Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au débat interactif et spontané, dont la durée a été fixée à une heure par la conférence des présidents.
Je vous rappelle que chaque sénateur peut intervenir pendant deux minutes au maximum. La commission des affaires européennes ou le Gouvernement, s’ils sont sollicités, pourront répondre.
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. « Chaque fois qu’un jeune n’arrive pas à trouver un emploi, des rêves sont brisés ». Monsieur le secrétaire d’État, ces mots prononcés par Jean-Claude Juncker illustrent parfaitement la situation des 4,1 millions de jeunes Européens qui aujourd’hui n’ont pas d’emploi.
Comment ne pas être révolté devant cette triste réalité qui veut que le taux de chômage des jeunes soit deux fois plus élevé que celui des adultes, alors même que 2 millions d’emplois sont vacants en Europe ? Derrière ce paradoxe, apparaît en filigrane l’inadéquation des compétences et des formations aux besoins réels du marché du travail.
Dans sa stratégie pour l’emploi des jeunes, l’Union européenne entend répondre à cette situation, notamment en encourageant l’apprentissage et la mobilité des apprentis.
Le rapport d’évaluation de cette stratégie publié au mois de juin dernier est sans appel : les pays qui ont misé sur l’apprentissage sont ceux qui affichent les taux de chômage des jeunes les plus faibles.
Votre gouvernement a malheureusement tardé à en prendre conscience : en 2012, l’une de ses premières décisions a été de baisser les crédits alloués à l’embauche des apprentis, cassant ainsi la dynamique que nous avions impulsée au cours du mandat précédent. Ce choix est incompréhensible quand on sait que 70 % des apprentis trouvent directement un emploi à la fin de leur formation !
L’Europe doit également miser sur le développement de la mobilité des apprentis pour leur offrir de nouvelles opportunités et leur permettre d’apprendre une ou plusieurs langues étrangères, dont la maîtrise est indispensable dans les secteurs pourvoyeurs d’emplois tels que l’hôtellerie, la restauration ou l’industrie du luxe.
Ma question est la suivante : la France est-elle prête aujourd’hui à aller plus loin en soutenant l’instauration d’un cadre unique de l’apprentissage en Europe, avec notamment la création d’un statut européen de l’apprenti ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, l’apprentissage est effectivement une thématique importante. Il rencontre d’ailleurs un fort succès dans tous les pays européens qui l’ont développé depuis longtemps. Contrairement à ce que vous affirmez, le Gouvernement a soutenu son développement, mais je n’entrerai pas dans une polémique portant sur la politique nationale.
Quoi qu’il en soit, je suis d’accord avec vous : il convient de développer l’apprentissage dans un cadre européen. J’ai soutenu, avec quinze entreprises françaises et allemandes, un projet pilote visant à favoriser des échanges d’apprentis entre nos deux pays. Une telle démarche soulève des problèmes en raison de la différence des cycles d’apprentissage et des alternances entre l’entreprise et le centre de formation. En tout état de cause, nous avons voulu montrer qu’il était possible de surmonter ces différences.
Le Parlement européen a également fait adopter un budget pour étendre cette expérimentation à plusieurs pays et régions. Nous travaillons avec la Commission européenne pour mettre sur pied un véritable programme Erasmus des apprentis. À l’avenir, les jeunes en apprentissage – ils doivent être plus nombreux dans chacun de nos pays – pourront, pendant leur formation, bénéficier d’une expérience européenne. Elle leur apportera une qualification très utile sur le marché du travail et constituera une expérience de citoyenneté européenne. Nous nous rejoignons donc sur cette priorité.
Pour ce qui est de la garantie jeune, ce projet a été soutenu à l’échelon européen par le Président de la République. Nous avons obtenu qu’elle soit étendue et dotée, dans la revue du cadre financier pluriannuel, de 1,2 milliard d’euros supplémentaires.
Mme la présidente. Nous en avons terminé avec le débat préalable à la réunion du Conseil européen des 15 et 16 décembre 2016.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.)
PRÉSIDENCE DE M. Claude Bérit-Débat
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte commun sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, actuellement en cours d’examen.
Cette liste a été publiée conformément à l’article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n’est faite dans le délai d’une heure.
11
Modernisation, développement et protection des territoires de montagne
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Organisation des travaux
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il nous reste 201 amendements à examiner sur le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
Comme nous l’avons décidé hier soir, je vous propose d’ouvrir la nuit, afin d’avancer dans de bonnes conditions dans l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’observation ?
