M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait des trois premiers amendements, qu’elle considère plutôt comme des amendements d’appel. Ceux-ci, notamment l’amendement n° II-618 rectifié, nous paraissent soit inopérants, soit trop larges, soit déjà satisfaits par le droit existant.
Quant au quatrième amendement, j’aimerais entendre le Gouvernement sur la question des faux numéros et de la fraude documentaire. Le système des cartes Vitale avec photographie, élément biométrique, etc. ne fonctionne pas et le recours à l’attribution de numéros de sécurité sociale est manifestement un champ de fraude extrêmement étendu. Je ne suis guère favorable à la production de rapports, mais c’est un vrai sujet. Nous aimerions connaître le nombre de faux numéros, savoir comment ils peuvent être attribués, les conséquences qu’en tire le Gouvernement. Celui-ci s’était engagé oralement à l’occasion de l’examen de la loi relative à la lutte contre la fraude. Néanmoins, peu de dispositions de cette loi permettent de lutter contre la délivrance de faux numéros. La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° II-617 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État. Je veux d’abord vous rappeler l’ambition collective du Gouvernement et de tous les opérateurs sociaux de lutter massivement contre la fraude documentaire, notamment grâce aux nouveaux moyens numériques. De nombreux projets existent déjà quant au renforcement technologique des moyens d’émission des documents liés au numéro d’inscription au répertoire, le NIR, autrement dit le numéro de sécurité sociale. D’autres chantiers ont été lancés sur l’identité numérique publique. Tous ont pour objectif d’assurer un plus haut niveau de protection et une meilleure facilité d’accès aux citoyens.
La fraude documentaire fait déjà l’objet d’un volet spécifique dans l’analyse de la fraude sociale. À ce titre, un suivi régulier est retracé dans les bilans annuels transmis par l’ensemble des organismes, y compris la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, en application de l’article L. 114-9 du code de la sécurité sociale, bilans annuels que le Gouvernement mettra à votre disposition.
La fraude au NIR fait l’objet de sanctions spécifiques et, en cas de constat de fraude documentaire, les caisses de sécurité sociale doivent suspendre le versement des prestations sociales. Par certains aspects, votre amendement est donc déjà satisfait, madame le sénateur.
Enfin, les prestations versées par la branche maladie sont également concernées puisque l’essentiel des cas de fraude documentaire entre dans le cadre de la fraude à la stabilité de la résidence ou à la régularité du séjour. Sur ces points, vous verrez dans les rapports annuels que les opérateurs arrivent à contrôler et à sanctionner.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement vous demande le retrait de ces amendements. À défaut, son avis serait défavorable.
M. le président. Madame Goulet, les amendements nos II-620 rectifié, II-619 rectifié, II-618 rectifié et II-617 rectifié sont-ils maintenus ?
Mme Nathalie Goulet. Je vais retirer les trois amendements litigieux et maintenir l’amendement n° II-617 rectifié.
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai posé voilà quelques mois une question d’actualité sur le même sujet. Nous suivons le dossier depuis plusieurs années et nous n’arrivons pas à obtenir d’informations. Un avis de sagesse sur le rapport, même si cette mesure ne traverse pas le boulevard Saint-Germain et ne parvient pas jusqu’à l’Assemblée nationale, représentera un geste. J’en ai parlé au rapporteur général de la commission des affaires sociales, Jean-Marie Vanlerenberghe, et il existe tout de même un problème. Vous me dites qu’il y a un suivi, je m’en réjouis : travaillons sur le sujet !
M. le président. Les amendements nos II-620 rectifié, II-619 rectifié et II-618 rectifié sont retirés.
Je mets aux voix l’amendement n° II-617 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 55 novodecies.
Article 55 vicies (nouveau)
I. – L’article 244 quater B du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa du I est ainsi modifié :
a) Les troisième et dernière phrases sont complétées par les mots : « ou sur le territoire de la collectivité de Corse » ;
b) À la troisième phrase, les mots : « à compter du 1er janvier 2015 » sont supprimés ;
c) À la dernière phrase, les mots : « , à compter du 1er janvier 2015, » sont supprimés ;
2° Après le mot : « précité », la fin du 3 du II bis est supprimée.
II. – Le I s’applique aux dépenses engagées au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2019.
III. – Le I entre en vigueur à une date fixée par décret, qui ne peut être postérieure de plus de six mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer le dispositif législatif lui ayant été notifié comme conforme au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État. – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 55 vicies
M. le président. L’amendement n° II-767 rectifié, présenté par M. Gremillet, Mme Primas, MM. Magras, Pierre, Morisset et Saury, Mmes Bruguière, Chain-Larché, Thomas et Morhet-Richaud, MM. Mayet, Pellevat, Revet et Bonne, Mme Deromedi, MM. Mouiller, Milon, Bonhomme, Savary, Bascher, Danesi, Lefèvre et Chaize, Mme Imbert, MM. Cuypers et Cardoux, Mme M. Mercier, M. Daubresse, Mme Gruny, MM. Sido, Vogel, Kennel, Longuet, Bizet, Laménie, Genest, J.M. Boyer, Duplomb et de Nicolaÿ, Mmes de Cidrac et Chauvin, M. H. Leroy, Mme Deroche, MM. B. Fournier, Babary et Pillet, Mmes A.M. Bertrand et Micouleau, MM. Piednoir et Raison, Mme L. Darcos, MM. Mandelli et Savin, Mme Bories, M. Vaspart, Mme Noël, MM. Bazin, Darnaud, Segouin, D. Laurent et Charon et Mme Lamure, est ainsi libellé :
Après l’article 55 vicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La troisième phrase du premier alinéa du I de l’article 244 quater B du code général des impôts est complétée par les mots : « et, pour les exercices ouverts du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2024, à 60 % pour les dépenses de recherche inférieures ou égales à 50 millions d’euros dédiées au développement de produits de biocontrôle tels que définis à l’article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime ».
II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Sophie Primas.
Mme Sophie Primas. Le présent amendement, dont Daniel Gremillet est le premier signataire, vise à doubler le crédit d’impôt pour les dépenses de recherche dédiées au développement de produits de biocontrôle à hauteur de 60 % de ces dépenses. Est ainsi proposée la création d’un nouveau levier fiscal en faveur du soutien à la recherche relative à ces produits.
Le déploiement d’alternatives aux produits phytopharmaceutiques est la condition sine qua non d’une meilleure maîtrise de leur utilisation. Le développement de solutions alternatives est également un enjeu majeur pour l’agriculture française, qui doit répondre au défi alimentaire, tout en faisant face aux risques climatiques, sanitaires et environnementaux. Il intéresse, par ailleurs, les collectivités, ainsi que les particuliers, qui ne peuvent plus utiliser de produits phytosanitaires pour l’entretien de l’ensemble des espaces verts, des forêts, ou encore de la voirie.
Dans ce contexte, il est essentiel de soutenir la recherche sur des produits de substitution tels que les produits de biocontrôle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Les produits de biocontrôle bénéficient déjà de soutiens et de régimes dérogatoires par rapport au droit commun. Je pense notamment aux procédures accélérées d’évaluation et d’instruction des demandes, aux taxes réduites dans le cadre de ces procédures, aux allégements réglementaires, comme l’exemption d’interdiction de publicité commerciale ou d’obligation d’agrément phytosanitaire, etc.
Faut-il pour autant doubler pendant six ans le taux du crédit d’impôt recherche ? La commission est assez réservée, pour ne pas dire défavorable. Cette mesure est contraire à l’article 20 de la loi de programmation des finances publiques prévoyant que les créations ou extensions de dépenses fiscales instaurées par un texte promulgué à compter du 1er janvier 2018 sont applicables pour une durée maximale de quatre ans. C’est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État. Comme vous l’avez rappelé, comme le Gouvernement l’a récemment réaffirmé, la stratégie nationale consiste à soutenir les produits de biocontrôle, la recherche publique et les acteurs de la filière. Néanmoins, augmenter le coût de la dépense fiscale en créant une mesure dérogatoire spécifique pour ces produits bouleverserait nécessairement les entreprises réalisant des travaux de R&D qui ne seraient pas dans le champ du biocontrôle, mais concerneraient tout autant de grandes priorités nationales.
De plus, pour en revenir à des arguments plus techniques, la mesure proposée s’appliquerait pour une durée excédant quatre ans, ce qui contreviendrait à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. Enfin, elle constitue une aide d’État au sens du droit de l’Union européenne qui pourrait fragiliser le dispositif déjà fragile et pourtant extrêmement nécessaire du crédit d’impôt recherche.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Je constate que M. le rapporteur général maîtrise parfaitement son sujet, mais peut-être moins celui du désherbage…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. J’avoue mon incompétence en la matière !
M. Bruno Sido. La situation est relativement dramatique. Les mauvaises herbes se multiplient dans les cultures et l’on ne maîtrise plus rien à force de retirer des matières actives en l’absence de moyens de substitution.
J’entendais hier un bruit infernal dans le jardin du Luxembourg, où l’on désherbait au chalumeau, avec du gaz importé ! Bonjour les émissions de CO2…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est soumis à la TICPE ! (Sourires.)
M. Bruno Sido. Par conséquent, la recherche doit absolument aboutir, afin de trouver des matières actives à destination des agriculteurs, innocentes pour l’environnement, peut-être, mais surtout efficaces. Sinon, on se retrouvera bientôt avec des champignons comme l’ergot du seigle qui tuaient autrefois les gens !
J’appelle donc l’attention du Gouvernement et de la commission sur le fait qu’il faut soutenir puissamment cette recherche, éventuellement à l’échelon européen.
M. le président. Madame Primas, l’amendement n° II-767 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sophie Primas. Oui, monsieur le président, car Daniel Gremillet y tient beaucoup.
Il faut savoir ce qu’on veut, monsieur le secrétaire d’État ! On interdit des produits sans délai, hors loi de finances, en laissant les agriculteurs, les maires et beaucoup de gens dans la difficulté. J’en comprends les raisons, mais il faut développer le biocontrôle. Un coup de pouce serait bienvenu. J’ajoute que les entreprises qui font de la recherche en la matière attendent trois ans pour obtenir les autorisations de mise sur le marché, fussent-elles très limitées ! C’est un autre sujet essentiel, qui concerne aussi l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 55 vicies.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-793, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli, Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 55 vicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le I de l’article 244 quater B du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice du crédit d’impôt mentionné au premier alinéa du présent I est conditionné à l’engagement de l’entreprise de maintenir son activité sur le territoire national pendant un délai de cinq ans à compter du 1er janvier de l’année suivant celle où l’entreprise a exposé les dépenses de recherche pour lesquelles elle bénéficie de ce crédit. Si, dans ce délai, l’entreprise cesse son activité sur le territoire national, la réduction d’impôt pratiquée fait l’objet d’une reprise. »
II. – Le I est applicable aux dépenses engagées au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2019.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, vous connaissez notre position sur le crédit d’impôt recherche, le CIR. Toutefois, nous avons décidé de déposer cet amendement de repli qui reprend avec quelques modifications une préconisation du rapport de juin 2018 de M. Martial Bourquin, fait au nom de la mission d’information du Sénat sur Alstom et la stratégie industrielle du pays.
Cet amendement tend à conditionner le bénéfice du crédit d’impôt recherche à un engagement de maintien de l’activité de l’entreprise sur le territoire national pendant un délai de cinq ans à compter du 1er janvier de l’année suivant celle où l’entreprise a exposé les dépenses de recherche pour lesquelles elle bénéficie de ce crédit.
En effet, pour reprendre un constat que nous avons fait il y a plusieurs années et qui est d’une actualité saisissante, le Gouvernement explique tous les jours que les caisses de l’État sont vides et qu’il est indispensable de faire des économies, mais commençons par voir si l’argent dépensé l’est utilement, et regardons là où l’on n’a pas l’habitude de regarder !
De ce point de vue, le crédit d’impôt recherche est tout à fait exemplaire. Il pèse un poids considérable : son montant, 6 milliards d’euros, en fait l’une des principales niches fiscales depuis plusieurs années. En outre, tout le monde l’admet, on ignore sa réelle efficacité. Un rapport de notre collègue Mme Brigitte Gonthier-Morin était éclairant sur cette question.
C’est pourquoi, par le biais de cet amendement, nous souhaitons éviter de voir se reproduire les comportements de pure optimisation fiscale de la part de certains groupes étrangers, mais aussi nationaux, qui bénéficient du CIR sans exercer leur activité sur le territoire national. Ce crédit d’impôt doit s’accompagner d’une contrepartie, avec une présence suffisante en France pour permettre un juste retour pour la collectivité de l’effort fiscal consenti.
M. le président. L’amendement n° II-828 rectifié, présenté par MM. Chatillon, M. Bourquin, Allizard, Kern, Rambaud et Wattebled, Mme Primas, MM. Corbisez, Danesi et D. Laurent, Mmes Keller et Létard, MM. Longeot, Pellevat, Perrin et Savin, Mmes Vullien et Artigalas et MM. J. Bigot, Marchand et Menonville, est ainsi libellé :
Après l’article 55 vicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le I de l’article 244 quater B du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice du crédit d’impôt mentionné au premier alinéa du présent I est conditionné à l’engagement de l’entreprise de maintenir son activité sur le territoire national pendant un délai de trois ans à compter du 1er janvier de l’année suivant celle où l’entreprise a exposé les dépenses de recherche pour lesquelles elle bénéficie de ce crédit. Si, dans ce délai, l’entreprise cesse son activité sur le territoire national, la réduction d’impôt pratiquée fait l’objet d’une reprise au titre de l’année au cours de laquelle cet événement est intervenu. »
II. – Le I est applicable aux dépenses engagées au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2019.
La parole est à Mme Sophie Primas.
Mme Sophie Primas. Cet amendement, dont le premier signataire est mon collègue Chatillon, va un petit peu dans le sens de l’amendement précédent. Il tend à conditionner le bénéfice du crédit d’impôt recherche à un engagement de maintien de l’activité de l’entreprise sur le territoire national pendant un délai de trois ans à compter du 1er janvier de l’année suivant celle où l’entreprise a exposé ses dépenses de recherche. À défaut d’assurer le respect de cette condition de durée, le dispositif organise un mécanisme de reprise de l’avantage fiscal octroyé.
Cette mesure était l’une des recommandations du rapport de Martial Bourquin, fait au nom de la mission d’information du Sénat sur Alstom et la stratégie industrielle du pays présidée par Alain Chatillon. Elle nous semble tout à fait juste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. À la différence du groupe CRCE, je suis, comme la majorité des membres de la commission, favorable au crédit d’impôt recherche, qui est un outil puissant pour maintenir de la recherche en France. Néanmoins, nous avons un point d’accord : le CIR ne doit pas être utilisé comme un outil d’optimisation fiscale pour des entreprises qui seraient amenées à déménager leurs activités. Comme l’a dit à l’instant Sophie Primas, la mission d’information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays a proposé de conditionner le bénéfice du crédit d’impôt à la présence d’une activité sur le territoire national pendant un délai de trois ans.
J’invite donc le groupe CRCE à retirer son amendement au profit de l’amendement n° II-828 rectifié, qui est directement issu des travaux de la mission d’information, sur lequel la commission émet, en l’état, un avis de sagesse. Elle y serait favorable sous réserve d’une légère rectification, à savoir l’ajout de l’adverbe « volontairement » dans la dernière phrase du quatrième paragraphe qui serait ainsi rédigée : « Si, dans ce délai, l’entreprise cesse volontairement son activité sur le territoire national, la réduction d’impôt pratiquée fait l’objet d’une reprise au titre de l’année au cours de laquelle cet événement est intervenu. » Il est en effet des cas de force majeure totalement indépendants de l’entreprise ou qui peuvent s’expliquer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État. Nous n’entendons pas modifier le crédit d’impôt recherche, qui est aujourd’hui un dispositif central et efficace de soutien à l’investissement en matière de recherche et développement. Pour les contribuables qui en bénéficient, sa stabilité fait partie de sa force ; celle-ci est indispensable pour que le dispositif demeure efficace.
Vous dénoncez un effet d’aubaine, mais toutes les évaluations du CIR montrent son efficacité pour stimuler la dépense de R&D des entreprises qui en bénéficient. Elles montrent que chaque euro de crédit d’impôt recherche donne lieu à une dépense de R&D d’au moins un euro. Ainsi, le dispositif en lui-même ne génère pas d’effet d’aubaine ou d’optimisation fiscale.
D’un point de vue plus technique et juridique, la Cour de justice de l’Union européenne pourrait considérer que le fait de conditionner le bénéfice du crédit d’impôt à un engagement de maintien de l’activité de l’entreprise sur le territoire national pendant un certain délai est contraire à la liberté d’établissement. Je vous renvoie ainsi à l’arrêt Fournier du 10 mars 2005, dans lequel la Cour de justice des communautés européennes, répondant à une question préjudicielle, a estimé que réserver le bénéfice du CIR à des opérations de recherche uniquement réalisées en France était contraire au droit communautaire.
Enfin, plus particulièrement sur l’amendement n° II-828 rectifié, je me permets de rappeler que le crédit d’impôt recherche est un dispositif général qui bénéficie à toutes les entreprises. Il est important de souligner que 91 % des bénéficiaires du CIR sont des entreprises de moins de 250 salariés, des petites et des moyennes entreprises implantées partout sur le territoire.
Dans ces conditions, je vous demande, madame, monsieur les sénateurs, au nom de la stabilité, de bien vouloir retirer ces amendements. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Savoldelli, l’amendement n° II-793 est-il maintenu ?
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez évoqué une évaluation faisant état d’un euro investi pour un euro dépensé. Pourriez-vous la partager avec les membres de la commission des finances ? Nous pourrions ainsi développer un esprit critique constructif.
Cela étant dit, je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° II-793 est retiré.
Madame Primas, acceptez-vous de rectifier l’amendement n° II-828 rectifié, comme vous y invite M. le rapporteur général ?
Mme Sophie Primas. Bien entendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-828 rectifié bis, présenté par MM. Chatillon, M. Bourquin, Allizard, Kern, Rambaud et Wattebled, Mme Primas, MM. Corbisez, Danesi et D. Laurent, Mmes Keller et Létard, MM. Longeot, Pellevat, Perrin et Savin, Mmes Vullien et Artigalas et MM. J. Bigot, Marchand et Menonville, est ainsi libellé :
Après l’article 55 vicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le I de l’article 244 quater B du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice du crédit d’impôt mentionné au premier alinéa du présent I est conditionné à l’engagement de l’entreprise de maintenir son activité sur le territoire national pendant un délai de trois ans à compter du 1er janvier de l’année suivant celle où l’entreprise a exposé les dépenses de recherche pour lesquelles elle bénéficie de ce crédit. Si, dans ce délai, l’entreprise cesse volontairement son activité sur le territoire national, la réduction d’impôt pratiquée fait l’objet d’une reprise au titre de l’année au cours de laquelle cet événement est intervenu. »
II. – Le I est applicable aux dépenses engagées au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2019.
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 55 vicies.
L’amendement n° II-775 rectifié, présenté par Mme Lamure, MM. D. Laurent, Forissier et Vaspart, Mme Morhet-Richaud, MM. Lefèvre, Raison et Perrin, Mme Garriaud-Maylam, M. Gremillet, Mmes Bruguière, Estrosi Sassone, M. Mercier et Gruny, M. Huré, Mme Deromedi, MM. Reichardt, Danesi, B. Fournier, Grand, de Nicolaÿ, Mayet, Pointereau, Rapin, Charon et Dallier, Mmes L. Darcos et Deroche, M. Brisson, Mme Di Folco, M. Buffet, Mme Bories, MM. Bouchet, Bonhomme, Babary, Karoutchi et Kennel, Mme Primas et M. Pierre, est ainsi libellé :
Après l’article 55 vicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au premier alinéa du g du II de l’article 244 quater B du code général des impôts, les mots : « , pour la moitié de leur montant » sont supprimés.
II. – Le I est applicable aux dépenses engagées au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2019.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-François Rapin.
M. Jean-François Rapin. Dans son rapport d’information Où va la normalisation ? En quête d’une stratégie de compétitivité respectueuse de l’intérêt général, adopté en juillet 2017, la commission des affaires économiques a souligné l’importance de favoriser une « culture de la normalisation » dans les entreprises, notamment les PME, compte tenu du poids économique et de l’enjeu stratégique aujourd’hui considérables de la normalisation. Cet objectif passe notamment par des mesures incitatives, pour les entreprises, à participer aux travaux de normalisation à l’échelon tant national qu’européen ou international.
Dans ce contexte, la commission a regretté que les dépenses exposées par les entreprises au titre de leur participation aux travaux de normalisation ne bénéficient pas du même traitement que les autres dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche, le CIR. Cette difficulté avait déjà été relevée par Mme Claude Revel en 2012 dans son rapport au ministre du commerce extérieur, notre regrettée collègue Nicole Bricq, puis par la déléguée interministérielle aux normes en 2015 dans son rapport au ministre de l’économie, alors M. Emmanuel Macron.
Actuellement, aux termes de l’article 244 quater B du code général des impôts, seule la moitié des dépenses de normalisation exposées par les entreprises sont éligibles au CIR. Cet amendement tend donc à supprimer cette limitation injustifiée par rapport aux autres dépenses éligibles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement a déjà été présenté l’an dernier et le Gouvernement avait alors promis de réfléchir à l’inclusion des dépenses de normalisation dans le CIR. Depuis un an, le Gouvernement a-t-il réfléchi ?