M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, madame la vice-présidente de la commission, mes chers collègues, l’ordonnance qui nous est soumise aujourd’hui pour ratification me semble intervenir trop tard ou trop tôt.
Trop tard, parce que depuis 2011, date de mon arrivée au Sénat, je milite avec d’autres collègues et élus des Hauts-de-Seine pour que la gestion du quartier d’affaires de La Défense puisse s’opérer dans un réel partenariat entre l’État et les collectivités locales, tout en y associant les habitants qui y vivent, les salariés qui y travaillent et les entreprises qui y créent des activités.
Nous pensons depuis longtemps que la cogestion de ce quartier entre deux établissements publics – d’une part, l’établissement public d’aménagement de La Défense Seine Arche, l’EPADESA, qui, créé en 2010, a repris le flambeau du fameux EPAD qui avait été créé en 1958, et, d’autre part, Défense-Action, ou Defacto, créé en 2009 – n’est en effet pas viable, chacun d’entre nous le reconnaît.
Nous pensions qu’un établissement unique permettrait une meilleure gestion à moyen et long terme, et qu’une réelle ouverture de fonctionnement éviterait l’entre soi et certaines dérives dans la gouvernance.
Nous continuons de penser que la création de cet établissement devrait se faire en toute transparence lors d’une conférence qui réunirait l’ensemble des acteurs impliqués dans ce quartier, c’est-à-dire les maires, les élus municipaux des villes de Courbevoie, de La Garenne-Colombes, de Paris, de Nanterre, de Puteaux, les élus régionaux et départementaux, mais aussi les parlementaires et les représentants de l’État.
M. Roger Karoutchi. Pourquoi Paris ?
Mme Isabelle Debré. Paris ne finance rien !
M. André Gattolin. Certes, nous avons partiellement été entendus. En effet, en novembre 2016, dans le projet de loi relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain, nous avons découvert non sans étonnement l’article 38, qui portait sur la création, par voie d’ordonnance, d’un établissement unique pour gérer ce quartier d’affaires.
Seulement, cette proposition de création a été faite en catimini, en se basant sur un rapport commandé par le Premier ministre de l’époque, M. Manuel Valls, à quelques hauts fonctionnaires.
Mme Isabelle Debré. En catimini ? Le processus a duré des mois !
M. André Gattolin. Ce document, je n’ai, en tant que parlementaire du département, jamais pu en avoir connaissance ! Encore aujourd’hui, monsieur le ministre, après l’avoir réclamé à votre prédécesseur, Mme Cosse, je ne l’ai toujours pas. Je me souviens d’une séance où elle m’avait dit qu’il suffisait de le demander, ce que j’ai fait, mais sans succès.
M. Roger Karoutchi. Mme Cosse n’a pas été gentille avec vous !
M. André Gattolin. D’où l’importance d’entretenir de bonnes relations avec les membres du Gouvernement !
Ce texte arrive peut-être un peu tardivement, parce que pendant cinq ans les problèmes relatifs à la mise à niveau des équipements publics de ce quartier, l’entretien de la dalle, des tunnels qui commencent à être atteints par l’usure propre à ce type d’installation, n’ont pas été traités et que les dégradations n’ont pas cessé de progresser.
Par temps de fortes pluies – on l’a vu récemment –, certains axes routiers qui passent sous la dalle sont fréquemment fermés en raison d’inondations.
Cette ordonnance arrive donc un peu tard, et en même temps, d’une certaine manière elle intervient aussi trop tôt…
Trop tôt, mes chers collègues, parce qu’entre 2011 et aujourd’hui, est née, en 2016, la métropole du Grand Paris. Il faudra encore du temps pour que cette dernière prenne toute son ampleur.
Du temps, et aussi une volonté politique claire. Il faut l’avouer, la clarté n’a pas présidé à sa création, la loi NOTRe de 2015 modifiant profondément ses règles de fonctionnement établies un an plus tôt par la loi MAPTAM.