M. Michel Bouvard. M. Raoul a-t-il bien entendu ?…(Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Je veux seulement m’assurer que le site internet du Sénat sera bien mis à jour pour intégrer cette information.
M. le président. Bien sûr, mon cher collègue !
Il n’y a pas d’autre observation ?...
Il en est ainsi décidé.
Nous reprenons l’examen du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
Au sein du chapitre II du titre II, nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 11 bis.
Titre II (suite)
SOUTENIR L’EMPLOI ET LE DYNAMISME ÉCONOMIQUE EN MONTAGNE
Chapitre II (suite)
Encourager la pluriactivité et faciliter le travail saisonnier
Articles additionnels après l’article 11 bis (suite)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 246 rectifié est présenté par MM. Savin et Carle.
L'amendement n° 321 rectifié bis est présenté par MM. Delcros, L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas et Cigolotti, Mme Férat, M. Gabouty, Mme N. Goulet, M. Guerriau, Mme Joissains et M. Médevielle.
L'amendement n° 405 est présenté par M. Bouvard.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 11 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 113-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 113-… ainsi rédigé :
« Art. L. 113-… – Dans le cadre de leurs missions en lien avec l’activité agricole de leurs membres, et notamment pour la gestion des troupeaux dont ils ont la charge, les groupements pastoraux sont habilités à recourir aux contrats à durée déterminée dans les mêmes conditions que celles accordées aux agriculteurs, nonobstant la présence éventuelle de collectivités territoriales parmi les membres de ces groupements. »
La parole est à M. Michel Savin, pour présenter l’amendement n° 246 rectifié.
M. Michel Savin. Avec cet amendement, nous reprenons le débat que nous avions commencé cet après-midi.
Certains groupements pastoraux se sont vu interdire l’embauche saisonnière de bergers, alors que la maintenance estivale de troupeaux constitue l’une de leurs activités principales, sinon le cœur même de leur travail. L’activité pastorale est cruciale pour les équilibres des territoires de montagne ; nous ne pouvons la négliger. Cet amendement a donc pour objet de redonner toute sa légitimité à l’embauche saisonnière et d'encourager la pluriactivité.
Lors de nos échanges sur ce thème cet après-midi, M. le ministre a indiqué que les conventions régissant les embauches à durée déterminée dans le domaine agricole pouvaient s’appliquer pour les groupements pastoraux.
Or une jurisprudence récente montre que la question n’est pas définitivement tranchée. Un berger saisonnier a en effet obtenu la requalification de ses CDD en CDI par la cour d’appel de Grenoble dans un arrêt du 23 juin dernier.
Votre réponse nous interpelle donc, monsieur le ministre. S’il est possible de recourir aux CDD dans les mêmes conditions que celles qui sont accordées aux agriculteurs, pourquoi les CDD de ce saisonnier ont-ils été ainsi requalifiés ?
Nous devons recourir à la loi pour dépasser les blocages induits par les procédures en cours sur ces questions.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l'amendement n° 321 rectifié bis.
M. Bernard Delcros. J’étais prêt à retirer cet amendement, s’il était avéré que les groupements pastoraux, y compris lorsque des collectivités territoriales en sont membres, pouvaient accéder exactement aux mêmes conditions de recrutement que les agriculteurs, mais je comprends que la question reste posée.
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour présenter l'amendement n° 405.
M. Michel Bouvard. Le département de la Savoie est celui qui compte le plus grand nombre de transhumants accueillis chaque année, pour l’estive, en provenance du midi de la France.
En raison de la présence du loup, l’embauche de bergers pour la saison est aujourd'hui souvent nécessaire pour surveiller les troupeaux, y compris sur de vastes espaces en montagne.
La jurisprudence de la cour d’appel de Grenoble soulève donc un vrai problème. Il n’y a que la loi qui peut nous protéger du risque de requalification des contrats.
On ne peut pas ajouter à l’incertitude qui pèse sur la sécurité physique des troupeaux en période d’estive une insécurité juridique à l’égard du contrat des personnels qui doivent être embauchés pour surveiller ceux-ci.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Patricia Morhet-Richaud, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Ces trois amendements sont quasiment identiques à ceux qui ont été défendus cet après-midi.
La jurisprudence évoquée ne fait rien qu’appliquer le droit commun. Elle pourrait très bien concerner une entreprise, par exemple.
Inscrire dans la loi la disposition contenue dans ces amendements n’y changera rien, car elle est en réalité satisfaite par le droit en vigueur.
Je demande donc aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer. À défaut, j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Vous utilisez la décision de la cour d’appel de Grenoble pour défendre vos amendements, messieurs les sénateurs. Ce n’est pourtant pas à vous que je vais apprendre que la justice est indépendante.
D’autres cours d’appel peuvent très bien prendre d’autres décisions. La situation sera stabilisée le jour où la Cour de cassation aura tranché et pris une décision qui s’imposera.
En l’état actuel de la loi, qui s’applique, ces amendements sont satisfaits. J’émets par conséquent le même avis que la commission, donc : je demande le retrait de ces amendements, à défaut j’y serai défavorable.
M. le président. Monsieur Savin, l'amendement n° 246 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Savin. Oui, monsieur le président.
La situation est telle que les bergers ne pourront pas, pour la prochaine saison, être embauchés en CDD : leurs employeurs courront le risque de voir leurs contrats requalifiés en CDI ! C’est le sens de la jurisprudence de la cour d’appel de Grenoble qui peut se reproduire dans d’autres départements.
L’Isère cumule les problèmes, avec notamment la présence du loup sur son territoire. Nous y reviendrons. En tout état de cause, si les éleveurs ne peuvent avoir recours à employés en CDD sur la période estivale pour protéger leurs troupeaux, nous nous dirigeons vers une situation très conflictuelle.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 246 rectifié, 321 rectifié bis et 405.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par MM. L. Hervé, Delcros, Lasserre et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l'article 11 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le premier alinéa de l’article 261 B du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les mises à disposition de salariés effectuées par les groupements d’employeurs constitués selon les articles L. 1253-1, L. 1253-2, L. 1253-3 et L. 1253-19 du code du travail sont fiscalement neutres : la taxe sur la valeur ajoutée est applicable aux prestations effectuées pour des utilisateurs assujettis et non applicable pour des utilisateurs non-assujettis. »
II – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Loïc Hervé.
M. Loïc Hervé. Pour faciliter les recrutements et le fonctionnement des groupements d’employeurs, il est important de clarifier la fiscalité liée aux salaires et d’indiquer que les mises à disposition de salariés effectuées par les groupements d’employeurs constitués selon les articles L. 1253-1, L. 1253-2, L. 1253-3 et L. 1253-19 du code du travail, sont fiscalement neutres, la TVA étant applicable aux prestations effectuées pour des utilisateurs assujettis et non applicable pour des utilisateurs non assujettis.
Tel est l'objet du présent amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Patricia Morhet-Richaud, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à préciser dans quels cas de figure une entreprise sera assujettie ou non à la TVA lorsqu’elle recourt à des salariés mis à disposition par un groupement d’employeurs.
Les représentants des groupements d’employeurs que j’ai rencontrés m’ont effectivement signalé les problèmes que posaient les règles d’assujettissement à la TVA et les inconvénients qui en résultent quand ils sont mis en concurrence avec les agences d’intérim.
Mais je ne peux pas être favorable à cet amendement à ce stade, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, son lien avec le texte, même indirectement, est inexistant, ce qui contrevient à l’article 45 de la Constitution. Le présent projet de loi n’a pas vocation à modifier le cadre juridique des groupements d’employeurs qui vient d’être adapté par la loi Travail du 8 août dernier.
Ensuite, le débat sur l’application de la TVA aux salariés mis à disposition d’un groupement d’employeurs a plutôt vocation à être traité dans le cadre d’un projet de loi de finances.
Par conséquent, la commission des affaires sociales demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer. À défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Même avis, pour les raisons invoquées par Mme la rapporteur, mais aussi parce que la réglementation actuelle permet déjà, sous certaines conditions, d’exonérer les mises à disposition de personnes effectuées par les groupements d’employeurs mixtes, lorsque les membres assujettis sont imposés à la TVA sur moins de 20 % de leur chiffre d’affaires, et si les opérations de même nature réalisées au profit de tiers au regroupement n’excèdent pas 50 % du chiffre d’affaires de ce dernier. Aller au-delà serait exposer la France à un risque de contentieux européen.
M. le président. Monsieur Hervé, l'amendement n° 25 est-il maintenu ?
M. Loïc Hervé. Oui, monsieur le président.
D’abord, parce que l’article 45 de la Constitution ne m’a pas été objecté jusqu’à maintenant.
Ensuite, parce que les représentants des groupements d’employeurs que nous avons reçus pour préparer l’examen de ce projet de loi nous ont fait remonter les problèmes qu’ils rencontraient.
Or j’ai du mal à concevoir – c’est la réponse qui a été opposée également aux derniers amendements dont nous avons discuté – que tous ces problèmes sont en réalité en résolus par le droit en vigueur.
M. Michel Savin. C’est faux !
M. Loïc Hervé. Il y a une réelle dichotomie entre le vécu sur le terrain et les arguments qui sont avancés pour motiver les demandes de retrait.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
Article 12
L’article 61 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne est ainsi rédigé :
« Art. 61. – I. – Pour une durée de trois ans à compter de la publication de la loi n° … du … de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, est mise en place une expérimentation visant à adapter le dispositif de l’activité partielle aux régies dotées de la seule autonomie financière qui gèrent un service public à caractère industriel et commercial de remontées mécaniques ou de pistes de ski, qui remplissent les conditions mentionnées à l’article L. 2221-1 et au 2° de l’article L. 2221-4 du code général des collectivités territoriales et dont les collectivités territoriales ou établissements publics de rattachement se sont portés volontaires pour cette expérimentation. Dans la mesure du possible, cette expérimentation s’effectue sur un échantillon représentatif des différents territoires de montagne.
« Cette expérimentation inclut la mise en place par les collectivités territoriales et les régies concernées, avec l’appui des services de l’État compétents, d’une part, d’une analyse des possibilités de développement économique des petites stations et, d’autre part, d’une démarche active et territorialisée de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, afin de sécuriser les parcours professionnels des salariés saisonniers.
« II. – Au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement réalise une évaluation de l’impact de l’expérimentation sur la situation économique et financière des régies concernées et sur la situation de l’emploi dans les territoires participants, ainsi que de l’impact des actions complémentaires mises en place par les régies afin de faire face aux difficultés entraînant une baisse de leur activité.
« III. – Dans le cadre de cette expérimentation, les salariés employés par les régies mentionnées au I du présent article peuvent être placés en activité partielle dès lors qu’ils sont soumis aux dispositions du code du travail et que leur employeur a adhéré au régime d’assurance chômage en application du 1° de l’article L. 5424-2 du même code.
« IV. – Le dispositif expérimental est financé par l’État et par l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce, dans des conditions fixées par décret. »
M. le président. Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Article 13
(Non modifié)
Après le deuxième alinéa de l’article 27 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les massifs définis à l’article 5 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne et dans les communes ayant reçu la dénomination “commune touristique” en application des articles L. 133-11, L. 133-12 et L. 151-3 du code du tourisme, l’offre de maisons de services au public répond à la situation des travailleurs saisonniers et pluriactifs, et peut notamment intégrer des maisons des saisonniers. »
M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l'article.
M. Michel Le Scouarnec. L'isolement des saisonniers constitue le point faible de ceux-ci. C'est l’un des nœuds qu'il convient de desserrer pour faire progresser les droits et la protection de ces salariés, qui, de même que leur famille, ont besoin de vivre douze mois sur douze. Face à ce constat, il est de notre responsabilité de faire de la saisonnalité un levier et non plus un problème.
L’article 13 prévoit l'intégration de maisons des saisonniers au sein des maisons de services publics. Dans nos territoires, des actions innovantes sont déjà menées. Comme à la montagne, en Bretagne, dans le pays d'Auray, la question de l'emploi saisonnier est prépondérante. La maison de l'emploi a su fédérer autour de ce sujet tous les acteurs. Son espace saisonnier est devenu un lieu de ressources identifié par tous et pour tous les publics. Elle propose une sécurisation des parcours professionnels et un accompagnement des salariés comme des entreprises en facilitant les partenariats et les actions de sensibilisation.
Mais ces guichets uniques doivent avoir les moyens de leurs ambitions, en étant ouverts toute l’année. Certaines maisons des saisonniers disparaissent par manque de volonté ou de soutien financier.
Enfin, surtout, il faut des lieux d'information des salariés ; il faut aussi œuvrer au maintien, au développement, à la création de maisons des saisonnalités, en s'attachant à leur financement et à leur labellisation, avec l'Association des lieux d'accueil des travailleurs saisonniers, l'ALATRAS.
Les maisons des saisonnalités, au nombre d'une cinquantaine, sont aujourd'hui unanimement reconnues comme des outils indispensables au développement économique et social des territoires.
Il faut modifier la loi pour permettre la conclusion d'accords interprofessionnels territoriaux tenant compte de la réalité du territoire.
M. le président. Je mets aux voix l'article 13.
(L'article 13 est adopté.)
Article additionnel après l’article 13
M. le président. L'amendement n° 77, présenté par Mmes David, Cukierman et Didier, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au chapitre VIII du titre II du livre II de la quatrième partie du code du travail, il est inséré un article L. 4228-… ainsi rédigé :
« Art. L. 4228-… – Pour l’hébergement de ses salariés, notamment saisonniers, l’employeur respecte les règles fixées par le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l’application de l’article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains. La surface et le volume habitables, au sens de l’article R. 111-2 du code de la construction et de l’habitation, des locaux affectés à l’hébergement des travailleurs ne peuvent être inférieurs à 9 mètres carrés et 20 mètres cubes par personne. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous avons pu le constater au Sénat comme à l’Assemblée nationale, il existe une certaine unanimité pour reconnaître qu’il est nécessaire de prendre des mesures ambitieuses pour améliorer le logement des travailleurs saisonniers.
Un effort particulier a été fait dans ce projet de loi, puisque c’est l’objet de son article 14. Ainsi, entre autres choses, les communes touristiques y sont invitées à prendre en main cette question, ainsi que les bailleurs sociaux, qui devront prendre en charge une partie de la lutte contre le mal-logement des saisonniers.
La situation du logement des saisonniers est loin d’être satisfaisante, pour ne pas dire dramatique, lorsque la précarité du logement se double de risques pour leur sécurité. Chaque année, des saisonniers meurent en montagne, parce qu’ils ne sont pas logés ou qu’ils le sont mal. Ces difficultés sont connues et à l’origine de drames. Je ne reviendrai pas sur celui de La Clusaz ou sur celui, récent, de Chamonix.
Des solutions doivent absolument être trouvées. Outre la mobilisation du parc de logements sociaux et l’investissement des collectivités territoriales pour fournir des solutions d’hébergement, il nous paraît du devoir des employeurs d’héberger celles et ceux sans lesquels l’activité économique saisonnière ne serait pas possible. Cet hébergement doit se faire dans de bonnes conditions, pour le moins celles qui sont définies dans le décret du 30 janvier 2002 relatif au logement décent.
Ainsi, neuf mètres carrés et vingt mètres cubes au minimum doivent être alloués au salarié, et non pas six mètres carrés et quinze mètres cubes, comme le code du travail le prévoit actuellement, en contradiction d’ailleurs avec la loi SRU et son décret d’application.
Nous invitons donc le Gouvernement à prendre les mesures réglementaires qui s’imposent pour modifier ces dispositions du code du travail. Il s’agit d’éviter de nouveaux drames et de permettre aux saisonniers de vivre dans des conditions dignes. Il faut des actes concrets !
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
Mme Patricia Morhet-Richaud, rapporteur pour avis. Cet amendement traite d’un sujet intéressant, celui du logement des travailleurs saisonniers, qui est également abordé à l’article 14 du présent projet de loi.
Dans sa rédaction actuelle, il n’est pas acceptable, car il empiète de manière manifeste sur le domaine réglementaire en faisant référence à un décret du 30 janvier 2002.
Sur le fond, je pense que le Gouvernement pourra éclairer notre assemblée sur ce sujet, car les règles prévues dans le code du travail sont effectivement moins protectrices pour les travailleurs que celles qui le sont pour les habitations classiques.
L’article R. 4228-27 du code du travail interdit les logements de travailleurs inférieurs à six mètres carrés ou à quinze mètres cubes par personne et ne considère pas comme surface habitable les pièces dans lesquelles le plafond se situe à moins de 1,9 mètre du sol, alors que l’article 4 du décret précité fixe comme règle qu’un logement décent « dispose au moins d'une pièce principale ayant soit une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 mètres, soit un volume habitable au moins égal à 20 mètres cubes. »
Je pense qu’il faut augmenter les contrôles de l’inspection du travail avant de modifier les normes, qui relèvent d’ailleurs uniquement du pouvoir réglementaire, donc du Gouvernement.
C’est pourquoi j’avais proposé initialement à la commission des affaires sociales d’émettre un avis défavorable sur cet amendement. Mais je n’ai pas été suivie, et la commission a donné un avis favorable.