscrite au titre des monuments historiques ne peuvent en être détachés sans autorisation de l’autorité administrative. » ;
4° La section 4 du chapitre Ier est ainsi rédigée :
« Section 4
« Abords
« Art. L. 621-30. – I. – Les immeubles ou ensembles d’immeubles qui forment avec un monument historique un ensemble cohérent ou qui sont susceptibles de contribuer à sa conservation ou à sa mise en valeur sont protégés au titre des abords.
« La protection au titre des abords a le caractère de servitude d’utilité publique affectant l’utilisation des sols dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel.
« II. – La protection au titre des abords s’applique, sur décision de l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale, à tout immeuble, bâti ou non bâti :
« 1° Visible du monument historique ou visible en même temps que lui et situé à moins de cinq cents mètres de celui-ci ;
« 2° Ou situé dans un périmètre délimité par l’autorité administrative. Ce périmètre peut être commun à plusieurs monuments historiques.
« La protection au titre des abords s’applique à toute partie non protégée au titre des monuments historiques d’un immeuble partiellement protégé.
« La protection au titre des abords n’est pas applicable aux immeubles ou parties d’immeubles protégés au titre des monuments historiques ou situés dans le périmètre d’un site patrimonial protégé classé en application des articles L. 631-1 et L. 631-2.
« Les servitudes d’utilité publique instituées en application de l’article L. 341-1 du code de l’environnement ne sont pas applicables aux immeubles protégés au titre des abords.
« III. – (Supprimé)
« Art. L. 621-31. – Dans le cas prévu au 2° du II de l’article L. 621-30, les abords sont délimités et créés par décision de l’autorité administrative, sur proposition de l’architecte des Bâtiments de France, après enquête publique, consultation du propriétaire ou de l’affectataire domanial du monument historique et accord de l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale.
« À défaut d’accord de l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale, la décision est prise soit par l’autorité administrative, après avis de la commission régionale du patrimoine et de l’architecture, lorsque le périmètre ne dépasse pas la distance de cinq cents mètres à partir d’un monument historique, soit par décret en Conseil d’État, après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture, lorsque le périmètre dépasse la distance de cinq cents mètres à partir d’un monument historique.
« Lorsque le projet de périmètre délimité des abords est instruit concomitamment à l’élaboration, à la révision ou à la modification du plan local d’urbanisme, du document d’urbanisme en tenant lieu ou de la carte communale, l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale diligente une enquête publique unique portant à la fois sur le projet de document d’urbanisme et sur le projet de périmètre délimité des abords.
« Les enquêtes publiques conduites pour l’application du présent article sont réalisées dans les formes prévues au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement.
« Le périmètre délimité des abords peut être modifié dans les mêmes conditions.
« Art. L. 621-32. – Les travaux susceptibles de modifier l’aspect extérieur d’un immeuble, bâti ou non bâti, protégé au titre des abords sont soumis à une autorisation préalable.
« L’autorisation peut être refusée ou assortie de prescriptions lorsque les travaux sont susceptibles de porter atteinte à la conservation ou à la mise en valeur d’un monument historique ou des abords.
« Lorsqu’elle porte sur des travaux soumis à formalité au titre du code de l’urbanisme ou au titre du code de l’environnement, l’autorisation prévue au présent article est délivrée dans les conditions et selon les modalités de recours prévues à l’article L. 632-2 du présent code. » ;
5° L’article L. 621-33 est ainsi rédigé :
« Art. L. 621-33. – Lorsqu’un immeuble ou une partie d’immeuble protégé au titre des monuments historiques a été morcelé ou lorsqu’un effet mobilier qui lui était attaché à perpétuelle demeure a été détaché d’un immeuble protégé au titre des monuments historiques en violation des articles L. 621-9 ou L. 621-27, l’autorité administrative peut mettre en demeure l’auteur du manquement de procéder, dans un délai qu’elle détermine, à la remise en place, sous sa direction et sa surveillance, aux frais des auteurs des faits, vendeurs et acheteurs pris solidairement.
« En cas d’urgence, l’autorité administrative met en demeure l’auteur du manquement de prendre, dans un délai qu’elle détermine, les mesures nécessaires pour prévenir la détérioration, la dégradation et la destruction des biens concernés.
« L’acquisition d’un fragment d’immeuble protégé au titre des monuments historiques ou d’un effet mobilier détaché en violation des articles L. 621-9 ou L. 621-27 est nulle. L’autorité administrative et le propriétaire originaire peuvent exercer les actions en nullité ou en revendication dans un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle ils ont eu connaissance de l’acquisition. Elles s’exercent sans préjudice des demandes en dommages-intérêts qui peuvent être dirigées soit contre les parties contractantes solidairement responsables, soit contre l’officier public qui a prêté son concours à l’aliénation. Lorsque l’aliénation illicite a été consentie par une personne publique ou par un établissement d’utilité publique, cette action en dommages-intérêts est exercée par l’autorité administrative au nom et au profit de l’État.