Or cette ligne directrice existe désormais. Elle a été indiquée par le Président de la République,…
M. Roger Karoutchi. Ah !
M. André Gattolin. … dans le discours qu’il a prononcé lundi dernier, lors de la Conférence nationale des territoires qui s’est tenue au Sénat.
Permettez-moi de le citer : « Si nous voulons que le Grand Paris réussisse à l’échelle de ce qu’est la compétition internationale, si nous voulons produire la richesse pour ensuite pouvoir la répartir harmonieusement sur le territoire, nous avons besoin de simplifier drastiquement les structures. »
Et il complète ses propos en indiquant qu’il va réunir cet automne une conférence territoriale du Grand Paris, « qui devra se refonder autour d’un projet ambitieux de développement de la première métropole française, au sein de la région capitale, et aboutir à une organisation institutionnelle stabilisée et efficace ».
À l’automne, le fonctionnement institutionnel de la métropole du Grand Paris va donc être discuté, renforcé, mais d’avance, on a le sentiment qu’on lui soustrait, via cette ordonnance, une possibilité de peser économiquement, car on lui retire la gestion du quartier d’affaires de La Défense pour la confier au département des Hauts-de-Seine. On peut s’interroger sur la stratégie globale qui préside à ces décisions.
Ce texte arrive donc peut-être un peu trop tôt.
Trop tôt pour être en cohérence avec les projets présidentiels et pour tenir compte des perspectives de développement de ce quartier, en raison des potentielles conséquences du Brexit, qui ne peuvent se concevoir qu’au niveau métropolitain, voire régional.
Par-delà cette question de timing, deux autres sujets quelque peu épineux méritent à mon sens d’être soulevés.
Tout d’abord, est-il raisonnable que la majeure partie du budget d’investissement du département des Hauts-de-Seine puisse désormais être consacrée presque exclusivement au seul quartier d’affaires de ce département ?
Sur quelles aides pourront compter les autres secteurs d’activité des Hauts-de-Seine, notamment le port de Gennevilliers, le centre économique d’Issy-Boulogne ou encore celui d’Antonypole ?
Restera-t-il une possibilité pour aider les villes qui voient partir vers d’autres départements des entreprises implantées sur leur territoire, comme c’est le cas de La Garenne-Colombes, qui doit gérer le départ, en 2018, des 2 000 salariés du groupe PSA vers Poissy et Vélizy ?
Ensuite, cette ordonnance recèle deux questions juridiques constituant en réalité deux anomalies démocratiques.
Le 30 juin dernier, le conseil départemental des Hauts-de-Seine a désigné par anticipation ses neuf représentants au conseil d’administration du futur établissement sans tenir compte des délais d’application fixés par l’ordonnance et par son décret d’application, qui prescrivent, précisément, que cette démarche doit être faite après le 1er janvier 2018, et non six mois avant.
Monsieur le ministre, que vaut cette désignation préalable ? D’autant plus que, parmi les neuf personnes désignées, aucune ne représente l’opposition au sein du conseil départemental.
Je ne voudrais pas être polémique, mais je dirai simplement qu’il nous appartient à nous, législateurs, de corriger ce comportement que je juge peu respectueux des usages et des bonnes pratiques démocratiques, en rappelant l’importance du pluralisme des opinions politiques dans la représentation des élus au sein de ces instances. (Mme Isabelle Debré et M. Roger Karoutchi s’exclament avec amusement.)
En conclusion, vous comprendrez, mes chers collègues, que si je vois avec bienveillance l’existence de ce texte, je reste en l’état quelque peu sceptique quant à certaines de ses modalités d’application. (M. Michel Delebarre applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, monsieur le ministre – je vous adresse mon amical salut –, mes chers collègues, le projet de loi qui nous occupe aujourd’hui, qui vise à la création, par fusion de l’EPADESA et de Defacto, d’un établissement public unique nommé Paris-La Défense, revêt des enjeux politiques et financiers colossaux. Il serait hypocrite de le cacher.
Les intentions affichées par certains d’en faire, bien au-delà du quartier d’affaires historique, le réceptacle des retombées possibles du Brexit le prouve.
Je ne reviendrai pas sur l’historique des séparations et fusions successives qui jalonnent ce dossier et des querelles qu’il a occasionnées.
Mon groupe, l’année dernière, s’était prononcé favorablement sur l’article 55 de la loi relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain approuvant la création d’un établissement public local unique.
Nous avions d’ailleurs défendu des amendements visant à clarifier le périmètre et à réagir à l’introduction en dernière minute, par amendement du gouvernement, du conseil départemental dans la liste des acteurs associés au sein de cet établissement public local.
Aujourd’hui, nous franchissons une étape de plus avec la ratification de l’ordonnance portant création de cet établissement public.
Je voudrais dire un mot d’abord sur les personnels de ces deux établissements. L’ordonnance, ainsi que nos précédents débats, est quasi muette à leur sujet, si ce n’est pour dire qu’ils seront transférés au nouvel EPL au même titre que les « biens, droits et obligations » !
J’attire votre attention, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur leurs vives inquiétudes, du fait de multiples interrogations laissées sans aucune réponse.
En l’état, le texte issu des travaux de la commission des lois ne nous satisfait pas. Notre vote final dépendra donc du sort qui sera réservé à nos amendements, notamment nos amendements nos 1 et 2 rectifié bis.
Le premier point de divergence avec la commission et M. le rapporteur porte sur le périmètre. Vous proposez de supprimer toute notion de « périmètre », allant ainsi à l’encontre des engagements du Premier ministre de l’époque, de la ministre du logement devant les deux assemblées et de la rédaction même de l’article 55, autorisant le Gouvernement à légiférer par ordonnance. Cela questionne à nouveau sur le recours à l’ordonnance pour légiférer sur cette question.
Pour justifier la réécriture de l’article 2 de l’ordonnance, vous nous expliquez, monsieur le rapporteur, que la définition de ces périmètres fera l’objet de « décrets en Conseil d’État pris après avis des communes concernées et au plus tard dans les six mois suivant la création de cet établissement public local, soit le 1er juillet 2018 ».
Soyons précis : les décrets pourront intervenir après la création de l’EPL. On créerait ainsi l’EPL sans avoir au préalable défini son périmètre, soit son ADN. Étrange méthode !
Ce n’était pas l’intention du législateur au moment de voter l’article 55 du projet de loi dont vous étiez déjà le rapporteur, monsieur Darnaud, et c’est bien pour cela qu’un périmètre avait été déjà délimité.
Que proposons-nous par l’amendement n° 1 ? Non pas de revenir à la rédaction initiale de l’article 55 – c’est une manière caricaturale de le présenter –, mais d’apporter une nuance au regard des réalités locales.
Certes, nous réintroduisons bien la référence à l’opération d’intérêt national, ou OIN, visée au 2° de l’article R. 102-3 du code de l’urbanisme. Cependant, nous prévoyons qu’au-delà de ce périmètre historique du quartier d’affaires – que nous nommons « la dalle » entre nous –, toutes les opérations se fassent via une convention conclue entre le territoire concerné et l’EPL.
C’est d’ailleurs parfaitement conforme à la pratique qui a cours entre l’EPADESA et les communes, comme nous l’ont rappelé les représentants au comité d’entreprise des salariés de l’EPADESA, que nous avons, nous, auditionnés.
Notre proposition de rédaction ne sort donc pas de nulle part. Elle est cohérente avec ce qui se pratique déjà sur le terrain. Il n’est donc pas vrai de dire que nous proposons juste un retour à la rédaction initiale.
Nous formulons d’autres propositions d’amendements ayant notamment pour objet la composition du conseil d’administration. Nos craintes, exprimées en décembre dernier, quant à l’introduction du conseil départemental dans la liste des acteurs associés, se confirment à la lecture de la composition des membres désignés par ce même conseil.
Nous proposons donc d’introduire un peu de « pluralisme », et donc d’équilibre, dans la composition du conseil d’administration.
Ce sera l’objet de l’amendement n° 2 et de son sous-amendement.
J’ai parlé « d’équilibre ». Je crois que c’est vers quoi nous devons tendre, s’agissant de ce territoire qui accueille certes un quartier d’affaires avec ses salariés, mais aussi des habitants, des services publics, des activités.
Ne refaisons pas l’erreur de ne prendre en compte que le seul prisme économique, financier devrais-je dire, car les enjeux en termes d’équipements, de logements, notamment sociaux, de services publics et de défi environnemental, et au final de « vivre ensemble », sont considérables.
Ce projet, au sein d’un département certes riche, mais inégalitaire et en proie à de fortes disparités, peut permettre de rééquilibrer la balance en faveur des populations et des territoires.
Je souhaite donc, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, que nous cheminions ensemble dans cette voie. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Robert Hue.
M. Robert Hue. Monsieur le président, monsieur le ministre – je suis très heureux de vous voir au banc du Gouvernement –, mes chers collègues, lors de son allocution devant la Conférence nationale des territoires, le Président de la République a décidé que la simplification des structures du Grand Paris se fera dès cet automne après la tenue de la conférence territoriale du Grand Paris.
L’enjeu est crucial pour la France. Il s’agit de « produire la richesse qui pourra être ensuite répartie harmonieusement sur le territoire ».
À mon sens, la consolidation de l’attrait de la région capitale va de pair avec le projet de rénovation du développement économique du quartier d’affaires porté par l’ordonnance créant l’établissement public Paris La Défense.
En effet, Paris La Défense est un axe majeur du développement du Grand Paris. Il constituera l’un de ses principaux moteurs économiques, et l’un des symboles de son dynamisme international.
Face aux trop nombreuses difficultés qui ont nui à l’attractivité de La Défense depuis les années 2000, cette ordonnance doit permettre de trouver un financement durable et une gouvernance stabilisée pour les années à venir.
Il s’agit notamment de constituer une unité de pilotage en remédiant à la décision prise en 2007 de séparer les fonctions d’aménagement et de gestion confiées à deux établissements distincts, décision qui avait créé une confusion des responsabilités et gêné le développement du quartier d’affaires.
L’inéquitable répartition de la charge financière entre l’établissement public d’aménagement de La Défense Seine Arche et Defacto avait conduit à repousser les travaux depuis de trop nombreuses années, compromettant le fonctionnement quotidien du quartier. La mise aux normes de sécurité des tunnels et sous-sols, la répartition des réseaux d’assainissement, le désamiantage sont autant d’investissements indispensables que l’établissement public devra désormais mener de front sur une dizaine d’années, pour un montant minimum estimé à 360 millions d’euros.
La Cour des comptes a alerté pendant longtemps sur le manque de vision commune concernant l’avenir du quartier de La Défense. Des interrogations demeurent aujourd’hui à ce sujet. Il serait nécessaire de connaître au plus vite, d’une part, les modalités de la participation financière renforcée des collectivités, participation requise pour accompagner un programme d’investissement pluriannuel, et, d’autre part, les orientations stratégiques du nouvel établissement, qui devront être définies ultérieurement dans un document d’engagement à dix ans.
Il me semble que cette ordonnance peut donc permettre de faire face à un modèle de gestion et de développement vieillissant. La décentralisation de l’établissement, près de soixante ans après sa création, permet enfin de confier la responsabilité de son développement et de son entretien aux collectivités territoriales concernées, marquant ainsi une nouvelle étape de l’aménagement du Grand Paris.
Quant à l’État, il ne se dégage pas totalement. Il siégera au conseil d’administration de la nouvelle structure aux côtés des représentants des collectivités locales, avec un objectif de cohésion, d’efficacité et de réalisme.
Avec cette décentralisation, les communes gagnent en pouvoir sur le choix des projets puisque les droits de vote au sein du conseil d’admiration sont conditionnés par la participation financière des collectivités, encore que j’ai entendu la remarque de nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen indiquant qu’il fallait effectivement une réelle pluralité au sein de cette représentation même.
Nous pouvons regretter toutefois qu’à l’occasion de cette nouvelle répartition des rôles, cette tendance ne prévoie pas la consultation des populations, notamment sur les projets d’aménagement du quartier, pour lesquels elle devrait être systématique.
Dans le monde entier, les villes deviennent ou redeviennent incontournables dans l’architecture territoriale des appareils publics et de l’action publique. C’est le phénomène de métropolisation – décrit dans un ouvrage majeur de Patrick Le Galès, Le Retour des villes européennes –, que le système français s’est mis récemment à relayer.
Ainsi, le nouvel établissement public Paris La Défense qui verra le jour le 1er janvier 2018 devrait participer fortement à la réussite de la métropole du Grand Paris à l’échelle de la compétition internationale.
Grâce à sa gouvernance institutionnelle efficace et réactive et à son financement approprié, il doit permettre de s’adapter aux enjeux futurs et de faire rayonner les territoires environnants.
Toutefois, d’importantes réserves, soulevées à l’instant par d’autres orateurs, doivent encore être levées.
M. le président. La parole est à M. Michel Delebarre.
M. Michel Delebarre. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la vice-présidente de la commission, mes chers collègues, l’émergence du premier centre d’affaires européen, en l’espace de soixante ans, en lieu et place de pavillons vétustes voisins des bidonvilles et de petites usines de mécanique, ne s’est pas faite sans crise et sans rebond.
Aujourd’hui, le quartier d’affaires de La Défense, vieillissant, cherche un nouveau souffle.
C’est pour mieux penser l’avenir de La Défense, sa croissance comme le renouvellement de ses infrastructures, que le précédent gouvernement a souhaité réformer son schéma institutionnel.
Il a voulu le faire tout d’abord en créant un établissement public unique, alors que jusqu’à présent aménagement et gestion du patrimoine étaient pensés au sein de deux entités distinctes. La cohérence des actions menées ne pourra qu’en être renforcée.
Le précédent exécutif a également souhaité redonner la main aux principaux acteurs de ce territoire, les élus locaux. Il s’agit là d’une véritable révolution culturelle puisque, jusqu’à présent, la voix de l’État était prépondérante lorsqu’il fallait présider aux destinées du quartier d’affaires. Une prépondérance parfois toute relative, quand on sait combien les Hauts-de-Seine ont offert à la République d’illustres serviteurs de l’État. Le département des Hauts-de-Seine et sa majorité ont ainsi souvent pu trouver une oreille attentive auprès de l’État.
Désormais les élus locaux vont acquérir une véritable liberté de gestion. C’est une revendication ancienne de la gauche dans ce département, et je m’en félicite, mais ces droits nouveaux appellent naturellement de nouvelles responsabilités.
Durant plusieurs décennies, les collectivités situées sur le territoire de La Défense ont pu bénéficier de ressources très importantes sans nécessairement prendre part à l’entretien et à la réhabilitation du secteur.
Ces ressources demeurent. Il y a une quinzaine de jours, la commune de Courbevoie a perçu 10 millions d’euros de droits de mutation liés à la vente de trois nouvelles tours de bureaux. Le 29 mars dernier, le conseil municipal de la ville de Puteaux a voté un budget de 430 millions d’euros, dont plus de 180 millions d’euros en investissement et près de 250 millions d’euros en fonctionnement. Pour mémoire, cette commune ne compte « que » 45 000 habitants.
Il a donc été décidé d’instaurer un pacte de gouvernance engageant les collectivités concernées à abonder les ressources du nouvel établissement public à hauteur des besoins non couverts en matière de gestion, d’entretien et de remise en état du site.
La rénovation du patrimoine de La Défense, dont l’urgence devient pressante, est estimée à un demi-milliard d’euros, peut-être plus.
Cette régénération sera donc désormais essentiellement portée par celles et ceux qui sont les premiers bénéficiaires de la richesse générée par ce site fort de 150 000 emplois et de plus de 3 millions de mètres carrés de bureaux.
Cette remise à niveau viendra conforter les occupants actuels tout en permettant de saisir plus aisément les opportunités futures.
Certes, la décision britannique de retrait des institutions européennes offre à la place de Paris et à son principal quartier d’affaires une attractivité nouvelle. Mais cette attractivité passera également par une évolution de son modèle de développement, trop monofonctionnel.
Lors de la précédente législature, des efforts ont été menés pour humaniser et diversifier le quartier d’affaires. Ils devront se poursuivre.
En conclusion, je veux saluer l’accord global qui a conduit à cette réforme. Il fait honneur au précédent gouvernement, qui a su une nouvelle fois démontrer son attachement à la décentralisation et à la mise en responsabilité de nos collectivités territoriales.
C’est pour respecter l’équilibre de cet accord global que j’estime qu’il est nécessaire d’attendre la refonte de l’organisation du Grand Paris, annoncée par le Président de la République, pour réenvisager, au sein de ce nouveau schéma institutionnel, le rôle alloué à la métropole, aujourd’hui dotée de moyens bien trop modestes.
Mais il ne faudra pas dans l’avenir occulter ce débat, car la vision métropolitaine est la plus à même d’œuvrer efficacement au rééquilibrage des richesses créées au sein de la zone dense parisienne, qui demeure une terre de contrastes et de profonds déséquilibres territoriaux. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Mézard, ministre. Mesdames et Messieurs les sénatrices et sénateurs, je dirai simplement quelques mots en réponse aux différents orateurs, que j’ai écoutés avec intérêt.
Le précédent gouvernement a décidé le 10 mai de déposer ce texte, qui est, je l’ai dit tout à l’heure, le fruit de très longues discussions.
M. Gattolin disait qu’il arrivait ou trop tôt ou trop tard. Mais c’est le cas dès que l’on change quelque chose dans ce pays !
M. André Gattolin. C’est vrai ! (Sourires.)
M. Jacques Mézard, ministre. L’urgence est de donner à ce quartier d’affaires les moyens d’avoir une gestion et de réaliser des travaux conformes à l’ambition, que vous partagez sur toutes les travées, de le rendre encore plus présent dans le cadre des affaires européennes à la suite du Brexit.
Un cadre général a été fixé lors des discussions menées par le précédent gouvernement. J’estime qu’il est indispensable, quelque opinion qu’on puisse avoir sur le calendrier, que nous puissions prendre des décisions en raison de l’urgence que vous avez unanimement rappelée. Je pense en particulier aux questions relatives à la dalle et aux travaux, pour lesquelles il faut aller vite.
J’ai également entendu les observations de M. Delebarre sur la répartition des richesses territoriales. Il a eu raison de rappeler que ce quartier d’affaires ne génère pas que des dépenses ; il génère aussi beaucoup de recettes, et viser à une meilleure, à une plus juste répartition des richesses est également l’ambition du ministre de la cohésion des territoires que je suis.
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. Jacques Mézard, ministre. Je pense que ce message sera entendu sur l’ensemble des travées. Je souhaite que nous trouvions un équilibre et une justice dans cette répartition, tout en reconnaissant qu’il y a naturellement dans ce dossier un chef de file, et qu’il en fallait un. (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche et du RDSE.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.