M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de résolution européenne, je donne la parole à M. le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Je veux profiter de cette prise de parole pour remercier tous les intervenants de cette discussion. Il existe, dans la vie du Parlement, des moments privilégiés ; nous sommes certainement en train d’en vivre un, tant le nombre de mes collègues présents et l’unanimité qui ressort des propos qui ont été tenus montrent que ce que nous faisons est important.
Comme M. le secrétaire d’État a eu la gentillesse de le rappeler, j’ai eu l’honneur de participer, avec M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, à cette mission en Irak. Je veux simplement, mes chers collègues, vous faire partager mon éclairage ou, plus exactement, ce que j’ai compris à cette occasion, à savoir les trois désirs qu’ont manifestés l’ensemble des communautés irakiennes que nous avons rencontrées.
Tout d’abord, j’ai relevé un vrai désir de réconciliation. Je l’ai véritablement mesuré de la part de toutes les autorités, qu’il s’agisse du Président de la République ou du Premier ministre. Il est également présent parmi les Kurdes et la communauté chiite, à laquelle nous avons rendu visite au lieu saint de Nadjaf. J’ai entendu, pour la première fois, une volonté de se libérer du cauchemar qui a frappé ce pays. C’était assez touchant de constater cette volonté de travailler ensemble après de nombreuses années de confrontation.
Le deuxième désir est un désir de justice ; les orateurs qui se sont succédé l’ont rappelé. En effet, on ne peut pas se réconcilier quand on ne s’est pas mis au clair avec son histoire. Nous avons notamment rencontré – ce fut un moment absolument terrible, très émouvant – les associations qui viennent au secours des familles yézidies. Sachez qu’au moment même où je vous parle, des enfants – les femmes, bien sûr, sont toujours persécutées –, plus précisément des petites filles de dix ou onze ans, subissent des traitements aux hormones pour pouvoir être livrées à l’esclavagisme sexuel. Voilà la réalité pour des milliers de femmes et d’enfants !
Enfin, le troisième désir, qui n’est pas le moindre, est le désir de France. Nous avons entendu s’exprimer, de toute part, alors même que les Américains insinuent qu’ils vont se désengager, la volonté de voir la France plus présente au côté de l’Irak au moment où les grands défis de la reconstruction sont mis en œuvre.
Alors, mes chers collègues, en s’exprimant sur le présent texte, le Sénat devra remplir la haute mission qui est la sienne : défendre la vérité, défendre nos valeurs, et faire en sorte qu’une justice stricte, mais équitable, puisse être appliquée. Il convient de faire en sorte que nous portions très haut les valeurs qui font croire encore en l’humanité. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, la proposition de résolution européenne.
(La proposition de résolution européenne est adoptée.) (Applaudissements.)
M. le président. En application de l’article 73 quinquies, alinéa 7, du règlement, la résolution que le Sénat vient d’adopter sera transmise au Gouvernement et à l’Assemblée nationale.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
4
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.
Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun de vous à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu’il s’agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.
situation des hôpitaux et maternités
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Laurence Cohen. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, l’agence régionale de santé des Hauts-de-France vient de prendre acte de la fermeture de la maternité de Creil, dans l’Oise, et de son transfert à Senlis. Cette décision a été prise contre l’avis des élus locaux, notamment le maire de Creil, Jean-Claude Villemain, le maire de Montataire, ancien sénateur, mon ami et camarade Jean-Pierre Bosino. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Il ne faut pas être jaloux ! (Sourires.)
Elle intervient contre l’avis des usagers, des syndicalistes, des personnels de santé. Il y a un an, je manifestais déjà à leurs côtés contre cette menace de fermeture, à l’appel de leur très actif comité de défense. Loïc Pen, chef de service des urgences, a démissionné pour protester contre cette fermeture. Peu importe, vous passez en force et tant pis pour les 1 500 accouchements par an réalisés au sein de cette maternité de niveau 3 !
D’autres maternités sont touchées, comme celles de Bernay dans l’Eure, du Blanc dans l’Indre, ou encore de Guingamp dans les Côtes-d’Armor. Il s’agit là d’une véritable catastrophe sanitaire qui se fait au détriment de l’intérêt des femmes, qui plus est à l’heure de l’aggravation des déserts médicaux.
Madame la ministre, les hôpitaux publics, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou EHPAD, le secteur psychiatrique, qui manifeste aujourd’hui même, sont en grande souffrance.
Pour répondre aux mouvements des blouses blanches, vous opposez votre projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, qui comprend – faut-il le rappeler ? – vingt-trois articles, dont quatorze relèvent d’une ordonnance. Pensez-vous vraiment que, à moyens constants, ce texte peut améliorer l’accès aux soins, la qualité de la prise en charge sur tout le territoire et les conditions de travail des personnels ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Laurence Cohen, parmi vos nombreuses affirmations, beaucoup sont fausses,…
Mme Laurence Cohen. Ah ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. … mais il en est une que je ne peux laisser passer : celle selon laquelle tout cela se fait au détriment des femmes.
À l’heure actuelle, vous le savez, un certain nombre de maternités fonctionnent dans des situations de sécurité dégradées. Je l’ai affirmé et je le réaffirme devant vous tous, mesdames, messieurs les sénateurs : aujourd’hui, en France, aucune décision de fermeture de maternité ou de services de proximité n’est prise pour des raisons financières. (Murmures sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme Éliane Assassi. Vous allez les mettre en colère !
Mme Agnès Buzyn, ministre. La totalité de mes décisions est fondée sur des questions de sécurité, notamment liées à un défaut de remplissage des listes de garde dans un certain nombre de maternités. Ainsi, certaines fonctionnent parfois sans pédiatre, sans anesthésiste, avec des plateaux techniques qui ne sont plus en capacité d’assurer la sécurité des parturientes.
C’est pourquoi ces structures sont actuellement transformées en centres de périnatalité, qui, au contraire, améliorent la qualité du suivi des femmes, font de la prévention, de l’accompagnement à l’accouchement, de la sophrologie, assurent des suivis psychologiques, font de l’éducation thérapeutique, reçoivent les femmes après leur accouchement pour tisser le lien mère-enfant.
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas là que l’on accouche !
Mme Agnès Buzyn, ministre. Il y a donc non pas des fermetures de maternités, mais des transformations en centres de périnatalogie, et seul l’acte d’accouchement est transféré.
Le seul critère qui motive aujourd’hui les décisions prises par les agences régionales de santé est la sécurité sanitaire.
J’en viens à la maternité de Creil, qui vous tient à cœur, madame la sénatrice. Vous le savez, la décision a été prise par les équipes médicales dans le cadre de la restructuration des deux établissements concernés avant que je n’arrive au Gouvernement ; elle date de 2017. Le processus de restructuration de ces deux hôpitaux se poursuit avec l’aval des professionnels de santé. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.
Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, je m’inscris totalement en faux. Vous propos témoignent d’une méconnaissance de la population du bassin de Creil : 40 % de personnes ne possèdent pas de véhicule. Alors, c’est sûr, ce sera beaucoup plus secure d’accoucher dans une voiture ou dans un camion de pompiers ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain. – M. Loïc Hervé applaudit également.)
Il faut arrêter de faire des économies sur le dos des hôpitaux : 2 milliards d’euros d’économies depuis l’élection du Président de la République, c’est-à-dire depuis bientôt deux ans, cela suffit !
M. le président. Il faut conclure !
Mme Laurence Cohen. Les problèmes de santé sont vitaux pour les Françaises et les Français. Malheureusement, ce sujet ne figure pas au grand débat national. C’est un scandale ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
alstom
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Martial Bourquin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances.
Monsieur le ministre, nous avons appris que la Commission européenne pourrait remettre en cause l’accord de fusion conclu entre Siemens et Alstom. Deux choix s’offrent aujourd’hui à la France : soit les groupes acceptent de nouvelles cessions d’actifs, ce qui est synonyme de suppressions de production et d’emplois, peut-être même de sites industriels, soit ce sera un refus de la Commission européenne.
Nous partageons, comme vous, le dogmatisme de la Commission sur la question de la concurrence qui empêche l’émergence de champions européens.
Cependant, nous l’avons dit et répété, l’accord passé entre Siemens et Alstom était un mauvais accord, qui est plus une absorption d’Alstom par Siemens qu’une véritable fusion entre égaux.
Monsieur le ministre, nous vous demandons de refuser toute nouvelle cession d’actifs, qui serait synonyme de démantèlement d’Alstom. En cas de refus de l’Union européenne, vous devez mettre sur pied une stratégie nationale.
Alstom s’est désendettée, a gagné de nombreux marchés à travers le monde ; il va être urgent de mettre en place un pacte d’actionnaires en vue d’une véritable stratégie industrielle. Thales, entreprise pionnière dans la signalisation, pourrait par exemple participer à ce pacte d’actionnaires.
Il est aussi nécessaire que la Caisse des dépôts et consignations ou la Banque publique d’investissement soient associées à un tel pacte pour protéger Alstom contre d’éventuels prédateurs financiers.
Monsieur le ministre, avez-vous la volonté de défendre ce fleuron industriel ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur Martial Bourquin, j’ai parfois l’impression que la Commission européenne et les responsables européens ne vivent pas dans le même monde que le nôtre. (Marques d’approbation et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Sido. Oui !
M. Bruno Le Maire, ministre. Ils n’ont pas vu que, depuis quinze ans, un champion chinois de l’industrie ferroviaire avait émergé.
On dénombre 26 000 kilomètres de lignes à grande vitesse et très grande vitesse en Chine – c’est un marché captif pour les Chinois – contre 9 000 en Europe. CRRC construit 200 à 220 trains à grande vitesse ou à très grande vitesse chaque année ; Alstom et Siemens, à eux deux, en construisent 35.
M. Bruno Sido. Oh là là !
M. Bruno Le Maire, ministre. Le chiffre d’affaires de CRRC est le double de ceux d’Alstom et de Siemens réunis.
Je considère donc qu’il est temps que nous adaptions les règles de la concurrence européenne à la réalité de l’industrie mondiale du XXIe siècle… (Marques d’approbation et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. Christian Cambon. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. … et que nous arrêtions d’appliquer, en 2019, des règles de la concurrence européenne qui n’ont pas été modifiées depuis quinze ans, c’est-à-dire depuis 2004.
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. L’Europe doit changer pour mieux protéger et défendre notre industrie nationale et européenne. (Très bien ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Vous avez parfaitement raison, monsieur Bourquin, Alstom et Siemens ont fait des concessions, même d’ultimes concessions pour répondre aux demandes de la Commission européenne. Ces deux groupes ne feront pas de concessions supplémentaires qui pourraient les fragiliser. C’est maintenant à la Commission européenne de prendre ses responsabilités.
Quant à nous, soyez-en sûr, nous prendrons les nôtres. J’estime que, si jamais la Commission européenne devait rendre une décision négative sur la création d’un champion industriel européen, d’un géant du ferroviaire, pour résister à la concurrence chinoise et à la concurrence d’autres grandes nations du monde, elle commettrait une erreur économique et une faute politique. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
Un sénateur du groupe socialiste et républicain. Et donc ?
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour la réplique.
M. Martial Bourquin. Monsieur le ministre, Alstom, c’est 8 500 personnes en France sur douze sites, 4 500 fournisseurs, 27 000 emplois : cela vaut la peine de défendre ce fleuron industriel ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
zones de revitalisation rurale
M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
M. Alain Marc. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Puisqu’elle concerne les zones de revitalisation rurale, les ZRR, je souhaite y associer mon ami et collègue Jean-Claude Luche.
En Aveyron, les exonérations sociales et fiscales qui sont associées au classement en ZRR ont été de l’ordre de 6,5 millions d’euros pour l’année 2017. Ce dispositif présente donc un intérêt pour nos territoires ruraux. Après avoir mené des auditions – on ne doit pas auditionner les mêmes personnes ! –, deux collègues députés, Anne Blanc, de l’Aveyron, et Véronique Louwagie, de l’Orne, l’ont évalué. Elles ont déclaré, dans leurs conclusions, que le dispositif de zone de revitalisation rurale ne servait pas à grand-chose et préconisé de le mettre à la main des préfets, non pas pour que son objet initial soit maintenu, mais pour augmenter la DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux, en direction des maires.
Madame la ministre, quelles suites allez-vous donner à ce rapport ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Alain Marc, vous le savez parfaitement, les parlementaires sont libres de faire des rapports et d’y écrire ce qu’ils veulent…
Les zones de revitalisation rurale constituent, vous le savez également, un dispositif essentiel pour le soutien aux territoires ruraux. Le Gouvernement y est très attaché.
M. Roger Karoutchi. Oh !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Fondé sur le croisement de deux critères simultanés – la densité de population et la richesse des habitants –, ce dispositif contribue activement à la création d’emplois dans les territoires concernés.
Vous vous en souvenez, la réforme de 2015 a permis de maintenir le nombre global de communes classées à 14 000. Elle a fait des gagnants, ceux qui entrent dans le dispositif, et des perdants, ceux qui en sortent.
À l’écoute des critiques qui s’étaient élevées et des craintes exprimées par les communes sortantes après cette réforme de 2015, le Gouvernement a prévu, dans la loi de finances pour 2018, que ces communes puissent continuer à bénéficier des effets du classement en ZRR. Cette décision permet ainsi, et jusqu’en 2020, à près de 18 000 communes de bénéficier du dispositif de ZRR, soit près de la moitié des communes françaises. Cette décision est donc allée dans le sens d’un élargissement, monsieur le sénateur.
Dans la perspective de l’échéance de 2020, le Gouvernement conduit actuellement des travaux de réflexion. Des travaux parlementaires ont été menés par les députés Calmette et Vigier, Blanc et Louwagie.
À ce stade de la réflexion, il apparaît que le classement en ZRR sur des critères communaux et non à l’échelle des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, conduirait à un émiettement important du dispositif, qui ne ferait qu’exacerber les concurrences territoriales, soit un effet opposé à celui qui est recherché.
Toutes les options sont sur la table, monsieur le sénateur, et le Gouvernement les étudie avec la plus grande attention, afin d’assurer à ce dispositif le maximum d’efficacité au profit des territoires ruraux.
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Au moment où nous voulons faire un agenda rural, soyez assuré de notre action dans ce domaine.
M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour la réplique.
M. Alain Marc. Madame la ministre, pourquoi changer quelque chose qui ne marche pas mal du tout ? Ce matin, j’ai interrogé plusieurs établissements – établissements pour handicapés, maisons familiales rurales, EHPAD, etc. –, et tous sont très contents du système.
Par ailleurs, je puis vous assurer que, en Aveyron, par exemple, où certaines communes ont une densité de cinq à six habitants au kilomètre carré, nous avons été très contents de pouvoir faire venir des médecins. Certes, en l’espèce, une exonération fiscale pendant quelques années n’est pas le critère essentiel, mais c’est un critère supplémentaire qui nous permet de renforcer notre attractivité.
À notre tour, nous allons essayer de procéder à des évaluations sur le territoire. Reste que ce système fonctionne, et plutôt bien. Nous en sommes heureux et je souhaite qu’il perdure pour nos territoires ruraux. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
immigration
M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour le groupe Les Républicains.
M. François-Noël Buffet. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Le 15 janvier dernier, le Gouvernement a donné les statistiques de la politique migratoire pour l’année 2018. Tous les chiffres sont en hausse, sauf dans un domaine : le traitement de l’immigration irrégulière.
Pour 2018, l’immigration régulière concerne plus de 255 000 personnes, la demande d’asile est en augmentation de 22 % par rapport à 2017, le taux de renvoi dans les pays d’origine des gens en situation irrégulière est assez faible – moins de 10 %.
Le Gouvernement nous dit que tout va bien. Pour preuve, le budget 2019 ne prévoit pas d’augmentation particulière, singulièrement pour le traitement de l’asile, mais également pour le traitement de l’immigration irrégulière. Le Président de la République vient de déclarer qu’il souhaitait inscrire dans le débat national le thème de l’immigration, en particulier reprendre une idée du Sénat, celle des quotas annuels, que nous défendons depuis des années dans cet hémicycle.
M. Roger Karoutchi. Oui !
M. François-Noël Buffet. Comment le Gouvernement compte-t-il aborder l’année 2019, qui, en matière de politique migratoire, s’annonce bien différente de ce qu’il espérait ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sophie Joissains et M. Loïc Hervé applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur les statistiques annuelles en matière d’immigration qui ont en effet été publiées récemment par le ministère de l’intérieur. Comme vous l’avez dit, en 2018, nous constatons une hausse de 21,6 % des demandes enregistrées par l’OFPRA, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides. Cette augmentation est notamment due aux flux que l’on appelle secondaires.
Je tiens à souligner, pour répondre à votre question, que notre politique d’immigration et d’accueil est juste et réaliste. Nous nous donnons les moyens de l’accueil dans des délais raisonnables – c’est une volonté forte exprimée dans la loi Asile et immigration adoptée le 10 septembre 2018 –, mais nous procédons aussi à des mesures d’éloignement, comme le prévoit cette même loi. À ce titre, les éloignements forcés sont en hausse significative ; c’est d’ailleurs la progression en chiffres la plus élevée depuis le début de cette décennie.
Ces chiffres témoignent de l’efficacité de notre politique contre l’immigration irrégulière. Ils ne sont pas le fruit du hasard, mais résultent bien de la loi que je viens de rappeler, comme de nos dispositifs de contrôles aux frontières, qui ont été significativement renforcés à la frontière franco-italienne ou à la frontière franco-espagnole. Je m’y suis rendu moi-même, et le Gouvernement a nommé un coordonnateur chargé de renforcer ces contrôles, qui sont maintenant effectifs.
Quant au budget pour l’année 2019, il donne au Gouvernement les moyens de conduire une politique équilibrée. Je la rappelle : garantir le droit d’asile, mais aussi procéder à des mesures d’éloignement. Le budget de la mission « Immigration, asile et intégration » est en augmentation de près de 7 % cette année.
Il nous faut cependant reconnaître et écouter l’inquiétude de nos concitoyens, qui s’est manifestée avec une virulence particulière à propos du pacte de Marrakech. C’est la raison pour laquelle, monsieur le sénateur, le Gouvernement a décidé d’ajouter les problématiques de l’immigration au grand débat qui va se tenir au cours des semaines à venir, ces échanges ayant notamment leur place dans le cadre de la thématique sur le débat démocratique et la citoyenneté. (MM. François Patriat, Jacques Mézard et Jean-Marc Gabouty applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour la réplique.
M. François-Noël Buffet. Monsieur le secrétaire d’État, je ne partage pas votre optimisme. Depuis de nombreuses années, dans cette maison, nous défendons une autre politique migratoire : premièrement, accueillir moins, mais accueillir mieux, beaucoup mieux que ce qui se fait jusqu’à maintenant ; deuxièmement, traiter l’asile dans de bons délais, mais traiter surtout les déboutés du droit d’asile.
Aujourd’hui, deux événements se font jour : d’une part, l’augmentation de la demande d’asile sera réelle en 2019, elle sera même peut-être plus importante que l’année précédente ; d’autre part, le traitement effectif de l’immigration irrégulière. En réalité, beaucoup plus d’obligations de quitter le territoire national ont été prononcées, mais le niveau d’exécution reste faible, quoi que vous en disiez.
Le Sénat a proposé des solutions. Je souhaite que le Président de la République et l’exécutif prennent en compte ces propositions, non seulement la notion de quotas et le débat annuel,…
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. François-Noël Buffet. … mais également la question des visas délivrés en contrepartie de laissez-passer consulaires accordés par les pays sources. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
interdiction du glyphosate
M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. Pierre Médevielle. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Monsieur le ministre, mardi 15 janvier dernier, le tribunal administratif de Lyon a annulé l’autorisation de mise sur le marché du Roundup Pro 360. La juridiction appuie sa décision sur le fait que l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, aurait commis une erreur d’appréciation au regard du principe de précaution en autorisant la commercialisation de ce produit au mois de mars 2017.
La communauté scientifique dans sa majorité, le monde agricole et les industriels ne comprennent absolument pas ce type de décision totalement arbitraire.
À la demande de l’OPECST, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, mon collègue Pierre Ouzoulias et moi-même remettrons prochainement un rapport analysant les dysfonctionnements possibles et la crise de confiance naissante vis-à-vis de nos agences d’expertise. Notre travail mettra en valeur le souci d’harmonisation et de cohérence dans nos politiques d’évaluation.
Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, que ce type de décision discrédite totalement le travail remarquable de l’ANSES, dont l’indépendance et les compétences ne sont plus à démontrer ?
En quoi les tribunaux administratifs sont-ils compétents pour traiter ce genre de dossiers ? Ne craignez-vous pas une surenchère dans la suppression des autorisations de mise sur le marché, au nom du principe de précaution ?