« L’acquéreur ou le sous-acquéreur de bonne foi entre les mains duquel l’objet est revendiqué a droit au remboursement de son prix d’acquisition. Si la revendication est exercée par l’autorité administrative, celle-ci a recours contre le vendeur originaire pour le montant intégral de l’indemnité qu’il aura dû payer à l’acquéreur ou au sous-acquéreur. » ;
6° Le chapitre Ier est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Domaines nationaux
« Sous-section 1
« Définition, liste et délimitation
« Art. L. 621-34. – Les domaines nationaux sont des ensembles immobiliers présentant un lien exceptionnel avec l’histoire de la Nation et dont l’État est, au moins pour partie, propriétaire.
« Ces biens ont vocation à être conservés et restaurés par l’État dans le respect de leur caractère historique, artistique, paysager et écologique.
« Art. L. 621-35. – La liste des domaines nationaux et leur périmètre sont déterminés par décret en Conseil d’État sur proposition du ministre chargé de la culture, après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture et du ministre chargé des domaines.
« Ils peuvent comprendre des biens immobiliers appartenant à l’État, à des collectivités territoriales, à des établissements publics ou à des personnes privées.
« Sous-section 2
« Protection au titre des monuments historiques
« Art. L. 621-36. – Les parties des domaines nationaux qui appartiennent à l’État ou à l’un de ses établissements publics sont inaliénables et imprescriptibles.
« Art. L. 621-37. – Les parties d’un domaine national qui appartiennent à l’État ou à l’un de ses établissements publics sont de plein droit intégralement classées au titre des monuments historiques dès l’entrée en vigueur du décret délimitant le domaine national.
« Elles sont inconstructibles, à l’exception des bâtiments strictement nécessaires à leur entretien et à leur visite par le public.
« Art. L. 621-38. – À l’exception de celles qui sont déjà classées au titre des monuments historiques, les parties d’un domaine national qui appartiennent à une personne publique autre que l’État ou l’un de ses établissements publics ou à une personne privée sont de plein droit intégralement inscrites au titre des monuments historiques dès l’entrée en vigueur du décret délimitant le domaine national. Elles peuvent être classées au titre des monuments historiques dans les conditions définies à la section 1 du présent chapitre.
« Sous-section 2 bis
« Droit de préemption
(Division et intitulé nouveaux)
« Art. L. 621–38–1. – L’État est informé avant toute cession de l’une des parties d’un domaine national appartenant à une personne autre que lui ou l’un de ses établissements publics. Il peut exercer un droit de préemption par l’effet duquel il se trouve subrogé à l’acquéreur.
« Un décret définit les modalités d’application du présent article.
« Sous-section 3
« Gestion des parties des domaines nationaux appartenant à l’État
« Art. L. 621-39. – Par dérogation aux articles L. 3211-5, L. 3211-5-1 et L. 3211-21 du code général de la propriété des personnes publiques, les parties des domaines nationaux gérées par l’Office national des forêts en application du 1° du I de l’article L. 211-1 du code forestier ne peuvent faire l’objet d’aucune aliénation, même sous forme d’échange. » ;
7° Après l’article L. 622-1, sont insérés des articles L. 622-1-1 et L. 622-1-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 622-1-1. – Un ensemble ou une collection d’objets mobiliers dont la conservation dans son intégrité et sa cohérence présente un intérêt public au point de vue de l’histoire, de l’art, de l’architecture, de l’archéologie, de l’ethnologie, de la science ou de la technique peut être classé au titre des monuments historiques comme ensemble historique mobilier par décision de l’autorité administrative, après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture.
« Cet ensemble ne peut être divisé ou aliéné par lot ou pièce sans autorisation de cette autorité.
« Les effets du classement s’appliquent à chaque élément de l’ensemble historique mobilier classé et subsistent pour un élément s’il est dissocié de l’ensemble. Toutefois, lorsque l’élément dissocié ne bénéficie pas d’un classement en application de l’article L. 622-1, les effets du classement peuvent être levés pour cet élément par l’autorité administrative.
« Art. L. 622-1-2. – Lorsque des objets mobiliers classés ou un ensemble historique mobilier classé sont attachés, par des liens historiques ou artistiques remarquables, à un immeuble classé, et forment avec lui un ensemble d’une qualité et d’une cohérence dont la conservation dans son intégrité présente un intérêt public, ces objets mobiliers ou cet ensemble historique mobilier peuvent être grevés d’une servitude de maintien dans les lieux par décision de l’autorité administrative, après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture et accord du propriétaire. Cette servitude peut être levée dans les mêmes conditions. En cas de refus de l’autorité administrative de lever la servitude, les sujétions anormales qui peuvent en résulter sont compensées par une indemnité. À défaut d’accord amiable, l’action en indemnité est portée devant le juge judiciaire.
« Le déplacement de cet objet mobilier ou de tout ou partie de cet ensemble historique mobilier classé est subordonné à une autorisation de l’autorité administrative.
« La servitude de maintien dans les lieux peut être prononcée en même temps que la décision de classement des objets mobiliers ou de l’ensemble historique mobilier, ou postérieurement à celle-ci. » ;
7° bis (nouveau) L’article L. 622–2 est complété par les mots : « , après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture » ;
8° À la première phrase de l’article L. 622-3, après le mot : « administrative, », sont insérés les mots : « après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture, » ;
9° L’article L. 622-4 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par les mots : « , après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « Commission nationale des monuments historiques » sont remplacés par les mots : « Commission nationale du patrimoine et de l’architecture » ;
10° Après l’article L. 622-4, il est inséré un article L. 622-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 622-4-1. – Les ensembles ou collections d’objets mobiliers appartenant à un propriétaire autre que l’État ou qu’un établissement public de l’État sont classés au titre des monuments historiques comme ensembles historiques mobiliers par décision de l’autorité administrative, après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture et accord du propriétaire.
« En cas de désaccord, le classement d’office est prononcé par décret en Conseil d’État, sous les mêmes conditions et dans les mêmes formes que celles prévues à l’article L. 622-4. » ;
10° bis À la fin du second alinéa de l’article L. 622-10, la référence : « L. 612-2 » est remplacée par la référence : « L. 611-2 » ;
11° Le chapitre IV est abrogé.
II. – Le titre III du livre VI du code du patrimoine est ainsi rédigé :
« TITRE III
« SITES PATRIMONIAUX PROTÉGÉS
« CHAPITRE IER
« Classement au titre des sites patrimoniaux protégés
« Art. L. 631-1. – Sont classés au titre des sites patrimoniaux protégés les villes, villages ou quartiers dont la conservation ou la mise en valeur présente, au point de vue historique, architectural, archéologique, artistique ou paysager, un intérêt public.
« Peuvent être classés, au même titre, les espaces ruraux et les paysages qui forment avec ces villes, villages ou quartiers un ensemble cohérent ou qui sont susceptibles de contribuer à leur conservation ou à leur mise en valeur.
« Le classement au titre des sites patrimoniaux protégés a le caractère de servitude d’utilité publique affectant l’utilisation des sols dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel.
« Art. L. 631-2. – Les sites patrimoniaux protégés sont classés par décision du ministre chargé de la culture, après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture et enquête publique conduite par l’autorité administrative, sur proposition ou après accord de l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale et, le cas échéant, de la ou des communes concernées. La Commission nationale du patrimoine et de l’architecture et les commissions régionales du patrimoine et de l’architecture peuvent proposer le classement au titre des sites patrimoniaux protégés.
« À défaut d’accord de l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale, le site patrimonial protégé est classé par décret en Conseil d’État, après avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture.
« L’acte classant le site patrimonial protégé en délimite le périmètre.
« Le périmètre d’un site patrimonial protégé peut être modifié dans les mêmes conditions.
« Les enquêtes publiques conduites pour l’application du présent article sont réalisées dans les formes prévues au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement.
« Art. L. 631-3. – I. – Un plan de sauvegarde et de mise en valeur peut être établi sur tout ou partie du site patrimonial protégé, dans les conditions prévues au chapitre III du titre Ier du livre III du code de l’urbanisme.
« Sur les parties du site patrimonial protégé non couvertes par un plan de sauvegarde et de mise en valeur, un plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine est établi dans les conditions prévues à l’article L. 631-4 du présent code.
« L’État apporte son assistance technique et financière à l’autorité compétente pour l’élaboration et la révision du plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine.
« Dans son avis rendu en application des premier et deuxième alinéas de l’article L. 631-2, la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture indique le document d’urbanisme permettant, sur tout ou partie du périmètre, la protection, la conservation et la mise en valeur effectives du patrimoine culturel. Elle peut assortir son avis de recommandations et d’orientations.
« II. – (Supprimé)
« III (nouveau). – À compter de la publication de l’acte classant un site patrimonial protégé, il est institué une commission locale du site patrimonial protégé, composée de représentants locaux permettant d’assurer la représentation de la ou des communes concernées, de représentants de l’État et de personnalités qualifiées au titre, d’une part, de la protection du patrimoine et, d’autre part, des intérêts économiques locaux.
« Elle est consultée sur le projet de plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine et, le cas échéant, sur le projet de plan de sauvegarde et de mise en valeur et assure le suivi de sa mise en œuvre après son adoption. Dans le cadre de l’instruction des demandes d’autorisation de travaux, elle peut être consultée par l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation sur tout projet d’opération d’aménagement, de construction ou de démolition, notamment lorsque celui-ci nécessite une adaptation mineure du plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine ou du plan de sauvegarde et de mise en valeur.
« Elle peut également proposer la modification ou la mise en révision du plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine ou du plan de sauvegarde et de mise en valeur ».
« Art. L. 631-4 (nouveau). – I. – Le plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine comprend :
« 1° Un rapport de présentation des objectifs du site patrimonial protégé, fondé sur un diagnostic comprenant un inventaire du patrimoine et des éléments paysagers sur le périmètre couvert par le plan ;
« 2° Un règlement comprenant des prescriptions relatives :
« a) Aux parties extérieures des constructions neuves, rénovées ou réhabilitées, leurs dimensions, les matériaux du clos et couvert, leurs conditions d’alignement sur la voirie et de distance minimale par rapport à la limite séparative et l’aménagement de leurs abords, afin de contribuer à la qualité architecturale, urbaine et paysagère, à la mise en valeur du patrimoine bâti et des espaces naturels ou urbains et à l’insertion des constructions dans le milieu environnant ;
« b) Aux quartiers, îlots, immeubles, espaces publics, monuments, sites, cours, jardins, plantations et mobiliers urbains à protéger et à conserver, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d’ordre culturel, historique ou architectural, afin d’assurer leur conservation ou leur restauration ;
« 3° Un document graphique faisant apparaître le périmètre couvert par le plan, une typologie des constructions, les immeubles protégés, bâtis ou non, dont la conservation, la restauration, la mise en valeur ou la requalification est imposée et, le cas échéant, les conditions spéciales relatives à l’implantation, à la morphologie, aux dimensions des constructions et aux matériaux du clos et couvert.
« II. – Le projet de plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine est arrêté par l’organe délibérant de l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale.
« Le plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine, dont le projet est arrêté par l’organe délibérant de l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale, est adopté par le même organe, après enquête publique, avis de la commission régionale du patrimoine et de l’architecture, consultation des personnes mentionnées à l’article L. 132-7 et L. 132-9 du code de l’urbanisme et accord de l’autorité administrative.
« Lorsqu’il n’est pas compatible avec le plan local d’urbanisme et, s’il existe, le projet de d’aménagement et de développement durables, il ne peut être adopté avant d’avoir été mis en compatibilité selon la procédure définie aux articles L. 153-54 à L. 153-59 du même code.
« Lorsque le projet de plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine est instruit concomitamment à l’élaboration, la révision ou la modification du plan local d’urbanisme, du document en tenant lieu ou de la carte communale, l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale diligente une enquête publique portant à la fois sur le projet de document d’urbanisme et sur le projet de plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine.
« Le plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine est annexé au plan local d’urbanisme en application de l’article L. 151–43 dudit code.
« III. – La révision du plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine a lieu dans les mêmes conditions que celles prévues au II du présent article.
« Le plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine peut également être modifié lorsqu’il n’est pas porté atteinte à l’économie générale de ses dispositions relatives à la protection du patrimoine bâti et des espaces. La modification est prononcée, après enquête publique, consultation de l’architecte des Bâtiments de France puis accord de l’autorité administrative, par délibération de l’organe délibérant de l’autorité mentionnée au deuxième alinéa du même II.
« La modification de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine emporte, le cas échéant, la modification du plan local d’urbanisme.
« Art. L. 631–5 (nouveau). – La Commission nationale du patrimoine et de l’architecture peut, à tout moment, demander un rapport ou émettre un avis sur l’état de conservation du site patrimonial protégé. Ses avis sont transmis pour débat à l’organe délibérant de l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale.
« CHAPITRE II
« Régime des travaux
« Art. L. 632-1. – Dans le périmètre d’un site patrimonial protégé, sont soumis à une autorisation préalable les travaux susceptibles de modifier l’état des parties extérieures des immeubles bâtis, y compris du second œuvre, des immeubles non bâtis ou, dès qu’il existe un acte décidant la mise à l’étude du plan de sauvegarde et de mise en valeur mentionné au II de l’article L. 313-1 du code de l’urbanisme, des parties intérieures des immeubles bâtis.
« L’autorisation peut être refusée ou assortie de prescriptions lorsque les travaux sont susceptibles de porter atteinte à la conservation ou à la mise en valeur du site patrimonial protégé.
« Art. L. 632-2. – I. – Le permis de construire, le permis de démolir, le permis d’aménager, l’absence d’opposition à déclaration préalable ou l’autorisation prévue au titre des sites classés en application de l’article L. 341-10 du code de l’environnement tient lieu de l’autorisation prévue à l’article L. 632-1 du présent code si l’architecte des Bâtiments de France a donné son accord, le cas échéant assorti de prescriptions motivées. À ce titre, il s’assure du respect de l’intérêt public attaché au patrimoine, à l’architecture, au paysage naturel ou urbain, à la qualité des constructions et à leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant. Il s’assure, le cas échéant, du respect des règles du plan de sauvegarde et de mise en valeur ou du plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine.
« En cas de silence de l’architecte des Bâtiments de France, cet accord est réputé donné.
« L’autorisation délivrée énonce, le cas échéant, les prescriptions motivées auxquelles le demandeur doit se conformer.
« II. – En cas de désaccord avec l’architecte des Bâtiments de France, l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation transmet le dossier accompagné de son projet de décision à l’autorité administrative, qui statue après avis de la commission régionale du patrimoine et de l’architecture. En cas de silence, l’autorité administrative est réputée avoir approuvé ce projet de décision.
« III. – Un recours peut être exercé par le demandeur à l’occasion du refus d’autorisation de travaux. Il est alors adressé à l’autorité administrative, qui statue. En cas de silence, l’autorité administrative est réputée avoir confirmé la décision de l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation.
« IV. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article.
« Art. L. 632-3. – Les articles L. 632-1 et L. 632-2 ne sont pas applicables aux immeubles ou parties d’immeubles protégés au titre des monuments historiques.
« Les servitudes d’utilité publique instituées en application de l’article L. 341-1 du code de l’environnement ne sont pas applicables aux immeubles situés dans le périmètre d’un site patrimonial protégé.
« CHAPITRE III
« Dispositions fiscales
« Art. L. 633-1. – I. – Les règles fiscales relatives à la détermination du revenu net des personnes propriétaires d’un immeuble situé en site patrimonial protégé pour lequel une demande de permis de construire ou une déclaration de travaux a été déposée au plus tard le 31 décembre 2008 sont fixées au b ter du 1° du I de l’article 31 et au I de l’article 156 du code général des impôts.
« II. – Les règles fiscales relatives à la réduction d’impôt dont peuvent bénéficier les personnes propriétaires d’un immeuble situé en site patrimonial protégé pour lequel une demande de permis de construire ou une déclaration de travaux a été déposée à compter du 1er janvier 2009 sont fixées à l’article 199 tervicies du même code. »
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, sur l’article.
Mme Audrey Azoulay, ministre. J’évoquais tout à l’heure les points sur lesquels nous pouvions nous retrouver et ceux sur lesquels nous étions un peu éloignés, et c’est le cas de vos propositions sur les abords.
Je tiens à préciser qu’il n’a jamais été question, pour le Gouvernement, de mettre fin à la règle actuelle. L’amendement du Gouvernement le rappelle : nous avons affirmé clairement le maintien de la règle des 500 mètres, mais seulement en l’absence de périmètre délimité.
Il me semble en effet que le périmètre spécifique à chaque monument, proposé et défini par l’architecte des Bâtiments de France, ou ABF, est un atout important qui permet une protection tenant compte des spécificités locales, que l’ABF connaît bien.
Cette disposition permet également de mettre fin à la règle de la covisibilité, qui n’est pas forcément très bien comprise, et qui peut même parfois être vue comme une source de traitement inéquitable.
Vous doutez de la pertinence du périmètre délimité ou du périmètre « intelligent », que nous souhaitons instaurer comme règle de droit commun, et vous souhaitez permettre à la commune ou à l’intercommunalité de choisir entre la règle habituelle des 500 mètres et de la covisibilité, ou le nouveau périmètre délimité.
Ce qui me paraît gênant dans votre proposition, c’est qu’il n’y a plus de règle de droit commun, et il y a potentiellement des conflits pour des monuments historiques qui sont à cheval sur plusieurs territoires ou plusieurs collectivités, qui ne seraient pas forcément d’accord sur la règle à appliquer.
Il me semble donc important de maintenir une règle de droit commun.
La proposition du Gouvernement ne méconnaît pas l’avis des collectivités locales concernées, puisque le nouveau périmètre délimité ne peut être créé qu’avec l’accord de la commune ou de l’intercommunalité.
Telles sont les précisions que je souhaitais porter à la connaissance de la Haute Assemblée avant de commencer le débat sur cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur, sur l’article.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Avec l’article 24, nous allons aborder l’une des dispositions phares du projet de loi, mais aussi l’une des plus sujettes à discussion – vous venez de le dire, madame la ministre –, à en juger par le nombre d’amendements déposés : la réforme des espaces protégés.
Il faut bien admettre que la perspective de la fin du délai de transformation des ZPPAUP l’été prochain n’imposait pas, à première vue, une réforme d’une telle ampleur.
Néanmoins, il faut aussi reconnaître que cette réforme apporte une simplification et une clarification tout à fait bienvenues sur plusieurs points, sur lesquels la commission n’a par conséquent pas jugé opportun de revenir. Distinction plus nette entre les protections au titre du code du patrimoine et du code de l’environnement, modernisation et alignement des régimes de travaux, suppression des chevauchements de servitudes d’utilité publique sont autant d’évolutions qui devraient permettre d’apporter de la lisibilité pour nos concitoyens.
La commission s’est efforcée de s’inscrire dans cette logique de simplification, sans remettre en cause le haut niveau de protection du patrimoine de notre législation et en gardant constamment à l’esprit la nécessité de préserver les intérêts des collectivités territoriales. Ces dernières ont largement manifesté leur besoin d’être mieux accompagnées, et c’est à cet effet que nous avons abandonné le recours au PLU au profit d’un document plus proche de celui du règlement des AVAP, renforcé le rôle de la Commission nationale ou rétabli l’élaboration conjointe du plan de sauvegarde et de mise en valeur.
L’article 24 présente aujourd’hui un équilibre entre la nécessaire protection du patrimoine, l’enjeu de simplification et de lisibilité des normes applicables en ce domaine et les intérêts des collectivités territoriales. Je forme l’espoir que nos travaux restent guidés par une même logique et ne viennent pas bouleverser l’équilibre que nous avons atteint, et qui a reçu, madame la ministre, des échos très très positifs.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, sur l'article.
M. Alain Fouché. Je souhaite simplement attirer l’attention sur la portée des avis dits conformes des architectes des Bâtiments de France, les ABF.
En effet, je pense qu’il devient urgent que le Gouvernement travaille à une réforme du fonctionnement des ABF. Il est un fait que leur pouvoir est prépondérant dans les domaines des permis de construire ou de travaux, un pouvoir bien supérieur à celui des premiers magistrats des communes.
Leurs préconisations doivent naturellement être prises en compte dans les choix et les accords qui sont donnés. Toutefois, je voudrais, comme bon nombre de maires, que cet avis soit non plus conforme, mais seulement consultatif, particulièrement pour les travaux n’ayant qu’un impact limité sur l’aspect extérieur des bâtiments situés dans un périmètre protégé, et souvent non visible, sans compter que les décisions rendues sont très souvent arbitraires et divergentes d’un département à un autre, d’une commune à une autre, comme on peut le voir dans de nombreuses situations, et même entre deux architectes successifs.
Globalement, les maires font face à des tracasseries quotidiennes et permanentes. Au-delà des difficultés financières dues à la baisse des dotations, beaucoup de normes, de contraintes et de freins rendent la gestion communale compliquée. Le Sénat, chambre des communes, est là pour leur rendre la vie plus facile.
Par ailleurs, pour ce qui concerne le choix des entreprises qui interviennent sur ce type de travaux, il est assez limité, car elles doivent répondre à un certain nombre de contraintes souhaitées soit par les ABF, soit par les architectes des monuments historiques. Par conséquent, ce sont très souvent les mêmes entreprises qui bénéficient des chantiers après avoir obtenu le « label » de l’architecte. Il s’agit d’une vraie nébuleuse qui pose question. Sur quels critères sont-elles choisies ? Quelle est la réglementation en la matière ?
Celles qui n’ont pas ce label ne peuvent prétendre à ces travaux.
Il y a donc deux poids, deux mesures, madame la ministre.
Nous devons être pragmatiques dans nos décisions et introduire de la souplesse et de la vérité dans les procédures, en rendant aux maires leur rôle de décideurs en dernier ressort dans leur commune pour certains dossiers.
J’insiste sur les consultations des entreprises car ce sont bien souvent les mêmes entreprises qui tournent. Il y a quelque chose qui n’est pas clair, et il faut véritablement être attentif car les maires sont las de ces tracasseries de tous les jours. Si vous faites un sondage sur ce point, les résultats seront éloquents. (Mme Caroline Cayeux et M. Michel Magras applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, sur l'article.
M. David Assouline. Ce débat démontre clairement l’apport du travail parlementaire et l’écoute du Gouvernement. Sur ce qui a longuement été débattu à l’Assemblée nationale, les choses ont bougé dans un climat d’écoute mutuelle. Au Sénat, sur le fond, la tonalité a été à peu près la même.
Nous sentions déjà une inflexion du Gouvernement : il n’était pas possible de laisser la main aux seules municipalités, avec les risques d’abus ou des décisions dans lesquelles l’État était totalement évincé.
Cet équilibre, nous espérons le retrouver lors de la discussion des amendements. Nous remercions, en tout cas, le Gouvernement d’avoir fait preuve d’ouverture.
Tout à l’heure, à l’issue du débat pour choisir entre « les sites patrimoniaux protégés » et « les cités historiques », divergence d’appellation qui semblait le point de blocage majeur, nous avons salué par des applaudissements la décision prise par Mme la ministre, qui a accepté en séance de retirer son amendement. Elle a ainsi permis au Parlement d’apporter sa contribution à la rédaction du projet de loi.
Cette attitude mérite d’être soulignée, car elle annonce une poursuite de la discussion dans un climat constructif. Nous allons finalement surmonter ce qui paraissait être des points de discorde pour débattre les uns avec les autres, dans l’écoute du Gouvernement, et pour apporter au texte l’enrichissement du travail parlementaire.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l’article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous considérons, au groupe communiste, républicain et citoyen, qu’un bâtiment protégé pour sa qualité architecturale et son importance historique appartient non à la collectivité dans laquelle il se trouve, mais au pays dans son intégralité. C’est pour cette raison que nous déplorons le recul de l’État opéré dans la version originale du texte.
On pourrait ajouter un certain nombre d’arguments plus pragmatiques.
Les collectivités territoriales ont-elles toutes les moyens humains suffisants pour réunir des compétences patrimoniales ? Nous ne le pensons pas.
Est-il de leur seule responsabilité de veiller à la protection du patrimoine ? Nous ne le pensons pas non plus.
C’est dans cette optique que nous proposerons un certain nombre d’amendements pour permettre à toutes les personnes intéressées une participation au processus de protection des monuments.
Par ailleurs, je regrette que le Gouvernement se soit lancé dans une réforme du régime de protection, alors même que certaines collectivités viennent tout juste d’intégrer le dispositif précédent et que les premières observations montrent que le système fonctionne globalement bien.
Concernant la réforme des abords, il nous semble préjudiciable de revenir sur le caractère automatique de la zone des abords, pourtant déjà adaptable en fonction des circonstances. Nous le comprenons d’autant moins que le dispositif actuel semblait satisfaire aux exigences de protection du patrimoine.
Ce qu’il nous apparaît, c’est qu’une certaine logique urbanistique prend le pas sur la logique patrimoniale. Le renforcement du pouvoir du maire en matière d’abords le place dans une situation de juge et partie, d’autant plus dans la période tendue que nous connaissons en matière de logements.
Pour finir, j’évoquerai les architectes des Bâtiments de France. Je crains que le débat qui s’ouvre à ce propos à partir de l’article 24 ne soit un prétexte pour les fragiliser les architectes des Bâtiments de France. Certes, comme vous, je pense qu’ils ne sont pas exempts de tout reproche.
M. Alain Fouché. C’est le moins qu’on puisse dire !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cependant, ils montrent des compétences de plus en plus affirmées. Dans le même temps – peut-être est-ce là que réside l’un des problèmes – leur nombre a diminué au fur et à mesure des années.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Si une nouvelle fois, nous pouvons entendre qu’une réflexion soit entreprise sur une réforme du corps des ABF, il nous apparaît injuste de le faire ainsi, alors même qu’ils sont deux cents et gèrent près de 44 000 monuments !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, sur l’article.
Mme Marie-Pierre Monier. L’article 24 est réellement le cœur du volet « patrimoine » de cette loi.
Cet article est riche. Il contient de nombreuses dispositions qui concernent nos territoires, la gestion de leur patrimoine via des documents d’urbanisme réformés et les décisions de leurs élus. Ces dispositions peuvent, comme vous l’avez dit dans votre propos liminaire, madame la ministre, redonner un élan salutaire à la conservation, la mise en valeur et la protection du patrimoine auquel nos concitoyens sont très attachés. L’enjeu est donc majeur.
Nous avons la conviction que pour mieux protéger le patrimoine il faut simplifier, clarifier, apporter plus de cohérence, tant sur le fond que sur la forme.
En ce sens, l’objectif est clairement de mieux identifier les enjeux patrimoniaux via les documents de gestion, les noms et les types d’espaces protégés afin de permettre une meilleure lisibilité pour les porteurs de projets et pour les habitants.
Certains sujets abordés en commission ont fait l’objet d’un assez large consensus, avec des avancées notables, je pense notamment à la création de commissions locales ou à la Commission nationale, qui voit ses pouvoirs élargis.
À travers nos amendements, nous allons renforcer et préciser ces dispositions qui vont dans le bon sens, de manière constructive.
Quelques points de divergence sont apparus.
Tel est le cas de la question des abords : le périmètre dit « intelligent » délimité au cas par cas doit être réaffirmé. La nouvelle rédaction laisse les maires en première ligne sur cette question. Nous pensons, au contraire, que l’ABF doit rester maître d’œuvre en matière de tracé des abords.
Autre point de désaccord, la dénomination « cité historique », sur lequel je ne reviens pas.
S’agissant des domaines nationaux, nous n’approuvons pas le texte de la commission, qui limite drastiquement la constructibilité. Parce qu’elle tend à « figer » ces domaines, cette rédaction nous paraît inopportune.
Je tiens vraiment à saluer, après David Assouline et d’autres, l’évolution du Gouvernement sur le PLU patrimonial, qui était vraiment une grande préoccupation. Nous nous félicitons que vous en ayez tenu compte, madame la ministre.
Des questions importantes ont également été soulevées par cet article. Nous y reviendrons le moment venu. Je pense à la question de l’intercommunalité, qui ne doit pas affaiblir la volonté de protection patrimoniale de tel ou tel maire.
Dans tous les cas, nous souhaitons que l’État, par ses instances nationales et régionales, accompagne au mieux les maires et apporte une garantie nationale avec une assistance concrète sur les territoires. Ce point a été longuement abordé pendant nos travaux et nos auditions. Nous y avons été très sensibles.
Mme la présidente. Madame la ministre, compte tenu des contraintes de temps que vous savez, il serait préférable de ne pas entamer la discussion de votre amendement ce soir et de lever la séance. (Mme la ministre fait un signe d’assentiment.)
Mes chers collègues, nous avons examiné 110 amendements au cours de la journée ; il en reste 198.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
5
Communication du Conseil constitutionnel
Mme la présidente. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le vendredi 12 février 2016, qu’en application de l’article 61–1 de la Constitution le Conseil d’État a adressé au Conseil constitutionnel deux décisions de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant :
- sur l’article LO. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie (Imposition sur le revenu des personnes mariées n’ayant pas toutes deux leur domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie) (2016–539 QPC) ;
- sur l’article L. 145-3 du code de l’urbanisme (Principes d’aménagement et de protection en zone de montagne) (2016-540 QPC).
Le texte de ces décisions de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de cette communication.
6
Ordre du jour
Mme la présidente. Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement a demandé l’inscription à l’ordre du jour du mardi 16 février 2016 de la suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine.
Acte est donné de cette demande.
En conséquence, je vais vous donner lecture de l’ordre du jour du mardi 16 février 2016.
Mardi 16 février 2016 :
À quatorze heures trente :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (n° 15, 2015-2016) ;
Rapport de M. Jean-Pierre Leleux et Mme Françoise Férat, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 340, tomes I et II, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 341, 2015-2016).
À seize heures quarante-cinq : questions d’actualité au Gouvernement.
À dix-sept heures quarante-cinq, le soir et la nuit :
Nouvelle lecture du projet de loi relatif au droit des étrangers en France (n° 339, 2015-2016) ;
Rapport de M. François-Noël Buffet, fait au nom de la commission des lois (n° 392, 2015-2016) ;
Résultat des travaux de la commission (n° 393, 2015-2016).
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (n° 15, 2015-2016) ;
Rapport de M. Jean-Pierre Leleux et Mme Françoise Férat, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 340, tomes I et II, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 341, 2015-2016).
La conférence des présidents pourra se réunir le mardi 16 février, en fin de matinée, pour examiner l’ordre du jour de la fin de la semaine gouvernementale du 15 février 2016 et fixer la date du scrutin solennel sur le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine.
Madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, mes chers collègues, je vais lever la séance.
Je vous souhaite à toutes et à tous une bonne soirée. Madame la ministre, nous savons où vous allez vous rendre. Donc, bon baptême du feu ! (Sourires.)
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quarante.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD