Sommaire
Présidence de M. Vincent Delahaye
Secrétaires :
MM. Daniel Dubois, Guy-Dominique Kennel.
2. Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
3. Renforcement du dialogue social. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 97 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 185 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 98 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 159 de Mme Patricia Schillinger. – Rejet.
Amendement n° 186 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 139 de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Amendement n° 193 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 140 de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Amendement n° 141 de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Amendement n° 187 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 155 de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Amendement n° 99 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 33 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 101 de M. Jean-Louis Tourenne. – Retrait.
Amendement n° 100 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 194 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 34 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 142 de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Amendement n° 197 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 35 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 196 de la commission. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 4
Amendement n° 38 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 102 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Amendement n° 103 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Amendement n° 104 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Amendement n° 105 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Amendement n° 39 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 11 rectifié bis de Mme Corinne Imbert. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 4 bis
Amendement n° 56 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 3 rectifié quater de M. Daniel Chasseing. – Rejet.
Amendement n° 156 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 5
Amendement n° 107 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 108 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 167 rectifié bis de M. Jean-Claude Requier. – Adoption.
Amendement n° 113 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 15 rectifié ter de Mme Pascale Gruny. – Retrait.
Amendement n° 168 rectifié de M. Jean-Claude Requier. – Retrait.
Amendement n° 114 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 49 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 42 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 48 de M. Dominique Watrin. – Retrait.
Amendement n° 2 rectifié quinquies de M. Daniel Chasseing. – Adoption.
Amendement n° 67 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 130 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 165 de Mme Patricia Schillinger. – Adoption.
Amendement n° 1 rectifié quater de M. Daniel Chasseing. – Devenu sans objet.
Amendement n° 14 rectifié ter de Mme Pascale Gruny. – Retrait.
Amendement n° 191 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 43 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 116 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 177 de Mme Patricia Schillinger. – Adoption.
Amendement n° 44 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 117 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 119 de M. Jean-Louis Tourenne. – Retrait.
Amendement n° 118 de M. Jean-Louis Tourenne. – Retrait.
Amendement n° 120 de M. Jean-Louis Tourenne. – Retrait.
Amendement n° 121 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 46 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 143 de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Amendement n° 122 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 124 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 45 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 47 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 125 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 110 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 181 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 127 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 16 rectifié ter de Mme Pascale Gruny. – Retrait.
Amendement n° 128 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 129 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 50 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 153 de Mme Catherine Fournier. – Adoption.
Amendement n° 131 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 51 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 52 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 161 rectifié de Mme Patricia Schillinger. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 6
Amendement n° 53 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 54 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 55 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 57 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 58 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 59 de M. Dominique Watrin. – Retrait.
Amendement n° 64 de M. Dominique Watrin. – Retrait.
Amendement n° 60 de M. Dominique Watrin. – Retrait.
Amendement n° 7 rectifié quater de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 183 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 182 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
4. Candidature à une mission d’information
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Troendlé
5. Renforcement du dialogue social. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
Article additionnel après l’article 6 bis
Amendement n° 8 rectifié quater de M. Daniel Chasseing. – Non soutenu.
Amendement n° 184 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 7
Amendement n° 174 rectifié de M. Jean-Claude Requier. – Retrait.
Amendement n° 61 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 8 bis (nouveau) – Adoption.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 9
Amendement n° 133 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 135 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 134 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 158 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 188 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 189 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 166 rectifié de M. Jacques Genest. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 10
Amendement n° 199 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 69 rectifié sexies de M. Philippe Mouiller. – Rectification.
Amendement n° 195 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 190 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 157 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail
Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
Nomination d’un membre d’une mission d’information
compte rendu intégral
Présidence de M. Vincent Delahaye
vice-président
Secrétaires :
M. Daniel Dubois,
M. Guy-Dominique Kennel.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures ont été publiées pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte commun sur le projet de loi en cours d’examen.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
3
Renforcement du dialogue social
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social (projet n° 119 rectifié, texte de la commission n° 195, rapport n° 194).
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 4.
Article 4 (suite)
La deuxième partie du code du travail, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 précitée, est ainsi modifiée :
1° A Au deuxième alinéa de l’article L. 2143-3, après la seconde occurrence du mot : « alinéa », sont insérés les mots : « , ou si l’ensemble des élus qui remplissent les conditions mentionnées au même premier alinéa renoncent par écrit à leur droit d’être désigné délégué syndical » ;
1° B L’article L. 2312-5 est ainsi modifié :
a) (nouveau) Au deuxième alinéa, le mot : « les » est remplacé par les mots : « l’amélioration des » ;
b) (nouveau) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elle exerce le droit d’alerte dans les conditions prévues aux articles L. 2312-59 et L. 2312-60. » ;
1° CA (nouveau) Après le 3° de l’article L. 2312-37, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3 bis Opération de concentration ; » ;
1° CB (nouveau) À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 2312-56, après le mot : « consultations », sont insérés les mots : « et informations » ;
1° C L’article L. 2312-81 est ainsi modifié :
a) La seconde phrase du premier alinéa est supprimée ;
b) Le second alinéa est ainsi rédigé :
« À défaut d’accord, le rapport de cette contribution à la masse salariale brute ne peut être inférieur au même rapport existant pour l’année précédente. » ;
1° D (nouveau) Le second alinéa de l’article L. 2312-83 est supprimé ;
1° E (nouveau) Au premier alinéa du I de l’article L. 2314-3, la deuxième occurrence du mot : « les » est remplacée par le mot : « aux » ;
1° F (nouveau) À l’article L. 2314-31, le mot : « compétente » est remplacé par les mots : « administrative ou de l’employeur » et le mot : « l’employeur » est remplacé par le mot : « celui-ci » ;
1° L’article L. 2314-33 est ainsi modifié :
a) (nouveau) Au début du deuxième alinéa, les mots : « Sauf si l’accord prévu à l’article L. 2314-6 en dispose autrement, » sont supprimés ;
b) (nouveau) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le nombre maximal de mandats successifs fixé au deuxième alinéa du présent article vaut également pour les membres du comité social et économique central et pour les membres des comités sociaux et économiques d’établissement, excepté pour les entreprises ou établissements de moins de cinquante salariés, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. » ;
1° bis (nouveau) Au début du premier alinéa de l’article L. 2315-18, les mots : « Les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail, ou, le cas échéant, » sont supprimés ;
1° ter (nouveau) Au deuxième alinéa de l’article L. 2315-27, le mot : « et » est remplacé par le mot : « ou » ;
1° quater (nouveau) Après l’article L. 2315-44, il est inséré un paragraphe 1 bis ainsi rédigé :
« Paragraphe 1 bis
« Commission des marchés
« Art. L. 2315-44-1. – Une commission des marchés est créée au sein du comité social et économique qui dépasse, pour au moins deux des trois critères mentionnés au II de l’article L. 2315-64, des seuils fixés par décret.
« Art. L. 2315-44-2. – Pour les marchés dont le montant est supérieur à un seuil fixé par décret, le comité social et économique détermine, sur proposition de la commission des marchés, les critères retenus pour le choix des fournisseurs et des prestataires du comité et la procédure des achats de fournitures, de services et de travaux.
« La commission des marchés choisit les fournisseurs et les prestataires du comité. Elle rend compte de ces choix, au moins une fois par an, au comité, selon des modalités déterminées par le règlement intérieur du comité.
« Art. L. 2315-44-3. – Les membres de la commission des marchés sont désignés par le comité social et économique parmi ses membres titulaires.
« Le règlement intérieur du comité social et économique fixe les modalités de fonctionnement de la commission, le nombre de ses membres, les modalités de leur désignation et la durée de leur mandat.
« Art. L. 2315-44-4. – La commission des marchés établit un rapport d’activité annuel, joint en annexe au rapport mentionné à l’article L. 2315-69. » ;
2° L’article L. 2315-61 est ainsi modifié :
aa) (nouveau) Au 1°, après les mots : « de cinquante à », sont insérés les mots : « moins de » ;
ab) (nouveau) Au 2°, les mots : « de plus de » sont remplacés par les mots : « d’au moins » ;
a) La première phrase du cinquième alinéa est complétée par les mots : « ainsi qu’à la formation des représentants de proximité, lorsqu’ils existent » ;
b) La seconde phrase du même cinquième alinéa est ainsi modifiée :
– les mots : « tout ou » sont remplacés par le mot : « une » ;
– sont ajoutés les mots : « , dans des conditions et limites fixées par décret en Conseil d’État » ;
b bis) (nouveau) Le dernier alinéa est supprimé ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le financement des frais d’expertise est pris en charge par l’employeur en application du 3° de l’article L. 2315-80 du présent code, le comité social et économique ne peut pas décider de transférer d’excédents du budget de fonctionnement au financement des activités sociales et culturelles pendant les trois années suivantes. » ;
2° bis L’article L. 2315-80 est ainsi modifié :
a) Le 1° est complété par les mots : « ainsi qu’à l’article L. 2315-95 en l’absence de tout indicateur relatif à l’égalité professionnelle prévu à l’article L. 2312-18 » ;
b) Il est ajouté un 3° ainsi rédigé :
« 3° Par l’employeur concernant les consultations mentionnées au 2° du présent article, lorsque le budget de fonctionnement du comité social et économique est insuffisant pour couvrir le coût de l’expertise et n’a pas donné lieu à un transfert d’excédent annuel au budget destiné aux activités sociales et culturelles prévu à l’article L. 2312-84 au cours des trois années précédentes. » ;
2° ter Au 1° de l’article L. 2315-85, après le mot : « expertise, », sont insérés les mots : « à défaut d’accord entre les parties, » ;
2° quater (nouveau) À l’article L. 2316-22, les quatre occurrences des mots : « comité central d’entreprise » sont remplacées par les mots : « comité social et économique central », les deux occurrences des mots : « comités d’établissement » sont remplacées par les mots : « comités sociaux et économiques d’établissement » et les mots : « comité d’établissement » sont remplacés par les mots : « comité social et économique d’établissement » ;
3° (Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 97, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 2314-5 est supprimé ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Nous souhaitons que la situation des petites entreprises de 11 à 20 salariés soit prise en compte.
Les organisations syndicales sont invitées par l’employeur à négocier le protocole d’accord préélectoral pour l’organisation des élections des membres du comité social et économique, le CSE. Mais, pour ces petites entreprises de 11 à 20 salariés, cette invitation est conditionnée : au moins un salarié doit s’être porté candidat aux élections dans un délai de trente jours.
Cette disposition rend plus difficile l’implantation syndicale dans les petites entreprises. En effet, l’entrée des organisations syndicales dans les PME se faisait traditionnellement à l’occasion de la négociation des protocoles préélectoraux.
Avec ce nouveau texte, les organisations syndicales n’auront plus à être averties de l’organisation d’élections, sauf dans le cas, improbable, où un salarié se serait porté candidat avant toute négociation d’un protocole, avec les risques que cela comporte.
C’est pourquoi nous proposons la suppression de l’alinéa 15.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Afin de limiter les rigidités et d’assouplir le formalisme des obligations qui pèsent sur les petites PME, l’ordonnance a prévu qu’un employeur de moins de 21 salariés ne doit enclencher le processus de négociation d’un protocole d’accord préélectoral, c’est-à-dire inviter les organisations syndicales représentatives localement, dans la branche ou au niveau national, à y participer, que si l’un de ses salariés a fait état de sa volonté d’être candidat aux prochaines élections professionnelles.
Une telle mesure a pour but non pas d’empêcher les élections de se tenir, mais bien d’éviter à un employeur voulant avant tout se consacrer au développement de son entreprise de gaspiller du temps et des ressources dans un processus voué à aboutir à un procès-verbal de carence.
Il faut au contraire saluer le fait que le Gouvernement a, sur ce point, tenu compte des contraintes pesant sur les plus petites entreprises et conserver cette mesure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, pour les mêmes raisons que la commission.
Le but ici est de permettre un dialogue social efficace dans nos entreprises, mais en faisant preuve de beaucoup de pragmatisme. Aujourd’hui, on constate un très fort taux de carence, à hauteur de 80 %.
Les élections sont parfois organisées en pure perte, et les salariés eux-mêmes ne comprennent souvent pas ce principe, qui n’apporte finalement rien, d’élections formelles dans les entreprises de moins de 20 salariés.
D’ailleurs, même pour les organisations syndicales, ce n’était pas un sujet essentiel. Cela fait vingt ans que l’on pratique cette formule et qu’elle ne fonctionne pas !
Il faut, me semble-t-il, rester dans l’esprit des ordonnances. Pour qu’un texte soit efficace, il doit être cohérent : par cohérence, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 185, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le premier alinéa de l’article L. 2314-10 est complété par les mots : « ou s’ils sont la conséquence de l’annulation de l’élection de membres du comité social et économique prononcée par le juge en application des troisième et avant-dernier alinéas de l’article L. 2314-32 » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à dispenser l’employeur d’avoir à organiser des élections professionnelles partielles si l’élection de membres du CSE a été annulée par le juge en raison du non-respect par les organisations syndicales de l’obligation de refléter exactement la proportion des femmes et des hommes dans l’entreprise sur les listes.
Cette disposition avait été introduite par le Sénat dans la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, dite loi Rebsamen. Il convient donc de la rétablir.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 98, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 2314-23, après le mot :« continus », sont insérés les mots : « ou discontinus » ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Pour pouvoir voter et être éligible au CSE, il faut avoir fait partie de l’entreprise pendant douze mois consécutifs.
Or on a de plus en plus recours à des salariés en contrat à durée déterminée, qui se trouvent donc de fait exclus de la marche de l’entreprise, alors que l’employeur a tendance, lui, à les considérer comme des personnels réguliers faisant un peu partie de l’entreprise.
Nous vous proposons donc de compléter le texte en insérant les mots : « ou discontinus » après le mot : « continus ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je vais répondre sur l’amendement, et non sur les explications que vient de donner M. Tourenne, qui n’ont pas forcément de lien direct…
Les salariés mis à disposition d’une autre entreprise, c’est-à-dire les sous-traitants ou prestataires, peuvent voter aux élections professionnelles de l’entreprise au sein de laquelle ils exercent leur activité après au moins douze mois consécutifs de présence.
M. Jean-Louis Tourenne. Je crains que ce ne soit vous qui vous vous trompiez !
M. Alain Milon, rapporteur. Non ! Je suis bien sur l’amendement n° 98.
Contrairement à plusieurs de leurs amendements précédents, les auteurs de cet amendement souhaitent que la réforme ne s’effectue pas à droit constant. Ils proposent en effet que les salariés mis à disposition soient électeurs après douze mois de présence continue ou discontinue dans l’entreprise.
Or, jusqu’à présent, aussi bien pour les délégués du personnel que pour les membres du comité d’entreprise, la durée requise était bien de douze mois continus.
Je ne sais pas en quoi cette condition serait plus « excessive et manipulable » aujourd’hui que par le passé. D’ailleurs, les gouvernements précédents n’ont jamais cherché à la modifier dans les nombreux textes qu’ils nous ont présentés sur le dialogue social.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il y a deux sujets : la représentation des salariés et la prise en compte des salariés en CDD dans l’entreprise.
Sur la représentation des salariés, je rappelle qu’il y a 85 % de CDI dans les entreprises. Les partenaires sociaux sont, et je le comprends, très attachés au fait que les représentants des salariés les représentent effectivement : ceux dont la connaissance de l’entreprise est récente ne sont pas forcément considérés comme très représentatifs.
En revanche, le sujet que vous soulevez, celui des 15 % de salariés travaillant au titre d’emplois intérimaires, par exemple des CDD, est réel. C’est pour cela que nous avons souhaité faire figurer dans les ordonnances la possibilité de négocier sur la gestion de la qualité de l’emploi, notamment des CDD, parmi les nouvelles compétences des accords de branche.
Oui, il faut évidemment tenir compte de ces 10 % à 15 % d’emplois temporaires dans la discussion sociale ! Mais, pour ce qui concerne la représentation des salariés, nous souhaitons, avec les partenaires sociaux, nous en tenir au principe qui a toujours prévalu : il faut des représentants qui connaissent bien l’entreprise et soient eux-mêmes connus de leurs collègues pour les représenter valablement.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 159, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Amiel et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 18
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
a) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Sauf si l’accord prévu à l’article L. 2314-6 en dispose autrement, et à l’exception des entreprises de moins de cinquante salariés, la durée des mandats successifs ne peut excéder douze ans. » ;
II. – Alinéa 20
Remplacer les mots :
Le nombre maximal de mandats successifs fixé
par les mots :
La durée maximale de mandats successifs fixée
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. L’article L. 2314-33 du code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1386, limite le nombre de mandats successifs à trois, soit un maximum de douze ans avec des mandats d’une durée de quatre ans.
Les mandats des élus n’ayant pas nécessairement une durée de quatre ans, il convient de prévoir dans la loi le principe d’une durée totale maximale de douze ans. Ainsi, ce n’est pas tant le nombre de mandats que la durée totale pendant laquelle le salarié a exercé un mandat qui importe.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise en fait à renverser la logique de la limitation dans le temps du nombre de mandats de représentants du personnel, que la loi d’habilitation a fixé, sur mon initiative, à trois.
Il s’agirait donc de fixer cette limite non plus à trois mandats consécutifs, mais à douze ans. Or, si la durée de droit commun des mandats est de quatre ans, il est possible de fixer par accord une durée plus courte. Ainsi, dans une entreprise où la durée des mandats serait de deux ans, les élus pourraient effectuer six mandats. C’est tout à fait contraire à la loi d’habilitation et à l’esprit de la réforme.
Qui plus est, il est proposé de réintroduire, pour les entreprises, la possibilité, supprimée en commission, de s’affranchir de l’application de la limitation par accord collectif.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Pour ma part, je suis favorable à cet amendement.
En effet, dans l’esprit de la loi d’habitation, que vous avez approuvée, nous souhaitons limiter les mandats dans le temps,…
M. Jean-Pierre Grand. C’est une manie !
Mme Muriel Pénicaud, ministre. … sauf pour les délégués syndicaux.
Les élus du personnel et les représentants syndicaux doivent pouvoir avoir une carrière au sein de l’entreprise. En contrepartie, des efforts seront déployés en faveur de la reconnaissance de leurs compétences et leur formation, afin de leur permettre de reprendre un métier.
Notre objectif, qui correspond à une attente forte au sein des entreprises, est de faire en sorte que les salariés ne soient pas représentés seulement par des « professionnels à vie » ; il faut également des personnes qui connaissent l’entreprise de l’intérieur et vivent les mêmes évolutions que le reste de leurs collègues salariés.
Pour autant, nous n’infligeons pas de double peine. Au départ, nous avions effectivement envisagé de retenir le principe de trois mandats, considérant que cela ferait douze ans. Ce sont les organisations syndicales qui nous ont, à juste titre, fait observer que les mandats pouvaient être de deux ou trois ans dans certaines entreprises.
Il est donc important de rester sur une logique de trois mandats ou douze ans, ce qui, dans bien des cas, revient au même, et de prévoir des contreparties en termes de formation, de reconnaissance des compétences et de carrière des élus. Ce sera très positif pour l’entreprise et pour le dialogue social d’avoir des représentants, certes, très engagés dans leur mandat, mais aussi avec une perspective pour l’après.
En l’occurrence, je vous trouve un peu formaliste, monsieur le rapporteur ; cela ne vous ressemble guère. (Sourires.)
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Je suis un peu surpris par ce débat.
Tout se passe comme si les délégués syndicaux faisaient une carrière… On croit rêver ! Dans combien d’endroits ne trouve-t-on pas de militants syndicaux ! Dans combien d’endroits n’a-t-on pas vu des militants syndicaux rencontrer des problèmes au cours de leur carrière après s’être engagés ! Certains ont dû aller devant les tribunaux pour faire reconnaître ce qu’ils avaient perdu en émoluments ; des jugements ont parfois permis de leur faire restituer des dizaines de milliers d’euros !
Nous évoquions hier les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les CHSCT. Les militants concernés ont une connaissance très fine des conditions de travail. Pourquoi vouloir limiter leurs mandats dans le temps s’ils souhaitent continuer ?
On dirait qu’il y a un foisonnement de militants syndicaux qui veulent faire carrière : ce n’est pas cela du tout !
Être militant syndical dans une entreprise, c’est très difficile : je le sais, je l’ai été ! Votre carrière et, parfois, votre salaire en prennent un coup !
Et on parle de vingt heures par mois ! Alors, pourquoi une telle limitation ?
Non, vraiment, la limitation prévue dans les ordonnances est une erreur. Elle portera inévitablement un coup très dur aux organisations syndicales.
Ce débat me paraît complètement surréaliste. Nous avons au contraire intérêt à avoir des militants syndicaux formés, qui puissent exercer dans la durée, pour défendre au mieux les intérêts matériels et moraux des salariés.
J’ai l’impression que l’on est à des années-lumière du véritable débat ! Si les organisations syndicales n’ont pas le poids qu’elle devrait avoir, c’est parce qu’il n’y a pas suffisamment de personnes qui s’engagent dans la vie syndicale !
Je ne comprends donc pas du tout une telle limitation. En revanche, je comprends la démarche de Patricia Schillinger, qui a certainement vu des grandes entreprises se tourner vers elle pour lui faire entendre que ce n’était pas assez et s’interroger sur ce qu’elles allaient faire.
Madame la ministre, mes chers collègues, ce débat risque d’affaiblir durablement les organisations syndicales !
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Monsieur Bourquin, Mme la ministre et vous avez dit à peu près la même chose.
Quand on parle de « faire carrière », je ne pense pas qu’il s’agisse de faire carrière dans le monde syndical ! Simplement, quand on s’implique complètement comme délégué syndical, on risque de perdre le lien avec le travail et de ne plus pouvoir le reprendre ensuite.
M. Martial Bourquin. Vingt heures par mois !...
M. Martin Lévrier. Non ! Quand on s’implique, quand on se donne totalement, cela peut prendre plus de temps !
Je trouve très intéressant de parler de douze ans, et non de trois mandats grâce ou à cause de cela.
Quoi qu’il en soit, les deux propos se ressemblent.
M. Martial Bourquin. Mais non !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. Madame la ministre, je me permets de vous demander si nous ne sommes pas en train d’entamer le futur débat sur la révision constitutionnelle. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Exclamations sur les travées du groupe La République En Marche.)
En effet, c’est le même principe qui est à l’œuvre : il s’agit bien de toucher à la liberté des élus, car les délégués syndicaux sont des élus. Pour ma part, je suis gaulliste ; depuis la Libération – rassurez-vous, je n’y étais pas ! (Sourires.) –, la liberté syndicale est dans nos gènes !
N’allons-nous pas trop loin ? (M. Laurent Duplomb applaudit.) Allons-nous aussi décider, dans le cadre de la réforme constitutionnelle, de mettre des barrières dans le temps aux reconductions ministérielles ? Va-t-on limiter dans le temps le mandat de secrétaire général d’une organisation syndicale ? Après tout, certains sont restés longtemps en place.
Est-il plus dangereux d’avoir un secrétaire général de syndicat en fonction pendant quinze ans ou un délégué syndical d’une entreprise qui ne reste pas trop longtemps ? On peut se demander si une telle demande n’émane pas du MEDEF, qui serait désireux de changer les têtes lorsque les résultats des élections ne lui conviennent pas…
D’aucuns s’étonneront peut-être d’entendre tenir de tels propos depuis les travées sur lesquelles je siège, mais il est des moments où il faut savoir s’exprimer avec le cœur ! Nous avons une responsabilité : défendre les élus locaux, qui connaissent parfaitement le problème et seront confrontés à de graves difficultés en ne pouvant pas cumuler leur mandat sur un certain nombre d’années.
On touchera ainsi, madame la ministre, vous le verrez, au cœur de la démocratie ! Dans les plus petits villages, dans les plus petites communes, les élus finiront par abandonner, et ils auront peut-être raison ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. J’adhère à une partie de ce qui vient d’être indiqué, mais je pense qu’il y a tout de même une différence importante entre les mandats syndicaux et les mandats politiques.
Il faut, me semble-t-il, encourager l’engagement syndical, au service des autres personnels dans les entreprises.
Je suis très inquiète quant à l’après. Les élus des comités d’entreprise ou des CHSCT, les représentants du personnel ont des droits en tant que tels et sont des salariés protégés. Mais je crains que, parvenus en fin de mandat, ils ne subissent des pressions, ce qui aura pour conséquence d’entraver la liberté syndicale.
Madame la ministre, quelles garanties pouvez-vous apporter pour que la limitation du cumul dans le temps ne vienne pas fragiliser les représentants syndicaux, surtout lorsqu’ils arrivent au bout du nombre d’années prévu ?
M. Martial Bourquin. Excellent !
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Je partage la quasi-totalité des propos de M. Grand, sauf sur un point : on ne peut pas laisser croire – j’ai déjà entendu cette remarque – qu’il faudrait limiter le cumul des mandats dans le temps des délégués syndicaux sous prétexte que l’on veut nous imposer une telle limitation à nous, élus politiques. Évitons que l’amertume qui est la nôtre – elle transparaît dans de tels propos – ne nous conduise à faire subir à d’autres ce que nous regrettons pour nous ! Ce n’est, me semble-t-il, pas un argument à invoquer en faveur de la limitation des mandats dans le temps.
J’ai également entendu que certains, dans leur grande bonté, voulaient limiter dans le temps les mandats des délégués syndicaux « pour leur bien », afin que ces derniers ne se retrouvent pas dans une situation délicate en fin de mandat. Permettez-moi d’être sceptique ! Je pense que les délégués syndicaux sont suffisamment responsables pour décider eux-mêmes s’ils doivent se représenter ou pas !
Les ordonnances prévoient une limitation des mandats, mais sans indiquer la durée. Or, madame la ministre, vous avez raison de le rappeler, les accords de branche peuvent fixer la durée du mandat entre deux et quatre ans. Or trois mandats de deux ans, cela fait six ans. Cela ne laisse pas le temps d’acquérir l’expérience, la compétence et la maîtrise des dossiers, alors que le patron qui, lui, sera présent en permanence, aura pu les acquérir.
Nous avons soutenu des amendements tendant à supprimer cette limitation. Toutefois, je voterai l’amendement de Mme Schillinger, afin d’éviter le pire.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je partage un certain nombre des remarques qui ont été formulées.
Nous parlons de la vie de l’entreprise ; une entreprise, c’est une direction, des salariés, des savoir-faire, des machines-outils, un cadre de vie : c’est tout cela, une entreprise !
Pourquoi avons-nous si peu de salariés qui s’engagent dans le syndicalisme ? Parce que beaucoup subissent la répression syndicale ! Être syndiqué dans un groupe de la grande distribution, par exemple – j’ai rencontré beaucoup de jeunes femmes concernées –, c’est se voir imposer des horaires incompatibles avec une vie de famille ! C’est parfois – mon collègue Martial Bourquin l’a souligné – voir son avancement de carrière stoppé net. Combien a-t-on connu de cas comme ceux-là ?
À mon sens, les syndiqués sont les héros d’aujourd’hui ! Pour s’engager dans son entreprise, pour ses collègues et pour l’entreprise elle-même, parfois dans cette ambiance de répression syndicale, il faut avoir du cran ! Et c’est encore plus vrai dans les PME, où il n’y a bien souvent pas de syndicat ! L’adoption d’un tel amendement ne résoudra pas le problème.
Enfin, comme notre collègue l’a rappelé, c’est aux salariés eux-mêmes de décider qui peut le mieux les représenter. En six ans, on peut en faire, du travail, mais on peut aussi ne pas avoir fini ! Pour pouvoir passer le relais dans de bonnes conditions, il faut parfois dix ans ou quinze ans, et les syndicats et les salariés sont les mieux placés pour savoir quand le moment est venu de changer de représentants.
Nous ne voterons donc pas un amendement qui, à mon sens, va décourager le syndicalisme plus que l’encourager.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. Je partage la position de M. le rapporteur.
Il me paraît assez logique d’opter pour une limitation à trois mandats, comme la loi le prévoit. Il est vrai que certains mandats sont de deux ans. Dans ce cas, il est peut-être souhaitable d’inciter les branches à porter cette durée à quatre ans, afin de favoriser le gain de compétences.
Mais, fort de la modeste expérience qui est la mienne du monde de l’entreprise, je constate qu’il y a un syndicalisme professionnel, et même très professionnel, de plus en plus éloigné du monde du travail.
L’important, c’est de pouvoir effectuer des passages – c’est vrai aussi en politique – de l’activité professionnelle vers un mandat d’élu, puis de revenir dans le monde du travail ; cela permet de ne pas s’éloigner des réalités.
Or, aujourd’hui, et je le dis très clairement à mon collègue Fabien Gay, les syndicats sont totalement déconnectés du monde du travail ; ils connaissent peut-être très bien le droit du travail – et tant mieux ! –, mais certainement pas les réalités du terrain. C’est ce qui a suscité de la désaffection à leur égard.
Pour ma part, je souhaite des syndicats forts et des entreprises avec des employés connaissant les réalités du monde du travail. C’est pourquoi je soutiens la position de la commission. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je pense – en tout cas, j’espère – que la négociation dans les PME et la formation des personnels favoriseront l’engagement syndical.
Je voterai en faveur de cet amendement, qui vise à limiter la durée des mandats successifs à douze ans, ce qui me semble déjà assez important.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Permettez-moi de vous faire part de mon étonnement.
Depuis hier, on nous parle de dialogue social. Et, en même temps, Mme la ministre déclare depuis le début faire confiance aux partenaires sociaux. Or voilà que l’on veut imposer dans la loi une règle limitative aux délégués syndicaux, c’est-à-dire à celles et ceux qui défendent les salariés ! Il faudrait savoir !
Qu’est-ce que le dialogue social ? Qui favorise-t-il dans les entreprises ?
Avec l’ensemble de mon groupe, je ne partage pas du tout l’esprit de ces ordonnances, qui font toujours pencher la balance dans le sens des directions, et jamais dans celui des salariés ! Il est encore prévu d’ajouter une nouvelle règle pour brimer ceux des salariés qui défendent l’outil et les conditions de travail !
Notre collègue Jean-Pierre Grand nous disait à l’instant que, en tant que gaulliste, il avait une autre conception de la démocratie ; je pense que nous sommes très nombreuses et très nombreux à la partager !
Il est vrai que cet amendement adoucirait un peu le dispositif ; nous ne voterons donc pas contre. Mais nous nous abstiendrons. Il est tout de même terrible que, dans cet hémicycle, nous en soyons réduits à retenir le « moins pire » !
M. Jean-Louis Tourenne. C’est vrai ! Mais il faut tout de même prendre ses responsabilités !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Avant que le Sénat ne vote, je voudrais juste apporter une précision afin que nous soyons sûrs de parler tous exactement de la même chose.
Tout d’abord, les délégués syndicaux ne sont pas concernés par cet article : il n’y a pas de limitation de leurs mandats dans le temps. Cela ne figure ni dans le texte des ordonnances ni dans l’amendement de la commission. Sont donc concernés ici les autres élus du personnel, sachant que les délégués syndicaux peuvent être élus ou désignés.
Par ailleurs, je le redis afin qu’il n’y ait pas d’ambiguïté, les organisations syndicales soulignent les difficultés en termes d’engagement, rencontrées par les différents élus. De nombreux jeunes, mais aussi des personnels plus anciens, se disent qu’ils ne pourront plus revenir en arrière une fois qu’ils se seront engagés. Ils craignent de se trouver pénalisés dans leur carrière ou leur rémunération, ou au minimum ralentis, ce qui est vrai dans un certain nombre de cas. D’un autre côté, ils ne sont pas certains de pouvoir réussir à se projeter sur une longue durée. Bref, des mandats longs semblent antinomiques avec la capacité de poursuivre une carrière, non pas d’élu, mais dans l’entreprise, en progressant dans son métier.
Mon ambition, en confiant une mission à Dominique Simonpoli et à Gilles Gateau, est de pouvoir aller beaucoup plus loin en ce qui concerne la valorisation des compétences. Je suis très frappée de constater que, dans les entreprises, les personnes qui ont été élues du personnel, qu’il s’agisse d’ouvriers ou d’employés, ont su développer des compétences extraordinaires en matière d’organisation, de management, de conviction, de négociations. Elles s’engagent pour les autres et pour la collectivité, mais au final, au terme de leur mandat, on ne leur propose rien d’autre que de revenir à la case départ. Ce n’est ni correct ni de nature à les inciter à s’engager !
Certes, ce sujet n’est pas à proprement parler l’objet de l’amendement n° 159, mais il est en lien avec lui. C’est une question de cohérence d’ensemble. En tout état de cause, il est très important d’avancer sur les sujets relatifs à l’avenir professionnel et à la lutte contre les discriminations. Voilà pourquoi nous souhaitons avoir des observatoires départementaux pour suivre ces questions de carrière et s’assurer qu’il n’y a pas de discriminations.
Il est vrai que l’ordonnance prévoyait au départ de limiter les mandats successifs à trois, et nous avions sous-estimé le fait qu’il existait beaucoup de mandats de moins de quatre ans. Cela aurait pu restreindre la durée des mandats successifs à six ans. Or si être élus du personnel peut constituer un piège sur toute une carrière – je ne parle pas des délégués syndicaux –, limiter les mandats à six ans ne permet pas de développer les compétences et paraît excessif. C’est la raison pour laquelle les auteurs de l’amendement désirent aller jusqu’à douze ans. La commission ne le souhaite pas, mais au vu des débats, il me semble que cet amendement sera voté sur de nombreuses travées, certains le feront avec conviction, d’autres en pensant que c’est moins pire, si je puis dire. (On s’esclaffe au banc des commissions.)
M. Alain Milon, rapporteur. Voulez-vous que je demande un scrutin public ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. À votre guise ! (Sourires.)
Cela n’a pas été souligné dans la discussion, mais nous avons prévu une absence de limitation en dessous de 50 salariés, car cela poserait un problème en termes de ressource. En revanche, dans les plus grandes entreprises, il est important que les mandats puissent tourner afin qu’un plus grand nombre de salariés puisse développer cette culture de la négociation, de la représentation.
De surcroît, nous avons prévu, mais la commission veut le supprimer, que par accord majoritaire dans l’entreprise on puisse aller au-delà de cette limite de trois mandats et de douze ans. C’est pourquoi l’amendement défendu par M. le rapporteur me paraît trop restrictif au regard du développement syndical.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. J’ai le sentiment très net que, dans l’ensemble, nous sommes à peu près tous d’accord : ce sont ceux qui votent qui doivent limiter le nombre de mandats des élus dans le temps, et non le Gouvernement ou la loi.
Par ailleurs, l’amendement défendu par Patricia Schillinger aborde la question de la durée du mandat dont nous avons suffisamment parlé. Mais on a omis de souligner qu’il est possible de s’affranchir par accord d’entreprise de cette limitation à trois mandats, comme Mme la ministre vient de le rappeler. À quoi bon alors l’inscrire dans la loi ? Je confirme donc l’avis défavorable de la commission sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 186, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Rédiger ainsi cet alinéa :
1° bis Au premier alinéa de l’article L. 2315–18, les mots : « , ou, le cas échéant, les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail » sont supprimés ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel visant à réaffirmer l’obligation introduite en commission de former l’ensemble des élus du CSE aux questions de santé et de sécurité, et pas uniquement les membres de la commission dédiée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. C’est un amendement intéressant, en cohérence avec ce que j’ai dit hier lors du débat sur la santé au travail. À mon sens, la santé, la sécurité et les conditions de travail doivent être l’affaire de tous et pas simplement de la commission spécialisée, même si cette dernière joue un rôle utile d’approfondissement.
Pour faire de la prévention, tout le monde doit être à bord sur les sujets de santé, de sécurité et de conditions de travail, ce qui demande un minimum de formation. Celle-ci ne sera peut-être pas aussi poussée que pour les membres de la commission dédiée à ces questions. Mais que tous les membres du CSE puissent bénéficier d’une formation dans ce domaine me paraît une bonne initiative. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 139, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au deuxième alinéa de l’article L. 2315-23, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « deux » ;
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian. Quand elles ne les suppriment pas tout simplement pour les entreprises plus petites, les ordonnances fragilisent par petites touches soit les instances représentatives du personnel, en les fusionnant ou en supprimant un certain nombre de leurs prérogatives, soit les élus, comme on vient de le voir lors du précédent débat.
Autre petite touche, il est prévu ici que l’employeur ne sera plus limité à un nombre maximum de collaborateurs pouvant assister avec lui aux réunions plénières de l’instance. Certes, l’employeur peut avoir besoin de s’entourer de collaborateurs, car s’il dirige l’entreprise il ne connaît pas pour autant toutes les questions dans le détail. Néanmoins, lorsque l’on est salarié représentant du personnel et que l’on siège dans des instances où il faut convaincre, participer au dialogue, mais aussi s’opposer, il n’est pas facile d’avoir en face de soi un grand nombre de personnes entourant l’employeur, d’autant que les salariés n’ont pas forcément l’habitude de s’exprimer en public. Ce genre de disposition peut donc rendre leur expression plus difficile.
Voilà pourquoi le nombre de collaborateurs maximum avec lequel l’employeur pouvait assister aux réunions était auparavant limité. Nous proposons de rétablir cette limitation afin de permettre la pleine et entière expression des salariés au sein de ces instances. En effet, quand on se retrouve face à son responsable direct, il est peut-être plus difficile de s’exprimer.
Cette proposition contribuera à rendre ces instances constructives et va dans le sens du dialogue social. Il s’agit de limiter cette fragmentation par petites touches, cette fragilisation du pouvoir et des capacités d’agir des représentants du personnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. En fait, cet amendement vise à abaisser de trois à deux le nombre de collaborateurs qui peuvent assister l’employeur, lequel préside le CSE.
Toutefois, les compétences de la nouvelle instance sont bien plus étendues que celles du comité d’entreprise, notamment – on l’a vu pour l’amendement précédent – en matière de santé et de sécurité au travail, qui relevaient jusqu’à présent du CHSCT. Il est donc logique, sur ce point, de faire évoluer le droit et de permettre à l’employeur de disposer d’un collaborateur spécialisé sur ces questions.
La commission émet donc un avis défavorable et préfère s’en tenir à trois collaborateurs.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Ce qui est important, au-delà du nombre de collaborateurs, c’est que de part et d’autre l’on puisse discuter. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Il n’est aucunement question de limiter le nombre de collaborateurs aux deux seules mêmes personnes pour tous les points de l’ordre du jour de l’instance. Il serait tout à fait possible, d’ailleurs cela se fait déjà, que l’employeur demande à être assisté de tel collaborateur lorsqu’il s’agit des risques professionnels et de tel autre quand il s’agit d’un sujet ayant trait à la finance de l’entreprise. (M. Michel Dagbert opine.)
Deux collaborateurs permettent à l’employeur d’être correctement entouré sans fragiliser la voix des salariés.
M. le président. L’amendement n° 193, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 21
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 2315–24 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sauf accord de l’employeur, un règlement intérieur ne peut comporter des clauses lui imposant des obligations ne résultant pas de dispositions légales. Cet accord constitue un engagement unilatéral de l’employeur que celui-ci peut dénoncer à l’issue d’un délai raisonnable et après en avoir informé les membres de la délégation du personnel du comité social et économique. » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à préciser la nature des engagements pris par l’employeur dans le règlement intérieur du CSE et les conditions dans lesquelles il peut les dénoncer sur la base de la jurisprudence de la Cour de cassation.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui tend à codifier une jurisprudence établie de la Cour de cassation. Ce sera plus simple à la fois pour les employeurs et pour les syndicats de salariés. Il s’agit ici des obligations de l’employeur. Il faut déjà accéder au code du travail ; nous allons essayer de le rendre plus lisible grâce au code numérique. Mais si l’on doit en plus rechercher tous les arrêts de la Cour de cassation…
À partir du moment où la jurisprudence est établie et qu’elle correspond à une pratique qui convient au législateur, il vaut mieux la codifier.
M. le président. L’amendement n° 140, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 22
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 2315-36 est ainsi modifié :
a) Aux 1° et 2°, les mots : « trois cents » sont remplacés par le mot : « cinquante » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Cette commission dispose de la personnalité civile et prend de manière autonome les décisions en matière de santé, sécurité et conditions de travail, notamment en matière d’expertise. » ;
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian. Cet amendement a pour objet de rétablir la présence de représentants aux fonctions spécifiques en matière de santé et de sécurité dans les entreprises dont l’effectif est compris entre 50 et 300 salariés.
Qu’est-ce qui légitime l’absence d’instance spécifique, avec une spécialisation des représentants, dans les entreprises de taille plus petite ? Nous savons tous, cela a été dit et répété hier soir, parfois jusqu’à tard, que ces représentants, qui disposaient de connaissances à la fois techniques et humaines des situations de travail dans l’entreprise, étaient indispensables pour faire vivre la prévention des risques professionnels. Notre proposition répond aux propos de Mme la ministre. La prévention des risques professionnels se fait-elle à droit constant ? N’avons-nous rien perdu ? Il me semble au contraire que beaucoup de salariés vont y perdre !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à abaisser de 300 à 50 salariés le seuil d’effectif à partir duquel la création d’une commission spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail est obligatoire au sein du CSE, et à lui conférer la personnalité civile, ce qui lui permettrait notamment d’ester en justice.
Il part du postulat, erroné à mon sens, que la fusion des instances représentatives du personnel, les IRP, au sein du CSE entraînera un examen moins approfondi de ces questions par cette instance, en particulier lorsqu’elle ne dispose pas d’une commission dédiée, dont la mise en place est obligatoire dans les entreprises d’au moins 300 salariés, ainsi que sur les sites Seveso.
Outre le fait qu’il est possible d’en créer une par accord collectif dans les entreprises de plus petite taille, je ne pense pas que l’absence de cette commission dans les entreprises de taille moyenne empêche les membres du CSE de se spécialiser chacun sur les questions pour lesquelles ils ont une appétence particulière. Il pourra s’agir de la santé au travail ou bien des problématiques financières de l’entreprise, selon la façon dont les élus décident de s’organiser.
Par ailleurs, je suis opposé à ce que la commission dédiée soit dotée de la personnalité civile et émette elle-même des avis. C’est contraire à l’esprit de la réforme, qui repose sur la création d’une instance unique de représentation du personnel. Cela reviendrait à en recréer une seconde.
Surtout, je pense que c’est un facteur de qualité des avis émis que de permettre à l’ensemble des membres du CSE de se prononcer sur des questions de santé et de sécurité au travail. Ils ont chacun leurs expériences propres en la matière et sont à ce titre légitimes pour se prononcer sur ces questions. Je tiens par ailleurs à rappeler que pour cette raison la commission a rendu obligatoire la formation de l’ensemble des membres du CSE aux problématiques de santé, de sécurité et des conditions de travail, et pas uniquement celle des membres de la commission.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, en cohérence avec ce que j’ai précisé hier et voilà quelques instants sur les sujets de santé, de sécurité et de conditions de travail.
D’abord, il serait complètement contradictoire de recréer une sous-commission avec une personnalité morale alors que, justement, nous avons décidé la fusion pour créer une seule personnalité morale disposant d’une vue d’ensemble de l’entreprise.
Par ailleurs, je rappelle que cette commission est déjà obligatoire pour les entreprises de moins de 300 salariés dans les établissements sensibles, c’est-à-dire avec une installation nucléaire ou classés Seveso. L’inspection du travail peut imposer la création d’une telle commission lorsqu’il y a des sujets spécifiques liés à la nature de l’activité, à l’agencement et à l’équipement des locaux.
Enfin, et surtout, vous venez de rendre obligatoire la formation pour tous les membres du CSE. Or le CSE dans ses compétences doit au moins quatre fois par an consacrer ses travaux aux sujets de santé, d’hygiène et de sécurité travail. Il est donc faux de dire que ces questions ne seront plus traitées ou qu’elles ne le seront pas assez bien.
Cet amendement ne me paraît pas nécessaire. Il est même contradictoire avec ce que nous voulons faire. Voilà pourquoi le Gouvernement a émis un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Je le confirme, cet amendement est certainement contraire à l’esprit des ordonnances.
Vous m’avez répondu que ces commissions existaient dans les entreprises dites « sensibles ». Néanmoins, il y a dans beaucoup d’entreprises des situations de travail sensibles, sans pour autant qu’elles relèvent notamment de la réglementation Seveso !
Par ailleurs, vous dites qu’il faut fusionner car une vision globale est nécessaire pour traiter des questions de santé et de sécurité au travail. Cependant, il importe de ne pas laisser entrer d’autres considérations en ligne de compte quand il s’agit de santé et de sécurité au travail dans ces instances. Faute de quoi on finit toujours par les négliger. Or les salariés n’ont qu’un corps : protégeons-le !
Si les élus doivent prendre en compte d’autres considérations que la santé et la sécurité au travail, et obéir à d’autres intérêts, il sera alors facile de négliger les questions de prévention, surtout si celles-ci n’ont pas un caractère grave, que le danger est diffus, qu’il n’est pas imminent. C’est ainsi que l’on omet de prendre garde.
C’est la raison pour laquelle ces instances spécifiques étaient incomparables en termes d’efficacité et pour prendre en compte les situations de travail provoquant des dégâts sur la santé des salariés. Pour toutes ces raisons, il est essentiel, de notre point de vue, en contradiction avec l’esprit des ordonnances, de prendre en compte les dispositions prévues au travers de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Madame la ministre, tenez bon, ne lâchez surtout pas ! (Sourires.) C’est le principe même de l’intérêt de la loi.
Quand nous discutons avec des salariés ou des chefs d’entreprise sur le terrain, il ressort de nos échanges que vos ordonnances leur apporteront plus de souplesse au sein des instances représentatives. Or ces entreprises sont sensibles aux problèmes de santé. Le bien-être de leurs collaborateurs, le fait qu’ils puissent s’épanouir à travers leur travail, est même pour elles la meilleure façon d’être plus compétitives !
Plus le problème est de faible importance, plus chacun fera preuve de souplesse et de bonne volonté pour le prendre en considération. Et face à des problèmes graves, bien sûr, chacun veillera à prendre les mesures qui s’imposent. Mais ce sera trop tard ! C’est au niveau de la prévention qu’il faut agir !
En ayant des actions de prévention volontaire, une entreprise sera plus dynamique et plus performante. Les salariés voudront y travailler, car la protection y sera meilleure qu’ailleurs, qu’il s’agisse des droits ou des conditions de travail. C’est donc un moment important de la loi sur lequel il faut rester particulièrement ferme !
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Quiconque a eu l’occasion de diriger un établissement d’importance doté d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail sait l’enthousiasme et l’engagement des membres de ces comités, qui ont l’impression d’être chargés d’une mission particulière et d’avoir une responsabilité à l’égard de l’ensemble des salariés.
Bien sûr qu’ils sont casse-pieds ! Mais tout directeur, tout chef d’établissement sait qu’ils agissent comme un aiguillon, qu’ils attirent l’attention sur des problèmes que l’on aurait mieux aimé ne pas voir, parce qu’ils engendreront des modifications et des dépenses supplémentaires. Néanmoins, combien de maux ont été ainsi évités ? Combien de maladies, combien de handicaps, combien de difficultés les CHSCT ont-ils épargnés ?
Au fond, en vous écoutant, je me dis que nous sommes d’accord. La dilution à l’intérieur des CSE réduira la capacité d’intervention en matière de santé et de sécurité. (Mme la ministre proteste.) Mais si, puisque vous cherchez à apporter des palliatifs !
Le rapporteur nous a dit que dans certaines entreprises il sera possible de créer de telles instances. Devrions-nous nous en contenter ? Pourquoi ne pas l’inscrire plutôt dans le droit commun ? Voilà quelques instants, vous avez affirmé qu’il sera possible, par dérogation, d’obtenir plus de trois mandats. Pourquoi ne pas le faire figurer dans la loi ? C’est un aveu implicite : vous savez pertinemment que les commissions, si elles existent, ou à défaut les CSE, ne rempliront pas les fonctions qu’exerçaient les CHSCT !
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Nous avons auditionné ce matin le numéro deux de Lactalis. Selon un rapport, qui a fait l’objet de plusieurs articles dans la presse spécialisée, la mise en place du lean management dans cette entreprise pourrait être à l’origine des problèmes de sécurité alimentaire. Cette question doit être étudiée de près. Le parquet en est saisi, nous verrons…
Quoi qu’il en soit, les délégués du personnel et du CHSCT avaient mis en garde la direction sur ces sujets.
M. le rapporteur a affirmé que les questions de sécurité au travail ne feront pas l’objet de moins d’attention. Bien sûr que si puisqu’il y aura moins de représentants et un seul organisme ! Pourtant, ces questions se posent à nous avec une acuité particulière. Cela doit nous interroger !
En effet, le fonds pour l’amélioration des conditions de travail, ou FACT, produit régulièrement des textes sur le sujet. Les questions de burn-out se posent aussi de manière aiguë. Il convient donc au contraire de mettre l’accent sur la santé au travail. C’est ce que font notamment des pays scandinaves. L’Allemagne s’y attache également avec beaucoup d’attention ; elle en fait d’ailleurs un élément de productivité au travail.
Par conséquent, je ne comprends pas très bien cette volonté de s’opposer à cet amendement et à tout ce qui se met en place dans les autres pays pour essayer de traiter au mieux la question de la santé au travail.
Pour finir, on a refusé voilà quelques instants de porter la durée globale des mandats à douze ans et, surtout, on veut limiter les mandats des représentants. Madame la ministre, pourquoi ne pas limiter également le temps de nomination des P-DG à la tête des entreprises ? C’est une boutade. Néanmoins, une chose est sûre : beaucoup de syndicats disparaîtront faute de délégués,…
M. le président. Merci, mon cher collègue !
M. Martial Bourquin. … lesquels seront touchés par la limitation des mandats !
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Le groupe La République En Marche soutiendra évidemment le Gouvernement. Mme la ministre a bien expliqué les choses en soulignant que certains propos étaient mensongers. On ne peut pas tout entendre. Les attributions du CHSCT n’ont pas disparu : elles ont été transférées au CSE, qui continuera à jouer un rôle de prévention et de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, ainsi qu’à améliorer leurs conditions de travail.
Par ailleurs, le texte a prévu la possibilité, voire l’obligation dans les entreprises et établissements d’au moins 300 salariés de créer une ou plusieurs commissions entièrement consacrées aux questions de santé, de sécurité, de conditions de travail.
Le CSE devra se réunir également au moins quatre fois par an sur ces sujets de santé, de sécurité et de conditions de travail.
Je voterai donc contre l’amendement. (Mme Sophie Taillé-Polian s’exclame.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Nous voterons cet amendement de repli. (M. René-Paul Savary s’exclame.) Il n’est certes pas aussi ambitieux que nous le souhaiterions, mais il faut souligner que la santé au travail est un élément déterminant du niveau de santé. Nous sommes dans une société où le vieillissement va prendre de plus en plus de place. C’est pour beaucoup d’entre nous sur notre lieu de travail que se déterminera notre longévité. Je rappelle qu’il y a six ans d’écart entre une personne ayant exercé une profession libérale et un ouvrier. Il ne s’agit pas uniquement d’une question économique, d’une question sociale, c’est aussi une question sociétale.
Il y va de l’intérêt de l’ensemble de la société que nous prenions toutes les mesures pour prévenir le vieillissement précoce, les invalidités, les accidents du travail, les maladies professionnelles. Il me semble qu’il y aurait beaucoup à faire. Au lieu de réduire les possibilités de prévention, cherchons plutôt à les augmenter !
Madame la ministre, que vous le vouliez ou non, en reportant le débat sur les questions de santé au travail dans une commission, et plus largement en les fondant dans le CSE, vous les faites dépendre des questions stratégiques de l’entreprise.
Ces questions d’organisation du travail, ces questions liées à l’impact, par exemple, des restructurations et des suppressions d’emplois, vont se trouver noyées dans des discussions stratégiques sur le devenir de l’entreprise. Cela revient, à mon sens, à diminuer la portée des débats nécessaires sur les questions de prévention au travail.
Il s’agit, comme je l’ai souligné en introduction, d’un amendement de repli.
M. le président. Il faut conclure !
M. Dominique Watrin. En effet, si les CHSCT dans leur fonctionnement actuel ne sont pas toujours satisfaisants, c’est parce qu’ils manquent de moyens et que l’inspecteur ou le médecin du travail n’étaient pas présents.
M. le président. Merci, mon cher collègue !
M. Dominique Watrin. Plutôt que de les supprimer, améliorons le système existant !
M. le président. Je vous rappelle, mes chers collègues, au respect des temps de parole. D’autant qu’en deux minutes et demie il est possible d’expliquer son vote.
La parole est à Mme Catherine Fournier, pour explication de vote.
Mme Catherine Fournier. Je voudrais réagir à certains propos, notamment sur le CSE.
Mes chers collègues, il serait temps de faire un peu confiance aux chefs d’entreprise.
M. Jean-François Husson. Très bien !
Mme Catherine Fournier. Ce sont des personnes responsables, de même que les personnels qui les entourent, comme les DRH. C’est un fait avéré : si le personnel se sent bien dans son entreprise, il travaillera correctement. J’aimerais que l’on ne remette plus en question ce point. Il faut que l’on évolue et que l’on arrête de tenir ce discours quelque peu archaïque. Ramenons le positionnement aux salariés, que je respecte !
Cela étant, en termes de prévention et de santé, je voudrais revenir sur mes propos lors de la discussion générale. Si l’on veut que les salariés soient bien protégés, mieux vaudrait à mon sens procéder à la professionnalisation de la médecine du travail. Nous attendons dans les prochains mois une refonte totale de cette médecine. Je préférerais, si vous le voulez bien, madame la ministre, faire confiance à des professionnels pour la prévention des salariés.
En tout état de cause, nous voterons contre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Les trois instances – délégué du personnel, comité d’entreprise, CHSCT – sont transférées au CSE, avec la totalité de leurs prérogatives.
Pourquoi le CSE minimiserait-il la santé au travail, qui est très importante ? Je ne crois pas du tout que tel sera le cas. Je voterai donc contre l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 141, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 22
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 2315-39 est supprimé ;
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian. Cet amendement, qui fait suite à l’avant-dernier amendement que nous avons présenté, a pour objet de restreindre la possibilité pour l’employeur d’être assisté en réunion de tant de collaborateurs qu’ils formeraient un ensemble aussi nombreux que les représentants titulaires, avec le risque que les représentants des salariés siègent en face de leur supérieur hiérarchique.
Il s’agit de prévenir un risque d’entrave ou d’autocensure, qui sera immanquablement encouru dans certaines entreprises. Il n’est pas question de dire que les employeurs sont méchants (Marques d’ironie sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.) ou de les stigmatiser, mais il faut fixer des cadres.
Il faut que la santé des salariés, ce bien précieux, irremplaçable, nécessaire et important – une meilleure santé au travail permet une meilleure productivité –, soit garantie. On le sait, un certain nombre d’employeurs ne font pas d’efforts dans ce domaine. C’est la raison pour laquelle les CHSCT ont été créés.
M. Philippe Mouiller. Qu’avez-vous fait depuis 2012 ?
Mme Sophie Taillé-Polian. J’insiste, il ne s’agit pas de jeter l’opprobre sur l’ensemble des employeurs, mais il faut tout de même regarder la réalité en face. Des scandales touchant à la santé au travail ont montré que certains d’entre eux ne faisaient pas le minimum. (Mme Catherine Fournier et M. Jean-François Longeot s’exclament.)
Il faut non seulement garantir à tous ce minimum, mais s’engager à faire du mieux possible. C’est la santé des Français qui est en question !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à interdire à l’employeur de se faire assister par des conseillers techniques lors des réunions de la commission santé, sécurité et conditions de travail.
La commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail, qui seront nécessairement désignés au sein du CSE, bénéficieront à ce titre du statut de salarié protégé, qui favorise et protège leur liberté d’expression pleine et entière au sein de la commission.
Des sujets techniques y seront souvent abordés, comme c’est déjà le cas au sein des CHSCT, où des conseillers techniques sont toujours présents. La nature du débat ne changera donc pas. Ce qui importe, c’est la liberté d’expression pleine et entière, laquelle est garantie par le statut de salarié protégé.
Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 187, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 31
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le sous-paragraphe 5 du paragraphe 3 de la sous-section 6 de la section 3 du chapitre V du titre Ier du livre III est abrogé ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination avec la décision prise en commission de maintenir le caractère obligatoire d’une commission des marchés dans les CSE les plus importants.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. La commission a souhaité corriger sur ce point l’ordonnance, qui prévoyait que le CSE pouvait organiser ses travaux.
Je comprends la logique de l’amendement, lequel vise à encourager la transparence en faisant référence à des règles connues de tous.
Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. L’amendement n° 155, présenté par Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 33
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
aa) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« L’employeur verse au comité social et économique une subvention de fonctionnement d’un montant annuel équivalent à 0,22 % de la masse salariale brute dans toutes les entreprises. » ;
II. – Alinéa 34
Rédiger ainsi cet alinéa :
ab) Les 1° et 2° sont abrogés ;
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian. Dans un souci de simplification, et afin de permettre un même financement dans toutes les entreprises au bénéfice de tous les salariés, nous proposons de fixer le montant de la subvention de fonctionnement versée par l’employeur au comité social et économique, quel que soit le nombre de salariés dans l’entreprise, à 0,22 % de la masse salariale brute.
Dans notre pays, les salariés des plus petites entreprises sont souvent beaucoup moins favorisés que ceux des grandes, comme nous l’avons évoqué lors de notre récent débat sur la prévention des risques.
Nous souhaitons donc aligner leurs statuts pour ce qui touche au fonctionnement du CSE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à porter de 0,2 % à 0,22 % de la masse salariale la subvention de fonctionnement du CSE versée par l’employeur dans les entreprises comptant entre 50 et 2 000 salariés, qui correspond au niveau auquel cette subvention a été portée par l’ordonnance dans les entreprises d’au moins 2 000 salariés.
Il n’est pas démontré que ce niveau soit insuffisant pour permettre au CSE de remplir ses missions. Le reliquat des moyens consacrés aux activités sociales et culturelles peut, par ailleurs, être désormais reversé au budget de fonctionnement. Un accord collectif peut également prévoir un niveau plus élevé. En revanche, je ne pense pas souhaitable de faire peser sur les entreprises de taille moyenne une charge financière supplémentaire.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il s’agit, encore une fois, d’en revenir à la cohérence du texte. Il faut tenir un discours clair aux entreprises comme aux salariés.
Les ordonnances relatives au renforcement du dialogue social ont mis l’accent sur l’importance pour les petites et moyennes entreprises d’être opérationnelles. Augmenter la charge pesant sur elles ne me paraît donc pas opportun.
Je rappelle que nous avons prévu un abondement supplémentaire pour les grandes entreprises car la complexité de leur fonctionnement entraîne de fait, comme l’expérience a permis de le constater, un besoin plus important d’expertise. Dans les petites entreprises, en revanche, les sujets peuvent être plus facilement appréhendés.
L’avis est donc également défavorable.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 99, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 40, 41, 44 et 45
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Les dispositions des alinéas 41 et 45 portent atteinte à la liberté du comité social et économique de disposer de ses propres fonds. Si nous sommes hostiles au principe de cette fongibilité, il est évident que dès lors qu’elle est rendue possible par les ordonnances, elle doit être complète.
L’interdiction de transfert est une disposition que l’on peut qualifier de « perverse ». En effet, pour que l’employeur prenne en charge les frais d’expertise, elle implique que le CSE n’ait pas transféré d’excédent annuel du budget de fonctionnement sur les activités sociales et culturelles durant les trois années précédentes. De plus, si l’employeur prend en charge les frais d’expertise, le CSE ne pourra opérer de transfert durant les trois années suivantes, ce qui pourrait pénaliser le financement des activités sociales et culturelles destinées aux salariés. Dans ces conditions, ne risque-t-il pas de renoncer à des expertises ?
Vous avez dit, madame la ministre, qu’il n’était pas opportun de surcharger le budget des entreprises. Vous n’avez pas hésité, malgré tout, à alourdir le budget du CSE en lui imposant de financer 20 % du coût de certaines expertises.
M. le président. L’amendement n° 33, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 44 à 46
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cet amendement vient d’être excellemment défendu. Nous estimons qu’une sorte de chantage, insupportable, est mise en place au travers de ces dispositions.
M. le président. L’amendement n° 101, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 44 et 45
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
…° L’article L. 2315-83 est complété par une phrase ainsi rédigée : À cette fin, l’expert a accès aux mêmes documents que le commissaire aux comptes de l’entreprise et, « plus généralement, à tous les documents nécessaires à l’exercice de sa mission. » ;
L’amendement n° 100, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 45
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° Toutefois, le coût des expertises est intégralement pris en charge par l’employeur dans les entreprises de moins de 500 salariés ou dont la subvention de fonctionnement n’atteint pas au moins 50 000 €. » ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter ces deux amendements.
M. Jean-Louis Tourenne. Sur l’amendement n° 101, on m’a laissé entendre en commission que notre sollicitation était satisfaite. Par conséquent, je le retire.
M. Jean-Louis Tourenne. J’en viens à l’amendement n° 100. En pratique, le dispositif de cofinancement à hauteur de 20 % sur le budget de fonctionnement va priver un grand nombre de comités sociaux et économiques du droit à l’expertise. Il s’agit de tous ceux qui ne reçoivent aucune somme mobilisable puisque leurs moyens de fonctionnement leur sont donnés « en nature » par leur employeur, et de tous ceux dont la taille trop petite leur rend impossible tout cofinancement.
Je vais prendre un exemple. Dans une entreprise de 100 salariés peu qualifiés au sein de laquelle le salaire brut annuel moyen est de 20 000 euros et la masse salariale brute de 2 millions d’euros, le montant de la subvention de fonctionnement sera de 4 000 euros.
Cette subvention modeste de 4 000 euros va d’abord être largement utilisée par la documentation, la formation, les déplacements, l’informatique ou encore la téléphonie et internet…
En prenant l’hypothèse qu’un maximum de 10 % de cette subvention puisse servir à rémunérer une expertise, cela fait un budget de 400 euros. Si la hauteur de cofinancement est de 20 %, cela signifie que le budget d’expertise, avec la participation de l’employeur, sera de 2 000 euros. Ce montant très faible montre bien que le droit à l’expertise ne sera plus opérationnel.
Au travers de cet amendement, nous vous proposons une dispense du cofinancement en fonction de la taille de l’entreprise ou du montant de la masse salariale.
M. le président. L’amendement n° 194, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 46
Remplacer cet alinéa par dix alinéas ainsi rédigés :
2° ter Le 1° de l’article L. 2315-85 est complété par les mots : « , en l’absence d’accord d’entreprise ou d’accord conclu entre l’employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires de la délégation du personnel du comité, le définissant » ;
…° L’intitulé du paragraphe 3 de la sous-section 10 de la section 3 du chapitre V du titre Ier du livre III est ainsi rédigé :
« Paragraphe 3
« Autres cas de recours à l’expertise
…° La division et l’intitulé du sous-paragraphe 3 de la sous-section 10 de la section 3 du chapitre V du titre Ier du livre III sont supprimés ;
…° L’article L. 2315-96 devient l’article L. 2315-94 ;
…° L’article L. 2315-94 est ainsi modifié :
a) Au 2° , après les mots : « En cas », sont insérés les mots : « d’introduction de nouvelles technologies ou » et le mot : « prévu » est remplacé par le mot : « prévus » ;
b) Il est ajouté un 3° ainsi rédigé :
« 3° Dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, en vue de préparer la négociation sur l’égalité professionnelle. » ;
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les autres amendements restant en discussion.
M. Alain Milon, rapporteur. L’amendement n° 194 que présente la commission est relatif à la simplification des modalités de recours à l’expertise par le CSE et aux types d’experts. Il vise à supprimer notamment la notion d’expert technique, qui n’avait jamais été véritablement définie, et à confirmer que les experts seront désormais habilités par un organisme d’accréditation, comme le COFRAC, le Comité français d’accréditation, et non plus agréés par le ministère du travail, ce qui permettra de garantir leurs compétences.
J’en viens à l’avis de la commission sur les autres amendements.
L’amendement n° 99 tend à supprimer les règles encadrant l’utilisation par le CSE de l’excédent de son budget de fonctionnement.
À l’Assemblée nationale, le Gouvernement a complété les dispositions issues de l’ordonnance, qui fixe désormais comme principe que le CSE devra participer à hauteur de 20 % à la prise en charge du coût de certaines expertises – orientations stratégiques de l’entreprise, consultations ponctuelles sauf en cas de plan de sauvegarde de l’emploi, risques graves dans l’établissement –, afin de tenir compte des situations dans lesquelles son budget de fonctionnement sera insuffisant pour apporter cette participation financière.
Il a fixé comme principe, dans ce cas, que l’employeur devra financer l’intégralité du coût. Toutefois, pour s’assurer que le CSE ne mettra pas en place une stratégie de diminution artificielle de ses moyens pour mettre l’employeur systématiquement à contribution, cette prise en charge a été conditionnée à l’absence de transfert de l’excédent du budget de fonctionnement aux activités sociales et culturelles durant les trois années précédentes. De plus, si l’employeur est amené à financer la totalité d’une expertise à ce titre, le CSE ne pourra pas procéder à un tel transfert au cours des trois années suivantes.
Les auteurs de cet amendement veulent supprimer cette disposition, en affirmant qu’il s’agirait d’un moyen de faire diminuer le recours à l’expertise par le CSE. Je pense que c’est, une fois encore, faire bien peu confiance aux élus du personnel. Leur mission première reste d’émettre des avis sur les projets de l’employeur, avant d’assurer la gestion des activités sociales et culturelles, les ASC. Il serait bien peu responsable de leur part de favoriser l’arbre de Noël de fin d’année au détriment des expertises nécessaires aux consultations ponctuelles dont ils sont saisis.
Par ailleurs, je tiens à rappeler que la possibilité de reverser aux ASC l’excédent du budget de fonctionnement est une nouveauté introduite par l’ordonnance. Il n’est donc pas ici question de revenir sur des pratiques anciennes ou de changer des habitudes bien établies.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement, de même que sur les amendements nos 33 et 100.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je souhaite revenir sur la raison de ce débat : nous avons introduit dans les ordonnances la possibilité d’une fongibilité vers les activités sociales et culturelles. On constatait en effet que, dans nombre de CE, le budget de fonctionnement n’était pas entièrement utilisé, mais ne pouvait pas être transféré aux ASC.
Le point de départ est donc de permettre de libérer ces sommes. Dans de grandes entreprises, des millions d’euros sont parfois bloqués pendant des années : on ne peut rien en faire et les salariés n’en sont pas bénéficiaires.
Par ailleurs, nous avons estimé qu’il était nécessaire de mettre en place un cofinancement à 80 %–20 %, pour certains types d’expertise. Or il ne fallait pas que cela puisse annuler la mesure précédente. Nous avons donc prévu une limitation de la fongibilité, mesure que souhaitent supprimer les auteurs des amendements. Il fallait aussi éviter de mettre en péril le cofinancement.
Est également prévu le cas des petites entreprises qui ne disposeraient pas de financement suffisant pour l’expertise : l’employeur doit alors prendre le financement à sa charge, ce qui correspond à l’esprit, et non pas à la lettre, de l’amendement n° 100, car nous n’avons pas voulu fixer de seuil précis, mais plutôt prévoir une évaluation au cas par cas.
Pour résumer, nous souhaitons confirmer dans la loi de ratification le principe d’une possibilité de fongibilité en cas d’excédent de fonctionnement, laquelle fongibilité ne doit pas se faire au détriment de la codécision sur certains types d’expertise exceptionnelle.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 99, 33 et 100. Il est favorable, en revanche, à l’amendement n° 194, qui prévoit une meilleure rédaction s’agissant des interventions de l’expert.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Vous nous dites, madame la ministre, que vous avez été très sensible à la situation des CSE en les autorisant, dès lors qu’ils ont de l’argent en caisse, à utiliser une partie de l’excédent pour financer d’autres activités, non pas seulement des arbres de Noël, mais aussi des activités culturelles, sportives, voire sociales.
Vous ajoutez qu’en contrepartie de ce cadeau que l’on fait aux CSE, il faudra leur faire payer une contrepartie. (Mme la ministre fait un signe de dénégation.) Si ! D’une part, vous mettez à leur charge 20 % du coût des expertises, ce qui n’existait pas avant ; d’autre part, dans le cas où ils ont droit à une prise en charge totale parce qu’ils n’ont pas réalisé d’excédent pendant trois ans, alors, pendant trois ans, ils ne pourront pas utiliser l’excédent éventuellement dégagé pour des activités sociales ou culturelles. Ce n’est pas une marque de générosité de votre part, mais un moyen de pression. Je trouve que ce n’est pas bien ! (M. Philippe Mouiller rit.)
M. le président. L’amendement n° 34, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 41
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° L’article L. 2315-79 est abrogé ;
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’article L. 2315–79 du code du travail, créé par l’ordonnance n° 2017–1386 du 22 septembre 2017, dispose : « Un accord d’entreprise, ou à défaut un accord conclu entre l’employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel, détermine le nombre d’expertises dans le cadre des consultations récurrentes prévues […] sur une ou plusieurs années. »
Ainsi donc, il sera possible de déterminer à l’avance le nombre d’expertises dans le cadre des consultations sur les orientations stratégiques de l’entreprise, la situation économique et financière de l’entreprise, ou la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi sur une ou plusieurs années. Cet article remet par conséquent en question le droit des représentantes et des représentants du personnel à expertiser les décisions prises par la direction.
Ce droit à l’expertise est-il si fondamental, me rétorquerez-vous ?
Nous pensons qu’il s’agit d’un droit important, d’autant que – on le voit au fil des propositions contenues dans ces ordonnances et d’un certain nombre d’amendements qui ne vont pas dans le sens de l’intérêt des salariés – les droits des représentantes et des représentants sont remis en cause.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’ordonnance permet en effet aux partenaires sociaux dans l’entreprise de s’entendre à l’avance sur les expertises qui seront sollicitées dans le cadre des consultations récurrentes du CSE. Contrairement aux consultations ponctuelles, il sera possible de les anticiper.
Si leur périodicité n’a pas été modifiée par un accord, comme l’ordonnance le permet, le CSE devra se prononcer chaque année sur les orientations stratégiques de l’entreprise, sa situation économique et financière et sa politique sociale, soit trois cas de recours à un expert. Il n’est pas déraisonnable de fixer ce nombre par accord collectif, les consultations ponctuelles n’étant évidemment pas concernées.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il faut bien comprendre qu’il s’agit d’une possibilité résultant d’un accord d’entreprise ou d’un accord entre l’employeur et le CSE. Les représentants du personnel doivent donc y consentir. S’ils le font, c’est qu’ils y ont intérêt.
En outre, cette négociation ne peut avoir lieu que pour les consultations récurrentes du CSE. L’idée est de programmer d’un commun accord un rythme des expertises.
La négociation n’est pas applicable en cas de consultations ponctuelles, c’est-à-dire en cas de risque grave, de projet important, de droit d’alerte économique, d’opération de concentration, de licenciement collectif pour motif économique, d’offre publique d’acquisition, soit tout événement imprévu, et parfois imprévisible, qui survient dans l’entreprise.
Cela permettra d’associer les parties concernées plus en amont, d’avoir le temps de réfléchir sur les expertises qui seront faites, de passer commande d’un train d’expertises programmées, et contribuera au dialogue social et économique construit dans la durée, sans restreindre le recours à l’expertise ponctuelle, ou en urgence, ou sur des éléments nouveaux.
L’avis est donc également défavorable.
M. le président. L’amendement n° 142, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 42
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au 1°, la référence : « au 1° » est remplacée par les références : « aux 1° et 2° » ;
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian. Cet amendement a pour objet d’étendre le financement des expertises portant sur les projets importants, définies à l’article L. 2315–96 du code du travail.
La nouvelle disposition risquait en effet de priver certains CSE de leur droit à l’expertise, notamment sur des projets d’ampleur. Or cette capacité permet d’anticiper et d’éviter des problèmes relatifs à la santé au travail.
Il nous semble dommage, dans une logique de prévention, de fragiliser le recours à ces expertises par les CSE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Ces expertises « projet important » entrent dans le cadre de celles qui, au titre des consultations ponctuelles du CSE, doivent être prises en charge à hauteur de 20 % par cette instance. Elles n’ont pas un caractère d’urgence ou de danger qui justifierait leur financement complet par l’employeur, comme c’est justement le cas des expertises commandées en cas de risque grave dans l’établissement.
Toutefois, l’employeur prendra bien en charge l’intégralité du coût de cette expertise dès lors que le budget du CSE ne le permet pas et que ce dernier n’a pas, au cours des trois dernières années, reversé un éventuel excédent à ses activités sociales et culturelles. En ce sens, aucun CSE ne devrait être privé de son droit à l’expertise, à l’exception peut-être de ceux qui, à l’avenir, préféreront privilégier leur compétence sociale sur leur compétence consultative.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Tous les éléments de ma réponse ayant déjà été donnés dans mes avis précédents, je n’y reviens pas.
L’avis est défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Effectivement, ces expertises n’entrent pas dans le cadre de l’urgence, au sens d’un danger grave et imminent. Cependant, elles peuvent s’intégrer dans le contexte de projets de réorganisation. Lorsqu’un employeur souhaite mener un projet de réorganisation, il n’a pas envie d’attendre l’année suivante que le CSE ait les moyens de le faire…
C’est donc non pas une question d’urgence, mais d’opportunité du projet, lorsque l’on peut encore prendre davantage en compte les questions de conditions de travail et de prévention des risques professionnels.
Lorsque le budget le permet et lorsque les problématiques de conditions de travail et de santé au travail ne sont pas les seules prérogatives du CSE, on peut avoir d’autres priorités. Des élus qui ne sont pas spécialistes des conditions de travail peuvent préférer organiser des activités socioprofessionnelles, par exemple, et y consacrer le budget.
Vous me rétorquerez que c’est parce que les questions de conditions de travail et de santé au travail soulevées ne sont pas suffisamment importantes. Or ce sera tout de même suffisamment important, mais on en revient toujours au risque de dilution des problématiques pourtant essentielles de la prévention des risques au profit d’autres problématiques, également d’importance, mais qui doivent être traitées à part.
M. le président. L’amendement n° 197, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 43
Les mots :
Le 1° est
sont remplacés par les mots :
Au 1°, la référence : « L. 2315–96 » est remplacé par la référence : « L. 2315-94 » et l’alinéa est
et les mots :
qu’à l’article L. 2315–95
sont remplacés par les mots :
qu’au 3° du même article L. 2315–94
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 35, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 43
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au 2°, les mots : « et les consultations ponctuelles hors celles visées au deuxième alinéa » sont supprimés ;
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Le nouvel article L. 2315–80 du code du travail prévoit désormais que plusieurs expertises ponctuelles devront être financées à 20 % par le comité social et économique, alors qu’elles étaient auparavant prises en charge par l’employeur.
L’expertise restera intégralement prise en charge si cette consultation porte sur la politique sociale et les conditions de travail et d’emploi, sur un projet de licenciement collectif pour motif économique d’au moins dix salariés sur une période de trente jours et, enfin, si elle porte sur un risque grave constaté dans l’établissement. En revanche, dans les autres cas, et notamment lors de consultations récurrentes sur les orientations stratégiques de l’entreprise ou de consultations ponctuelles demandées à tel ou tel moment, il est prévu que ceux qui en font la demande y contribuent à hauteur de 20 %, l’entreprise y participant, elle, à hauteur de 80 %.
Alors que les syndicats sont confrontés à des employeurs qui viennent accompagnés des meilleurs experts, le projet de loi réduit donc la capacité d’action des représentants des salariés. C’est pourquoi nous demandons la suppression de la fin de cet alinéa.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’instauration d’un cofinancement, à hauteur de 20 %, du coût des expertises demandées par le CSE dans le cadre de certaines consultations ponctuelles vise avant tout à responsabiliser les représentants du personnel, non à les priver de leur droit de faire appel à un expert.
De plus, cette règle ne s’appliquera pas si le budget de fonctionnement du CSE est insuffisant pour couvrir ce coût : comme l’a prévu l’amendement gouvernemental adopté à l’Assemblée nationale sur ce point, l’employeur prendra alors en charge l’intégralité de la rémunération de l’expert.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 196, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 48
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
3° Le premier alinéa de l’article L. 2321–1 est complété par les mots : « à l’exception des accords qui sont soumis à des règles spécifiques de validité prévus notamment aux articles L. 1233–24–1, L. 2314–6, L. 2314–12 et L. 2314–27 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir une exception à la règle selon laquelle le conseil d’entreprise était seul compétent pour négocier et conclure des accords d’entreprise.
Cette exception figurait dans l’ordonnance d’origine, mais elle a été supprimée par la sixième ordonnance du 20 décembre 2017. Or certains accords sont soumis à des règles de validité spécifiques, notamment d’unanimité, qu’il convient de préserver.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je n’ai pas bien compris l’amendement de la commission, qui revient à détruire le conseil d’entreprise. La différence entre un comité social et économique et un conseil d’entreprise, c’est justement que le conseil d’entreprise a la capacité de négocier sur tous les sujets. On retrouve la fonction de délégué syndical, qui détient un pouvoir de négociation, en complément des autres qui avaient un pouvoir d’information et de consultation, au sein du conseil d’entreprise. C’est cette instance qui a le pouvoir de négocier sur l’ensemble de sujets, en suivant les règles de majorité habituelles.
L’amendement conduirait à supprimer la différence entre comité social et économique et conseil d’entreprise. Je suggère son retrait, car il résulte d’une mauvaise compréhension entre nous.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l’amendement n° 196 est-il maintenu ?
M. Alain Milon, rapporteur. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 196 est retiré.
Je mets aux voix l’article 4, modifié.
(L’article 4 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 4
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 171 rectifié bis est présenté par MM. Requier, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville et Vall.
L’amendement n° 176 rectifié est présenté par Mme Lamure, MM. Gabouty et Adnot, Mme Billon, M. Bouchet, Mme Berthet, M. Cadic, Mme Canayer, MM. Canevet et Danesi, Mmes Deromedi et Estrosi Sassone, M. Forissier, Mmes C. Fournier et Gruny, MM. Kennel et Le Nay, Mmes Loisier et Morhet-Richaud et MM. Nougein, Paul, Pierre et Vaspart.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 64 de la loi n° 2016–1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels est abrogé.
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 171 rectifié bis.
M. Jean-Claude Requier. La loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a créé, au sein des réseaux de franchise, une instance centrale de dialogue placée auprès du franchiseur et représentant les salariés des franchisés.
Or la mise en place de cette instance nous semble en totale contradiction avec le principe même de la franchise, puisque chaque franchisé est un entrepreneur indépendant, lié par un contrat de distribution avec le franchiseur. Je le répète, la franchise repose sur une totale indépendance du franchiseur et du franchisé, ainsi qu’entre les franchisés.
La commission des affaires sociales l’avait souligné à l’époque : il n’est pas possible d’imposer à un employeur de chercher à reclasser, en cas de licenciement économique, un de ses salariés chez un autre franchisé, avec lequel il n’entretient aucun lien juridique ou économique, ou de permettre à un hypothétique délégué syndical de réseau de franchise d’accéder à une entreprise dont il n’est pas salarié.
C’est pourquoi nous proposons de supprimer la mise en place d’une instance de dialogue social dans les réseaux de franchise.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l’amendement n° 176 rectifié.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement prévoit la suppression de la mise en place d’une instance de dialogue social dans les réseaux de franchise. En effet, cette mesure remettrait en cause le statut de la franchise. Le franchisé est un commerçant indépendant du franchiseur, et qui encourt les mêmes risques économiques et supporte les mêmes responsabilités juridiques qu’un entrepreneur non franchisé.
Cet article a d’ailleurs été déclaré partiellement contraire à la Constitution en raison de l’atteinte disproportionnée qu’il représentait à la liberté d’entreprendre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission partage le point de vue des auteurs de ces amendements : cette instance est pour le moins atypique, dans le mauvais sens du terme. En effet, elle crée, au sein d’un réseau de franchise, un lien entre le franchiseur et les salariés de ses franchisés, alors qu’il n’existe aucun lien de subordination de ces derniers envers lui. Le franchiseur ne saurait être tenu pour responsable des choix faits en matière d’organisation du travail par ses franchisés, la relation qu’il entretient avec eux étant de nature purement commerciale.
Notre commission, sur l’initiative de Jean-Marc Gabouty qui était alors son rapporteur, avait supprimé cette disposition lors de l’examen de la loi Travail, et le Sénat avait partagé sa position.
Par cohérence, la commission émet donc un avis favorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable. Selon nous, ce sujet n’entrait pas dans le champ de la loi d’habilitation que vous avez votée. (Sourires sur plusieurs travées.) Nous ne l’avons jamais évoqué, et nous n’aurions même pas osé le faire !
Par ailleurs, à notre connaissance, personne n’a sollicité une telle disposition, qui est donc en quelque sorte virtuelle. Elle ne gêne pas l’action puisqu’elle n’a été mise en place nulle part. Ce n’est pas une raison de fond pour la rejeter, mais au vu du degré d’urgence de ce sujet et du fait qu’il ne relève pas du champ de la loi d’habilitation, j’y suis défavorable à l’instant t, car je ne vois pas pourquoi nous aborderions cette question aujourd’hui.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 171 rectifié bis et 176 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.
L’amendement n° 38, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 225-27 du code de commerce, les mots : « supérieur à quatre ou, dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, cinq, ni excéder le » sont remplacés par les mots : « inférieur au ».
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Cet amendement vise à renforcer la représentation des salariés dans les conseils d’administration. Celle-ci est en effet très insuffisante en France, car limitée aux seules grandes entreprises. En comparaison, en Allemagne, les salariés représentent un tiers du conseil d’administration pour les entreprises comprenant entre 500 et 2 000 salariés et la moitié des sièges dans les très grandes entreprises.
Il est ici proposé de s’inspirer du fameux « modèle allemand », en garantissant aux salariés un tiers des sièges des conseils d’administration des entreprises.
Madame la ministre, vous présentez souvent la codécision comme un modèle pour l’entreprise. Pour y parvenir, il faut commencer par renforcer la présence des salariés et de leurs organisations partout, y compris dans les instances décisionnaires où s’élaborent les modalités de gestion et la stratégie des entreprises. Les salariés ont beaucoup de choses à dire.
Notre amendement tend à transformer le plafond actuel en seuil plancher. Celle disposition constituerait un saut qualitatif indéniable en termes de représentation des salariés dans les organes de décision des entreprises et participerait de la bonne gestion des intérêts collectifs de long terme de l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Outre les dispositions introduites depuis 2013 rendant obligatoire, dans les plus grandes entreprises, la présence d’administrateurs représentant les salariés dans les conseils d’administration, les entreprises pouvaient déjà, de leur propre initiative, en accueillir.
Cet amendement vise à rigidifier cette possibilité en disposant que l’entreprise ne pourra plus le faire que si ces représentants composent au moins le tiers du conseil d’administration. Voilà une proposition qui est de nature à décourager les entreprises qui n’ont pas d’obligation, en la matière, d’expérimenter en ce sens. Si, à terme, elles pourraient décider d’augmenter le nombre d’administrateurs salariés, elles souhaiteront sans doute mettre en place progressivement cette représentation.
La commission a donc émis pour l’instant un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. La participation des représentants des salariés dans la gouvernance des entreprises est un sujet sur lequel le droit comme les mentalités évoluent au fil du temps. C’est effectivement la loi Travail d’août 2015 qui a abaissé à 1 000 salariés le seuil à partir duquel des représentants sont membres du conseil d’administration. Cette mesure est mise en œuvre depuis quelques mois puisqu’elle était applicable à partir du deuxième semestre de l’année 2017.
Avec cette loi, la France est, à notre connaissance, le deuxième pays le plus avancé en Europe, après l’Allemagne que vous avez citée, monsieur le sénateur, en termes de participation – je ne parle pas des représentants du personnel qui siègent en plus au conseil d’administration – d’administrateurs salariés.
Ce débat a été amorcé pendant les concertations avec les partenaires sociaux et avait été d’ailleurs rapidement abordé au moment de la discussion de la loi d’habilitation.
Aujourd’hui, les questions qui sont posées sont de plusieurs ordres.
On peut évoquer le sujet de la place des femmes dans les conseils d’administration des sociétés non cotées, maintenant que la loi est appliquée et qu’il y a bien 40 % de femmes dans les sociétés cotées.
La question des administrateurs salariés, quant à elle, est à la fois quantitative et qualitative, car les débats portent sur les conditions d’exercice. Pour éviter tout risque de délit d’initié, les débats du conseil d’administration sont confidentiels. Cela provoque un débat au sein de certaines organisations syndicales, car l’administrateur salarié n’est, par conséquent, plus vraiment en contact avec son organisation ou, plus exactement, ne peut pas lui donner d’informations.
Il faut évoquer, par ailleurs, la mise en œuvre dans les entreprises. Au-delà de 1 000 salariés, on trouve des entreprises de taille intermédiaire, patrimoniales, dont le conseil de gouvernance n’est souvent composé que de trois ou quatre membres. Comment les choses vont-elles se mettre en place dans ces entreprises ? Là aussi, c’est une nouveauté.
Enfin, le champ non couvert par la loi fait débat. Celle-ci excluait ainsi paradoxalement l’économie sociale et solidaire, en considérant que, dans ce domaine déjà régi par une logique paritaire, il n’était pas nécessaire de prévoir des administrateurs salariés supplémentaires. Il faut aussi évoquer – j’aurais ainsi fait le tour de la question – les entreprises à statut européen, qui échappent à cette réglementation.
Je voulais évoquer l’ensemble de ces points pour montrer que le sujet ne peut être traité par le biais d’un amendement sans avoir fait le tour de la question. Pour cette raison, la question de la gouvernance fait partie des sujets que Nicole Notat et Jean-Dominique Sénard étudieront dans le cadre de la mission que Bruno Le Maire, Nicole Belloubet, Nicolas Hulot et moi-même leur avons confiée.
J’ai simplement dressé la liste des questions, mais vous pouvez constater qu’elle est déjà assez longue… Il nous a paru prématuré d’étudier ce sujet dans le cadre des ordonnances, car nous parvenons seulement au moment où la loi s’applique aux entreprises de plus de 1 000 salariés, mais nous n’avons pas encore de recul sur la question. Il faut faire le tour de l’ensemble des questions avant de procéder à un éventuel aménagement législatif qui, s’il devait être décidé, figurerait dans le cadre du projet de loi PACTE au printemps prochain.
Pour l’ensemble de ces raisons, il est prématuré de se poser la question au travers d’un amendement. Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 102, présenté par Mme Lienemann, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 225-27-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, la première occurrence du mot : « mille » est remplacée par les mots : « cinq cents » et les mots : « dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, » sont supprimés ;
b) Les deuxième et troisième alinéas du I sont supprimés ;
c) Le II est ainsi rédigé :
« II. – Dans les sociétés qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, de cinq cents à mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français, le nombre des administrateurs représentant les salariés est au moins égal à deux.
« Dans les sociétés qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, de mille à cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français et à l’étranger, le nombre des administrateurs représentant les salariés est au moins égal au tiers des administrateurs.
« Dans les sociétés qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français et à l’étranger, le nombre des administrateurs représentant les salariés est au moins égal à la moitié des administrateurs.
« L’élection des administrateurs représentant les salariés sur le fondement du 1° du III du présent article respecte la parité conformément à l’article L. 225-28 du présent code. » ;
2° L’article L. 225-79 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « Il peut être stipulé » sont remplacés par les mots : « Il est stipulé » ;
b) Les deuxième et troisième alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Le nombre des membres du conseil de surveillance élus par les salariés correspond au tiers des membres composant le conseil de surveillance. »
L’amendement n° 103, présenté par Mme Lienemann, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 225-27-1 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I, la première occurrence du mot : « mille » est remplacée par les mots : « cinq cents » et les mots : « dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, » sont supprimés ;
2° Les deuxième et troisième alinéas du I sont supprimés ;
3° Le II est ainsi rédigé :
« II. – Dans les sociétés qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, de cinq cents à mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français, le nombre des administrateurs représentant les salariés est au moins égal à deux.
« Dans les sociétés qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, de mille à cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français et à l’étranger, le nombre des administrateurs représentant les salariés est au moins égal au tiers des administrateurs.
« Dans les sociétés qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français et à l’étranger, le nombre des administrateurs représentant les salariés est au moins égal à la moitié des administrateurs.
« L’élection des administrateurs représentant les salariés sur le fondement du 1° du III du présent article respecte la parité conformément à l’article L. 225-28 du présent code. »
L’amendement n° 104, présenté par Mme Lienemann, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 225-27-1 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, la première occurrence du mot : « mille » est remplacée par les mots : « cinq cents » et les mots : « dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, » sont supprimés ;
2° Les deuxième et troisième alinéas sont supprimés.
L’amendement n° 105, présenté par Mme Lienemann, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du I de l’article L. 225-27-1 du code de commerce est ainsi modifié :
1° La première occurrence du mot : « mille » est remplacée par les mots : « cinq cents » ;
2° Les mots : « dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, » sont supprimés.
La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter ces quatre amendements.
Mme Laurence Rossignol. J’ai bien entendu l’avis que vient d’exprimer Mme la ministre, et qui vaudra certainement pour partie réponse aux amendements nos 102, 103, 104 et 105 que je vais présenter en lieu et place de ma collègue Marie-Noëlle Lienemann.
Ces amendements visent à nous encourager à être un peu plus audacieux en matière de partage du pouvoir dans la gouvernance d’entreprise, par le biais de la codétermination et d’une meilleure participation des salariés.
En effet, cette question est aujourd’hui, me semble-t-il, centrale pour les salariés. Lorsqu’ils siègent dans les instances de gouvernance de l’entreprise, ils ont accès à des informations stratégiques qui sont souvent éludées lors de la consultation des comités d’entreprise. Leur position est davantage équilibrée face à des actionnaires qui font trop souvent valoir leurs intérêts financiers à court terme, qui ne sont pas toujours cohérents avec les intérêts de l’entreprise et les intérêts à moyen terme.
C’est la raison pour laquelle cette série d’amendements vise à renforcer la place des salariés en abaissant les seuils de présence des représentants dans les conseils d’administration aux entreprises de plus de 500 salariés, en retirant aux entreprises la possibilité de déroger à l’obligation d’avoir des représentants dans ces conseils et en établissant une progressivité du nombre de représentants en fonction de la taille des entreprises.
L’amendement n° 104 tend à abaisser les seuils de présence des représentants des salariés dans les conseils d’administration, en en faisant la norme pour toutes les entreprises de plus de 500 salariés.
Le dernier amendement vise à abaisser à 500 salariés le seuil à partir duquel la présence d’administrateurs salariés est requise, tant pour les sociétés et leurs filiales dont le siège social est fixé sur le territoire national que pour celles dont le siège social est à l’étranger.
Tous ces amendements ont pour but, puisqu’il s’agit de moderniser les relations du travail dans les entreprises et la gouvernance, de renforcer la place des salariés dans les organismes de gouvernance.
M. le président. L’amendement n° 39, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le mot : « salariés », la fin du premier alinéa du II de l’article L. 225-27-1 du code de commerce est ainsi rédigée : « ne peut être inférieur à deux, sauf dans l’hypothèse où le nombre des administrateurs mentionnés aux articles L. 225–17 et L. 225–18 est de trois. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Madame la ministre, j’ai bien entendu votre réponse. Je constate que vous citez le modèle allemand quand cela vous arrange. Pour donner de nouveaux pouvoirs de décision aux salariés, il faut attendre…
Toujours dans l’objectif de renforcer la présence des salariés dans les conseils d’administration des entreprises, nous proposons, avec cet amendement de repli, d’assurer une représentation minimale de deux administrateurs salariés dans les conseils d’administration, à l’exception des conseils composés de trois membres.
Cette disposition avait été adoptée en séance publique le 26 mai 2016 lors de l’examen de la proposition de loi visant à encadrer les rémunérations, sur proposition du groupe GDR à l’Assemblée nationale.
Je suis persuadé que ce modèle de codétermination est l’un des facteurs expliquant la réussite et la compétitivité de l’Allemagne. Démocratiser l’entreprise, c’est donc aussi faire participer les salariés à la prise de décision en améliorant leur représentation dans les instances de gouvernance. Nous ferions alors clairement un premier pas dans la bonne direction.
Nous vous proposons, par cohérence, d’adopter de nouveau cette mesure en votant cet amendement qui permettra d’améliorer la représentation des salariés dans les conseils des grandes entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Les amendements nos 102, 103, 104 et 105 prévoient un renforcement très marqué des obligations en matière de représentation des salariés dans les conseils d’administration des entreprises.
Il convient ici de se rappeler que la dernière réforme en la matière a eu lieu en 2015, sur l’initiative d’un ministre qui, avant de rejoindre le gouvernement, occupait d’éminentes fonctions au sein du groupe signataire du présent amendement : il s’agit de François Rebsamen. Il avait déjà divisé par cinq, de 5 000 à 1 000 salariés, le seuil d’effectif à partir duquel une entreprise est soumise à cette obligation, et corrigé plusieurs insuffisances de ce mécanisme de représentation introduit en 2013.
Toutefois, il avait très judicieusement laissé aux entreprises concernées un délai raisonnable pour s’adapter à une telle évolution de leur gouvernance : elles ont jusqu’au terme du sixième mois suivant la clôture de l’exercice 2017, soit potentiellement jusqu’à la mi-2018, pour procéder, lors d’une assemblée générale, aux modifications statutaires nécessaires.
Pour résumer, elles n’ont sans doute pas toutes encore accueilli des représentants des salariés dans leur conseil d’administration. Les auteurs des amendements proposent aujourd’hui d’aller bien plus loin, en touchant des entreprises de taille moyenne à la gouvernance familiale, sans période transitoire ni même évaluation de l’impact ou du nombre des entreprises concernées.
Par ailleurs, il est proposé de mettre en place, du jour au lendemain, de la codétermination à l’allemande dans toutes les grandes entreprises françaises. Si les résultats du modèle allemand sont enviables à plus d’un titre, ils ne sont pas uniquement dus aux règles de gouvernance des entreprises, qu’il n’est pas possible de reproduire telles quelles dans un cadre historique, social et économique bien différent.
Dès lors, en l’absence d’évaluation et même de mise en œuvre des réformes précédentes, il n’est pas de bonne politique de remettre l’ouvrage sur le métier sans aucune concertation.
La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements nos 102, 103, 104, 105 et 39.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je me suis longuement expliquée, lors de la discussion de l’amendement précédent, sur l’analyse que nous faisons de la question de la gouvernance. Je ne reviendrai donc pas sur le sujet et vous comprendrez donc mon avis défavorable sur les amendements nos 102, 103, 104, 105 et 39.
Je veux revenir sur un point : je ne peux pas laisser dire que tous les actionnaires ont une vision de court terme, car ce n’est pas vrai. Je pense notamment aux entreprises de taille intermédiaire, celles de plus de 500 salariés, qui sont visées dans le dernier amendement, parmi lesquelles on trouve une majorité d’entreprises patrimoniales, familiales, qui sont justement dans une logique de long terme. Cet argument n’est donc pas valable, même si cela ne signifie pas qu’il n’y a pas des choses à faire en termes de dialogue social ou de gouvernance. La question est prématurée, mais on pourra toujours l’aborder à l’avenir.
Ce serait un mauvais message, incompréhensible pour les entreprises de leur dire qu’elles sont obsédées par le court terme. Une des forces de l’Allemagne et de l’Italie, c’est le nombre important de leurs entreprises patrimoniales et familiales – elles peuvent être petites, moyennes ou grandes –, qui raisonnent à long terme.
Nicole Notat et Jean-Dominique Sénard traiteront, parmi les sujets de leur mission, de la question du renforcement des entreprises, quelle que soit leur taille, et de leur gouvernance, dans une vision de long terme.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Madame la ministre, ne faites pas semblant de ne pas avoir compris de quoi je parlais précédemment ! Quand j’évoque les actionnaires qui ont une vision à court terme des entreprises, je ne parle bien évidemment pas des entreprises à caractère familial, dans lesquelles il y a une totale homogénéité entre l’entreprise et l’actionnariat.
L’une des spécificités du capitalisme financiarisé est que les intérêts des entreprises sont justement déterminés par des groupes d’actionnaires, qui n’ont aucun rapport avec la société – je prendrai l’exemple classique des fonds de pension, qui est sans doute un peu trop utilisé, mais qui correspond tout de même à une réalité. Dans ces entreprises, les actionnaires ne se préoccupent ni de l’entreprise, ni même de la marque, ni du savoir-faire, ni des salariés.
Voilà ce que je voulais dire, mais vous le saviez déjà !
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je trouve assez cocasse que ce soit le parti communiste qui propose la cogestion ! D’après mes quelques réminiscences historiques, cela n’a pas toujours été le cas…
Pour notre part, dans notre groupe et dans le parti auquel je n’ai cessé d’appartenir, nous avons toujours souhaité que puisse prospérer dans notre pays cette belle idée de cogestion, de codétermination, de mitbestimmung comme disent les Allemands.
Le problème venait du fait que les esprits n’étaient pas prêts, que ce soit d’ailleurs parmi les syndicats ou au sein de nos assemblées. Je me réjouis pour ma part que, comme M. le rapporteur l’a rappelé, nous ayons pu voter la loi Rebsamen. Elle a permis d’ouvrir largement cette possibilité, puisque le seuil a été abaissé à 1 000 salariés. Alors laissons prospérer cette idée – je rejoins Mme la ministre sur ce point. Il faut simplement lui faire la publicité nécessaire.
Je souhaite que le Gouvernement et vous-même, madame la ministre, puissiez faire état des premiers résultats, notamment du succès que cette idée pourrait rencontrer dans les années qui viennent auprès des entreprises.
On pourrait peut-être s’accorder un certain délai pour tirer le bilan de cette idée, qui me paraît non seulement généreuse, mais aussi – je suis d’accord avec vous – très utile pour renforcer la compétitivité des entreprises.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je trouve que la chute du propos de notre collègue était meilleure que l’attaque. Il a conclu en disant qu’il était d’accord avec ce que nous avons dit. Je le souligne, parce que nous sommes en 2018 et que, en tant que membre de la commission des affaires sociales, notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe entend le souci constant que Dominique Watrin et moi-même avons de dénoncer un système qui, je le redis, ne nous convient pas – le système capitaliste –, et d’essayer de construire dans le même temps des propositions alternatives. Il est tout de même un peu cavalier de nous attaquer en disant que le parti communiste n’a pas toujours défendu ce genre de position. (MM. Jean-Marie Vanlerenberghe et Michel Canevet sourient.)
Eh bien oui, nous n’avons pas toujours été parfaits,…
M. Gérard Longuet. Ça, c’est vrai !
Mme Laurence Cohen. … mais maintenant nous le sommes ! (Rires.) Nous voulions que ce soit dit dans l’hémicycle, pour montrer que finalement nous cheminons. C’est bien parce que vous l’avez – enfin ! – noté dans votre intervention…
Je voulais faire ce petit clin d’accueil afin de poursuivre nos débats dans de bonnes conditions ! (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 39.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 4 bis
L’article L. 2231-5-1 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils sont publiés dans une version ne comportant pas les noms et prénoms des négociateurs et des signataires. » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après la première occurrence du mot : « accord », sont insérés les mots « de groupe, interentreprises, d’entreprise ou d’établissement » ;
b) (Supprimé)
c) La dernière phrase est supprimée.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. L’article 4 bis prévoit que les accords et conventions publiés sur la base de données publiques ne divulguent pas l’identité des négociateurs et signataires des accords collectifs. Nous partageons cette volonté de rendre anonymes ces accords accessibles à toutes et tous. C’est un moyen de protéger les personnes concernées, et cela nous semble d’autant plus important à un moment – cela a été dit à plusieurs reprises dans cet hémicycle, sur différentes travées – où la qualité de syndicaliste expose à des conditions parfois difficiles de travail et d’exercice du mandat.
J’en profite pour insister sur un sujet que l’article 4 bis du projet de loi effleure : celui de la répression des syndicalistes dans les entreprises, déjà souligné par mon collègue Fabien Gay.
L’avis du Conseil économique, social et environnemental de juillet 2017 intitulé « Repérer, prévenir et lutter contre les discriminations syndicales » en a démontré les conséquences, tout comme l’enquête « Relations professionnelles et négociations d’entreprise » produite par la DARES, la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, en 2011, qui met en évidence que les délégués syndicaux subissent une pénalité salariale de 10 %.
Malgré la protection dont bénéficient les syndicalistes avec l’obligation de l’autorisation préalable de l’inspection du travail pour toute demande de licenciement ou de transfert du contrat de travail de la part de l’employeur, ils demeurent victimes des pressions d’un certain nombre de dirigeants d’entreprise.
On ne peut à la fois affirmer que l’on regrette la faiblesse du syndicalisme en France et refuser d’affronter la question des discriminations syndicales qui découragent la syndicalisation.
Il faut le rappeler ici, le principal frein à l’engagement, c’est bien la peur de perdre son emploi, la crainte des représailles et des effets négatifs sur la carrière.
Derrière les cas de discriminations, ce sont des femmes et des hommes, des carrières brisées et trop souvent hélas, des drames humains, avec des effets sur la santé et sur la famille.
J’insiste de nouveau sur cette question à ce moment de notre débat car nous affirmons, avec gravité et sérieux, notre souhait que le Gouvernement s’appuie a minima sur les préconisations de l’avis du CESE pour faire progresser le droit en matière de lutte contre les discriminations syndicales.
En attendant, et il est important que nous puissions le souligner ici, nous voterons cet article 4 bis qui nous semble aller dans le bon sens.
M. le président. L’amendement n° 11 rectifié bis, présenté par Mme Imbert, MM. Cornu, Vaspart et Cardoux, Mmes Eustache-Brinio, Lassarade et L. Darcos, MM. Morisset, Paccaud et Chaize, Mmes Micouleau et Lamure, MM. Kennel, Pierre, B. Fournier, Lefèvre et Danesi, Mme Puissat, MM. Cuypers et Gremillet, Mme Deromedi, MM. Mayet, Huré, Paul, D. Laurent, Bazin et Babary, Mme Berthet, MM. Rapin et Laménie et Mme Bruguière, est ainsi libellé :
Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
…) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « L’employeur peut occulter les éléments portant atteinte aux intérêts stratégiques de l’entreprise. » ;
…° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les accords d’intéressement, de participation, les plans d’épargne d’entreprise, interentreprises ou pour la retraite collectifs ainsi que les accords mentionnés à l’article L. 1233-24-1 et à l’article L. 2254-2 ne font pas l’objet de la publication prévue au présent article. »
La parole est à Mme Corinne Imbert.
Mme Corinne Imbert. Dans le cadre de la loi n° 2016–1088 du 8 août 2016, le législateur a prévu la publication de tous les accords collectifs.
Or la sensibilité des données économiques et sociales contenues dans les accords d’intéressement, de participation, les plans d’épargne d’entreprise, interentreprises ou pour la retraite collectifs, ainsi que les accords collectifs déterminant le contenu d’un plan de sauvegarde de l’emploi ou les accords de performance sociale et économique, s’oppose de fait à leur publication intégrale, notamment au titre de la protection du secret commercial.
Aussi, l’obligation de publication conduit les parties à mettre en œuvre la faculté d’occultation de telle façon que la publication ne présente plus d’intérêt. À ce titre, il apparaît comme souhaitable d’exclure ces textes pour concentrer l’obligation de publication sur des documents qui présentent un intérêt pour la transparence de la vie économique et du dialogue social.
Enfin, il paraît souhaitable de donner la faculté à l’employeur d’occulter des parties qui porteraient atteinte aux intérêts stratégiques de l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je voudrais rebondir sur deux points.
Vous avez évoqué, madame Cohen, la question de l’anonymat des signataires. Elle figurait effectivement dans le rapport du CESE sur la lutte contre les discriminations. Ce n’est pas la seule mesure que nous avons retenue. Je rappelle les fameux observatoires départementaux : je regrette que vous les ayez supprimés. Je sais que je suis un peu têtue sur la question…
Pour revenir au sujet que vous évoquiez, madame Cohen, il est vrai qu’il est important que cette transparence, dont le but est de créer une émulation entre entreprises, ne soit pas finalement pénalisante dans un système concurrentiel. En effet, on y introduit forcément, quand on parle de PSE, d’intéressement, de participation ou de certains accords, des données stratégiques et confidentielles qui sont partagées avec les partenaires sociaux, mais qui n’ont pas vocation à l’être avec la concurrence, française ou internationale.
C’est pourquoi le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui exclut les accords de PSE et d’épargne salariale, lesquels comprennent de nombreuses données stratégiques et confidentielles, et qui permet d’occulter certaines parties des accords publiés lorsqu’elles sont de nature à nuire à l’entreprise et donc in fine et à l’employeur et aux salariés.
M. le président. Je mets aux voix l’article 4 bis, modifié.
(L’article 4 bis est adopté.)
Articles additionnels après l’article 4 bis
M. le président. L’amendement n° 56, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 4 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1251-6 du code du travail, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 précitée, est ainsi rédigé :
« Art. L. 1251–6. – Un utilisateur ne peut faire appel à un salarié temporaire que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas suivants :
« 1° Remplacement d’un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail et pour pourvoir directement le poste de travail du salarié absent ;
« 2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise. Au titre de ce motif, le nombre de salariés temporaires ne peut excéder 10 % de l’effectif occupé en moyenne au cours de l’année civile précédente dans les entreprises d’au moins onze salariés. Ce nombre obtenu est arrondi à l’unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d’ancienneté dans l’entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée avec l’entreprise utilisatrice. »
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Nous proposons, au travers de cet amendement, de mieux encadrer les conditions de recours au travail intérimaire.
Le travail intérimaire a connu, en septembre dernier, une progression de 12 %, et il a encore progressé, pour le trente-cinquième mois consécutif, en octobre 2017, à hauteur de 9,2 %.
Le développement de l’intérim concerne le transport et la logistique, mais également les services ; aussi cet amendement vise-t-il à encadrer le recours, qui nous semble un peu trop systématique, au contrat de travail intérimaire.
Rappelons également que l’on recense deux fois plus d’accidents du travail chez les intérimaires que chez les autres salariés des entreprises qui y recourent.
Il est donc essentiel à nos yeux d’encadrer strictement le travail intérimaire, afin de faire en sorte qu’un utilisateur ne puisse faire appel à un salarié temporaire que pour l’exécution d’une mission précise et limitée dans le temps, et seulement pour remplacer un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail, ou pour faire face à un accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Le sujet de l’utilisation des contrats courts, mon cher collègue, est au centre des négociations actuelles entre les partenaires sociaux sur l’assurance chômage. Nous pourrons donc, je l’espère, en reparler au printemps ou un peu plus tard, lors de l’examen du projet de loi concerné.
La commission a donc émis un avis défavorable, en attendant de pouvoir en discuter dans le cadre dudit projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il y a, d’une part, le droit et, d’autre part, le contexte, la dynamique, où nous nous trouvons.
Pour ce qui concerne le droit, je rappelle que la loi prévoit que le recours au contrat de travail temporaire ne peut avoir pour objet ou pour effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Il faut faire respecter ce droit.
En même temps, le but des contrats de travail temporaire est, par définition, de faire face à un surcroît d’activité ou à l’absence d’un salarié, dans des cas limitativement énumérés par le code du travail et qui varient évidemment selon l’activité, mais aussi selon la période et le cycle de vie de l’entreprise.
Il est donc très difficile, et même impossible, de fixer un quota général, qui serait beaucoup trop élevé dans certains cas et ne le serait pas assez dans d’autres.
En revanche, lorsque j’ai saisi les partenaires sociaux de la réforme de l’assurance chômage, je leur ai clairement demandé d’avoir une réflexion et de faire des propositions sur la régulation des contrats courts. En effet, comme vous, je pense que le recours aux contrats courts, c’est-à-dire à l’intérim et au CDD, est aujourd’hui excessif dans certaines entreprises. Je dis « dans certaines entreprises », parce que, selon les secteurs d’activité, et même au sein d’un même secteur, il peut y avoir, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, des variations extrêmes.
Cela a deux conséquences.
La première, c’est que, aujourd’hui, parmi les 19 millions de salariés du secteur privé, 85 % des contrats ont une durée indéterminée – cette proportion est assez stable –, mais, vous le savez, le nombre d’embauches, le flux entrant, est aussi un flux sortant puisqu’il y a une majorité de propositions d’emploi en CDD ou en intérim.
Il faut profiter du contexte de croissance dans lequel nous sommes, qui offre des perspectives plus grandes d’emploi solide, robuste, pour prévoir des mécanismes, incitatifs ou correctifs, à destination des entreprises, afin d’éviter, là où c’est possible, là où cela a du sens, l’excès de contrats courts.
La seconde conséquence concerne l’assurance chômage, car les contrats courts pèsent pour plus de la moitié de ses coûts.
C’est pour cela que j’ai « mis la balle », si j’ose dire, dans le camp des partenaires sociaux, qui doivent revenir dans le courant du mois de février avec des propositions. Dans le cadre de l’examen du projet de loi sur l’apprentissage, la formation professionnelle et l’assurance chômage, qui vous sera soumis au printemps, nous aurons à traiter ce sujet.
Par conséquent, pour l’instant, je suis défavorable à cet amendement ; c’est une bonne question, mais ce n’est ni la bonne réponse ni tout à fait le bon moment. Nous en reparlerons…
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Je veux remercier Mme la ministre de nous informer de ce qui est sur la table des négociations ; il est très important d’avoir ce débat.
Simplement, je veux aussi lui dire que ce que l’on constate sur le terrain ne correspond pas exactement à ce qu’elle nous dit ; le phénomène de l’intérim est développé de manière exagérée. (Mme la ministre opine.) Il suffit d’aller dans les entreprises de production – je suis pour ma part allé dans la zone de Capécure, à Boulogne-sur-Mer, dans le département dont je suis élu, mais on peut aussi aller dans des entreprises automobiles – pour voir que, de manière permanente, il y a 40 %, voire plus, de contrats d’intérim dans ces entreprises.
Le système est d’autant plus facile à identifier comme étant organisé que les boîtes d’intérim sont présentes dans l’entreprise pour planifier ce roulement, au détriment des salariés.
Bien sûr, des choses ont été tentées dans des lois précédentes – on a ainsi instauré le CDI intérimaire –, mais ce que l’on entend, dans les retours d’expérience des personnes concernées, c’est que cela n’a pas réglé leurs problèmes d’insertion dans la société. Quand ils vont dans une banque ou qu’ils cherchent un logement, on leur répond que, sur leur contrat, figure le mot « intérim ». (Mme la ministre opine.)
C’est donc une vraie question (Mme la ministre opine de nouveau.) et il faut véritablement que, dans les semaines et les mois qui viennent, des réponses soient apportées. Nous en proposions une au travers de cet amendement, et nous la reproposerons ou en proposons d’autres, en fonction du déroulement des négociations.
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. C’est un sujet important.
Je veux simplement appeler votre attention, puisque ce sujet sera évoqué très bientôt, sur le fait qu’il ne faut pas prévoir trop de restrictions au recours au travail intérimaire, surtout quand on évoque une limitation à 10 %, pour les entreprises comptant au moins onze salariés, du recours à ces contrats ; cela représenterait des contraintes absolument terribles pour les petites entreprises.
Je rappelle les difficultés que rencontrent un certain nombre de chefs d’entreprise pour trouver les collaborateurs dont ils ont besoin. Ces entreprises ont de plus en plus de difficultés à accepter des commandes – c’est par exemple le cas, en Bretagne, du secteur de la construction navale –, tout simplement parce qu’elles n’arrivent pas à trouver la main-d’œuvre nécessaire.
Le recours au travail intérimaire permet donc, d’une part, d’assurer la livraison d’un certain nombre de commandes, de fournitures, de marchés et, d’autre part, d’identifier les collaborateurs pouvant être recrutés par les entreprises, parce qu’ils ont su démontrer qu’ils avaient les qualités correspondant aux besoins de celles-ci.
Par conséquent, il faut être très attentif à la nécessité de ne pas instaurer de contraintes trop draconiennes, car cela aurait un effet contraire à celui qui est recherché : que bon nombre de nos compatriotes puissent retrouver un emploi.
M. le président. L’amendement n° 3 rectifié quater, présenté par MM. Chasseing, Luche, Cigolotti et Delcros, Mme F. Gerbaud, M. Longeot et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 4 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 2312-1, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « soixante-quinze » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 2312-2, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « soixante-quinze » ;
3° À l’article L. 2312-3, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « soixante-quinze ».
La parole est à M. Alain Marc.
M. Alain Marc. Cet amendement tend à relever de 50 à 75 salariés le seuil de déclenchement des nouvelles obligations des entreprises, notamment en matière d’attributions du comité social et économique, le CSE.
En effet, le franchissement de seuil entraîne de nombreuses obligations supplémentaires, pesant lourdement sur la vie économique et professionnelle d’une entreprise. Cette situation conduit de nombreux chefs d’entreprise à limiter la croissance de leur entreprise ou à développer d’autres sociétés en parallèle pour rester sous ce seuil. Ainsi, la France compte 2,4 fois plus d’entreprises de 49 salariés que d’entreprises de 51 salariés. Le relèvement de ce seuil à 75 salariés serait une mesure favorable à la création d’emplois.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je veux d’abord rappeler que la mise en place du CSE dans toutes les entreprises employant au moins 11 salariés atténuera probablement la rigueur du passage du seuil de 50 salariés.
Je rappelle aussi que ce passage déclenche de très nombreuses obligations qui, elles, ne sont pas liées directement au droit du travail ; ce sont des obligations en matière environnementale, fiscale et sociale.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’ordonnance qui fusionne les trois instances d’information et de consultation en un comité social et économique aura déjà un effet assez fort sur ce seuil de 50 salariés. D’ailleurs, ce seuil était encore plus sensible dans les entreprises de cinquante à soixante salariés – j’en ai rencontré beaucoup –, dans lesquelles c’étaient les mêmes personnes qui siégeaient dans ces instances ; cela engendrait des coûts et des complexités énormes qui seront supprimés par la fusion.
Par ailleurs, le seuil de 50 salariés, s’il entraîne des devoirs, entraîne aussi des droits ; je pense notamment au droit à bénéficier des activités sociales et culturelles, très populaire en France. Avant de supprimer ce droit pour les salariés d’entreprises de plus de 50 salariés, il faudrait quand même y réfléchir à deux fois ; même s’il s’agit de sommes modestes, dans une petite entreprise, c’est quelque chose qui est très apprécié.
Vous posez donc une question plus vaste que le sujet de la représentation : la question des seuils en général. Or, comme j’ai eu l’occasion de le dire hier…
M. Alain Milon, rapporteur. C’est nous qui le disions ! (Sourires.)
Mme Muriel Pénicaud, ministre. … – c’était peut-être vous, monsieur le rapporteur, en tout cas, quelqu’un en a parlé (Nouveaux sourires.) –, cette question de la multiplicité des seuils sociaux et fiscaux, qui rend le paysage très compliqué, et des effets de seuils fera partie, sans engagement, des éléments qui seront étudiés dans le cadre du projet de loi PACTE de mon collègue Bruno Le Maire. Vous aurez donc l’occasion d’y revenir, probablement au printemps.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 156, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 4 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l’article L. 3346-1 du code du travail ainsi rédigé :
« Le conseil d’orientation, présidé par le Premier ministre ou par son représentant, comprend deux députés et deux sénateurs désignés par leur assemblée respective. Un décret détermine la composition des autres membres du conseil d’orientation et ses modalités de fonctionnement, dans des conditions de nature à assurer son indépendance et sa représentativité et à garantir la qualité de ses travaux. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il s’agit de prendre acte des dispositions de l’article 13 de la loi organique n° 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique. Ce texte impose en effet, au nom de la séparation des pouvoirs, le recours à la loi pour désigner un député ou un sénateur dans un organisme extraparlementaire.
Aujourd’hui, nous ne disposons pas de cette base légale pour compléter la composition du Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié, le COPIESAS. Ce conseil est important, et je vais le saisir très rapidement, dans les tout prochains jours, de la réforme de l’intéressement, de la participation et de l’épargne salariale. Le Sénat y sera d’ailleurs éminemment représenté par Mme Pascale Gruny et M. Jean-Louis Tourenne, qui alimenteront ses travaux au nom de la Haute Assemblée.
Ces travaux sont menés, avec les partenaires sociaux, à la fois par mon ministère et par Bercy, compte tenu des impacts sociaux et fiscaux de la réforme. Le but de celle-ci est de réfléchir aux moyens d’étendre progressivement le bénéfice de l’intéressement et de la participation à tous les salariés, contrairement à ce qui existe aujourd’hui. Il s’agit aussi de clarifier et de simplifier la formule de la participation, qui, n’étant pas lisible par les salariés, ne fait pas œuvre pédagogique. En effet, la formule est tellement complexe qu’elle ne permet pas de mesurer l’impact de l’action des salariés sur le montant de la participation. Il s’agit donc d’améliorer la transparence.
Il peut y avoir d’autres sujets à examiner, mais je vais saisir le COPIESAS très rapidement, dès que la loi sera adoptée, parce que nous aurons un travail important à réaliser, dans les mois qui viennent, sur ce sujet.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement. Elle ajoute que nos collègues Pascale Gruny et Jean-Louis Tourenne, qui sont désignés pour siéger à ce conseil, y feront un binôme percutant… (Sourires.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4 bis.
Article 5
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail est ratifiée.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l’article.
M. Dominique Watrin. L’ordonnance ratifiée par cet article 5 intègre un dispositif qui commence à faire parler de lui, celui de la rupture conventionnelle collective. Le fait que des entreprises aussi diverses que PSA, Pimkie, Monoprix ou d’autres annoncent le recours à cette procédure indique que cet outil particulier de gestion des effectifs risque de devenir un outil de gestion ordinaire des entreprises. Cela n’est pas sans conséquence, tant s’en faut.
En effet, il faut tout de même revenir sur l’aspect essentiel de ce dispositif, à savoir le fait qu’il peut être déclenché sans justification économique avérée. C’est donc une procédure de suppression collective d’emplois sans avoir à prouver de difficultés économiques. Ainsi, une entreprise présentant une situation financière florissante, de même qu’une entreprise qui rencontrerait quelques difficultés, pourra proposer un accord de rupture conventionnelle collective aux organisations syndicales représentatives.
Il nous semble que cette disposition pose une question plus large sur le sens même qui doit motiver une loi. Ici, la loi n’est plus l’expression de l’intérêt général, mais un outil de mise en jeu d’un intérêt particulier, celui de l’entreprise, singulièrement du point de vue de sa rentabilité financière et de la rémunération des actionnaires. Il serait tout de même bon d’y réfléchir, au moment où de grands groupes, et non des moindres, annoncent des réductions massives d’emplois, sans susciter, il faut bien le dire, beaucoup de réactions de la part du Gouvernement. Nous ne faisons pas ici le procès de toutes les entreprises, nous faisons bien la distinction entre les petites entreprises et ces grands groupes, qui manifestent, selon nous, une certaine irresponsabilité sociale dans notre pays, lequel compte déjà 6 millions de demandeurs d’emploi.
Peut-être me rétorquerez-vous que la rupture conventionnelle n’est pas vraiment quelque chose de nouveau par rapport à ce qui a pu exister auparavant – je pense par exemple aux plans dits « Fonds national de l’emploi » ou FNE, des années 1980. Néanmoins, il y a tout de même deux différences fondamentales : premièrement, il n’y a pas à donner de motivations économiques ; deuxièmement, l’allocation et les garanties données aux salariés sont plus faibles.
C’est pourquoi nous nous opposons à ce nouveau dispositif.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 40 est présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 106 est présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 40.
Mme Laurence Cohen. La rupture conventionnelle collective viserait à éviter le traumatisme du licenciement mais, mon collègue Dominique Watrin l’a démontré, il s’agit au contraire d’un appel d’air à licencier plus facilement, en limitant, prétendument, les risques de conflit social.
Depuis la publication du décret, le 27 décembre dernier, PSA, Pimkie, Le Figaro, les Inrocks ou encore la Société Générale ont annoncé les premières RCC.
Chez PSA, où 1 300 postes doivent être supprimés, la direction a décidé d’augmenter les primes de départ pour les salariés franciliens, ce qui laisse présager une fermeture de l’usine de Saint-Ouen. Chez Pimkie, pas de signature de la convention, mais 208 postes sont supprimés. Pour les autres entreprises que j’ai citées, l’accord n’est pas encore effectif.
Le Gouvernement met entre les mains du patronat, on le voit bien, un outil permettant de procéder à des ruptures conventionnelles collectives de contrats de travail nettement plus facilement que dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi. On se retrouve donc, en quelque sorte, devant un faux choix, entre un plan de départs volontaires et une fermeture d’entreprise.
Vous nous dites qu’il y aurait un garde-fou, le contrôle des RCC par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, la DIRECCTE, censée vérifier la conformité des accords aux textes et donner son avis dans les quinze jours – c’est cet avis qui validera la rupture conventionnelle collective, ne laissant plus de possibilité pour les syndicalistes d’attaquer ensuite cette RCC devant le juge. Quinze jours pour donner un avis, alors que, depuis 2016, les missions de la DIRECCTE ont été sans cesse accrues, leurs effectifs étant, dans le même temps, réduits ! Comment voulez-vous que les agents puissent véritablement contrôler la conformité d’une RCC en quinze jours ? Comment peut-on penser sauver l’emploi en facilitant les licenciements de manière massive ? Si ce n’était pas aussi dramatique, on pourrait parler de fable grotesque.
J’appelle votre attention, mes chers collègues, sur le fait que les entreprises que j’ai nommées ont annoncé des RCC alors que la Haute Assemblée n’a pas encore adopté cette ordonnance. On imagine ce que cela donnera si nous l’adoptons. C’est pourquoi nous demandons, au travers de cet amendement, la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 106.
M. Jean-Louis Tourenne. L’ordonnance comporte des dispositions telles que la barémisation des indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, la restriction au territoire national du périmètre d’appréciation des licenciements économiques, la création de la rupture conventionnelle collective permettant d’éviter un plan social et les obligations de reclassement, et la généralisation du contrat de chantier – le CDI, pour « contrat à durée imprévisible » –, pour ne parler que du plus visible.
Cet article constitue donc un élément central de la réforme du droit du travail allant dans le sens d’une précarisation du salariat, au travers de la forme des contrats de travail et des modalités de la rupture de ceux-ci. Le raisonnement est que, plus les contrats seront précaires, plus les employeurs pourront facilement licencier, et plus ils embaucheront. Votre postulat est démenti par le réel depuis plusieurs décennies, à bas bruit d’abord, puis plus clairement ; la précarisation se répand et le chômage ne diminue pas.
En ce qui concerne la rupture du contrat, le patronat veut à tout prix éviter la judiciarisation ; à tout prix, mais pas à n’importe quel coût. Il est certain que la suppression de la prime de précarité afférente aux CDD, grâce à l’instauration du contrat de chantier, pourra représenter une affaire intéressante ; il suffira, à chaque nouveau projet, d’embaucher et de débaucher sans formalité inutile.
Le sommet est atteint avec la barémisation es dommages et intérêts en cas de licenciement abusif ; dommage, préjudice. Vous nous demandez de valider un déni de droit, puisque le préjudice sera pré-évalué au bénéfice de l’employeur, que le pouvoir du juge sera réduit, et surtout que le principe de droit selon lequel le préjudice doit être évalué et indemnisé individuellement est liquidé.
En quoi tout cela va-t-il permettre le développement de l’emploi ? C’est vraiment prendre prétexte de la situation actuelle pour transformer, au profit exclusif des employeurs, la relation et le droit du travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La troisième ordonnance permet principalement de simplifier et de moderniser les règles du droit du travail en matière de licenciement.
Le barème comprend de nombreuses exceptions et permettra aux juges, à l’intérieur des planchers et plafonds fixés par la loi, d’individualiser le montant de l’indemnité allouée à un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse.
La définition d’un périmètre national pour apprécier les causes d’un licenciement économique met fin à une exception française en Europe, qui n’était guère justifiée d’un point de vue économique, et qui nuisait à l’attractivité de notre pays.
Enfin, je rappelle que la rupture conventionnelle collective instaurée par cette ordonnance ne peut être utilisée que s’il y a un double accord : tout d’abord, un accord collectif, puis un accord individuel des salariés concernés, qui doivent se porter candidats auprès de l’employeur pour en bénéficier. J’ajoute que la RCC doit ensuite être validée par la DIRECCTE.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur les amendements identiques nos 40 et 106.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement émettra bien sûr un avis défavorable, cela paraît évident.
Je ne reviendrai pas sur tous les points qu’a évoqués M. le rapporteur, mais je veux revenir un moment sur la rupture conventionnelle collective. Comme il s’agit d’un élément nouveau, je souhaite être sûre, là encore, que nous en ayons tous la même compréhension.
La rupture conventionnelle collective, dont le nom et l’esprit s’inspirent de l’expérience de la rupture conventionnelle individuelle, c’est-à-dire d’un accord des parties, n’est pas du tout la solution à toutes les situations. Il existe des situations dans lesquelles elle ne s’applique pas, notamment lorsqu’il n’y a pas eu d’anticipation, de préparation, quand le dialogue social ne le permet pas, ou quand l’entreprise a le dos au mur et qu’elle est malheureusement obligée de recourir à un plan de sauvegarde de l’emploi, un PSE, avec certains départs volontaires ou non – je rappelle que le PSE constitue, après information et consultation des instances représentatives, une décision unilatérale de l’employeur, prise sur le fondement de difficultés économiques.
Il s’agit, dans le cas de la rupture conventionnelle collective, d’un contexte différent, à plusieurs égards, d’un contexte où il y a anticipation, accompagnement des évolutions et des réorganisations. Cela ne signifie pas forcément une restructuration dramatique ; au contraire, le but est plutôt d’éviter la brutalité du licenciement économique, en trouvant un accord entre les parties afin de pouvoir anticiper ou accompagner les évolutions et réorganisations nécessaires, en fonction des marchés et des métiers de l’entreprise.
Concrètement, il y a trois conditions cumulatives à la signature d’une RCC. La première condition est l’existence d’un accord majoritaire entre les syndicats de salariés et l’employeur – je rappelle que ce n’est pas nécessaire pour le PSE.
La deuxième condition est que les départs soient strictement volontaires, alors que, dans le cas d’un PSE, il peut y avoir une partie de volontariat et une partie de licenciements ; en l’occurrence, une rupture conventionnelle collective ne peut concerner que des départs volontaires, même si des mesures d’accompagnement, de reclassement, de formation, de mobilité doivent être prévues, contrairement à ce que la presse a indiqué – la chose est nouvelle et probablement encore mal connue.
La troisième condition est l’homologation de l’accord par la DIRECCTE, qui vérifie que les deux premières conditions ont bien été remplies – il y a un accord majoritaire, d’une part, et un strict volontariat, d’autre part –, et que l’information fournie aux salariés est bien complète, précise, donc que le volontariat des salariés et l’accord des syndicats sont sûrs.
L’actualité des dernières semaines, vous l’avez évoqué, a déjà montré – je pense que cela se confirmera – que ce qui est prévu dans les ordonnances est robuste, c’est-à-dire que le droit correspond à l’intention.
En effet, dans le cas de PSA, les syndicats ont, dans leur très grande majorité, signé cet accord et il y aura des volontaires – de toute façon, s’il n’y a pas de volontaire, il ne se passe rien, on ne peut pas transformer cet accord en licenciement. Les contreparties étant réelles – il y a eu un équilibre dans cette négociation –, les syndicats et les salariés sont positifs sur le sujet.
En revanche, dans le cas de Pimkie, les syndicats ont refusé l’accord, et c’est assez logique s’agissant d’une fermeture de sites ; logiquement, les ruptures conventionnelles collectives ne sont pas adaptées aux fermetures de sites (M. Julien Bargeton opine.), puisque j’imagine mal que, dans un site que l’on ferme, 100 % des salariés sont volontaires – cela arrivera peut-être mais, pour ma part, je ne connais pas de cas… Assez logiquement, les syndicats ont refusé, donc l’entreprise ne peut pas faire de rupture conventionnelle collective.
Il faut donc bien comprendre qu’il ne s’agit pas d’un acte unilatéral, mais d’un acte de négociation, qui s’inscrit dans la logique du dialogue social et économique dont on parle en permanence dans les ordonnances. Cela ne couvrira pas tous les cas, cela s’adaptera plutôt aux entreprises ayant fait preuve d’anticipation et d’accompagnement. Cela permettra d’éviter que, ultérieurement, certaines décisions n’ayant pas été prises, les choses se passent de manière beaucoup plus brutale et pénalisante. En effet, quand l’entreprise est dos au mur, un plan social reste toujours un traumatisme et reste toujours brutal. Même quand il est bien accompagné, il reste difficile à vivre dans l’entreprise.
La rupture conventionnelle collective n’est donc pas plus que cela, et elle n’est pas moins que cela. Ce n’est pas la solution à toutes les situations, mais c’est un complément à notre dispositif, qui repose intégralement sur un dialogue social de haute qualité. Cela prendra en compte les réalités de l’entreprise et les aspirations des salariés. Évidemment, dans l’évaluation des ordonnances, on suivra de très près cet « objet nouveau », si j’ose dire, et nous en rendrons compte au Parlement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Votre discours est séduisant, madame la ministre, et il correspond d’ailleurs au contenu des ordonnances ; c’est parfaitement conforme et je ne contesterai pas ce que vous avez dit.
Je veux juste préciser que j’ai rencontré, la semaine dernière, la directrice du site de PSA à Rennes, où est en train de se mettre en œuvre la rupture conventionnelle collective. Le raisonnement de mon interlocutrice est le même que le vôtre, elle nous laisse entendre qu’il s’agit de volontariat, que les syndicats doivent être d’accord, bref qu’il y a une préparation.
Toutefois, je voudrais que vous m’ôtiez une angoisse ou que vous essayiez de voir quelles sont les perspectives possibles. Que se passe-t-il en réalité ? PSA, en tout cas à Rennes, met en place une nouvelle chaîne, qui fonctionnera complètement différemment de la chaîne actuelle et qui suppose des compétences, des connaissances et une formation particulières.
Or cette entreprise considère que, pour un certain nombre de salariés, cette formation sera trop difficile, compte tenu de leur niveau ou de leur âge, et, plutôt que d’engager un processus de formation, l’entreprise préfère proposer à ces salariés de s’en aller avec une prime et un certain nombre d’accompagnements, que vous avez évoqués il y a quelques instants. Dans le même temps, PSA recrutera un certain nombre de salariés qui, eux, auront des capacités à appréhender le métier beaucoup plus vite que les autres.
On assiste donc à une espèce de remplacement progressif des salariés âgés par des salariés plus jeunes, et cela risque de s’étendre parce qu’il est vrai que ce modèle peut intéresser des chefs d’entreprise.
Pourtant, c’est tout de même le chômage qui attend ceux qui vont partir (Mme la ministre fait un signe de dénégation.), même s’ils sont d’accord. Il y aura tout de même, chez les gens à qui l’on propose de s’en aller, une perte d’estime de soi, un sentiment de ne pas avoir été à la hauteur.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Jean-Louis Tourenne. Je crois qu’il y a donc un aspect très pervers dans cette affaire.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Pour venir d’un bassin d’emploi où se trouve PSA, je peux vous dire que les bénéfices de cette entreprise sont au beau fixe. Après quelques années où elle risquait d’être dissoute, l’intervention du gouvernement précédent nous a permis de sauver cette entreprise. Aujourd’hui, avec la 3008 et la 308, celle-ci connaît une situation tout à fait florissante.
C’est à ce moment que l’on met en place la rupture conventionnelle collective, qui est un PSE allégé. (Mme la ministre hoche la tête en signe de dénégation.) Il faut le dire ! Appelons les choses par leur nom, madame la ministre.
Avant, les entreprises supprimaient des emplois quand il n’y avait pas de travail, quand elles connaissaient des difficultés. Maintenant, même quand ça va bien, on se sépare de personnels !
Le nouveau dispositif va clairement intervenir dans la gestion systématique des emplois et des formations des grandes entreprises. Certes, il faudra un accord majoritaire, comme vient de le dire Mme la ministre, mais il sera ensuite impossible tant pour les salariés que pour les syndicats qui l’ont signé de le remettre en question.
Aucune obligation de reclassement, aucune action de formation ou de maintien de l’emploi !
M. Martial Bourquin. Un chèque suffira, même si celui-ci peut être intéressant.
Cette mesure existait déjà auparavant sous une forme non collective. Combien de personnes ayant signé une rupture conventionnelle se sont retrouvées à la charge des centres communaux d’action sociale parce qu’elles ne retrouvaient pas de travail !
Mais le plus grave, dans cette affaire, madame la ministre, c’est la discrimination par l’âge. Il est à craindre que ce dispositif ne cible les seniors et les salariés ayant le plus d’ancienneté, parce qu’ils coûtent plus cher à l’entreprise,…
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Martial Bourquin. … pour les remplacer par des personnes en début de carrière.
M. le président. Merci !
M. Martial Bourquin. C’est un nouveau recul social.
Voilà des questions qui méritent d’être discutées.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Je serai très bref.
Je crois au dialogue social. Je crois aux chefs d’entreprise et aux syndicats.
Mes chers collègues, je m’étonne, après les discours que vous avez tenus voilà quelques instants, empreints de méfiance à l’égard des chefs d’entreprise, que vous manifestiez maintenant de la méfiance à l’égard des syndicats. Faites confiance aux parties qui signent des accords !
Bien évidemment, je voterai contre ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 40 et 106.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 54 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 251 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’article 5.
(L’article 5 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 5
M. le président. L’amendement n° 107, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement engage une réflexion visant à étudier les possibilités de modulation de la durée du préavis du salarié concerné par le licenciement économique en fonction de la durée des actions de formation entreprises en vue de l’acquisition d’une nouvelle qualification ou d’une reconversion professionnelle.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Je précise que j’étais défavorable à l’article 5.
Pour ce qui concerne cet amendement, il faut rappeler que l’avis du Conseil économique, social et environnemental, le CESE, intitulé L’impact du chômage sur les personnes et leur entourage, adopté en mai 2016, décrit parfaitement les conséquences du chômage, plus psychologiques et sociales que strictement financières.
Chez les chômeurs, les atteintes à la confiance en soi, en ses capacités de rebond, les sentiments d’exclusion et de culpabilité sont édifiants. Ils peuvent entraîner des préjudices irréversibles pour ces personnes et leur entourage, notamment familial.
Rester intégré à l’entreprise permettrait d’éviter de tels traumatismes à coût constant.
C’est la raison pour laquelle il est souhaitable d’engager une réflexion le plus rapidement possible sur ce thème, sachant que des expériences existent à l’étranger.
En clair, la malédiction qui pèse sur le chômeur réside moins dans son indemnisation, qui n’est pas si mauvaise, puisqu’elle dure deux ans, que dans le fait d’avoir été licencié, de n’être plus salarié, dans la peur du regard des autres et l’incapacité à retrouver l’estime de soi.
Il faudrait parvenir à distinguer le problème du chômage de celui du statut de chômeur. Dans cet esprit, mon amendement a pour objet de solliciter une réflexion visant à étudier la possibilité de moduler la durée du préavis en fonction de la durée de formation nécessaire pour intégrer une autre entreprise, comme cela existe dans un certain nombre de pays, notamment en Suède, afin que le salarié ne perde jamais ce statut et ne se retrouve jamais dans une situation extrêmement délicate.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. On peut évidemment comprendre les motivations de notre collègue : nous connaissons tous les effets somatiques et psychologiques du chômage. Ces effets sont majeurs.
Toutefois, mon cher collègue, votre amendement pose deux problèmes.
Sur la forme, il est dépourvu de valeur normative. Il ne prévoit pas la remise d’un rapport et ne fixe pas de règles de droit. D’ailleurs, je suspecte fort que l’amendement vise une réflexion plutôt qu’un rapport parce que l’on sait la commission défavorable aux rapports… (Sourires.)
Sur le fond, cet amendement est en partie satisfait par l’existence du congé de reclassement dans les entreprises de plus de 1 000 salariés, lequel permet de garder tout de même un lien entre l’entreprise et les salariés pour lesquels un licenciement économique est envisagé, et du contrat de sécurisation professionnelle dans les autres entreprises.
J’ajoute que la troisième ordonnance a créé un congé de mobilité, qui peut être proposé par accord collectif, indépendamment d’un projet de licenciement économique.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Effectivement, cet amendement soulève une vraie question, même si de nombreux outils existent déjà. Oui, il vaut mieux prévenir que guérir et il est vrai qu’il est important que les discussions relatives au reclassement et à la formation commencent autant que possible pendant que le salarié est encore employé de l’entreprise, dans l’intérêt à la fois de confiance en soi et de la sécurisation du parcours.
Cela dit, je sollicite le retrait de l’amendement, les partenaires sociaux pouvant d’ores et déjà s’entendre pour fixer une durée de préavis différente de celle qui est applicable par défaut, mieux adaptée aux conditions de rupture.
Par ailleurs, plusieurs dispositifs répondent déjà à cette logique.
Dans le cadre du licenciement économique, c’est l’objectif du contrat de sécurisation professionnelle, qui peut être négocié dans les entreprises de moins de 1 000 salariés. Dans les entreprises de plus de 1 000 salariés, le congé de reclassement peut tenir compte de la durée des mesures d’accompagnement et de formation.
Au-delà du licenciement économique, la durée peut également être allongée pour tenir compte de l’accompagnement et de la formation dans le cadre de la rupture conventionnelle collective, la RCC. C’est aussi l’esprit du congé de mobilité, dans le cadre de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la GPEC.
Quatre dispositifs existent donc, qui permettent une négociation des partenaires sociaux pour adapter la durée du préavis, en fonction notamment de la formation ou d’autres mesures d’accompagnement.
Je pense qu’aujourd’hui ces dispositifs n’ont peut-être pas l’ampleur qu’ils pourraient avoir. Faire la publicité – si j’ose dire – de ces possibilités permettra que les partenaires sociaux s’en saisissent.
Quoi qu’il en soit, l’arsenal juridique existe. La pratique de la négociation, elle, n’est pas encore très développée. Elle pourra être encouragée au travers du dialogue social, puisqu’il y aura, notamment avec la RCC, plus d’occasions d’y recourir.
M. le président. Monsieur Tourenne, l’amendement n° 107 est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Tourenne. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
D’abord, cet amendement n’est pas méchant : il vise simplement à faire réfléchir. Je suis sûr que le Gouvernement en est capable, raison pour laquelle j’ai formulé cette proposition. (Mme la ministre sourit.)
M. Gérard Dériot, vice-président de la commission des affaires sociales. Ça commence mal !
M. Jean-Louis Tourenne. Je suggère juste une piste. Ce n’est pas la seule.
Comme je l’ai dit voilà quelques instants, il importe de distinguer le problème du chômage de celui du statut de chômeur.
Nous ne sommes pas à l’abri d’une vague de recrudescence du chômage : il suffit que l’économie numérique se développe beaucoup plus vite que nous ne le pensions et qu’elle réserve un certain nombre de surprises désagréables pour que de nouveaux chômeurs se retrouvent à pointer.
Je considère que les solutions existent, avec 41 milliards d’euros distribués pour la formation des chômeurs.
M. Jean-Louis Tourenne. Ne polémiquons pas sur les chiffres ! Je parle du principe.
Il est souhaitable que les personnes concernées par le licenciement économique demeurent salariées de l’entreprise, qu’elles conservent ce statut. Dès l’instant où l’on modifie leur statut, on les pointe du doigt, on opère une espèce de discrimination qui les met en difficulté, notamment sous le regard de l’autre.
J’ai cité précédemment la Suède, mais il existe en Autriche un dispositif de « fondations » tout à fait remarquables, les bénéficiaires restant salariés de l’entreprise le temps de la formation – d’ailleurs, l’enseignement est dispensé, la plupart du temps, dans les locaux de l’entreprise.
Mon amendement est un simple appel à la réflexion. S’il ne recueille pas votre assentiment, madame la ministre, je souhaite malgré tout que vous reteniez l’idée qu’une telle solution sera nécessaire un jour pour éviter tous les dégâts collatéraux que l’on peut constater chez les chômeurs.
M. le président. L’amendement n° 108, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement engage une réflexion sur les frais de formation professionnelle des salariés.
Lorsqu’un salarié quitte l’entreprise dans les six mois suivant la réalisation d’une formation qui lui permet d’accéder à un poste correspondant à une qualification supérieure dans une autre entreprise, celle-ci verse à la première entreprise une quote-part des frais engagés pour ladite formation.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Décidément, je vous fais confiance, madame la ministre !
Cet amendement est tout simple : il répond à l’interpellation d’un chef d’entreprise qui a consenti des efforts pour former ses salariés, lesquels, une fois formés, ont acquis plus de valeur et ont, par conséquent, intéressé d’autres entreprises. Ces dernières ont donc bénéficié des compétences acquises grâce à une formation financée par une autre.
Est-il possible d’imaginer un système dans lequel la formation qui a été financée par une entreprise est prise en charge par l’entreprise qui va accueillir l’employé ainsi valorisé et largement plus compétent ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable.
Je veux d’abord rappeler à M. Tourenne que le Gouvernement va déposer, à la fin du mois d’avril me semble-t-il (Mme la ministre le confirme.), un projet de loi de réforme de la formation professionnelle. Nous aurons évidemment l’occasion de rediscuter de tout cela dans ce cadre.
En outre, je suis surpris par la proposition d’obliger le salarié à rembourser à son ancien employeur (M. Jean-Louis Tourenne fait un signe de dénégation.) une partie de sa formation s’il quitte l’entreprise dans les six mois. Cette obligation est trop générale et floue : elle s’appliquerait même en cas de licenciement et ne précise pas le niveau de la quote-part.
Elle marquerait une rupture dans le modèle de formation que nous connaissons et pourrait avoir des effets pervers, en dissuadant certaines personnes de suivre des formations si elles risquent un jour de devoir les rembourser.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je note l’innovation que constituent les amendements présentés par M. Tourenne : ni demandes de rapport ni droit dur, leur dispositif appelle à la réflexion, notamment du Gouvernement… (M. Jean-Louis Tourenne sourit.)
J’accepte l’invitation à réfléchir, mais pas d’inscrire cette invitation dans le droit : il ne faudrait pas que notre champ de réflexion soit, a contrario, limité aux sujets figurant expressément dans la loi.
Plus sérieusement, j’émets un avis défavorable sur l’amendement.
Dans le cadre de la réforme de la formation professionnelle, qui fait l’objet en ce moment d’une négociation entre les partenaires sociaux et que nous allons discuter au Parlement, le sujet que vous évoquez rejoint deux questions : la continuité des parcours de formation – quand le salarié change d’entreprise –, et les capacités de formation des entreprises, supérieures aux capacités d’embauche pour les grandes entreprises, mais inférieures pour les PME, comme nous le verrons avec l’apprentissage.
Il y a donc une réflexion à avoir sur les conditions dans lesquelles, dans un écosystème géographique ou sectoriel donné, certaines entreprises, qui disposent de capacités de formation plus importantes, notamment en matière d’apprentissage, mais aussi de formation continue, peuvent mettre ces capacités à disposition d’entreprises qui voudraient embaucher des personnes qualifiées, sans avoir forcément besoin de les former.
Cela fait partie des sujets dont nous pourrons discuter lors de l’examen du nouveau texte qui nous réunira prochainement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 108.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 6
I. – Le code du travail, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 précitée, est ainsi modifié :
1° L’article L. 1222-9 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1222-9. – I. – Sans préjudice de l’application, s’il y a lieu, des dispositions du présent code protégeant les travailleurs à domicile, le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication.
« Est qualifié de télétravailleur au sens de la présente section tout salarié de l’entreprise qui effectue, soit dès l’embauche, soit ultérieurement, du télétravail tel que défini au premier alinéa.
« Le télétravail est mis en place dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, dans le cadre d’une charte élaborée par l’employeur après avis du comité social et économique, s’il existe.
« En l’absence d’accord collectif ou de charte, lorsque le salarié et l’employeur conviennent de recourir au télétravail, ils formalisent leur accord par tout moyen.
« II. – L’accord collectif applicable ou, à défaut, la charte élaborée par l’employeur précise :
« 1° Les conditions de passage en télétravail et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail ;
« 2° Les modalités d’acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
« 3° Les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
« 4° La détermination des plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail.
« III. – Le télétravailleur a les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise.
« L’employeur qui refuse d’accorder le bénéfice du télétravail à un salarié qui occupe un poste éligible à un mode d’organisation en télétravail dans les conditions prévues par accord collectif ou, à défaut, par la charte, motive sa réponse.
« Le refus d’accepter un poste de télétravailleur n’est pas un motif de rupture du contrat de travail.
« L’accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l’exercice de l’activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail au sens des dispositions de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale. »
2° Le douzième alinéa de l’article L. 1233-3 est complété par les mots : « , sauf fraude. » ;
2° bis (nouveau) Au premier alinéa de l’article L. 1233-34, après la troisième occurrence du mot : « sur », sont insérés les mots : « la santé, la sécurité ou » ;
3° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 1235-3 est complété par les mots : « , à l’exception de l’indemnité de licenciement mentionnée à l’article L. 1234-9 » ;
3° bis (nouveau) L’article L. 1235-3-1 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est remplacé par sept alinéas ainsi rédigés :
« Les nullités mentionnées à l’alinéa précédent sont celles qui sont afférentes à :
« 1° La violation d’une liberté fondamentale ;
« 2° Des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L. 1152-3 et L. 1153-4 ;
« 3° Un licenciement discriminatoire dans les conditions prévues aux articles L. 1132-4 et L. 1134-4 ;
« 4° Un licenciement consécutif à une action en justice en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans les conditions mentionnées à l’article L. 1144-3, ou à une dénonciation de crimes et délits ;
« 5° Un licenciement d’un salarié protégé mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2412-1 en raison de l’exercice de son mandat ;
« 6° Un licenciement d’un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles L. 1225-71 et L. 1226-13. » ;
b) Le troisième alinéa est ainsi modifié :
– les mots : « , lorsqu’il est dû en application des dispositions de l’article L. 1225-71 et du statut protecteur, » sont supprimés ;
– après le mot : « nullité », sont insérés les mots : « mentionnée à l’alinéa précédent » ;
4° L’article L. 1235-3-2 est complété par les mots : « , sauf lorsque cette rupture produit les effets d’un licenciement nul afférent aux cas mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 1235-3-1, pour lesquels il est fait application du premier alinéa du même article L. 1235-3-1 » ;
4° bis La section 3 du chapitre VI du titre III du livre II de la première partie est complétée par un article L. 1236-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 1236-9. – Si la convention ou l’accord mentionné à l’article L. 1223-8 le prévoit, le salarié licencié à l’issue d’un contrat de chantier ou d’opération peut bénéficier d’une priorité de réembauche en contrat à durée indéterminée dans le délai fixé par la convention ou l’accord. » ;
4° ter (nouveau) Après le mot : « collectifs », la fin du dernier alinéa de l’article L. 1237-16 est ainsi rédigée : « mentionnés à l’article L. 1237-17. » ;
5° Le premier alinéa de l’article L. 1237-18 est ainsi rédigé :
« Un congé de mobilité peut être proposé par l’employeur soit dans le cadre d’un accord portant rupture conventionnelle collective conclu dans les conditions prévues aux articles L. 1237-19 à L. 1237-19-8, soit dans les entreprises ayant conclu un accord collectif portant sur la gestion des emplois et des compétences. » ;
6° L’article L. 1237-19-1 est ainsi modifié :
aa) (nouveau) Le 1° est complété par les mots : « , s’il existe » ;
a) Après le mot : « durée », la fin du 2° est ainsi rédigée : « pendant laquelle des ruptures de contrat de travail peuvent être engagées sur le fondement de l’accord ; »
b) Après le 6°, il est inséré un 6° bis ainsi rédigé :
« 6° bis Les modalités de conclusion d’une convention individuelle de rupture entre l’employeur et le salarié et d’exercice du droit de rétractation des parties ; »
c) Au 7°, après le mot : « faciliter », sont insérés les mots : « l’accompagnement et » et, après le mot : « que », sont insérés les mots : « le congé de mobilité dans les conditions prévues aux articles L. 1237-18-1 à L. 1237-18-5, » ;
7° Le premier alinéa de l’article L. 1237-19-2 est complété par les mots : « , le cas échéant dans les conditions prévues à l’article L. 1237-18-4 » ;
7° bis Les quatre derniers alinéas de l’article L. 1237-19-3 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« L’autorité administrative valide l’accord collectif après s’être assurée de sa conformité au même article L. 1237-19, de la présence des mesures prévues à l’article L. 1237-19-1 et de la régularité de la procédure d’information du comité social et économique, s’il existe. Elle ne valide pas l’accord si, au regard du nombre de salariés potentiellement concernés, les mesures d’accompagnement et de reclassement prévues au 7° du même article L. 1237-19-1 ne sont pas précises et concrètes ou si l’accord est manifestement incompatible avec l’objectif d’accompagnement et de reclassement externe des salariés. » ;
7° ter (nouveau) À la première phrase du deuxième alinéa et à la seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 1237-19-4, après le mot : « économique », sont insérés les mots : « , s’il existe, » ;
8° L’article L. 1237-19-6 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1237-19-6. – En cas de refus de validation, un nouvel accord peut être négocié, qui tient compte des éléments de motivation accompagnant la décision de l’administration. Le comité social et économique, s’il existe, est informé de la reprise et de la négociation. Le nouvel accord conclu est transmis à l’autorité administrative, qui se prononce dans les conditions prévues aux articles L. 1237-19-3 et L. 1237-19-4. » ;
8° bis A (nouveau) Au premier alinéa de l’article L. 1237-19-7, après le mot : « objet », sont insérés les mots : « , s’il existe, » ;
8° bis B (nouveau) L’article L. 1442-13-2 est ainsi modifié :
a) L’avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les membres de la Commission nationale de discipline sont désignés pour trois ans » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
8° bis L’article L. 4624-7 est ainsi modifié :
a) (nouveau) À la seconde phrase du I, après le mot : « contestation », sont insérés les mots : « par l’employeur » ;
b) (nouveau) Au III, après le mot : « prud’hommes », sont insérés les mots : « , rendue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine, » ;
c) (nouveau) Le IV est ainsi rédigé :
« IV. – Les honoraires et frais liés à la mesure d’instruction sont mis à la charge de la partie perdante, à moins que la formation de référé ou, le cas échéant, le conseil de prud’hommes saisi au fond, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie, dès lors que l’action en justice n’est pas dilatoire ou abusive. Ces honoraires et frais sont réglés d’après le tarif fixé par un arrêté conjoint des ministres chargés du travail et du budget. » ;
9° L’article L. 8241-3 est ainsi modifié :
a) Au début de la première phrase du premier alinéa du I, les mots : « Sans préjudice des dispositions » sont remplacés par les mots : « Par dérogation au dernier alinéa » ;
b) Au II, après la référence : « L. 8241-1 », sont insérés les mots : « pour les entreprises utilisatrices ».
I bis. – (Non modifié) À la deuxième phrase du I de l’article 1er de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 précitée, après le mot : « conventionnelles », sont insérés les mots : « , en particulier de branche, d’entreprise et d’établissement, sous réserve de leur publication, ».
II. – (Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 41 est présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 109 est présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 41.
M. Dominique Watrin. L’article 6 modifie les règles issues de l’ordonnance relative à la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail.
Il faut le dire, le droit du travail était déjà largement flexible. Cependant, madame la ministre, vous allez encore plus loin.
Comme je l’ai déjà évoqué lors de la discussion générale, vous voulez réduire le périmètre des licenciements économiques au territoire national, plafonner les indemnités prud’homales en cas de licenciement illégal, au motif de lever la peur d’embaucher des employeurs, autoriser les prêts de main-d’œuvre gratuits, faciliter le recours aux CDD et à l’intérim, alors même que, dans le même temps, vous constatez l’accroissement de l’utilisation de ces formes d’emploi. Vous proposez même d’élargir le nombre de secteurs pour les contrats de chantier. Ce n’est tout de même pas rien !
Dans votre élan, vous êtes peut-être même allée trop loin, puisque, à l’Assemblée nationale, votre majorité est revenue sur certaines mesures, en introduisant des correctifs censés limiter les conséquences pour les salariés de cette libéralisation à outrance du droit du travail.
Selon nous, ce n’est pas en corrigeant des dérives potentielles, par exemple, du licenciement économique, en aménageant les règles du barème impératif du licenciement ou bien en introduisant une priorité d’embauche pour les contrats de chantier que vous allez véritablement améliorer les choses. Limiter les conséquences ne suffit pas : il nous semble que c’est à la racine même du texte qu’il faut s’attaquer.
L’acte originel est, effectivement, cette ordonnance n° 2017–1387 sur la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail.
Quand on décode son intitulé, que signifie « prévisibilité », si ce n’est anticiper les sanctions par l’employeur du juge des prud’hommes pour calculer à l’avance le montant des indemnités en cas de licenciement ? On parle ici de licenciements, de licenciements abusifs, et c’est l’employeur que l’on sécurise !
Nous ne sommes pas d’accord avec cette démarche. Nous proposons donc de supprimer l’article 6.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 109.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
J’ajoute simplement que cet article prévoit la possibilité de conclure « par tout moyen », c’est-à-dire sans garantie pour les salariés, un accord individuel de télétravail régulier, sans passer par un accord collectif.
Le danger, c’est que l’on peut toujours réussir à convaincre un salarié, ne serait-ce que par l’autorité que l’on exerce sur lui, d’accepter le télétravail. C’est moins facile dans un accord collectif.
Il s’agit là d’un moyen de contournement des institutions représentatives du personnel, qui veillent, lors de la négociation des accords collectifs, à ce que l’ensemble des garanties légales en la matière soient assurées : mise à disposition des matériels, locaux adaptés, droit à la déconnexion, accidents du travail, présence régulière dans l’entreprise…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission est défavorable à la suppression de l’article 6.
Je rappelle qu’elle a adopté dix amendements sur cet article.
Nous sommes plus favorables à sa discussion qu’à sa suppression !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Comme il est facile de l’imaginer, le Gouvernement est défavorable à la suppression de l’article 6, comme de l’ensemble des articles.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. La loi est très claire : la rupture conventionnelle collective n’est pas un licenciement économique. Il faut l’accord du personnel et de plus de 50 % des syndicats. On n’y recourt pas par plaisir, mais peut-être par envie de faire autre chose.
Des critères du compte personnel de prévention de la pénibilité, le C3P, qui étaient totalement inapplicables pour les petites entreprises, ont été supprimés. Je pense notamment à la manutention de charges, aux postures pénibles, qui étaient impossibles à quantifier. J’estime que c’est une bonne chose.
Le compte professionnel de prévention conserve les mêmes prérogatives que le C3P : des formations, des départs anticipés à la retraite… Cependant, les critères conservés sont gérables.
Je voterai donc contre les amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 41 et 109.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 55 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 251 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 112 est présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 169 rectifié bis est présenté par MM. Requier, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Vall et A. Marc.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Remplacer les mots :
tout moyen
par le mot :
écrit
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 112.
M. Jean-Louis Tourenne. Je place beaucoup d’espoirs dans cet amendement. Enfin un qui a des chances d’être adopté ! (Sourires.)
Il vise, s’agissant toujours du télétravail, à remplacer l’expression « tout moyen » par le mot « écrit », « tout moyen » laissant entendre que l’accord pourrait être arraché et ne pas recevoir de signature confirmant la volonté du salarié.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 169 rectifié bis.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement est défendu.
Si nous n’avons pas souvent été d’accord avec Jean-Louis Tourenne depuis le début des débats, nous nous rejoignons avec ces amendements.
J’ajoute simplement que la trace écrite peut être un simple e-mail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Dans les entreprises dépourvues d’accord collectif ou de charte sur le télétravail, l’obligation de formaliser l’accord implique, selon la commission, une trace écrite, que celle-ci soit manuscrite ou informatique.
L’amendement nous paraît donc satisfait.
Les services du ministère du travail considèrent que l’expression « tout moyen » renvoie à un accord écrit. Je pense que la ministre confirmera cette analyse.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je confirme que l’expression « par tout moyen » dans le code du travail implique « par tout moyen opposable. Il faut donc une preuve concrète, et par conséquent quelque chose d’écrit.
On ne peut réécrire « par tout moyen » partout dans le code… Monsieur le sénateur, je propose de mettre à votre disposition cette analyse juridique qui démontre que l’exigence d’un accord écrit est sous-entendue. Je vous demande de faire confiance à cette analyse juridique que vous n’avez pas encore mais qui, je puis vous l’assurer, existe
Votre amendement étant satisfait, je vous suggère de bien vouloir le retirer.
M. le président. Monsieur Tourenne, l’amendement n° 112 est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Tourenne. Oui, je le maintiens, monsieur le président. Je préfère en effet l’expression « par écrit » à l’expression « par tout moyen ».
M. le président. Monsieur Requier, qu’en est-il de l’amendement n° 169 rectifié bis ?
M. Jean-Claude Requier. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 112 et 169 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 167 rectifié bis, présenté par M. Requier, Mme N. Delattre, MM. Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Vall et A. Marc, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après les mots :
en télétravail
insérer les mots :
, en particulier en cas d’épisode de pollution mentionné à l’article L. 223–1 du code de l’environnement,
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement s’inspire d’une disposition de la proposition de loi visant à favoriser le télétravail en cas d’épisode de pollution que notre groupe a récemment déposée.
Selon l’Organisation mondiale de la santé, un décès sur neuf dans le monde est lié à la pollution de l’air. En France, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, évalue l’impact de cette pollution à 48 000 décès prématurés par an.
Face à l’ampleur de ce danger sanitaire, les pouvoirs publics ont mis en place des mesures qui se sont malheureusement révélées insuffisantes et ont suscité de nombreuses critiques.
Nous pensons qu’il existe une solution alternative aux problèmes de pollution : le télétravail.
Aussi, nous souhaitions créer un droit du salarié au télétravail – réservé à certains postes – lorsque des mesures propres à limiter l’ampleur et les effets de la pointe de pollution sur la population ont été prises par le préfet.
Sur proposition du rapporteur, nous avons rectifié notre amendement afin que les conditions de mise en place du télétravail en cas de pollution soient précisées dans l’accord collectif ou dans la charte élaborée par l’employeur.
Nous avons entendu les craintes émises par la commission sur la mise en place d’un droit au télétravail opposable à l’employeur.
Je tiens toutefois à rappeler que si, lors des pics de pollution, la mise en place de la circulation alternée ou différenciée est relativement respectée par les automobilistes, nous le savons pertinemment, il existe – nous sommes en France, vieille terre gauloise… (Sourires.) – certains « fautifs » qui n’ont pas la possibilité de prendre les transports en commun ni les moyens d’acheter un véhicule propre.
Il faut chercher la réponse ailleurs que dans la répression. Dans ces conditions, la mise en place du télétravail prend tout son sens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Comme l’a souligné M. Requier, cet amendement a été rectifié conformément au souhait de la commission. Le dispositif proposé va moins loin que la version initiale qui créait, au profit du salarié, un droit au télétravail opposable à l’employeur en cas de pic de pollution. Cependant, il permettra d’éviter de désorganiser les entreprises en cas de demandes nombreuses et soudaines des salariés.
La nouvelle version prévoit que la question du passage des salariés au télétravail en cas d’épisode de pollution soit abordée dans l’accord collectif ou dans la charte.
Je reconnais que rien, dans l’ordonnance, n’interdit aujourd’hui le télétravail en cas de pollution, mais il me semble intéressant de créer un lien dans la loi entre télétravail et pollution, en raison des enjeux de santé publique liés à la pollution de l’air.
Pour ces raisons, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il est clair qu’on ne peut créer un droit opposable en cas de pollution.
En effet, les conditions d’équipement, de responsabilité, de fonctionnement, prévues dans la charte ou dans l’accord, ne sont pas réunies pour un salarié qui n’est pas habituellement en télétravail. Et on ne peut les réunir dans l’urgence, en cas de pic de pollution. Il me semble que la rectification demandée par la commission allait dans ce sens.
Les enquêtes montrent que les motifs du recours au télétravail peuvent être très variés : le temps passé dans les transports est la première motivation des demandes de passage au télétravail, pour des raisons d’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ; mais il peut aussi s’agir d’un besoin de concentration, propre à certains métiers – il est parfois plus intéressant pour les deux parties, salarié et employeur, de passer un ou deux jours chez soi plutôt que sur son lieu de travail.
Dans tous les cas de figure, le télétravail ne concerne qu’une partie de l’activité du salarié, car il convient aussi de conserver le lien social dans l’entreprise.
Il peut aussi s’agir d’une demande sociale. Je pense aux aidants, qui doivent pouvoir adapter leurs horaires en fonction des contraintes liées à de jeunes enfants, à des personnes âgées ou à des personnes handicapées.
Enfin, le télétravail se développe également en zone rurale.
Ma seule réserve – ce n’est pas une réserve de fond – tient à ce qu’en créant un précédent nous risquons de voir se multiplier les demandes pour tel ou tel cas de figure…
Toutefois, dans la mesure où la pollution est un sujet rarement pris en compte par le monde du travail et eu égard au fait que ce droit n’est pas opposable, le Gouvernement, sous les réserves que j’ai évoquées, émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 113, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les modalités de prise en charge par l’employeur de tous les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement vise à rétablir l’obligation pour l’employeur de prendre en charge les coûts découlant du télétravail.
Il s’agit d’intégrer cette obligation, prévue par l’accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005 sur le télétravail, dans les ordonnances.
Que les coûts liés à l’exercice du télétravail soient pris en charge par l’employeur me paraît être la moindre des choses.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission pense que la prise en charge des frais occasionnés par le télétravail doit rester facultative, être traitée au cas par cas et ne pas redevenir obligatoire. Je rappelle que les alinéas 7 à 11 fixent la liste des sujets impératifs dans l’accord ou dans la charte instituant le télétravail.
L’ancienne obligation était probablement justifiée à une époque où nos concitoyens étaient peu équipés en matériel informatique. La situation a changé : presque tous les salariés disposent aujourd’hui d’un matériel informatique et d’un accès quasi illimité à internet. J’ajoute que les salariés en télétravail apportent parfois un ordinateur portable à leur domicile.
Au final, rien, dans l’ordonnance, n’interdit à l’accord collectif ou à la charte de prévoir au cas par cas la participation financière de l’employeur si le télétravailleur doit faire face à des coûts particuliers.
Pour ces raisons, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Nous avons un but commun : développer le télétravail. C’est la raison pour laquelle nous avons inscrit dans les ordonnances le droit opposable au télétravail. Il s’agit d’une première en Europe.
Selon un sondage, 83 % des salariés – ou 70 % selon un autre sondage – sont favorables à une généralisation du télétravail. Cela ne veut pas dire qu’ils souhaitent y recourir pour l’intégralité de leur temps de travail, mais au moins de manière régulière ou ponctuelle, à temps partiel.
L’obligation de prise en charge, par l’employeur, des coûts découlant directement du télétravail a été supprimée pour deux raisons : tout d’abord, comme on a pu le constater au cours des premières négociations, il est très difficile de distinguer, dans un abonnement internet préexistant, la quote-part correspondant au télétravail.
Ensuite, comme le rappelle régulièrement le juge, l’employeur doit prendre en charge les frais professionnels nécessaires à l’exécution du travail. Il s’agit d’une obligation générale.
Concrètement, plutôt qu’une partie de l’abonnement internet de son salarié, l’employeur lui achètera, par exemple, un siège ergonomique ou tout autre élément de son environnement de travail.
Par défaut, l’entreprise doit donc pourvoir à tous les frais professionnels nécessaires à l’exécution du travail. En supprimant le spécifique, on permet aux négociations d’être plus porteuses.
Le dialogue social va permettre d’aboutir à de meilleurs accords, sachant qu’existe toujours le filet de sécurité de l’obligation générale de l’employeur. Dès lors qu’il y a télétravail, il y a travail et le télétravail est donc concerné.
Pour ces raisons, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Tourenne, l’amendement n° 113 est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Tourenne. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 15 rectifié ter, présenté par Mme Gruny, MM. Gremillet, Bonne et Daubresse, Mmes Garriaud-Maylam et Lamure, M. Lefèvre, Mme Imbert, M. Longuet, Mme Micouleau, MM. Raison, Perrin, Paccaud et Dallier, Mmes Eustache-Brinio et Lassarade, MM. Savary, Laménie, Mandelli, Rapin, B. Fournier et Mouiller et Mme Deromedi, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Toute contestation doit être formée à peine d’irrecevabilité avant l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la notification du refus de l’employeur.
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. Cet amendement porte sur le refus motivé de l’employeur d’accorder le bénéfice du télétravail à un salarié occupant un poste éligible à un mode d’organisation en télétravail dans les conditions prévues par accord collectif.
Il est précisé que toute contestation de ce refus doit être formée dans un délai de deux mois sous peine d’irrecevabilité.
Il convient ainsi de sécuriser toute possibilité de contestation par un délai de contentieux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission ne pense pas nécessaire d’enserrer dans des délais spécifiques le refus de l’employeur en matière de télétravail.
Restons-en à la règle de droit commun posée à l’article L. 1471–1 du code du travail qui prévoit un délai de deux ans pour attaquer devant le juge une décision de l’employeur.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.
Nous voulons privilégier le dialogue social et faire en sorte que les conditions soient définies en commun.
Par ailleurs, les motifs du recours au télétravail peuvent évoluer dans le temps : il peut s’agir d’une situation personnelle ponctuelle, d’une tâche spécifique à un moment donné… Le salarié peut ne pas vouloir contester cette décision dans les deux mois jusqu’à ce que sa situation change quelques mois plus tard.
L’encadrement du délai de recours contentieux ne me semble pas nécessaire. Nous sommes sur un sujet très différent du licenciement. Il s’agit ici de l’accord des parties sur une manière de travailler. C’est le dialogue social, et non la limitation dans le temps du délai de recours, qui permettra de régler la question.
M. le président. Madame Gruny, l’amendement n° 15 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Pascale Gruny. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 15 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 168 rectifié, présenté par M. Requier, Mme N. Delattre, MM. Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Vall et A. Marc, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À l’article L. 1222-11, après le mot : « épidémie », sont insérés les mots : « , d’épisode de pollution lorsque des mesures propres à limiter l’ampleur et les effets de la pointe de pollution ont été prises en application de l’article L. 223–1 du code de l’environnement » ;
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement s’inscrit, comme l’amendement n° 167 rectifié bis, dans notre volonté de favoriser le recours au télétravail en cas de pic de pollution.
Actuellement, l’article L. 1222–11 du code du travail dispose que l’employeur, en cas de circonstances exceptionnelles, peut imposer le recours au télétravail, alors « considéré comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés. »
Sont notamment considérés comme circonstances exceptionnelles les menaces d’épidémies ou les cas de force majeure. Notre amendement vise à préciser que les épisodes de pollution peuvent également constituer des circonstances exceptionnelles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Comme l’a souligné Mme Laborde, cet amendement s’inscrit dans le prolongement de l’amendement n° 167 rectifié bis, qui avait recueilli un avis favorable. En l’occurrence, tel ne sera pas le cas. La commission estime en effet que cette précision relève du pouvoir réglementaire, comme l’avait d’ailleurs reconnu Mme El Khomri lors de l’examen de la loi Travail.
En outre, même dans le silence de la loi et du décret, la commission considère que les pics de pollution peuvent déjà être assimilés à des circonstances exceptionnelles au sens de l’article L. 1222–11 du code du travail. Mme la ministre pourra peut-être nous confirmer cette analyse.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il est très difficile d’imposer le télétravail et on ne peut le faire en urgence. Or un pic de pollution est, par définition, un cas d’urgence.
La mise en place du télétravail demande tout un aménagement – conditions de travail, flux d’information… Il ne s’agit pas d’un travail isolé, chez soi, mais bien d’un travail connecté, qui suppose une connexion informatique sécurisée.
C’est à la charte ou à l’accord de définir ces modalités. Nous venons de prévoir, à travers l’amendement n° 167 rectifié bis, que certaines personnes pourraient passer en télétravail en cas de pic de pollution.
Dès lors, si les choses ont été anticipées, le télétravail sera opérationnel. Si elles ne l’ont pas été, ça ne pourra pas fonctionner. Vouloir imposer le télétravail sans préparation est un peu théorique ; vouloir l’encourager, à l’instar de l’amendement n° 167 rectifié bis qui vise à mieux prévenir ce cas de figure, me semble plus pertinent.
Pour ces raisons, le Gouvernement suggère à ses auteurs de retirer cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.
Mme Françoise Laborde. Je vais retirer cet amendement, mais je tiens à préciser que la circulation alternée ou différée est parfois pire pour les entreprises. Il me semble important de le signaler et d’anticiper les difficultés.
Je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 168 rectifié est retiré.
Je suis saisi de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 114, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° L’article L. 1223-8 est abrogé ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. L’article L. 1223–8 du code du travail élargit le champ d’application du contrat de chantier, facteur de plus de précarité qu’un contrat à durée déterminée puisque son terme n’est pas connu et qu’il ne donne pas lieu au versement d’une indemnité de précarité.
M. le président. L’amendement n° 49, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 32 à 49
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
…° La sous-section 2 de la section 4 du chapitre VII du titre III du livre II de la première partie est abrogée ;
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. L’employeur n’est pas tenu de reclasser les salariés dans les autres établissements. Surtout, ils sont privés de droits essentiels – je pense notamment au contrat de sécurisation professionnelle qui permet un accompagnement renforcé dans la recherche d’emploi et qui garantit au salarié de percevoir 75 % de son salaire brut pendant un an.
Les mesures d’accompagnement et de reclassement externes ne seront plus garanties, mais négociées entreprise par entreprise. Si nous faisons preuve d’un moment de lucidité, la probabilité est faible de voir un accord d’entreprise instaurer, par exemple, un congé de reclassement maintenant le contrat de travail entre quatre et douze mois pour permettre au salarié concerné de se former.
Le volontariat des salariés qui accepteront de bénéficier des conditions imposées par la direction n’est qu’une illusion quand on connaît les pressions exercées sur eux pour quitter l’entreprise.
Je n’y reviendrai pas, mais il faut bien comprendre comment ont évolué les entreprises dont nous parlons ici. En raison de la financiarisation de l’économie, la pression sur les salariés que j’évoque s’est accompagnée d’une pression actionnariale sur les dirigeants eux-mêmes. Et je ne vous parle pas des sous-traitants.
Quand l’économie se financiarise trop, le dialogue social passe au second plan par rapport aux pressions et aux impulsions de l’actionnariat.
M. le président. L’amendement n° 42, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 32 à 34
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
…° La section 3 du chapitre III du titre II du livre II de la première partie est abrogée ;
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’article 30 de l’ordonnance relative à la sécurisation des relations de travail prévoit d’étendre le recours aux CDI de chantier à d’autres secteurs que le bâtiment, selon des modalités fixées par accord de branche étendu.
Tout d’abord, je tiens à préciser que parler de « CDI de chantier » est une contradiction en soi : dans la mesure où la durée du contrat est assise sur la réalisation d’un chantier, il ne peut s’agir d’un contrat à durée indéterminée.
Avec le CDI de chantier, l’employeur n’a plus besoin d’invoquer un motif de licenciement, puisque la fin du projet ou du chantier suffit à constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement. Elle place le salarié dans une situation de précarité permanente, sans possibilité de contester la rupture du contrat de travail.
Vous nous répondrez, une fois de plus, que les branches négocieront les modalités de recours à cette disposition et qu’il existera donc des garanties.
Or c’est la philosophie globale de ce dispositif que nous contestons. Pour nous, il s’agit d’un nouveau contrat de travail précaire. La Fédération française du bâtiment, la FFB, première organisation patronale du secteur, ne dispose pas de chiffres sur le recours au CDI de chantier dans le BTP. Elle estime que ce contrat concerne surtout les projets « très gros ou très longs », comme la construction de lignes à grande vitesse.
Les dirigeants de sociétés de services en ingénierie informatique, ou SSII, se frottent les mains à l’idée de bénéficier de ce contrat ultra-souple, dans un domaine où ces entreprises dépêchent leurs informaticiens chez les clients pour des missions plus ou moins longues.
Aujourd’hui, l’écrasante majorité des salariés du secteur restent embauchés en CDI classique, rémunérés et protégés entre chaque mission, une période dénommée « intercontrat ».
Les employeurs rêvent de recourir au CDI de chantier pour ne payer les salariés que le temps facturé au client, à des tarifs plus bas que ceux des informaticiens free-lance qui servent aujourd’hui de main-d’œuvre d’appoint.
Le CDI de chantier, c’est en réalité la fin du CDI pour toutes et pour tous, raison pour laquelle nous demandons son abrogation.
M. le président. L’amendement n° 48, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 32 et 33
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1236-8 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1236-8. – I. – Le licenciement qui, à la fin d’un chantier, revêt un caractère normal selon la pratique habituelle et l’exercice régulier de la profession, n’est pas soumis aux dispositions du chapitre III relatives au licenciement pour motif économique, sauf dérogations déterminées par convention ou accord collectif de travail.
« II. – Ce licenciement est soumis aux dispositions du chapitre II relatives au licenciement pour motif personnel. »
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Dans la continuité de ce que vient de nous dire Laurence Cohen, nous constatons que les secteurs principalement concernés par l’extension du CDI de chantier sont la construction navale ou bien l’industrie cinématographique.
Vous affirmez, madame la ministre, qu’avec le CDI de chantier les salariés vont sortir de la précarité et disposer d’une visibilité sur plusieurs années.
Or, premièrement, le salarié ne recevra plus la prime de précarité, qui était la règle pour les CDD en fin de contrat.
Deuxièmement, ce dispositif permettra de contourner les protections prévues par le droit du licenciement.
En effet, à la fin de la mission concernée, qu’elle dure un mois, deux ans ou plus, le salarié pourra être licencié, mais seulement pour motif personnel. Comme la fin de chantier constitue un motif valable de licenciement, l’employeur ne sera pas tenu de justifier l’arrêt de la collaboration. Il est donc inattaquable devant le juge prud’homal.
Quant au fond, il s’agit plutôt, selon nous, de créer un nouveau type de contrat de travail ultra-précaire. Loin de sécuriser ces travailleurs, vous précarisez leurs relations de travail comme leur accès au logement ou au crédit.
Pour ces raisons, nous demandons l’abrogation de ces dispositions.
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié quinquies, présenté par MM. Chasseing, Bignon, Capus, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Luche et Cigolotti, Mme F. Gerbaud et MM. Longeot et Gabouty, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Remplacer le mot :
fixé
par les mots :
et selon les modalités fixés
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. L’Assemblée nationale a introduit un amendement posant le principe d’une priorité de réembauche d’un salarié en contrat de chantier.
Ces contrats étant aujourd’hui organisés par les branches professionnelles, leurs conditions doivent être déterminées par ces mêmes branches.
Les ordonnances prévoient d’ailleurs que ces contrats de chantier soient gérés par les branches professionnelles, au motif qu’elles connaissent les réalités du terrain et peuvent participer à la spécificité de chaque secteur.
Dans la continuité de ces ordonnances, le présent amendement prévoit que le principe de réembauche des salariés licenciés à l’issue d’un contrat de chantier ou d’opération soit régi et négocié par lesdites branches professionnelles.
M. le président. L’amendement n° 67, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 34 à 57
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. La commission des affaires sociales du Sénat a autorisé la conclusion d’un accord instituant une rupture conventionnelle collective dans les entreprises dépourvues de comité social et économique, ou CSE, notamment en cas de carence de candidats aux élections professionnelles, alors que l’ordonnance prévoit la mise en place d’un comité social et économique dans les entreprises d’au moins 11 salariés.
La commission propose en réalité de généraliser les ruptures conventionnelles à l’ensemble des entreprises sans distinction du nombre de salariés.
Autrement dit, n’importe quel patron de TPE pourra licencier ses salariés sans motif économique à tout moment, alors que la loi de 2008 a instauré les ruptures conventionnelles individuelles.
Quel est l’objectif de la généralisation des ruptures conventionnelles collectives ? Selon une enquête réalisée par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, auprès de 4 000 signataires d’une rupture conventionnelle, 57 % de ces ruptures ont eu lieu sur l’initiative du salarié, pour des raisons conflictuelles dans plus de la moitié des cas.
En clair, les salariés ne souhaitant plus rester dans l’entreprise optent pour la rupture conventionnelle, plutôt que pour une démission, et vraisemblablement pour bénéficier de l’indemnisation du chômage.
De même, une autre étude indique que près de 30 % des salariés se disent contraints par l’employeur à signer une rupture conventionnelle.
En 2008, lors de la création des ruptures conventionnelles individuelles, le taux de chômage atteignait 7,4 %. Depuis, 2,7 millions de ruptures conventionnelles ont été conclues et le taux de chômage a grimpé à 9,4 %. La rupture à l’amiable n’a donc pas permis de favoriser la création d’emplois. Aussi, nous sommes pour la suppression de cet article.
Par ailleurs, je doute qu’une sénatrice ou un sénateur dont l’élection serait invalidée accepterait cette décision sans en connaître les raisons. (Sourires sur plusieurs travées du groupe Union Centriste.) Or un salarié ne connaîtra les motifs de son licenciement qu’après sa notification…
M. le président. L’amendement n° 130, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 34
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéas 37 à 49
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
6° La sous-section 2 de la section 4 du chapitre VII du titre III du livre II de la première partie est abrogée ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. J’adhère aux propos qui viennent d’être tenus.
Comme je l’ai déjà souligné, je crains que la rupture conventionnelle collective ne devienne un outil généralisé servant à remplacer les travailleurs âgés par des plus jeunes.
M. le président. L’amendement n° 165, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Amiel et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 39
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le 5° et le 6° deviennent respectivement le 6° et le 5° ;
II. – Alinéas 40 et 41
Rédiger ainsi ces alinéas :
b) Après le 4°, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :
« 4° bis Les modalités de conclusion d’une convention individuelle de rupture entre l’employeur et le salarié et d’exercice du droit de rétractation des parties ; »
III. – Alinéa 45
Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :
« L’autorité administrative valide l’accord collectif dès lors qu’elle s’est assurée :
« 1° De sa conformité à l’article L. 1237-19 ;
« 2° De la présence des clauses prévues à l’article L. 1237-19-1 ;
« 3° Du caractère précis et concret des mesures prévues au 7° de l’article L. 1237-19-1 ;
« 4° Le cas échéant, de la régularité de la procédure d’information du comité social et économique. » ;
IV. – Après l’alinéa 52
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au troisième alinéa de l’article L. 1471-1, la référence : « L. 1237-19-10 » est remplacée par la référence : « L. 1237-19-8 » ;
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement tend à préciser le contrôle exercé par la DIRECCTE dans le cadre de la rupture conventionnelle collective.
À ce titre, le contrôle exercé par l’administration sur les mesures de reclassement et d’accompagnement proposées dans le cadre de la rupture conventionnelle collective doit permettre à la DIRECCTE de s’assurer du caractère précis et concret de ces mesures.
Ce contrôle permettra de vérifier que l’employeur met tout en œuvre pour que les salariés volontaires ayant conclu une rupture conventionnelle collective bénéficient des moyens nécessaires à leur accompagnement et à leur reclassement.
En outre, cet amendement vise à corriger des erreurs matérielles.
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié quater, présenté par MM. Chasseing, Luche et Cigolotti, Mme F. Gerbaud, M. Longeot et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéas 44 et 45
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. En sus du contrôle de la DIRECCTE, l’Assemblée nationale a introduit un contrôle d’opportunité de l’administration pour la validation d’une rupture conventionnelle collective.
Cette rupture, qui simplifie et sécurise les plans de départ volontaire, est fondée sur le volontariat des parties et permet de négocier les conditions de départ des salariés.
Le fait qu’elle puisse être remise en cause par l’administration, hors motif de légalité, va sans aucun doute faire hésiter de nombreux chefs d’entreprise à mobiliser ce nouveau mode de rupture conventionnelle.
La philosophie de ces ordonnances est de faire confiance à la négociation entre l’employeur et ses salariés. Il est donc dommage de revenir sur cette nouvelle confiance. Il nous semble nécessaire d’éviter toute forme de contrôle abusif de l’administratif sur la rupture conventionnelle collective. C’est l’objet du présent amendement.
M. le président. L’amendement n° 14 rectifié ter, présenté par Mme Gruny, MM. Gremillet, Bonne et Daubresse, Mmes Garriaud-Maylam et Lamure, M. Lefèvre, Mme Imbert, M. Longuet, Mme Micouleau, MM. Raison, Perrin, Paccaud et Dallier, Mmes Eustache-Brinio et Lassarade, MM. Savary, Laménie, Mandelli, Rapin, B. Fournier et Mouiller et Mme Deromedi, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 45
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au premier alinéa de l’article L. 1237-19-4, après le mot : « jours », est inséré le mot : « ouvrables » ;
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. Il existe des jours ouvrables, des jours ouvrés et des jours calendaires. Ces questions sont parfois à l’origine de difficultés avec l’inspection du travail, qui valide les ruptures conventionnelles.
Cet amendement vise donc à préciser qu’il s’agit de jours « ouvrables ».
M. le président. L’amendement n° 191, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 57, première phrase
Supprimer les mots :
la formation de référé ou, le cas échéant,
et les mots :
saisi au fond
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination juridique des règles relatives à la procédure de contestation des décisions du médecin du travail devant le conseil des prud’hommes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les dix autres amendements en discussion commune ?
M. Alain Milon, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 114, la commission y est défavorable, un amendement similaire ayant déjà été rejeté.
Le recours à ces contrats dans un secteur donné est soumis à trois conditions : un accord de branche doit être conclu ; son contenu obligatoire est défini à l’article L. 1223-9 du code du travail, notamment pour prévoir des contreparties et des garanties aux salariés ; un arrêté d’extension doit ensuite être pris par le ministre du travail.
Pour toutes ces raisons, laissons leur chance à ces contrats et faisons confiance aux partenaires sociaux !
L’amendement n° 49 vise à supprimer la rupture conventionnelle collective. La commission y est bien évidemment opposée, car ce nouveau dispositif permet de supprimer à froid des emplois, uniquement sur la base du volontariat, et sans recourir à des licenciements.
La rupture conventionnelle collective, dont nous avons déjà beaucoup parlé, s’inspire de deux dispositifs qui ont montré leur efficacité.
Je veux parler tout d’abord de la rupture conventionnelle individuelle créée en 2008. En 2016, sur 420 000 demandes d’homologation reçues par les DIRECCTE, les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, seulement 5 % d’entre elles n’ont pas été homologuées.
Ensuite, le plan de sauvegarde de l’emploi, réformé en 2013, dont les deux tiers sont aujourd’hui définis par accord collectif majoritaire, et un tiers seulement unilatéralement par l’employeur.
La commission est donc défavorable à l’amendement n° 49.
Quant à l’amendement n° 42, il tend à supprimer les règles relatives aux contrats de chantier. Le recours à ces derniers dans un secteur donné est soumis à trois conditions : un accord de branche doit être conclu ; son contenu obligatoire est défini à l’article L. 1223–9 du code du travail, notamment pour prévoir des contreparties et des garanties aux salariés ; un arrêté d’extension doit ensuite être pris par le ministre du travail.
Pour toutes ces raisons, laissons leur chance à ces contrats et faisons confiance aux partenaires sociaux ! La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
S’agissant de l’amendement n° 48, l’ordonnance prévoit que la rupture du contrat de chantier à son terme est réputée reposer sur une cause réelle et sérieuse. Cette présomption n’est pas irréfragable : un salarié peut toujours saisir le juge en cas d’abus de pouvoir ou de détournement de pouvoir de l’employeur.
Par cet amendement, il s’agit de refuser une telle qualification de la rupture, en lui substituant un motif personnel de licenciement. La commission y est opposée, car la rupture du contrat de chantier à son terme normal ne repose pas sur un motif inhérent à la personne du salarié. Elle a donc émis un avis défavorable.
L’amendement n° 2 rectifié quinquies précise que la priorité de réembauche doit respecter les modalités prévues par l’accord de branche étendu.
La commission est favorable à une telle disposition, cohérente avec ses travaux, qui visent à conditionner cette priorité de réembauche à l’existence de stipulations dans l’accord.
Par cohérence, la commission est défavorable à l’amendement n° 67, amendement de repli visant à revenir sur ses travaux.
L’amendement n° 130 visant à supprimer la rupture conventionnelle collective, la commission y est défavorable, comme je l’ai déjà expliqué concernant l’amendement n° 49.
S’agissant de l’amendement n° 165, la commission avait prévu un contrôle minimal de l’administration sur le volet consacré aux mesures de reclassement et d’accompagnement.
Cet amendement prévoit que ces mesures doivent être précises et concrètes, sans qu’un contrôle d’opportunité ou de proportionnalité soit exercé par rapport aux capacités de l’entreprise.
Je partage avec Mme Schillinger le souhait de faire confiance aux partenaires sociaux qui signent un accord. En outre, l’adoption de cet amendement permet d’assurer des coordinations juridiques utiles.
Aussi, la commission a émis un avis favorable.
Monsieur Chasseing, concernant l’amendement n° 1 rectifié quater, il est nécessaire que l’administration exerce un contrôle sur cet accord, la question étant de déterminer sa portée. Le contrôle doit-il être minimal, normal ou proportionnel ?
L’Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement prévoyant un contrôle normal des mesures d’accompagnement des salariés acceptant la rupture conventionnelle.
La commission a transformé ce contrôle normal en contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation. Or, par cet amendement, mon cher collègue, vous revenez sur cet apport sans proposer de piste alternative. La commission y est donc défavorable.
Enfin, l’amendement n° 14 rectifié ter tend à préciser que le délai de quinze jours s’entend en jours ouvrables. Selon la commission, il n’est pas nécessaire d’apporter une telle précision : le délai actuel de quinze jours s’entend clairement en jours calendaires. Aussi, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je m’exprimerai tout d’abord sur les amendements nos 114, 42 et 48, qui concernent les contrats de chantier.
Le contrat de chantier est actuellement en vigueur dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Il permet d’embaucher les salariés en CDI sur des périodes de trois, quatre ou cinq ans, en fonction de la durée du chantier, laquelle est variable, dans la mesure où on n’en connaît jamais exactement la fin.
Ces embauches permettent aux salariés de bénéficier de l’ensemble des droits liés au CDI, notamment en matière de formation et d’ancienneté. Autre avantage du contrat de chantier, sur la feuille de paye, cela s’appelle un CDI, ce qui constitue une différence très importante notamment lorsqu’on veut emprunter, se loger. Il s’agit donc d’un « plus ». C’est d’ailleurs la raison pour laquelle chacun préfère le CDI au CDD !
Sur les cinq premiers mois de 2017, 20 000 contrats de chantier ont été signés dans le bâtiment. Par rapport à l’ensemble des emplois dans ce secteur, la proportion, sans être très forte, est quand même significative. Dans les domaines où les chantiers constituent une part très importante de l’activité, les entreprises hésitent à accepter des chantiers au motif qu’elles redoutent de devoir faire un plan social massif à la fin d’un premier chantier si elles n’ont pas alors un deuxième chantier.
Dans le cadre des ordonnances, nous avons décidé d’élargir à d’autres secteurs les contrats de chantier, à certaines conditions qui sont autant de garde-fous. Il s’agit de la construction navale, que vous avez citée – un chantier n’a pas pu avoir lieu pour cette raison précise –, de l’industrie cinématographique et de certains grands projets informatiques.
Nous avons posé comme condition que le contrat ne soit pas défini au niveau de l’entreprise, auquel cas nous ne pourrions sans doute pas en contrôler complètement l’usage. Il faut quand même être prudent à cet égard. En revanche, au niveau d’une branche – il ne s’agit pas des métiers de bouche : on ne fait pas des projets sur cinq ans dans la boulangerie ! –, on peut négocier des conditions d’accompagnement, de formation et de sortie – cela répond à des amendements –, ce qui permettra également aux entreprises de garder les personnes en CDI, alors même qu’elles ont développé des compétences. Bien évidemment, on ne peut associer l’obligation de réembauche au licenciement économique !
Pour autant, ce contrat permettra des trajectoires de longue durée dans certains secteurs embauchant aujourd’hui en CDD, afin de ne pas s’engager massivement dans des CDI, alors que l’essentiel de leur activité repose sur de grands chantiers. Dans les faits, ils renouvellent régulièrement des CDD de 18 mois ! Finalement, on a la flexibilité sans la sécurité ! Nous proposons donc une flexisécurité. Il faut permettre aux intérimaires ou CDD d’avoir la chance d’être en CDI de chantier. Un tel contrat doit être encadré au niveau de la branche et s’imposer aux entreprises.
Pour l’ensemble de ces raisons, je suis défavorable aux amendements nos 114, 42 et 48. Nous avons en effet défini les conditions permettant de sécuriser le contrat de chantier, lequel présente un intérêt pour le salarié et pour l’entreprise, grâce au dialogue social dans la branche.
Je suis bien évidemment défavorable à l’amendement n° 49, qui vise à supprimer la rupture conventionnelle collective, dispositif que j’ai expliqué précédemment.
Je souhaite toutefois évoquer un risque qu’il convient de prévenir. Comment éviter que, dans le cadre d’un accord majoritaire, les syndicats, les salariés et l’entreprise s’accordent en faveur de départs massifs en préretraite, payée par l’assurance chômage ? L’homologation doit permettre de vérifier qu’un tel cas de figure n’est pas possible. Par ailleurs, des mesures d’accompagnement, de reclassement, de formation et de mobilité sont nécessaires. Les DIRECCTE ont d’ores et déjà reçu des directives en ce sens.
Dans le cas de PSA, les préretraites seront entièrement financées par l’entreprise. Le coût du dispositif ne sera donc pas à la charge de la collectivité. Pourquoi pas, si cela correspond au désir des salariés et que l’entreprise paye intégralement ! Peu d’entreprises auront les moyens de le faire, ce qui limitera le nombre de situations similaires. Je le répète, s’il n’y a pas de mesures d’accompagnement, de reclassement et de mobilité, les DIRECCTE ne pourront pas homologuer les accords. On prévient ainsi le risque évoqué.
J’en viens à l’amendement n° 2 rectifié quinquies, qui concerne la priorité de réembauche en CDI à l’issue d’un contrat de chantier. Je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, je me verrai contrainte d’émettre un avis défavorable. En effet, c’est dans le cadre de la négociation collective de branche que les conditions doivent être définies. On ne peut à la fois soumettre les conditions à la négociation de branche et prévoir plus que ce qui est déjà prévu, à savoir que les modalités de la priorité de réembauche en CDI sont régies et négociées par les branches professionnelles. Cela serait superfétatoire.
Je suis défavorable à l’amendement n° 67, qui vise à supprimer la possibilité de conclure des accords de RCC dans les TPE. Pourquoi ce qui est bénéfique à la fois aux salariés et aux entreprises ne pourrait-il être possible dans les petites entreprises ?
Quant à l’amendement n° 130, qui vise également à supprimer la RCC, j’y suis défavorable.
Je suis favorable à l’amendement n° 165, qui tend à introduire des précisions sur le contrôle de la RCC et à corriger des erreurs matérielles. Son adoption permettra en effet de préciser le degré de contrôle de l’administration. Je viens de dire à quel point il sera important. Dans les cas rencontrés récemment, il s’est avéré inutile, les syndicats n’ayant pas trouvé d’accord. Toutefois, dans certains cas, il conviendra de vérifier que l’accord des salariés et des syndicats est plein et entier. Pour ce faire, il faut des critères précis, qui sont prévus par cet amendement.
En toute logique, je ne peux être favorable à l’amendement n° 1 rectifié quater, qui prévoit la suppression du contrôle de l’administration dans le cadre de la RCC. Ce contrôle est une homologation rapide, mais ferme et précise. Elle apporte des garanties sans trop peser sur les intéressés.
S’agissant de l’amendement n° 14 rectifié ter, en l’absence de précision contraire, il est considéré de manière usuelle – c’est l’interprétation retenue par la Cour de cassation – que l’expression s’entend en jours calendaires. Il n’est donc pas utile d’apporter des précisions sur ce point. Par conséquent, je vous demande, madame Gruny, de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Enfin, je suis favorable à l’amendement n° 191, qui permettra d’éviter certaines contestations ou interprétations. Il faut faire valoir l’expression « conseil des prud’hommes » dans cet article. Chaque fois que le droit est plus précis, c’est mieux pour tout le monde !
M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 48.
M. Dominique Watrin. Je le retire, monsieur le président ! Il comporte en effet une erreur dans sa formulation, comme l’ont montré les propos que j’ai tenus lors de sa présentation.
M. le président. L’amendement n° 48 est retiré.
L’amendement n° 2 rectifié quinquies est-il maintenu, monsieur Chasseing ?
M. Daniel Chasseing. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 1 rectifié quater n’a plus d’objet.
L’amendement n° 14 rectifié ter est-il maintenu, madame Gruny ?
Mme Pascale Gruny. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 14 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 191.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 43, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° L’article L. 1224-3-2 est abrogé ;
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. L’article 34 de l’ordonnance relative à la sécurisation des relations de travail prévoit, dans la continuité de la loi Travail de 2016, que, « en cas de succession d’entreprises dans l’exécution d’un marché, les salariés du nouveau prestataire ne peuvent invoquer utilement les différences de rémunération résultant d’avantages obtenus, avant le changement de prestataire, par les salariés dont les contrats de travail ont été poursuivis. »
Ainsi, lorsque la société Cyclocity a perdu le contrat des Vélib’ avec la mairie de Paris, les contrats des salariés ont été repris par la société Smovengo, qui a remporté le marché public.
Les salariés du service Vélib’ se sont vu proposer de poursuivre leur activité chez Smovengo, mais sans les primes. Ainsi, malgré leur ancienneté, le salaire mensuel brut a été diminué de 300 à 400 euros par rapport à ce qu’ils percevaient auparavant.
Cet exemple montre simplement et concrètement les difficultés rencontrées par les salariés dans le cadre d’un transfert conventionnel faisant suite à la perte d’un marché de services.
Sous prétexte de sécurisation, le dispositif prévu par le Gouvernement aboutit à baisser le coût du travail. En tout cas, il ne répond pas à ce problème précis. C’est pourquoi nous en demandons l’abrogation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’ordonnance n’a modifié qu’à la marge les dispositions issues de la loi Travail, en supprimant seulement la notion de sites.
Ainsi, aucun salarié de l’entreprise ayant remporté le marché ne pourra dorénavant invoquer des différences de traitement nées d’avantages conservés par des salariés transférés à la suite de l’obtention d’un marché par l’entreprise d’accueil. Ce faisant, l’ordonnance rend irrecevables les contentieux fondés sur les avantages conservés par des salariés transférés, en application d’un accord de branche étendu, vers l’entreprise qui a remporté le marché, quel que soit le lieu de travail des salariés requérants de l’entreprise d’accueil.
L’ordonnance vise donc à sécuriser les transferts conventionnels, dont la raison d’être est le maintien de l’emploi des salariés, en dépit de la perte d’un marché par l’entreprise d’origine.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. Il s’agit en effet de supprimer le cadre juridique visant à sécuriser les contrats de travail dans le cadre d’une succession d’entreprises. Or il semble de l’intérêt de tous de préserver un tel cadre.
M. le président. L’amendement n° 116, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À l’article L. 1225-71, après le mot : « indemnité », sont insérés les mots : « , qui ne peut être inférieure aux salaires des douze derniers mois, » ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement vise à améliorer l’indemnité allouée aux salariés en cas de non-respect par l’employeur de ses obligations relatives à la protection de la grossesse et de la maternité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je souhaite vous rappeler brièvement, mon cher collègue, l’objet de la réforme.
Un barème obligatoire avec des planchers et des plafonds a été créé pour fixer l’indemnité accordée à un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse.
En revanche, en cas de licenciements nuls, le barème ne s’applique pas, le code du travail prévoyant que l’indemnité allouée ne peut être inférieure à six mois de salaire, sans qu’un plafond soit prévu, quelle que soit la nature de la nullité du licenciement : méconnaissance des règles en matière de discrimination, de harcèlement, d’accident du travail, de grossesse ou de maternité, par exemple.
La commission estime que les règles doivent être simples et qu’il ne faut pas créer de nouvelles exceptions parmi les indemnités accordées en cas de licenciement nul. Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Nous avons prévu un plancher harmonisé pour tous les cas de figure. En revanche, dans les cas de discrimination, qu’il s’agisse notamment d’une discrimination syndicale ou liée à la situation de santé, il n’existe pas de plafond. Typiquement, pour les cas de grossesse ou de maternité, on serait bien dans un cas de discrimination.
En l’occurrence, le juge a donc une vraie marge d’appréciation,…
M. Jean-Louis Tourenne. Il y a un plancher !
Mme Muriel Pénicaud, ministre. … sans compter l’existence d’une indemnité plancher équivalant à six mois de salaire.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 177, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Amiel et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 15
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1232-6 est ainsi modifié :
a) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « et fixe » sont remplacés par les mots : « . Un arrêté du ministre chargé du travail fixe » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
II. – Après l’alinéa 16
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1233-16 est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, les mots : « décret en Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « arrêté du ministre chargé du travail » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
III. – Après l’alinéa 17
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1233-42 est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, les mots : « décret en Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « arrêté du ministre chargé du travail » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Il est proposé que les modèles de lettre de licenciement soient fixés par arrêté et non par décret en Conseil d’État. Ils pourront être plus facilement et plus rapidement ajustés par arrêté.
En outre, le présent amendement tend à supprimer la mention des droits et obligations dans les modèles de lettre. En effet, un tel alinéa peut induire une confusion quant au contenu de ces modèles. Si ceux-ci ont bien une visée informative, leur premier objectif est de notifier le licenciement. Il importe donc de ne pas créer de confusion quant à la nature de ce document, au regard des informations qui doivent y figurer et celles qui ne sont que facultatives. Pour ces dernières, il appartient à l’employeur de déterminer s’il souhaite les mentionner, ce qu’il lui sera toujours possible de faire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Il s’agit de prévoir que les modèles utilisés par les employeurs en cas de licenciement peuvent faire l’objet d’un arrêté du ministre du travail.
Le recours à un arrêté plutôt qu’à un décret est source de souplesse et de réactivité. La commission est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est également favorable à cet amendement. Ces modèles de lettres de licenciement, qui n’ont rien d’obligatoire, ont pour objet de sécuriser les deux parties. Il s’agit de veiller à ce que les motifs soient bien précisés.
En effet, en cas de vice de forme, on relève souvent un manque de précision, qui insécurise les parties. Le recours à un simple arrêté plutôt qu’à un décret en Conseil d’État paraît de bon sens. Ce ne sont pas des formulaires CERFA !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 44, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 16 et 17
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
2° Les douzième à quatorzième alinéas de l’article L. 1233-3 sont supprimés ;
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’article 15 de l’ordonnance relative à la sécurisation des relations de travail prévoit de limiter le périmètre d’appréciation des difficultés économiques au territoire national.
Cette mesure inquiète particulièrement les salariés, et notamment ceux des grandes entreprises, qu’elles soient françaises ou étrangères.
Avant l’application de l’ordonnance, pour déclencher un plan social, une entreprise ou un groupe ayant une implantation internationale devait justifier de sa mauvaise santé au plan international. Une multinationale ne pouvait pas faire de plan social si ses résultats à l’international déclarés étaient bénéficiaires.
Désormais, cette même multinationale pourra enclencher un plan social si ses résultats nationaux déclarés sont déficitaires. On imagine les maquillages de compte possibles !
La majorité sénatoriale répondra qu’elle propose justement d’interdire les licenciements économiques lorsqu’ils sont fondés sur des difficultés artificielles, notamment en matière comptable.
Comme l’a souligné le rapporteur, « il est très souvent très difficile pour un juge de détecter les fraudes en matière de licenciement économique quand elles interviennent au sein d’un groupe international. Un employeur peut en effet pendant plusieurs mois assécher volontairement le carnet de commandes d’un site, réduire les investissements matériels ou encore diminuer les embauches et les formations afin de justifier des licenciements économiques ultérieurs. »
Dans le cas des Goodyear Amiens, des Continental ou encore des Ford Blanquefort, c’est toujours le même argument qui est donné par les directions des entreprises : la filiale française n’est pas rentable, et ce même si le groupe est florissant à l’échelle mondiale.
Dans le cas des Continental, qui s’étaient battus contre leur licenciement en 2009, la justice n’avait reconnu qu’en 2013 l’illégalité des licenciements, soit longtemps après qu’ils avaient été prononcés.
Dès lors, pour éviter ces dérives, nous proposons de revenir au périmètre international, afin de prendre en considération l’ensemble des entités constitutives de l’entreprise.
M. le président. L’amendement n° 117, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° Le douzième alinéa de l’article L. 1233-3 est supprimé ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Je ne reviendrai pas sur les arguments qui viennent d’être évoqués. Simplement, je veux rappeler que la Cour de cassation, de façon constante, a demandé que, dans le cadre de demandes de licenciement dans des filiales françaises de groupes internationaux, l’ensemble des moyens de ces établissements soient examinés.
Ce texte prévoit une régression par rapport à la situation antérieure. Même si nous sommes vigilants, lorsqu’une entreprise voudra quitter le territoire national ou procéder à des licenciements, rien ne l’empêchera de faire apparaître que la filiale française est déficitaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Aux yeux de la commission, le choix fait par le Gouvernement dans la troisième ordonnance est un bon compromis entre le périmètre de l’entreprise et le périmètre international. Il a eu un impact très fort sur l’image de notre pays auprès des investisseurs étrangers.
La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements nos 44 et 117.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je suis bien évidemment défavorable à ces deux amendements. Je le rappelle, la France était le seul pays européen à avoir une telle clause, qui était considérée comme incompréhensible non seulement par les employeurs, mais aussi par les partenaires sociaux des autres pays européens.
En outre, la vraie protection n’est pas là ! La cause économique des licenciements s’évalue désormais au niveau national, sauf fraude. Or les juges peuvent considérer qu’il y a fraude lorsque les prix de transfert ou la remontée de dividendes sont manifestement déconnectés de la réalité économique de la filiale française ou de la maison mère française.
Ce qui fonctionne, c’est quand le juge fait ses appréciations. Les dispositions que vous évoquez ne font pas peser un risque supplémentaire sur les salariés français. En revanche, elles permettront une meilleure réciprocité, des investissements croisés et, donc, des créations d’emploi, notamment au sein de l’Europe.
M. le président. L’amendement n° 119, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Après le mot : « salarié », la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1233-4 est supprimée ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 119 est retiré.
L’amendement n° 118, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 16
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1233-4-1 est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. L. 1233-4-1. – Lorsque l’entreprise ou le groupe auquel elle appartient est implanté hors du territoire national, l’employeur demande au salarié, préalablement au licenciement, s’il accepte de recevoir des offres de reclassement hors de ce territoire, dans chacune des implantations en cause, et sous quelles restrictions éventuelles quant aux caractéristiques des emplois offerts, notamment en matière de rémunération et de localisation.
« Le salarié manifeste son accord, assorti le cas échéant des restrictions susmentionnées, pour recevoir de telles offres dans un délai de six jours ouvrables à compter de la réception de la proposition de l’employeur. L’absence de réponse vaut refus.
« Les offres de reclassement hors du territoire national, qui sont écrites et précises, ne sont adressées qu’au salarié ayant accepté d’en recevoir et compte tenu des restrictions qu’il a pu exprimer. Le salarié reste libre de refuser ces offres. Le salarié auquel aucune offre n’est adressée est informé de l’absence d’offres correspondant à celles qu’il a accepté de recevoir. »
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Je retire également cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 118 est retiré.
L’amendement n° 120, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au premier alinéa de l’article L. 1233-61, les mots : « d’au moins cinquante salariés », sont remplacés par les mots : « mentionnées à l’article L. 1233-71 » ;
Il n’est pas retiré ?… Dommage, c’était bien parti ! (Sourires.)
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Monsieur le président, on attend de moi, tout de même, que je respecte un certain nombre de règles de fonctionnement ! (Nouveaux sourires.)
Certains employeurs ont désormais la possibilité de licencier avant cession de l’entreprise, ce qui était antérieurement parfaitement interdit : le repreneur devait reprendre l’ensemble des salariés. La suppression de cette obligation, via cette nouvelle disposition, permettra à des employeurs qui cèdent leur entreprise de spéculer sur la valeur de celle-ci, débarrassant le repreneur d’un certain nombre de contraintes qui pouvaient lui être pénibles.
Par conséquent, je demande la suppression de cette disposition.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Le premier alinéa de l’article L. 1233–61 du code du travail prévoit que « Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l’employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l’emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. »
L’amendement vise à relever le seuil d’effectif de 50 à 1 000 salariés.
Sans le vouloir, notre collègue assouplit donc de manière radicale les règles du PSE, ce qui n’est sans doute pas son intention.
Il me semble qu’il voulait viser le troisième alinéa de l’article, qui porte sur le transfert des entités économiques autonomes, et non le premier alinéa.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Monsieur Tourenne, l’amendement n° 120 est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Tourenne. Monsieur le rapporteur, vos arguments sont tout à fait importants et séduisants. (Sourires.) Par conséquent, monsieur le président, je retire cet amendement. (Nouveaux sourires.)
M. le président. L’amendement n° 120 est retiré.
Je suis saisi de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 121, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° L’article L. 1235-2 est abrogé ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. L’article L. 1235-2 du code du travail permet à l’employeur de rectifier le motif du licenciement après la notification dudit licenciement au salarié, ce qui constitue une innovation intéressante du point de vue du droit.
En réalité, l’employeur n’est plus tenu d’apporter toutes les précisions nécessaires dans la notification du licenciement au salarié, si bien que ce dernier, au moment où il reçoit sa lettre de licenciement, peut ne pas savoir exactement pour quelles raisons on se prive de ses services, ce qui ne lui permet pas de préparer sa défense de façon aussi efficace que possible. Un droit est encore retiré au salarié !
M. le président. L’amendement n° 46, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1235-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1235-2. – Si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. » ;
…° L’article L. 1235-2-1 est abrogé ;
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement est défendu, monsieur le président : notre argumentaire vient d’être présenté.
M. le président. L’amendement n° 143, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1235-3 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, les mots : « est compris entre les montants minimaux et maximaux » sont remplacés par les mots : « ne peut être inférieur aux montants minimaux » ;
b) La troisième colonne du tableau constituant le troisième alinéa est supprimée ;
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Cet encadrement strict des indemnités prud’homales montre une fois de plus que les salariés sont les perdants de cette réforme ; les employeurs tentés par des licenciements hasardeux à bas coût seront encouragés par cette condamnation réduite.
Cet amendement a donc pour objet de supprimer les montants maximaux du barème, c’est-à-dire les plafonds d’indemnités prud’homales.
Nous souhaitons en effet préserver le pouvoir des juges prud’homaux et leur permettre de prendre en compte d’autres critères de préjudice, afin qu’ils puissent statuer, comme ils l’ont toujours fait, sur l’entier préjudice subi par le salarié abusivement licencié, lui octroyant ainsi une réparation adéquate et appropriée.
Par là même, nous respecterions le principe fondamental qui prévoit une réparation intégrale du préjudice subi.
M. le président. L’amendement n° 122, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le tableau constituant le troisième alinéa de l’article L. 1235-3 est ainsi rédigé :
«
Ancienneté du salarié dans l’entreprise (en années complètes) |
Indemnité minimale (en mois de salaire brut) |
Indemnité maximale (en mois de salaire brut) |
0 |
1 |
6 |
1 |
2 |
6 |
2 |
3 |
6 |
3 |
4 |
6 |
4 |
5 |
6 |
5 |
6 |
12 |
6 |
7 |
12 |
7 |
8 |
12 |
8 |
9 |
12 |
9 |
10 |
15 |
10 |
10 |
15 |
11 |
11 |
15 |
12 |
11 |
15 |
13 |
11 |
15 |
14 |
11 |
15 |
15 |
11 |
15 |
16 |
14 |
20 |
17 |
14 |
20 |
18 |
14 |
20 |
19 |
14 |
20 |
20 |
15 |
25 |
21 |
15 |
25 |
22 |
15 |
25 |
23 |
15 |
25 |
24 |
15 |
25 |
25 |
15 |
30 |
26 |
15 |
30 |
27 |
15 |
30 |
28 |
15 |
30 |
29 |
15 |
30 |
30 et au-delà |
15 |
30 |
» ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 124, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Les quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 1235-3 sont supprimés ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement est également défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 45, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 18 à 31
Remplacer ces alinéas par dix-neuf alinéas ainsi rédigés :
3° La section I du chapitre V du titre III du livre II de la première partie du code du travail est ainsi rédigée :
« Section 1
« Dispositions communes.
« Art. L. 1235-1. – En cas de litige, lors de la conciliation prévue à l’article L. 1411-1, l’employeur et le salarié peuvent convenir ou le bureau de conciliation proposer d’y mettre un terme par accord. Cet accord prévoit le versement par l’employeur au salarié d’une indemnité forfaitaire dont le montant est déterminé, sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles, en référence à un barème fixé par décret en fonction de l’ancienneté du salarié.
« Le procès-verbal constatant l’accord vaut renonciation des parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail prévues au présent chapitre.
« À défaut d’accord, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
« Il justifie dans le jugement qu’il prononce le montant des indemnités qu’il octroie.
« Si un doute subsiste, il profite au salarié.
« Art. L. 1235-2. – Si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
« Art. L. 1235-3. – Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
« Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9.
« Art. L. 1235-4. – Dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé.
« Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.
« Art. L. 1235-5. – Ne sont pas applicables au licenciement d’un salarié de moins de deux ans d’ancienneté dans l’entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives :
« 1° Aux irrégularités de procédure, prévues à l’article L. 1235-2 ;
« 2° A l’absence de cause réelle et sérieuse, prévues à l’article L. 1235-3 ;
« 3° Au remboursement des indemnités de chômage, prévues à l’article L. 1235-4.
« Le salarié peut prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi.
« Toutefois, en cas de méconnaissance des dispositions des articles L. 1232-4 et L. 1233-13, relatives à l’assistance du salarié par un conseiller, les dispositions relatives aux irrégularités de procédure prévues à l’article L. 1235-2 s’appliquent même au licenciement d’un salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés. » ;
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Je tiens à défendre cet amendement ; c’est très important !
Nous avons certes déjà débattu du plafonnement des indemnités prud’homales, mais je voudrais revenir sur les arguments du Gouvernement.
Le Gouvernement et la majorité ont affirmé à plusieurs reprises que le temps mis par les conseils des prud’hommes pour rendre leurs jugements est source d’insécurité pour les salariés.
Mais la bonne question est la suivante : pourquoi en est-on arrivé là, si ce n’est parce que l’État n’a pas donné auxdits conseils, jusqu’à présent, les moyens nécessaires à leur bon fonctionnement ?
Si nous voulons une justice du travail efficace, il faut en tirer les conséquences, c’est-à-dire lui donner les ressources nécessaires.
Au lieu de cela, et toujours sous couvert d’efficacité, madame la ministre, vous proposez une automatisation des peines. C’est sur ce point que nous avons avec vous un désaccord de fond.
J’ai bien compris ce que vous nous disiez : la barémisation des indemnités laissera au juge un pouvoir d’appréciation. Mais cet argument, me semble-t-il, ne tient pas la route : le juge ne pourra plus tenir compte de la situation familiale ou de la mobilité géographique du salarié qui aura été licencié, et licencié, de surcroît – je le rappelle ici –, de façon abusive.
Nous pensons, comme certains de nos collègues l’ont déjà dit, que la réparation doit être à la hauteur du préjudice subi, ni plus ni moins. La satisfaction de cette exigence passe par la prise en compte des difficultés réelles qui seront rencontrées par la victime pour retrouver un nouvel emploi ; ces difficultés varient bien évidemment d’un territoire à un autre, d’une personne à une autre.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de ces dispositions.
M. le président. L’amendement n° 47, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
3° L’article L. 1235-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1235-3. – Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
« Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9. » ;
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Quelques mots sur le plafonnement des indemnités prud’homales qui sont à la charge de l’employeur lorsqu’il licencie un salarié sans cause réelle et sérieuse.
Le plafonnement des indemnités est censé rassurer les employeurs qui seraient très inquiets des recours éventuels engagés par les salariés contre une décision de licencier.
Pour notre part, nous ne croyons pas à une telle crainte ; nous ne pensons pas que la modification et l’assouplissement des règles du licenciement permettront d’améliorer la création d’emplois, d’autant que, par la mise en place du plafonnement des indemnités, le juge prud’homal verra son pouvoir d’appréciation extrêmement limité. S’il est un vrai sujet d’inquiétude, c’est celui-là !
En outre, les salariés n’auront plus droit à une réparation intégrale du préjudice, prenant en compte, notamment, en cas de licenciement abusif, leur situation spécifique – je pense par exemple à leur situation familiale ou géographique.
Loin de sécuriser les salariés, il s’agit donc en réalité de reconnaître un droit de licencier abusivement, l’employeur connaissant à l’avance le prix de sa faute. Celui-ci pourra donc évaluer la situation et choisir de licencier ou non.
Pour ces raisons, nous demandons la suppression du nouvel article L. 1235–3 du code du travail et le rétablissement des dispositions antérieures.
Je sais bien qu’écrire une loi, c’est construire un cadre ; n’oublions pas, donc, qu’existent des possibilités d’interprétation ou de contournement. Les éléments que je viens de vous donner, mes chers collègues, montrent la nécessité d’abroger les articles auxquels j’ai fait référence.
M. le président. L’amendement n° 125, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le dernier alinéa de l’article L. 1235-3 est supprimé ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Je rejoins tout à fait ce qui vient d’être dit : ce texte est un véritable pousse-au-crime en même temps qu’un déni de justice.
Je ne suis pas versé dans les affaires de droit, mais c’est la première fois que je constate qu’on peut décider que la victime d’un dommage particulier n’aura pas droit à une réparation pleine et entière.
Je crains qu’il ne s’agisse d’une entorse aux fondements mêmes de notre droit, laquelle risque d’attiser quelques tentations. Il s’agit bien d’un pousse-au-crime : le chef d’entreprise, l’employeur, aura la tentation, sachant quel prix il aura à payer, non seulement de licencier, mais également de programmer le licenciement.
M. Michel Canevet. Mon cher collègue, vous voyez le mal partout !
M. le président. L’amendement n° 110, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À la seconde phrase du premier alinéa, le mot : « six » est remplacé par le mot : « douze » ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement vise à fixer à douze mois de salaire l’indemnisation minimale octroyée par le juge lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou lorsque sa réintégration est impossible.
M. le président. L’amendement n° 181, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 28 à 30
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à préciser le champ d’application de la notion de rattrapage.
M. le président. L’amendement n° 127, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 31
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
4° L’article L. 1235-3-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1235-3-2. – Lorsque le juge constate que le licenciement est intervenu en méconnaissance des articles L. 1132-1, L. 1153-2, L. 1225-4 et L. 1225-5 et que le salarié ne demande pas la poursuite de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge octroie au salarié une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice du paiement du salaire, lorsqu’il est dû, qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité et, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9. » ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Les licenciements entachés d’une faute d’une exceptionnelle gravité de la part de l’employeur, notamment d’actes de harcèlement ou de discrimination, sont exclus du barème obligatoire.
Cependant, les dispositions qui rappellent que l’indemnité est due sans préjudice du paiement du salaire, lorsque celui-ci est dû, qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité, et, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement légale, conventionnelle ou contractuelle, ont été supprimées.
Nous proposons de les rétablir. Il n’est pas normal qu’au cours de la période pendant laquelle le licenciement a été considéré comme frappé de nullité, le salarié se voie privé du salaire auquel il aurait eu droit.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 121, je voudrais rappeler à son auteur que l’alinéa 17 de l’article 6 n’institue qu’un droit à l’erreur très limité pour l’employeur : ce dernier ne dispose que de quinze jours et ne peut que préciser les motifs, en aucun cas en ajouter de nouveaux.
J’ajoute que la lettre de licenciement, précisée, le cas échéant, par l’employeur, fixe les limites du litige pour ce qui concerne les motifs de licenciement.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, ainsi que, pour les mêmes raisons, sur l’amendement n° 46, qui vise à interdire à l’employeur de préciser les motifs énoncés dans la lettre de licenciement après la notification de celui-ci.
Concernant l’amendement n° 143, l’intérêt du barème est justement d’offrir une forme de prévisibilité aux employeurs et aux salariés.
La commission est donc opposée à la suppression des plafonds, qui reviendrait à créer une incertitude similaire à celle qui prévalait avant les ordonnances – je rappelle qu’avant la création de ce barème, il existait, pour l’indemnité due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, un plancher fixé à six mois de salaire, mais pas de plafond.
Avis défavorable, donc, sur cet amendement.
Sur l’amendement n° 122, malgré le travail extrêmement important accompli par les membres du groupe socialiste pour essayer de nous convaincre qu’il serait intéressant de l’adopter, la commission a émis un avis défavorable.
L’amendement n° 124 vise à supprimer, dans le barème prud’homal, les planchers spécifiques pour les entreprises employant moins de onze salariés.
Lorsque le Conseil constitutionnel a censuré, le 5 août 2015, la première version du barème prud’homal présente dans la loi pour la croissance et l’activité, c’était parce que le plafond, et non le plancher, de l’indemnité devait être en lien direct avec le préjudice subi par le salarié.
Par conséquent, le risque d’une nouvelle censure par le Conseil constitutionnel n’est pas avéré, car l’ordonnance ne fixe que des planchers pour les petites entreprises.
Avis défavorable, donc, sur cet amendement.
S’agissant de l’amendement n° 45, la nouvelle rédaction proposée par M. Watrin et ses collègues écrase les règles du barème prud’homal. Avis défavorable.
Avis défavorable également sur l’amendement n° 47, qui tend à revenir sur la création du barème prud’homal.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 125, à condition de ne pas dépasser les plafonds du barème, l’indemnité sanctionnant un licenciement sans cause réelle et sérieuse est cumulable avec les autres indemnités imposées à l’employeur en cas de non-respect des procédures de consultation, de la priorité de réembauche, ou de l’obligation, dans les entreprises d’au moins onze salariés, de mettre en place un comité social et économique ou, à défaut, d’établir un procès-verbal de carence pour prononcer des licenciements économiques.
Cette autorisation du cumul permet de garantir l’objectif de prévisibilité des procédures de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L’avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement.
La commission a également émis un avis défavorable sur l’amendement n° 110.
Le plancher actuel de l’indemnisation d’un salarié victime d’un licenciement nul, fixé à six mois, semble déjà élevé à la commission, étant entendu que l’indemnité en question n’est pas plafonnée, contrairement à l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
J’ajoute qu’un plancher systématique de douze mois pourrait entraîner, pour les petites entreprises, en cas de condamnation, de graves difficultés, voire leur fermeture.
Attendons donc un ou deux ans pour tirer un premier bilan de ces nouvelles règles indemnitaires.
Enfin, sur l’amendement n° 127, la commission a émis un avis défavorable. Cet amendement a pour objet de modifier la rédaction de l’article L. 1235–3–2 et de rétablir les anciennes dispositions prévues à l’article L. 1235–3–1, lesquelles ont été totalement refondues dans le cadre de l’ordonnance. La commission souhaite revenir à la rédaction de l’ordonnance.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Sur l’amendement n° 121 de M. Tourenne, l’avis du Gouvernement est défavorable.
Cet amendement vise à supprimer les dispositions de l’ordonnance relatives à la procédure permettant à l’employeur de préciser les motifs énoncés dans la lettre de licenciement. Je rappelle que le but poursuivi est de sécuriser la procédure de licenciement en amont de la procédure contentieuse, car trop de litiges sont aujourd’hui liés au sentiment que les griefs invoqués dans la lettre de licenciement sont trop peu expliqués et détaillés. Plus on se parle et plus on est précis en amont, mieux c’est.
L’amendement n° 46 de M. Watrin a pour objet la suppression de la procédure de précision du motif de licenciement ; l’enjeu est notamment celui des motifs dits « contaminants ». Pour les mêmes raisons que celles qui ont été invoquées précédemment, l’avis du Gouvernement est défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 143 de Mme Taillé-Polian tend à supprimer les plafonds établis dans le cadre de la création du barème.
Je crois en avoir beaucoup parlé, au mois de juillet, lors de la discussion sur le projet de loi d’habilitation. C’est toute l’économie de cette disposition qui repose sur l’existence d’un plancher et d’un plafond. Je rappelle qu’entre le plancher et le plafond, le barème n’est pas fixé situation par situation ; le juge dispose donc d’une pleine capacité d’appréciation.
Point très important : le Conseil constitutionnel a validé le principe même du barème. Il a certes censuré les dispositions de la loi Macron rendant possibles des inégalités de traitement entre des salariés de petites et moyennes entreprises ; en revanche, le principe d’un barème comprenant des plafonds a bien été accepté, le Conseil constitutionnel considérant que les dommages et intérêts n’ont pas vocation à être sans limites, puisque d’autres variables sont à prendre en considération : la situation des salariés, l’intérêt général en termes d’emploi, la situation des entreprises. Le principe du barème est donc accepté par le Conseil constitutionnel.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement, de même que sur l’amendement n° 122 de M. Tourenne, qui vise à relever les planchers et les plafonds.
Les niveaux retenus ont été pesés en fonction des moyennes constatées, de telle façon que nous nous inscrivions bien dans la logique que nous souhaitions adopter : en finir avec les variations d’indemnisation de 1 à 4 pour des motifs et des situations similaires. Les plafonds et les planchers prévus me semblent équilibrés.
L’amendement n° 124 a pour objet la suppression du barème spécifique pour les entreprises de moins de onze salariés. Vous indiquez à tort, monsieur Tourenne, que des dispositions similaires ont été censurées par le Conseil constitutionnel. Encore une fois, à lire les décisions du 5 août 2015 et du 13 octobre 2016, on voit que le principe d’égalité devant la loi est respecté par les dispositions de l’ordonnance ; d’ailleurs, le Conseil d’État nous l’a confirmé. Juridiquement, nous sommes robustes.
Monsieur Watrin, par l’amendement n° 47, vous proposez le retour au texte antérieur à la publication de l’ordonnance sur la sanction du licenciement sans cause réelle et sérieuse. J’y suis évidemment défavorable. Comme je l’ai dit à l’instant, les montants alloués étaient très variables d’une juridiction à l’autre, sans que ces écarts puissent s’expliquer par des différences de situation objectives. La visibilité fait partie intégrante de la sécurisation des deux parties.
Je continue de répondre à M. Watrin : via l’amendement n° 45, qui est très proche du précédent, si ce n’est identique à lui, vous souhaitez rétablir la rédaction antérieure du code du travail en matière de sanction du licenciement sans cause réelle et sérieuse. J’y suis évidemment, là encore, défavorable. Vous avez quelque peu caricaturé l’intention du Gouvernement et, bientôt, je l’espère, du législateur. Tout le monde a compris que votre présentation était contraire à l’esprit de la réforme que nous souhaitons mettre en place.
Sur l’amendement n° 125 de M. Tourenne, qui vise à supprimer l’alinéa autorisant le cumul des indemnités dans la limite du barème, l’avis du Gouvernement est une nouvelle fois défavorable.
Nous entendons, par la création d’un tel barème, apporter de la clarté et de la prévisibilité. Cette disposition, qui organise le cumul, le cas échéant, de l’indemnité versée en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse avec les autres indemnités me semble répondre à cet objectif.
S’agissant du relèvement du plancher de l’indemnité applicable en cas de licenciement nul, de six à douze mois de salaire, j’ai déjà répondu de façon générale, monsieur Tourenne, sur la non-modification des planchers et des plafonds, dont le niveau prévu me paraît équilibré. Avis défavorable, donc, sur l’amendement n° 110.
Sur l’amendement n° 181 de M. le rapporteur, amendement rédactionnel dont l’adoption serait utile, j’émets un avis favorable.
L’amendement n° 127 de M. Tourenne vise à préciser que les salaires sont dus, même en l’absence de réintégration, lorsque le licenciement est nul.
Je ne suis pas favorable à cet ajout, qui n’est pas nécessaire. En l’occurrence, nous n’avons pas changé le droit. Les dispositions relatives au paiement des salaires, y compris celles qui couvrent les cas d’absence de réintégration, n’ont pas été modifiées par les ordonnances. L’intention du Gouvernement est de rester, en la matière, à droit constant.
M. le président. L’amendement n° 16 rectifié ter, présenté par Mme Gruny, MM. Gremillet, Bonne et Daubresse, Mmes Garriaud-Maylam et Lamure, M. Lefèvre, Mme Imbert, M. Longuet, Mme Micouleau, MM. Raison, Perrin, Paccaud et Dallier, Mmes Eustache-Brinio et Lassarade, MM. Savary, Laménie, Mandelli, Rapin, B. Fournier et Mouiller et Mme Deromedi, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 31
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° L’article L. 1235-7 est complété par les mots : « , ou encore, dans le cadre de l’article L. 1233-65 du présent code, de la notification d’un document énonçant le motif économique à l’origine du licenciement » ;
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. En matière de notification de rupture, il convient de tenir compte des dispositions de l’article L. 1233–65 du code du travail sur le contrat de sécurisation professionnelle, dit CSP, dans le cadre du licenciement économique.
Sur ce point, la Cour de cassation a décidé que l’écrit énonçant le motif économique devait être adressé au salarié soit dans le document écrit d’information sur le CSP remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, au cours de l’entretien préalable ou à l’issue de la dernière réunion des représentants du personnel, soit dans la lettre que l’employeur est tenu d’adresser au salarié, au plus tard à la date d’expiration du délai dont dispose ce dernier pour prendre parti sur son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle, c’est-à-dire 21 jours après que le CSP lui a été proposé.
Il convient donc d’adapter l’article L. 1235–7 du code du travail à ces dispositions.
En cas d’acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, le contrat de travail est rompu au terme d’un délai de réflexion de 21 jours. Dans le cas contraire, c’est la lettre de licenciement antérieurement envoyée qui vaut rupture du contrat de travail.
La commission m’a signalé que cet amendement était satisfait ; je voudrais simplement entendre, de la part de Mme la ministre, les précisions qui s’imposent, pour que nous soyons bien certains que la décision de la Cour de cassation n’est pas contraire à la loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je rappelle, au préalable, que le contrat de sécurisation professionnelle est un dispositif d’accompagnement renforcé, que doit proposer un employeur qui envisage de procéder à des licenciements économiques dans toute entreprise de moins de 1 000 salariés. Le salarié bénéficie en outre d’une allocation plus élevée que celle qui est accordée par Pôle emploi en cas de licenciement : 75 % du salaire journalier de référence.
Cet amendement présenté par Mme Gruny est, selon la commission, satisfait par l’article L. 1233–67 du code du travail, qui dispose que « L’adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle emporte rupture du contrat de travail. Toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par douze mois à compter de l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle. »
Notre collègue fait référence à une jurisprudence de la Cour de cassation qui porte sur un sujet un peu différent, puisque le juge a précisé l’obligation pour l’employeur d’indiquer au salarié le motif économique du licenciement et la priorité de réembauche dont il bénéficie.
J’imagine que Mme la ministre s’apprête à apporter à Mme Gruny les éléments demandés, et que, ces précisions étant données, notre collègue retirera son amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je confirme à Mme la sénatrice Gruny que l’article L. 1233–67 du code du travail prévoit déjà que « Toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par douze mois à compter de l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle. Ce délai n’est opposable au salarié que s’il en a été fait mention dans la proposition de contrat de sécurisation professionnelle. »
Il existe donc déjà des dispositions qui permettent d’adapter la prescription aux spécificités du contrat. C’est pourquoi votre amendement, madame la sénatrice, me semble satisfait.
Je suggère son retrait ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Madame Gruny, l’amendement n° 16 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Pascale Gruny. Je vais le retirer, monsieur le président. De telles précisions étaient néanmoins nécessaires ; je vous en remercie, madame la ministre.
Je retire donc cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 16 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 128, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 31
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au second alinéa de l’article L. 1235-11, le mot : « six » est remplacé par le mot : « douze » ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Le plancher de l’indemnité due au salarié dont le licenciement est nul et pour lequel la réintégration ou la poursuite de son contrat de travail est impossible est divisé par deux. Ainsi, le plancher serait de six mois de salaire, contre douze auparavant.
Certes, au-delà de ce minimum légal, la fixation du montant de l’indemnité relève du pouvoir souverain d’appréciation du juge du fond, mais le risque existe d’une généralisation du montant plancher, laquelle porterait une atteinte grave au régime de sanction de la nullité.
C’est la raison pour laquelle nous proposons de rétablir le niveau du plancher à douze mois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La publication de l’ordonnance a effectivement abaissé ce plancher de douze à six mois, par souci de coordination juridique avec le plancher de six mois prévu pour l’indemnité applicable en cas de nullité du licenciement dû à un comportement particulièrement grave de l’employeur, dont nous venons de parler.
La commission souhaite maintenir cette mesure de cohérence et de simplification ; elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 129, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 31
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À l’article L. 1235-13, le mot : « un » est remplacé par le mot : « deux » ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Le plancher de l’indemnité versée en cas de non-respect de la priorité de réembauche est réduit de deux à un mois : encore une division par deux ! De là à penser qu’il s’agit d’acharnement…
Nous demandons le rétablissement du plancher à deux mois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 50, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 49
Insérer vingt-huit alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1242-8 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1242-8. – La durée totale du contrat de travail à durée déterminée ne peut excéder dix-huit mois compte tenu, le cas échéant, du renouvellement intervenant dans les conditions prévues à l’article L. 1243-13.
« Cette durée est réduite à neuf mois lorsque le contrat est conclu dans l’attente de l’entrée en service effective d’un salarié recruté par contrat à durée indéterminée ou lorsque son objet consiste en la réalisation des travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité.
« Elle est portée à vingt-quatre mois :
« 1° Lorsque le contrat est exécuté à l’étranger ;
« 2° Lorsque le contrat est conclu dans le cadre du départ définitif d’un salarié précédant la suppression de son poste de travail ;
« 3° Lorsque survient dans l’entreprise, qu’il s’agisse de celle de l’entrepreneur principal ou de celle d’un sous-traitant, une commande exceptionnelle à l’exportation dont l’importance nécessite la mise en œuvre de moyens quantitativement ou qualitativement exorbitants de ceux que l’entreprise utilise ordinairement. Dans ce cas, la durée initiale du contrat ne peut être inférieure à six mois et l’employeur doit procéder, préalablement aux recrutements envisagés, à la consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’il en existe.
« Ces dispositions ne sont pas applicables au contrat de travail à durée déterminée conclu en application de l’article L. 1242-3 » ;
…° Les articles L. 1242-8-1 et L. 1242-8-2 sont abrogés ;
…° L’article L. 1243-13 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1242-13. – Le contrat de travail est transmis au salarié, au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche. » ;
…° L’article L. 1243-13-1 est abrogé ;
…° L’article L. 1244-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1244-3. – À l’expiration d’un contrat de travail à durée déterminée, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de travail temporaire, avant l’expiration d’un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat, renouvellement inclus. Ce délai de carence est égal :
« 1° Au tiers de la durée du contrat venu à expiration si la durée du contrat, renouvellement inclus, est de quatorze jours ou plus ;
« 2° À la moitié de la durée du contrat venu à expiration si la durée du contrat, renouvellement inclus, est inférieure à quatorze jours.
« Les jours pris en compte pour apprécier le délai devant séparer les deux contrats sont les jours d’ouverture de l’entreprise ou de l’établissement concerné. » ;
…° L’article L. 1244-3-1 est abrogé ;
…° L’article L. 1244-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1244-4. – Le délai de carence n’est pas applicable :
« 1° Lorsque le contrat de travail à durée déterminée est conclu pour assurer le remplacement d’un salarié temporairement absent ou dont le contrat de travail est suspendu, en cas de nouvelle absence du salarié remplacé ;
« 2° Lorsque le contrat de travail à durée déterminée est conclu pour l’exécution de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité ;
« 3° Lorsque le contrat de travail à durée déterminée est conclu pour pourvoir un emploi à caractère saisonnier ou pour lequel, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de cet emploi ;
« 4° Lorsque le contrat est conclu pour assurer le remplacement de l’une des personnes mentionnées aux 4°et 5° de l’article L. 1242-2 ;
« 5° Lorsque le contrat est conclu en application de l’article L. 1242-3 ;
« 6° Lorsque le salarié est à l’initiative d’une rupture anticipée du contrat ;
« 7° Lorsque le salarié refuse le renouvellement de son contrat, pour la durée du contrat non renouvelé. » ;
…° L’article L. 1244-4-1 est abrogé ;
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. L’article 22 de l’ordonnance relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail prévoit de confier à la négociation de branche les règles relatives à la durée des contrats à durée déterminée, alors que ce champ relevait auparavant de la loi d’ordre public.
Le nouvel article L. 1242-8 du code du travail résultant de l’ordonnance n° 2017-1387 ne mentionne même plus de durée maximale pour les CDD. Ainsi, les branches ne sont plus contraintes par une durée maximale alors que la loi fixait auparavant un délai de dix-huit mois, renouvellement inclus. Le délai légal de dix-huit mois ne s’applique plus qu’à défaut d’accord de branche étendu, de manière supplétive.
Ces dispositions marquent le recul de la loi commune et encouragent une négociation de régression au détriment des protections dont pouvaient bénéficier les salariés, notamment les plus précaires, les femmes et les jeunes en particulier.
Je rappelle que les femmes sont plus souvent à temps partiel que les hommes. La proportion de femmes salariées à temps partiel dans les TPE, les très petites entreprises, est deux fois et demie plus importante que la proportion d’hommes à temps partiel : 41,4 % des femmes qui travaillent sont concernées, contre 15,5 % des hommes – madame la ministre, je pense que vous avez connaissance de ces chiffres.
Le recours aux contrats courts est d’ailleurs plus fréquent dans les TPE, avec 13,1 % de contrats à durée déterminée, contre 9,5 % de salariés en CDD dans les entreprises de 10 à 19 salariés.
Il est donc indispensable d’encadrer les négociations de branche par une norme supérieure. Pour ces raisons, nous demandons le retrait de ces dispositions et le rétablissement du droit antérieur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission considère que l’ordonnance donne plus de poids aux accords de branche étendus pour déterminer la durée maximale des CDD, le nombre de leurs renouvellements et les règles du délai de carence, dans le respect de l’ordre public social fixé par la loi.
Mes chers collègues, faisons confiance aux partenaires sociaux de la branche.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. La gestion de la qualité de l’emploi, incluant les modalités relatives aux CDD, fait partie de ces sujets issus des discussions engagées avec les partenaires sociaux. L’idée, encore une fois, c’est bien de faire confiance au dialogue social dans le cadre de la branche pour adapter les règles au regard des différences qui peuvent exister selon les métiers.
Cela étant, n’oublions pas le caractère supplétif de la loi : si les partenaires sociaux ne se mettent pas d’accord, la loi s’applique. La disposition visée par le présent amendement n’emporte donc aucun risque par rapport aux droits des salariés. Elle repose au contraire, une nouvelle fois, sur la confiance, sur le fait que ces droits peuvent aussi être améliorés d’un commun accord. Telle est toute la philosophie des ordonnances.
Par conséquent, le Gouvernement est évidemment contraint d’émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 153, présenté par Mme C. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 52
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1442-17 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1442-17. – Le conseiller prud’homme qui refuse de se faire installer ou qui a été déclaré démissionnaire peut d’office ou à sa demande être relevé de l’incapacité prévue par l’article L. 1441-10. » ;
…° L’article L. 1442-18 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « , ou de quatre ans à partir de la déchéance » sont supprimés ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « dans le premier cas et quatre ans dans le second » sont supprimés ;
La parole est à Mme Catherine Fournier.
Mme Catherine Fournier. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, dont l’objet est de supprimer toute possibilité de relèvement en cas de déchéance prononcée par la Commission nationale de discipline des conseillers prud’hommes, par cohérence avec les nouvelles sanctions disciplinaires prévues par la loi du 6 août 2015.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 131, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 52
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 1471-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « exécution », sont insérés les mots : « ou la rupture » ;
b) Le deuxième alinéa est supprimé ;
c) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « Les deux premiers alinéas ne sont toutefois pas applicables » sont remplacés par les mots : « Le premier alinéa n’est toutefois pas applicable » ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Par cet amendement, nous entendons rétablir le délai de recours à deux ans en cas de rupture du contrat de travail. D’une manière générale, les délais n’ont cessé d’être réduits pour sécuriser les employeurs. Le délai d’un an nous semble trop court, parce qu’il nous amènerait à la situation paradoxale dans laquelle le requérant aurait moins de temps pour monter son dossier que les tribunaux n’en auraient pour l’instruire, puisque certaines procédures en région parisienne durent près de deux ans.
Lorsqu’un salarié est victime d’un licenciement, les conséquences psychologiques peuvent être lourdes et son premier réflexe ne sera pas forcément de mettre en question la légalité de son licenciement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Il est vrai que la loi relative à la sécurisation de l’emploi de 2013 a réduit de cinq à deux ans ce délai de prescription. Dans la même lignée, la troisième ordonnance a dédoublé ce dernier : il reste de deux ans pour les actions portant sur l’exécution du contrat de travail, mais est réduit à un an pour les actions visant la rupture de ce contrat.
Ce délai de réflexion d’un an est, selon la commission, suffisant. Je rappelle que la règle de droit commun pour attaquer un acte administratif, notamment quand il concerne un agent public, est de deux mois seulement.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’avis est également défavorable. L’objectif était d’harmoniser tous les délais de recours de droit commun en cas de rupture du contrat de travail, ramenés à un an dans l’ordonnance.
Monsieur le sénateur, les comparaisons internationales que nous avons effectuées le montrent, même réduit à un an, le délai permet de prendre en compte la dimension psychologique du licenciement que vous évoquez à juste titre.
En Allemagne, et cela montre que nous ne la prenons pas toujours comme modèle, contrairement à ce que j’ai pu entendre précédemment, ce délai est de trois semaines, ce qui n’était absolument pas envisageable.
Un délai d’un an me paraît une solution équilibrée. Il est plutôt plus important que dans de nombreux autres pays européens. Il est suffisant pour englober le temps de l’émotion, de la réflexion, de la réaction et de la contestation.
M. le président. L’amendement n° 51, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 52
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le dernier alinéa de l’article L. 3122-15 est supprimé ;
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. L’article 32 de l’ordonnance relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail instaure une présomption de conformité aux dispositions d’ordre public pour tous les accords d’entreprise portant sur la mise en place du travail de nuit. Concrètement, cela signifie que, quel que soit le motif du recours au travail de nuit, l’accord bénéficie d’une présomption de légalité.
Pourtant, les risques de cancer, notamment de la peau et du sein, augmentent de 19 % en moyenne pour les femmes travaillant de nuit pendant plusieurs années. Ce chiffre est issu d’une étude sérieuse, au cours de laquelle les chercheurs ont passé en revue 61 travaux de recherche portant sur 3,9 millions de participants et couvrant plus de 100 000 patients.
Chez les travailleurs de nuit, le sommeil est en effet très affecté. La plupart des études l’ont montré, le travail de nuit entraîne une réduction du temps de sommeil d’au moins une à deux heures. L’accroissement des risques s’explique non pas seulement par la diminution du temps global de sommeil, mais plutôt par ce que l’on appelle la désynchronisation, c’est-à-dire l’exposition à des perturbations majeures de l’horloge biologique.
C’est pourquoi, dans un souci de santé publique, il nous semble indispensable de rétablir un encadrement du travail de nuit par un accord collectif, mais aussi de lever la présomption de légalité des accords d’entreprise mettant en place un tel dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Mon cher collègue, je comprends vos interrogations. Il ne faudrait évidemment pas banaliser le travail de nuit en raison de ses conséquences sur la santé des travailleurs.
Mais cette présomption de légalité n’est pas absolue : le juge pourrait annuler un accord ou écarter son application dans un litige individuel s’il est manifestement contraire aux dispositions de l’article L. 3122-1 du code du travail.
Je le rappelle également, cet article prévoit que « le recours au travail de nuit est exceptionnel » ; qu’il doit prendre en compte « les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs » ; et qu’il doit être « justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale. »
Conservons cette présomption de légalité et tirons un bilan de son application dans un an ou deux. Pour le moment, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je le rappelle à mon tour, le code du travail dispose, cela ne change évidemment pas, que « le recours au travail de nuit est exceptionnel » et qu’il n’est justifié que « par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale. »
À défaut de définition légale, les tribunaux, dans le cadre des contentieux engagés, sont amenés à délimiter les contours de cette justification, ce qui crée une certaine forme d’insécurité juridique.
Depuis la loi du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, le recours à la négociation collective est obligatoire pour la mise en place du travail de nuit. Les justifications que doit comporter un tel accord doivent correspondre à l’un des deux cas prévus par le code du travail : la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale.
Monsieur le sénateur, il n’est pas question d’y revenir. Vous avez raison, le travail de nuit doit rester exceptionnel, puisque, on le sait, il n’est pas sans conséquence.
La loi confie également aux partenaires sociaux la responsabilité de prévoir les contreparties au travail de nuit, ainsi que les mesures destinées à faciliter pour les salariés travaillant la nuit l’articulation de leur activité professionnelle nocturne avec leur vie personnelle.
La prise en compte des sujets de santé dans le cadre de ces contreparties est un élément d’autant plus important que la connaissance sur les effets du travail de nuit est maintenant plus fine.
Il est vrai que l’article 32 de l’ordonnance présume la légitimité des partenaires sociaux à incarner l’intérêt collectif, dans ce domaine comme dans les autres. C’est ce sur quoi repose l’économie des ordonnances.
En droit, la règle générale est que la charge de la preuve incombe à celui qui se plaint, en l’espèce, la partie, signataire ou non de l’accord, qui considère que les deux motifs justifiant le travail de nuit prévus par le code du travail n’ont pas été respectés.
Par ce projet de loi, nous entendons promouvoir une société de confiance, au travers d’un dialogue social exigeant, bien loin du pouvoir unilatéral de l’employeur. Faut-il le rappeler, tous les accords devront être majoritaires. Pour ce qui est du rôle des partenaires sociaux en la matière, nous ne changeons rien pour ce qui concerne les conditions autorisant le recours exceptionnel au travail de nuit, rien quant à la nécessité pour les partenaires sociaux de négocier les contreparties, rien non plus à l’égard des possibilités de recours.
La seule modification, et c’est pour nous un point très important, consiste à considérer qu’un accord, dès lors qu’il est conclu, est présumé justifié. Cela n’ôte rien aux possibilités de recours mais est totalement cohérent par rapport à cette vision du droit social qui transparaît dans les ordonnances : oui, l’accord a une valeur, les partenaires sociaux veillent à l’intérêt général, donc à celui des salariés.
Nous serons bien sûr vigilants sur ce sujet. Je n’ai moi-même aucune inquiétude, car je ne connais pas d’accord sur le travail de nuit qui ne prévoie pas un encadrement très précis par les partenaires sociaux. Si un dérapage devait être constaté, il y aurait un recours sur lequel le juge serait appelé à se prononcer.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Je ne suis pas complètement convaincu par les explications de M. le rapporteur sur cette question de la présomption de légalité. Certes, la possibilité existe d’un recours contentieux dans le cas d’un litige individuel, mais on imagine les difficultés qu’il y aurait à engager un tel processus.
J’entends bien qu’il s’agit d’un dispositif exceptionnel. N’oublions tout de même pas les millions de travailleuses plus particulièrement concernées et les risques récurrents de cancers. C’est un problème de santé publique qui mériterait d’être traité de manière un peu plus sérieuse. Renvoyer au dialogue social, c’est un peu facile ; prétendre qu’un accord d’entreprise suffira à régler toutes les questions, c’est pour le moins ambitieux.
Madame la ministre, je vous le dis très simplement, la mesure que vous proposez ne règle en rien le recul qui a été entériné dans la précédente loi Travail, dite loi El Khomri. Sous couvert d’une pénurie de médecins du travail, cette dernière a prolongé le délai prévu entre deux visites médicales, fixé pendant très longtemps, si ma mémoire est bonne, à six mois.
Voilà autant d’éléments qui font émerger une banalisation du travail de nuit, alors que c’est un problème de santé publique. Et puisque l’on propose d’aller vers l’égalité hommes-femmes et que nombreuses sont les femmes qui sont victimes du travail de nuit, cette question aurait dû être traitée autrement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 52, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 58 à 61
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
9° L’article L. 8241-3 est abrogé.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’article 33 de l’ordonnance relative à la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail prévoit de faciliter le prêt de main-d’œuvre des grandes entreprises vers les petites.
Concrètement, pendant une durée d’au plus deux ans, les groupes ou les entreprises d’au moins 5 000 salariés pourront mettre à disposition leurs salariés auprès de jeunes entreprises de moins de huit ans d’existence ou de PME d’au plus 250 salariés. Cette opération sera considérée comme dépourvue de but lucratif, y compris lorsque le montant facturé par l’entreprise prêteuse à l’entreprise utilisatrice est inférieur aux salaires versés au salarié, aux cotisations sociales et aux frais professionnels.
Une telle disposition permettra aux grandes entreprises d’externaliser leur main-d’œuvre dans des petites entreprises, qui deviendraient de fait leurs sous-traitants, sans qu’elles assument la totalité de la prise en charge des salaires.
Le risque est grand, de notre point de vue, d’accroître le pouvoir des donneurs d’ordre sur les sous-traitants. C’est pourquoi nous demandons l’abrogation d’une telle disposition.
M. le président. L’amendement n° 161 rectifié, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Amiel et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 59
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au 1° du même I, après les mots : « Pour les entreprises utilisatrices, », sont insérés les mots : « aux personnes morales dont la liste est fixée aux a à g du 1 de l’article 238 bis du code général des impôts, » ;
II. – Après l’alinéa 60
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le premier alinéa du même II est complété par les mots : « ou est égal à zéro ».
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. L’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 a introduit un nouveau dispositif de prêt de main-d’œuvre à but non lucratif destiné à sécuriser la mise à disposition de salariés, souvent hautement qualifiés, apportant leurs compétences à des jeunes entreprises ou à des PME.
Afin d’assurer que les structures bénéficiant aujourd’hui du mécénat de compétences, lequel prend souvent la forme d’un prêt de main-d’œuvre, puissent bien inscrire l’accueil de salariés pour des projets d’intérêt général ou d’utilité sociale dans ce nouveau cadre juridique, cet amendement vise à étendre expressément la définition des entreprises utilisatrices figurant à l’article L. 8241-3 du code du travail à ces personnes morales dont la liste est fixée dans le code général des impôts.
Ainsi, des structures associatives ou des fondations pourront accueillir, dans les conditions prévues par le code du travail, des salariés de grandes entreprises sans encourir aucun risque juridique ni fiscal.
Par ailleurs, cet amendement a pour objet de préciser les possibilités de facturation des charges correspondant au salarié prêté par son employeur à l’entreprise d’accueil, en confirmant la possibilité de prêts à titre gratuit, avec une facturation de charges nulles, qui pourront bénéficier à des entreprises ou associations disposant de moyens très limités pour s’attacher l’apport de compétences nouvelles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 52, je voudrais dissiper un malentendu. Contrairement à ce qui est écrit dans son objet, l’entreprise prêteuse devra assumer la totalité de la rémunération des salariés mis à disposition, qui conservent évidemment leur rémunération d’origine.
Ce n’est que dans la facturation du prêt calculée par la grande entreprise que celle-ci pourra prévoir un niveau inférieur au coût réel, afin, justement, de donner un coup de pouce à l’entreprise d’accueil.
Concrètement, un ingénieur chevronné employé dans un grand groupe pourra conserver son salaire lorsqu’il est mis à la disposition d’une start-up, tandis que l’entreprise d’accueil ne remboursera, par exemple, que la moitié du coût réel du prêt.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Pour ce qui est de l’amendement n° 161 rectifié, l’élargissement aux associations du prêt de main-d’œuvre à but non lucratif a paru utile à la commission. Faute d’être mentionnées explicitement, les associations pourraient en effet être exclues du dispositif.
Cet amendement vise également à préciser que la facturation du prêt de la structure prêteuse à la structure d’accueil peut être nulle, afin de ne pas remettre en cause les actions de mécénat de compétences qui existent aujourd’hui.
C’est donc un avis favorable qu’émet la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Ces deux amendements portent sur le mécénat de compétences de la part de grandes entreprises désireuses d’aider leur écosystème composé des start-up ou des PME qui gravitent autour d’elles. Ce type de mécénat correspond souvent à une forte demande des salariés, qui souhaitent apporter, dans le cadre d’un projet industriel ou marketing, leurs compétences à des associations ou petites entreprises, qui, financièrement, ne pourraient pas se les offrir. Ce besoin de compétences n’est pas forcément permanent.
J’ai moi-même eu à connaître d’un exemple, celui d’une grande association œuvrant dans le domaine de l’aide alimentaire, qui fait face à des besoins de logistique extrêmement complexes. Au travers du mécénat de compétences, une grande entreprise a pu mettre à sa disposition des ingénieurs logisticiens pendant quelques mois, le temps que cette association mette en place un système lui permettant de changer d’échelle.
De la même manière, les start-up, lorsqu’elles démarrent leur activité, n’ont souvent pas les moyens de s’offrir des compétences en matière de recherche et développement ou de marketing. Le mécénat de compétences, au-delà de promouvoir la solidarité, est un formidable moyen de développer la motivation des salariés dans les grands groupes. L’ordonnance permet de sécuriser un tel dispositif sur le plan juridique.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à l’amendement n° 52 et favorable à l’amendement n° 161 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix l’article 6, modifié.
(L’article 6 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 6
M. le président. L’amendement n° 53, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1233-2 du code du travail est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Est réputé dépourvu de cause réelle et sérieuse tout licenciement pour motif économique ou toute suppression d’emplois sous quelque forme que ce soit, décidé par un employeur dont l’entreprise a constitué des réserves ou réalisé un résultat net ou un résultat d’exploitation positif au cours des deux derniers exercices comptables.
« Est également dépourvu de cause réelle et sérieuse tout licenciement pour motif économique ou toute suppression d’emploi sous quelque forme que ce soit, décidé par un employeur dont l’entreprise a, au cours des deux derniers exercices comptables, distribué des dividendes ou des stock options ou des actions gratuites ou procédé à une opération de rachat d’actions. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. La question des licenciements dits « boursiers » est une vieille histoire ; cela fait déjà quelques années que l’opinion publique a l’occasion de se scandaliser en raison de la manière dont certaines directions d’entreprise se séparent d’une partie de leurs salariés.
Différent du licenciement pour motif personnel, qui tient à la personne même du salarié, et du licenciement pour motif économique, caractérisé par des difficultés économiques ou des mutations technologiques, quand bien même il y aurait des choses à dire à leur sujet, le licenciement boursier est inacceptable. Or il présente la particularité de peser sur les salariés qui en sont victimes, alors même que les entreprises qui les employaient jusqu’alors ne connaissent aucune difficulté particulière ni prévisible.
Aujourd’hui, les entreprises peuvent licencier alors qu’elles sont prospères. Elles peuvent même licencier dans le seul but d’accroître la rémunération des actionnaires.
C’est en 1999 que l’affaire Michelin a mis en évidence ce type de situations. Chacun s’en souvient, cette année-là, la direction annonçait simultanément des bénéfices semestriels en augmentation de 20 %, une hausse des dividendes et 7 500 suppressions d’emplois suivies, dès le lendemain, par une progression de 12 % du cours de l’action.
Plus récemment, en 2010, Alstom, qui avait déclaré 1,22 milliard d’euros de bénéfices, a décidé de supprimer 4 000 postes. On sait où cela nous a menés, aujourd’hui, avec les risques de démantèlement de l’entreprise.
Chaque semaine, chaque jour, des entreprises bénéficiaires décident de licencier, afin de conserver les marges de profit nécessaires à une importante redistribution aux actionnaires.
Désormais avec les ruptures conventionnelles collectives, Carrefour, la Société générale, Peugeot et les autres pourront sans sourciller licencier pour accroître les dividendes.
Notre amendement vise justement à refuser cela et à interdire que les entreprises championnes des dividendes versés aux actionnaires licencient leurs salariés sans état d’âme.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission a déjà été conduite à repousser à de très nombreuses reprises l’interdiction des licenciements dits boursiers que défendent les auteurs de cet amendement.
M. Fabien Gay. Parce qu’ils continuent !
M. Alain Milon, rapporteur. Elle émet, cette fois encore, un avis défavorable.
Mme Laurence Cohen. Ce n’est pas une réponse !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Éliane Assassi. Toujours pas de réponse !
M. Fabien Gay. Répondez sur le fond !
M. le président. L’amendement n° 54, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La sous-section 1 de la section 2 du chapitre V du titre III du livre II de la première partie du code du travail est complétée par un article L. 1235-7-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 1235-7-1-… – Lorsque le juge constate que le licenciement pour motif économique ou les suppressions d’emploi sont dépourvus de cause réelle et sérieuse, il ordonne le remboursement du montant de la réduction de cotisations sociales patronales mentionnée à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale dont a bénéficié l’entreprise pour les salariés concernés par le licenciement ou la suppression d’emplois envisagés.
« Dès lors que le juge prononce la nullité du licenciement pour motif économique ou de la suppression d’emploi, l’employeur perd le bénéfice des dispositifs prévus aux articles 244 quater B et 244 quater C du code général des impôts si son entreprise est déjà bénéficiaire, ou l’opportunité d’en bénéficier, pour une période ne pouvant excéder cinq ans. Le juge peut également condamner l’employeur à rembourser tout ou partie du montant dont son entreprise a bénéficié au titre de ces dispositifs. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Cet amendement, qui vient en complément du précédent, tend au remboursement des aides publiques lorsque le licenciement pour motif économique aura été jugé sans cause réelle et sérieuse, notamment en cas de licenciement économique boursier. L’entreprise se verra alors condamnée à rembourser le montant des exonérations de cotisations sociales dont elle a bénéficié au titre de l’ensemble des salariés initialement concernés par les licenciements ou les suppressions d’emplois.
Par ailleurs, l’entreprise perdra, le cas échéant, le bénéfice ou l’opportunité de bénéficier du crédit d’impôt recherche, le CIR, ou du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le fameux CICE.
Enfin, le juge pourra ordonner le remboursement de tout ou partie du montant dont aura bénéficié l’entreprise au titre du CIR ou du CICE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Comme sur l’amendement précédent, l’avis est défavorable. Je rappelle que, en cas de licenciement économique sans cause réelle et sérieuse, le juge peut ordonner le versement d’une indemnité en application d’un barème.
L’adoption de l’amendement poserait un problème majeur, dans la mesure où il ne précise pas le nombre d’années sur lequel le remboursement des réductions de cotisations patronales peut porter : s’agit-il d’un an, de deux ans, de trois ans ou de plus encore ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Si j’émets un avis défavorable sur cet amendement, je comprends l’intention de ses auteurs. Il n’est pas concevable d’inscrire dans le présent projet de loi une telle mesure de portée universelle, appelée à s’appliquer dans tous les cas de licenciement, quel que soit le contexte.
Pour autant, dès lors que l’État prend des engagements spécifiques à l’égard d’une entreprise, je pense notamment à certains exemples de l’actualité récente, il est clair que, si des licenciements économiques devaient par la suite intervenir, il faudrait que cela se passe dans le respect complet desdits engagements. C’est sur ce terrain-là que les choses se jouent.
C’est bien parce qu’il ne saurait y avoir universalité que le juge est conduit à apprécier la cause réelle et sérieuse du licenciement et le montant des dommages et intérêts éventuels. Il n’est pas possible de sanctionner uniformément tous les cas de figure existants, justement parce qu’ils ne correspondent pas aux mêmes situations.
Le Gouvernement s’emploie à développer des engagements contractuels avec un certain nombre d’entreprises. Il peut y avoir, selon le contexte, des motifs de licencier, mais, je le répète, ce n’est pas une raison pour ne pas respecter les engagements pris. Nous continuerons d’être vigilants sur ce point.
M. le président. L’amendement n° 55, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 1242-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1242-2 – Le contrat de travail ne peut être conclu pour une durée déterminée que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas suivants :
« 1° Remplacement d’un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail et pour pourvoir directement le poste de travail du salarié absent ;
« 2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise. Au titre de ce motif, le nombre de salariés occupés en contrat de travail à durée déterminée ne peut excéder 10 % de l’effectif moyen occupé au cours de l’année civile précédente dans les entreprises d’au moins onze salariés. Le nombre obtenu est arrondi à l’unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d’ancienneté dans l’entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée ;
« 3° Emplois à caractère saisonnier de courte durée définis par décret ou pour lesquels dans certains secteurs d’activité définis par décret, il est d’usage constant et établi de recourir à des emplois temporaires en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;
« 4° Remplacement d’un chef d’entreprise temporairement absent ;
« 5° Réalisation d’un contrat d’apprentissage. » ;
2° Les articles L. 1242-3 et L. 1242-4 sont abrogés.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Avec cet amendement, nous proposons, d’une part, d’encadrer le recours des entreprises aux contrats de travail à durée déterminée, afin que ceux-ci cessent d’être utilisés comme des variables d’ajustement, d’autre part, de limiter le nombre de personnes en contrat à durée déterminée à 10 % de l’effectif total dans les entreprises d’au moins 11 salariés.
Ces deux mesures contraignantes visent à lutter efficacement contre la précarisation du marché du travail qui pèse sur les salariés et, en premier lieu, sur les femmes, comme nous avons eu l’occasion de le préciser à plusieurs reprises.
Le total des CDD intérimaires, des CDD, des intérimaires et des temps partiels subis représente 4 millions de personnes.
La proportion des emplois précaires traduit aussi la spécialisation de la France dans des productions à bas coûts salariaux, au détriment de l’exigence de montée en gamme de notre industrie.
D’où notre proposition, que je réitère, de limiter le nombre de personnes en CDD dans l’entreprise, en les plafonnant à 10 % de l’effectif global dans les entreprises de plus de 10 salariés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Madame Assassi, vous défendez, par cet amendement, l’interdiction pour un employeur de compter plus de 10 % de son personnel embauché en CDD.
Nous aurons l’occasion d’avoir ce débat au printemps prochain, lors de l’examen du projet de loi sur l’assurance chômage, puisque le Gouvernement pourrait, dans ce cadre, proposer de pénaliser les entreprises qui utilisent beaucoup de contrats courts, peut-être au travers d’un système de bonus-malus.
C’est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. J’ai déjà répondu à une proposition similaire cette après-midi. La lutte contre la précarité fait partie des thèmes qui figurent dans le projet de réforme des règles de l’assurance chômage. J’en ai saisi les partenaires sociaux, ils sont en train d’en discuter, et nous aurons effectivement l’occasion d’en débattre au printemps prochain.
Je propose donc le retrait de cet amendement. Sinon, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Madame Assassi, l’amendement n° 55 est-il maintenu ?
Mme Éliane Assassi. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 57, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3121-27 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 3121-27. – La durée légale du travail des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine civile ou par toute autre période de sept jours consécutifs. Cette durée est fixée à trente-deux heures à compter du 1er janvier 2021. »
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Tout le monde l’a bien compris : nous défendons une série d’amendements alternatifs qui visent à aller plus loin que la réglementation actuelle et à évoquer des sujets d’avenir.
Sur les licenciements boursiers, vous nous dites que l’on peut toujours ester en justice et qu’il n’y a pas deux cas similaires. Je prendrai simplement l’exemple d’une commune proche de mon lieu de résidence, Hénin-Beaumont, où des centaines de salariés ont été victimes de licenciements boursiers. Vous connaissez l’étiquette politique de cette ville.
Quand on ne légifère pas sur ces questions, quand on renvoie toujours le sujet à plus tard, à un moment donné, on le paye sur le plan politique.
Cet amendement vise la diminution du temps de travail, autre sujet de société, sur lequel il y a un débat. Chacun reconnaît dans cette enceinte que les mutations actuellement à l’œuvre et les progrès technologiques, en particulier l’émergence de l’intelligence artificielle, bouleversent le monde du travail et imposent de le repenser.
En l’occurrence, comme sur les licenciements boursiers ou la limitation des contrats précaires, nous pensons que nous devons agir. À tout le moins, il nous faut en débattre sérieusement dans cet hémicycle, une bonne fois pour toutes. Sinon, nous déposerons toujours ces mêmes amendements sur de nombreux textes ! (Sourires.)
Nos propositions ne sont pas nouvelles. On sait que les 35 heures ont permis, par exemple, la création de 350 000 emplois. On sait aussi que les progrès technologiques rendront l’insertion de chacun plus difficile dans la nouvelle société du travail.
Le temps effectif de travail est de 39,5 heures. Les marges de manœuvre existent donc pour s’interroger sur une réelle réduction du temps de travail. Aller par étapes vers les 32 heures nous paraît être une bonne solution.
Nous voulons, à travers cet amendement, anticiper la mutation du marché du travail et donner à nos concitoyens plus de temps pour s’engager différemment au service de la société.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’avis est défavorable, monsieur le président.
Je ne reviendrai pas sur les 35 heures, en particulier sur leurs conséquences à l’échelon des hôpitaux.
Je précise simplement que cette proposition, en l’état, dépasse le cadre du projet de loi de ratification.
Elle ne correspond pas en outre à l’analyse de la commission sur les enjeux économiques auxquels notre pays est confronté.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Rien dans la loi d’habilitation n’indiquait que nous puissions modifier le temps de travail de l’ensemble des salariés en France. Pour les mêmes raisons que le rapporteur, il me semble que cette proposition est quelque peu hors sujet.
On pourrait certes débattre du fond de la question, mais peut-être pas ce soir… (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 58, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3123-7 du code du travail est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque la durée de travail convenue est inférieure à vingt-quatre heures par semaine et supérieure à quinze heures par semaine, ces heures de travail sont rémunérées à un taux majoré de 25 %.
« Lorsque la durée de travail est inférieure ou égale à quinze heures par semaine, ou lorsque la durée quotidienne de travail est inférieure à deux heures, ces heures de travail sont rémunérées à un taux majoré de 50 %. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Lors de l’examen de la loi Macron, je me souviens que l’un des points particulièrement mis en avant pour vanter ses mérites, ici même, au Sénat, était la mise en place d’un plancher de 24 heures minimales hebdomadaires pour les contrats à temps partiel. L’objectif était d’en finir avec les mini-contrats de quelques heures qui ne font qu’entraîner de la précarité.
Nous avions bien évidemment soutenu cette mesure, qui allait, selon nous, dans le sens d’une amélioration des conditions de travail, notamment celles des femmes, dont on sait qu’elles sont majoritairement concernées.
Malheureusement, très vite, cette mesure positive a été suivie de très nombreuses dérogations dans les entreprises, ce qui a rendu caduque cette belle ambition. Et nous avions dénoncé ce fait.
C’est pourquoi nous proposons, à travers cet amendement, de majorer de 25 % la rémunération des heures de travail comprises entre 15 et 24 heures hebdomadaires.
Pour une durée de travail inférieure ou égale à 15 heures par semaine, ou lorsque la durée quotidienne de travail est inférieure à 2 heures, nous proposons que ces heures de travail soient rémunérées à un taux majoré de 50 %.
Ces majorations auraient pour finalité, tout à la fois, de compenser les faibles salaires dus au petit nombre d’heures effectuées et d’être dissuasives pour les entreprises.
Trop de femmes travaillent à temps partiel de façon subie. Il est temps pour nous de mettre fin à cette discrimination « genrée », qui a des conséquences au quotidien sur les salaires et les retraites.
Madame la ministre, voici une nouvelle fois l’occasion de faire évoluer les choses. On nous dit souvent que ce n’est pas le bon vecteur, mais, à un moment, il faut agir. Ces ordonnances relatives aux conditions de travail constituent une opportunité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission ne juge pas utile de rouvrir le débat sur le temps partiel à l’occasion de l’examen du présent texte. Elle considère aussi que l’idée de majorer aussi fortement le coût du travail pourrait être très néfaste pour certaines entreprises. Elle émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il n’a jamais été prévu de traiter ces sujets dans le cadre de la loi d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.
En outre, nous avons assisté à deux mouvements opposés. Vous proposez de majorer le paiement des heures en deçà de 24 heures effectuées par semaine ; d’autres ont proposé de relever le seuil des 24 heures ou de le supprimer.
Si tous les arguments s’entendent, une chose est certaine : ce sujet ne figurait pas dans le champ de la loi d’habitation.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. J’entends les arguments du rapporteur et de la ministre. Toutefois, mon groupe a avancé plusieurs propositions pour combattre la précarisation et la flexibilité du travail, et l’on nous dit à chaque fois que ce texte n’est pas le bon vecteur…
S’agissant des 24 heures hebdomadaires, il ne s’agit pas seulement de s’attaquer au temps partiel subi, monsieur le rapporteur. On assiste aujourd’hui à une attaque qui concerne plus particulièrement les femmes. Le seuil des 24 heures est soumis à de très nombreuses dérogations, avec pour conséquence des petits boulots de quelques heures.
Je veux bien que ce ne soit ni le moment ni le lieu d’examiner cette proposition, mais j’attire toutefois l’attention du Gouvernement et de la Haute Assemblée sur ce sujet. À un moment donné, il faut trouver des solutions qui remédient à un problème durement vécu par une partie non négligeable de la population.
On arrive bien à débloquer de l’argent pour les grands groupes en espérant qu’ils créent de l’emploi, et l’on voit que cela ne marche pas. Il faudrait faire preuve de la même détermination pour le temps partiel.
J’ai entendu, hier, madame la ministre, que l’égalité professionnelle était une préoccupation globale du Gouvernement. C’est important, mais ces petits boulots de quelques heures que nous dénonçons contribuent aussi à l’accroissement des inégalités professionnelles entre les femmes et les hommes.
Je souhaite donc que vous intégriez ce sujet à la réflexion que vous allez conduire, et que nous avons envie de mener avec vous, car nous voulons agir pour améliorer les conditions de travail, notamment des femmes.
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Je ne voudrais pas laisser croire que tout le monde considère dans cet hémicycle que des contraintes supplémentaires sont nécessaires pour les entreprises et que le temps de travail est constamment subi, et non choisi. Il faut aussi penser à tous ceux qui ont envie d’un temps de travail inférieur à la durée légale du travail.
Selon les discours que nous venons d’entendre, tous les salariés seraient exploités. Ce n’est absolument pas la réalité sur le terrain, dans les entreprises. Je ne veux pas laisser sans réponse ce genre de messages émis au sein de notre hémicycle.
Alors que nous considérons tous qu’il y a trop de normes et de contraintes dans notre pays, les derniers amendements que nous venons d’examiner ne cessent de contenir des normes et des contraintes supplémentaires. Or celles-ci contribueraient à augmenter encore le chômage, alors qu’il faut au contraire tout faire pour que l’emploi soit au cœur de nos priorités. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Éliane Assassi. Vos politiques ne marchent pas !
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Mme Cohen souhaite que le travail des femmes donne lieu à un salaire décent. Je suis d’accord.
Nous devons toutefois faire attention lorsque nous imposons de nouvelles contraintes. J’ai été président d’une association en secteur rural qui embauchait en tant que prestataire des femmes pour des emplois d’aide-ménagère ou d’auxiliaire de vie. Certaines femmes ne voulaient pas travailler plus de 24 heures pour des raisons personnelles.
De surcroît, au démarrage, lorsqu’une entreprise embauche du personnel, pendant un ou deux mois, elle n’a pas toujours une demande suffisante pour pouvoir confier à ses employés un travail d’une durée supérieure à 24 heures. C’est un handicap qu’il faudra également prendre en compte dans le dialogue qui s’engagera. Sinon, certains secteurs ne pourront pas embaucher.
M. le président. L’amendement n° 59, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° Avant le chapitre Ier du titre III du livre II de la troisième partie, il est inséré un chapitre préliminaire ainsi rédigé :
« Chapitre préliminaire
« Encadrement des écarts de rémunération au sein d’une même entreprise
« Art. L. 3230-1. – Le présent chapitre est applicable aux rémunérations des personnels, des mandataires sociaux et des autres dirigeants, régis ou non par le présent code, des entreprises, constituées sous forme de société, groupement, personne morale ou établissement public à caractère industriel et commercial, quel que soit leur statut juridique.
« Art. L. 3230-2. – Le montant annuel de la rémunération individuelle la plus élevée attribuée dans une entreprise mentionnée à l’article L. 3230-1, calculé en intégrant tous les éléments fixes, variables ou exceptionnels de toute nature dus ou susceptibles d’être dus à titre de rémunération ou d’indemnisation au cours de l’exercice comptable, ne peut être supérieur à vingt fois le salaire annuel minimal appliqué en France pour un emploi à temps plein dans la même entreprise ou dans une entreprise qu’elle contrôle au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce.
« Art. L. 3230-3. – Pour chaque exercice comptable, lorsque l’application d’une décision ou d’une convention a pour effet de porter le montant annuel de la rémunération annuelle la plus élevée à un niveau supérieur à vingt fois celui du salaire minimal annuel défini à l’article L. 3230-2 du présent code, l’ensemble des décisions ou conventions relatives à la détermination de cette rémunération sont nulles de plein droit, sauf si le salaire minimal annuel pratiqué est relevé à un niveau assurant le respect des dispositions du même article. » ;
2° L’article L. 2323-17 est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. L. 2323-17. – En vue de la consultation prévue à l’article L. 2323-15, l’employeur met à la disposition du comité d’entreprise, dans les conditions prévues à l’article L. 2323-9 :
« 1° Les informations sur l’évolution de l’emploi, des qualifications, de la formation et des salaires, sur les écarts de rémunérations des salariés et mandataires sociaux au sein de l’entreprise et des entreprises qui la contrôlent au sens de l’article L. 233-3 du code du commerce, sur les actions en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés, sur le nombre et les conditions d’accueil des stagiaires, sur l’apprentissage et sur le recours aux contrats de travail à durée déterminée, aux contrats de mission conclus avec une entreprise de travail temporaire ou aux contrats conclus avec une entreprise de portage salarial ;
« 2° Les informations et les indicateurs chiffrés sur la situation comparée des femmes et des hommes au sein de l’entreprise, mentionnés au 1° bis de l’article L. 2323-8, ainsi que l’accord ou, à défaut, le plan d’action mentionnés au troisième alinéa du 2° de l’article L. 2242-8 en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;
« 3° Les informations sur le plan de formation du personnel de l’entreprise ;
« 4° Les informations sur la mise en œuvre des contrats et des périodes de professionnalisation et du compte personnel de formation ;
« 5° Les informations sur la durée du travail, portant sur :
« a) Les heures supplémentaires accomplies dans la limite et au-delà du contingent annuel applicable dans l’entreprise ;
« b) A défaut de détermination du contingent annuel d’heures supplémentaires par voie conventionnelle, les modalités de son utilisation et de son éventuel dépassement dans les conditions prévues à l’article L. 3121-11 ;
« c) Le bilan du travail à temps partiel réalisé dans l’entreprise ;
« d) Le nombre de demandes individuelles formulées par les salariés à temps partiel pour déroger à la durée hebdomadaire minimale prévue à l’article L. 3123-14-1 ;
« e) La durée, l’aménagement du temps de travail, la période de prise des congés payés prévue à l’article L. 3141-13, les conditions d’application des aménagements de la durée et des horaires prévus à l’article L. 3122-2 lorsqu’ils s’appliquent à des salariés à temps partiel, le recours aux conventions de forfait et les modalités de suivi de la charge de travail des salariés concernés ;
« 6° Les éléments figurant dans le rapport et le programme annuels de prévention présentés par l’employeur au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, prévus à l’article L. 4612-16 ;
« 7° Les informations sur les mesures prises en vue de faciliter l’emploi des accidentés du travail, des invalides de guerre et assimilés, des invalides civils et des travailleurs handicapés, notamment celles relatives à l’application de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés ;
« 8° Les informations sur l’affectation de la contribution sur les salaires au titre de l’effort de construction ainsi que sur les conditions de logement des travailleurs étrangers que l’entreprise se propose de recruter ;
« 9° Les informations sur les modalités d’exercice du droit d’expression des salariés prévues à l’article L. 2281-11. »
II. – Les entreprises mentionnées à l’article L. 3230-1 du code du travail dans lesquelles l’écart des rémunérations est supérieur à celui prévu à l’article L. 3230-2 du même code disposent d’un délai de douze mois, à compter de la date de promulgation de la présente loi, pour se conformer aux dispositions du même article L. 3230-2.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a annoncé qu’il présenterait en mars un projet de loi pour transformer les entreprises et leur permettre d’innover, de grandir et de créer des emplois.
Comme nous sommes des communistes constructifs (Sourires.) – nous sommes minoritaires, mais nous continuons à alimenter le débat –, nous proposons au ministre, pour transformer l’entreprise, d’encadrer les écarts de rémunération au sein d’une même entreprise par un rapport allant de un à vingt.
L’encadrement des salaires a été mis en place dans les entreprises publiques, avec un plafond de rémunération de 450 000 euros. Nous proposons d’aller plus loin, en encadrant, dans les entreprises publiques comme privées, les écarts de salaires comme précédemment indiqué.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. M. Gay nous rappelle que Bruno Le Maire présentera en mars un projet de loi concernant les entreprises. Or nous sommes en janvier…
Il précise par ailleurs que ses propositions s’adressent au ministre. J’en déduis donc qu’elles ne doivent pas entrer dans le champ du texte que nous examinons ce jour.
De fait, l’habilitation ne prévoyait pas ce genre de mesures et je vous propose donc, mon cher collègue, d’en reparler en mars avec Bruno Le Maire.
Mme Laurence Cohen. Nous anticipons ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je rejoins les observations du rapporteur, même si la discussion du projet de loi visé s’engagera non pas forcément en mars, mais au printemps.
Le mot « rémunération » me renvoie également à l’intervention précédente de Mme Cohen. Pour alimenter notre réflexion sur l’égalité salariale hommes-femmes, j’ai demandé un examen plus particulier des branches les plus utilisatrices du travail à temps très partiel – moins de 24 heures hebdomadaires – pour savoir combien de femmes et d’hommes étaient concernés et quelles contreparties leur étaient accordées. Je ne sais pas si nous nous accorderons sur les solutions, mais nous aurons à tout le moins une analyse approfondie de la situation.
M. Fabien Gay. Dans ces conditions, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 59 est retiré.
L’amendement n° 64, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 5312-1 du code du travail, il est inséré un article L. 5312-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 5312-1-… – Les entreprises d’au moins vingt salariés sont tenues de réserver 10 % de leurs embauches à des jeunes âgés de 16 à 25 ans. Ces taux sont calculés d’une part pour les recrutements en contrat à durée indéterminée et d’autre part pour les recrutements en contrat à durée déterminée.
« Il peut être dérogé à ce taux par accord de branche étendu si les caractéristiques spécifiques du secteur d’activité le justifient.
« Un décret détermine les modalités d’application du présent article. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Le taux de chômage des jeunes actifs s’est établi à 22,6 % à la fin du premier semestre 2017, selon les récents chiffres du ministère du travail.
Si la plupart des indicateurs économiques sont au vert, le chômage des jeunes reste particulièrement marqué en France. Les jeunes constituent en fait une véritable variable d’ajustement en cas de crise ou de récession et il se pourrait que la situation ne s’améliore pas vraiment dans les mois à venir.
Nous proposons à travers cet amendement une solution innovante consistant à réserver 10 % des nouvelles embauches aux jeunes de moins de vingt-cinq ans.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement tend à obliger les entreprises employant plus de 20 salariés à consacrer au moins 10 % de leurs embauches à des jeunes âgés de moins de vingt-cinq ans. Il dépasse, une fois encore, le cadre de la loi d’habilitation.
Je précise par ailleurs que certaines entreprises réservent déjà plus de 10 % de leurs embauches à des jeunes, alors que l’amendement vise uniquement le seuil de 10 %.
En outre, une approche purement mathématique n’est sans doute pas adaptée à la complexité du sujet du chômage des jeunes, la vraie question étant plutôt celle de leur formation et de leur adaptation aux besoins des entreprises.
Pour toutes ces raisons, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je salue décidément l’esprit d’anticipation qui vous anime, mesdames, messieurs les sénateurs !
Dans le cadre du projet de loi sur l’apprentissage, la formation professionnelle et l’assurance chômage, nous aurons l’occasion de reparler du recrutement des jeunes. Il existe déjà une obligation en termes de nombre d’apprentis.
Ces propositions sont quelque peu hors sujet aujourd’hui, mais nous devrons discuter ensemble de la meilleure façon d’avancer significativement sur la qualification et l’emploi des jeunes. Je vous donne donc rendez-vous très bientôt.
M. le président. Madame Prunaud, l’amendement n° 64 est-il maintenu ?
Mme Christine Prunaud. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 64 est retiré.
L’amendement n° 60, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 8221-6 est ainsi rédigé :
« Art. L. 8221-6. – Est réputé salarié tout travailleur qui exerce son activité dans des conditions de droit ou de fait caractérisant un lien de subordination juridique ou un lien de dépendance économique vis-à-vis d’une autre personne physique ou morale.
« Est présumé être l’employeur de ce salarié la personne physique ou morale qui utilise directement ou indirectement ses services.
« Outre les clauses du contrat conclu entre les parties, le lien de subordination juridique ou le lien de dépendance économique sont établis notamment :
« 1° Lorsque le travailleur ne possède pas la maîtrise des moyens matériels ou immatériels utilisés pour la production des biens ou services ;
« 2° Ou lorsque le travailleur ne peut entrer en relation avec l’utilisateur final des services que par l’intermédiaire obligé d’un tiers ;
« 3° Ou lorsqu’un tiers, gérant une plate-forme numérique de mise en relation entre le travailleur et les clients peut librement radier le travailleur de la liste des prestataires figurant sur la plate-forme ;
« 4° Ou lorsque le travailleur, prétendument indépendant, ne fixe pas lui-même, ou par entente avec le client, le prix de ses prestations ;
« 5° Ou lorsque le travailleur, pour l’exécution de ses prestations, applique des instructions ou sujétions telles que celles portant sur des horaires ou des méthodes de travail, émises par une personne physique ou morale autre que l’acheteur final des services ;
« 6° Ou lorsque le travailleur se voit imposer la vente de telles marchandises à l’exclusion de toutes autres ou se voit imposer le prix de vente de ces marchandises. » ;
2° Après l’article L. 8221-6-1, sont insérés trois articles ainsi rédigés :
« Art. L. 8221-6-1… – Lorsque le travailleur, utilisé dans les conditions prévues par l’article L. 8221-6, emploie lui-même d’autres salariés, ceux-ci sont réputés être liés par contrat de travail au même employeur.
« Art. L. 8221-6-1… – La sous-traitance de toute activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l’accomplissement d’actes de commerce est prohibée au-delà du second rang. Les travailleurs occupés en méconnaissance de cette interdiction, y compris ceux visés à l’article L. 8221-6-1, sont réputés être salariés du sous-traitant de second rang.
« Art. L. 8221-6-1… – Toute décision de faire appel à la sous-traitance d’une partie de l’activité ou des fonctions de l’entreprise est soumise à l’avis conforme du comité d’entreprise. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Les ordonnances qui ont été prises reviennent sur la quasi-intégralité du code du travail. En revanche, nous n’avons trouvé aucune disposition répondant à la question du développement du numérique au travail, notamment des plateformes de type Uber.
En France, l’URSSAF a engagé des procédures et les travailleurs des plateformes s’organisent pour faire reconnaître le lien de subordination qui les lie à leur employeur.
Par cet amendement, nous proposons de mieux les protéger en instaurant une présomption de salariat fondée à la fois sur le lien de subordination juridique et sur la relation de dépendance économique.
En effet, ces travailleurs sont aujourd’hui doublement privés de protection : n’étant pas salariés, ils n’ont pas droit aux dispositions protectrices du code du travail ; n’étant pas réellement indépendants non plus, ils ne bénéficient pas de la protection économique qu’offre cet état.
Cet amendement nous donne l’occasion de mettre un terme à cette situation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement présente des critères pour identifier une relation salariale, afin de supprimer le statut de faux travailleur indépendant.
Ces dispositions extrêmement intéressantes méritent d’être débattues ultérieurement, car, pour l’heure, elles dépassent le champ du projet de loi de ratification et la loi d’habilitation.
La commission sollicite par conséquent le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’avis est défavorable.
La jurisprudence récente va dans le sens inverse de votre affirmation, madame la sénatrice, en confirmant que les travailleurs des plateformes numériques sont bien des travailleurs indépendants, ce qui n’exclut pas au demeurant certaines obligations pour les plateformes qui leur fournissent une activité. En revanche, des discussions sont en cours dans le cadre de l’assurance chômage, puisque nous souhaitons que les travailleurs indépendants, qu’ils soient micro-entrepreneurs ou travailleurs de plateformes, puissent avoir un filet de sécurité. Se pose aussi la question de la prise en compte de certains accidents.
Nous aurons donc l’occasion d’y revenir lors de l’examen du projet de loi sur l’apprentissage, la formation professionnelle et l’assurance chômage. Quel beau texte en perspective ! (Sourires.)
M. le président. Madame Cohen, l’amendement n° 60 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. Vous pouvez constater le dynamisme de notre groupe : nous anticipons les lois à venir et nous alimentons la réflexion grâce à nos propositions ! (Sourires.)
Cela étant, pour les raisons qui nous ont été opposées, nous retirons cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 60 est retiré.
L’amendement n° 7 rectifié quater, présenté par MM. Chasseing, Luche, Cigolotti, Delcros, Longeot et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 31 décembre 2018, un rapport examinant le recours effectif au télétravail dans les entreprises françaises et évaluant les besoins d’encadrement juridique de ces nouvelles pratiques.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Par le biais de cet amendement, je sollicite un rapport examinant le recours effectif au télétravail dans les entreprises françaises et évaluant les besoins d’encadrement juridique de ces nouvelles pratiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Monsieur Chasseing, vous le savez, par principe, je suis peu favorable aux demandes de rapport. Ce matin, en commission, je vous ai d’ailleurs démontré que sur les dix rapports demandés dans la loi El Khomri, aucun n’avait pour l’instant été rendu. Le retard pris est donc déjà considérable.
De surcroît, votre amendement est d’ores et déjà satisfait, les partenaires sociaux ayant remis au Gouvernement un rapport sur le télétravail le 27 mai 2017, en application de l’article 57 de la loi Travail. C’est d’ailleurs ce rapport qui a alimenté la réflexion du Gouvernement pour réformer le télétravail dans sa troisième ordonnance.
En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Chasseing, l’amendement n° 7 rectifié quater est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié quater est retiré.
Article 6 bis
(Non modifié)
Le livre V du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa de l’article L. 511-84 est ainsi rédigé :
« Nonobstant l’article L. 1331-2 du code du travail, le montant total de la rémunération variable peut, en tout ou partie, être réduit ou donner lieu à restitution en fonction notamment des agissements ou du comportement de la personne concernée en matière de prise de risque. » ;
2° Après le même article L. 511-84, il est inséré un article L. 511-84-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 511-84-1. – Pour l’application des articles L. 1226-15, L. 1234-9, L. 1235-3, L. 1235-3-1, L. 1235-11 et L. 1235-16 du code du travail, la détermination de l’indemnité à la charge de l’employeur ne prend pas en compte, pour les preneurs de risques au sens des articles 3 et 4 du règlement délégué (UE) n° 604/2014 de la Commission du 4 mars 2014 complétant la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation en ce qui concerne les critères qualitatifs et quantitatifs appropriés permettant de recenser les catégories de personnel dont les activités professionnelles ont une incidence significative sur le profil de risque d’un établissement, la partie de la part variable de la rémunération dont le versement peut être réduit ou donner lieu à restitution en application des articles L. 511-71 et L. 511-84 du présent code. » ;
3° L’article L. 533-22-2 est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – La politique et les pratiques de rémunération mentionnées au présent article peuvent, nonobstant l’article L. 1331-2 du code du travail, prévoir que le montant total de la rémunération variable peut, en tout ou partie, être réduit ou donner lieu à restitution en fonction notamment des agissements ou du comportement de la personne concernée en matière de prise de risque. » ;
4° La sous-section 2 de la section 5 du chapitre III du titre III est complétée par un article L. 533-22-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 533-22-2-1. – Pour l’application des articles L. 1226-15, L. 1234-9, L. 1235-3, L. 1235-3-1, L. 1235-11 et L. 1235-16 du code du travail, la détermination de l’indemnité à la charge de l’employeur ne prend pas en compte, en application de l’article L. 533-22-2 du présent code et pour les personnes mentionnées au même article L. 533-22-2, la partie de la part variable de la rémunération dont le versement peut être réduit ou donner lieu à restitution. »
M. le président. L’amendement n° 183, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au second alinéa, après la référence : « L. 511-81 », sont insérés les mots : « du présent code ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 182, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 8 et 9
Remplacer la référence :
L. 533-22-2-1
par la référence :
L. 533-22-2-3
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
4
Candidature à une mission d’information
M. le président. J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la mission d’information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays a été publiée.
Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Catherine Troendlé.)
PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Troendlé
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
5
Renforcement du dialogue social
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.
Article additionnel après l’article 6 bis
Mme la présidente. L’amendement n° 8 rectifié quater, présenté par MM. Chasseing, Luche, Cigolotti, Delcros, Longeot et les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires, n’est pas soutenu.
Article 6 ter
(Non modifié)
Les travailleurs bénéficiant du dispositif du suivi individuel renforcé, ou qui ont bénéficié d’un tel suivi pendant une période définie par décret au cours de leur carrière professionnelle, bénéficient obligatoirement d’une visite médicale auprès du médecin du travail dans un délai antérieur à leur départ en retraite, fixé par décret.
Cet examen médical vise à établir une traçabilité et un état des lieux, à date, des expositions à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels mentionnés à l’article L. 4161-1 du code du travail auxquelles a été soumis le travailleur. Le médecin du travail a la faculté, s’il constate une exposition du travailleur à certains risques dangereux, notamment chimiques, mentionnés au a du 2° du I du même article L. 4161-1, de mettre en place une surveillance post-professionnelle en lien avec le médecin traitant.
Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret.
Mme la présidente. L’amendement n° 152, présenté par Mme C. Fournier, n’est pas soutenu.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales, rapporteur. Je le reprends au nom de la commission.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 200, présenté par M. Milon, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après l’article L. 4624-2 du code du travail, il est inséré un article L. 4624-2-… ainsi rédigé :
« Art. 4624-2-… – Les travailleurs bénéficiant du dispositif de suivi individuel renforcé prévu à l’article L. 4624-2, ou qui ont bénéficié d’un tel suivi au cours de leur carrière professionnelle sont examinés par le médecin du travail au cours d’une visite médicale, avant leur départ à la retraite.
« Cet examen médical vise à établir une traçabilité et un état des lieux, à date, des expositions à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels mentionnés à l’article L. 4161-1 auxquelles a été soumis le travailleur. Le médecin du travail a la faculté, s’il constate une exposition du travailleur à certains risques dangereux, notamment chimiques, mentionnés au a du 2° du I du même article L. 4161-1, de mettre en place une surveillance post-professionnelle en lien avec le médecin traitant.
« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État. »
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Le présent article met en place un examen médical obligatoire préalablement au départ à la retraite de salariés ayant été confrontés à des facteurs de risques professionnels au cours de leur carrière. Cet examen médical a pour objet d’évaluer les effets de ces expositions et d’assurer leur suivi, y compris après le départ à la retraite des salariés concernés.
Le présent amendement tend à codifier cette disposition au sein du code du travail ; il a reçu un avis favorable de la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Avis favorable, madame la présidente, d’autant que cet amendement a été repris par la commission…
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Nous aurons l’occasion, dans quelques minutes, de débattre de la question des critères de pénibilité. Cet amendement ne concerne pas directement ce sujet, mais l’adopter reviendrait à apporter une caution à la procédure qui va se mettre en place, à savoir les examens médicaux pour tous ceux qui partent à la retraite et qui peuvent, éventuellement, présenter un handicap d’au moins 10 %.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 6 ter est ainsi rédigé.
Article 7
(Non modifié)
L’article L. 5223-1 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au début du 4°, les mots : « Au contrôle médical » sont remplacés par les mots : « À la visite médicale » ;
2° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’exercice des missions définies aux 4° et 7° du présent article, la limite d’âge mentionnée au I de l’article 6-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public est portée à soixante-treize ans, à titre transitoire jusqu’au 31 décembre 2022, pour les médecins engagés par l’Office en qualité de contractuels. »
Mme la présidente. L’amendement n° 184, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
Office
insérer les mots :
français de l’immigration et de l’intégration
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision juridique, qui vise à insérer l’intitulé complet de l’Office français de l’immigration et de l’intégration.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L’article 7 est adopté.)
Article additionnel après l’article 7
Mme la présidente. L’amendement n° 174 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa du I de l’article L. 1214-8-2 du code des transports est ainsi rédigé :
« Le programme d’actions comporte des mesures relatives au télétravail et à la flexibilité des horaires. Il peut en outre comporter des mesures relatives à la promotion des moyens et usages de transports alternatifs à la voiture individuelle, à l’utilisation des transports en commun, au covoiturage et à l’auto-partage, à la marche et à l’usage du vélo, à l’organisation du travail, à la logistique et aux livraisons de marchandises. »
La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.
M. Jean-Marc Gabouty. L’article 51 de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a rendu obligatoire l’élaboration d’un plan de mobilité pour le personnel des entreprises regroupant au moins 100 travailleurs sur un même site dans le périmètre d’un plan de déplacements urbains. Il s’agissait notamment d’encourager l’utilisation des transports en commun et du vélo, le télétravail, la flexibilité des horaires et le recours au covoiturage et à l’auto-partage.
Cet amendement vise à rendre obligatoires les mesures relatives au télétravail et à la flexibilité des horaires au sein de ces plans de mobilité, les grandes entreprises ayant un rôle à jouer dans la prévention des épisodes de pollution et la fluidité des déplacements pendulaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Le plan de déplacements urbains, mis en place par les autorités organisatrices, a pour but de rationaliser et fluidifier les différents modes de transport.
Il doit comprendre un volet sur l’amélioration du transport des personnels des entreprises pour les inciter à prévoir un plan de mobilité. Ce plan de mobilité n’est obligatoire que pour les entreprises employant plus de 100 personnes.
Quand ce plan existe, il peut comprendre un programme d’actions pour promouvoir les voies alternatives à la voiture individuelle, comme le télétravail.
L’unique finalité de cet amendement est que ce programme d’actions comporte obligatoirement des mesures relatives au télétravail et à la flexibilité des horaires.
Ce sujet, qui relève du code des transports, dépasse les compétences de notre commission et mériterait, avant d’être éventuellement rouvert, un bilan de la mise en œuvre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte votée en 2015.
C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Nous devons être cohérents avec nous-mêmes : nous avons prévu que le télétravail ferait l’objet d’un accord ou d’une charte d’entreprise et je crois qu’il faut rester à ce niveau de discussion.
En outre, nous avons voulu simplifier le code du travail pour le rendre plus lisible. Si nous rajoutons des précisions sectorielles dans tous les sens, nous finirons par rendre de nouveau illisibles les principes fondamentaux fixés par la loi.
C’est le dialogue social qui doit déterminer, à l’échelon de la branche ou des entreprises selon les cas, les différentes dispositions à mettre en œuvre. Pour le télétravail, l’entreprise me semble être le niveau adapté.
En toute cohérence, je ne peux donc être que défavorable à cet amendement, qui crée une exception, dans le code des transports, sur un sujet qui est du ressort de la négociation d’entreprise.
Mme la présidente. Monsieur Gabouty, l’amendement n° 174 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Marc Gabouty. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 174 rectifié est retiré.
Article 8
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2017-1388 du 22 septembre 2017 portant diverses mesures relatives au cadre de la négociation collective est ratifiée.
Mme la présidente. L’amendement n° 61, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Le présent amendement vise à annuler la ratification de l’ordonnance n° 2017-1388 du 22 septembre 2017 portant diverses mesures relatives au cadre de la négociation collective.
La quatrième ordonnance prévoit notamment que le ministre du travail peut exclure de l’extension d’un accord de branche les clauses « étant de nature à porter une atteinte excessive à la libre concurrence, compte tenu des caractéristiques du marché concerné ».
Cette nouvelle disposition donne donc des pouvoirs exorbitants au ministre du travail, qui se trouve placé en position d’arbitre de la libre concurrence.
Le 4 octobre dernier, les routiers ont signé, au terme d’un conflit social important, un accord de branche pour permettre le maintien de diverses primes – prime de nuit, treizième mois, prime d’ancienneté. Cet accord est-il menacé par la disposition prévue à cet article ?
Dans le doute, nous demandons la suppression de cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’article 8 ratifie la quatrième ordonnance, n° 2017-1388, qui a apporté des adaptations au cadre juridique de l’extension et de l’élargissement des accords de branche.
Cette ordonnance n’a pas donné des pouvoirs exorbitants au ministre du travail en la matière, comme l’évoquent les auteurs de cet amendement, mais elle a précisé, sur la base de la jurisprudence administrative, ses compétences.
Cet amendement est contraire à la position que le Sénat a adoptée lors de l’examen de la loi d’habilitation, ainsi qu’à celle qu’a exprimée la commission. L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Le pouvoir dont il est question est en fait précisé par l’ordonnance, mais il faut savoir que cette extension, si elle est fréquente, n’est pas automatique.
Je rappelle aussi qu’une disposition de la loi d’habilitation prévoit que, pour pouvoir étendre un accord, il faut qu’il contienne des mesures spécifiques ou, à tout le moins, adaptées aux petites et moyennes entreprises. En effet, nous sommes parfois dans la situation où ces entreprises ne peuvent tout simplement pas appliquer un accord de branche, ce qui crée évidemment des difficultés.
Par ailleurs, je réunirai un comité scientifique de personnalités indépendantes qui examinera les questions de concurrence et d’emploi et éclairera le processus de prise de décision dans les procédures d’extension d’un accord.
Pour ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8.
(L’article 8 est adopté.)
Article 8 bis (nouveau)
À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 2261-25 du code du travail dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-1388 du 22 septembre 2017 portant diverses mesures relatives au cadre de la négociation collective, après les mots : « libre concurrence », sont insérés les mots : « ou au regard des objectifs de la politique de l’emploi ». – (Adopté.)
Article 9
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 relative à la prévention et à la prise en compte des effets de l’exposition à certains facteurs de risques professionnels et au compte professionnel de prévention est ratifiée.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, sur l’article.
Mme Nicole Bonnefoy. La déclaration et la mesure de l’exposition aux risques chimiques constituaient un progrès du précédent quinquennat, notamment parce qu’elles devaient contribuer à la prévention des maladies contractées au travail qui tuent régulièrement et ne font que rarement et faiblement l’objet de reconnaissance au titre des maladies professionnelles.
Je vais me contenter d’évoquer les problèmes posés par le suivi lacunaire des expositions professionnelles aux pesticides.
Dans son rapport sur le sujet publié en 2016, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, indiquait que plus d’un million de personnes sont exposées en France aux pesticides dans le cadre de leur profession. L’Agence soulignait que de nombreuses études épidémiologiques mettaient en évidence une association entre les expositions aux pesticides et certaines pathologies chroniques. Elle citait notamment certains cancers – prostate, tumeurs cérébrales, cancers cutanés… –, des maladies neurologiques – Parkinson, Alzheimer… – et des troubles de la reproduction et du développement.
En 2012, la mission d’information sénatoriale sur les pesticides, dont j’étais la rapporteur, constatait, quant à elle, que le système français de reconnaissance des maladies professionnelles en agriculture conduisait à la sous-déclaration et à la sous-reconnaissance massive des pathologies liées à l’exposition aux pesticides.
Quelle est la cause essentielle de cette situation ?
Pour les personnes malades, la documentation insuffisante de leur exposition transforme le plus souvent le processus de reconnaissance de la maladie professionnelle en parcours du combattant.
Hormis pour deux pathologies inscrites au tableau des maladies professionnelles et pour lesquelles les malades bénéficient d’une présomption de causalité, ceux-ci se doivent de reconstituer eux-mêmes des listes d’exposition, en allant à la recherche des carnets de commandes, des factures, des vieilles étiquettes ou des bidons.
Cette démarche est compliquée par l’existence d’un important temps de latence, pouvant atteindre deux à trois décennies, entre le moment de l’exposition et celui de la survenue des premiers symptômes de la maladie.
Or, sans succès dans ces reconstitutions ardues et parfois impossibles, la démonstration du lien entre la maladie et la profession est d’emblée condamnée.
Du côté des instances chargées d’indemniser les personnes atteintes de maladies professionnelles et accidentées du travail, l’insuffisante documentation des expositions aux pesticides entretient la faiblesse des données épidémiologiques, ainsi que des lacunes dans la connaissance scientifique et médicale des effets sur la santé de ces expositions. Ce manque de connaissances entretient la lenteur de l’actualisation des tableaux des maladies professionnelles et celle de la mise en œuvre de mesures de protection sanitaire.
Un tel rappel est utile, au moment où le Gouvernement supprime du compte pénibilité les risques chimiques, parmi d’autres facteurs de risques professionnels. Je tenais à faire ce rappel.
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, sur l’article.
M. Roland Courteau. Sur cet article comme sur d’autres, je persiste à considérer que la philosophie même du compte pénibilité va être profondément modifiée.
La logique médicalisée et a posteriori qui sera utilisée pour plusieurs des critères constitue une marche arrière, qui dénote une vision restrictive de la pénibilité. C’est même, pour les hommes et les femmes qui subissent des postures pénibles, manipulent des charges lourdes ou sont exposés à des risques chimiques, le contraire d’une véritable politique de prévention.
On nous dit que c’est l’expertise médicale qui décidera si les salariés doivent rester à leur poste. Pourtant, obtenir la reconnaissance d’un taux d’incapacité de 10 % équivaut, dans bien des cas, à un parcours du combattant.
Quant aux autres salariés, ils partiront en bonne santé à la retraite – du moins le croiront-ils… –, mais ils seront peut-être rattrapés, quelque temps plus tard, par le déclenchement d’une maladie.
Dans ces conditions, il n’y aura ni prévention ni réparation. Voilà ce qui attend un certain nombre de salariés, dont la plupart ont déjà une espérance de vie plus courte.
Bref, par ces dispositions, vous allez à l’encontre du principe de justice et de lutte contre les inégalités. Or, faut-il rappeler une fois encore que les inégalités en termes de santé se développent principalement dans le monde professionnel ?
Cette réforme va même jusqu’à effacer le mot pénibilité, comme si certains travaux n’induisaient pas une souffrance. Comment expliquer, dès lors, que le nombre de maladies professionnelles augmente de 4 % par an ou que l’espérance de vie d’une ouvrière ou d’un ouvrier soit inférieure de six années à celle d’un cadre ? Est-ce un signe de bien-être au travail ou de pénibilité ?
Nommons les choses par leur nom, sans occulter les tristes réalités ! Ce qui n’est pas nommé n’existe pas, écrivait le psychanalyste Jacques Lacan. Alors, nommons la pénibilité par son nom et n’en ayons pas honte !
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 62 est présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 132 est présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 62.
Mme Laurence Cohen. Le gouvernement précédent avait décidé de créer, en contrepartie de la réforme des retraites et de l’allongement de la durée de cotisation, un compte pénibilité pour les salariés ayant exercé des métiers pénibles, afin qu’ils puissent partir plus tôt à la retraite. Depuis 2010, le MEDEF n’a eu de cesse de tout mettre en œuvre pour obtenir la suppression ce dernier.
Madame la ministre, vous avez décidé de retirer la manutention de charges lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et les risques chimiques des critères de ce compte. Nous trouvons cette décision profondément injuste.
À la place, vous entendez garantir aux employés qui sont exposés la possibilité de bénéficier d’un départ anticipé à la retraite, mais à une double condition : reconnaissance d’une maladie professionnelle et taux d’incapacité permanente excédant 10 %.
Ces décisions vont avoir pour conséquence de réduire largement le nombre de bénéficiaires possibles. Cela ne correspond pas du tout à la pénibilité que l’on trouve dans un certain nombre de métiers. Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 132.
M. Jean-Louis Tourenne. L’ordonnance en cause supprime le compte personnel de prévention de la pénibilité pour lui préférer un compte qui renvoie aux prémices des réflexions et négociations sur cette question fondamentale.
Depuis l’entrée en vigueur du dispositif en 2015, 975 000 comptes pénibilité ont été ouverts : un tiers d’entre eux est crédité de quatre points, un autre tiers de huit. Peu de personnes sont parties à la retraite de manière anticipée, mais cela est dû aux faits que l’utilisation des points n’a été possible qu’à partir de 2016 et que les entreprises ont largement pratiqué la sous-déclaration.
Le nouveau système ne permettrait que 10 000 départs anticipés à la retraite en 2018.
Pourtant, les expositions à la pénibilité sont particulièrement importantes en France ; c’est notamment le cas de l’exposition aux mouvements répétitifs et aux produits chimiques, au port de charges lourdes, à des températures extrêmes et à des postures douloureuses, autant d’expositions qui sortent du dispositif, en renvoyant à une visite médicale à la fin de carrière. Cette évolution change la philosophie du dispositif, en privilégiant la réparation plutôt que la prévention.
Les entreprises ont obtenu la suppression de deux cotisations, alors que le choix de financement par la création d’un fonds alimenté par ces cotisations patronales traduisait la volonté d’une solidarité interprofessionnelle. Ce financement permettait aussi de responsabiliser les employeurs, en les incitant financièrement à se mobiliser : s’ils voulaient payer des cotisations moins élevées, ils devaient réduire l’exposition de leurs salariés aux facteurs de pénibilité.
De plus, avec le renvoi de la mesure de l’exposition des trois critères dits ergonomiques à une visite médicale a posteriori, pour bénéficier d’un départ anticipé, les travailleurs exposés devront s’être vu reconnaître une incapacité permanente du fait de leurs conditions de travail égale ou supérieure à 10 %, et ce sans condition spécifique quant à une durée d’exposition.
Je n’ose penser que les représentants des employeurs, depuis la création du compte, aient voulu que les salariés concernés basculent en invalidité, dont le coût pèse sur la collectivité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’article 9 ratifie la cinquième ordonnance relative à la prévention de la pénibilité qui substitue notamment le compte professionnel de prévention au compte personnel de prévention de la pénibilité, le C3P.
Durant l’ensemble de ses travaux, la commission a salué cette réforme, qui s’inscrit dans la lignée des recommandations formulées par le Sénat depuis plusieurs années et qui tient compte des très grandes difficultés rencontrées par les petites entreprises pour se conformer à leurs obligations au titre du C3P.
Certes, ce qui a été dit jusqu’à présent est exact, mais la véritable difficulté réside dans la capacité de mettre en place effectivement la reconnaissance de la pénibilité.
Or c’est presque impossible pour certaines expositions, par exemple en ce qui concerne les produits chimiques. J’ai entendu Mme Bonnefoy parler du cancer de la prostate. Je veux rappeler qu’à partir de cinquante ans, quasiment tous les hommes développent des cellules cancéreuses dans la prostate ; pour autant, ils ne sont pas tous exposés aux produits chimiques…
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Nous avons déjà beaucoup discuté de ce sujet au mois de juillet, mais j’ai entendu des choses qui étaient exactes et d’autres qui ne l’étaient pas. C’est pourquoi je veux simplement, madame la présidente, résumer les faits.
Je rappelle tout d’abord que les dix critères sont bien maintenus et ne sont pas remis en cause.
Pour les six premiers de ces critères, les modalités d’application se mettent en place et ont toutes les chances de fonctionner ; nous n’avons donc pas changé le mécanisme.
Pour les quatre derniers critères, il faut distinguer, d’un côté, les trois qui sont dits ergonomiques – charges lourdes, postures et bruit – et, de l’autre, le risque chimique.
Pourquoi avoir fait évoluer les choses sur ces quatre critères ? Tout simplement parce que nous avons constaté, comme vous, un nombre extrêmement limité de déclarations. En fait, le système qui supposait de comptabiliser le nombre d’heures pendant lequel le salarié porte des charges lourdes ou doit adopter des postures dangereuses est totalement inapplicable dans les petites entreprises, par exemple pour les artisans ou les agriculteurs.
Le principe, qui reposait sur la justice sociale, était bon, mais le dispositif lui-même était une usine à gaz ! Il est vrai que certains risques professionnels amplifient les inégalités en termes de santé.
Quand on met en place une usine à gaz, même si elle s’appuie sur un bon principe, le droit reste formel et n’est pas réel. Pour le rendre effectif, ce qui me semble tout de même le plus important, nous avons pris deux décisions.
Pour les trois risques ergonomiques, dont les effets sont rapidement observables, c’est un examen médical qui permettra de constater la situation du salarié : 10 000 personnes pourront ainsi partir à la retraite dès maintenant, sans attendre quinze ans pour avoir tous les points nécessaires. Cette décision, qui constitue un vrai plus, puisque ces personnes pourront partir plus tôt à la retraite, relève de la constatation d’un dommage, plus que de la prévention, mais celle-ci est aussi, comme vous le savez, une priorité de notre action.
Pour ce qui est du risque chimique, la nature du problème est différente, car, à l’inverse des risques ergonomiques, ses effets sont, par nature, différés et se constatent même parfois après le départ en retraite.
Comment prendre en compte un risque dont les effets sont si difficilement observables ? On voit bien avec le dossier de l’amiante – la jurisprudence n’est pas encore stabilisée – que cette question est à la fois compliquée et importante et qu’il est nécessaire d’adopter une autre approche.
Je note déjà que la prévention est éminemment importante dans ces situations, mais il est clairement impossible, comme je l’avais indiqué lors des débats sur le projet de loi d’habilitation, de régler une telle question en quelques semaines et de façon superficielle.
C’est pourquoi Agnès Buzyn et moi-même avons confié une mission, dont je vous ai déjà parlé, au professeur Frimat, spécialiste de ces sujets. Il nous rendra ses conclusions dans quelques semaines.
J’insiste sur un point : le risque chimique concerne de nombreux secteurs économiques : le bâtiment, l’agriculture et beaucoup d’autres. On ne doit pas se focaliser sur la seule industrie chimique, dont c’est le cœur de métier et qui est donc déjà très sensible à ces questions. Ce risque concerne aussi beaucoup de petites et moyennes entreprises dans des secteurs économiques variés.
C’est pourquoi, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, le sujet de la prévention est une priorité du dialogue avec les partenaires sociaux, ainsi que du comité chargé de la santé et des conditions de travail.
Nous avons conservé une cotisation sociale mutualisée en partie à travers la branche AT-MP qui encourage la prévention et joue bien un rôle dissuasif.
Parmi les actions que nous menons à ce sujet, je vous rappelle aussi qu’Agnès Buzyn et moi-même avons lancé une mission sur la santé au travail, qui concerne notamment la médecine du travail. Nous aurons évidemment l’occasion d’évoquer ensemble les résultats de cette mission, à l’issue de laquelle nous serons certainement amenées à formuler des propositions.
En conclusion, je le répète, nous avons eu pour objectif de transformer un droit en partie formel en un droit réel. Ainsi, nous permettons à des salariés d’accéder, dès aujourd’hui, à ce droit à la retraite anticipée, ce qui n’était pas possible dans la situation antérieure en raison de l’absence de déclaration, en particulier dans les petites et moyennes entreprises.
Nous devons encore progresser sur la question de la santé au travail, nous le ferons ensemble, car c’est l’intérêt de tous, entreprises comme salariés.
Vous l’aurez compris, l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Le compte personnel de prévention de la pénibilité restait effectivement assez formel, puisque les petites entreprises étaient dans l’incapacité de gérer certains critères, par exemple les postures pénibles ou le port de charges. Il est très difficile de quantifier les choses sur ces questions.
Le compte professionnel de prévention conserve les mêmes prérogatives que le C3P pour la formation, le départ à la retraite et le travail à mi-temps. En outre, six critères sont maintenus en ce qui concerne le travail pénible : travail de nuit ou répétitif, horaires alternés, risque hyperbare, bruit et températures extrêmes.
Voilà pourquoi je ne voterai pas ces amendements.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 62 et 132.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 9.
(L’article 9 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 9
Mme la présidente. L’amendement n° 133, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 4161-1 du code du travail, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 précitée, est ainsi rédigé :
« Art. L. 4161-1. – I. – L’employeur déclare de façon dématérialisée aux caisses mentionnées au II les facteurs de risques professionnels liés à des contraintes physiques marquées, à un environnement physique agressif ou à certains rythmes de travail, susceptibles de laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé auxquels les travailleurs susceptibles d’acquérir des droits au titre d’un compte personnel de prévention de la pénibilité, dans les conditions fixées au chapitre II du présent titre, sont exposés au-delà de certains seuils, appréciés après application des mesures de protection collective et individuelle.
« II. – La déclaration mentionnée au I du présent article est effectuée, selon les modalités prévues à l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale, auprès de la caisse mentionnée aux articles L. 215-1, L. 222-1-1 ou L. 752-4 du même code ou à l’article L. 723-2 du code rural et de la pêche maritime dont relève l’employeur. Un décret précise ces modalités.
« III. – Les informations contenues dans cette déclaration sont confidentielles et ne peuvent pas être communiquées à un autre employeur auprès duquel le travailleur sollicite un emploi.
« IV. – Les entreprises utilisatrices mentionnées à l’article L. 1251-1 transmettent à l’entreprise de travail temporaire les informations nécessaires à l’établissement par cette dernière de la déclaration mentionnée au I. Les conditions dans lesquelles les entreprises utilisatrices transmettent ces informations et les modalités selon lesquelles l’entreprise de travail temporaire établit la déclaration sont définies par décret en Conseil d’État.
« V. – Un décret détermine :
« 1° Les facteurs de risques professionnels et les seuils mentionnés au I du présent article ;
« 2° Les modalités d’adaptation de la déclaration mentionnée au même I pour les travailleurs qui ne sont pas susceptibles d’acquérir des droits au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité dans les conditions fixées au chapitre II du présent titre et exposés à des facteurs de risques dans les conditions prévues audit I. »
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. En cohérence avec nos positions précédemment exprimées, cet amendement vise à revenir aux dispositions antérieurement en vigueur.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je vais essayer d’être aussi synthétique : je demande le retrait, car la commission estime que cet amendement est satisfait. Sinon, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Compte tenu de mes explications antérieures, j’émets également un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Tourenne, l’amendement n° 133 est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Tourenne. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 135, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 4163-21 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 4163-21. – I. – Il est institué un fonds chargé du financement des droits liés au compte personnel de prévention de la pénibilité.
« Ce fonds est un établissement public de l’État.
« II. – Le conseil d’administration du fonds comprend :
« 1° Des représentants de l’État ;
« 2° Des représentants des salariés, désignés par les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel ;
« 3° Des représentants des employeurs, désignés par les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ;
« 4° Des personnalités qualifiées, désignées par arrêté des ministres chargés du travail et de la sécurité sociale.
« La composition, les modes de désignation des membres et les modalités de fonctionnement du conseil d’administration sont fixés par décret.
« III. – Un décret définit le régime comptable et financier du fonds. Il précise les relations financières et comptables entre le fonds et les organismes gestionnaires du compte personnel de prévention de la pénibilité.
« IV. – Les dépenses du fonds sont constituées par :
« 1° La prise en charge de tout ou partie des sommes exposées par les financeurs des actions de formation professionnelle suivies dans le cadre de l’utilisation mentionnée au 1° du I de l’article L. 4163-7, dans des conditions fixées par décret ;
« 2° La prise en charge des compléments de rémunération et des cotisations et contributions légales et conventionnelles correspondantes mentionnés au 2° du même I, selon des modalités fixées par décret ;
« 3° Le remboursement au régime général de sécurité sociale, dans des conditions fixées par décret, des sommes représentatives de la prise en charge des majorations de durée d’assurance mentionnées au 3° dudit I, calculées sur une base forfaitaire ;
« 4° La prise en charge des dépenses liées aux frais d’expertise exposés par les commissions mentionnées à l’article L. 4162-14, dans la limite d’une fraction, fixée par décret, du total des recettes du fonds, ainsi que la prise en charge des dépenses liées aux frais des expertises mentionnées à l’article L. 4162-13 ;
« 5° Le remboursement aux caisses mentionnées au premier alinéa de l’article L. 4162-11 des frais exposés au titre de la gestion du compte personnel de prévention de la pénibilité.
« V. – Les recettes du fonds sont constituées par :
« 1° Une cotisation due par les employeurs au titre des salariés qu’ils emploient et qui entrent dans le champ d’application du compte personnel de prévention de la pénibilité défini à l’article L. 4162-1, dans les conditions définies au I de l’article L. 4162-20 ;
« 2° Une cotisation additionnelle due par les employeurs ayant exposé au moins un de leurs salariés à la pénibilité, au sens du deuxième alinéa de l’article L. 4162-2, dans les conditions définies au II de l’article L. 4162-20 ;
« 3° Toute autre recette autorisée par les lois et règlements.
« VI. – La cotisation mentionnée au 1° du II du présent article est égale à un pourcentage, fixé par décret, dans la limite de 0,2 % des rémunérations ou gains, au sens du premier alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, perçus par les salariés entrant dans le champ d’application du compte personnel de prévention de la pénibilité défini à l’article L. 4162-1 du présent code.
« VII. – La cotisation additionnelle mentionnée au 2° du II du présent article est égale à un pourcentage fixé par décret et compris entre 0,1 % et 0,8 % des rémunérations ou gains mentionnés au I du présent article perçus par les salariés exposés à la pénibilité, au sens du deuxième alinéa de l’article L. 4162-2, au cours de chaque période. Un taux spécifique, compris entre 0,2 % et 1,6 %, est appliqué au titre des salariés ayant été exposés simultanément à plusieurs facteurs de pénibilité.
« VIII. – La section 1 du chapitre VII du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est applicable à la cotisation définie au VI du présent article et à la cotisation additionnelle définie au VII. »
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. La question du financement du compte pénibilité a été réglée en attribuant désormais à la branche accidents du travail et maladies professionnelles la gestion des dépenses et du compte professionnel.
Le choix du financement par la création d’un fonds alimenté par deux cotisations patronales traduisait la solidarité interprofessionnelle, qui doit s’exercer au titre d’un risque, qui, même concentré dans certains secteurs et types d’activité, reste inhérent à l’activité économique. Il permettait aussi de responsabiliser les employeurs pour les raisons que j’ai indiquées précédemment.
La cotisation de 0,01 % de la masse salariale qui finançait la C3P serait supprimée, et la branche AT-MP de la sécurité sociale, excédentaire de 900 millions d’euros en 2017, prendrait en charge les sinistres.
En fait, on sort de la philosophie préventive du C3P pour revenir aux dispositions relatives à l’invalidité et à une prise en charge, non plus a priori, mais a posteriori par la sécurité sociale. Il convient de rappeler que la branche AT-MP reverse chaque année à la branche maladie 1 milliard d’euros au titre de la non-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles.
Le présent amendement vise à rétablir le financement du compte personnel de prévention de la pénibilité tel qu’il était antérieurement à la publication des ordonnances.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Les auteurs de cet amendement cherchent à rétablir le fonds de financement du compte personnel de prévention de la pénibilité, alimenté par deux cotisations versées par les employeurs. L’une des avancées de la réforme proposée par le Gouvernement est bien leur suppression et le transfert de la prise en charge à la branche AT-MP, dans le respect des équilibres financiers de celle-ci.
Il est vrai que la branche AT-MP est excédentaire de près de 1 milliard d’euros ; or ce milliard d’euros, qui devrait revenir à la branche, part chaque année, depuis quelque temps – habitude prise par les gouvernements précédents et par celui-ci –, vers la branche maladie, sans justificatif réel. On dit simplement qu’il y a suspicion de non-déclaration, mais il n’y a pas de réalité avérée. Au bout du compte, si l’on rendait aux entreprises cette somme « piquée » à la branche AT-MP par l’assurance maladie, elles se porteraient peut-être mieux et pourraient embaucher plus.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Monsieur le rapporteur, vous me placez devant un dilemme. Je voulais dire « même avis », mais cela devient difficile… (Sourires.)
Je dirai donc : même avis défavorable que la commission, mais pas tout à fait pour les mêmes raisons ». (Nouveaux sourires.) Il s’agit plutôt de celles que j’ai évoquées précédemment.
Mme la présidente. L’amendement n° 134, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 431-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de l’article 3 de l’ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 précitée, les mots : « et la reconversion professionnelle » sont supprimés.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. N’ayez crainte, le one man show va se terminer bientôt. (Sourires.)
L’ordonnance considérée introduit la notion de « reconversion professionnelle » à l’article L. 431-1 du code de la sécurité sociale. Or la reconversion professionnelle a une définition très large, qui dépasse le cadre de l’assurance maladie censée, dans cet article, selon son écriture actuelle, prendre en charge « la couverture des frais médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et accessoires, des frais liés à l’accident afférents aux produits et prestations inscrits sur la liste prévue à l’article L. 165-1 et aux prothèses dentaires inscrites sur la liste prévue à l’article L. 162-1-7, des frais de transport de la victime à sa résidence habituelle ou à l’établissement hospitalier et, d’une façon générale, la prise en charge des frais nécessités par le traitement, la réadaptation fonctionnelle, la rééducation professionnelle et le reclassement de la victime. »
La caisse d’assurance maladie peut verser des indemnités journalières, une pension d’invalidité ou une pension d’inaptitude. La reconversion professionnelle intervient après un processus de reclassement nécessitant toujours une nouvelle formation. C’est la transformation des activités professionnelles d’un travailleur victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle au cours de sa carrière qui doit s’adapter et changer d’activité ou de métier.
Cet article signifie donc clairement que la formation nécessaire après un accident du travail ou une maladie professionnelle sera désormais prise en charge par la branche maladie, ce qui n’est manifestement pas sa mission.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’objet de cet amendement est d’interdire la prise en charge d’actions de reconversion professionnelle par la branche AT-MP.
La cinquième ordonnance a prévu que les victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle pourront bénéficier d’un abondement de leur compte personnel de formation, qu’un décret du 29 décembre 2017 a fixé à 500 heures, pour financer une formation devant leur permettre de se reconvertir si elles ne sont plus en mesure d’exercer leur activité professionnelle. L’entrée en vigueur de cette disposition est fixée au 1er janvier 2019. Il s’agit d’une avancée appréciable, qui entre bien dans les missions de la branche AT-MP, et qu’il faut saluer.
L’avis de la commission est par conséquent défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je me demande s’il n’y a pas un quiproquo sur notre intention. Je suis d’accord avec M. Tourenne et M. le rapporteur : le but est de permettre la reconversion professionnelle des personnes concernées, donc que plus d’heures de formation leur soient proposées. Nous visons bien la même chose.
Or votre amendement, monsieur le sénateur, consiste à supprimer le droit à la formation professionnelle institué par la présente ordonnance, qui constitue pourtant un progrès majeur dans la prise en charge des victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles.
Ce droit à la formation qualifiante bénéficiera, à compter du 1er janvier 2019, aux victimes d’accidents de travail ou de maladies professionnelles présentant, en raison de la gravité de leurs séquelles, un risque particulier de désinsertion professionnelle. Ce nouveau droit donnera lieu à un abondement du compte personnel de formation de 500 heures. Il faut savoir que les formations qualifiantes longues représentent 400 heures à 500 heures. Les bénéficiaires concernés pourront donc suivre une vraie formation qualifiante, pour une vraie reconversion.
Cela représente une avancée significative par rapport aux possibilités actuelles, qui se résument à des formations courtes, du type bilan de compétences. Ce dispositif permettra de renforcer les politiques de maintien dans l’emploi, qui sont une priorité tant pour les partenaires sociaux que pour le Gouvernement. Elles sont également au cœur du troisième plan santé au travail et de la convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la branche AT-MP.
La mise en place d’un tel financement entrant bien dans cette démarche, j’avoue que j’ai du mal à comprendre pourquoi vous n’êtes pas favorable à ce nouveau droit, qui privilégie les reconversions longues par rapport aux reconversions courtes.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable, car, pour ma part, je tiens à ce que ce droit existe.
Mme la présidente. Monsieur Tourenne, l’amendement n° 134 est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Tourenne. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 158, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’ordonnance n° 2017–1718 du 20 décembre 2017 visant à compléter et mettre en cohérence les dispositions prises en application de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social est ratifiée.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il s’agit de la ratification de la sixième ordonnance.
Cette ordonnance, dite de cohérence légistique, vise à consolider l’articulation juridique des mesures déclinées par les cinq ordonnances ratifiées dans le cadre du projet de loi. Elle vient harmoniser l’état du droit, assurer la cohérence des textes, au sein tant du code du travail que de nombreux autres codes concernés, abroger les dispositions devenues sans objet par l’effet des ordonnances, réécrire certaines dispositions, afin d’en clarifier le vocabulaire ou d’en préciser la portée, le tout dans un souci de sécurité juridique et d’intelligibilité, et actualiser les références au code du travail dans les codes, lois et ordonnances en vigueur.
Elle procède également à la correction des erreurs matérielles ou des incohérences contenues dans le code du travail ou d’autres codes à la suite des évolutions législatives consécutives à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, à la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels et à la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.
Vous le constatez, il y a beaucoup de mises en cohérence nécessaires. Tel est l’objet de cette sixième ordonnance, qui doit parachever le travail, si j’ose dire, pour que le tout soit cohérent, robuste et lisible.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’avis est favorable à l’adoption de cette voiture-balai qu’est cette sixième ordonnance. (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Je n’ai pas encore tout compris au fonctionnement du Sénat, alors, parfois, je demande des explications. On m’avait indiqué qu’il n’était pas impossible que cette sixième ordonnance, qui est l’Arlésienne, dont on parle, mais que l’on ne voit pas, soit ratifiée sous forme d’amendement. Je m’étais dit que cela n’était pas possible, que le Gouvernement n’était pas capable de faire ce genre de chose…
Avec cet amendement, le Gouvernement nous propose pourtant bien de ratifier l’ordonnance n° 2017-1718 prise le 20 décembre dernier, la fameuse sixième ordonnance…
Non content de nous imposer un projet de ratification des cinq ordonnances prises en septembre 2017 après des concertations éclair avec les syndicats et un passage accéléré à l’Assemblée nationale, le Gouvernement nous présente maintenant une proposition de ratification d’ordonnance par voie d’amendement.
Je n’ose pas employer le mot « désinvolture » à l’égard du Parlement, même si ce terme ne suffit plus tout à fait à décrire ce comportement et ce procédé.
Cette ordonnance nous est présentée comme un simple instrument de coordination juridique. En réalité, madame la ministre, votre texte va nettement au-delà du simple cadre rédactionnel. Certaines de ses dispositions sont neutres par rapport au contenu des cinq ordonnances précédentes, mais d’autres sont plus importantes.
Par exemple, vous autorisez les signataires d’un accord de branche à prévoir les conditions dans lesquelles le délai de carence entre deux CDD n’est pas applicable.
Vous proposez une nouvelle définition du groupe d’entreprises, afin d’englober les groupes étrangers en matière de reclassement des salariés inaptes à la suite d’un accident ou d’une maladie professionnelle, et du périmètre d’appréciation de la cause des licenciements économiques et des reclassements.
Vous supprimez l’obligation d’indiquer la finalité du prêt de main-d’œuvre à but non lucratif dans la convention entre l’entreprise prêteuse et l’entreprise d’accueil.
Vous donnez la primauté à l’accord d’entreprise et d’établissement sur les accords de branche étendus.
Ce sont là non pas des modifications rédactionnelles, mais des mesures qui affecteront négativement les conditions de vie et de travail des salariés. Il est d’autant plus grave de les glisser par voie d’amendement en fin de discussion d’un projet de loi de ratification d’autres ordonnances.
Sur le fond comme sur la forme, nous voterons donc contre cet amendement
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Je ne suis pas chargé de défendre le Gouvernement et je ne suis pas un soutien actif de celui-ci.
M. Alain Milon, rapporteur. D’autres membres de notre assemblée sont des soutiens plus affirmés que moi.
Cependant, affirmer qu’il n’y a pas eu de concertation est particulièrement exagéré. Mon cher collègue, je ne sais pas qui vous a dit que la ratification de la sixième ordonnance se ferait pas voie d’amendement, mais ce n’est certainement pas un membre de la commission. En tout cas, cela ne vient pas de moi. Je vous ai simplement dit lors de l’examen des cinq ordonnances qu’une sixième ordonnance serait présentée ultérieurement et que nous l’examinerions après la suspension des travaux de fin d’année. C’est ce que nous avons fait le plus clairement possible tout en disposant du temps nécessaire.
Enfin, dire que le Gouvernement a traité le Parlement avec désinvolture revient à lui faire un mauvais procès. L’article 49-3 n’a pas été employé comme pour la loi El Khomri…
M. Jean-Louis Tourenne. Cela n’a rien à voir !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9.
Article 10
(Non modifié)
L’article 34 de la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d’ordre sanitaire, social et statutaire est ainsi modifié :
1° À la fin du troisième alinéa, les mots : « les dispositions du code du travail relatives aux comités d’entreprise » sont remplacés par les mots : « l’ensemble des dispositions du code du travail relatives aux comités sociaux et économiques » ;
2° À la première phrase du quatrième alinéa, la première occurrence des mots : « du présent article » est remplacée par les mots : « des premier à troisième alinéas » ;
3° Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :
« La Caisse des dépôts et consignations, représentée par son directeur général, est habilitée à conclure des accords collectifs avec les organisations syndicales représentatives, qui ont pour objet d’assurer la mise en cohérence des règles sociales dont relèvent les personnels de la Caisse des dépôts et consignations. Approuvés par arrêté du directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, ces accords s’appliquent de plein droit à l’ensemble de ces personnels. La Caisse des dépôts et consignations est par ailleurs habilitée à conclure des accords collectifs avec les organisations syndicales représentatives et une ou plusieurs des personnes morales liées à elle au sens du II l’article L. 2331-1 du code du travail. » ;
4° Au début de la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « Ces accords, approuvés par arrêté du directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, portent, d’une part, sur la désignation et les compétences » sont remplacés par les mots : « Les accords portent notamment sur la mise en place » ;
5° Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Les délégués syndicaux communs à la Caisse des dépôts et consignations et à ses filiales sont désignés par les organisations représentatives au sens du code du travail.
« Cette représentativité est déterminée en fonction de la somme des suffrages exprimés lors du premier tour des dernières élections des membres titulaires du comité social et économique de la Caisse des dépôts et consignations et des comités sociaux et économiques de ses filiales.
« Ces délégués syndicaux communs ont compétence, selon des modalités précisées par un accord collectif, pour négocier sur des thèmes communs à la Caisse des dépôts et consignations et à ses filiales et, en l’absence de représentation syndicale propre au sein d’une filiale, pour représenter, en tant que de besoin, les organisations syndicales dans la défense des personnels. »
Mme la présidente. L’amendement n° 188, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
4° Au début de la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « Ces accords, approuvés par arrêté du directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, portent » sont remplacés par les mots : « Les accords portent notamment sur la mise en place de délégués syndicaux communs pouvant intervenir auprès des personnes morales mentionnées au cinquième alinéa du présent article et bénéficiant des dispositions du chapitre III du titre IV du livre Ier de la deuxième partie du code du travail et » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel qui vise à tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-579 QPC du 5 octobre 2016, afin de garantir la protection des délégués syndicaux communs au sein de la Caisse des dépôts et consignations et de réaffirmer la compétence des partenaires sociaux en son sein pour définir leurs conditions de mise en place.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui apporte des précisions bienvenues pour le dialogue social à la Caisse des dépôts. Celle-ci ayant un statut particulier, la question de la mise en place du comité social et économique se posait. Une concertation interne a permis de préciser ce point, ce dont je me félicite. L’avis est favorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 189, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au dernier alinéa, au début, sont ajoutés les mots : « Les délégués syndicaux communs et », et les mots : « des articles L. 412-18 et suivants » sont remplacés par les mots : « du livre IV de la deuxième partie » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement a pour objet de rétablir le cadre juridique de la protection contre le licenciement des délégués syndicaux communs de la Caisse des dépôts et consignations et de procéder à l’actualisation d’une référence obsolète.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 166 rectifié, présenté par MM. Genest et Darnaud, Mme Eustache-Brinio, MM. Paul, Lefèvre et Bouchet, Mme Garriaud-Maylam, M. Daubresse, Mme Bories, MM. Babary et Laménie, Mmes Gruny et Lamure, MM. D. Laurent, Longuet, Forissier, Raison, Perrin et Pointereau, Mme Deromedi et MM. Duplomb et Gremillet, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer les mots :
lors du premier tour des dernières élections des membres titulaires du comité social et économique de la Caisse des dépôts et consignations et
par les mots :
lors de la dernière élection des membres titulaires de l’instance unique de représentation du personnel de la Caisse des dépôts et consignations et lors du premier tour des dernières élections des membres titulaires
La parole est à M. Marc Laménie.
M. Marc Laménie. Cet amendement a été déposé sur l’initiative de Jacques Genest.
L’article 10 vise à assurer la mise en conformité de l’article 34 de la loi du 28 mai 1996. Il adapte également cet article 34 aux nouvelles dispositions introduites par les ordonnances. Ainsi, il précise que la représentativité syndicale dans le groupe Caisse des dépôts et consignations est établie sur la base des résultats aux élections des comités sociaux et économiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 10, modifié.
(L’article 10 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 10
Mme la présidente. L’amendement n° 199, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation au 1° de l’article L. 2135-12 du code du travail, bénéficie des crédits du fonds paritaire mentionné à l’article L. 2135-9 du même code au titre de l’exercice de la mission mentionnée au 1° de l’article L. 2135-11 dudit code, dans le secteur des professions libérales, l’organisation professionnelle d’employeurs représentative des professions de ce secteur dont les statuts prévoient qu’elle a vocation à percevoir ces crédits pour le compte de ses membres et qui a reçu mandat à cette fin de leur part.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à garantir le financement de l’UNAPL, l’Union nationale des professions libérales, par le fonds paritaire de financement du dialogue social. En effet, ce financement pourrait être fragilisé depuis l’adhésion de cette union en novembre 2016 à l’UPA, l’Union professionnelle artisanale, rebaptisée depuis l’U2P, l’Union des entreprises de proximité.
Il convient de ne pas pénaliser financièrement les opérations volontaires de rationalisation du paysage patronal et syndical dans notre pays.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
L’amendement n° 163 rectifié, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Amiel et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code du travail est ainsi modifié :
A. – L’article L. 2261-13 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
- les mots : « conservent, en application de la convention ou de l’accord dénoncé, une » sont remplacés par les mots : « bénéficient d’une garantie de » ;
- après les mots : « ne peut être inférieur à la rémunération versée, », sont insérés les mots : « , en application de la convention ou de l’accord dénoncé et du contrat de travail, » ;
b) À la seconde phrase, après le mot : « Cette », sont insérés les mots : « garantie de » ;
2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cette garantie de rémunération peut être assurée par le versement d’une indemnité différentielle entre le montant de la rémunération qui était dû au salarié en vertu de la convention ou de l’accord dénoncé et de son contrat travail et le montant de la rémunération du salarié résultant de la nouvelle convention ou du nouvel accord, s’il existe, et de son contrat de travail. »
B. –L’article L. 2261-14 est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
- les mots : « conservent, en application de la convention ou de l’accord mis en cause, une » sont remplacés par les mots : « bénéficient d’une garantie de » ;
- après les mots : « ne peut être inférieur à la rémunération versée, », sont insérés les mots : « , en application de la convention ou de l’accord mis en cause, » ;
b) À la seconde phrase, après le mot : « Cette », sont insérés les mots : « garantie de » ;
2° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cette garantie de rémunération peut être assurée par le versement d’une indemnité différentielle entre le montant de la rémunération qui était dû au salarié en vertu de la convention ou de l’accord mis en cause et de son contrat travail et le montant de la rémunération du salarié résultant de la nouvelle convention ou du nouvel accord, s’il existe, et de son contrat de travail. »
II. – Le présent I s’applique à tous les accords ou conventions dénoncés ou mis en cause ayant cessé de produire leurs effets à compter du 9 août 2016, y compris si la date de leur dénonciation ou de leur mise en cause est antérieure à cette date.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. La loi du 8 août 2016 a supprimé le régime des avantages individuels acquis au profit d’un maintien de la rémunération individuelle versée au salarié. Des difficultés d’interprétation rendent nécessaires des précisions quant à la mise en œuvre de ces dispositions.
Nous souhaitons préciser que ce maintien de salaire constitue une garantie de rémunération pour le salarié, au titre des seuls éléments issus de la convention ou de l’accord mis en cause ou dénoncé, et du contrat de travail.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. En commission, j’avais demandé quelques rectifications rédactionnelles, lesquelles ont été faites par les auteurs de l’amendement. Dans ces conditions, je suis favorable à son adoption.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Les auteurs de cet amendement proposent de préciser le nouveau régime de rémunération annuelle maintenue qui avait été créé par la loi du 8 août 2016. L’application de cette mesure a fait l’objet de multiples interrogations des praticiens depuis lors, car elle n’était pas d’une clarté juridique absolue.
Cet amendement est bienvenu, puisqu’il permet de déterminer les contours de la garantie et les modalités selon lesquelles celle-ci est assurée. Il va bien dans le sens d’une clarification et d’une précision du droit. Le Gouvernement y est donc favorable.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
L’amendement n° 69 rectifié sexies, présenté par MM. Mouiller, Forissier, Morisset et Mandelli, Mmes Dumas et Gruny, M. Gremillet, Mme Imbert, M. Cuypers, Mme Morhet-Richaud, M. Bonne, Mmes Deseyne, Estrosi Sassone et Garriaud-Maylam, M. B. Fournier, Mme Puissat, MM. Pierre, Chatillon et Lefèvre, Mmes Micouleau, Lamure, Canayer et Deromedi, MM. Savary, Rapin, Vogel, Charon, Paccaud, Carle, Bazin et Daubresse, Mme Bories, M. Buffet, Mmes Procaccia et F. Gerbaud, MM. Dufaut et Paul, Mme Bonfanti-Dossat et M. Le Gleut, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au II de l’article L. 1244-2-2 du code du travail, avant les mots : « Tout salarié », sont insérés les mots : « Dans les branches mentionnées à l’article L. 1244-2-1, à défaut de stipulations conventionnelles au niveau de la branche ou de l’entreprise ».
II. – Le troisième alinéa des articles L. 2412-2, L. 2412-3, L. 2412-4, L. 2412-5, L. 2412-8, L. 2412-9 et L. 2412-13 du code du travail est ainsi rédigé :
« Lorsque le contrat est conclu sur le fondement du 3° de l’article L. 1242-2, le salarié bénéficie de la protection lorsque l’employeur envisage soit de rompre le contrat de travail avant l’échéance du terme, soit de ne pas le renouveler en non-respect d’une clause de reconduction prévue dans le contrat de travail, accord d’entreprise ou accord de branche mentionné à l’article L. 1244-2-2 du code du travail. Les délais de protection sont prolongés d’une durée égale à la période habituelle d’interruption de l’activité du salarié. »
III. – L’article L. 2421-8 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, avant les mots : « l’arrivée », sont insérés les mots : « Pour l’application de la protection prévue au troisième alinéa des articles L. 2412-2, L. 2412-3, L. 2412-4, L. 2412-5, L. 2412-8, L. 2412-9 et L. 2412-13, » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « un mois » sont supprimés.
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Le présent amendement tend à apporter trois modifications s’agissant des contrats saisonniers.
La première modification porte sur les garanties définies à l’article L. 1244-2-2 du code du travail en matière de droit à la reconduction du contrat saisonnier d’une saison sur l’autre qui ont été introduites par l’ordonnance n° 2017-647 du 27 avril 2017.
Alors que la loi d’habilitation à l’origine de cette ordonnance prévoyait que ses dispositions ne s’appliqueraient qu’à défaut d’accord de branche ou d’entreprise, dans les branches où l’emploi saisonnier est particulièrement développé, l’ordonnance a introduit des modalités de reconduction de contrat de façon non supplétive.
Il est donc proposé de revenir à l’esprit et à la lettre de la loi d’habilitation en donnant la priorité au dialogue social pour fixer de telles règles de reconduction de contrat.
La deuxième modification précise la portée de la protection des salariés saisonniers détenteurs de mandat.
Selon les dispositions actuelles du code du travail, d’une manière générale, la rupture du contrat de travail à durée déterminée, avant l’échéance du terme en raison d’une faute grave ou de l’inaptitude constatée par le médecin du travail, ou à l’arrivée du terme lorsque l’employeur n’envisage pas de renouveler un contrat comportant une clause de renouvellement, ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail.
En application des articles L. 2412-2 à L. 2412-13 du code précité, cette protection est ouverte aux salariés exerçant les mandats visés par l’article L. 2412-1 dudit code. Il en est de même, selon ces dispositions, à l’arrivée du terme lorsque l’employeur n’envisage pas de renouveler un contrat comportant une clause de renouvellement.
Il est proposé de préciser que le salarié saisonnier détenteur de mandat bénéficie bien de la protection dans ces deux cas également : la rupture avant le terme du CDD ; le non-respect d’une clause de reconduction prévue par contrat ou accord collectif.
La troisième modification tire les conséquences de la deuxième modification en simplifiant les délais de la procédure administrative de saisine de l’inspecteur du travail pour mettre fin au contrat à durée déterminée d’un salarié détenteur d’un mandat conférant une protection.
Sans remettre en cause le principe de la protection d’origine constitutionnelle, elle supprime un délai impossible à respecter lorsque le CDD a une durée courte, en particulier lorsqu’il s’agit de CDD saisonniers.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement a été rectifié postérieurement à son examen par la commission.
La première partie, nouvelle, prévoit que les règles actuelles relatives au droit à la reconduction des contrats saisonniers s’appliquent à titre supplétif, à défaut d’accord de branche ou d’entreprise, afin de donner la priorité au dialogue social.
La deuxième partie, nouvelle également, est une mesure de simplification et de bon sens. Aujourd’hui, quand un salarié protégé voit son CDD arrivé à son terme, l’employeur doit saisir l’inspection du travail pour vérifier que la fin du contrat n’est pas entachée de discrimination liée au mandat exercé. Cette règle est trop contraignante, car elle s’applique à toutes les fins naturelles de contrat. Le présent amendement vise donc à limiter le contrôle de l’inspection du travail aux salariés protégés dont le CDD a été rompu avant son terme initial et qui n’a pas été reconduit, en dépit d’une stipulation contractuelle ou conventionnelle.
La dernière partie reprend les dispositions qui étaient présentes dans l’amendement initial qu’a présenté M. Mouiller, et sur lesquelles la commission avait donné un avis favorable. Je rappelle qu’elles visent seulement à supprimer le délai d’un mois pour envoyer à l’inspection la demande d’autorisation de mettre un terme au CDD d’un salarié protégé lorsque le contrat arrive à son terme.
Des mesures de coordination juridique ont été ajoutées pour tenir compte des modifications apportées dans le deuxième volet de cet amendement. Donc, à titre personnel, et pas au nom de la commission – elle n’a pas examiné cet amendement, tel que modifié – je donne un avis favorable à l’adoption de cet amendement, sous réserve d’une toute petite modification rédactionnelle : au cinquième alinéa, première phrase, avant la première occurrence du mot « accord », il faudrait insérer les mots « ou par ».
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Cet amendement est intéressant, parce qu’il permet de clarifier la portée opérationnelle de ces dispositions, qui posaient parfois problème, tout en faisant en sorte que la protection constitutionnelle des salariés détenteurs de mandat soit pleinement garantie. Le Gouvernement y est favorable.
Mme la présidente. Monsieur Mouiller, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens proposé par M. le rapporteur ?
M. Philippe Mouiller. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 69 rectifié septies, présenté par MM. Mouiller, Forissier, Morisset et Mandelli, Mmes Dumas et Gruny, M. Gremillet, Mme Imbert, M. Cuypers, Mme Morhet-Richaud, M. Bonne, Mmes Deseyne, Estrosi Sassone et Garriaud-Maylam, M. B. Fournier, Mme Puissat, MM. Pierre, Chatillon et Lefèvre, Mmes Micouleau, Lamure, Canayer et Deromedi, MM. Savary, Rapin, Vogel, Charon, Paccaud, Carle, Bazin et Daubresse, Mme Bories, M. Buffet, Mmes Procaccia et F. Gerbaud, MM. Dufaut et Paul, Mme Bonfanti-Dossat et M. Le Gleut, et ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au II de l’article L. 1244-2-2 du code du travail, avant les mots : « Tout salarié », sont insérés les mots : « Dans les branches mentionnées à l’article L. 1244-2-1, à défaut de stipulations conventionnelles au niveau de la branche ou de l’entreprise ».
II. – Le troisième alinéa des articles L. 2412-2, L. 2412-3, L. 2412-4, L. 2412-5, L. 2412-8, L. 2412-9 et L. 2412-13 du code du travail est ainsi rédigé :
« Lorsque le contrat est conclu sur le fondement du 3° de l’article L. 1242-2, le salarié bénéficie de la protection lorsque l’employeur envisage soit de rompre le contrat de travail avant l’échéance du terme, soit de ne pas le renouveler en non-respect d’une clause de reconduction prévue dans le contrat de travail, ou par accord d’entreprise ou accord de branche mentionné à l’article L. 1244-2-2 du code du travail. Les délais de protection sont prolongés d’une durée égale à la période habituelle d’interruption de l’activité du salarié. »
III. – L’article L. 2421-8 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, avant les mots : « l’arrivée », sont insérés les mots : « Pour l’application de la protection prévue au troisième alinéa des articles L. 2412-2, L. 2412-3, L. 2412-4, L. 2412-5, L. 2412-8, L. 2412-9 et L. 2412-13, » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « un mois » sont supprimés.
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
L’amendement n° 195, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La sixième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° Le chapitre II du titre II du livre II est complété par une section 7 ainsi rédigée :
« Section 7
« Mobilité internationale et européenne des apprentis
« Art. L. 6222-42. – Le contrat d’apprentissage peut être exécuté en partie à l’étranger pour une durée déterminée et limitée à un an.
« Pendant la période de mobilité dans l’Union européenne, l’entreprise ou le centre de formation d’accueil est seul responsable des conditions d’exécution du travail, telles qu’elles sont déterminées par les dispositions légales et conventionnelles en vigueur dans le pays d’accueil, notamment ce qui a trait :
« 1° À la santé et à la sécurité au travail ;
« 2° À la rémunération ;
« 3° À la durée du travail ;
« 4° Au repos hebdomadaire et aux jours fériés.
« Pendant la période de mobilité dans l’Union européenne, l’apprenti relève de la sécurité sociale de l’État d’accueil, sauf lorsqu’il ne bénéficie pas du statut de salarié ou assimilé dans cet État. Dans ce cas, sa couverture sociale est régie par le code de la sécurité sociale pour ce qui concerne les risques maladie, vieillesse, accident du travail et maladie professionnelle et invalidité.
« Par dérogation à l’article L. 6221-1 et au second alinéa de l’article L. 6222-4, une convention peut être conclue entre l’apprenti, l’employeur en France, l’employeur à l’étranger, le centre de formation en France et, le cas échéant, le centre de formation à l’étranger pour la mise en œuvre de cette mobilité dans l’Union européenne.
« Un arrêté du ministre chargé du travail détermine le modèle de cette convention.
« Art. L. 6222-43. – Les apprentis originaires de l’Union européenne effectuant une période de mobilité en France bénéficient des dispositions du présent livre. En raison du caractère temporaire de cette mobilité, les dispositions suivantes ne leur sont pas applicables :
« 1° L’article L. 6211-1, relatif à la finalité du contrat d’apprentissage ;
« 2° L’article L. 6222-7-1, relatif à la durée du contrat d’apprentissage ;
« 3° Le deuxième alinéa de l’article L. 6222-12, relatif aux conditions d’intégration d’une formation en apprentissage ;
« 4° L’article L. 6233-8, relatif à la durée de la formation en apprentissage. » ;
2° La section 7 du chapitre II du titre II du livre II, dans sa rédaction résultant du 1°, comprend l’article L. 6211-5 qui devient l’article L. 6222-44 ;
3° L’article L. 6231-1 est ainsi modifié :
a) Au 1° , après les mots : « contrat d’apprentissage », sont insérés les mots : « ainsi qu’aux apprentis originaires de l’Union européenne en mobilité en France » ;
b) Au 8° , après les mots : « Union européenne », sont insérés les mots : « , du personnel dédié » ;
4° Au 4° de l’article L. 6332-16-1, après les mots : « tout ou partie », sont insérés les mots : « de la perte de ressources, ainsi que des coûts de toute nature, y compris ceux correspondant aux cotisations sociales, et le cas échéant » et la référence : « L. 6211-5 » est remplacée par la référence : « L. 6222-42 ».
II. – À l’article L. 337-4 du code de l’éducation, la référence : « L. 6211-5 » est remplacée par la référence : « L. 6222-44 ».
III. – Au troisième alinéa de l’article L. 811-2 et au quatrième alinéa de l’article L. 813-2 du code rural et de la pêche maritime, la référence : « L. 6211-5 » est remplacée par la référence : « L. 6222-44 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à favoriser la mobilité internationale et européenne des apprentis en s’inspirant des recommandations formulées par Jean Arthuis dans le rapport sur le développement d’Erasmus Pro, qu’il a remis à Mme la ministre du travail le 19 janvier dernier.
Durant ses travaux, Jean Arthuis a identifié de nombreux freins juridiques à la mobilité des apprentis hors du territoire national et à l’accueil d’apprentis étrangers en France, du point de vue tant des obligations pesant sur les entreprises que des contraintes pédagogiques trop strictes empêchant la réalisation de ces échanges.
En conséquence, il est proposé de définir un cadre incitant toutes les parties – apprentis, entreprises, centres de formation – à profiter des opportunités offertes au niveau européen par le programme Erasmus Pro.
Dans la limite d’une durée d’un an, un contrat d’apprentissage pourra ainsi être exécuté à l’étranger. L’apprenti sera alors placé sous la responsabilité de son employeur ou du centre de formation dans le pays d’accueil et soumis au droit qui y est applicable en matière de rémunération, de durée du travail, de santé et de sécurité au travail, et de repos hebdomadaire. Les modalités de réalisation de cette mobilité seront formalisées dans une convention conclue entre l’apprenti, ses employeurs en France et à l’étranger, et son centre de formation.
L’accueil d’apprentis étrangers en France sera facilité, puisque les dispositions du code du travail relatives à l’apprentissage leur seront applicables, à l’exception de plusieurs obligations qui font aujourd’hui obstacle à leur venue en France, comme celles qui fixent à douze mois la durée minimale d’un contrat d’apprentissage ou à 400 heures par an la durée minimale de la formation et les règles encadrant les dates d’entrée en apprentissage.
Il est également proposé d’élargir les possibilités de financement de la mobilité internationale des apprentis en permettant aux OPCA, les organismes paritaires collecteurs agréés, de prendre en charge tout ou partie de ses coûts, notamment de vie sur place, ainsi que les cotisations sociales.
Enfin, cet amendement prévoit explicitement que les centres de formation d’apprentis, les CFA, peuvent accueillir des apprentis étrangers et qu’ils doivent encourager davantage la mobilité internationale de leurs apprentis, notamment en désignant des référents dédiés à cette mission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’avis du Gouvernement est favorable, et je veux prendre quelques minutes pour en expliquer les raisons à la Haute Assemblée.
J’avais demandé à Jean Arthuis, président de la commission des budgets du Parlement européen et défenseur d’Erasmus Pro depuis longtemps, de me faire des propositions sur ce dispositif qui s’adresse aux apprentis. Pourquoi ?
Depuis la création d’Erasmus, dont tout le monde s’accorde à dire que c’est un immense succès, tant pour le sentiment d’appartenance à la citoyenneté européenne que pour le développement de nos jeunes, plus de 600 000 étudiants français en ont bénéficié, contre seulement 25 000 apprentis qui ont utilisé le dispositif Erasmus Pro. Chaque année, le flux est de 6 800 apprentis par an, quand plusieurs dizaines de milliers d’étudiants partent étudier à l’étranger.
Aujourd’hui, dans le monde où nous vivons, il me semble que tous les jeunes aspirent à avoir une expérience européenne, à l’international.
L’apprentissage est souvent une voie de réussite, d’excellence, mais il permet aussi d’emprunter l’ascenseur social.
Je juge très important que les apprentis, eux aussi, puissent être exposés à une autre culture, à une autre manière de vivre et de travailler. J’ai rencontré beaucoup de ceux qui sont allés ainsi à l’étranger : l’expérience prouve qu’ils en ressortent grandis, structurés, pleins d’optimisme, d’enthousiasme et de confiance en eux. Ils ont vu autre chose et ont développé des compétences linguistiques. Les pionniers de ce programme, tels que les maisons familiales rurales ou les Compagnons du devoir, attestent de réussites assez éclatantes de jeunes qui, tout d’un coup, prennent une nouvelle confiance en eux.
Il se pose une question d’équité : pourquoi les apprentis ne pourraient-ils pas aller à l’étranger, alors que les étudiants le peuvent ? Notre initiative s’inscrit aussi, plus largement, dans une démarche de valorisation de l’apprentissage sur laquelle nous reviendrons ensemble.
Le rapport de Jean Arthuis a montré qu’il existe de nombreux freins de tous ordres, dans la reconnaissance des diplômes ou encore dans les tutorats croisés : je ne vous en fais pas la liste complète, car nous aurons l’occasion d’en reparler lors de la discussion du projet de loi relatif à la formation professionnelle.
En revanche, l’un de ces freins relevait du code du travail et de la sécurisation des parcours. Dès lors, même si le rapport n’a été publié que le 19 janvier dernier, j’ai estimé qu’il serait bon de régler le problème tout de suite. Aujourd’hui, si l’employeur d’un jeune en contrat d’apprentissage l’envoie à l’étranger, l’apprenti reste entièrement lié par ce contrat et demeure sous la responsabilité de l’employeur français, et vice-versa pour les jeunes qui viennent en France. C’est pourquoi les apprentis qui participent au programme Erasmus Pro non seulement ne sont pas nombreux, mais partent pour deux ou trois semaines seulement, comme en voyage d’études. Nous souhaitons plutôt qu’ils puissent aller passer un semestre dans un autre pays européen, comme les étudiants, et que nous puissions accueillir des apprentis étrangers dans les mêmes conditions.
Pour ce faire, il faut non pas suspendre complètement le contrat d’apprentissage pendant le séjour à l’étranger, mais en mettre en veille certains aspects. Ainsi, les accidents du travail doivent être pris en charge dans le pays d’accueil par l’entreprise d’accueil, dont ce sera la responsabilité, évidemment de manière contrôlée.
La rémunération doit, elle aussi, être prise en charge dans le pays d’accueil. Deux cas de figure existent. Dans certains pays, comme l’Allemagne ou la France, le contrat d’apprentissage est un contrat de travail ; dans ce cas, le jeune devient pour ainsi dire apprenti dans l’autre pays pendant quelques mois, et y perçoit donc une rémunération. En revanche, dans d’autres pays, il s’agit d’un statut de stagiaire qui est plus ou moins rémunéré, voire pas du tout. Pour ces pays, nous avons prévu que, à travers un mécanisme de financement, le CFA puisse se substituer à l’entreprise d’accueil et verser sa rémunération au stagiaire.
Cette suspension de certains aspects du contrat permettra par ailleurs de résoudre des problèmes de sécurité sociale. De fait, elle lèvera un frein très important à ces échanges.
Aujourd’hui, de nombreux jeunes veulent partir dans ce cadre. La Commission européenne vient d’accepter d’augmenter le budget du programme Erasmus Pro. Il faut saisir cette opportunité pour accueillir plus de jeunes étrangers et pour qu’un plus grand nombre de nos jeunes apprentis puissent partir en apprentissage à l’étranger.
J’ai beaucoup d’enthousiasme sur ce sujet parce que je pense que nous envoyons ainsi un signal. D’ailleurs, au vu de l’écho qu’a eu le rapport de Jean Arthuis, nos jeunes ont sur ce point une forte aspiration. C’est pourquoi je vous invite à voter cet amendement pour nos jeunes apprentis.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Je tiens à remercier M. le président de la commission des affaires sociales de son amendement, qui est excellent : il n’y a là aucune flagornerie, je pense simplement que nous pouvons, en l’adoptant, lever des freins qui s’avéraient ingérables et permettre ainsi à des apprentis de faire des expériences à l’étranger.
Les employeurs d’apprentis sont souvent des artisans ou des PME qui ne peuvent pas se permettre de continuer à assurer la rémunération d’un apprenti qui part pour une longue période à l’étranger. La question de la responsabilité se posait elle aussi. Je suis donc vraiment très heureuse de cet amendement : c’est un très grand pas.
Madame la ministre, je suis aussi très heureuse – vous l’avez deviné – de votre enthousiasme pour l’apprentissage. Toutefois, permettez-moi une petite digression. Vous travaillez aujourd’hui, d’une manière extrêmement positive et convaincue, pour développer l’apprentissage. C’est une filière de réussite et de succès envers laquelle les familles comme les apprentis eux-mêmes doivent pouvoir retrouver de la fierté. En revanche, je crains que votre frilosité à l’égard de la capacité des régions à assumer l’apprentissage et à permettre des mutualisations entre des branches qui ont des moyens très différents ne soit un vrai risque pour l’apprentissage et pour la réussite du dispositif de ce très bel amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Je veux saluer le travail important qui a été réalisé par Jean Arthuis sur ce sujet ; il est important parce que nous avons besoin de réhabiliter l’apprentissage, qui est trop souvent décrié dans notre pays. On sait bien, pourtant, que cette forme d’insertion professionnelle est particulièrement performante et permet aux jeunes, en tout cas, d’acquérir dans les meilleures conditions les compétences qui sont nécessaires aux entreprises.
Quelques minutes avant que nous reprenions la séance, je rencontrais le président et le directeur de l’Institut nautique de Bretagne, qui me rappelaient combien il était important que les jeunes qui effectuent une formation en alternance et, notamment, ceux qui ont un contrat d’apprentissage puissent suivre un cursus à l’étranger. En effet, les débouchés professionnels à l’étranger sont particulièrement importants dans les métiers du nautisme.
À l’évidence, les dispositions qui ont été présentées par le président Milon peuvent faire en sorte que l’apprentissage soit mieux valorisé et, surtout, permettront à nos jeunes qui suivent ces formations d’acquérir les compétences dont les entreprises ont besoin. Cela contribuera aussi, certainement, à permettre à la France de reconquérir des parts de marché à l’exportation. C’est en effet cela aussi qui est sous-tendu à travers les objectifs de formation de nos jeunes : en acquérant des compétences en langues étrangères, ils participent au développement économique de la France. Je soutiens donc complètement cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je salue le mérite des membres de la commission des affaires sociales qui se sont investis sur ce texte important et, en particulier, sur cet amendement de qualité. Il s’agit de faire évoluer le code du travail, dont on sait combien il est compliqué.
On parle beaucoup de l’apprentissage. Il est vrai que, dans chacun de nos départements, les formateurs font de leur mieux, ainsi que les chambres consulaires, telles les chambres de métiers. Tout le monde essaie de trouver et de former des jeunes, ce qui entretient un lien fort avec l’éducation nationale.
Comme l’a montré le travail réalisé par Jean Arthuis, la mobilité des apprentis à l’échelle de l’Union européenne est particulièrement importante. C’est pourquoi nous devons essayer d’assouplir les règles et d’ouvrir ainsi la formation sur l’extérieur, afin de pouvoir, à la fois, accueillir des apprentis de l’étranger et envoyer de jeunes Français dans d’autres pays pour qu’ils y vivent d’autres expériences.
C’est aussi important, naturellement, pour les métiers de demain, parce qu’il existe un savoir-faire dans nos entreprises, qu’elles soient petites, moyennes ou grandes, et dans les CFA. C’est selon moi indispensable pour faire évoluer la formation professionnelle.
Beaucoup de jeunes courageux veulent s’inscrire dans cette démarche d’apprentissage. Vous avez cité, madame la ministre, les Compagnons du devoir. De fait, l’apprentissage comprend des métiers manuels, dans l’artisanat, mais est aussi ouvert au monde industriel et à l’agriculture.
Pour toutes ces raisons, je soutiens cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Je tiens à vous remercier, monsieur le rapporteur, madame la ministre, pour vos interventions qui me font vraiment chaud au cœur.
Le 23 février 2017, Colette Mélot et moi-même avions présenté un avis politique sur l’Erasmus des apprentis ; vous nous avez entendues. Cela me réjouit d’autant plus que cela fait des mois que nous nous battons pour que l’apprentissage à l’étranger soit non pas juste un voyage sympathique, mais bien une possibilité, pour ces jeunes, de connaître une expérience.
L’objectif que nous nous étions fixé était de 50 000 apprentis en 2020 ; je pense que nous n’y parviendrons pas, mais l’élan est donné, et c’est une bonne chose.
Je tiens surtout à rappeler que les jeunes qui passent par un apprentissage par le biais du programme Erasmus seront protégés du chômage du fait de leur réel acquis. Non seulement les échanges forment la jeunesse, mais ils offrent aussi une ouverture d’esprit et permettent de voir les choses de façon différente, ce qui est important.
Dans mon département, le Haut-Rhin, les échanges sont nombreux. Notre plus grand lycée, qui accueille plus de 2 500 élèves, a déjà conclu des partenariats avec l’Allemagne et la Suisse. Je vous engage donc, madame la ministre, à faire un déplacement chez nous, à Saint-Louis, dans notre département frontalier.
Les membres de mon groupe voteront naturellement cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Alors que l’on nous a reproché d’ouvrir des débats sur les licenciements boursiers ou les temps partiels, j’ai bien l’impression qu’on ouvre à présent un autre débat : celui sur l’apprentissage. Alors, soyons clairs : nous ne sommes pas contre la mobilité internationale des jeunes et, en particulier, des apprentis.
En revanche, il s’agit tout de même d’un amendement ambitieux, puisqu’il vise à instaurer de nouvelles normes en matière de droit du travail, ce qui crée son lien avec le texte en discussion. J’estime pour ma part qu’il est quelque peu compliqué d’en débattre en quelques minutes. C’est pourquoi, dans l’attente de l’inscription à l’ordre du jour de la réforme de la formation professionnelle et, en particulier, de l’apprentissage qui a été annoncée par le Gouvernement, nous ne participerons pas au vote.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Monsieur Watrin, vous avez complètement raison : le sujet de l’apprentissage sera traité dans le cadre des projets de loi qui seront présentés prochainement par le Gouvernement.
Si je défends cet amendement aujourd’hui, à la suite du rapport de M. Arthuis et en accord avec lui, c’est simplement parce que les fonds Erasmus ne peuvent être mobilisés que jusqu’au 31 janvier de cette année. Dès lors, si l’on n’inscrit pas dans la loi dès à présent des dispositions permettant ces échanges d’apprentis, ceux-ci ne pourront pas avoir accès à ce programme cette année. C’est pourquoi j’ai déposé cet amendement sur ce texte. Je salue évidemment le travail important de M. Arthuis sur ce sujet, mais cette raison de calendrier est essentielle.
Un autre point est important : l’adoption de cet amendement au sein de ce texte enverra un signal positif à l’Union européenne et à ses États membres. C’est tout pour aujourd’hui ; le reste viendra par la suite.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
L’amendement n° 190, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6525-5 du code des transports est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, la référence : « L. 3123-2 et » est remplacée par la référence : « L. 3123-1 à » ;
2° Le second alinéa est supprimé.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Non seulement la sixième ordonnance, publiée le 20 décembre 2017, comporte de nombreuses coordinations rendues nécessaires par les modifications apportées au code du travail par les cinq ordonnances du 22 septembre 2017, mais elle modifie aussi le fond du droit sur plusieurs points, souvent en l’assumant, parfois de manière subreptice.
C’est le cas avec l’introduction, pour la première fois dans la loi, d’une définition du travail à temps partiel des personnels navigants du transport aérien comme toute durée de travail annuelle inférieure à 235 jours d’activité, sauf si un accord collectif en dispose autrement.
Il apparaît que cette disposition n’a fait l’objet d’aucune concertation avec les organisations syndicales intéressées ou les organisations professionnelles du secteur. En outre, eu égard au seuil légal retenu, un grand nombre de salariés du secteur deviendrait des salariés à temps partiel. De ce fait, serait ouverte une brèche dans le modèle de protection sociale et d’affiliation obligatoire de l’ensemble des navigants à la caisse de retraite des personnels navigants, ou CRPN, puisque les périodes d’inactivité sans solde liées au travail à temps alterné ne donnent pas lieu au versement de cotisations. Par ce biais, la concurrence sociale déloyale qu’entraînerait l’arrivée de nouveaux entrants pourrait fragiliser le secteur et affaiblir les droits des salariés en place.
Il convient donc de supprimer cette disposition et de renvoyer la définition du travail à temps partiel des navigants à une concertation avec leurs représentants, sous l’égide du ministère des transports.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il est favorable ; évidemment, le ministère des transports et le ministère du travail ont la même position sur le sujet.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
L’amendement n° 157, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Par dérogation aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 1242-5 du code du travail, l’interdiction de recourir à des contrats à durée déterminée ne s’applique pas aux collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy pendant les six mois suivant un licenciement pour motif économique notifié à la suite des circonstances exceptionnelles climatiques survenues le 6 septembre 2017.
II. – Dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, l’employeur invite, par tout moyen conférant date certaine, le salarié à reprendre son poste de travail dans un délai qu’il fixe et ne pouvant être inférieur à quinze jours. En cas de refus du salarié ou d’absence de réponse ainsi qu’en cas d’impossibilité pour ce dernier de revenir à son poste de travail, l’employeur peut engager une procédure de licenciement. L’impossibilité de reprendre le poste de travail constitue la cause réelle et sérieuse du licenciement. Celui-ci est prononcé dans les conditions prévues par les dispositions du code du travail relatives à la rupture du contrat de travail pour motif personnel, à l’exception des dispositions prévues aux articles L. 1232-2 à L. 1232-4 et L. 1234-1 à L. 1234-5 du même code.
Le salarié bénéficie de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9 dudit code et de l’indemnité de congés payés prévue à l’article L. 3141-28 du même code.
L’employeur doit remettre aux salariés les documents mentionnés aux articles L. 1234-19 et L. 1234-20 du même code.
Le présent II est applicable aux employeurs de droit privé établis dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, à compter de la promulgation de la présente loi et ce jusqu’au 31 décembre 2018.
III. – Dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, par dérogation aux articles L. 1232-2 et L. 1233-11 du même code, l’employeur qui envisage de licencier un ou plusieurs salariés à la suite de circonstances exceptionnelles climatiques survenues le 6 septembre 2017, n’est pas tenu de les convoquer à un entretien préalable lorsqu’il se trouve dans l’impossibilité matérielle de procéder à cet entretien.
Le présent III est applicable à compter de la promulgation de la présente loi et ce jusqu’au 31 décembre 2018.
IV. – Dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, le salarié qui n’obtient pas de réponse de son employeur dans un délai de quinze jours, après l’avoir contacté par tout moyen conférant date certaine, demande à la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi de Guadeloupe de constater la carence de l’employeur. Après avoir mené les investigations nécessaires, la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi de Guadeloupe atteste, dans un délai de quinze jours, cette carence. Cette attestation entraîne la rupture du contrat de travail à la date de notification aux parties en cause. Cette rupture produit les effets d’un licenciement. L’absence de réponse de l’employeur constitue la cause réelle et sérieuse du licenciement. Les dispositions du code du travail relatives à la procédure de licenciement ne sont pas applicables.
Le salarié bénéficie de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9 du même code et de l’indemnité de congés payés prévue à l’article L. 3141-28 du même code. À défaut de versement par l’employeur, ces indemnités sont couvertes par l’assurance prévue à l’article L. 3253-6 du même code.
Le présent IV est applicable aux employeurs de droit privé établis dans les collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, à compter de la promulgation de la présente loi et ce jusqu’au 31 décembre 2018.
V. – Les employeurs exerçant leur activité dans les collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélemy sont dispensés de la contribution prévue à l’article L. 1233-69 du même code pour les salariés ayant adhéré au contrat de sécurisation professionnelle entre le 6 septembre 2017 et le 5 septembre 2018.
Un avenant à la convention pluriannuelle mentionnée à l’article L. 1233-70 du même code entre l’État et l’organisme chargé de la gestion du régime d’assurance chômage mentionné à l’article L. 5427-1 du même code traite les conséquences de cette dispense sur le financement du parcours de retour à l’emploi mentionné à l’article L. 1233-65 du même code et des mesures qu’il comprend.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Ce dernier amendement concerne Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
J’étais au mois de décembre aux Antilles, et j’ai passé à cette occasion un peu de temps sur l’île de Saint-Martin. J’ai pu y constater l’extraordinaire mobilisation de nos concitoyens pour nettoyer et tout remettre en ordre de marche après l’ouragan. J’ai aussi vu à quel point la reprise était difficile. En effet, la saison touristique y commence au mois de novembre ; elle a par conséquent été, cette année, quasi impossible à réaliser. En outre, les reconstructions sont lentes et difficiles, pour différentes raisons techniques et d’assurance que je ne détaillerai pas aujourd’hui. La situation à laquelle nous faisons face à Saint-Martin est donc grave.
C’est pourquoi, dès l’ouragan passé, j’avais demandé à la direction des entreprises, de la concurrence, du travail et de l’emploi de Saint-Martin, la DIECCTE, de mettre en œuvre les possibilités légales d’activité partielle, c’est-à-dire, en langage courant, de chômage technique. Ces dispositions sont néanmoins prévues pour des durées plus courtes qu’une année entière. Dès lors, ayant pris la mesure de la situation, je me suis engagée vis-à-vis des autorités locales, des employeurs et des salariés pour qu’on puisse prolonger ces dispositifs et faire ainsi le pont jusqu’au redémarrage de la saison touristique en novembre prochain.
Tout l’enjeu pour Saint-Martin est de reconstruire suffisamment pour qu’en novembre ou décembre prochain la saison touristique puisse redémarrer. Cela seul pourra sauvegarder l’emploi ; sinon, l’emploi à Saint-Martin sera très endommagé durablement.
Le deuxième sujet qui m’a paru d’une importance évidente est celui du contrat de sécurisation professionnelle pour les entreprises. Nous avons souhaité que, dans ce contexte d’exception, les entreprises qui doivent licencier des salariés pour motif économique soient exonérées du financement de ce contrat. Cela a sauvé plusieurs entreprises et plusieurs centaines d’emplois sur l’île. Il faut voir la situation que vivent à la fois les entreprises et les salariés ; je pense donc que ce sera une bonne chose.
Troisièmement, il fallait une adaptation temporaire du droit du travail. Saint-Martin vit actuellement et, là encore, de façon temporaire, des situations insolubles en droit. En effet, certains salariés ont complètement perdu leur entreprise. Ils n’ont plus d’employeur et ne peuvent donc pas être licenciés et bénéficier de l’assurance chômage. C’est kafkaïen ! Le problème inverse existe aussi. C’est pourquoi, dans les deux cas, nous entendons adapter provisoirement le droit du travail pour prendre en considération toutes les situations et, surtout, pour sauvegarder le plus possible d’emplois par le recours le plus fréquent possible à l’activité partielle. Nous éviterons ainsi la mise au chômage de milliers de nos concitoyens et nous faciliterons également la vie des entreprises et des salariés.
Je vous propose donc, mes chers collègues, d’adopter, par le biais de cet amendement, une adaptation temporaire du droit du travail visant à aider Saint-Martin à repartir de l’avant.
J’ai également pu, à cette occasion, proposer la création d’un centre de formation d’apprentis à Saint-Martin, qui n’en dispose pas actuellement. J’anticipe quelque peu sur ce point. Il y a beaucoup à faire dans le tourisme comme dans la construction, du fait de la reconstruction nécessaire. Nous avons aussi renforcé les moyens du service public. Ces deux dernières mesures ne sont pas comprises dans l’amendement en discussion, mais je voulais insister sur ce point, car je crois que nous avons un devoir de solidarité envers Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Favorable, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour explication de vote.
M. Guillaume Arnell. Ce n’est pas à proprement parler une explication de vote : en tant qu’élu du territoire de Saint-Martin, je souhaite tout d’abord vous remercier, madame la ministre, de m’avoir associé en amont à la préparation de votre visite sur l’île, ce qui nous a permis de vous éclairer sur certaines difficultés et sur la nécessité d’apporter de vraies réponses aux acteurs économiques, qui n’en attendaient pas moins.
J’avais évoqué ici même combien il était nécessaire que le Gouvernement offre des réponses et un accompagnement à la hauteur des dégâts occasionnés par l’ouragan Irma. Or il m’apparaît que vous faites réellement preuve d’une attention toute particulière. C’est pourquoi je souhaite vous remercier en mon nom, mais également au nom de l’ensemble des acteurs économiques du territoire de Saint-Martin et, par extension, de Saint-Barthélemy. Je m’interdis parfois de m’exprimer au nom de mon collègue de Saint-Barthélemy, mais je crois que le Gouvernement a fait preuve d’initiative et je saurais relayer cette façon de voir les choses.
Je veux aussi remercier l’ensemble des membres de la commission des affaires sociales, qui a émis ce matin, à l’unanimité, un avis favorable sur cet amendement.
Enfin, merci encore, madame la ministre, pour votre bienveillance à l’égard des sinistrés de Saint-Martin !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Catherine Fournier, pour explication de vote.
Mme Catherine Fournier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat va très vraisemblablement ratifier ces ordonnances ; c’est en tout cas le vœu de mon groupe. Nous terminerons ainsi, madame la ministre, l’examen de la première partie de votre réforme de notre modèle social.
La discussion de ces 200 amendements a confirmé que, en matière de droit du travail, il y a réellement deux visions qui s’opposent.
Certains voient l’entreprise comme un lieu de conflit entre salariés et employeurs, dont les relations ne seraient basées que sur un rapport de suspicion et de force. Le dialogue social ne se justifierait que pour protéger les salariés d’une menace, les employeurs ne se soucieraient que de leur profit, avec la complicité du pouvoir.
D’autres, dont je fais partie, avec les membres de mon groupe et, plus largement, de la majorité sénatoriale, croient au contraire qu’il faut pouvoir avoir confiance dans l’intelligence collective de ces communautés que sont les entreprises, confiance dans la capacité qu’ont les femmes et les hommes qui y travaillent, salariés comme employeurs, à comprendre qu’ils ont des intérêts communs et qu’ils doivent agir en conséquence.
Faire confiance ne signifie pas pour autant être naïf. Oui, la violence existe dans les entreprises, violence physique, violence morale, violence économique. Oui, les abus existent, chez les employeurs, chez les salariés, parfois même chez les syndicats. La violence et les abus existent dans les entreprises comme partout ailleurs. Il faut donc prévoir des garde-fous pour que les communautés dont je parlais résistent aux comportements néfastes et aux attitudes individualistes.
Comme en toute chose, il y a un équilibre à trouver : c’est une centriste qui vous le dit. Je trouve pour ma part ces ordonnances équilibrées. Elles confèrent aux entreprises la souplesse nécessaire pour s’adapter, elles encouragent le dialogue entre salariés et employeurs sans pour autant renier les missions des représentants syndicaux, et elles protègent plus efficacement. Ce n’est peut-être pas suffisant, mais c’est à mes yeux un signal fort.
Continuez dans cette voie, madame la ministre ! Nous vous donnons rendez-vous dans quelques mois pour aborder le second volet de votre réforme, sans doute le plus important : celui de la protection et de l’accompagnement des salariés.
Je tiens également à vous remercier, ainsi que M. le président-rapporteur de la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, l’emploi industriel en France représente 14 %, contre 26 % en Allemagne, et près de 80 % de CDD. Ce projet de loi apporte de la flexibilité aux entreprises et de la sécurité aux salariés et il permettra aux entreprises d’embaucher désormais des salariés en CDI. Il revêt donc une réelle importance pour les PME de moins de 50 employés. Il crée une possibilité de négociation par un accord collectif sans délégué syndical ; s’il y en a un, celui-ci conserve ses prérogatives.
Le comité social et économique, qui est une fusion des délégués du personnel, du comité d’entreprise et du CHSCT, conserve toutes les prérogatives de ces structures, contrairement à ce qui a été affirmé lors de la discussion des articles. C’est principalement vrai pour le CHSCT. Par ailleurs, cela laisse une grande liberté aux partenaires sociaux et donne la possibilité de transformer le CSE en conseil d’entreprise.
Qui plus est, ce projet de loi permet une augmentation des indemnités de licenciement, si, malheureusement, cette situation survient, et encadre, en cas de conflit, les indemnités prud’homales. Cela se traduira par moins de litiges et par plus d’équité sur le territoire, par plus de justice pour les salariés et plus de sécurité pour les employeurs.
Dans le C3P, plusieurs facteurs étaient ingérables, notamment pour les PME. Ils ont été retirés et le C2P, le compte professionnel de prévention, conserve les mêmes prérogatives que le C3P pour ce qui concerne la formation, le départ anticipé à la retraite, le travail à mi-temps. À cette fin, six critères identifiés ont été conservés.
Le CDI de chantier intéressera les PME. La rupture conventionnelle collective accompagne les départs volontaires ; il ne s’agit pas d’un licenciement déguisé, puisqu’il faut un accord des syndicats représentant plus de 50 % des salariés et l’assentiment des salariés concernés.
Ce projet de loi adapte bien le droit du travail à la diversité des entreprises, notamment des PME et TPE. Il faut donc que les acteurs économiques s’approprient cette réforme, qui est utile pour les salariés et qui apporte de la stabilité aux entreprises par le dialogue et le travail ensemble.
Notre économie et les entreprises doivent devenir compétitives. Pour cela, il faut aussi privilégier la formation professionnelle, notamment grâce à l’apprentissage, car de nombreux emplois restent vacants.
L’adoption de ce projet de loi renforçant le dialogue social constitue un élément important pour aller vers le plein-emploi. C’est pourquoi le groupe Les Indépendants – République et Territoires le votera et remercie Mme la ministre et M. le président de la commission des affaires sociales de leur implication.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe Les Républicains votera ce projet de loi modifié par le Sénat.
Je tiens à remercier le président-rapporteur de la commission des affaires sociales de la qualité de son travail. Je veux également saluer votre écoute, madame la ministre, notamment lors de vos échanges avec la commission des affaires sociales.
Comme cela a été évoqué lors de la discussion générale, nous accompagnerons cette réforme, que nous saluons, mais nous aurions voulu aller plus loin dans la refonte du code du travail, notamment son volet social. Je pense en particulier à l’évolution des seuils sociaux, sujet qui a été abordé au cours de ce débat et qui constitue l’une des orientations des évolutions à venir.
J’ai bien entendu que nous aurions l’occasion de revenir sur ces points, dans les prochains mois, à travers différents textes. Sachez toutefois, madame la ministre, que cela fait partie de nos préoccupations, dans l’intérêt de l’économie française comme dans celui de l’emploi.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen de ce projet de loi. Nous regrettons le peu d’écho qu’ont eu nos débats, alors que nous nous apprêtons à voter un texte qui va profondément bouleverser le droit du travail. Comme nous avons eu l’occasion de le souligner, l’application depuis le 1er janvier de certaines dispositions des ordonnances explique certainement ce manque d’intérêt.
Ces cinq ordonnances généralisent pourtant l’inversion de la hiérarchie des normes entre l’accord d’entreprise et l’accord de branche, suppriment le principe de faveur dans bien des domaines et flexibilisent le travail. Les conséquences concrètes de ces décisions dans la vie des travailleurs se font d’ailleurs déjà sentir dans les entreprises.
La mise en place des barèmes des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif, la restriction du périmètre d’appréciation de la cause économique des licenciements au territoire national, la création des ruptures conventionnelles collectives, la fusion des instances représentatives du personnel sont autant de mesures régressives qui réduisent les protections des salariés et sécurisent, parfois abusivement, les employeurs.
Même si l’on peut saluer son climat serein, le débat que nous avons eu durant deux jours a confirmé le clivage que j’avais dénoncé lors de la discussion générale. Loin d’être un texte équilibré, ce projet de loi, qui s’inscrit dans le sillon tracé par la loi El Khomri, n’a aucunement été modifié, même à la marge, malgré les cinquante amendements que nous avons déposés et ceux qui ont été défendus par d’autres groupes : tous ont été systématiquement rejetés. Ce texte se trouve donc confirmé dans sa brutalité à l’égard des droits des salariés.
Les amendements qui visaient à proposer des solutions de remplacement ont tous été repoussés par la majorité du Sénat. Ils avaient pourtant pour objet la modernisation des normes permettant de s’attaquer aux nouveaux enjeux liés à la précarité à outrance du salariat, au développement des sciences et techniques et à leur impact sur l’organisation du travail, à la santé au travail, aux nouveaux pouvoirs des salariés dans l’entreprise pour briser la logique financière destructrice d’emplois.
Nous n’en sommes pas surpris, mais nous le regrettons vivement. Pour toutes ces raisons, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera résolument contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, je joins mes remerciements à ceux qui vous ont été adressés. Nous avons fait la preuve que les convictions pouvaient s’exprimer avec force, que le débat pouvait avoir lieu et que l’humour y trouvait même de temps en temps sa place, ce qui ne gâte rien. À mon sens, la démocratie en sort grandie.
Il n’en reste pas moins que mes convictions demeurent, identiques. Madame la ministre, l’édifice que vous nous avez présenté a au moins le mérite de la cohérence. L’ennui, c’est qu’il repose sur des fondations de sable. Je le répète, vous partez de l’axiome selon lequel la négociation permettra de générer de la confiance, car elle sera établie sur des rapports équilibrés entre les salariés et l’employeur. Or vous avez enlevé les moyens de cet équilibre et supprimé l’obligation que l’entreprise compte un représentant syndical ou un salarié mandaté. Les relations de subordination sont telles qu’il y a de grands risques que des pressions fortes soient exercées et que l’employeur parvienne à ses fins sans trop de difficultés.
La loi El Khomri aurait mérité d’être évaluée. Elle a en effet permis en 2016 et en 2017 la création d’un nombre important d’emplois dans toutes les régions de ce pays. C’est dire si elle n’avait pas tous les défauts que vous avez bien voulu lui prêter.
Le projet de loi que nous venons d’examiner est une régression en matière de sécurité des salariés. En effet, ceux-ci ne seront pas assurés de conserver leurs salaires, leurs conditions de travail, leurs primes, ni même leurs horaires. Ils ne sont d’ailleurs même pas sûrs de conserver leur emploi !
Ce texte est également un recul en termes de vigilance apportée aux conditions de travail, à la santé, à la sécurité. C’est aussi une régression quant au droit à une indemnisation juste pour préjudice subi. C’est encore une régression eu égard aux contrats de travail.
Globalement, c’est une régression par rapport à la situation antérieure, ce qui est tout à fait regrettable. Par conséquent, nous voterons contre ce projet de loi.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Le groupe La République En Marche salue le professionnalisme de Mme la ministre, sa maîtrise des dossiers, ainsi que le travail collaboratif qu’elle a permis avec le Sénat. Il remercie également le rapporteur, ainsi que toutes les personnes qui l’ont épaulé, de la grande qualité du travail réalisé. Je ne saurais oublier l’ensemble des sénateurs présents pour la hauteur des débats et la sérénité dans laquelle ces derniers se sont déroulés.
Le Sénat a contribué à améliorer ce texte sur certains points. Toutefois, le groupe La République En Marche s’abstiendra, même si je précise que cette abstention doit être perçue comme constructive. (Marques de surprise sur plusieurs travées.) En effet, la majorité sénatoriale a malheureusement voté plusieurs modifications que nous ne pouvons accepter,…
Mme Laurence Cohen. Il faut voter contre, alors !
Mme Patricia Schillinger. … notamment la suppression des observatoires départementaux d’analyse et d’appui au dialogue social et à la négociation et, surtout, la suppression de la généralisation des accords majoritaires, fil rouge du dialogue social.
La prochaine étape sera la commission mixte paritaire. Nous croyons en un accord entre les deux assemblées, afin de continuer sur la voie du changement et de la modernité, en attendant les prochaines réformes. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Gabouty. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je me félicite des échanges qui ont eu lieu. Si de nombreux constats sont partagés sur l’ensemble des travées, tout le monde n’en tire pas les mêmes conclusions et les mêmes leçons. À mon sens, la philosophie de ce texte s’inscrit dans la ligne de la loi El Khomri, le réalisme en plus. On peut vouloir des délégués syndicaux dans des PME, dans des petites entreprises, dans des entreprises de moins de 10 salariés, ou le mandatement, mais on sait que cela ne marche pas ! Voilà un exemple de différence entre la théorie et la pratique.
Le pragmatisme est à la base de l’efficacité des lois. Faire des lois pour qu’elles soient mal appliquées ou qu’elles ne produisent pas les effets qui ont motivé leur élaboration ne sert strictement à rien.
Je pense que l’on va vraiment dans la bonne direction. Certains le savent, je le dis publiquement, je soutiens le Gouvernement, je soutiens le Président de la République. C’est pourquoi je m’étonne, mes chers collègues du groupe La République En Marche, que, pour des différences somme toute minimes, vous ne votiez pas ce texte. Pour ma part, je suis beaucoup plus positif.
M. Fabien Gay. Oui, vous êtes d’accord !
M. Jean-Marc Gabouty. Les textes que nous examinons ne peuvent correspondre à 100 % à ce que nous souhaitons et le texte modifié par le Sénat ne me semble pas aller à l’encontre du projet du Gouvernement. Le hiatus ne me paraît pas si grand. C’est la raison pour laquelle les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen voteront ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.
(Le projet de loi est adopté.) (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, je tiens à remercier l’ensemble des vice-présidents qui se sont succédé au cours de ces débats. J’adresse mes remerciements les plus chaleureux au président-rapporteur de la commission des affaires sociales, ainsi qu’à tous les membres qui composent cette instance. La qualité de nos débats, leur rigueur, leur profondeur sont largement dues au fait qu’ils avaient fait l’objet d’une préparation minutieuse et qu’un travail important avait été fourni en amont. Ces deux volets du travail parlementaire – en commission et en séance publique – sont complémentaires.
J’ose le dire, ce fut pour moi un honneur et un plaisir de travailler avec la commission des affaires sociales. C’était une première, mais ce n’est pas la dernière fois, puisque nous allons nous retrouver bientôt ! Je salue tout particulièrement le travail qu’elle a accompli, ainsi que son président.
Sur certains points, en effet, le Sénat a enrichi le texte,…
Mme Françoise Gatel. Toujours ! (Sourires.)
Mme Muriel Pénicaud, ministre. … sur d’autres, non, mais l’histoire n’est pas tout à fait finie ! (Nouveaux sourires.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie également de la façon très approfondie dont vous menez les débats : vous vous attachez au fond, faites preuve de rigueur et manifestez la volonté d’aller au bout des discussions. Voilà un bel exercice démocratique. Certes, c’est la responsabilité des sénateurs, comme celle du Gouvernement, mais c’est bien ce qui ressort de nos travaux, qu’il y ait eu accords ou désaccords.
Finalement, la démocratie, c’est cela : l’important est de pouvoir discuter ensemble, de façon ouverte, sincère et rigoureuse, afin de trouver le meilleur pour notre pays.
Je ne saurais conclure sans remercier, au nom du Gouvernement, tous ceux qui n’ont pas la parole, mais qui contribuent à la réussite de ces débats et nous permettent de faire œuvre commune : les administrateurs, les huissiers, la direction de la séance qui réalisent chaque jour un travail formidable, sans oublier mon équipe.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous dis à très bientôt, car nous aurons l’occasion de nous réunir prochainement pour la suite ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe socialiste et républicain, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
6
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 25 janvier 2018, à dix heures trente, quatorze heures trente et, éventuellement, le soir :
1. Quatre conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :
- Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Chili relatif à l’emploi rémunéré des personnes à charge des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre et de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l’État plurinational de Bolivie relatif à l’emploi salarié des membres des familles des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre (n° 164, 2016-2017) ;
Rapport de Mme Hélène Conway-Mouret, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, (n° 220, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 221, 2017-2018).
- Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Congo relatif à l’activité professionnelle salariée des personnes à charge des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre, de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d’Équateur sur l’emploi salarié des personnes à charge des membres des missions officielles, et de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Pérou relatif à l’activité rémunérée des membres des familles des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre (n° 66, 2017-2018) ;
Rapport de Mme Hélène Conway-Mouret, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, (n° 220, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 222, 2017-2018).
- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et douanière (n° 185, 2017-2018) ;
Rapport de Mme Christine Prunaud, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 223, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 225, 2017-2018).
- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre relatif à la coopération technique et à l’assistance mutuelle en matière de sécurité civile (n° 184, 2017-2018) ;
Rapport de Mme Christine Prunaud, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 223, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 224, 2017-2018).
2. Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, permettant une bonne application du régime d’asile européen (n° 149, 2017-2018) ;
Rapport de M. François-Noël Buffet, fait au nom de la commission des lois (n° 218, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 219, 2017-2018).
3. Nouvelle lecture du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017-48 du 19 janvier 2017 relative à la profession de physicien médical et l’ordonnance n° 2017-50 du 19 janvier 2017 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé (n° 183, 2017-2018) ;
Rapport de Mme Corinne Imbert, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 216, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 217, 2017-2018).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures dix.)
nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été publiée conformément à l’article 12 du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 9 du règlement, cette liste est ratifiée.
Les représentants du Sénat à l’éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social sont :
Titulaires : MM. Alain Milon, Philippe Mouiller, Mmes Catherine Deroche, Catherine Fournier, M. Jean-Louis Tourenne, Mmes Nadine Grelet-Certenais, Patricia Schillinger ;
Suppléants : MM. Stéphane Artano, Gérard Dériot, Mmes Chantal Deseyne, Pascale Gruny, M. Olivier Henno, Mme Monique Lubin, M. Dominique Watrin.
nomination d’un membre d’une mission d’information
Le groupe Union Centriste a présenté une candidature pour la mission d’information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : Mme Valérie Létard est membre de la mission d’information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays, en remplacement de M. Jean-Pierre Moga, démissionnaire.
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD