M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le vice-président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mes chers collègues, avant d’évoquer plus précisément les comptes sociaux, je veux indiquer que la commission des affaires sociales partage l’appréciation de MM. les ministres selon laquelle il est nécessaire de nous projeter prioritairement dans l’avenir.
Néanmoins, il me semble indispensable de consacrer aussi du temps à l’examen de la gestion passée.
C’est particulièrement vrai pour les lois de financement de la sécurité sociale, qui sont des exercices de prévisions. Leur exécution n’est que rapidement évoquée dans les textes relatifs aux exercices suivants ou traitée, hors du Parlement, dans le cadre très formel et plutôt daté de la commission des comptes de la sécurité sociale, créée en 1979.
Il faut rénover ce cadre et l’intégrer, selon l’expression consacrée, dans un chaînage vertueux, qui se décline des engagements européens de notre pays dans le cadre des ASSO, les administrations de sécurité sociale, jusqu’au régime général de la sécurité sociale, lequel fait l’objet du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Les régimes à gestion paritaire, les hôpitaux, l’effort en faveur des personnes âgées et handicapées ne doivent plus constituer des angles morts de nos finances publiques dont les comptes ne seraient retracés dans aucun texte, alors que notre pays s’engage aussi sur les résultats de ces entités.
Je vois l’intérêt, comme cela est évoqué dans le document préparatoire à ce débat, qu’il pourrait y avoir à renforcer le lien entre les volets « recettes » des différents textes financiers, même si, à la suite des efforts récents, la TVA demeure la seule recette partagée entre l’État et la sécurité sociale. Je m’interroge toutefois sur les modalités de ce renforcement dans l’état actuel des textes organiques et dans la séquence des débats à l’Assemblée nationale et au Sénat. Au-delà des rapprochements qui pourraient s’opérer, il existe bien une spécificité des finances sociales qui tient, notamment, à la part encore très majoritaire prise par les cotisations sociales dans le financement des prestations.
Pour en venir aux comptes sociaux, le Gouvernement a fixé un horizon de retour à l’équilibre du régime général en 2020. Cet objectif nous semble à la fois réaliste et exigeant. Il est réaliste, car la marche à franchir, de l’ordre de 5,5 milliards d’euros, n’est pas si élevée et elle est sans commune mesure avec le déficit de l’État. Mais cet objectif est exigeant, parce que la dynamique des dépenses est forte, tandis que, à très court terme, des baisses de recettes sont d’ores et déjà engagées.
Pour 2017, le déficit devrait se réduire moins que prévu, mais sa réduction devrait être acquise si les dépenses ne connaissent pas d’accélération au second semestre.
Pour 2018, l’équation paraît difficile. Les résultats enregistrés en 2016 et 2017, moins bons que prévu, se reporteront sur cet exercice, tandis que des tensions sont d’ores et déjà prévisibles.
En recettes, la révision de l’hypothèse d’évolution de la masse salariale, que vous avez signalée, messieurs les ministres, devrait se traduire par de moindres recettes à hauteur de 1,4 milliard d’euros, auxquelles s’ajoutent les effets des mesures nouvelles : crédit d’impôt de taxe sur les salaires, contrecoup des acomptes de la C3S, la contribution sociale de solidarité des sociétés, et de la taxe sur les véhicules de sociétés, pour un total de 1,3 milliard d’euros.
En dépenses, la nouvelle convention médicale pèsera encore davantage sur l’ONDAM – l’objectif national de dépenses d’assurance maladie – soins de ville, tandis que le protocole PPCR – parcours professionnels, carrières et rémunérations – augmente les charges des hôpitaux publics.
Au total, ce sont près de 4,5 milliards d’euros qu’il faudra trouver, en recettes ou en moindres dépenses.
À cet égard, le document préparatoire nous informe que chacun des sous-secteurs devra contribuer à la baisse de la dépense publique pour la part des dépenses qu’il représente dans le PIB. Pour les ASSO, si mes calculs sont exacts, cela correspond à 32 milliards d’euros sur cinq ans, dont 8 milliards d’euros dès 2018. La commission des affaires sociales a formulé des propositions, notamment sur l’assurance maladie où des gisements d’efficience restent à exploiter dans l’organisation des soins.
Mais le document ne nous informe pas davantage sur ce point. Il trace, en revanche, quelques pistes qui suscitent de notre part des réflexions et des suggestions.
Je voudrais ainsi évoquer l’assurance chômage, dont le Gouvernement souhaite étendre le bénéfice aux travailleurs indépendants.
Certains indépendants souscrivent déjà de telles garanties à titre volontaire, pour des montants et des durées d’indemnisation variables avec des cotisations éligibles à des avantages fiscaux. La définition, cruciale, de la privation involontaire d’emploi est en général entendue assez strictement : redressement judiciaire, liquidation ou cession judiciaire, fusion-absorption, restructuration profonde, révocation ou non-reconduction du mandat social pour citer quelques cas.
Le projet du Gouvernement semble beaucoup plus large. Pourriez-vous nous éclairer, monsieur le ministre, sur son calendrier, ses contours et le cadrage général de son financement ? Qu’envisagez-vous au sujet de la question de la dette de l’assurance chômage qui s’élève d’ores et déjà à 30 milliards d’euros et approchera les 40 milliards d’euros à la fin de l’année ?
Sur la question des retraites, le Sénat s’est prononcé à plusieurs reprises en faveur d’une réforme systémique et de l’instauration d’un régime par points, plus équitable et plus facile à piloter. Nous sommes donc, sur ce sujet, en accord avec les évolutions annoncées.
Au-delà de cette question d’organisation, la commission des affaires sociales a également alerté, lors de la discussion de chacun des derniers projets de loi de financement de la sécurité sociale, sur la nécessité de reporter l’âge légal pour tenir compte de l’augmentation de l’espérance de vie et garantir la soutenabilité de notre système de retraite ainsi que la confiance des jeunes générations. Après la publication des nouvelles prévisions du Conseil d’orientation des retraites qui font état de déséquilibres profonds et persistants à court terme, le comité de suivi des retraites a préconisé, la semaine dernière, que des mesures correctives soient prises. Quelles sont, sur ce sujet des retraites, les intentions du Gouvernement ?
C’est sur les jeunes générations que nous reportons le poids de la dette sociale, en prévoyant de leur faire supporter demain les économies ou les impôts que nous ne souhaitons pas aujourd’hui.
Nous savons tous que la solution de portage des déficits du régime général par l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, ne peut être que transitoire. La disruption ira-t-elle jusqu’à l’augmentation de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS, éventuellement gagée par la baisse d’autres prélèvements, avec l’engagement ferme de la restituer aux Français à l’échéance de 2024, comme l’a confirmé le Gouvernement ?
Voilà, messieurs les ministres, mes chers collègues, les principales observations et interrogations que je souhaitais formuler, au nom de la commission des affaires sociales, dans le cadre de ce débat d’orientation. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
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Mise au point au sujet d’un vote
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal.
M. Claude Raynal. Monsieur le président, mon collègue Roger Madec souhaitait voter pour lors du scrutin public n° 123 sur l’ensemble du projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
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Orientation des finances publiques et Règlement du budget et approbation des comptes de l’année 2016
Suite d’un débat puis adoption définitive d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons le débat sur l’orientation des finances publiques et la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2016.
Dans la suite du débat commun, la parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Monsieur le président, messieurs les ministres, messieurs les rapporteurs généraux, mes chers collègues, je commencerai par aborder le projet de loi de règlement du budget. Je rappelle que la discussion sur ce texte doit permettre d’évaluer la manière dont la loi de finances initiale, éventuellement modifiée par des lois de finances rectificatives, a été exécutée.
Le débat ne doit pas porter sur le contenu de la loi de finances elle-même, comme cela est parfois le cas, lorsque la discussion dévie. Ce qui nous intéresse, c’est de mesurer l’efficacité des politiques mises en œuvre.
L’exécution de la loi de finances pour 2016 est globalement satisfaisante et conforme aux objectifs fixés. Le taux de croissance est de 1,2 %, comme prévu. Nous nous en réjouissons, mais ce n’est tout de même pas un taux fracassant ! Aux États-Unis, ce taux est d’environ 2 %, sans même parler des pays qui connaissent une croissance de 6 ou 7 %.
L’inflation reste faible, ce qui est dommage, puisque nous avions pour ambition d’atteindre un taux de 2 %. Mais il faut mettre cet élément de côté, car l’inflation n’est plus vraiment entre les mains du gouvernement français – c’est la Banque centrale européenne qui est active en la matière.
Notre point le plus faible est toujours le commerce extérieur, en particulier la faiblesse de nos exportations. Nous le savons, cela s’explique non pas par des raisons extérieures – les intempéries ou le ralentissement du commerce international sont invoqués – puisque les autres pays y sont également confrontés, mais par le fait que le tissu économique formé par nos PME n’est pas orienté vers les exportations et n’a pas une productivité suffisante. Nous rêvons tous au Mittelstand allemand, mais ce rêve relève davantage d’un souhait que de la réalité.
Les dépenses sont couvertes par les recettes comme prévu, même si, au fond, la baisse de 2 milliards d’euros du déficit, de 72 à 70 milliards d’euros, n’est pas énorme…
Le déficit structurel, calculé en dehors de toutes les influences conjoncturelles extérieures, est de 1,6 % du PIB, ce qui reste très élevé. Je rappelle que l’objectif communautaire, fixé par le fameux traité, est de 0,5 %.
Quant au déficit, il se situe à 3,4 % du PIB. Vous l’avez regretté, monsieur le rapporteur général de la commission des finances. Mais c’est mieux que 3,6 %, le taux initialement prévu.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. M. de La Palice n’aurait pas dit mieux !
M. Richard Yung. Certes, on aurait préféré 3 %, mais vous devriez accorder un petit satisfecit pour cette amélioration !
S’agissant des dépenses, notre pays fait l’objet d’une procédure pour déficit excessif depuis 2009, soit depuis bientôt dix ans. La Commission européenne est bonne fille. En effet, lors de chaque débat annuel, elle accorde une année de plus à la France ! On dirait une dispute familiale… Le moment est venu d’agir de façon plus sérieuse en la matière.
Nous avons évoqué la question de la sous-budgétisation lors de l’examen du rapport de la Cour des comptes. Le mot « sincérité » a été employé à plusieurs reprises. Pour 2016, la sous-budgétisation s’élève à 3 milliards d’euros pour les programmes qui ont été mentionnés – OPEX, asile, santé, etc. Ce n’est pas tout à fait une nouveauté, puisque tous les gouvernements y recourent depuis vingt ans.
M. Francis Delattre. C’était avant ! (Sourires.)
M. Richard Yung. Je suis sûr que le nouveau gouvernement est décidé à prendre cette question à bras-le-corps et à faire cesser cette sous-budgétisation.
La question qui se pose est celle de l’évaluation. Nous en avons discuté avec la Cour des comptes. Le Haut Conseil des finances publiques a été créé pour évaluer les hypothèses de croissance et d’inflation. Il donne apparemment satisfaction. Faut-il envisager que ce conseil ou qu’une autre institution économique donne un avis sur les budgétisations proposées ? Nous devons, me semble-t-il, avoir ce débat.
En ce qui concerne les réserves de précaution, j’estime qu’elles vident la discussion budgétaire de son sens.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Tout à fait !
M. Richard Yung. Tout le travail que nous faisons dans cette enceinte pendant trois semaines – cette discussion détaillée des programmes – ne sert plus à grand-chose. Au départ fixé à 5 %, le taux est passé à 6 % puis à 8 %… Ensuite, on gèle, on dégèle…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. On regèle !
M. Richard Yung. … et maintenant on gèle les reports de crédits.
Autrement dit, ce que nous avons voté n’a plus aucun sens !
Je propose, comme cela est d’ailleurs mentionné dans le rapport sur la trajectoire à moyen terme, que nous travaillions ensemble, peut-être sous la forme d’une table ronde, pour revoir l’ensemble de ces procédures, à la fois d’élaboration du budget et d’évaluation. La démocratie est à ce prix.
Sur le chemin d’orientation à moyen terme, les hypothèses de croissance sont prudentes et crédibles : la prévision pour cette année est, par exemple, de 1,6 %. Le FMI vient d’oindre le Gouvernement français de sa bénédiction pour l’année en cours et probablement pour les années qui viennent. Nous nous en réjouissons. Alléluia ! (Sourires amusés sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Le retour à un déficit de 3 % est prévu dès cette année grâce aux 4,5 milliards d’euros d’économies et à une soudaine progression des recettes fiscales. C’est une bonne nouvelle ! Il semblerait que le taux d’élasticité fiscale, dont notre collègue François Marc est le spécialiste, ait été recalculé à la hausse. Nous respecterons donc, semble-t-il, le taux de 3 %.
En ce qui concerne le déficit structurel, nous sommes en revanche loin d’atteindre le taux de 0,5 %, même si c’est le cas pour le déficit courant.
Messieurs les ministres, je souhaite vous interroger sur la fiscalité. Vous avez prévu un taux forfaitaire de 30 % pour les revenus du capital. Cette mesure était demandée et peut être discutée. Pourriez-vous nous apporter des précisions quant à l’assiette de cette taxe ? La formule « revenus du capital » est en effet assez large… Je suppose que les revenus immobiliers n’en font pas partie, mais je n’en suis pas certain… Quid du livret A ? Le sujet est assez sensible en ce moment.
Enfin, pourriez-vous préciser les grandes lignes de votre plan de réduction des dépenses de quelque 60 milliards d’euros en cinq ans, répartis à hauteur de 25 milliards pour l’État, 10 milliards pour les collectivités territoriales, portés maintenant à 13 milliards, et 25 milliards pour la sphère sociale ? C’est tout de même assez énorme ! C’est la raison pour laquelle j’aimerais que vous nous détailliez ce que comprennent ces différentes masses.
Sous réserve de ces observations, mon groupe approuvera le plan à moyen terme. (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche. – M. Yvon Collin applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, il faut, sans tarder, sans faiblir, réduire la dépense publique !
Il faut, sans hésiter et avec le courage nécessaire, réduire la dépense publique !
Cependant, évoquons les 87 000 bacheliers – je me permets de les féliciter ici d’avoir si brillamment conclu leur scolarité secondaire – qui se retrouvent dans la nature par la faute d’une autonomie des universités devenue machine à exclure.
Ou bien parlons des enfants, qui ne verront jamais en classe d’école communale l’un des 6 000 enseignants n’ayant pas été nommés depuis cinq ans !
Ou citons encore les usagers des transports parisiens, qui sont confrontés chaque jour aux pannes du matériel roulant, à l’usure du réseau ou aux défaillances de la signalisation…
Mais, allons bon, il faut réduire la dépense publique, la chose est acquise et c’est là, soi-disant, la seule solution !
Malgré une baisse de la dépense locale en 2016, les collectivités territoriales vont devoir prendre à leur charge, outre la disparition programmée de 80 % de la taxe d’habitation, 13 milliards d’euros de baisse de la dépense publique. Il faut y ajouter la baisse de 10 milliards d’euros de la dotation globale de fonctionnement, la DGF. Cela ne pourrait pas être pire pour les collectivités, et pourtant un ministre, répondant à une question d’actualité aujourd’hui même au Sénat, évoquait la nécessité de diminuer encore les dépenses de fonctionnement !
Les dépenses de fonctionnement, ce sont certes le gaz, l’électricité et l’essence. Mais la part la plus importante, de l’ordre de 50 à 60 %, est surtout constituée de la masse salariale des salariés des collectivités. Rappelons que les effectifs de la fonction publique s’élèvent à plus de 5 millions. C’est donc un appel à la réduction des effectifs, mais il conduirait à une augmentation du chômage dans notre pays et à une baisse des services publics assurés aux populations.
La mesure est claire et lisible, et le choix laissé aux élus locaux ne résidera que dans la peine qu’ils auront décidé, en conscience, de s’appliquer à eux-mêmes, avec ces 13 milliards d’euros…
Quelle formidable avancée par rapport au quinquennat qui vient de s’achever sur un déficit de 3,2 % du PIB, dépassant ainsi de 4 milliards d’euros – somme considérable ! – les engagements que nous avions souscrits auprès des instances européennes, soit environ 17 heures et demie de production nationale ou à peu près 35 heures de rendement des prélèvements fiscaux et sociaux !
L’insincérité invoquée des comptes publics me fait d’ailleurs penser au collectif budgétaire pour 2012. Il était indiqué dans l’exposé des motifs qu’il était « nécessaire de procéder à une rectification des prévisions de recettes, d’une part, en raison de la révision à la baisse de la prévision de croissance et, d’autre part, afin de corriger les erreurs manifestes de prévision du gouvernement précédent, telles qu’elles [avaient] été soulignées dans l’audit rendu par la Cour des comptes. […] Cela [conduisait] à réviser à la baisse les prévisions de recettes publiques de manière significative. » Ces observations, mes chers collègues, figuraient donc en toutes lettres dans le dossier de présentation du collectif budgétaire d’août 2012, que le gouvernement de M. Hollande avait fait voter devant l’impasse de 7,1 milliards d’euros – 7,1 milliards d’euros, j’y insiste – de pertes de recettes fiscales observée lors de son installation.
Aussi, ne comptez pas sur nous, ne comptez pas sur moi, pour accorder un brevet de bonne gestion des comptes publics à l’équipe Hollande,…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Sur moi non plus !
M. Thierry Foucaud. … car le suffrage universel a été suffisamment sévère à son endroit.
Ne comptez pas plus sur nous pour donner quitus aux choix que nous propose le gouvernement actuel, livre de recettes éculées, qui, en trente ans, ont fait la preuve de leur inefficacité.
Oui, nous sommes pour la baisse de la dépense publique, mais quand il s’agit, par exemple, de financer à fonds perdu le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, à cause duquel chaque emploi coûte 200 000 euros pièce. Oui, nous sommes pour la baisse de la dépense publique quand elle finance le crédit d’impôt recherche, ou CIR, qui n’a nullement relancé les budgets de recherche et développement des entreprises ni n’a permis de créer de l’emploi. Oui, nous sommes pour la baisse de la dépense publique quand elle paie la ristourne dégressive sur les bas salaires qui inspirait le commentaire suivant dans une récente publication de France Stratégie : « En France, les travaux d’évaluation de la politique d’exonérations de cotisations sociales patronales sur les bas salaires ont surtout cherché à mesurer son effet sur le volume de l’emploi. Ils aboutissent globalement à conclure que la première vague d’allégements (de 1993 à 1997) a permis de créer ou sauvegarder de l’ordre de 300 000 emplois et la deuxième vague (de 1998 à 2002) environ 350 000 emplois. Les effets de la troisième vague (de 2003 à 2005), eux, seraient quasi nuls. »
Or que vous apprêtez-vous à faire, messieurs les ministres, puisque l’agenda fiscal du Gouvernement comprend un certain nombre de dispositifs dont l’orientation est fondamentalement, totalement, exclusivement libérale ? À rétablir un prélèvement libératoire pour les revenus du capital encore plus intéressant que celui qui avait disparu sous la gestion Hollande.
Au demeurant, quand on est de gauche, que l’on soit communiste, socialiste, progressiste, comment peut-on approuver une telle mesure, qui va permettre à quelques dizaines de milliers de contribuables de se partager 1,5 milliard d’euros de baisse d’impôt ? Pour les 280 000 foyers fiscaux les plus riches, la réforme fiscale Macron-Philippe représente 15 000 euros de baisse d’impôt en 2018. Rien à voir avec les 200 euros de baisse moyenne de la taxe d’habitation inscrite dans votre réforme…
Quand on est de gauche, progressiste, et que l’on compare le montant de l’ISF-PME – 1 milliard d’euros par an – et le montant net des patrimoines imposables à l’ISF – plus de 1 000 milliards d’euros –, on ne peut pas admettre une quasi-liquidation de l’impôt de solidarité sur la fortune, sous le prétexte du financement des PME.
Quand on est de gauche, progressiste, on refuse une politique fiscale qui accroîtra les inégalités de patrimoine financier, immobilier ou autre. L’orientation budgétaire de 2018 est donc celle de l’austérité, encore et toujours de l’austérité.
Ainsi, en lieu et place d’une désintoxication de la dépense publique comme des prélèvements sociaux et fiscaux, on subira, une fois encore, la mise en cause du service public national et local, et la dégradation tant de la qualité de vie des agents, dont le traitement sera gelé et les droits attaqués, que des réponses apportées aux attentes des citoyens.
Ainsi, on prendra encore du retard dans la réalisation des grands projets structurants dont notre pays a besoin pour avancer sur la voie de la transition écologique.
Ainsi, on n’engagera pas les sommes nécessaires à l’indispensable sortie du nucléaire qui requiert des investissements spécifiques pour modifier notre gamme de production d’énergie.
Ainsi, on n’aura pas les moyens de mener le vaste plan de mise à niveau des performances thermiques des immeubles d’habitation, attendu par nombre de familles modestes soucieuses de leur facture de chauffage.
Ainsi, on ne mettra pas en œuvre le plan de réalisation d’équipements universitaires indispensable à l’accueil des trois millions d’étudiants qui s’inscriront dans les dix années qui viennent.
Pour toutes ces raisons, outre que le groupe CRC ne votera pas le projet de loi de règlement du budget de l’année 2016, il ne peut que désapprouver la ligne imprimée à la gestion des deniers publics pour 2018, d’autant que, entre cadeaux fiscaux aux plus riches et réduction du service public pour les autres, elle conduira à la récession. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
(Mme Isabelle Debré remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)